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75. Tels sont les instruments de l'art spirituel.
76. Si nous les exerçons sans cesse, jour et nuit, et les remettons au jour du jugement, nous recevrons du Seigneur cette récompense qu'il a promise :
77. « Ce qu'aucun œil n'a vu, aucune oreille entendu, ce que Dieu a préparé pour ceux qui l'aiment. »
78. Quant à l'atelier où nous accomplirons assidûment tout cela, c'est la clôture du monastère et la stabilité dans la communauté.
En général, nous les hommes, nous aimons les outils et la technique ... Pour réparer une serrure ou une fuite d'eau, nous savons nous dépenser afin de trouver une solution. La difficulté nous stimule même parfois à inventer des résolutions inattendues. Dans l'atelier de l'art spirituel, ne pourrait-il pas en être de même? Face à une difficulté relationnelle, face aux passions qui peuvent parfois nous éprouver, ne pouvons-nous pas aussi faire preuve de grandes imaginations pour qu'une issue s'ouvre? Comment s'engager avec ardeur dans la résolution des conflits avec des frères? Comment donner plus d'attention à la résolution de nos conflits intérieurs? En même temps, nous mesurons qu'il est plus facile de reboucher un trou dans un tuyau que de pardonner à un frère, ou de guérir de la colère ou de l'envie. La conversion de notre cœur relève d'un art qui demande bien plus de patience que n'importe quel autre art ... Elle exige un engagement de tous les instants: « si nous les exerçons sans cesse, jour et nuit» dit Benoit. Peut-être est-ce dans ce « sans cesse, jour et nuit» que réside notre vraie stabilité, non pas d'abord dans un lieu, fût-il cloîtré, mais dans ce travail de vigilance intérieure, repris jour après jour. Etre moine, c'est ne pas se fatiguer de veiller: veiller pour le Seigneur dans la prière, veiller sur les frères qui nous sont confiés, veiller sur nous-mêmes et nos propres faiblesses toujours enclines à nous faire dévier ou tomber. Telle est notre stabilité dans la veille. Au chapitre, le P. David a évoqué la stabilité en ces termes: « On parlait autrefois de fuga mundi (fuite du monde) pour caractériser la vie monastique, mais le schéma s'est inversé: c'est le monde lui-même qui se fuit dans la distraction, qui se fuit en permanence, qui a institué la fuite en avant; dès que l'obstacle se présente, on change, on tourne la page, on bifurque, affectivement, professionnellement; le déménagement tient lieu de conversion. Tandis que la stabilité impose au moine l'enracinement avec lui-même, la confrontation à ses propres limites et à celles de ses frères ... ». Dans l'atelier du monastère, choisissant la stabilité de ce labeur spirituel et relationnelle sans cesse repris, nous choisissons de ne pas fuir. Nous affrontons avec réalisme les difficultés en nous-mêmes et avec les autres, sans esquive, mais aussi dans cette profonde assurance que Dieu est avec nous. Sa miséricorde nous est toujours offerte, sans aucune mesure avec les efforts que nous pouvons faire. (28.09.2016)
75. Tels sont les instruments de l'art spirituel.
76. Si nous les exerçons sans cesse, jour et nuit, et les remettons au jour du jugement, nous recevrons du Seigneur cette récompense qu'il a promise :
77. « Ce qu'aucun œil n'a vu, aucune oreille entendu, ce que Dieu a préparé pour ceux qui l'aiment. »
78. Quant à l'atelier où nous accomplirons assidûment tout cela, c'est la clôture du monastère et la stabilité dans la communauté.
