vendredi 15 août 2025 : fête de l’Assomption, horaire des dimanches (vigiles la veille à 20h45, messe à 10h) + concert à 16h.

Nota : L’office de None (14h45) sera prié au dolmen de ND de la Pierre-qui-Vire.

Commentaires sur la Règle



Voir le commentaire de Père Abbé Luc / Chapitre 06, v 1-2 De la taciturnité écrit le 19 août 2015
Verset(s) :

1. Faisons ce que dit le prophète : « J'ai dit : je surveillerai mes voies, afin de ne pas pécher par ma langue. J'ai placé une garde devant ma bouche. Je me suis tu et j'ai été humilié et j'ai gardé le silence sur les choses bonnes. »

2. En ce passage, le prophète montre que, si l'on doit parfois renoncer à des paroles bonnes à cause de la taciturnité, à bien plus forte raison l'on doit s'interdire les discours mauvais à cause du châtiment qui frappe le péché.

Commentaire :

Il est toujours délicat de parler du silence monastique ... Trop en dire le dénature, ne rien en dire nous fait l'oublier. Il est à la fois très simple et naturel, et à la fois précieux pour qui cherche Dieu. De même que dans une musique, les silences font partie à part entière de l'œuvre et lui sont nécessaires, de même dans la vie monastique, le silence contribue à notre respiration profonde en Dieu. Silence dans les espaces, silence à certains moments clefs de la journée, silence durant le travail. Les espaces et les temps nous enseignent à faire silence. Faire silence.« Faisons ce que dit le prophète », commence Benoit. Il y a quelque chose à faire. Qu'y a-t-il à faire? Pour nous moine, il y a peut-être avant tout un acte de foi à faire. Croire que le silence recherché en vérité est un lieu privilégié pour nous tenir en présence de . Dieu. Dieu ne cesse de nous parler, mais nous pouvons nous arranger pour être tellement occupé que nous n'avons plus la disponibilité intérieure pour l'écouter. Croire que le silence donne son fruit à celui qui sait le préserver. Croire que dans le silence la Parole entendue et la Parole donnée prendront tout leur relief et toute leur beauté.

Faire silence en «plaçant une garde devant sa bouche ». Choisir de ne pas parler pour laisser entre nous ce bel espace de respiration. Non par mutisme ou par peur. Pour Dieu, et pour nous. Cela vaut particulièrement dans le travail l'attire l'attention sur ce point. Aujourd'hui, on peut être tenté de penser qu'avec les contraintes techniques, le silence n'est plus possible pour nous durant le travail. Je crois que ce peut être une manière de fuir l'exigence. Ne pas laisser le travail être envahi par le bavardage, ou le brouhaha de toute sorte, c'est se donner la chance de vivre quelque chose de plus profond. Ne restons pas à la superficie de nous-mêmes. Nous pouvons recueillir plus profondément une paix et une unification de nos vies dans le travail même. Entraidons-nous à vivre cette autre manière d'être frère sans avoir besoin de parler, parce que nous sommes sous le regard de Dieu notre Père qui nous rassemble.

Pour faire ce silence-là, chacun est renvoyé à faire silence encore plus profondément. Je reviendrai sur ce point demain. (2015-08-19)

Voir le commentaire de Père Abbé Luc / Chapitre 05, v 14-19 De l'obéissance écrit le 18 août 2015
Verset(s) :

14. Mais cette obéissance elle-même ne sera agréable à Dieu et douce aux hommes, que si l'ordre est exécuté sans frayeur, sans lenteur, sans tiédeur ou murmure ni réponse négative,

15. car l'obéissance prêtée aux supérieurs, c'est à Dieu qu'elle s'adresse, puisqu'il a dit lui-même : « Qui vous écoute, m'écoute. »

16. Et les disciples doivent la prêter de bon gré, car « Dieu aime celui qui donne avec joie. »

17. En effet, si le disciple obéit contre son gré, et qu'il murmure non seulement oralement, mais même dans son cœur,

18. même s'il exécute l'ordre, ce ne sera pas pour autant agréé de Dieu, qui regarde son cœur murmurer.

