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55. Le huitième degré d'humilité est que le moine ne fasse rien qui ne se recommande de la règle commune du monastère et des exemples des supérieurs.
Ce 8ème degré peut faire illusion par sa simplicité, et son apparente
facilité. Quoi de plus facile que de faire comme tout le monde!
Mais nous sommes souvent avides d'originalité et de changement:
beaucoup veulent éviter de faire comme tout le monde, pour affirmer
la singularité de leur personnalité. Est-ce que St Benoit serait opposé à
l'éclosion de la personnalité de chacun? La vie monastique serait-elle
un moule étriqué dans lequel on veut nous contraindre à nous couler?
Au risque de perdre notre personnalité?
St Benoit ne nous demande pas de disparaitre, de nous fondre dans le
groupe. Ce qu'il attend du moine, c'est qu'il prenne conscience de ce
qui le fonde en vérité. Sans s'appuyer sur de fausses fondations.
La Règle se situe dans la perspective de l'Evangile. Dans cette vision la
conversion est toujours une double découverte. D'abord, je ne suis pas
celui que je prétends être, et l'affirmation d'une personnalité originale
n'est souvent qu'une comédie. Et puis, je suis plus grand que je ne le
crois: « Je est un autre )}, disait Maurice Zundel, en citant Rimbaud. Cet
autre, c'est le Christ qui vit en moi.
Ce 8ème degré d'humilité est celui d'une découverte; d'une expérience
intérieure bouleversante. Le problème n'est plus de jouer un
personnage, de se donner des airs, d'entretenir une image. Mais
d'entrer en communion avec Celui qui nous habite, au plus intime de
nous-mêmes. Et comment découvrir cette relation, sinon en suivant la
voie ouverte par l'exemple des anciens, comme le dit St Benoit. Ce n'est
ni une contrainte extérieure, ni un effort que nous nous imposons à
nous-mêmes. C'est l'ouverture au plus profond de nous-mêmes d'un
autre espace de liberté. Ce 8ème degré nous indique le chemin d'une
autre fécondité, d'une autre originalité. Celle voulue par Dieu. Et c'est
l'Esprit de Dieu qui nous conduit sur ce chemin. (11/11/16 )
51. Le septième degré d'humilité est que, non content de déclarer avec sa langue qu'on est le dernier et le plus vil de tous, on le croie en outre dans l'intime sentiment de son cœur,
52. en s'humiliant et en disant avec le prophète : « Pour moi, je suis un ver et non un homme, l'opprobre des hommes et le rebut du peuple.
53. J'ai été exalté, humilié et confondu. »
54. Et aussi : « Il m'est bon que tu m'aies humilié, pour que j'apprenne tes commandements. »
« Il m'est bon que tu m'aies humilié, pour que j'apprenne tes
commandements! » Ce 7° degré d'humilité peut se résumer par cette
citation du Psaume 118. La version liturgique dit: « C'est pour mon bien
que j'ai souffert, ainsi ai-je appris tes commandements ». L'idée est la
même: Pour apprendre Dieu, il faut passer par des chemins étroits.
L'humilité est un passage nécessaire.
Mais ce degré d'humilité, comme le précédent, n'est pas facile à bien
vivre. Nous hésitons souvent entre deux attitudes contraires. Nous
sentir en dessous de tout, parce que nous avons vécu un échec, nous
nous sommes heurtés à nos limites, à notre incompétence: nous
pouvons croire alors que nous sommes arrivés au 7° degré d'humilité.
Ou bien nous avons le désir de vivre ce degré par vertu, mais dès que
quelqu'un nous fait sentir qu'il nous voit bien ainsi en effet, limité,
incompétent, nous nous révoltons, nous devenons amers.
Le grand problème de l'humilité, c'est que ni l'humiliation, ni la vertu,
ne suffisent pour qu'elle devienne effective. Il ne suffit pas de tout rater
pour être humble. Ni de vouloir l'être par vertu. Dans les deux cas nous
risquons fort nous tromper de chemin.
