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6. La troisième et détestable espèce de moines est celle des sarabaïtes. Aucune règle ne les a éprouvés, grâce aux leçons de l'expérience, comme l'or dans la fournaise, mais ils sont devenus mous comme du plomb.
7. Par leurs œuvres, ils restent encore fidèles au siècle, et on les voit mentir à Dieu par leur tonsure.
8. A deux ou trois, voire seuls, sans pasteur, enfermés non dans les bergeries du Seigneur, mais dans les leurs, ils ont pour loi la volonté de leurs désirs.
9. Tout ce qu'ils pensent et décident, ils le déclarent saint ; ce qu'ils ne veulent pas, ils pensent que c'est interdit.
10. La quatrième espèce de moines est celle que l'on nomme gyrovague. Toute leur vie, allant par les différentes provinces, ils se font héberger trois ou quatre jours par les celles des différents moines,
11. toujours errants et jamais stables, asservis à leurs propres volontés et aux tentations de la bouche, et en tout plus détestables que les sarabaïtes.
12. La misérable conduite de tous ces gens-là, mieux vaut la passer sous silence que d'en parler.
13. Laissons-les donc et venons-en, avec l'aide du Seigneur, à organiser la valeureuse espèce des cénobites.
Si ces deux espèces de moines !es sarabaïtes et les gyrovagues ne nous intéressent pas du tout en elles-mêmes. nous pouvons retirer quelques indications en négatif de ce que St Benoit attend des cénobites. La première notation que je retiens est celle de la règle qui éprouve : "aucune reg!e ne les a éprouvés". Dans tous les sens du terme. la règle nous éprouve. Elle nous met a l'épreuve parce qu'elle vient raboter des choses en nous qui sont comme la corne aux pieds... on les gratte et elles repoussent ! Le cadre de l'horaire vient raboter notre propension a nous étaler dans le temps, ou encore à nous penser comme maitre absolu de notre temps. Non, notre temps est à Dieu, et tout ce que nous faisons, c'est pour Lui, ce que l'office nous invite à célébrer. La vie commune et son jeu de relations, les services demandes, !es travaux à coordonner. tout ceci vient raboter notre tendance a nous débrouiller tout seul ou à nous penser seuls au monde. Alors que nous ne nous déployons vraiment que dans les relations
d'échange et de don mutuel. En ces lieux et en bien d'autres, la règle nous met à l'épreuve: allons-nous enfin consentir à nous donner de bon coeur ? La question nous est posée chaque jour, et chaque jour, elle attend notre réponse... La seconde notation que je relève est que la vie commune sous une règle nous fait entrer dans une longue tradition d'expériences: « aucune règle ne les a éprouvés grâce aux leçons de l'expérience ». Ce que nous vivons sous une règle à la force d'une longue tradition de plusieurs siècles, une tradition vivante qui n'exclue pas des évolutions et des changements. Cette tradition qui a fait ses preuves pour offrir un art de vivre où s'allie solitude pour Dieu et recherche de communion avec !es autres. Dans cette tension, la règle, et nos coutumes locales qui en dérivent, sont le fruit de recherches incessantes menées génération après génération. Sans prétention à l'infaillibilité, se dégage de notre genre de vie, une sagesse qui porte du fruit pour qui s'attache à l'écouter et à la faire sienne. La dernière notation est liée à l'obéissance: « A deux ou trois, voire seuls, sans pasteur, enfermés non dans
les bergeries du Seigneur, mais dans les leurs, ils ont pour loi la volonté de leurs désirs ». En
se mettant sous l'autorité de l'abbé, et plus largement en voulant vivre dans une disposition d'écoute des frères, les cénobites évitent le grand piège de la bulle. Le grand risque, et il est très sensible aujourd'hui, serait de vivre notre vie humaine dans une bulle, à l'abri derrière nos rêves et nos désirs de toute puissance. En nous apprenant à nous tenir avec liberté et responsabilité
dans une attitude d'écoute, la vie cénobitique fait éclater nos bulles et descendre chacun de sa tour d'ivoire. Rendons grâce à Dieu de nous avoir offert cette pédagogie pour répondre à son appel a l'aimer et à aimer nos frères.
3. Ensuite la seconde espèce est celle des anachorètes, autrement dit, des ermites. Ce n'est pas dans la ferveur récente de la vie religieuse, mais dans l'épreuve prolongée d'un monastère
4. qu'ils ont appris à combattre le diable, instruits qu'ils sont désormais grâce à l'aide de plusieurs,
5. et bien armés dans les lignes de leurs frères pour le combat singulier du désert, ils sont désormais capables de combattre avec assurance les vices de la chair et des pensées, sans le secours d'autrui, par leur seule main et leur seul bras, avec l'aide de Dieu.