En général, nous les hommes, nous aimons les outils et la technique ... Pour réparer une serrure ou une fuite d'eau, nous savons nous dépenser afin de trouver une solution. La difficulté nous stimule même parfois à inventer des résolutions inattendues. Dans l'atelier de l'art spirituel, ne pourrait-il pas en être de même? Face à une difficulté relationnelle, face aux passions qui peuvent parfois nous éprouver, ne pouvons-nous pas aussi faire preuve de grandes imaginations pour qu'une issue s'ouvre? Comment s'engager avec ardeur dans la résolution des conflits avec des frères? Comment donner plus d'attention à la résolution de nos conflits intérieurs? En même temps, nous mesurons qu'il est plus facile de reboucher un trou dans un tuyau que de pardonner à un frère, ou de guérir de la colère ou de l'envie. La conversion de notre cœur relève d'un art qui demande bien plus de patience que n'importe quel autre art ... Elle exige un engagement de tous les instants: « si nous les exerçons sans cesse, jour et nuit» dit Benoit. Peut-être est-ce dans ce « sans cesse, jour et nuit» que réside notre vraie stabilité, non pas d'abord dans un lieu, fût-il cloîtré, mais dans ce travail de vigilance intérieure, repris jour après jour. Etre moine, c'est ne pas se fatiguer de veiller: veiller pour le Seigneur dans la prière, veiller sur les frères qui nous sont confiés, veiller sur nous-mêmes et nos propres faiblesses toujours enclines à nous faire dévier ou tomber. Telle est notre stabilité dans la veille. Au chapitre, le P. David a évoqué la stabilité en ces termes: « On parlait autrefois de fuga mundi (fuite du monde) pour caractériser la vie monastique, mais le schéma s'est inversé: c'est le monde lui-même qui se fuit dans la distraction, qui se fuit en permanence, qui a institué la fuite en avant; dès que l'obstacle se présente, on change, on tourne la page, on bifurque, affectivement, professionnellement; le déménagement tient lieu de conversion. Tandis que la stabilité impose au moine l'enracinement avec lui-même, la confrontation à ses propres limites et à celles de ses frères ... ». Dans l'atelier du monastère, choisissant la stabilité de ce labeur spirituel et relationnelle sans cesse repris, nous choisissons de ne pas fuir. Nous affrontons avec réalisme les difficultés en nous-mêmes et avec les autres, sans esquive, mais aussi dans cette profonde assurance que Dieu est avec nous. Sa miséricorde nous est toujours offerte, sans aucune mesure avec les efforts que nous pouvons faire. (28.09.2016)
68. ne pas aimer la contestation,
69. fuir l'élèvement.
« Détester la contestation ». Paul place la contestation, avec la jalousie et l'envie, au rang des convoitises de la chair. Il s'agit de cette forme de contestation qui dégénère en querelle, discorde, esprit de rivalité. C'est peut-être inconscient au début: on se contente de dire ce qu'on pense, sans prendre garde au fait qu'on prend le contre-pied d'un autre. Qu'on s'attache d'autant plus à son idée qu'elle n'est celle d'autrui. Chacun a un domaine où il se sent plus libre de contredire: au nom de l'expérience, du bon sens, et même de la vertu. Rien à voir avec le fait, tout naturel, de donner son avis. Ici, c'est à la décision, ou à l'autorité, que l'on se heurte. Il entre dans cet affrontement une bonne part de refus de toute subordination. De jalousie plus ou moins instinctive de l'autre. Nous comprenons pourquoi Benoit a enchainé la trilogie: jalousie, envie, rivalité. Si nous n'y prenons pas garde, tout devient objet de litige. « Ils en arrivèrent à se quereller sur celui d'entre eux qui leur semblait le plus grand» ! Lc22/24. Abba Pœmen a dit: « Fuis toujours celui qui, dans la conversation, n'arrête pas de contester ».
« Fuir l'élèvement ». On peut traduire aussi: « Fuir l'arrogance ».