L'humilité n'est pas d'abord un regard négatif sur soi. C'est plutôt un
regard renouvelé sur l'autre. Elle ne consiste pas à se déprécier, à ne
voir que ses limites et ses défauts. Au contraire. L'humilité véritable,
c'est reconnaitre les dons que Dieu nous a faits, sans que nous y soyons
pour rien. Et surtout s'émerveiller de ce que la grâce fait dans nos
frères. L'humilité n'est donc pas une force négative. Plutôt une
puissance positive qui sait reconnaitre l'œuvre de Dieu.
Seul celui qui aime sait voir la beauté de son frère. Seul celui qui aime
voit, au-delà des apparences. Il discerne le don caché, le trésor dans le
champ, la perle rare, qui fait de chacun de nos frères un trésor.
L'humilité, c'est d'abord un cœur qui aime, des yeux qui s'ouvrent. (10/11/16)
49. Le sixième degré d'humilité est que le moine se contente de tout ce qu'il y a de plus vil et de plus abject, et que, par rapport à tout ce qu'on lui commande, il se juge comme un ouvrier mauvais et indigne,
50. en se disant avec le prophète : « J'ai été réduit à néant et je n'ai rien su. J'ai été comme une bête brute auprès de toi et je suis toujours avec toi. »
« Etre satisfait de tout ce qu'il y a de vil et d'abject » ! Quel instrument
difficile à entendre! Et pourtant, par notre vocation chrétienne et
monastique, nous sommes appelés à cela: participer à l'abaissement de
notre Seigneur.
Benoit nous a amenés à ce degré si rude par les degrés précédents:
Vivre sous le regard de Dieu. Désirer participer à la Passion de Jésus, et
trouver en lui la force d'obéir. Avoir avec notre Père Abbé des rapports
de foi. Entrer dans cette démarche, peut nous aider à aborder cette
étape. Sinon, c'est désespérant! L'homme qui connait sa misère sans
être en relation avec le Christ peut s'enfoncer dans un abîme sans fond.
Notre Salut, c'est d'apprendre à aimer. Le salut n'est pas à faire, mais à
recevoir. La vie divine nous est donnée, comme un don purement
gratuit: le don de Dieu. L'obstacle, ce serait de nous présenter devant
Dieu comme des ayants droit. Jour après jour, travailler à écarter tout
ce qui peut faire obstacle à cette effusion de la vie divine en nous. « J'ai
été réduit à rien et je n'ai rien su. J'ai été comme une brute auprès de
toi, mais moi, je suis toujours avec toi », dit Benoit, en citant le Psaume
72. C'est cet effacement de nous-même devant le Seigneur qui nous est
demandé. Mais ce consentement, cette reddition, ne vont pas de soi!
Nous devons nous habituer aux façons de faire de Dieu. Il faut que Dieu
nous élève au-dessus de nous-mêmes, car nous en sommes incapables
par nos seules forces. Cela suppose des détachements dans tous les
domaines. Dans la mesure où nous consentons à ces détachements,
souvent inattendus, le torrent de la vie de Dieu pourra se répandre en
nous. Mais, nous le savons bien, Il y a toutes ces manières subtiles dont
nous nous recherchons, sous prétexte de nous épanouir. Alorsjque cet
épanouissement nous sera donné par Dieu, dans la relation avec Lui.
Le monastère est le lieu idéal où nous pouvons apprendre à devenir
humbles. Il nous est bon de perdre la face devant les autres. Tant que
nous n'en sommes pas là, nous jouons plus ou moins la comédie aux
yeux des autres, et à nos propres yeux. Aidons nous les uns les autres,
par notre fidélité, par notre charité, à faire cette expérience, en
communion avec le Christ. (9/11/16)
44. Le cinquième degré d'humilité est que, par une humble confession, on ne cache à son abbé aucune des pensées mauvaises qui se présentent à son cœur, ni des mauvaises actions qu’on a commises en secret.
