vendredi 3 octobre 2025 : journée de solitude pour la communauté, messe vers 6h45 après Laudes.

Commentaires sur la Règle



Voir le commentaire de Père Abbé Luc / Chapitre 20, v 1-5 De la révérence dans la prière écrit le 25 mars 2011
Verset(s) :

1. Si, lorsque nous voulons présenter quelque requête aux hommes puissants, nous n'osons le faire qu'avec humilité et révérence,

2. combien plus devons-nous supplier le Seigneur Dieu de l'univers en toute humilité et très pure dévotion !

3. Et ce n'est pas par l'abondance des paroles, mais par la pureté du cœur et les larmes de la componction que nous serons exaucés, sachons-le bien.

4. Aussi l'oraison doit-elle être brève et pure, à moins qu'elle ne vienne à se prolonger sous l'effet d'un sentiment inspiré par la grâce divine.

5. En communauté, cependant, le temps de l'oraison sera tout à fait bref, et dès que le supérieur aura donné le signal, on se lèvera tous ensemble.

Commentaire :

Trois mots reviennent plusieurs fois dans ce court chapitre : humilité, pureté et bref. Chacun nous introduit dans une manière de prier que Benoît recommande à ses moines, une manière de prier en quête de justesse et de vérité.

Humilité. A ce mot, Benoît associe celui de révérence. Devant Dieu, le Seigneur de l’Univers, le moine priant est appelé à se tenir avec révérence, avec humilité. Attitude qui voudrait traduire sa conscience de plus en plus affinée de sa condition toute entière redevable de Celui devant lequel il se tient. Lui qui a tout créé et qui porte l’univers. Mais à humilité, Benoît associe aussi le mot de dévotion. Ce mot peut équilibrer ce que la révérence mal comprise pourrait suggérer de soumission. Dans la conscience de sa petitesse le moine ne s’aplatit pas devant Dieu. Mais dans un profond respect, il se donne tout entier avec amour. Il se voue totalement au service de Dieu. Ce n’est pas la peur qui caractérise sa prière devant le Dieu de l’Univers, mais le désir de se donner.

Pureté ou pure. Ces mots reviennent à trois reprises. L’insistance s’inscrit dans la tradition de la prière reçue de Cassien qui axe toute la quête du moine sur la pureté du cœur. Ici pureté du cœur est associée à la componction des larmes. Un cœur pur est un cœur « piqué » « percé » par la Parole de Dieu. Touché par la parole, le cœur se reconnaît tel qu’il est avec ses pauvretés mais aussi sauvé par le pardon de Dieu. De ce cœur piqué par la Parole, naissent des larmes de repentir et des larmes de joie. « Viennent les larmes et le Fils renaît, joie du retour au Père ». Chantons-nous en ce temps de Carême. C’est à cette vérité de fils devant son Père qu’une prière toujours plus pure voudrait nous conduire.

Bref ou brève. Denier qualificatif de la prière selon Benoit. Bref s’oppose ici au flot de paroles qui pourrait occuper tout le champ. Comme déjà Jésus le recommande, la prière ne consiste pas dans le rabâchage de mots. Rabâcher devant Dieu, c’est s’adresser non pas à un Père désireux de nouer une relation avec ses enfants. C’est plutôt le considérer comme une idole qu’il faudrait à tout prix se concilier. La brièveté voudrait nous garder de cette contrefaçon de la prière. En ce temps de Carême, où Benoit nous invite à nous appliquer à la prière avec larmes, à la componction du cœur, demandons la grâce d’une prière plus vraie et plus filiale. « Seigneur apprends-nous à prier ». (2011-03-25)

Voir le commentaire de Père Abbé Luc / Chapitre 19, v 1-6 De la tenue dans la psalmodie écrit le 22 mars 2011
Verset(s) :

1. Nous croyons que la divine présence est partout et que « les yeux du Seigneur regardent en tout lieu les bons et les méchants. »

2. Cependant, c'est surtout quand nous assistons à l'office divin que nous devons le croire sans le moindre doute.

3. Aussi rappelons-nous toujours ce que dit le prophète : « Servez le Seigneur dans la crainte » ;

4. et encore : « Psalmodiez sagement » ;

5. et : « En présence des anges je psalmodierai pour toi. »

6. Considérons donc comment il nous faut être en présence de la divinité et de ses anges,

Commentaire :

« Psalmodiez sagement ». Cette citation du Ps 46 est l’une des citations scripturaires utilisée par Benoît pour argumenter de la nécessité d’être bien présent à ce que l’on fait lorsqu’on psalmodie. Que serait l’opposé de « psalmodier sagement » ? « Psalmodier bêtement » ou plutôt « psalmodier machinalement », de façon mécanique ? Ce petit chapitre voudrait nous réveiller si nous avons tendance à ronronner à l’office par la force de l’habitude. Il nous rappelle que l’office n’est pas un exercice quelconque, mais qu’il nous met en présence de Dieu, qu’il nous introduit à une rencontre avec lui.