19. Et pour une action de ce genre il n'obtient aucune faveur ; bien plus, il encourt la peine des murmurateurs, s'il ne se corrige en faisant satisfaction.

Commentaire :

Dans les lignes entendues ce matin, je suis frappé par la présence des mots : « agréable, agréé, bon gré, contre son gré». Cette association de mots de la même famille voulue ainsi par le traducteur Père Adalbert, exprime bien l'esprit d'obéissance que nous sommes tous invités à chercher. Obéir est une chose, obéir de bon gré, sans frayeur, ni lenteur, ni tiédeur ou murmure, en est une autre. Cette obéissance-ci fait appel à un vrai engagement du cœur. Parce que le cœur obéit de bon gré, en profondeur, cette obéissance est agréable à Dieu et aux hommes.

J'ai été voir dans le dictionnaire où s'enracinait le mot français « gré», duquel sont venus les mots « agréer, agréable, mais aussi maugréer (= ne pas être content, murmurer) ». Il vient de « gratus» : « chose agréable» qui est de la même famille que « gratia» : faveur, grâce. En français, on dira aussi « obéir de bonne grâce » ... L'obéissance est donc une affaire de grâce. Vendredi, je parlais de l'obéissance comme d'une danse. Y-a-t-il de la danse sans grâce? Ainsi l'obéissance nous fait entrer dans une relation gracieuse avec Dieu et entre nous. Cette obéissance voudrait nous entrainer loin d'une obéissance qui instaurerait un rapport de domination et de soumission. Je dis « voudrait », car c'est certainement le travail qui nous est demandé à chacun, que l'on soit tour à tour, en position d'autorité ou que l'on soit en position d'obéissance. Si celui qui demande quelque chose le vit comme une manière d'assurer un pouvoir et de montrer son importance, il est à côté. Jésus dans l'évangile met en garde ses disciples contre la tentation de faire sentir leur pouvoir, pour les inviter à servir. Si celui qui obéit le vit comme une soumission dans laquelle il garde son quant à soi, pour murmurer éventuellement, il n'est pas entré dans l'obéissance. Il reste à côté.

L'obéissance selon St Benoit est vraiment gracieuse dans tous les sens du terme: gracieuse car fruit de la grâce qui nous incline en profondeur à nous donner; gracieuse car don précieux et doux fait à Dieu et aux frères à qui on obéit. Si telle est l'obéissance, elle est toujours une grâce à demander, à chercher, à désirer. .. car elle ne nous est pas spontanée. Aussi plutôt que de craindre et de tendre le dos à d'éventuelles demandes, demandons cette grâce de nous ouvrir et de nous donner les uns aux autres par le bien de l'obéissance (le bonum de RB 71). Car l'obéissance nous fera entrer dans des relations de plus en plus gracieuses . (2015-08-18)

Voir le commentaire de Père Abbé Luc / Chapitre 05, v 10-13 De l'obéissance écrit le 14 août 2015
Verset(s) :

10. Ceux qui sont pressés du désir d'avancer vers la vie éternelle,

11. ceux-là adoptent la voie étroite, dont le Seigneur dit : « Étroite est la voie qui conduit à la vie » ;

12. ne vivant pas à leur guise et n'obéissant pas à leurs désirs ni à leurs plaisirs, mais marchant au jugement et au commandement d'autrui, demeurant dans les cœnobia, ils désirent avoir un abbé pour supérieur.

13. Ces hommes-là, certes, imitent la maxime du Seigneur, dans laquelle il dit : « Je ne suis pas venu faire ma volonté, mais celle de celui qui m'a envoyé. »

Commentaire :