Le lien entre les deux vocations cénobitique et érémitique est ici clairement explicite. Et chez les cénobites et chez les ermites, on combat. Par trois fois, le mot revient. Chez les cénobites, on combat dans les rangs fraternels, avec le secours d'autrui. Chez les ermites, on combat seuls. Il est intéressant de voir que pour Benoit la vie cénobitique est plutôt vue sous l'angle facilitateur pour mener le combat spirituel. La on y reçoit de l'aide. Laquelle? St Benoit ne précise pas : sûrement celle de l'ancien spirituel auprès duquel on peut parler, mais peut-être aussi tout simplement l'ensemble des frères qui par leur présence sont un support et un stimulant, par ex lorsqu'il faut aller à l'office, ou bien lorsqu'il faut travailler, etc... Lorsque nous parlons de la vie fraternelle, assez spontanément, nous avons tendance à faire ressortir ses difficultés, les frottements, les agacements, les incompatibilités parfois, les peurs etc... Tout ceci est vrai. Tout ceci constitue certainement la face "nord", la face abrupte de notre ascension en cordée, notre combat proprement cénobitique. Mais ces lignes sur les ermites peuvent aussi nous aider à regarder la face « sud » de notre ascension, celle qui est plus
ensoleillée et enrichie du soutien des frères. St Benoit prend l'image de l'armée. Pour aller au combat, il n'est jamais prudent d'avancer seul, mais il faut y aller par petit groupe. Nos communautés sont fortes de la diversité des expériences, des âges, des dons portés par chacun.
Les frères plus expérimentés et plus âgés peuvent par une parole ou par un simple silence émettre comme un signal : un danger à éviter, ou bien une délicatesse à avoir, ou encore une invitation à une certaine prudence. Leur seule présence est aussi souvent un encouragement. Alors qu'intérieurement, je peux râler contre un autre ou simplement contre moi-même, voir un ancien qui lutte pour marcher ou qui se laisse faire dans sa dépendance, relativise d'un seul coup mes problèmes. Heureux sommes-nous si nous cultivons cette sensibilité aux frères qui sont à nos cotés, pour essayer de capter la richesse de la présence qu'il nous offre. Concernant les dons que chacun apporte pour les offrir à tous, apprenons aussi à ouvrir le bon oeil. Regardons nos frères d'abord sous cet angle positif de leurs dons mis a la disposition de tous: le service, !'attention, la disponibilité, la quête de prière, la capacité à tisser du lien, a donner une bonne parole, les dons intellectuels de clarté et de vision large, la discrétion et la capacité d'écoute. Oui, notre armée de cénobites est riche de tous ces dons qui permettent à chacun de pouvoir mener plus à l'aise son propre combat, le combat de sa fidélité, de sa persévérance, de la charité appelée à s'élargir. Rendons grâce pour le cadeau des frères que Dieu nous a fait.
1. Il est clair qu'il existe quatre espèces de moines.
2. La première est celle des cénobites, c'est-à-dire vivant en monastères ; ils servent sous une règle et un abbé.
«Cénobites» de coenobita, de koinos-bios, vie commune... Ceux qui mènent la vie commune. Vivre ensemble : pouvoir vivre ensemble, voilà le but, sous une règle et un abbé : voilà !es moyens. On pourrait en rester là et ne considérer notre vie monastique cénobitique que sous son aspect organisationnel : pour que cela marche, il faut une règle qui structure, et un chef qui dirige. Mais tout au long de sa règle, St Benoit va nous introduire a une réalité plus profonde. La vie commune que nous voulons vivre est d'abord l'oeuvre de Dieu. Il a appelé ensemble et regroupe des hommes qui ne se seraient surement jamais rencontrés. On peut entendre ici la belle phrase de notre frère Basile dans l'interview paru dans le livre « Sagesse cachée des monastères » : « le plus beau cadeau que Dieu m'ait fait, ce sont mes frères » (p 34). Comme un berger, Dieu rassemble, il éduque, il enseigne ces hommes afin qu'ils marchent ensemble en s'entraidant. II sait ce qu'il fait. Lui, lorsqu'il met ensemble des tempéraments si différents, mais aussi des affinités, et des complémentarités. De cet assemblage étonnant, parfois détonnant (!), ii espère faire une communauté de frères capables de s'aimer entre eux et capables d 'accueillir ceux qui passent. Au départ de notre rassemblement, ii y a une oeuvre de grâce, tout au long de notre marche commune, l'oeuvre de grâce se poursuit, et nous espérons que « le Christ nous conduise tous ensemble à la vie éternelle » (RB 72).