Elatio : c'est la tendance à fanfaronner, à se pavaner, à s'élever. C'est une tentation qui est toujours présente en nous, plus ou moins sournoise. Nous pensons au Magnificat: « Il renverse les puissants de leur trône; il élève les humbles. » Cet instrument est important pour St Benoit, puisqu'il l'ajoute à la panoplie héritée du Maître. Et il reviendra sur ce danger plusieurs fois: à propos du lecteur de semaine, qui devra demander la prière de la communauté, « afin que Dieu daigne le préserver de l'esprit de vanité ». RB38/2. De même, le prêtre admis au monastère devra se garder de l'élèvement. Risque, aussi, pour le prieur! Qualité nécessaire au cellérier. Benoit dénonce même, dans le Prologue, le danger de s'enorgueillir de sa bonne observance, au lieu de reconnaître que le bien qui se trouve en nous vient de Dieu. C'est aussi ce que Jésus reproche aux pharisiens. « Un frère demande à Abbé Pœmen : Comment dois-je me conduire, dans le lieu où j'habite? Où que tu sois, répond l'ancien, ne cherche pas à imposer ton point de vue, et tu vivras en paix ». Paix, et humilité, nous ne nous étonnons pas de ce jumelage. Il est dans l'Evangile. (24/9/16)
63. Accomplir chaque jour par ses actes les commandements de Dieu,
64. aimer la chasteté,
65. ne haïr personne,
66. ne pas avoir de jalousie,
67. ne pas agir par envie,
« Accomplir, chaque jour, par ses actes, les préceptes de Dieu ». L'expression est forte. Elle vient du Christ lui-même, qui est venu accomplir la Loi et les Prophètes, c'est-à-dire leur donner leur plénitude de sens. Les faire passer de la lettre au fait. Chacun de nous, à la suite du Christ, est responsable de cet accomplissement. Contribuer à la plénitude de l'Incarnation.
« Aimer la chasteté ». Il faut apprécier cette expression lapidaire de St Benoit. Il situe la chasteté au niveau du commandement de l'Amour. Il ne saurait en être autrement. « Donnez-moi quelqu'un qui aime, il comprendra », disait St Augustin. Aimer la chasteté, cela veut dire qu'on en a jamais fini, qu'on n'est jamais quitte avec la chasteté. Elle est un programme de vie, ouvert sur l'infini. Peut-être que pour être chaste, il ne faut pas être trop attaché à sa pureté. Peut-être que Marie Madeleine l'était beaucoup plus que nous. Elle qui savait aimer au creux de ce qui était débauche. Nous aimons cette Sara l'Egyptienne, tentée pendant 13 ans par le démon de l'impureté, et qui disait seulement dans sa prière: « Seigneur, donne moi la force! »
« Ne haïr personne.» Haïr, détester, rejeter totalement: des sentiments qui existent dans notre cœur. L'homme est divisé. Sa vocation est d'aimer, il peut vouloir détruire ce qu'il faudrait apprendre à aimer quand même. Jésus met la barre très haut: « Aimez vos ennemis, priez pour ceux qui vous persécutent ». Lui n'a pas connu la haine. Méprisé, haï, il n'a su que pardonner. Ne haïr personne, c'est retrouver le chemin de notre unité intérieure: que rien ne se perde de nos aptitudes à aimer. Tout ce qui, en nous, doit servir à aimer. La haine détruit celui qui l'éprouve.
« Ne pas être jaloux ». En latin, c'est le mot « zèle ». C'est l'ardeur que nous mettons à défendre un bien dont nous sommes jaloux. Benoit parlera au ch 72 du bon zèle: le zèle pour Dieu, le zèle de Dieu. Il l'oppose au zèle amer. La jalousie est un poison pour l'âme, pour la relation, pour la vie commune. « Ne pas agir avec envie ». Jalousie et envie peuvent être confondues. Mais l'étymologie permet de comprendre des réalités différentes, que nous éprouvons tous, plus ou moins. La jalousie tient de l'ardeur à défendre, à garder. L'envie relève du regard: voir de travers, voir contre. L'envie est donc une maladie du regard. La jalousie une maladie de la relation. L'envie porte sur les choses ou les qualités que possède mon frère, et que je n'ai pas. Esaü porte un regard mauvais sur son frère parce qu'il envie sa bénédiction. Toute son enfance, il s'est senti moins aimé. Nous sommes faits pour apprendre à aimer. Nous réjouir du bien qui est dans nos frères. (23/9/16)
60. haïr sa volonté propre,
61. obéir en tout aux commandements de l'abbé, même s'il agit lui-même autrement – ce qu'à Dieu ne plaise – en se souvenant du commandement du Seigneur : « Ce qu'ils disent, faites-le ; quant à ce qu'ils font, ne le faites pas. »
62. Ne pas vouloir être appelé saint avant de l'être, mais l'être d'abord, afin d'être appelé ainsi avec plus de vérité.
« Haïr sa volonté propre ». Le latin dit:« Voluntatem propriam odire ».Sans possessif. Peut-être parce que toute volonté propre est haïssable. Obstacle au dialogue. Et la nôtre ne vaut pas mieux que celle des autres, quand elle cherche à s'imposer. Cela montre aussi que la volonté est au service de la relation, du dialogue, du partage. Il faut haïr la volonté propre parce qu'elle refuse les règles de l'amour, et joue le jeu de l'égoïsme et de la haine. C'est dans cette mesure que Montaigne avait raison d'affirmer: « Le moi est haïssable ».