« Ceux qui sont pressés du désir d'avancer vers la vie éternelle » ... St Benoit reste fidèle à son intuition de la vie monastique comme une course ... L'obéissance est un des moyens privilégiés de mener à bien la course, sans mollir. Quand l'obéissance est là, tout est fluide et pour soi et pour la communauté. Quand elle n'est pas là, tout est ralenti, voire compliqué. Une chose est la nécessaire concertation entre frères ou en communauté sur les orientations à prendre. C'est le temps de l'écoute mutuelle pour laisser se dégager une orientation à prendre. Nous vivons actuellement ce travail de maturation dans la réflexion avec Ezalen, ou simplement lors de nos chapitres conventuels. Mais autre chose sont les blocages, les attentes, ou les pertes de temps en discussion sans fin parce qu'un frère ne fait pas ce qui est prévu, parce qu'il se dérobe, parce qu'il n'entre pas dans la danse ... Madeleine Delbrêl aimait bien associer l'obéissance à la danse. Dans son beau texte, « le bal de l'obéissance », elle suggère que notre vie est une danse avec Dieu.« Si nous étions contents de vous, Seigneur, nous ne pourrions pas résister à ce besoin de danser qui déferle sur le monde, et nous arriverions à deviner quelle danse il vous plaît de nous faire danser en épousant les pas de votre Providence ». Deviner la volonté du Seigneur à travers les évènements de la Providence, les appels divers ... Elle poursuit : « Dans le bal joyeux de votre amour. Seigneur, venez nous inviter. Nous sommes prêts à vous danser cette course à faire, ces comptes, le dîner à préparer, cette veillée où l'on aura sommeil. Nous sommes prêts à vous danser la danse du travail, celle de la chaleur, plus

tard celle du froid

Seigneur, enseignez-nous la place que, dans ce roman éternel amorcé entre vous et nous, tient le bal singulier de notre obéissance. Révélez-nous le grand orchestre de vos desseins, où ce que vous permettez jette des notes étranges dans la sérénité de ce que vous voulez. Apprenez-nous à revêtir chaque jour notre condition humaine comme une robe de bal, qui nous fera aimer de vous tous ses détails comme d'indispensables bijoux ».

Danser notre vie, obéir comme on se laisse entrainer dans un pas de danse ... S'il en est ainsi notre obéissance va nous découvrir des saveurs insoupçonnées, et à certains jours quelque chose de l'éternité. (2015-08-14)

Voir le commentaire de Père Abbé Luc / Chapitre 05, v 1-9 De l'obéissance écrit le 06 août 2015
Verset(s) :

1. Le premier degré d'humilité est l'obéissance sans délai.

2. Elle convient à ceux qui estiment n'avoir rien de plus cher que le Christ.

3. À cause du service saint qu'ils ont voué, ou à cause de la crainte de la géhenne et de la gloire de la vie éternelle,

4. aussitôt qu'un supérieur leur commande quelque chose, comme si c'était commandé par Dieu, ils ne peuvent souffrir le moindre délai dans l'accomplissement.

5. C'est d'eux que le Seigneur a dit : « Dès que son oreille a entendu, il a obéi. »

6. Et il dit encore aux docteurs : « Qui vous écoute, m'écoute. »

7. Ces hommes-là, donc, abandonnant sur-le-champ leurs intérêts personnels et délaissant leur volonté propre,

8. les mains libres immédiatement et laissant inachevé ce qu'ils faisaient, avec une obéissance qui emboîte le pas, font suivre à leurs actes la voix de celui qui ordonne.

9. Et comme au même instant, l'ordre proféré par le maître et l'œuvre accomplie par le disciple, les deux choses se déroulent ensemble, à vive allure, avec la rapidité qu'inspire la crainte de Dieu.

Commentaire :

Obéir sans délai, sans faire trainer, sans faire sentir à l'autre qu'on existe. Obéir sans rechigner, sans susceptibilité ... Oui, cela demande une grande, une très grande humilité. Accepter d'être tout entier sous la parole d'un autre sans discuter, vient prendre à rebrousse- poil notre orgueil spontané. Comme on le verra, il ne s'agit pas d'une attitude de faiblesse qui masquerait un cœur qui récrimine. St Benoit semble pousser à l'extrême l'obéissance en insistant sur le « sans délai », ou sur « laisser tout, tout de suite ». Que veut-il dire? Souhaite- t-il que les moines soient comme des robots ou des êtres infantiles, immatures?