Sous une règle, il s'agit bien plus que du règlement pour que la vie communautaire soit possible. Notre règle se veut être une expression concrète de l'Evangile. « Per ducatum
evangelii » (RB Prol 21 ). A la suite du Christ qui appelle, nous avançons sous la conduite de l'évangile, afin de donner à notre vie une saveur qui fasse signe du Royaume à venir. C'est notre avenir dans le Royaume qui éclaire notre présent. Nous n'appliquons pas la règle pour que la vie soit supportable. Mais nous cherchons à travers elle, comme mieux aimer, ce qui sera
la grande activité du Royaume. Aimer mieux le Seigneur dans la prière, aimer mieux nos frères. F. Basile disait encore:« Ecouter ses frères, ne pas faire ce qui nous plait, mais chercher le bien de l'autre et de la communauté. Ecouter son propre coeur pour entendre le murmure de l'Esprit, mais aussi tous les cris des hommes d'aujourd'hui... » (p 36)
Vivre ensemble sous une règle. Et l'abbé? L'abbé est plus qu'un chef parce qu'il faudrait un chef. Mais il est cette figure d'autorité dans laquelle chacun peut apprendre à écouter une autre parole, pour peu à peu reconnaitre et mettre toute sa vie sous l'autorité du Christ.
45. Il nous faut donc instituer une école pour le service du Seigneur.
46. En l'organisant, nous espérons n'instituer rien de pénible, rien d'accablant.
47. Si toutefois une raison d'équité commandait d'y introduire quelque chose d'un peu strict, en vue d'amender les vices et de conserver la charité,
48. ne te laisse pas aussitôt troubler par la crainte et ne t'enfuis pas loin de la voie du salut, qui ne peut être qu'étroite au début.
49. Mais en avançant dans la vie religieuse et la foi, « le cœur se dilate et l'on court sur la voie des commandements » de Dieu avec une douceur d'amour inexprimable.
50. Ainsi, n'abandonnant jamais ce maître, persévérant au monastère dans son enseignement jusqu'à la mort, nous partagerons les souffrances du Christ par la patience, afin de mériter de prendre place en son royaume. Amen.
« II nous faut donc instituer une école pour le service du Seigneur ». Parler de la vie monastique comme d'une école, oui, mais quelle école ? Bien des modèles d'écoles peuvent se bousculer dans notre imaginaire: l'école primaire ou l'on apprend les B.A BA de la culture, ou bien une école collège-lycée où l'on approfondit son champ de vision sur la vie, ou une école prépa courte et très intensive limitées à quelques matières, une école professionnelle etc... Peut-être que l'école de la vie monastique emprunte des aspects à tous ces modèles pour offrir un modèle propre. Ce modèle peut impressionner parfois les gens de l'extérieur par les formes qu'il prend: la rigueur de l'horaire et du cadre de vie, l'espace limite dans lequel nous vivons, la manière de vivre les relations entre nous et sous un abbé, le primat de la prière etc... Mais surtout, la vie monastique est une école assez originale puisqu'elle dure toute la vie. Dans tous les modèles inventoriés ci-dessus, la formation a un temps limite. Ensuite on prend !es rênes de son existence pour la mener a son gré, fort de tous instruments reçus pour se lancer dans la vie professionnelle, familiale et sociale. En choisissant la vie monastique, nous choisissons d'être guidés, aidés. enseignés durant toute notre vie, et cela jusque dans la gestion la plus quotidienne. Car l'école monastique est une école qui veut atteindre un but spécifique et exigent. Elle nous entraine à connaitre Dieu et à servir son dessein de salut pour les hommes. Et cette connaissance ne peut se résumer à un savoir qu'on apprend dans les livres. Connaitre est ici inséparable d'aimer selon le sens biblique. Car nous ne restons pas extérieurs au savoir qu'on acquiert. Non,
connaitre Dieu et son mystère n'est possible que si l'on s'y livre tout entier. Se livrer, se donner dans l'obéissance à un autre, renoncer librement à une certaine indépendance spontanée pour dépendre plus étroitement de la Parole dans l'écoute de l'Esprit Saint. Autrement dit dans cette école, le premier de classe n'est pas forcément celui qui peut faire de belles homélies ou de beaux cours de théologie, mais celui qui se donne vraiment avec humilité à Dieu dans la prière et à ses frères dans la vie commune. Celui-là qui est humble, est vraiment savant puisqu'il se met alors à l'école du Christ son maitre, doux et humble de coeur. Il entre avec toute sa chair dans le mystère de l'humilité du Christ, mystère par lequel se révèle le Coeur de notre Dieu, ainsi que le moyen privilégié qu'il a utilisé et qu'il utilise encore pour sauver le monde. Soyons heureux d'être embarqués dans ce navire-école ! Cultivons le désir d'apprendre. Et si cela se fait à nos dépens, ne soyons pas découragés, le chemin de l'humilité nous surprendra toujours. Demandons à l'Esprit Saint de nous rendre souples en ses mains, confiant comme des enfants.