« Psalmodiez sagement » peut s’entendre de plusieurs façons. Psalmodiez avec intelligence, avec toute cette présence d’esprit qui fait reconnaitre la particularité des psaumes. L’invitation est ici à être sensible au caractère du psaume : le Ps 118 n’est pas le Ps 50, ceux des montées ne sont les Ps 148-150 etc. Avec notre intelligence, nous gagnons beaucoup à repérer ces notes particulières des psaumes pour mieux nous couler dans leur dynamique spirituelle. De ce point de vue, tout ce qui nous informe sur les psaumes, des lectures, des conférences (par exemple celle de F.Sébastien) ne peut qu’affiner notre intelligence.

Psalmodiez avec sagesse peut encore s’entendre comme un appel à psalmodier avec toute notre épaisseur humaine, notre vérité. Sous cet aspect, on peut inclure beaucoup de choses : nos expériences de vie, nos expériences spirituelles, nos épreuves, nos approches du mystère de Dieu. Autant de réalités qui peuvent permettre de nous unir plus étroitement aux mots que nous disons. Je pense, par exemple, à la prise de conscience émerveillée que nous pouvons avoir de dire « Tu » à Dieu et cela sous tous les modes. Nous sommes un « Je » qui ose se tourner vers Celui devant qui, nous ne sommes que poussière, et qui, cependant nous permet et nous offre d’entrer en dialogue avec Lui. Nous nous adressons à lui en un « Tu » tantôt assuré, tantôt balbutiant, en un « Tu » qui est toujours cherché, jamais saisi. Apprendre à se tenir ainsi dans cet émerveillement étonné, cela aussi c’est psalmodier sagement avec saveur. (2011-03-22)

Voir le commentaire de Père Abbé Luc / Chapitre 18, v 24-25 En quel ordre dire les psaumes. écrit le 19 mars 2011
Verset(s) :

24. car les moines font preuve de par trop de paresse dans leur service de dévotion, quand ils psalmodient moins que le psautier, avec les cantiques accoutumés, en l'espace d'une semaine,

25. puisque nous lisons qu'une fois nos saints Pères accomplirent cela vaillamment en un seul jour. Tièdes que nous sommes, puissions-nous du moins nous en acquitter en une semaine entière !

Commentaire :

Prier avec les psaumes nous demande toujours d’accepter de nous déplacer, de quitter une certaine prière trop personnelle pour nous couler dans la prière du peuple juif, de l’Eglise et de l’humanité. Mystérieusement, en vivant ce déplacement notre prière personnelle, loin d ‘être diluée s’en trouve fortifiée et enrichie. Mais cela nous demande une vigilance active pour être bien là.

Ce matin, je voudrais relever un autre déplacement que cette prière peut nous donner de vivre. En priant les psaumes nous entrons dans la prière du Christ. Prière du Christ, on peut entendre ici d’abord Christ dans son sens premier de Messie. Oint du Seigneur, figure centrale dans l’AT. André Chouraqui a dit que le « Messie est la pierre angulaire de l’enseignement des psaumes ». Les psaumes parlent du Messie à venir, comme figure qui accomplit la « Voie du Juste » pour reprendre l’expression d’André Chouraqui. Ainsi la figure du Messie à venir est-elle en creux dans tout le psautier. La prière du juste en lutte contre l’impie et les ennemis porte en elle, celle du Messie qui vient pour instaurer la justice de Dieu.

Les Premiers chrétiens seront fortement conscients de la place importante du psautier pour éclairer le mystère de Jésus Messie et Fils de Dieu. Les citations et allusions du psautier reprises dans le NT sont à ce titre très éloquentes. Les psaumes parlent du Messie reconnu en Jésus de Nazareth.

En reprenant les psaumes dans sa prière, l’Eglise, Corps du Christ s’unit au Christ Tête et à sa prière. Cette prière du Corps et de la Tête trouve tout son sens : elle est prière de l’humanité en chemin, en quête de salut. Elle est prière du Christ Jésus qui a traversé la mort et qui nous offre déjà la victoire.