Son propos est sûrement davantage théologal que moral ou ascétique. Il suggère une attitude où l'on s'exerce à demeurer sous la parole du Christ, en se mettant sous la parole d'un autre. Le but est là : il s'agit d'obéir au Christ. L'extrême attention à vouloir obéir sans discuter ou pinailler, est le signe qu'on ne désire qu'obéir au Christ en toute occasion. Voilà la question qu'il nous laisse en filigrane: est-ce que je vis mon existence comme une écoute du Christ? Sommes-nous à l'affût de toutes les occasions pour y reconnaître une parole du Christ? Celui-ci nous parle à travers les Ecritures et la liturgie. Mais l'écouter aussi dans les appels et les demandes quotidiens nous entraine un peu plus loin à sa suite. Cette écoute veut unifier notre vie pour en faire vraiment une vie de disciple« à l'affût d'un mot, d'un ordre» pour reprendre les mots de l'hymne de la St Benoit.

Bien sûr, ce n'est pas facile à vivre. Et nous sommes toujours en deçà. C'est ce qui fait la différence entre l'obéissance militaire et l'obéissance religieuse. La première est automatique et immédiate sous peine d'exclusion de l'armée; la seconde est appelée à devenir toujours rapide et souple dans le désir de ne pas manquer une parole du Christ. S'il y a un travail intérieur à vivre, c'est bien celui-là: cultiver en nous le désir de ne pas manquer une parole que le Christ nous adresse. Si nous cultivons ce désir, si nous demandons la grâce d'y être plus entier, nous entrerons dans cette attitude d'obéissance, d'ouverture à tout ce qui vient, facile ou non. Nous découvrirons la manière avec laquelle le Seigneur nous conduit dans la vie. Nous entrerons plus profondément dans son projet sur nous et sur le monde; projet qui peut inclure des renoncements afin de nous conduire plus loin vers la liberté et le don de nous-mêmes. Demandons la grâce d'avoir un désir plus grand de ne pas manquer une parole que le Christ nous adresse au long de nos journées. (2015-08-06)

Voir le commentaire de Père Abbé Luc / Chapitre 04, v 55-58 Quels sont les instruments des bonnes oeuvres écrit le 05 août 2015
Verset(s) :

55. Écouter volontiers les saintes lectures,

56. se prosterner fréquemment pour prier,

57. confesser chaque jour à Dieu dans la prière, avec larmes et gémissements, ses fautes passées,

58. se corriger de ces fautes à l'avenir.

Commentaire :

Des instruments que nous venons d'entendre, je retiens les mots « volontiers », «fréquemment », « chaque jour ». Ces mots nous disent la manière avec laquelle nous sommes invités à vivre le combat de la prière et de la présence à Dieu. Notre vie monastique nous conduit à soigner cette manière. On peut venir à l'office comme un fonctionnaire, faire sa lectio comme une obligation, ou pire comme un fardeau. Qu'il y ait des périodes difficiles où les choses sont pesantes et où le goût manque, c'est normal dans une vie humaine qui est toujours en recherche de sa paix profonde. Mais si ce sentiment de poids ou de sécheresse s'installe, avant de parler trop vite d'épreuve mystique, il faut bien vérifier si l'on prend réellement les moyens mis à notre disposition. Avant de chercher pourquoi une voiture ne démarre pas, on vérifie d'abord si la batterie est chargée.

St Benoit nous donne des repères avec ces mots « volontiers, fréquemment, chaque jour». Notre écoute de la Parole dans la liturgie et dans la lectio requiert notre assentiment, notre désir d'être enseigné par notre Dieu ... Ecouter volontiers, c'est venir ouvert, tout ouïe, dans l'espérance d'être rejoint par un mot, dans le désir qu'une part de nous-mêmes va s'éveiller à l'amour de Dieu ou que notre situation présente va être éclairée. Le Seigneur prend soin de nous en nous adressant sa Parole. Si nous l'écoutons volontiers, à cœur ouvert, quelque chose va se passer ...