Dans l'Evangile, il n'est pas question de volonté propre. Quand Jésus parle de volonté, il se réfère à celle de son Père: « Non pas ma volonté, mais la tienne. » Il est important que Jésus soit perçu ici comme ayant une volonté personnelle. C'est ce qui fait de Lui une personne humaine. Mais cette volonté trouve sa joie à se lier d'amour avec celle de son Père, au point de ne plus faire qu'un avec elle. C'est même ainsi qu'elle s'accomplit. La prière que Jésus nous apprend rejoint ce mouvement: « Que ta volonté soit faite ». La seule volonté propre que nous devons aimer, et même adorer, t'est celle de Dieu. Précisément parce qu'elle est partage, et échange de consentement.
« Obéir en tout aux ordres de l'Abbé ». Le mot employé par Benoit est praecepta. Ce mot nous renvoie au Prologue: « Ecoute mon fils, les préceptes du Maître ». Cela laisse entendre que les préceptes de l'Abbé sont ceux du Christ. La voix qui appelle est celle du Seigneur: l'Abbé n'est que son porte voix. Cela veut dire aussi que le moine est considéré comme un adulte, qui sait pourquoi et pour qui il obéit. Il ne prendra pas prétexte des mauvais comportements des autres pour se dérober.
« Ne pas vouloir passer pour saint avant de l'être. » La sainteté, c'est la qualité de Dieu. Nous devons nous méfier de nos critères en ce domaine. Ste Thérèse de Lisieux a échappé complètement à la grille de lecture classique des vertus héroïques! Et nous, attendrons-nous d'être saints pour nous déclarer tels? Nous pouvons penser que le jour où cela nous arrivera enfin, et nous pouvons espérer que cela nous arrivera à tous, ce jour-là, être appelé saint ou pas nous sera bien égal. Nous serons tournés tout entier vers Dieu, vers sa Sainteté. Pas vers nous-mêmes. (22/9/16)
55. Écouter volontiers les saintes lectures,
56. se prosterner fréquemment pour prier,
57. confesser chaque jour à Dieu dans la prière, avec larmes et gémissements, ses fautes passées,
58. se corriger de ces fautes à l'avenir.
« Ecouter volontiers les saintes lectures. » Nous pouvons noter d'abord que l'insistance est mise sur l'écoute. Lire c'est écouter. Ecouter la parole d'un autre. Ecouter Dieu qui me parle. La Règle parle très souvent de lecture. Le mot lectio est employé 40 fois! Le plus souvent dans le cadre de l'Office Divin, ou du réfectoire. Au temps de St Benoit, l'oreille était plus sollicitée qu'aujourd'hui: la lecture, même personnelle, se faisait à plus ou moins haute voix. Cela aidait la mémorisation. L'oreille intérieure paresse plus souvent, quand l'oreille externe n'est pas sollicitée. Une lecture proclamée peut éveiller en nous des harmoniques, des consonances, qui seraient passées inaperçues aux yeux.
Pour St Benoit, la lecture est un travail. Il parle de la lectio personnelle au chapitre sur le travail manuel quotidien. (RB48) Les frères doivent consacrer certaines heures au travail des mains. D'autres à la lecture des choses divines.
« Se prosterner fréquemment pour prier ». L'Evangile nous invite à prier sans cesse. Mais nous comprenons bien que cette prosternation ne puisse se faire tout le temps. Cette précision dans l'attitude a un double avantage: Elle dit l'absolue gratuité de la prière, cette relation à Dieu. Elle précise qu'il s'agit ici de la prière personnelle, alors que le même mot, oratio, est utilisé aussi pour la prière communautaire. Benoit nous renvoie à l'Evangile: Jésus nous y est montré souvent en prière solitaire, la nuit, à l'écart, et même prosterné, comme à Gethsémani. Cette attitude exprime une soumission, que nous réservons à Dieu seul. Péguy parlait du « bel agenouillement de l'homme libre ».
