vendredi 15 août 2025 : fête de l’Assomption, horaire des dimanches (vigiles la veille à 20h45, messe à 10h) + concert à 16h.

Nota : L’office de None (14h45) sera prié au dolmen de ND de la Pierre-qui-Vire.

Commentaires sur la Règle



Voir le commentaire de Père Abbé Luc / Chapitre 31, v 13-15 Du cellérier écrit le 10 mai 2011
Verset(s) :

13. Qu'il ait avant tout l'humilité, et quand il n'y a rien à donner à quelqu'un, qu'il lui offre en réponse une parole aimable,

14. comme il est écrit : « Une parole aimable surpasse le don le plus précieux. »

15. Tout ce que l'abbé lui enjoindra, il en aura la responsabilité ; ce qu'il lui interdira, il ne se le permettra pas.

Commentaire :

« Qu’il ait avant tout l’humilité, quand il n’y a rien à donner ». Le cellérier, comme l’abbé, comme chacun des frères responsables d’un domaine n’est pas tout puissant. Il ne peut pas tout donner, ni tout faire, soit parce que ce n’est pas possible matériellement, soit parce que cela n’est pas permis par la règle. Etre responsable ne veut donc pas dire être tout puissant dans ce secteur. Il y aurait une belle illusion à le penser et à se comporter en grand seigneur qui donne abondamment sans compter. L’illusion ne serait pas moindre chez celui qui retient tout comme s’il était propriétaire des choses à lui confiées. C’est dire que chacun de nous responsable d’un secteur devons demeurer vigilants dans notre gestion. Nous avons tous des comptes à rendre, à l’abbé, à la communauté, devant la règle parce que fondamentalement nous voulons être serviteur de Dieu. Le servir lui et nos frères. C’est cette vive conscience qui peut nourrir et fortifier en nous l’humilié. Humilité qui ne sera pas démission ou aplatissement de soi. Mais humilité qui fera signe, qui aidera les regards à se tourner vers Celui que nous voulons tous servir en venant au monastère. Cette humilité ne brise pas la relation fraternelle. Quand on ne peut rien donner, on peut toujours dire une parole aimable. Dans la vive conscience que l’on n’est qu’un serviteur, nous n’avons pas à avoir peur de nos frères. Mais humblement on peut leur donner une parole aimable, une parole de réconfort ou d’encouragement à la patience. Une parole qui signifie que l’on est ensemble pour affronter le fait qu’il n’y a rien ou pour mesurer que l’on marche sur un même chemin avec les mêmes exigences monastiques. Et si le frère qui demande s’entête ou veut faire pression, humblement le frère qui reçoit la demande et ne peut donner renverra à l’abbé ou à un tiers compétent. Apprenons à travers cette recommandation de Benoit à ne pas avoir peur des demandes inopportunes ou impossibles. Avec humilité, gardons avant toute chose le lien de la charité. (2011-05-10)

Voir le commentaire de Père Abbé Luc / Chapitre 31, v 12-13 Du cellérier écrit le 05 mai 2011
Verset(s) :

12. Il ne cédera pas à l'avarice ni ne sera prodigue ou dissipateur de l'avoir du monastère, mais il fera tout avec mesure et selon les ordres de l'abbé.

13. Qu'il ait avant tout l'humilité, et quand il n'y a rien à donner à quelqu'un, qu'il lui offre en réponse une parole aimable,

Commentaire :

Céder à l’avarice, être prodigue ou dissipateurs des biens du monastère. Voilà deux attitudes opposées mais qui s’enracine dans une même disposition intérieure : vivre en considérant les biens que l‘on gère comme ses propres biens ; alors qu’ils sont ceux du monastère. Cette tentation peut guetter plus fortement le cellérier, le comptable ou l’abbé mais elle peut aussi toucher chacun des moines dans la gestion de son secteur d’activité ou bien quand il sort. Nous touchons là un lieu très sensible de la désappropriation que nous voulons vivre par notre profession monastique. Nous ne faisons pas vœu de pauvreté au sens strict du terme, mais vœu de conversion selon la RB qui offre des repères précis en ce domaine. La RB nous entraine dans une manière de vivre qui nous laisse libre par rapport aux biens. Loin de l’esprit du propriétaire, loin de l’esprit du richard dépensier. Nous ne sommes que des usagers de tout ce qui est à notre disposition. Sommes-nous conscients de la chaque que nous avons d’apprendre cette manière de vivre : user des choses sans nous y attacher, sans nous y accrocher ? Oui, c’est bien davantage qu’une chance, c’est notre vérité en acte. Sur cette terre où nous sommes de passage, nous ne sommes que des usagers, usagers des dons de la terre, des dons de Dieu, jamais propriétaire au sens profond. Pour nous aider à demeurer dans cette disposition ce liberté du cœur, nous avons deux atouts.