39. Nous avons donc interrogé le Seigneur, frères, au sujet de celui qui habitera dans sa demeure, et nous avons entendu le précepte donné pour y habiter, mais pourvu que nous remplissions les devoirs incombant à l'habitant.
40. Il nous faut donc tenir nos cœurs et nos corps prêts à servir sous la sainte obéissance due aux préceptes.
41. Et pour ce que la nature en nous trouve impossible, prions le Seigneur d'ordonner au secours de sa grâce de nous l'accorder.
42. Et si, fuyant les châtiments de la géhenne, nous voulons parvenir à la vie perpétuelle,
43. tandis qu'il en est encore temps et que nous sommes en ce corps et qu'il reste le temps d'exécuter tout cela à la lumière de cette vie,
44. il nous faut à présent courir et accomplir ce qui nous profitera pour toujours.
Les lignes entendues rappellent le début du prologue qui s'adresse a celui qui veut servir le Seigneur Christ. le roi véritable avec !es armes puissantes et glorieuses de l’obéissance. Elles rappellent aussi la nécessité de prier pour ce que la nature trouverait en nous impossible à accomplir. Nous tenir prêts, cœur et corps, pour servir sous l’obéissance et demeurer dans la prière au regard de notre faiblesse. Beaucoup d'aspects de notre vie monastique sont ici repérés.
Nous tenir prêts cœur et corps. Comme !es serviteurs de l’évangile qui attendent leur maitre, nous tenir prêts. Cœur et corps, dans une veille et spirituelle et corporelle. On pense spontanément au premier aspect spirituel, avec la garde des pensées. On peut facilement oublier le second, l'attention à notre corps, à son équilibre, à ses besoins, aux signes qu'il donne de fatigue ou de tensions. Nous tenir prêts avec notre corps nous invite à une certaine sagesse. Sachons écouter ou solliciter le regard des autres qui peuvent voir ce qu'on ne voit pas soi-même sur notre propre corps Je disais lors du dernier conseil que nous aurions avantage à continuer de nous faire aider. Travailler nos attitudes, nos postures qui, souvent statiques (assis ou debout), peuvent prendre de mauvais plis si on n'y prend garde. Mardi soir, au noviciat. Gabriel nous disait qu'à Ginette, le sport fait partie de l'équilibre de la formation des prépas, alors que dans d'autres prépas il n'est pas intégré. Dans notre vie monastique, chacun doit veiller à son équilibre corporel et d'exercices physiques, au risque de voir des fatigues s'accumuler par manque d'exercices ou de temps de respiration. Martine Buhrig peut donner de bons conseils. Y-aurait-il d'autres manières de faire ou d'autres aides à trouver pour ceux qui ne se retrouvent pas dans sa proposition. Qu'on n'hésite pas à m'en parler ! Servir sous l'obéissance : toute cette attention du cœur et du corps veut en fait affiner notre capacité à obéir, c'est-à-dire à nous tenir dans cette écoute ajustée à la volonté du Seigneur. Celui-ci ne nous demande pas de nous éreinter ni de nous la couler douce, il nous invite à trouver notre joie dans le don de nous-mêmes. Don qui, ajusté à nos forces présentes, vient agrandir notre désir de nous donner. Demeurer dans la prière, conscient de notre faiblesse. Ce serait nous faire illusion de croire que notre vigilance de cœur et de corps puisse nous suffire pour nous donner. Vite, nous butons sur notre inconstance, sur nos paresses, sur notre errance parfois. Comme Pierre qui a tenté de marcher sur les eaux, il nous faut souvent dire : Seigneur, sauve-moi soutiens-moi !
33. De là aussi la parole du Seigneur dans l'Évangile : « Celui qui écoute ce que je viens de dire et le met en pratique, je le comparerai à un homme sage, qui a bâti sa maison sur la pierre.