« Fréquemment» prier... Nous pouvons entendre ici l'invitation à demeurer en présence de Dieu dans tout ce que nous faisons. Nous tourner vers Lui au début ou en fin d'une activité, lui remettre dans une courte invocation notre travail, une rencontre. Ces petits mouvements intérieurs peuvent devenir l'expression de notre désir d'être plus uni à Dieu afin de faire sa volonté. Les pères du désert ruminaient une parole ou une prière du psaume. Certains laissent la prière du chapelet habiter leurs déplacements ou les gestes répétitifs d'un travail. D'autres chantonnent des antiennes ou des hymnes. Les moyens ne manquent pas de tenir notre cœur tourné « fréquemment» vers Celui qui nous cherche et que nous cherchons ...

« Chaque jour », confesser à Dieu ses fautes ... Sans tomber dans une culpabilité mortifère, nous pouvons entendre ici, le bienfait d'un petit exercice spirituel: l'examen de conscience de chaque soir. Relire devant Dieu sa journée, pour rendre grâce de tout ce qui a été vécu, ainsi que pour demander pardon de ce qui a été péché, résistance à l'Esprit, omission, lâcheté ... Ainsi quotidiennement, soyons heureux de nous exercer dans la prière (2015-08-05)

Voir le commentaire de Père Abbé Luc / Chapitre 04, v 44-47 Quels sont les instruments des bonnes oeuvres écrit le 04 août 2015
Verset(s) :

44. Craindre le jour du jugement,

45. redouter la géhenne,

46. désirer la vie éternelle de toute sa convoitise spirituelle,

47. avoir chaque jour la mort présente devant ses yeux.

Commentaire :

Parmi les instruments de l'art spirituel, voici un petit ensemble « eschatologique». Dans notre boite à outils, ils nous rappellent cette dimension ultime de notre vie humaine tendue vers l'éternité en Dieu. C'est une chance de pouvoir regarder en face la réalité de notre mort et de la mettre en perspective avec une vie pour toujours avec Dieu. Beaucoup de nos contemporains ne peuvent faire cela. Ils rejettent la mort loin de leurs yeux et de leurs pensées, ne sachant comment la considérer.

Pour affronter la mort, St Benoit propose une double attitude à ses moines: celle d'un fort réalisme et celle d'un grand désir. Fort réalisme pour regarder en face la mort, et ne pas faire comme si elle n'était pas là. Fort réalisme encore en n'oubliant pas la réalité du jugement et de l'enfer, ce qui équivaut à ne pas oublier la profondeur de notre propre liberté. Mais aussi grand désir de la vie éternelle en toute convoitise spirituelle ... Réalisme lucide et désir ardent. Ces deux attitudes forgeront en nous le chrétien. Face aux peurs, aux fermetures, aux fausses images de Dieu, comment progresser dans le désir de la Vie éternelle?

Je relève deux points. Dans la liturgie, nous pouvons accueillir et laisser résonner le désir de Dieu de nous voir partager sa vie en plénitude. Cette promesse de vie est annoncée à la messe, quand nous célébrons la mort et la résurrection du Christ en attendant qu'il vienne. Beaucoup d'oraisons nous orientent vers la vie éternelle. Par ex, l'oraison de post communion de la St Jean Marie Vianney: «Puissions-nous comme lui, progresser de jour en jour et parvenir enfin jusqu'à toi ». Souvent dans nos hymnes de l'office, au moins une strophe, ouvre sur la venue du Christ et notre avenir en Lui. Je cite celle que nous chantions ce matin: « Et vois parmi les saints, la foule des pécheurs dont la joie monte vers l'amour et s'émerveille: '0 pardon qui délivre, 0 bonheur sans déclin, n'être plus lumière dans le sang rédempteur'» ... Laissons la liturgie élargir notre désir de la vie éternelle avec le Seigneur.