« Avouer chaque jour à Dieu dans la prière, avec larmes, ses fautes passées. Se corriger de ces fautes. » Ces deux instruments nous paraissent un peu éloignés de ce que nous vivons aujourd'hui. Peut-être à cause de l'imperfection de notre contrition, ou de notre peu d'amour. Mais plus positivement notre pratique du Sacrement de Réconciliation nous aide à vivre la confiance absolue dans le Pardon. Les fautes d'hier, avouées, ne m'appartiennent plus. Nous avons appris à ne pas y revenir. A fuir le remord comme un poison, un manque de Foi. « Si nous confessons nos péchés, fidèle et juste comme il est, il nous pardonne», dit la 1° Lettre de St jean. (lJn l/9) (20/9/16)
51. Garder sa bouche des paroles mauvaises et déshonnêtes,
52. ne pas aimer à beaucoup parler ;
53. ne pas dire des paroles vaines ou qui portent à rire,
54. ne pas aimer le rire prolongé ou aux éclats.
« Garder sa bouche de toute parole mauvaise. » Cet outil est précieux dans la vie monastique. Mais pas toujours facile à manier. Abba Isaïe disait: « Aime te taire, plutôt que parler. Car le silence thésaurise, mais parler disperse. » Nous avons tous fait l'expérience de cette dispersion. Et aussi de l'aspect superficiel du flux de paroles. Il est difficile de parler longuement de cet instrument ! Surtout quand on est soi-même bavard. Le plus simple est de revenir à l'Ecriture. « Mets une garde à mes lèvres ». Comme nous, le Psalmiste se sait fragile. Garder sa langue du mal, c'est l'une des qualités du juste, dans la Bible. Et Jésus nous dit .« Ne rabâchez pas! » La prière intérieure n'a pas besoin de beaucoup de paroles. Parole et prière sont en dépendance: Il faut que l'une diminue, pour que l'autre grandisse.
« Ne pas dire des paroles vaines, ou qui portent à rire ». Dans cet outil, Benoit nuance le Maître, qui excluait tout à fait ce genre de plaisanteries. Il en reparlera au chapitre sur le silence. Mais sera-t-il suivi? Il est rassurant qu'il demande comme effort de Carême, de retrancher sur ce domaine de la plaisanterie. Nous le savons bien, il y a des plaisanteries qui nous aident à vivre ensemble. Qui dédramatisent. Les plaisanteries mauvaises sont les moqueries, celles qui tournent en ridicule une personne. Toutes les critiques des autres.
« Ne pas aimer le rire prolongé, ou aux éclats ». Un apophtegme raconte: « Quelqu'un vit rire un jeune moine. Il lui dit: Ne ris pas, frère, car tu chasses ainsi la crainte de Dieu. » Nous cherchons le recueillement, la prière continuelle. Mais c'est un apprentissage qui demande du temps et de la patience! C'est au 10ème degré d'humilité seulement que Benoit revient sur la question du rire. Il cite: « Le sot, en riant, élève la voix. »
Parmi les auteurs bibliques, l'ennemi le plus résolu du rire, c'est Qohelet:« L'habillement d'un homme, son rire, sa démarche, révèlent ce qu'il est ». Pourtant la Bible n'ignore pas le rire libérateur: au retour des exilés à Jérusalem, « notre bouche était pleine de rire» dit le Ps 125. Le mot de la fin est à St Jean Climaque, au 7°degré de son échelle: « Dieu, mes amis, ne demande ni ne désire que l'homme s'afflige à cause de la douleur de son cœur. Il préfère plutôt qu'il se réjouisse et qu'il rie, à cause de l'amour qu'il éprouve pour Lui. » (17/9/16)
46. désirer la vie éternelle de toute sa convoitise spirituelle,
47. avoir chaque jour la mort présente devant ses yeux.
48. Surveiller à toute heure les actions de sa vie,
49. en tout lieu tenir pour certain que Dieu nous regarde.
