vendredi 7 novembre 2025 : journée de solitude pour la communauté
(eucharistie vers 6h45, juste après Laudes). 

Commentaires sur la Règle



Voir le commentaire de Frère Yvan / Chapitre 72 1-12 Du bon zèle que doivent avoir les moines écrit le 15 juillet 2016
Verset(s) :

1. S'il existe un zèle mauvais et amer qui sépare de Dieu et conduit en enfer,

2. il existe aussi un bon zèle qui sépare des vices et conduit à Dieu et à la vie éternelle.

3. Tel est donc le zèle que les moines pratiqueront avec un ardent amour ;:

4. ils « se préviendront d'honneurs mutuels » ;

5. ils supporteront sans aucune impatience leurs infirmités corporelles et morales ;;

6. ils s'obéiront à l'envi ;

7. personne ne recherchera ce qu'il juge être son avantage, mais plutôt celui d'autrui ;;

8. ils pratiqueront la charité fraternelle avec désintéressement ;;

9. avec amour ils craindront Dieu ;

10. ils affectionneront leur abbé d'une charité sincère et humble ;;

11. « ils ne préféreront absolument rien au Christ. ;»

12. Que celui-ci nous fasse parvenir tous ensemble à la vie éternelle ;!

Commentaire :

Ce qui est remarquable dans ce chapitre, c'est qu'il nous offre une

image du cœur de l'homme. En deux phrases Saint Benoit dresse ce

portrait. Il commence au premier verset par citer le zèle amer. Mais

à partir du second verset, et jusqu'au bout, il nous décrit le bon zèle,

sans plus revenir sur le zèle amer.

Saint Benoit nous montre donc l'humanité, quand elle est

transformée par la rencontre de Dieu. D'une part il est lucide, car il

sait que le mal existe. Que la méchanceté est monnaie courante.

Que l'amertume et l'aigreur enferment ceux qui s'y laissent aller

dans un véritable enfer.

Mais il s'émerveille surtout du bien. Car ce qui est étonnant, ce n'est

pas le mal. Cette pente sur laquelle nous glissons si facilement. Mais

c'est le bien. Voilà la bonne nouvelle, au terme de la Règle. Le bien

est possible. Il est appelé à prendre de plus en plus de place dans

nos vies.

Saint Benoit est donc lucide, mais plein d'espérance. Et nous

sommes tous appelés à cette transformation intérieure, qui consiste

à être lucides sur le mal. En nous, d'abord, puis autour de nous.

Mais à rayonner d'espérance, parce que le Christ a vaincu le mal,

une fois pour toutes.

Nous le savons tous d'expérience, ce n'est pas parce que l'on aime

que l'on entre au monastère. C'est pour apprendre à aimer. Et pour

apprendre à aimer, Benoit nous engage à pratiquer ces actes

d'amour qui, peu à peu, avec le temps, vont transformer notre être

profond, éveiller cet amour qui vit au plus profond de notre cœur.

Pour Benoit, l'amour, c'est la manière d'être de Dieu lui-même, qui

ne fait pas de différences entre nous. (15/7/16 )

Voir le commentaire de Frère Yvan / Chapitre 71/6-9 Que l'on s'obéisse mutuellement. écrit le 14 juillet 2016
Verset(s) :

6. De plus, si un frère reçoit une réprimande quelconque de l'abbé ou de n'importe lequel de ses anciens pour quelque raison que ce soit, si mince qu'elle puisse être,

7. et s'il sent que l'esprit de n'importe quel ancien est légèrement irrité contre lui ou ému si peu que ce soit,

8. aussitôt et sans délai il se prosternera à terre et fera satisfaction, étendu à ses pieds, jusqu'à ce qu'une bénédiction vienne calmer cette émotion.

9. Celui qui refuse de faire cela, on lui infligera un châtiment corporel, ou bien, s'il est obstiné, on le chassera du monastère.

Commentaire :

Pourquoi l'obéissance est-elle la voix qui mène à Dieu?

Saint Benoit nous donne la clé de sa doctrine de l'obéissance dans

les versets que nous venons d'entendre. Là, il met en scène le frère

qui s'aperçoit qu'il en a contristé un autre. Aussitôt, il se jette à ses

pieds, pour obtenir une bénédiction. Cela peut paraître curieux, car

Benoit ne fait pas référence à un ordre reçu, simplement à un signe

de contrariété. Pour St Benoit, la voie de l'obéissance passe par ce

grand respect de l'autre.