Je relève un second point lié à la lectio, à partir de cette phrase de St Jean: « La vie éternelle, c'est de te connaître toi, le seul Dieu, et de connaître celui que tu as envoyé, Jésus- Christ» (Jn 17,3). Connaître notre Dieu, grandir dans la connaissance de son amour et de son mystère, nous ouvre dès maintenant la vie éternelle. Notre lectio, nos lectures, notre prière veulent nous introduire dès aujourd'hui dans une familiarité toujours plus profonde avec notre Dieu ... Laissons entrainer et former par l'Esprit Saint déjà à cette connaissance qui est vie éternelle. « Seigneur, envoie-moi le Saint Esprit qui me fasse connaître ce que je suis t ce que vous êtes » Saint Jean Marie Vianney - (2015-08-04)

Voir le commentaire de Père Abbé Luc / Chapitre 04, v 48-54 Quels sont les instruments des bonnes oeuvres écrit le 04 août 2015
Verset(s) :

48. Surveiller à toute heure les actions de sa vie,

49. en tout lieu tenir pour certain que Dieu nous regarde.

50. Quand des pensées mauvaises se présentent au cœur, les briser aussitôt contre le Christ et les découvrir à l'ancien spirituel.

51. Garder sa bouche des paroles mauvaises et déshonnêtes,

52. ne pas aimer à beaucoup parler ;

53. ne pas dire des paroles vaines ou qui portent à rire,

54. ne pas aimer le rire prolongé ou aux éclats.

Commentaire :

« Briser les pensées mauvaises contre le Christ et les découvrir à l'ancien spirituel ». A la lecture de cet instrument, je voudrais en profiter pour poser la question: comment chacun vit il la relation d'ouverture du cœur avec le frère qui l'accompagne ou avec le père abbé? Quelle place donne-t-on à cet espace de parole dans sa vie de moine? Qu'est-ce qu'il s'y passe? Est-ce un outil dans notre recherche spirituelle?

St Benoit envisage l'ouverture du cœur avant tout comme un lieu de délivrance: délivrance du poids obsédant de certaines pensées, afin de réduire ou d'anéantir leur pouvoir séducteur ou affligeant. Parler de soi en vérité demande du courage, mais quelle libération! Pouvoir être tel que nous sommes sans s'épuiser à se cacher ou user de subterfuges pour se dissimuler, quelle joie profonde! La vérité nous rend libre, voilà le premier fruit de l'ouverture du cœur.

Mais le profit qu'on peut retirer de cet exercice est bien plus large. Il peut permettre de parler de ses difficultés dans le but de chercher à mieux se connaître. Parler de ce que l'on vit, poser ses questions afin de ne pas être dupe de soi-même. Parler de notre relation avec les autres est aussi un lieu important de l'ouverture du cœur. Mais comment en parle-t-on? Seulement pour souligner ce qui ne va pas chez l'autre? Ou bien est-ce l'occasion de chercher à comprendre ce qui en moi peut-être obstacle ou ombre dans cette relation? Vivre en relation avec les autres me révèle mon propre visage. Ainsi vécue dans la foi, l'ouverture du cœur nous place toujours sous le regard bienveillant du Christ. Sous ce regard et sous cette lumière, il devient possible de s'aimer soi-même, de grandir dans une plus grande confiance en soi. C'est le second fruit de l'ouverture du cœur.

Mais l'ouverture du cœur peut permettre d'aller encore plus profond. Parler notre vie, c'est aussi apprendre à discerner peu à peu avec plus de finesse, qui est Dieu notre Père, qui est le Seigneur Jésus, quelle est notre docilité à l'Esprit. Il ne s'agit pas de faire de grands discours théologiques, mais de se mettre davantage à l'écoute de la Parole et des évènements pour entrer dans une connaissance plus intime du Seigneur de nos vies. Comment celui-ci me conduit-il? Quel visage me révèle-t-il de Lui-même? Sans les deux fruits précédents, celui d'une parole en vérité et celui d'une meilleure connaissance aimante de soi, cette connaissance plus intime de Dieu ne peut porter tout son fruit. Quel que soit notre âge, ne cessons pas de creuser cette recherche du visage de Dieu, dans le désir de lui être plus docile. (2015-08-04)

Voir le commentaire de Père Abbé Luc / Chapitre 04, v 41-43 Quels sont les instruments des bonnes oeuvres écrit le 01 août 2015
Verset(s) :

41. Confier son espoir à Dieu.

42. Quand on voit quelque bien en soi, l'attribuer à Dieu, non à soi-même ;

43. quant au mal, savoir qu'on en est toujours l'auteur et se l'imputer.