45. L'Écriture nous y exhorte en disant : « Révèle ta voie au Seigneur et espère en lui. »
46. Et elle dit aussi : « Confessez-vous au Seigneur, parce qu'il est bon, parce que sa miséricorde est à jamais. »
47. Et à son tour le prophète : « Je t'ai fait connaître mon délit et je n'ai pas dissimulé mes injustices.
Il Y a quelques jours, je rapportais des points sensibles de vie communautaires qui, mal
vécus, peuvent entrainer vers des dérives sectaires. L'ouverture du cœur, ou le rapport entre
for interne et for externe en est un. Une mauvaise lecture de ce 5° de l'humilité pourrait
légitimer des pratiques déviantes. Que nous dit St Benoit? L'ouverture du cœur est le signe
d'un frère qui avance sur le chemin de l'humilité. Elle manifeste son désir de ne rien
« cacher» de ses ombres à son Abbé, et par là de ne rien « dissimuler au Seigneur de ses
injustices ». Le moine humble ne craint pas d'apparaitre tel qu'il est devant un autre dans le
désir d'être en vérité devant son Dieu. La seconde chose que manifeste l'ouverture du cœur
est la foi en la miséricorde de Dieu et en sa bonté. Reconnaitre ses pauvretés rend gloire à
Dieu, car cela atteste en acte que je lui fais vraiment confiance.
Que ne nous dit pas St Benoit? S'il suggère ici, et s'il invite en d'autres passages (46,
5-6; 4,50) le moine à dire ses pensées, il n'oblige pas à ouvrir son coeur.L'ancien spirituel ou
l'abbé n'ont pas à demander l'ouverture du cœur. A la suite de Benoit, ils ne peuvent que la
conseiller comme une pratique spirituelle très fructueuse. Celle-ci ne peut se vivre que dans la
liberté en vue d'une plus grande liberté intérieure. S'ouvrir pour dire les choses les plus
délicates qui peuvent peser ou dont on n'est pas fier, cela demande du courage. Il nous en
coûte tous. Mais ceci n'est rien au regard de la libération éprouvée et la liberté retrouvée pour
poursuivre le chemin. St Benoit sait par expérience qu'un moine ne peut aller loin sur le
chemin de la vie monastique s'il conserve en lui ces poids qui paralysent et qui empêchent de
vivre. St Benoit ne connait pas la distinction que nous avons, entre ouverture du cœur et
confession. La confession nous apprend à venir avec confiance déposer nos péchés devant
notre Père des cieux, dans l'assurance qu'il les remet à travers le ministre qui nous écoute.