34. Les eaux sont venues, les vents ont soufflé et ont heurté cette maison, et elle n'est pas tombée, parce qu'elle était fondée sur la pierre. ;»
35. Achevant ainsi son discours, le Seigneur attend que nous répondions chaque jour par des actes aux saints enseignements qu'il vient de nous donner.
36. Voilà pourquoi les jours de cette vie nous sont accordés comme un sursis en vue de l'amendement de notre mauvaise conduite,
37. selon le mot de l'Apôtre : « Ne sais-tu pas que la patience de Dieu te conduit à la pénitence ? »
38. Car le Seigneur dit, dans sa bonté : « Je ne veux pas la mort du pécheur, mais qu'il se convertisse et qu'il vive. »
« Le Seigneur attend que nous répondions chaque jour ». II nous appelle chaque jour, il attend notre réponse chaque jour. Entre le matin et la nuit, chaque jour est une chance pour nouer avec le Seigneur une relation plus vivante. « Par des actes » mais aussi par une disposition intérieure d'écoute, il s'agit de faire de notre vie une réponse au Maitre de la Vie. Penser notre vie comme un dialogue avec le Seigneur et avec nos frères est une voie tout à fait monastique, une voie à la fois très concrète et une voie très intime. Chaque jour que l'année offrira, nous commencerons par « Seigneur ouvre mes lèvres », ou bien par « Dieu viens à mon
aide». Les premiers mots que la liturgie nous donne de prononcer, nous orientent vers le Seigneur, ensemble et personnellement. Heureux sommes-nous d'être ainsi entrainé à nous tourner vers l'essentiel : le dialogue entre Dieu et sa créature. La pire des choses serait de vivre notre vie monastique comme un monologue, dans une sorte de bulle : je me parle et je me réponds à moi-même, je vis et je calcule et je construis ma vie pour moi-même, j'agis en ne cherchant que mon intérêt. II y a peu, je rencontrais une personne qui me rapportait une conversation avec son frère de 21 ans son ainé. Le jour de l'anniversaire des 94 ans de ce dernier, elle lui dit : « j'ai encore 21 ans pour arriver là » . Et du tac au tac, ce dernier lui a dit :
« Tu as encore 21 ans pour donner du bonheur autour de toi ». Cette femme me disait combien cette parole l'avait surprise. Alors qu'elle est veuve aujourd'hui et qu'elle pourrait se replier sur elle-même, et sur ses soucis, elle repense souvent à la parole de son frère. Elle la reçoit comme un appel à se décentrer d'elle-même pour se tourner vers les autres. Et elle ajoutait combien elle était heureuse d'avoir ainsi découvert que cela changeait sa vie, de se tourner vers les autres au moment où elle voudrait se centrer sur elle-même. II me semble que c'est aussi le secret de notre bonheur dans la vie monastique : jour après jour, nous tourner vers Celui qui nous appelle, dans la liturgie, mais aussi dans les gestes les plus quotidiens pour répondre aux
sollicitations des frères ou des personnes rencontrées sans chercher à vouloir se réserver, du
temps ou son petit confort, voire même une part de gâteau à un libre-service ... En nous donnant ainsi, nous accueillons la vie du Christ qui se donne à travers nous. Et nous recevons alors bien plus que ce que nous croyons pouvoir nous réserver. Je pense en écho à l'hymne que nous chantons le vendredi matin en TO : « c'est un Oui sans réserve que tu dis sur nous par Jésus-Christ, et par lui tu nous donnes encore de répondre « Amen, à ton appel En réponse a ton évangile, que mon oui, soit oui sans condition ».
22. Si nous voulons habiter dans la demeure de ce royaume, on ne saurait y parvenir, à moins d'y courir par de bonnes actions.
23. Mais interrogeons le Seigneur avec le prophète, en lui disant : « ;Seigneur, qui habitera dans ta demeure, et qui reposera sur ta montagne sainte ? »
24. Cette question posée, frères, écoutons le Seigneur nous répondre et nous montrer le chemin de cette demeure,
25. en disant : « C'est celui qui marche sans se souiller et accomplit ce qui est juste ;
26. qui dit la vérité dans son cœur, qui n'a pas commis de tromperie par sa langue ;
27. qui n'a pas fait de mal à son prochain ;; qui n'a pas laissé l'injure atteindre son prochain ;» ;;
28. qui, lorsque le malin, le diable, lui suggérait quelque chose, l'a repoussé loin des regards de son cœur, lui et sa suggestion, l'a réduit à néant, et s'emparant de ses petits – les pensées qu'il lui inspirait – les a écrasés contre le Christ.