C'est un chemin d'oubli de soi, de mon désir, de mon idée sur la

manière de faire. L'obéissance n'est donc pas une conformité un

peu raide à des ordres reçus d'une hiérarchie. Elle est plutôt une

attention à ce qui n'est pas moi. Parce que l'autre, parce que Dieu a

du prix pour moi. La voie de l'obéissance est donc bien chemin

d'amour. Nous devons essayer d'être plus disponibles, plus dociles à

la grâce, pour arriver à l'humilité. Un effort d'humilité, c'est un

progrès dans la charité.

Chez St Benoit, l'obéissance n'a donc rien à voir avec une

quelconque disciple militaire. Même si discipline signifie l'art d'être

disciple. L'obéissance est cet art de l'ouverture à l'autre, qui est le

propre de toute la révélation biblique. Dans l'Ecriture, Dieu cherche

une oreille attentive. Il incline l'oreille de ceux qu'il aime, pour qu'ils

écoutent sa Parole. Cet art spirituel s'apprend dans les toutes

petites choses de la vie.

Celui qui n'entend pas la voix de son Abbé, de ses frères, n'entendra

pas non plus le doux murmure de Dieu, au fond de son cœur.

(14/7/16 )

Voir le commentaire de Frère Yvan / Chapitre 71/1-5. Que l'on s'obéisse mutuellement. écrit le 13 juillet 2016
Verset(s) :

1. Ce n'est pas seulement envers l'abbé que tous doivent pratiquer le bien de l'obéissance, mais en outre les frères s'obéiront mutuellement,

2. sachant que par cette voie de l'obéissance ils iront à Dieu.

3. Aussi, mis à part les ordres de l'abbé ou des prévôts qu'il institue, ordres auxquels nous ne permettons pas que l'on préfère ceux des particuliers,

4. pour le reste tous les inférieurs obéiront à leurs anciens en toute charité et empressement.

5. Si quelqu'un est pris à contester, on le réprimandera.

Commentaire :

St Benoit fait un raccourci saisissant entre l'obéissance et l'amour de

Dieu! Saisissant, mais pas si évident: pourquoi, l'obéissance nous

conduirait-elle à Dieu? Ce qui est certain, c'est que Benoit lui

attache une grande importance, puisque les deux chapitres qu'il lui

consacre, 5 et 71, semblent enserrer toute la doctrine spirituelle de

la Règle.

Une maxime exprime avec force cette conviction: L'obéissance est

la voie par laquelle on va à Dieu. Cette parole nous fait penser à

l'itinéraire proposé au novice: « les choses dures et âpres par

lesquelles on va à Dieu ». Et aussi à la grande perspective tracée au

début du Prologue: « revenir par une obéissance laborieuse à Celui

dont on s'était écarté par une désobéissance paresseuse ». Cette

perspective immense et indéterminée, nous la voyons se concrétiser

ici en une foule d'actes précis, qui remplissent toute l'existence du

moine.

Peu importe que le frère soit plus ou moins qualifié pour donner un

ordre. Peu importe la qualité objective de ce qu'il commande,

l'obéissance est toujours un bien pour celui qui veut suivre le Christ.

Elle nous fait pratiquer le renoncement à nous-même, et l'humilité,

l'imitation du Christ et la charité.

C'est ce que nous disait le troisième degré d'humilité: « le 3ème

degré d'humilité est que, pour l'amour de Dieu, on se soumette au

supérieur en toute obéissance, imitant le Seigneur, dont l'Apôtre

dit: S'étant fait obéissant jusqu'à la mort », C'est aussi ce que

Benoit indiquait quand il parlait des choses impossibles: nous

obéissons par amour. Obéir, c'est prendre l'attitude du serviteur. A

la dernière Cène, le Christ a fait de cette attitude l'exemple de

l'amour suprême. (13/7/16 )

Voir le commentaire de Frère Yvan / Chapitre 70 1-7 Qu'on ne se permette pas de frapper à tord et travers. écrit le 12 juillet 2016
Verset(s) :

1. On évitera, au monastère, toute occasion de présomption,

2. et nous décrétons que personne n'aura le droit d'excommunier ou de frapper aucun de ses frères, s'il n'en a reçu pouvoir de l'abbé.