L'ouverture du cœur nous engage davantage sur le chemin de la liberté et de l'humilité, en
acceptant de parler de tout ce qui habite notre cœur, des souvenirs du passé, des pensées
lourdes ou obsédantes etc ... La parole dite et l'écoute qui l'accueille sont ici en elles-mêmes
thérapeutiques: en se posant sous le regard et l'écoute d'un autre, notre vie apprend à
s'ajuster, à se ré ordonner. St Benoit ne connait pas la distinction « for interne et for externe»
selon laquelle on ne dirait rien à l'autorité, à l'abbé, de sa vie intérieure. L'ouverture du cœur
touche tellement l'ensemble de la vie du moine, qu'il parait difficile de couper entre c,e qui
serait de l'ordre plus intime et ce qui serait de l'ordre plus extérieur. Ouvrir son cœur à l'abbé
peut permettre au moine d'avancer plus librement et à l'abbé d'aider le frère au plus près de
ce qu'il vit.Cependant, notre tradition monastique a intégré une mesure de prudence en
évitant que l'abbé ou le maitre des novices ne soit aussi les confesseurs obligés des frères. La
chose est possible mais elle restera exceptionnelle, pour qui le veut. La confession demeure
cet espace privilégié et préservé entre Dieu et le moine. (08/11/2016)
35. Le quatrième degré d'humilité est que, dans l'exercice même de l'obéissance, quand on se voit imposer des choses dures et contrariantes, voire des injustices de toute sorte, on embrasse la patience silencieusement dans la conscience,
36. et que, tenant bon, on ne se décourage ni ne recule, selon le mot de l'Écriture : « Celui qui persévérera jusqu'à la fin, celui-là sera sauvé. ;»
37. Et aussi : « Que ton cœur soit ferme ! Supporte le Seigneur. »
38. Et voulant montrer que le fidèle doit même supporter pour le Seigneur toutes les contrariétés, elle place ces paroles dans la bouche de ceux qui souffrent : « A cause de toi, nous sommes mis à mort chaque jour. On nous regarde comme des brebis de boucherie. »
39. Et sûrs de la récompense divine qu'ils espèrent, ils poursuivent en disant joyeusement : « Mais en tout cela, nous triomphons, à cause de celui qui nous a aimés. »
40. Et ailleurs, l'Écriture dit aussi : « Tu nous as éprouvés, ô Dieu, tu nous as fait passer par le feu, comme on fait passer au feu l'argent. Tu nous as fait tomber dans le filet. Tu nous as mis sur le dos des tribulations. »
41. Et pour montrer que nous devons être sous un supérieur, elle poursuit en ces termes : « Tu as fait chevaucher des hommes sur nos têtes. »
42. En outre, ils accomplissent le précepte du Seigneur par la patience dans les adversités et les injustices : frappés sur une joue, ils présentent aussi l'autre ; à qui ôte leur tunique, ils abandonnent aussi le manteau ; requis pour un mille, ils en font deux ;
43. avec l'Apôtre Paul, ils supportent les faux frères, et ils supportent la persécution et quand on les maudit, ils bénissent.
Supporter, tenir bon, ne pas se décourager ne pas reculer, persévérer, embrasser la
patience. Voici tous les synonymes qui parsèment les lignes entendues au sujet du 4ème degré
de l'humilité ... Lorsque survient l'adversité, les contrariés, voire les injustices dans la vie
monastique, et plus particulièrement dans l'exercice de l'obéissance, voilà la stratégie
proposée pour avancer plus profondément dans l'humilité. Au lieu de se mettre en colère:
supporter; au lieu de se rebeller, tenir bon ;au lieu d'abandonner, embrasser la patience. Loin
d'être une manœuvre tactique pour lâches voulant éviter le combat, cette stratégie de
l'humilité porte le moine au cœur du combat spirituel. Là où la contrariété, voire les injustices
réveillent en nous le désir de revanche et la volonté de ne pas perdre la face, la stratégie de
l'humilité nous fait entrer par la patience à un autre niveau de combat..C'est le niveau où le
Christ lui-même a combattu comme quelques citations scripturaires employées le suggèrent ...
« On nous regarde comme des brebis de boucherie ... » Le Christ seul a connu l'injustice
totale, lui qui n'a pas péché et qui soutient l'univers. Il a souffert avec patience ce qu'il ne
méritait en aucun cas. Par son attitude de patience, de pardon et d'amour pour ceux qui le
faisaient souffrir, il a vaincu le mal en sa racine. Par son humilité il a accepté d'être compté
pour rien ... et il nous a délivrés de tout orgueil et de toute prétention à exister par et pour
nous-même. Sa Résurrection signe sa Victoire.
Ce 4ème degré ne veut rien moins que nous faire entrer dans le dynamisme pascal du
Christ par la patience, supporter les contrariétés, voire les injustices, avec cette profonde
conviction « qu'en tout cela, nous triomphons, à cause de celui qui nous a aimés»Que le
Christ mort et Ressuscité, nous vienne en aide ! (03.11.2016 )
34. Le troisième degré d'humilité est que, pour l'amour de Dieu, on se soumette au supérieur en toute obéissance, imitant le Seigneur, dont l'Apôtre dit : « S'étant fait obéissant jusqu'à la mort. »
R.B.