Quand nous prions les psaumes, nous pouvons tirer grand profit en les associant au Christ qui les dit avec nous, son Corps. Cela peut nous permettre de méditer sur son mystère. Certains versets peuvent nous faire communier à la prière du Christ en sa vie terrestre, dans son enseignement, dans sa lutte contre ses ennemis qui lui tendent des pièges, dans sa passion et finalement dans sa Résurrection. Mettre ainsi les mots du psalmiste dans la bouche de Jésus, et les prier avec lui peut nous ouvrir un vrai chemin de communion avec le Seigneur Jésus le Christ. (2011-03-19)

Voir le commentaire de Père Abbé Luc / Chapitre 18, 22-23 Dans quel ordre dire les psaumes écrit le 18 mars 2011
Verset(s) :

22. Par dessus tout, nous donnons cet avertissement : si quelqu'un n'aime pas cette distribution des psaumes, qu'il établisse une autre ordonnance, s'il la juge meilleure,

23. pourvu qu'il maintienne absolument la psalmodie intégrale des cent cinquante psaumes du psautier chaque semaine et la reprise perpétuelle par le commencement aux vigiles du dimanche,

Commentaire :

Ces lignes qui concluent le code liturgique de la RB peuvent permettre de nous arrêter un peu sur notre manière de considérer et de prier le psautier. Ce livre de prière du juif pieux est devenu le livre de prière de l’Eglise qui se rassemble, soit pour l’Eucharistie qui utilise de nombreux psaumes ou extraits, soit pour la liturgie des heures. Avec l’extension de la RB, la récitation hebdomadaire du psautier, s’est développée dans les monastères. Même si aujourd’hui la récitation du psautier peut se faire sur plusieurs semaines, les psaumes restent notre nourriture substantielle.

J’entends parfois la difficulté exprimée par tel ou tel de prier vraiment avec les psaumes avec certains qui semblent renvoyer à une culture religieuse si différente de la nôtre. Oui, la prière des psaumes nous demande toujours de consentir à plusieurs déplacements. Le premier est de nous faire entrer personnellement dans la prière de l’Eglise, dans une prière commune, pas d’abord la mienne. Je me coule dans une prière reçue en Eglise. C’est celle-là que je suis invité à faire mienne. Le second déplacement est culturel. En priant ces poèmes juifs d’avant le Christ, j’entre dans l’intelligence spirituelle et théologique de ce peuple dans lequel est né Jésus. Je m’approprie leur regard sur Dieu et leur espérance. Même si certains passages pris en eux-mêmes ne peuvent plus dire adéquatement aujourd’hui une parole sur Dieu, ils sont des témoins précieux de la recherche humaine et spirituelle vécue durant toute une histoire. Cela conduit à parler d’un troisième déplacement, plus humain celui-là. Avec les psaumes, j’apprends à quitter une certaine suffisance que pourrait voir ma prière personnelle, assurée d’être elle-même toujours juste et ajustée. La prière des psaumes m’apprend à rejoindre les cris et les tâtonnements de toute l’humanité qui cherche à se tourner vers Dieu ou vers un Au-delà quelle ne parvient pas à nommer. Ce faisant, la prière des psaumes m’apprend à rejoindre ma propre humanité dans ses zones plus sombres ou encore mal explorées. Les mots simples, parfois abruptes du psalmiste, ses coups de gueules toujours confiants, peuvent m’aider à oser mes propres mots. J’appartiens moi aussi à cette humanité qui cherche ses mots pour parler vraiment à Dieu. Ces trois déplacements auxquels nous provoquent les psaumes, nous les vivons plus ou moins facilement. C’est la raison pour laquelle, il y a toujours une grâce à demander au début de chaque office, pour être bien là, non de manière tendue, mais de manière disponible. Etre là offert et ouvert, pour entrer dans ce grand mouvement de prière que l’Esprit Saint veut susciter dans son peuple. (2011-03-18)

Voir le commentaire de Père Abbé Luc / Chapitre 18, v 12-21 Psaumes aux Vêpres, aux Complies et aux Vigiles écrit le 04 mars 2011
Verset(s) :

12. Les vêpres seront chantées chaque jour en modulant quatre psaumes.

13. Ces psaumes commenceront au cent-neuvième et ils iront jusqu'au cent-quarante-septième,

14. excepté ceux d'entre eux qui sont réservés à d'autres heures, c'est-à-dire depuis le cent-dix-septième jusqu'au cent-vingt-septième, ainsi que le cent-trente-troisième et le cent-quarante-deuxième ;

15. tous ceux qui restent sont à dire aux vêpres.

16. Et comme il manque trois psaumes, on divisera ceux qui, dans la série susdite, sont plus importants, c’est-à-dire le cent-trente-huitième et le cent-quarante-troisième et le cent-quarante-quatrième.