Le premier, c’est le fait de tout recevoir et de tout remettre. Sachons, nous exercer concrètement à être libre, en nous dessaisissant des choses inutiles, en ne recherchant pas ce dont nous n’avons pas vraiment besoin.

Le second atout, c’est de demander les choses ou de savoir demander conseil. Ici la parole nous apprend à garder distance, à maintenir la distance que notre convoitise veut toujours réduire. Ne saisissant les choses. Heureux sommes nous quand nous nous contentons de peu. Sachons vérifier nos besoins réels en prenant le temps de les parler avec l’abbé, ou un frère ; Ne nous laissons illusionner nous-mêmes et encombrer par des choses. (2011-05-05)

Voir le commentaire de Père Abbé Luc / Chapitre 31, v 11 Du cellérier écrit le 04 mai 2011
Verset(s) :

11. il ne tiendra rien pour négligeable.

Commentaire :

Comme nous l’avons déjà perçu dans ce chapitre toutes les qualités demandées ou souhaitées pour le cellérier sont d’abord des qualités humaines et spirituelles. Si l’on devait faire une description du poste de cellérier, à la manière des embauches dans l’entreprise moderne, on serait assez embarrassé. On ne trouve pas en effet d’énumération de compétences techniques, en gestion comptable, administrative, ou économique. Certes, nous avons appris à rationnaliser toutes les tâches pour tenter de mieux les maitriser. Benoît n’est pas préoccupé par un savoir faire technique, mais par le maintient d’une profonde cohérence spirituelle dans le domaine des choses temporelles. « Il ne tiendra rien pour négligeable » veut inviter à un autre regard. Tout a du prix, tout a une valeur, les choses, les objets, l’avoir du monastère. Autrement dit, il y a une qualité de regard et de relation à entretenir avec les choses, les objets, les brusquer, les malmener, les négliger, ne pas les entretenir, ce n’est pas digne d’un moine. Celui-ci veut apprendre à reconnaître toute chose à sa juste place. Et nos objets divers ont cette place tout à fait honorable d’être le fruit d’une élaboration, d’une mise en œuvre qui a demandé beaucoup de soin, d’intelligence et d’énergie humaine. Notre risque aujourd’hui que nous partageons avec nos contemporains, c’est de réduire l’objet, les choses fabriquées à leur valeur marchande. « Cela ne vaut que dix euros, on ne va se casser la tête ». Nous risquons alors de perdre le sens de la beauté et de la simplicité des choses de la vie quotidienne qui sont l’œuvre du génie des hommes, de leur travail. « Ne rien tenir pour négligeable », cette recommandation ne veut pas faire de nous des « maniaques du bout de ficelle à ne pas jeter ». Non mais elle veut nous apprendre à poser un regard plus large sur toute chose sortie du travail des hommes, qu’elle coûte dix ou mille Euros. Un respect du travail d’autrui s’impose, qui me renvoie à la juste considération de mon propre travail si humble soit-il dans la communauté et dans le monde. Chacun de nous apporte une pierre, un savoir –faire, au service de la vie. (2011-05-04)

Voir le commentaire de Père Abbé Luc / Chapitre 31, v 10 Du cellérier écrit le 30 avril 2011
Verset(s) :

10. Il considérera tous les vases du monastère et tout son avoir comme les vases sacrés de l'autel ;

Commentaire :

« Ils considéreront tout comme des vases sacrés de l’autel ». Nous aimons cette phrase de la RB et nous la tenons comme une des perles qui émaille le texte de Benoît. Même si le F.Adalbert note qu’il s’agit d’un lieu commun dans la littérature ancienne, cette sentence nous semble porteuse de sens jusqu’aujourd’hui.