A ce 30 degré, repris de la règle du Maitre, comme l'ensemble du chapitre, St Benoit ajoute la mention: « pour l'amour de Dieu ». « Pour l'amour de Dieu, on se soumet au supérieur en toute obéissance, imitant le Christ ». Ajout précieux. L'obéissance à un autre homme, à un supérieur, serait servile si elle n'était faite par amour. L'amour de Dieu nous a conduits au monastère. Nous avons entrevu combien cet amour pouvait nous faire vivre. Si nous choisissons de demeurer et de continuer à obéir, ce ne peut-être que par amour de Dieu. « Imitant le Seigneur» dit encore Benoit. Le Seigneur Jésus a obéi par amour de son Père. Comme je le disais hier, cela n'a pas été facile pour lui. Mais il a tenu bon. Il est resté fidèle à l'appel initial qui l'a conduit du désert au baptême, puis sur les routes de Palestine. Peu à peu il a compris que l'annonce du Royaume ne prendrait vraiment corps qu'avec le passage par la croix et la résurrection. Jusqu'au bout, Jésus a tenu bon dans la confiance aimante en son Père.
Comment demeurer dans une obéissance vivante, une obéissance qui ouvre en nous des chemins de liberté? N'est-ce pas en regardant Jésus et en scrutant dans les évangiles, sa manière à lui d'être fidèle et aimant dans l'obéissance? Nous n'imiterons pas le Christ, en vivant comme lui, le chemin de croix du Golgotha. Cela, lui seul pouvait l'accomplir. Mais à chacun de nous, il revient d'être disponible aux évènements et aux circonstances pour obéir à l'appel gui retentira. A travers le P.Abbé ou les frères, la vie quotidienne ne cesse de nous lancer des appels qui requièrent notre consentement. Le plus souvent, nous obéissons. Nous mesurons alors combien notre consentement nous inscrit dans un mouvement de vie qui est bon. Parfois nous faisons la sourde oreille, remettant à plus tard. Parfois nous refusons sans que les raisons invoquées soient bien vérifiées ou fondées. Consentir à se laisser déplacer par une demande, accepter d'être remis en cause par une remarque, c'est cela notre chemin de croix à la suite de Jésus. Rien de sanglant ni d'héroïque. Cette obéissance peut coûter cependant car elle vient toucher notre coeur encore trop enfermé sur lui-même. Allons-nous avec Jésus, nous donner dans l'instant présent, en nous laissant conduire dans une offrande plus libre? (26.10.2016)
31. Le second degré d'humilité est que, n'aimant pas sa volonté propre, on ne se complaise pas dans l'accomplissement de ses désirs,
32. mais qu'on imite dans sa conduite cette parole du Seigneur disant ;: « Je ne suis pas venu faire ma volonté, mais celle de celui qui m'a envoyé. ;»
33. L'Écriture dit aussi : « La volonté subit un châtiment et la contrainte engendre une couronne. »
R.B.
Pour bien comprendre les lignes entendues ce matin, le 2d degré d'humilité, il nous faut sûrement d'abord revivifier notre foi en la Volonté divine ... Celle-ci ne peut-être que très bonne. Dieu veut le bonheur de tout homme. Tel est le vouloir qui a guidé son projet créateuret son dessein rédempteur. Dieu nous aime en soi, et il nous témoigne encore davantage d'amour en nous appelant à prendre part à son dessein de salut pour le monde. Tel est notre appel radical: nous unir au Christ pour devenir par lui, avec lui et en lui des instruments de son salut comme nous le célébrons en chaque eucharistie. Ainsi avec ce second degré, St Benoit nous entraine à suivre le Christ qui n'a voulu faire que la volonté de son Père: «Je ne suis pas venu faire ma volonté, mais celle de celui qui m'a envoyé ». Le propos de la règle n'est autre que de nous donner les moyens d'être au plus près du Christ, et de rendre plus effectif notre engagement à sa suite.