29. Ce sont ceux-là qui, craignant le Seigneur, ne s'enorgueillissent pas de leur bonne observance, mais qui, estimant que ce qui est bon en eux ne peut être leur propre œuvre, mais celle du Seigneur,
30. magnifient le Seigneur qui opère en eux, en disant avec le prophète : « Non pas à nous, Seigneur, non pas à nous, mais à ton nom rends gloire ! »,
31. de même que l'Apôtre Paul, lui non plus, ne s'attribuait rien de sa prédication et disait : « C'est par la grâce de Dieu que je suis ce que je suis. »
32. Et il dit encore : « Celui qui se glorifie, qu'il se glorifie dans le Seigneur. »
Pour habiter le Royaume, il faut « courir par de bonnes actions », nous dit Benoit. Courir, travailler ou relever les manches, c'est tout un pour lui. Pourrons-nous en effet vivre dans la lumière du Royaume, habiter au cœur de l'Amour qui est Dieu, si notre cœur s'est fermé à l'amour, s'il ne nous a pas entrainé vers les autres et vers le Seigneur ? Avec cette évidence, Benoit tient une autre évidence : aucun de nous ne peut ou ne pourra se glorifier de cet amour qu'il a ou aura vécu sur cette terre. Autrement dit, dans le Royaume, personne ne pourra arriver avec son curriculum vitae de charité et tous ses diplômes de bonne conduite pour les faire valoir
à l'entrée. L'amour ne supporte pas cette dénaturation. Double conviction de l'urgence de l'amour à donner et de la conscience que l'amour se peut prévaloir de lui-même, au risque de ne plus être amour. L'Esprit nous presse d'aimer comme le Christ et en lui ceux que nous croisons. Et en même temps, nous sommes appelés à oublier ce que nous faisons pour nous tenir les mains vides, dans la conscience que ce que nous avons donné ne venait pas de nous.
Même s'ils sont dits dans un sens un peu différent, nous pouvons faire nôtre les mots de l'hymne de complies en Temps Ordinaire, « oublier l'offrande pour regarder Celui qui veut encore donner ».
Mystère de l'amour dont nous sommes bien les acteurs et en même temps qui nous traverse comme si nous n'y étions pour rien. Si nous y prêtons un peu attention, si nous
regardons ou écoutons ce qui se passe dans notre cœur, dans nos pensées, nous pouvons mesurer qu'il n'est pas facile de vivre ce mystère de l'amour. Nous oscillons tantôt entre une forme de
paresse à nous donner et tantôt entre le besoin de montrer qu'on se donne. Dans les deux cas,
nous voulons garder nos intérêts. Nous voulons bien engager un peu d'argent, mais à condition
que cela nous rapporte. Seul l'Esprit-Saint peut nous entrainer à aimer sans calcul. Demandons-lui cette grâce. Elle fera notre joie et celle des autres.
14. Et se cherchant un ouvrier dans la foule du peuple, à laquelle il lance cet appel, le Seigneur dit de nouveau :
15. « Quel est l'homme qui veut la vie et désire voir des jours heureux ? »
16. Si, en entendant cela, tu réponds : « C'est moi ! », Dieu te dit :
17. « Si tu veux avoir la vie véritable et perpétuelle, interdis le mal à ta langue et que tes lèvres ne prononcent point la tromperie. Évite le mal et fais le bien, cherche la paix et poursuis-la.
18. Et quand vous aurez fait cela, j'aurai les yeux sur vous et je prêterai l'oreille à vos prières, et avant que nous m'invoquiez, je dirai : me voici ! »
19. Quoi de plus doux que cette voix du Seigneur qui nous invite, frères bien aimés ?
20. Voici que, dans sa bonté, le Seigneur nous montre le chemin de la vie.
21. Ceignant donc nos reins de la foi et de l'accomplissement des bonnes actions, avançons sur ses voies, sous la conduite de l'Évangile, afin de mériter de voir celui qui nous a appelés à son royaume.
« Se cherchant un ouvrier dans la foule... » Dans ce bref passage, on peut repérer différentes étapes de ce qu'on pourrait appeler le mystère de la vocation. Nous pouvons regarder ces étapes comme les étapes de notre vocation initiale, celle qui nous a conduit au monastère. Mais nous pouvons aussi les regarder comme un mystère actuel. Nous demeurons des appelés. Heureux sommes-nous si nous nous considérons comme des hommes qui acceptent de se placer sous un appel. Quelles sont donc ces étapes. "Le Seigneur nous cherche, il nous appelle. il nous
guide et nous conseille sous la forme des commandements, il nous promet sa proximité. Ainsi se dessine le chemin qui conduit à « voir celui qui nous a appelé dans son Royaume ».