3. Mais « on reprendra les coupables en présence de tous, afin de faire peur aux autres. ;»

4. Quant aux enfants jusqu'à l'âge de quinze ans, tous auront soin de les maintenir dans l'ordre et les surveilleront,

5. mais en toute mesure et raison.

6. Si quelqu'un se permet quoi que ce soit contre un adulte sans instructions de l'abbé ou s'emporte sans discrétion contre des enfants, il subira les sanctions de règle,

7. car il est écrit : « Ce que tu ne veux pas qu'on te fasse, ne le fais pas à autrui. ;»

Commentaire :

Il peut arriver qu'un frère un peu plus ancien soit tenté de faire des

remarques à un frère plus jeune. Benoit maintient le droit de

correction exclusif à l'Abbé. Aucun frère ne peut l'usurper. Déjà St

Pacôme notait que personne, au monastère, ne doit reprendre un

frère, si l'Abbé ne l'y a autorisé.

Ne disons pas: ce n'est pas ma tendance. Car nous avons tous plus

ou moins ce défaut qui consiste à juger les autres. Nous pensons

que ce serait quand même mieux s'ils pensaient et agissaient

comme nous-mêmes. Saint Benoit nous met en garde. Pourquoi

vouloir niveler tout le monde? Chacun a son visage particulier, et

chacun est aimé par le Christ. Chacun est travaillé par le Christ d'une

manière très personnelle. Le cœur de mon frère est un mystère.

Nous sommes réunis ensemble par Dieu. C'est avec ces frères que

nous avons à faire notre salut. Que nous devons apprendre à aimer.

Sachons nous réjouir de tout le bien que nous voyons. Et nous

réjouir aussi lorsqu'il nous faut pratiquer la patience. Souvent ce

n'est pas une chose grave qui nous irrite, mais, jour après jour, elle

peut être l'occasion de beaucoup de charité.

Avoir tellement le zèle de la perfection de ses frères, que l'on passe

son temps à les épier: c'est une charité mal comprise! La perfection

ne s'impose pas. Si on voit une imperfection chez l'autre, prier pour

ce frère. Appliquons-nous à nous mettre à la place des autres. A les

aider de toutes nos forces par la prière, et par la générosité à vivre

nous-mêmes avec fidélité notre vie monastique. Se corriger soi-

même, nous savons bien que c'est un rude travail !

Avant de vouloir réformer les autres, désirons la sainteté pour nous-

mêmes. Si nous nous engageons sur ce chemin de perfection, nous

serons plus indulgents. (12/7/16 )

Voir le commentaire de Frère Yvan / Chapitre 69 Qu'on ne se permette pas au monastère de défendre un autre. écrit le 09 juillet 2016
Verset(s) :

1. Il faut prendre soin que personne au monastère, en aucune occasion, ne se permette de défendre un autre moine ou de lui servir comme de protecteur,

2. même s'ils sont unis par un lien de parenté quelconque.

3. Les moines ne se le permettront d'aucune manière, car cela peut être l'occasion de conflits très graves.

Commentaire :

Nous pourrions nous étonner de la vigueur avec laquelle Benoit

réagit dans ce chapitre. Il y a une saine capacité d'indignation, face à

l'injustice et à la méchanceté. Dans certaines situations, nous

pourrions même avoir le sentiment de trahir ce qu'il y a de plus

noble et de plus authentique en nous, si nous ne prenions pas la

défense du plus pauvre, du plus petit.

La Bible est scandée par la défense de la veuve et de l'orphelin, du

pauvre opprimé, du juste persécuté. Jésus lui-même a été le premier

à s'insurger contre ceux qui chargent leurs frères de pesants

fardeaux, ceux qui condamnent sans appel celui ou celle qui a

péché. Cette résistance à l'injustice, à l'oppression, au mensonge,

est au cœur du message évangélique. Elle demande parfois

beaucoup de courage, un authentique don de soi. Il faut même

espérer que la vie monastique, loin d'émousser cette capacité

d'indignation, l'affine et la développe.