Faire la volonté de Dieu et ne pas faire sa volonté propre: comment bien comprendre? En effet, il ne s'agit pas de ne pas avoir de volonté. Jésus lui-même a eu une volonté humaine pleine, comme elle se manifeste à son paroxysme au jardin de Gethsémani. Là, la volonté humaine de Jésus exprime tout d'abord sa crainte de faire la volonté du Père: « S'il est possible que cette coupe passe loin de moi» ... puis dans un second temps, y consent et la fait sienne: « Cependant non pas ce que je veux, mais ce que tu veux» ... La volonté de Jésus serait restée « volonté propre» en refusant d'entrer dans le dessein du Père ... Une volonté centrée sur soi, et du coup limitée aux seuls horizons de la vie présente. Au contraire, la volonté humaine de Jésus trouve toute sa plénitude en consentant à la volonté du Père. Elle s'unit pleinement à la volonté divine pour traverser la mort et permettre l'avènement de la résurrection. F. Jean Pascal, ce matin, nous prions avec toi. Que le Seigneur Jésus te donne comme à chacun de nous, la force et aussi la joie de convertir tout ce gui en ta volonté est « volonté propre », celle qui cherche ses propres intérêts. Que ta volonté soit pleinement unie à celle de Jésus pour qu'advienne davantage en ta vie, mais aussi dans la communauté et le monde, la victoire de la résurrection. (25.10.2016)
26. Si donc « les yeux du Seigneur observent bons et méchants »,
27. si « le Seigneur, du haut du ciel, regarde sans cesse les enfants des hommes, pour voir s'il en est un qui soit intelligent et qui cherche Dieu »,
28. et si les anges commis à nous garder rapportent au Seigneur quotidiennement, jour et nuit, les actes que nous accomplissons,
29. il nous faut donc prendre garde à tout instant, frères, de peur que, comme dit le prophète dans un psaume, Dieu ne nous voie à un moment « dévier » vers le mal « et devenir mauvais »,
30. et qu'après nous avoir épargnés dans le temps présent, parce qu'il est bon et qu'il attend que nous nous convertissions à une vie meilleure, il ne nous dise dans le futur : « Tu as fait cela, et je me suis tu. »
« Si donc les yeux du Seigneur observent ... Si le Seigneur regarde sans cesse les enfants des hommes ... » Elles sont très nombreuses dans ce premier degré de l'humilité les mentions du regard de Dieu sur nous les humains ... A 1ère vue, cette manière de présenter Dieu omniscient et surplombant de son regard chacune de nos pensées de nos volontés, chacun de nos actes et de nos désirs n'est pas très enthousiasmante ... Une telle vision de Dieu n'est guère attrayante ... voire elle nous fait plutôt fuir. Et pourtant comment comprendre une telle insistance en si peu de lignes? Plutôt qu'un enseignement sur Dieu lui-même, ne nous dit-elle pas quelque chose sur notre vie humaine dans sa relation avec son Dieu? En substance Benoît nous dit que c'est ce qui se passe en notre coeur, en son intime qui touche Dieu ... Ce sont nos pensées, nos désirs, nos volontés, comme autant de manifestations de notre coeur, qui expriment en fait notre être profond dans sa relation avec Dieu et avec les hommes. Malheureusement, assez souvent nos actes ou nos paroles n'expriment pas vraiment, ni totalement la vérité de notre coeur. .. Nos pensées secrètes, nos désirs cachés ou nos volontés, portent souvent davantage notre être vrai, sans fard ni faux-semblant ... Dans l'Evangile, on voit souvent Jésus qui démasque l'hypocrisie de ses adversaires en révélant les pensées secrètes qui se cachent derrière des attitudes de façade ... Ce qui intéresse Jésus, c'est l'homme droit, sans fard dont les actes et les paroles correspondent aux pensées et aux désirs intimes. Ce 1er degré de l'humilité ne nous dit-il pas autre chose? Etre humble c'est nous tenir tel que nous sommes, avec notre être en son entier sous le regard de Dieu qui est bon et qui nous attend, ajoute Benoit. Ce qui doit nous guider alors, c'est moins la crainte d'être vu tel que nous sommes, que l'abandon confiant en la miséricorde de Dieu, qui veut nous guérir et nous rendre plus ferme dans nos pensées, nos désirs et nos volontés, pour mieux le servir en
vérité ...( 21.10.2016)
19. Quant à notre volonté propre, on nous interdit de la faire, quand l'Écriture nous dit : « Et détourne-toi de tes volontés. »