50. Quand des pensées mauvaises se présentent au cœur, les briser aussitôt contre le Christ et les découvrir à l'ancien spirituel.
« Désirer d'un grand désir la vie éternelle « La vie éternelle, c'est qu'ils te connaissent, Toi, Père, le seul vrai Dieu, et Celui que tu as envoyé, Jésus Christ ». Désirer la vie éternelle, c'est donc désirer ce don de Dieu, éprouver cette soif, que Dieu seul peut étancher. Cette vie éternelle sera essentiellement relation, avec Dieu, et entre nous. « Désir spirituel» : on retrouve cette expression au chapitre sur le Carême (49) : « Il attendra la Sainte Pâque avec l'allégresse du désir spirituel ». Attendre la Sainte Pâque, tendre vers la vie éternelle, c'est tout un. Mais nous devons reconnaitre aussi tout le chemin que nous avons à faire, pour passer des désirs charnels immédiats, au désir de Dieu. « A qui donc irions-nous? Tu as les paroles de la vie éternelle! » Jn 6/68.
Le P. Christian de Chergé appelle les instruments 47 à 56 « les dix commandements du recueillement monastique» : Penser à la mort, se savoir regardé par Dieu. Briser contre le Christ les pensées mauvaises. Ne pas trop parler, ni trop rire. Aimer la Parole de Dieu. Prier souvent...
« Briser contre le Christ les pensées mauvaises qui surviennent au cœur , et les dévoiler à l'ancien spirituel ». Cet instrument commence par une exégèse allégorique du verset du Ps 136. A Bose, c'est le seul verset du Psautier qui n'est pas chanté dans la liturgie. St Benoit nous aide au contraire à le prier. Le Roc, c'est le Christ. Et il s'agit ici de ces rejetons du diable que sont les pensées mauvaises. Il y a celles qui nous arrivent à l'improviste, et il ya celles que nous cultivons. Ces mauvaises pensées sont un poison, pour celui qui est appelé à suivre et aimer Dieu et ses frères. Pour tous les enfants de Dieu. Elles attaquent le cœur et la mémoire. Elles sont l'opposé de la consigne donnée aux moines: « Donne à ton cœur le souvenir de Dieu. » Cette idée de les briser contre le Christ se rattache à l'Evangile: il reconnait à Jésus la connaissance des pensées secrètes du cœur, de tout ce non dit qui défigure nos relations. Benoit ajoute une note supplémentaire, conforme à la tradition monastique: l'ouverture du cœur au père spirituel. Le ch 46 indique qui sont ces spiritales seniores : « ceux qui savent guérir leurs propres plaies et celles des autres. Sans les découvrir, ni les publier. » Donc dans la discrétion.(16/09/2016)
41. Confier son espoir à Dieu.
42. Quand on voit quelque bien en soi, l'attribuer à Dieu, non à soi-même ;
43. quant au mal, savoir qu'on en est toujours l'auteur et se l'imputer.
« Mettre en Dieu son espérance ». Il s'agit de savoir si c'est Dieu que nous cherchons et que nous espérons. Où bien, est-ce que ce sont nos désirs qui prennent la place de Dieu dans notre vie? Mettre en Dieu son espérance, c'est l'attitude de la pauvreté spirituelle. C'est croire que l'avenir appartient à Dieu, même s'il ne correspond pas à mes attentes humaines. Dieu n'est pas lié par elles. Ce qu'II attend de moi, ce qu'II veut pour moi, est plus grand que tout ce que je peux imaginer. Son alliance est un dessein d'amour, qui demande à être reconnu et respecté comme tel, avec l'assurance qu'II ne nous fait pas défaut. Même à l'heure de la Croix. « Non pas ce que je veux, mais ce que tu veux ».
« Quand on voit quelque bien en soi, le rapporter à Dieu, non à soi-même ». Dans ce chapitre des « bonne œuvres », nous voici invités à rendre à Dieu ce qui lui est dû. C'est-à-dire toute œuvre bonne dans nos vies. Cela implique une lucidité particulière. Nous avons le droit, nous avons même le devoir, de voir du bien en nous-mêmes. Mais à condition d'y voir la part de Dieu, de la mettre au compte de Dieu, qui nous a créés à son image, qui nous a créés bons. Et avoir aussi ce reflexe vis-à-vis de l'autre, de tout autre: c'est un bon remède contre la jalousie.