Nous l’aimons car elle charme notre esprit en suggérant l’abolition d’une limite trop stricte entre sacré et profane. Mais en vivons- nous vraiment ? Cette conviction de Benoît suggère que tout désormais est sacré, tout objet, tout espace. Mais vivons nous vraiment à la hauteur de cette conviction pourtant séduisante ?

Comment prenons nous effectivement soin de tout ce qui nous est confié : nos vêtements, nos chaussures. Comme veillons-nous à les entretenir et les utiliser à bon escient, des chaussures de ville ne conviennent pas pour aller dans les bois, de même les vêtements. Dans nos effets personnels pour la cellule, pour le bureau. Est-ce qu’on veille à ne pas entasser, à ne pas laisser perdre, à ne pas gaspiller (savons, dentifrice, papier, crayons). Est-ce que l’on sait rendre ou se détacher de ce dont on n’a pas besoin (vieux effets, objets divers) ? On le mesure ici aisément dans les objets ou effets personnels, la vigilance porte autant sur les objets eux-mêmes que sur la gestion de notre espace. Allons-nous nous laisser envahir – encombré au point de perdre le sens de notre espace, par exemple en cellule ou au bureau ? Le laisser s’encombrer non rangé, c’est lui faire perdre son caractère sacré, de lieu de vie qui veut favoriser la vie avec Dieu et avec les autres. Serait- ce exagéré de dire qu’une cellule devenue un foutoir est une cellule profanée ? Viennent ensuite tous les objets mis à notre disposition pour le travail : outils divers, produit d’entretien, ordinateur. L’attention est requise car il s’agit des biens de tous, je pense à celui qui va les utiliser après moi ? Vais-je les lui laisser dans l’état où j’aimerais les trouver (par exemple : les balais et aspirateurs aux étages). La vraie question est alors : est-ce que je me sens responsable de la vie concrète de la communauté, de la propreté et des biens, ou bien suis-je seulement soucieux de moi-même et de mes affaires ?

On le voit cette petite phrase de Benoît nous entraine loin. Elle ne nous laisse jamais quitte car le soin des objets nous renvoie en fait au soin de la communauté et des frères. Tout cela est sacré !! (2011-04-30)

Voir le commentaire de Père Abbé Luc / Chapitre 31, v 8-9 Du cellérier écrit le 28 avril 2011
Verset(s) :

8. Il veillera sur son âme, en se souvenant toujours de cette parole de l'Apôtre : « Qui fait bien son service, se procure une belle place. »

9. Il prendra soin des malades, des enfants, des hôtes et des pauvres avec toute sa sollicitude, sachant sans aucun doute qu'il devra rendre compte pour toutes ces personnes au jour du jugement.

Commentaire :

« Il veillera sur son âme, il prendra soin des malades, des enfants, des hôtes et des pauvres ». Ces deux recommandations simultanées sont bonnes à entendre ensemble. Elles s’éclairent et se confortent l’une l’autre. Elles rappellent au cellérier et à chacun de nous, que nous ne nous réduisons jamais à la tâche que nous faisons. Nous remplissons un service pour la communauté, mais nous le faisons comme moine, comme chercheur de Dieu ; Il n’y pas d’un côté le travail, et de l’autre la vie spirituelle, d’un côté l’action et de l’autre la contemplation. Dans ce sens, il est intéressant de noter le lien que Benoît fait à travers la citation de Paul, entre « veiller sur son âme » et « bien faire son service ».