20. Et nous demandons aussi à Dieu, dans l'oraison, que sa volonté soit faite en nous.
21. Avec raison on nous enseigne donc de ne pas faire notre volonté, quand nous prenons garde à ce que dit l'Écriture : « Il est des voies qui paraissent droites aux hommes, et dont l'extrémité plonge au fond de l'enfer »,
22. et aussi quand nous redoutons ce qui est dit des négligents : « Ils se sont corrompus et rendus abominables dans leurs volontés. »
23. Dans les désirs de la chair, croyons que Dieu nous est toujours présent, puisque le prophète dit au Seigneur : « Devant toi sont tous mes désirs. »
24. Il faut donc se garder du désir mauvais, puisque « la mort est placée sur le seuil du plaisir. »
25. Aussi l'Écriture a-t-elle donné ce précepte : « Ne suis pas tes convoitises. »
Après les pensées, le moine humble qui craint Dieu se met sous le regard de Dieu avec toutes ses volontés et tous ses désirs. En laissant la lumière divine les éclairer, il peut mieux discerner ce qui dans sa volonté est volonté propre et ce qui dans son désir est désir de la chair. Rude discernement qui n'est pas aisé, car nous sommes capables d'arrangements de toute sorte pour arriver à nos fins. Rude discernement encore, car il demande que nous nous mettions vraiment en disposition de profonde liberté. St Ignace de Loyola parle de l'indifférence. Est-ce que je désire pardessus tout faire la volonté du Seigneur? Telle est la question qui peut fonder notre liberté et notre indifférence. Est-ce que je suis prêt à renoncer éventuellement à ce que j'avais entrevu, pour faire la volonté de Dieu?
Ici, il ne faut pas nous tromper, et le Malin fait tout pour nous tromper. Souvent, quand il s'agit de grandes orientations, faire la volonté de Dieu nous fait peur, ou s'il s'agit de choix plus petits qui sont exigeants, nous éprouvons de la gêne. Le risque est de laisser s'insinuer dans notre esprit et dans notre coeur, la pensée que le Seigneur finalement ne veut pas notre bien ... C'est l'insinuation du serpent au jardin de la genèse qui suggère que Dieu trompe l'homme en lui mettant des limites. Dieu serait jaloux de voir l'homme s'épanouir pleinement dans tous ses désirs, ici celui de manger du fruit de l'arbre de la connaissance du bien et du mal. La trace de cette insinuation diabolique est tenace. Devant une limite, un « non» ou une direction à prendre qui ferme d'autres voies, nous pensons assez vite que Dieu ou les autres ne veulent pas nous laisser vivre. Dieu est perçu comme un dieu castrateur qui empêche de vivre, le Père Abbé et la règle monastique aussi ... Une part de notre conversion n'est-elle pas de revenir sans cesse avec confiance sous la Parole, dans l'assurance que Dieu notre Père ne peut que nous vouloir du bien. L'autre part de notre conversion n'est-elle pas de consentir à nous laisser guider par la Parole, à travers les médiations humaines, en acceptant que nos volontés et nos désirs aient à s'ajuster. Notre vocation divine fait de nous des fils de Dieu associés à son oeuvre de salut pour le monde. Celle-ci dépasse nos visions toujours limitées du salut et du bien de l'humanité. A la suite de Jésus, nous savons que l'oeuvre du salut passe par la croix. En mettant notre volonté et notre désir au service de Jésus et de son Royaume, il ne faut pas nous étonner d'être bousculés et déplacés. L'amour infini du Père pour le monde appelle notre amour pour lui et pour le monde à s'élargir toujours davantage. (15.10.2016)