Commentaire :

« Confier son espoir à Dieu» Les instruments que nous lisons et commentons ces jours-ci, prennent toute leur valeur d'instruments de l'art spirituel, si nous les ruminons, si nous les faisons nôtre durant notre journée. Ils veulent nous apporter quelque lumière, ou quelque saveur, ou quelque force.

Je propose que durant cette journée, nous ruminions cet instrument: « Confier son espoir à Dieu». Laissons-le habiter notre pensée, notre mémoire. Ecrivons-le peut-être. Repassons-le lorsque nous nous déplaçons pour aller d'un point à un autre. Et au soir de ce jour, regardons quelle saveur il a donné à notre journée. A-t-il été un instrument qui nous a édifiés, fait grandir spirituellement?

Confier notre espoir à Dieu... Notre espoir, notre espérance pour nous-mêmes, notre espérance pour la communauté, notre espérance pour l'Eglise et pour notre monde.

Lui confier, lui remettre avec confiance et non le poser là pour s'en débarrasser afin qu'il s'en Occupe (« à toi de te débrouiller! »). Non, mais lui confier avec toute notre révérence et tout notre amour. Lui confier dans la conviction que rien de ce qui fait notre vie humaine n'est négligeable à ses yeux. Cet instrument nous invite à creuser la manière avec laquelle nous nous tenons devant Dieu. Est-ce à la manière de quelqu'un qui pense avoir des droits et qui en conséquence exige des choses de Dieu? Ou bien est-ce à la manière d'un enfant confiant sûr d'une chose: son Père entend et accueille son espérance en Lui? L'enfant gâté qui exige oublie qu'il a tout reçu. L'enfant confiant sait que seul il ne peut rien. En confiant son espoir à Dieu, c'est lui-même gui se remet tout entier dans les mains de Dieu. Nous ne sommes pas loin du chant de notre profession monastique: «Reçois-moi, Seigneur selon ta parole et je vivrai, ne me déçois pas dans mon attente ».

Confier son espoir à Dieu, c'est accepté d'être démuni, les mains vides devant lui. Avec pour seule assurance, notre confiance en Lui et en son Amour qui écoute. Cela nous invite à remettre aussi nos visions de notre vie, nos projets, nos visions de la vie de la communauté, de l'Eglise et du monde. Le Seigneur sait et conduit les choses, comme nous ne pouvons l'imaginer. Oui, en ce jour, ruminons cet instrument, et recueillons en le fruit: « confier son espoir à Dieu ... » (2015-08-01)

Voir le commentaire de Père Abbé Luc / Chapitre 04, v 34-40 Quels sont les instruments des bonnes oeuvres écrit le 31 juillet 2015
Verset(s) :

34. Ne pas être orgueilleux,

35. ni adonné au vin,

36. ni grand mangeur,

37. ni ami du sommeil,

38. ni paresseux,

39. ni murmurateur,

40. ni médisant.

Commentaire :

Etre du monde ou être du Christ? Ce dernier ensemble d'instruments ne regardent plus comme les deux précédents des actions (ne pas se venger, ne pas mentir, aimer ses ennemis) mais bien une façon d'être. Ne rien préférer à l'amour du Christ nous engage sur un chemin de transformation de tout l'être. Accueillir son amour, c'est le laisser nous illuminer et nous transformer à sa ressemblance. Préférer son amour à tout autre opère en nous un discernement. Devant l'humilité du Christ quelle valeur a notre orgueil, cette suffisance qui nous isole et nous enferme sur nous-même? A la lumière de la sagesse du Christ, que valent nos appétits débordants et insatiables? Face au Christ qui se donne quel poids a notre paresse? Devant le Christ qui accueille tout homme quel sens ont nos murmures et nos médisances ?