« Veiller sur son âme » n’est pas uniquement lié à l’attention nécessaire requise pour prier et faire lectio divina. Si ces moments sont indispensables à notre équilibre monastique, ils n’épuisent pas toute la réalité de cette attention spirituelle à vivre. « Faire bien son service », c’est aussi prendre soin de son âme. S’habituer à travailler avec conscience, avec régularité et rigueur, avec application, est bénéfique pour notre âme. Nous expérimentons par là combien notre vie peut alors s’unifier et nous permettre un don réel de nous-mêmes aux autres. Benoît parle de sollicitude envers les malades, les enfants, les hôtes, les pauvres, et il évoque un rendre compte lors du jugement. Là encore se retrouve le lien entre le « veiller sur son âme » et le « service des frères ». Le don d’eux-mêmes aux autres appelle une qualité d’âme à sans cesse cultiver. Le vrai service est lié à cette qualité d‘âme que l’on y met. Il ne suffit pas de servir ou de faire sa BA. Servir nos frères, nous donner à eux représente un engagement de tout l’être, ou alors cela risque vite de devenir insignifiant, voir inutile. C’est sur cette qualité d’âme, sur cette qualité d’engagement que nous serons jugés. Notre vie monastique qui est une quête d’unification de notre vie sous le regard de Dieu voudrait nous conduire à vivre nos services de la communauté et de frères avec une grande qualité d’âme. (2011-04-28)

Voir le commentaire de Père Abbé Luc / Chapitre 31, v 1-2 Du cellérier écrit le 27 avril 2011
Verset(s) :

1. On choisira pour cellérier du monastère un membre de la communauté qui ait sagesse, maturité de caractère, sobriété ; qui ne soit pas grand mangeur, hautain, turbulent, injuste, lent, prodigue,

2. mais qui ait la crainte de Dieu. Il sera comme un père pour toute la communauté.

Commentaire :

Ce chapitres sur le cellérier, outre les prescriptions qu’il donne pour la charge elle-même, offre bon nombre de point de repères précieux pour tout moine et pour toute la communauté monastique. Affleure, à l’occasion d’un enseignement sur une charge aux prises avec les affaires temporelles une vraie sagesse chrétienne, faite de mesure et de respect des personnes.

Ces premiers versets énoncent des qualités humaines st spirituelles qui forment comme un socle sur lequel pourront se vivre des relations équilibrées et justes avec les frères. Les qualités énumérées ici sont à mettre en relation directe avec ce qu’on lui demande : être un père pour la communauté. Sagesse et maturité de caractère lui seront nécessaires pour savoir prendre distance par rapport aux évènements et aux situations toujours inédits. Sobriété et ne pas être gros mangeur l’aideront à ne pas d’abord penser à soi, mais aux autres. Ne pas être hautain, agité, ni injuste, ni lent, ni prodigue ; autant de rappels qui montrent combien la charge de cellérier expose celui-ci à de nombreux dangers. Il peut être hautain à cause de son pouvoir, agité du fait des affaires qui n’arrêtent pas, injuste car il est difficile de s’adapter à tous, lent dans l’indécision, prodigue par manque de prudence.

A ces possibles écarts, Benoît présente un antidote « qu’il ait la crainte de Dieu ». Comme une règle intérieure, la crainte de Dieu réfère toute action et toute chose Dieu. Elle est cette boussole spirituelle qui aide à garder le juste cap. Benoît recommande cette boussole spirituelle à bien des reprises, et notamment à tous ceux qui ont une charge vis-à-vis d’autres personnes : l’abbé, l’hôtelier, le portier, l’infirmier. Dans la maison de Dieu, tous les serviteurs de Dieu doivent être pénétrés de cet amour respectueux et filial envers leur Seigneur pour accomplir de façon juste les tâches qui sont confiés à l’égard de leurs frères. Au cellérier, comme à tous les officiers du monastère, il n’est pas demandé d’être sans défaut, mais de demeurer toujours ajusté à cette boussole spirituelle de la crainte de Dieu. C’est elle qui oriente de façon appropriée actions et relations. Nous remercions F.Cyprien qui veille sur nous et nous l’assurons de notre prière.

(2011-04-27)

Voir le commentaire de Père Abbé Luc / Chapitre 30, v 1-3 La correction des enfants écrit le 16 avril 2011
Verset(s) :

1. Tout âge et degré d'intelligence doit recevoir un traitement approprié.

2. Aussi chaque fois que des enfants et des adolescents par l'âge, ou des adultes qui ne peuvent comprendre ce qu'est la peine d'excommunication,

3. quand donc ceux-là commettent une faute, on les punira par des jeûnes rigoureux ou on les châtiera rudement par des coups, afin de les guérir.