Mais ce n'est pas cela que vise Saint Benoit dans ce chapitre. Son

unique but, tout au long de la Règle, est de guérir notre humanité

blessée. Lui rendre sa dignité, sa splendeur originelle. En fait, Benoit

sait que bien souvent, quand nous défendons un frère, c'est d'abord

nos propres intérêts, notre opinion, notre relation avec lui que nous

défendons.

En cherchant à le protéger, c'est plutôt nous même que nous

protégeons. Il faut beaucoup de courage pour aimer vraiment, pour

oser aimer en vérité. Ce courage suppose une profonde lucidité sur

ce qui nous anime, au plus intime de nous-même. Cette lucidité

suppose que nous soyons capables de prendre du recul, même vis-à-

vis de notre propre indignation. Et que nous ayons l'humilité

d'accepter que d'autres nous aident à voir clair. (9/7/16 )

Voir le commentaire de Frère Yvan / Chapitre 68 1-5 Si l'on enjoint à un frère des choses impossibles. écrit le 08 juillet 2016
Verset(s) :

1. Si l'on enjoint à un frère des choses pénibles ou impossibles, il recevra l'ordre de celui qui commande en toute douceur et obéissance.

2. S'il voit que le poids du fardeau excède absolument la mesure de ses forces, il représentera à son supérieur, patiemment et opportunément, les raisons de son impuissance,

3. sans orgueil ou résistance ni contradiction.

4. Si, après ses représentations, l'ordre du supérieur se maintient sans qu'il change d'avis, l'inférieur saura qu'il est bon pour lui d'agir ainsi,

5. et par charité, confiant dans le secours de Dieu, il obéira.

Commentaire :

Ces chapitres qui terminent la Règle présentent notre vie de moine

dans toute sa difficulté et la générosité qu'elle demande. Pour les

comprendre, il faut mettre notre vie devant Dieu. Et entendre

l'appel qu'il a adressé à ses serviteurs tout au long de la Bible:

Abraham, Samuel, les prophètes, tous les saints de l'Ancien

Testament. Et Jésus: « le Serviteur ». Et entendre l'appel du Christ

: « Viens, suis-moi ».

« Le poids du fardeau» : Tout le monde passe par là, pas seulement

les moines! Pourquoi? Nous sommes appelés à aimer. Nous

sommes appelés à la perfection de l'amour. Et en même temps nous

sommes marqués par le poids de l'égoïsme, du péché. Avec le recul,

nous pouvons constater que ce qui a été le meilleur pour nous, dans

notre vie, ce n'est pas ce qui a été le plus facile. C'est par rapport à

Dieu que nous devons regarder toutes choses.

« Confiant dans le secours de Dieu, il obéira ». Ce n'est pas un

homme qui nous demande cette chose impossible, c'est Dieu lui-

même. Il n'attend pas de nous une réponse d'esclave qui se soumet

à contre cœur, mais une réponse de fils. Ce n'est plus moi qui obéis,

c'est le Christ qui obéit en moi. Le supérieur peut se tromper, la

chose demandée peut être impossible. La foi est-elle alors mise en

échec? Non. D'abord, est-ce vraiment sûr que ce soit impossible?

Et si oui, vraiment, l'humble ouverture au supérieu r n'en est pas

moins filiale, plus agréable à Dieu que l'exécution aveugle d'un

ordre que l'on sait absurde, afin de prouver au supérieur qu'il s'est

trompé.

En toutes occasions, nous ra lIier à l' obéissa nce du Ch rist. A son

attitude vis-à-vis de son Père. La patience que Dieu nous demande

n'est pas passivité. La passivité est faiblesse, lâcheté. L'impatience

est une forme d'orgueil. Mais la patience est force d'âme. Elle est

humilité. (8/7/16)

Voir le commentaire de Frère Yvan / Chapitre 67 1-7 Des frères envoyés en voyage. écrit le 07 juillet 2016
Verset(s) :

1. Les frères qui vont partir en voyage se recommanderont à l'oraison de tous les frères et de l'abbé,

2. et à la dernière oraison de l'œuvre de Dieu, on fera toujours mémoire de tous les absents.

3. Quant aux frères qui reviennent de voyage, le jour de leur retour, à toutes les heures canoniales, quand s'achève l'œuvre de Dieu, ils se prosterneront sur le sol de l'oratoire

4. et demanderont à tous de prier en raison de leurs manquements, de peur de s'être laissé prendre en voyage à voir ou entendre une chose mauvaise ou une parole déplacée.