17. Quant au cent-seizième, comme il est petit, on le joindra au cent-quinzième.

18. L'ordonnance des psaumes de vêpres étant ainsi disposée, le reste, c'est-à-dire la leçon, le répons, l'hymne, le verset et le cantique, sera exécuté comme nous l'avons prescrit plus haut.

19. Aux complies, on répétera chaque jour les mêmes psaumes, c'est-à-dire le quatrième, le quatre-vingt-dixième et le cent-trente-troisième.

20. L'ordonnance de la psalmodie du jour étant ainsi organisée, tous les autres psaumes qui restent seront répartis également entre les vigiles des sept nuits,

21. en partageant ceux d'entre ces psaumes qui sont plus longs, et en en mettant douze à chaque nuit.

Commentaire :

La manière de Benoît de distribuer les psaumes peut paraitre surprenante. En effet, il y a des offices comme les Matines, les petites heures du jour et les Complies, où les psaumes sont minutieusement choisis, un à un, et jour après jour, surtout pour les Matines. Et puis, il y a les offices de Vêpres et des Vigiles qui semblent être davantage composés de psaumes pris à la suite l’un de l’autre, à l’exception de ceux qui sont déjà choisis pour les autres offices. Ainsi aux Vêpres a-t-on la série des psaumes 109 jusqu’à 147, et aux Vigiles tous les psaumes restants. De ce fait, il apparait que les offices de Matines ou Laudes et les petites heures sont davantage pensés dans une cohérence précise que les offices de Vêpres et des Vigiles. Qu’en conclure ? Que Benoît a éprouvé le besoin de donner davantage de relief aux Laudes et aux petites heures qu’aux Vêpres et aux Vigiles ? Il n’est pas facile de répondre. Peut-être est-ce le signe qu’à ses yeux les offices de Vêpres et des Vigiles offrent par leur place dans la journée et la nuit une cohérence suffisante : celle du sacrifice de louange qui monte le soir après une journée de travail pour les Vêpres et celle de la veille priante et implorante la nuit pour les Vigiles.

Je me pose encore une question. Benoît fait commencer les Vêpres du dimanche par le Ps 109. Est-ce pour les commodités de la série qu’il semble emprunter à la tradition romaine, ou bien y avait-il le souci de donner à ce Ps 109 une place particulière, le dimanche ? Ce qui est sûr, c’est qu’il a acquis désormais dans la liturgie des heures une place bien précise pour chaque Vêpres dominicale et festive. Avec ce psaume plusieurs fois cités dans le NT pour méditer sur la Seigneurie du Christ ressuscité, nous sommes, chaque dimanche soir, un peu dans la situation des disciples d’Emmaüs. Avec eux, comme eux, en redisant ce psaume nous nous laissons enseigner pour entrer plus avant dans le mystère du Christ vivant à jamais. Il a fait de ses ennemis le marchepied de son trône. Par sa croix, il a dominé jusqu’au cœur de l’ennemi. Comme la rosée qui nait de l’aurore, son Père l’a engendré avec son corps à la vie divine. Oui le Christ se tient désormais à la droite de son Père, où il intercède pour nous lui le Grand prêtre à jamais. (2011-03-04)

Voir le commentaire de Père Abbé Luc / Chapitre 18, v 7-11 Psaumes à tierce, sexte et none écrit le 03 mars 2011
Verset(s) :

7. A tierce, sexte et none de la seconde férie, on dira les neuf sections qui restent du psaume cent-dix-huit, à raison de trois à chacune de ces mêmes heures.

8. Ayant donc achevé le psaume cent-dix-huit en deux jours, à savoir le dimanche et la seconde férie,

9. à la troisième férie on psalmodiera à tierce, sexte et none trois psaumes chaque fois, depuis le cent-dix-neuvième jusqu'au cent-vingt-septième, c'est-à-dire neuf psaumes.

10. Ces psaumes seront toujours répétés identiquement jusqu'au dimanche à ces mêmes heures, en gardant tous les jours également une disposition uniforme pour les hymnes, leçons et versets,

11. et ainsi l'on commencera toujours le dimanche par le psaume cent-dix-huit.