Commentaire :

Nous n’avons plus d’enfants dans l’enceinte du monastère, comme autrefois. Ce chapitre est comme tel obsolète. Mais le rapport entre enfant et faute ne nous est pas étranger, voire ce rapport est souvent en nous-mêmes très sensible. Il n’est pas rare si on y fait attention que lorsque nous sommes en situation de fautes ou de manquement et si une remarque nous est faite, que nous réagissions avec des réflexes de défense qui trouvent souvent leur racine dans nos expériences d’enfance. Comme enfant, nous avons tous vécu des situations plus ou moins difficiles à traverser où nous avons été confronté et mis en face de nos fautes ou de nos faiblesses. La manière avec laquelle nos éducateurs nous ont aidés à assumer cela et à le dépasser est pour beaucoup dans notre construction d’adulte. Si la figure d’autorité a été trop forte ou au contraire trop absente, si la parole a manqué pour laisser place simplement au ressenti de colère ou de reproche cela peut avoir laissé en nous des réflexes qui témoignent de notre difficulté à assumer notre réel fragile. Une hyper culpabilisation ou une fuite devant un écart commis peuvent alors nous encombrer intérieurement et entraver le chemin de notre vie d’adulte en devenir. Prendre peu à peu conscience de ces mécanismes peut être une vraie libération pour des moines qui sont sans cesse confrontés à une règle et à une vie commune. Celles-ci nous mettent nécessairement un jour ou l’autre à l’épreuve dans ces tâtonnements inévitables, dans nos chutes peut-être, dans nos égarements parfois. La règle et la vie commune ne nous demandent pas d’être des hommes parfaits du jour au lendemain. Elles nous demandent d’être des adultes debout qui apprennent à assumer tout ce qu’ils sont dans le désir de progresser à la lumière de l’Evangile et dans la force de l’Esprit Saint. Etre adulte c’est pouvoir reconnaitre que l’on s’est trompé, qu’on est tombé, c’est pouvoir demander pardon. C’est ne pas laisser la voix enfantine s’élever spontanément en nous pour dire : « C’est pas moi, c’est un tel qui a fait cela, c’est de sa faute » etc.. Ces réflexes enfantins sont des entraves à notre croissance humaine et spirituelle. Demandons au Christ Jésus de nous prendre par la main et de rendre plus fort par son Esprit Saint notre homme intérieur, plus adulte. (2011-04-16)

Voir le commentaire de Père Abbé Luc / Chapitre 29, v 1-3 De la réception des frères qui ont quitté écrit le 15 avril 2011
Verset(s) :

1. Un frère qui est sorti du monastère par sa propre faute, s'il veut revenir, commencera par promettre de s'amender complètement du défaut qui l'a fait sortir,

2. et alors on le recevra au dernier rang, pour éprouver par là son humilité.

3. S'il s'en va de nouveau, il sera reçu ainsi jusqu'à trois fois, en sachant qu'ensuite on lui refusera toute autorisation de retour.

Commentaire :

« S’il veut revenir ». La façon de présenter ce chapitre laisse entendre que les cas de frères quittant la vie monastique et demandant ensuite à revenir, devaient être assez fréquents. Cela peut confirmer le fait que le sentiment d’appartenance au groupe était à l’époque quelque chose de plus important que pour nous aujourd’hui. « Jusqu’à trois fois, il sera reçu », sonne comme une limite que l’on était peut-être tenté de dépasser tant les cas pouvaient se présenter facilement.

Est-ce que ces sorties du monastère étaient considérées avec moins de gravité qu’elles pourraient l’être pour nous aujourd’hui ? Peut-être a-t-on aussi dans ces mesures une recherche dans le sens de ce que nous connaissons aujourd’hui, avec l’exclaustration temporaire ? On ménageait à l’époque un espace avec plusieurs retours possibles, comme prévoit aujourd’hui un temps délimité à l’extérieur pour un frère qui devra décider s’il revient ou s’il quitte la vie monastique.