14. C'est ce que le prophète nous fait voir, quand il montre Dieu toujours présent à nos pensées, en disant : « Dieu scrute les cœurs et les reins. »
15. Et encore : « Le Seigneur connaît les pensées des hommes. »
16. Et il dit encore : « Tu as compris mes pensées de loin. »
17. Et : « Car la pensée de l'homme s'ouvrira à toi. »
18. D'autre part, pour être attentif à veiller sur ses pensées perverses, le frère vertueux dira toujours dans son cœur : « Je ne serai sans tache devant lui que si je me tiens en garde contre mon iniquité. »
R.B.
En ce premier degré, St Benoit donne à voir ce qu'est un homme qui a la crainte de Dieu: un homme qui consent à être totalement en vérité devant Dieu, en ses pensées, volontéset désirs. Dieu nous connait mieux que nous-mêmes, jusque dans nos pensées. Mais comment bien discerner ces pensées qui nous habitent afin de devenir « un frère utile », « un frère vertueux» selon la traduction de notre texte? C'est à un exercice de discernement en effet que le moine est convié en ce 1er degré, pour être « utile », vraiment engagé dans le service du Seigneur.
Un apophtegme donne un exemple de ce discernement. Abba Isaïe dit encore: « Quand tu accomplis tes liturgies, si tu le fais dans l'humilité en pensant être indigne, elles agréées par Dieu. Mais si monte en ton coeur quelque pensée d'orgueil et que tu y consentes, ou si tu te souviens d'un autre (frère) qui dort ou est négligent et que tu le juges, sache qu'inutile est ta peine» (Abba Isaïe in Coll Syst. XV, 22). En quoi consiste le discernement ici? A reconnaitre la pensée d'orgueil ou celle de jugement du frère, et à la rejeter. A l'inverse, y consentir, sera manquer de discernement, et fera entrer dans une attitude spirituelle faussée qui ne peut être agréable à Dieu, ni produire du fruit. Que les pensées surviennent, ne dépend pas de nous. Mais que les laissions s'installer en nous, est du ressort de notre liberté.
On pourrait dire: mais ce ne sont que des pensées, cela n'a pas de conséquences! Parler ainsi, c'est encore peu se connaitre. Les pensées mauvaises accueillies, voire entretenues, peu à peu nous obscurcissent le jugement et la capacité à nous remettre en cause. Quand nous devenons prompts à juger les frères, à les épingler, insensiblement nous nous fermons à la lucidité sur nous-mêmes, ainsi qu'à la capacité de compassion pour les autres. Nous nous durcissons, en réduisant nos frères à ce que nous en percevons. Nous risquons de manquer le mystère qu'ils sont. Car est-ce ainsi que Dieu les voit? Nous tenir dans la crainte de Dieu en nos pensées sur nos frères, c'est être prompt à couper court avec les jugements arrogants et prétentieux. Couper court avec les pensées d'orgueil, de jugement, mais aussi avec toute autre pensée négative est un exercice de vigilance de tous les jours. « Seigneur, prends pitié de moi pour cette pensée idiote» peut-être une manière simple de se remettre ajusté sous le regard de Dieu. (14.10.2016)