5. Et personne ne se permettra de rapporter à un autre tout ce qu'il aura vu ou entendu hors du monastère, car cela fait de très grands ravages.

6. Si quelqu'un se le permettait, il subira le châtiment de règle.

7. De même celui qui se permettrait de sortir de la clôture du monastère et d'aller n'importe où et de faire n'importe quoi, même de peu d'importance, sans l'autorisation de l'abbé.

Commentaire :

Lorsque nous avons à sortir du monastère, nous pouvons essayer de

le faire en nous inspirant des Evangiles d' « envoi en mission ». Celui

que nous avons entendu dimanche dernier par exemple. Quel que

soit le motif de notre voyage, nous avons toujours à rendre

témoignage au Christ. Par notre simplicité, « comme des agneaux au

milieu des loups ». Par notre réserve et notre discrétion, sur la vie

de la communauté. Par notre paix et notre charité. Nous sentir

envoyé en mission peut nous aider à trouver les attitudes qui

conviennent.

Regardons le Christ, à travers les pages de l'Evangile. Il est passé en

faisant le bien. Faire le bien, c'est donner la vie. « Je suis venu pour

qu'ils aient la vie en plénitude ». Nous de même, lorsque nous

sommes en voyage, nous pouvons nous considérer comme envoyés

pour faire le bien, pour témoigner de la présence de Dieu parmi les

hommes. Passer dans le monde, comme le Christ: non pas en nous

laissant captiver par tous les côtés superficiels, anecdotiques, mais

en nous efforçant de découvrir la Présence de Dieu dans le cœur de

ceux que nous croisons. Car Dieu est présent dans le cœur de

chacun. Il aime chacune de ces personnes.

Nous intéresser d'abord à Dieu. Voir en toute personne un enfant de

Dieu. Cela nous aide à nous intéresser au monde et aux autres, pour

Dieu, et non pas pour nous-mêmes. Cette vue de foi permet de

discerner ce que vous avons à faire et à dire lorsque nous sommes

au dehors. Faut-il faire telle démarche? Faut-il dire telle parole? La

fidélité à Dieu nous donnera la réponse. Ne craignons pas de

surprendre, d'étonner même, parfois. Ne soyons pas du monde. Ne

soyons pas mondains, comme aime à le répéter le Pape François.

Nous sommes faits pour Dieu. C'est le témoignage que nous avons à

donner au monde. Celui dont le monde a besoin. (7/7/16)

Voir le commentaire de Frère Yvan / Chapitre 66/6-8 Des portiers du monastère écrit le 06 juillet 2016
Verset(s) :

6. Quant au monastère, il doit être, si possible, construit de telle façon que tout le nécessaire, c'est-à-dire l'eau, le moulin, le jardin et les divers métiers, s'exerce à l'intérieur du monastère,

7. de sorte que les moines ne soient pas obligés de courir au-dehors de tous les côtés, car ce n'est pas bon du tout pour leurs âmes.

8. Nous voulons que cette règle soit lue souvent en communauté, pour qu'aucun frère ne s'excuse sur son ignorance.

Commentaire :

La porte du monastère est un sas, entre deux mondes. Et le gardien

du passage entre ces deux mondes, c'est le portier. Le monde du

dehors est constitué de tous ceux qui frappent à la porte: des

pauvres d'abord, qu'il convient d'accueillir avec la bonté et la

sérénité que confère la crainte de Dieu. Le monde du dehors, pour

Benoit, n'est pas un monde mauvais, contre lequel il faudrait se

défendre. Car accueillir celui qui frappe à la porte, c'est accueillir le

Christ en personne.

Et puis, il y a le monde du dedans. Et Benoit tient à ce que le

monastère soit organisé de telle sorte que le moine ne soit pas

obligé de sortir sans cesse. Il insiste: l'eau, le moulin, le jardin, les

métiers, tout doit être dedans. Pourquoi donc? Benoit aurait-il

changé d'avis, lui qui vient de nous dire que ce monde du dehors

n'est pas mauvais! Il s'explique: « que les moines ne soient pas

obligés de courir dehors de tous côtés. Car ce n'est pas bon du tout

pour leurs âmes ». Pour Benoit, ce qui est mauvais, ce n'est pas le

monde, mais cette tendance que nous avons tous à nous répandre,

à nous disperser à l'extérieur. Là encore Benoit reste fidèle à

l'Evangile, car ce qui rend l'homme impur, c'est ce qui sort de son

cœur. Ce désir qui nous entraîne à courir de tous côtés, à nous

disperser en choses vaines.