Comme hier, aujourd'hui encore le Seigneur nous cherche. Il desire pour nous plus que nous n'imaginons spontanément. La nous pourrions nous contenter d'une certaine routine, - au mieux, nous faisons ce qui est demandé- le Seigneur ne cesse de venir nous chercher parce qu'il veut que nous soyons vraiment vivant dans le don de nous-mêmes. Nous endormir sur une certaine satisfaction pourrait nous faire passer à coté de la joie de l'amour qui déborde notre petit confort. Alors le Seigneur nous fait entendre une parole. Son appel peut retentir sous !es formes les plus inattendues : une motion intérieure qui nous entraine à être plus généreux dans la prière, ou bien dans le partage, ou bien dans la vigilance sur soi; mais ce peut-être aussi par une parole entendue dans la liturgie ou la lectio qui ouvre de nouvelles perspectives ; ou encore la parole d'un frère qui me déplace, voire qui me dérange parce qu'elle met le doigt sur ce que je n'ai pas envie de regarder; ce peut-être l'appel à !'aide sous forme d'un service à rendre, d'une lettre à répondre, d'une écoute à offrir... Pour répondre à ces appels, nous ne sommes pas seuls. Le Seigneur nous guide. Souvent un mot des psaumes pourra devenir notre prière, et notre réconfort. Ne nous affligeons pas de voir que nos plans sont modifiés. Laissons-nous guider par ces appels, par ces mouvements de vie portent souvent en eux un dynamisme qui va être bien plus riche que notre routine programmée. Le Seigneur nous conseille encore à travers nos frères auprès desquels nous pouvons vérifier si, lorsqu'ils sont plus importants, ces appels sont vraiment authentiques. Si nous prenons le parti de nous laisser chercher, appeler, déranger vers ces chemins inconnus, ce qui n'a rien à voir avec la dispersion ou la distraction, soyons sûr de la proximité du Seigneur à nos cotés. Déjà nous gouterons des fruits du Royaume qui advient.
8. Levons-nous donc enfin, puisque l'Écriture nous éveille en nous disant : « L'heure est venue de nous lever du sommeil »,
9. et les yeux ouverts à la lumière de Dieu, écoutons d'une oreille attentive ce que la voix divine nous remontre par ses appels quotidiens :
10. « Aujourd'hui, si vous entendez sa voix, n'endurcissez pas vos cœurs ;» ;;
11. et encore : « Qui a des oreilles pour entendre, qu'il entende ce que l'Esprit dit aux Églises. »
12. Et que dit-il ? « Venez, mes fils, écoutez-moi, je vous enseignerai la crainte du Seigneur.
13. Courez, pendant que vous avez la lumière de la vie, de peur que les ténèbres de la mort ne vous atteignent. »
« Ecoutons d 'une oreille attentive ce que la voix divine nous remontre par ses appels quotidiens: « aujourd'hui, si vous entendez ... » En ce matin où nous célébrons l'Immaculée Conception, j'aimerais commenter ces versets en regardant Marie.« Ecoutons d'une oreille attentive». S'il y a une femme qui a su écouter parmi tous les humains, Marie tient certainement la première place. Notre foi catholique la regarde Immaculée en sa conception, sans qu' elle porte la trace du péché. Peut-être qu'une des principales conséquences de cette grâce, est sa qualité d'écoute. Le péché d' Adam et d'Eve est de ne pas avoir vraiment écoute la Parole entendue dans le jardin. Ils ne l'ont pas laissé produire en eux tous ses fruits de grâce. Ils l'ont
oublié pour prêter l'oreille a une autre parole, plus sournoise. Ils ont écouté la parole qui laissait
entendre que Dieu n'était pas si fiable que cela, que sa Parole n'était pas si bonne que cela. A
l'inverse, Marie a su écouter. En elle, pas d'obstacle à l'écoute, rien qui ne bouche ses oreilles du cœur. Cette écoute, elle l'a apprise, expérimenté, travaillé avec son Peuple, en récitant le Shema Israel. Elle a fait confiance à cette Parole de vie. « Le Seigneur ton Dieu est l'unique ...tu aimeras le Seigneur de tout ton cœur ... ». Comme nous le chantons, on peut penser qu'à la différence du nôtre, le« cœur de Marie était rempli d'ineffable attente ». II y avait en elle une
ouverture foncière à son Dieu. Aussi Marie peut-elle se prêter à l'irruption d'une Parole inattendue. « Aucune peur, aucun refus » en elle « ne vient troubler l’œuvre de grâce ». Elle accepte de se laisser bousculer par une Promesse qui aurait pu l'écraser: devenir la mère du Messie, le Fils de David. « Elle a bâti sa demeure dans les vouloirs du Père ». Elle consent à
se laisser faire par cette œuvre de l'Esprit en elle. « Elle offre à Dieu le silence où la Parole habite".