Avec ces instruments, nous pouvons accueillir la lumière et la parole du Christ qui vient démasquer nos lieux ténébreux à la racine. Notre péché ne réside pas seulement dans nos actions, mais aussi dans toutes ces pensées ou ces désirs illusoires que nous abritons et entretenons, qui finissent à notre insu par nous imprégner et nous faire devenir à leur ressemblance ... Notre être de chair laissé à lui-même se laisse vite entrainer ou bercer dans l'illusion. La Parole du Christ nous réveille. Telle une épée à deux tranchants, elle vient nous aider à discerner pour nous libérer de cet esclavage du souci de soi. Plus profondément, elle nous redit le désir du Christ, celui de son Père de nous voir plus ouvert, plus à l'écoute de son amour. C'est son amour, et la relation qu'il instaure qui nous rendra vraiment heureux, vraiment nous-mêmes. Et non notre orgueil, ni nos désirs charnels, ni notre paresse ou nos murmures contre les autres ... toutes ces illusions qui nous bernent et nous laissent insatisfaits.

Suivre le Christ, préférer son amour, ouvre une voie de liberté qui nous renouvelle très profondément. .. dans le regard sur la vie, mais aussi dans le désir de nous donner davantage. Venons et revenons sans cesse à la source de l'amour du Christ pour nous, un amour exigent, tout sauf mièvre, un amour libérateur de tous nos esclavages, de tous nos désirs illusoires ... « Seigneur, ton amour soit sur nous, comme notre espoir est en toi » (2015-07-31)...

Voir le commentaire de Père Abbé Luc / Chapitre 04, v 29-33 Quels sont les instruments des bonnes oeuvres écrit le 29 juillet 2015
Verset(s) :

29. Ne pas rendre le mal pour le mal,

30. ne pas faire d'injustice, et de plus supporter patiemment celles qui nous sont faites,

31. aimer ses ennemis,

32. quand on nous maudit, ne pas répondre en maudissant, mais bénir au contraire,

33. souffrir persécution pour la justice.

Commentaire :

Devant le mal, l'offense, la parole malveillante ou la persécution, comment le chrétien, et à fortiori le moine, vont ils se situer? A la manière du monde ou la manière du Christ? Ici nous sommes au cœur de la bonne nouvelle apportée par Jésus. C'est en ce lieu-là du mal que Jésus est venu apporter l'amour, son amour recréateur dans le pardon offert et dans la patience consentie. Il ne nous demande rien d'autre que de faire comme lui ... «Ne pas rendre le mal pour le mal, supporter patiemment les injustices qui nous sont faites, quand on nous maudit, ne pas répondre en maudissant, mais bénir au contraire ». C'est la Loi de l'évangile qui vient inverser la logique du mal par la logique de l'amour. C'est la Loi de l'évangile, mais il s'agit bien plus d'une loi. En effet, elle ne se présente pas à nous comme un commandement que l'on doit accomplir, car nous en sommes incapables. Mais elle se présente à nous comme une proposition de grâce, une béatitude:« Heureux les persécutés pour la justice ... Heureux serez-vous si l'on vous insulte, si l'on vous persécute ... à cause de moi... » Jésus veut nous partager à chacun le fruit de sa passion et de sa mort. Il désire que nous devenions heureux de son bonheur de pouvoir supporter l'injustice, de rendre le bien pour le mal, jusqu'à pardonner. Là est la plus grande liberté qui soit.

Comment grandir dans cette liberté, dans cette grâce en germe en nous depuis notre baptême? Qu'est-ce qui est vraiment en notre pouvoir? Comme dit Paul, le mal que je ne veux pas, je le fais, et le bien que je veux faire, je ne le fais pas ... (Rm 7,18-19) Que nous reste-t-il, sinon de désirer et de prier afin de demander la grâce de la disponibilité à l'Esprit, pour qu'au moment voulu, il nous soit donné de ne pas rendre le mal, de pardonner et de bénir au lieu de maudire ... Ces instruments de la règle nous donnent d'entrevoir notre vrai visage de fils de Dieu, celui qui à l'image du Christ. C'est à cette ressemblance que nous sommes promis, et à laquelle il nous est donné de collaborer humblement, mais réellement. Fais de nous, Seigneur Jésus, par ton Esprit Recréateur, des fils à ta ressemblance. (2015-07-29)