Le mot latin utilisé que l’on traduit par « revenir » peut se prêter à cette interprétation. C’est le mot « reversi-revertor », revenir sur ses pas, rebrousser chemin. Le même utilisé le plus souvent quand on parle des frères qui reviennent de sortie à l’extérieur du monastère, après un voyage (RB 51, 55, 67). Ce verbe « reversor » utilisé pour des frères sortis n’est pas le même que celui utilisé quand au début du prologue, Benoît parle de « revenir par l’obéissance » à celui dont on s’est éloigné par la désobéissance. D’un côté, on a « reversor » pour dire revenir sur ses pas, de l’autre « redire » pour dire un retour plus fondamental de la désobéissance à l’obéissance. Benoît est largement ouvert au frère qui veut revenir au monastère pour vivre avec ses frères un retour plus profond que nous n’avons pas fini de vivre jusqu’à notre dernier souffle. Tous, nous sommes des hommes sur le chemin du retour, sur le chemin du Royaume pour vivre pleinement comme des fils, tentés que nous sommes de vivre à notre propre compte. Revenir est cette attitude de confiance et d’ouverture par laquelle nous nous tournons vers notre Père, entrainés par le Christ, lui le Verbe, toujours tourné vers le Père, dans la force de l’Esprit. (2011-04-15)

Voir le commentaire de Père Abbé Luc / Chapitre 28, v 1-7 De ceux qui souvent repris ne veulent pas s’amender écrit le 14 avril 2011
Verset(s) :

1. Si un frère a été fréquemment repris pour une faute quelconque, si même après excommunication il ne s'amende pas, on lui infligera une punition plus rude, c'est-à-dire qu'on lui fera subir le châtiment des coups.

2. S'il ne se corrige pas non plus par ce moyen, ou que même, ce qu'à Dieu ne plaise, il se laisse emporter par l'orgueil et veuille défendre sa conduite, alors l'abbé agira comme un médecin sagace :

3. s'il a appliqué tour à tour les cataplasmes, l'onguent des exhortations, la médecine des divines Écritures, enfin le cautère de l'excommunication et des coups de verge,

4. et s'il voit que son industrie ne peut plus rien désormais, il aura encore recours à un remède supérieur : sa prière pour lui et celle de tous les frères,

5. afin que le Seigneur, qui peut tout, procure la santé à ce frère malade.

6. S'il ne se rétablit pas non plus de cette façon, alors l'abbé prendra le couteau pour amputer, comme dit l'Apôtre : « Retranchez le pervers du milieu de vous » ;

7. et encore : « Si l'infidèle s'en va, qu'il s'en aille »,

Commentaire :

Ce chapitre peut paraitre sévère à première vue, puisqu’il se conclue avec la séparation d’un frère à qui l’on demande de partir. Mais on peut aussi y lire tout le poids de sollicitude et d’attention que l’on a engagé à l’égard d’un homme afin d’éviter l’irréparable. Dans la ligne du chapitre précédent l’abbé et la communauté déploient un zèle très grand pour tenter de rejoindre ce frère malade. Toutes leurs actions culminent dans la prière au « Seigneur qui peut tout ».

Ces lignes nous redisent avec force, combien chaque frère avec son mystère de liberté est un frère espéré, espéré – attendu au meilleur de lui-même par ses frères et par Dieu avant tout. Nous mesurons ici ce qu’est le cœur et la profondeur de notre vie commune : permettre à chacun de vivre au meilleur de lui-même. Une communauté chrétienne n’a pas d’autre but : celui d’offrir une entraide où chacun peut se donner au meilleur de lui-même grâce à l’appui de ses frères. Et ce meilleur chacun le découvre grâce à la vie commune qui nous le révèle à nous-mêmes, en même temps qu’elle nous permet de nous donner les uns aux autres. Ce dynamisme de vie qui révèle à chacun ce qu’il est ne cesse de se vivre jour après jour. Il est tantôt heureux, tantôt crucifiant. Car la vie commune me révèle aussi ces points de résistance auxquels je m’accroche pour sauvegarder mes fausses sécurités. Ces images de moi-même que la réalité conteste et vient effriter. Les conflits sont souvent les lieux où apparaissent mes points de résistance illusoires. La règle et la vie commune viennent aussi mettre le doigt sur mes appuis fragiles. Vais-je m’accrocher au risque de m’enfermer et de m’isoler ou bien vais-je entrer dans le mouvement de la vie commune qui me déplace toujours ? Cette question apparait en pleine lumière à propos du frère qui s’entête dans son parti pris de séparation d’avec la communauté. Mais elle nous est posée en fait de manière quotidienne : allons- nous nous laisser déplacer par la vie commune et nous laisser entrainer par elle au meilleur de nous-mêmes ? (2011-04-14)