La clôture du monastère est aussi cela: cette conscience de notre

pauvreté, de nos faiblesses, qui nous empêchent de trouver le

chemin de notre cœur, et nous poussent à chercher au dehors, dans

des distractions, ce que nous avons renoncé à chercher au-dedans.

Nous avons à travailler sans cesse pour que notre vie, que notre

cœur, soient bien centrés là où Dieu nous a appelés.

Ce chapitre était sans doute, dans une première rédaction, le

dernier de la Règle. Le dernier verset que nous venons d'entendre

sonne comme une conclusion. Et la R.M. se termine par ce chapitre

sur les portiers. Ces prescriptions sur la porte et le portier sont une

manière très naturelle de clore la Règle, aussi bien que le

monastère. Puis des questions nouvelles ont amené Benoit à insérer

6 chapitres supplémentaires, avant l'épilogue. (6/7/16 )

Voir le commentaire de Frère Yvan / Chapitre 66/1-5 Des portiers du monastère. écrit le 05 juillet 2016
Verset(s) :

1. A la porte du monastère on placera un vieillard sage, qui sache recevoir et donner une réponse, et dont la maturité ne le laisse pas courir de tous côtés.

2. Ce portier doit avoir son logement près de la porte, afin que les visiteurs le trouvent toujours présent pour leur répondre.

3. Et aussitôt que quelqu'un frappe ou qu'un pauvre appelle, il répondra Deo gratias ou Benedic ,

4. et avec toute la douceur de la crainte de Dieu, il se hâtera de répondre avec la ferveur de la charité.

5. Si ce portier a besoin d'aide, il recevra un frère plus jeune.

Commentaire :

Le rôle du portier est important pour la paix du monastère. St Benoit

demande que ce soit un frère judicieux, prudent, capable de

recevoir, et de donner une réponse. Un homme plein de charité.

Nous remercions frère Alban, et les frères qui l'aident dans cette

charge.

En parlant du portier, ce chapitre parle de la clôture du monastère.

Elle n'est pas le fait d'hommes égoïstes, qui veulent vivre

tranquillement chez eux! « Que les autres nous laissent

tranquilles» n'est pas la définition de la charité! Si c'était cela,

notre clôture serait la pire des choses. Elle est une affaire d'amour:

que le Seigneur puisse travailler dans chacun de nos cœurs. Que les

hôtes, tous ceux qui passent, trouvent une maison habitée par Dieu.

Qu'ils se sentent invités à se mettre à son écoute.

Dans ces quelques phrases sur le portier, nous trouvons aussi la

définition du cœur du moine, de tout chrétien. Nous sommes ceux

qui avons entendu une parole, et qui devons donner une réponse.

Avant de répondre, commencer par entendre, par écouter, par

goûter cette parole. Cette parole est celle de Dieu. Dieu n'a qu'une

Parole, sa Parole incarnée, Jésus. Notre vie entière est un écho,

prolongé à tous les instants de notre vie, de cette Parole unique.

Mais comment donnerons-nous notre réponse, à chaque coup

frappé à la porte de notre cœur, si nous ne nous sommes pas rendus

attentifs, à l'écoute de cette Parole. Dans notre vie, il ya des temps

forts, des heures privilégiées, où il nous est donné de recevoir plus

directement cette parole, de la méditer, de nous laisser pénétrer et

assimiler par elle: l'Office Divin, la Lectio Divina, l'Eucharistie,

l'Oraison. Mais c'est à toutes les heures du jour et de la nuit que se

réalise l'Incarnation, et qu'il nous faut être là.

Que le Seigneur, quand il s'adresse à nous, trouve toujours

quelqu'un à qui parler! (5/7/16 )

Voir le commentaire de Père Abbé Luc / Chapitre 65, 11-22 Du prévôt du monastère. écrit le 02 juillet 2016
Verset(s) :

11. Aussi nous semble-t-il opportun, pour la sauvegarde de la paix et de la charité, que l'abbé règle à son gré l'organisation de son monastère.