Ouverture, attente, confiance, silence : nous pouvons contempler ainsi en Marie les belles harmoniques de l'écoute. Ces harmoniques qu'elle a reçues comme une grâce, demandons-les par son intercession, pour devenir comme elle, plus engagé dans l'écoute. En
écoutant, faisons toute sa place à notre Dieu, et toute sa place à notre frère. Sainte Marie Mère
de Dieu, servante toute écoutante, prie pour nous pécheur !
1. Il faut prendre soin que personne au monastère, en aucune occasion, ne se permette de défendre un autre moine ou de lui servir comme de protecteur,
2. même s'ils sont unis par un lien de parenté quelconque.
3. Les moines ne se le permettront d'aucune manière, car cela peut être l'occasion de conflits très graves.
4. Si quelqu'un transgresse ce point, on le châtiera rigoureusement.
Défendre un autre frère, s'ériger en défenseur, St Benoit proscrit ce genre de pratique dans le désir de préserver la vie communautaire de toute semence de zizanie. Et pourquoi y aurait-il besoin de défenseur? Ce type de problématique n'est-il pas le signe que quelque chose ne va pas dans la communauté ? Les conflits ou les situations d'injustice doivent se régler de manière ouverte, sans recours à des procédés occultes plus ou moins avouables. Certainement alors, il revient à l'abbé de veiller à créer un climat de recherche de justice ou chacun peut être entendu lorsqu'il a de quoi se plaindre, à propos d'un frère ou d'une situation injuste. A l'abbé de prendre ensuite des mesures pour que les choses se règlent dans l'équité. Veillons à ce que les choses ne s'enveniment pas. Lorsque quelque chose ne va pas : sachons en parler sans larder, pour que correction ou réparation soit faite.
Plus profondément cette question de la défense d'un frère par un autre, renvoie à notre égalité foncière sous le regard de Dieu. S'il y a un défenseur, c'est Dieu lui-même. Et de nous tous, il se soucie fondamentalement. Nous sommes invités à un regard de foi. Dans la bible, le mot « défenseur », renvoie au mot "Go'el", qu'on traduit aussi bien comme défenseur, vengeur que comme rédempteur-racheteur. Les deux notions assez distinctes se sont peu à peu
unifiées. Le défenseur-vengeur, « le vengeur du sang » était celui qui avait la charge de tuer un meurtrier, pour faire justice à celui ou ceux que le meurtrier avait lésé (Nb 35, 18,21). Le rédempteur ou racheteur est celui (souvent un proche parent) qui avait droit de racheter en payant
pour lui, une personne qui s'était mise en situation de dettes, voire d'esclavage. En payant pour
cette personne. le racheteur ou rédempteur lui permettait par ex de retrouver son patrimoine familial, ou sa condition d'homme libre (Lv 25, 25,47-49). Attaché à des pratiques très concrètes, le rôle de Go'el, vengeur-rédempteur, a été attribué à Dieu lui-même dans sa relation
avec son peuple. Le prophète Isaïe se saisit de ce titre pour dire l'intervention et la proximité de Dieu : « ainsi parle le Seigneur, votre rédempteur, le Saint d'Israël : en votre faveur, j'envoie une expédition à Babylone, je fais tomber tous !es verrous .." (Is 43, 14). Dieu va racheter, libérer son peuple de la servitude de l'exil. Avec Jésus, le rédempteur prend la forme du serviteur qui rachète en versant son propre sang. Il devient par sa mort et par sa résurrection Celui qui est notre défenseur auprès de Dieu, comme l'affirme la 1° de St Jean. Et pour notre pèlerinage sur cette terre, Jésus lui-même nous promet un autre défenseur, l'Esprit Saint qui
nous enseignera ce qu'il faut dire face à nos adversaires. Que craindre dès lors ? manquons-nous vraiment de défenseur ? Sachons prendre appui sur Celui qui marche à nos côtés...