« Se reconnaitre toujours l'auteur du mal que l'on fait ». Cet instrument est la réplique au précédent. Benoit situe résolument le BIEN du côté de Dieu, et le MAL du côté de l'homme. Comment régler dans la Foi le problème de la cœxistence du Bien et du Mal? La tradition chrétienne a hésité. Pourtant la Sagesse, les Prophètes et les Psaumes ont choisi: Le mal ne peut pas venir de Dieu. « Tes yeux sont trop purs pour voir le mal », dit Habacuc. Et le PS5 : «Tu n'es pas un Dieu ami du mal ». Nous pouvons laisser retentir à ce niveau de vérité la question de Pilate au sujet de jésus: « Qu'a-t-il donc fait de mal? » Mais notre propre cœur est compliqué. Nous savons, comme Paul, qu'il y a deux lois en nous: Le bien que je voudrais faire, le mal que je voudrais éviter. N'oublions pas que ce mal, en nous, a déjà été vaincu. Se l'imputer, ce n'est pas s'identifier avec lui. Le confesser, c'est croire en la miséricorde de notre Père. (14/9/16)
39. ni murmurateur,
40. ni médisant.
« Ne pas murmurer ». Tout au long de la Règle Benoit combat énergiquement ce ver sournois de la vie communautaire. Au ch 5, « De l'obéissance », il nous a dit qu'elle sera agréable à Dieu et aux hommes « si l'ordre est exécuté sans trouble, sans retard, sans tiédeur, sans murmure ... Si au contraire le disciple obéit, mais de mauvais gré, s'il murmure, non seulement de bouche, mais encore dans son cœur, même s'il s'exécute, son acte ne sera pas agréé par Dieu qui voit dans sa conscience le murmure. Bien loin d'être récompensé, il encourt la peine des murmurateurs ». C'est pourquoi Benoit demande à l'Abbé de « modérer toutes choses et de les disposer de telle sorte que les âmes se sauvent, et que les frères accomplissent leur tâche sans motif légitime de murmurer. » (RB 41) Benoit sait quels dégâts le murmure peut causer dans le cœur du moine: il paralyse toutes ses énergies, il aveugle son regard. On a pu comparer cette révolte à la pointe d'aiguille qui suffit à crever une outre. Le murmure atteint notre âme, et la dégonfle du souffle de l'Esprit.
L'envers du murmure, ce sera le réflexe de rebondir dans la louange de Dieu, quoiqu'il arrive.
Il faut distinguer le murmure spontané, qui n'est qu'un gémissement de contrariété, comme le fils de la parabole, qui grogne et dit non, avant d'exécuter ce qui lui a été demandé. Le murmure pernicieux est celui qui persiste alors même qu'on obéit. Il envahit le silence, il nous fige dans notre révolte. On critique, on va de proche en proche semer l'acide de nos mauvaises pensées.
La Bible est là, pour fixer dans notre mémoire ces murmures qui ont paralysé le peuple pendant l'Exode: murmures au désert, pas d'eau, pas de pain, toujours la même manne, où est passé ce Moïse! Et le murmure autour de Jésus! Qu'est ce que c'est que ce Pain vivant dont Il parle? Et cette chair à manger! Murmures des ouvriers de la première heure, jaloux des derniers arrivés, qui reçoivent le même salaire qu'eux.
Saint Benoit condamne sévèrement le murmure, mais il faut noter en même temps son soin à éviter les situations concrètes où naissent contestations et murmures. On donnera à chacun le nécessaire, pour qu'il soit en paix. (RB34) On donnera de l'aide à la cuisine. (RB35) On donnera un coup à boire et du pain avant le repas, à ceux qui sont de service.
Soyons attentifs à débusquer le murmure, dans notre cœur, dans nos paroles. Il y a ceux dont il est si facile de se moquer, la critique gratuite et répétée, qui ne change rien. Cultivons l'esprit d'action de grâce. (13/9/16)