12. Si faire se peut, c'est par des doyens que l'on organisera, comme nous l'avons établi antérieurement, tous les services du monastère, selon que l'abbé l'établira.

13. Ainsi, plusieurs en étant chargés, un seul ne s'enorgueillira pas.

14. Si le lieu l'exige ou si la communauté le demande raisonnablement avec humilité et que l'abbé le juge opportun,

15. l'abbé choisira qui il voudra avec le conseil des frères qui craignent Dieu, et il se l'ordonnera lui-même comme prévôt.

16. Ce prévôt, cependant, exécutera respectueusement ce que son abbé lui commande, sans rien faire contre la volonté ou les ordres de l'abbé,

17. car plus il est élevé au-dessus des autres, plus il lui faut observer avec soin les prescriptions de la règle.

18. Si ce prévôt se montre vicieux ou que, séduit par l'élèvement, il s'enorgueillisse, ou qu'il soit convaincu de mépris pour la sainte règle, on l'avertira verbalement jusqu'à quatre fois.

19. S'il ne s'amende pas, on lui appliquera la correction des sanctions de règle.

20. Si même alors il ne se corrige pas, on le destituera de son rang de prévôt, et l'on mettra à sa place un autre qui en soit digne.

21. Si même ensuite il n'est pas tranquille et obéissant en communauté, on ira jusqu'à le chasser du monastère.

22. Cependant l'abbé songera qu'il doit rendre compte à Dieu de tous ses jugements, de peur que le feu de l'envie ou de la jalousie ne brûle son âme.

Commentaire :

Ce chapitre n'est pas, comme je le disais, très agréable à entendre. Mais dans cette

seconde partie, il nous donne un bon exemple de processus de discernement pour savoir s'il

est opportun ou non d'avoir un prieur. Dans ce discernement, tous les rouages de la vie

communautaire interviennent: l'abbé, la communauté, le conseil des frères. L'abbé donne

l'impulsion en vue de régler comme bon lui semble « l'organisation du monastère N. C'est à

lui que revient la décision finale. Ici, Benoit penche plutôt pour une organisation qui se passe

d'un prieur. Mais l'abbé n'est pas autocrate. Il écoute la communauté qui peut exprimer le

désir d'avoir un prieur. Comment discerner si cette demande est juste? Benoit donne un

critère qui lui est cher: que la communauté exprime sa requête « raisonnablement avec

humilité ». Si c'est le cas, l'abbé prend conseil pour choisir qui il voudra. Il s'appuie sur les

frères qui craignent Dieu, pas nécessairement ceux qui sont au conseil.

Nous avons ici donc un bel exemple de la manière de discerner dans une communauté

monastique: chacun est à l'écoute de l'autre. La communauté écoute l'abbé, mais l'abbé

écoute la communauté et il prend conseil de frères sages. Comment vit-on cette écoute

mutuelle? Pour St Benoit, la manière de vivre les choses est toujours très importante. Chacun

sera un instrument utile dans le discernement communautaire, s'il est d'abord lui-même dans

une attitude d'écoute spirituelle, c'est-à-dire toujours à l'affût de faire la volonté de Dieu. La

communauté manifestera la qualité de son écoute de Dieu en parlant « raisonnablement avec

humilité », Les frères qui donnent leur conseil à l'abbé, sont des frères « qui craignent Dieu »,

c'est-à-dire des frères qui veulent demeurer attentifs à Dieu. Enfin l'abbé lui-même est

sommé de ne pas oublier le jugement de Dieu, qui en dernier recours discernera entre le juste

et l'injuste. L'abbé est ainsi engagé à veiller sur lui-même, afin que ses décisions ne soient

pas mues «par lefeu de l'envie ou de la jalousie ». Benoit nous donne une méthode pour

apprendre à nous écouter et à nous concerter dans la recherche du bien commun. Mais ces

moyens ne porteront tous leurs fruits, que si chacun cherche pour lui-même à se tenir au plus

juste devant Dieu ... Ne nous lassons pas d'essayer de nous accorder à la volonté de Dieu. (02/07/2016)