Voir le commentaire de Père Abbé Luc / Chapitre 27, v 1-9 Sollicitude l’abbé écrit le 13 avril 2011
Verset(s) :

1. C'est avec toute sa sollicitude que l'abbé prendra soin des frères délinquants, car « ce ne sont pas les bien-portants qui ont besoin du médecin, mais les malades. »

2. Aussi doit-il user de tous les moyens comme un médecin sagace ;: envoyer des senpectas , c'est-à-dire des frères anciens et sagaces,

3. qui comme en secret consoleront le frère hésitant et le porteront à satisfaire humblement, et le « consoleront pour qu'il ne sombre pas dans une tristesse excessive »,

4. mais comme dit encore l'Apôtre : « Que la charité s'intensifie à son égard », et que tous prient pour lui.

5. En effet, l'abbé doit prendre un très grand soin et s'empresser avec tout son savoir-faire et son industrie pour ne perdre aucune des brebis qui lui sont confiées.

6. Qu'il sache en effet qu'il a reçu la charge des âmes malades, non une autorité despotique sur celles qui sont en bonne santé.

7. Et qu'il craigne la menace du prophète, par laquelle Dieu dit : « ;Ce qui vous paraissait gras, vous le preniez, et ce qui était chétif, vous le rejetiez. »

8. Et qu'il imite l'exemple de tendresse du bon pasteur, qui abandonnant ses quatre-vingt-dix-neuf brebis sur les montagnes, partit à la recherche d'une seule brebis qui s'était perdue ;

9. sa misère lui fit tellement pitié, qu'il daigna la mettre sur ses épaules sacrées et la rapporter ainsi au troupeau.

Commentaire :

Ce chapitre est parmi les plus beaux de la règle, un de ceux qui sont les plus empreints de saveur évangélique. Il s’adresse principalement à l’abbé qui doit redoubler de zèle envers le frère excommunié. C’est dans cette situation où un frère est en difficulté qu’il est invité à se « rappeler le titre qu’on lui donne » qui l’associe au ministère du Christ. En effet, en aucun autre chapitre, son ministère n’est autant référé à la mission du Christ. Rude tâche que d’être signe pour les frères de la sollicitude du Christ, médecin et bon pasteur. De même que le Christ est allé au devant des hommes malades et qu’il est parti chercher la brebis perdue, ainsi l’abbé ne doit-il pas ménager ses efforts pour un frère en panne. Ici la RB se fait pressante et sans complaisance pour l’abbé. « Il doit user de tous les moyens, prendre un très grand soin et s’empresser avec tout son savoir-faire et son industrie pour ne perdre aucune brebis qui lui sont confiées ». A vues humaines, la charge semble bien outrepasser les forces humaines. Que peut faire un homme face à la liberté d’un autre homme ? On peut entendre dans ces lignes qu’il s’agit de faire tout son possible et de mettre en œuvre toutes les ressources disponibles pour tenter de gagner son frère. Là où la tentation pourrait être forte – encore davantage aujourd’hui de baisser les bras devant la liberté d’un frère, Benoit invite l’abbé à prendre de la hauteur. Cet homme qui s’égare ou s’enferme est un frère pour qui le Christ est mort et qui a besoin de son salut aujourd’hui. Pris dans ses ténèbres, il n’est plus vraiment libre et il a besoin d’une aide fraternelle pour retrouver la joie de la communion avec Dieu et avec les frères. C’est au service de cette communion perdue de vue que l’abbé doit donner toutes ses forces. Et l’abbé a aussi deux atouts : la communauté à travers les sympectes, mais aussi à travers sa charité et sa prière, et la grâce de l’Esprit Saint à l’œuvre en chacun. Une phrase exprime bien cet atout de la foi en la grâce, elle s’adresse à un ministre du Christ « le pouvoir de ton ministère sera à la mesure exacte de ta foi en la victoire de Jésus sur les âmes qui te sont confiées » (M. Basilica Scklink) (2011-04-13)