Commentaire :

Après avoir traité de l’office de prime, Benoît aborde les offices de tierce, sexte et none pour tous les jours de la semaine. Ce qui caractérise ces offices, c’est la répétition des mêmes psaumes. Seuls le dimanche et le lundi bénéficient d’un menu varié, puisqu’en chacune des petites heures, on psalmodie les vingt deux divisions du Ps 118. Par contre, les mardis, mercredis et jeudis, vendredis et samedis, on reprendra à chaque fois les mêmes Ps 119 à 127, répartis par trois sur les trois petites heures de tierce, sexte et none. Cette façon de distribuer les psaumes donnent par le fait même, une place singulière et au Ps 118 et aux psaumes des montées de 119 à 127. Psaume de l’amoureux de la Loi pour le 118 et psaumes de pèlerinage pour les 119 à 127. Le moine ne craint pas de reprendre ces psaumes sans cesse, car sa vie n’est-elle pas une quête amoureuse de la Loi et de la Parole de Dieu, n’est-elle pas ce long et fidèle pèlerinage par lequel on ne voudrait jamais s’installer ? La prière répétitive des psaumes nous entraine ici dans une identification au psalmiste. Nous entrons dans l’intimité du chant qui a jailli de son cœur. Nous apprenons à le faire nôtre, que ses mots deviennent les nôtres, que son audace et sa confiance envers son Dieu deviennent les nôtres. En ce sens, les psalmistes sont nos maîtres de prière, nos guides spirituels. La répétition incessante de ces mêmes prières, si elle est un risque - celui de nous endormir- est davantage encore une chance. En effet, ces psaumes s’offrent à nous comme ces oignons dont il faut les éplucher, enlever une à une les lamelles. Jour après jour, nous épluchons les psaumes, nous les laissons nous révéler leur saveur, leur profondeur. Nous ne cessons pas de les éplucher, pour atteindre le cœur, pour que notre cœur se mette au diapason du cœur du psalmiste. « Dans ma détresse, j’ai crié vers le Seigneur. Non il ne dort pas ne sommeille pas le gardien d’Israël. (2011-03-03)

Voir le commentaire de Frère Yvan / Chapitre 18, v 1-6 En quel ordre dire les psaumes écrit le 01 mars 2011
Verset(s) :

1. Tout d'abord, on dira le verset « Dieu, viens à mon aide ; Seigneur, hâte-toi de m'aider », gloria ; puis l'hymne de chaque heure.

2. Ensuite à l'heure de prime, le dimanche, on dira quatre sections du psaume cent-dix-huit.

3. Aux autres heures, à savoir tierce, sexte et none, on dira chaque fois trois sections du susdit psaume cent-dix-huit.

4. A prime de la seconde férie, on dira trois psaumes, à savoir le premier, le deuxième et le sixième.

5. Et ainsi, chaque jour à prime jusqu'au dimanche, on dira à la suite trois psaumes chaque fois jusqu'au psaume dix-neuf, en divisant en deux les psaumes neuf et dix-sept.

6. De la sorte, on commencera toujours par le vingtième aux vigiles du dimanche.

Commentaire :



La RM avait une toute autre façon d’utiliser le psautier dans l’office : on reprenait la suite des psaumes à chaque office, là où on l’avait arrêté à l’office précédent.

Benoît lui s’inspire de l’office romain, avec deux principes de base : l’utilisation de certains psaumes des offices précis. Et la récitation hebdomadaire du psautier.

Il fait commencer l’office par le verset du Ps 69 : « Dieu viens à mon aide », c’est sans doute à cause de la conférence 10 de Cassien, où il vante ce verset comme formule de prière appropriée à tout besoin, à toute circonstance. Pour Cassien, ce verset répété était un moyen pour arriver à prier sans cesse. Chez Benoît, il ne s’agit plus d’une formule répétée sans cesse par chaque moine, dans sa prière personnelle. Mais c’est l’introduction liturgique aux heures de l’office, et à la semaine de service des frères cuisiniers. St Colomban, dans sa règle, demande de dire trois fois ce verset dans le temps de prière silencieuse qui suit chaque psaume de l’office. Ces utilisations limitées et réglées diffèrent beaucoup de l’usage incessant et spontané préconisé par Cassien. Il n’a pas réussi à convaincre les moines latins d’utiliser le « Dieu viens à mon aide » pour prier sans cesse. Mais la récitation de ce verset au début des offices est précieuse : elle nous rappelle que notre prière est l’œuvre de Dieu en nous. Prier, c’est s’adresser au Père, que le Fils nous révèle, dans l’Esprit qui nous fait crier « Abba » et Seigneur-Jésus. Sans l’Esprit nous ne savons pas prier. En demandant à Dieu son aide, nous entrons dans la prière par sa seule porte : l’humble reconnaissance du don mystérieux dont tout dépend.

Ce chapitre nous renvoie à deux questions importantes : comment prions-nous pour que la psalmodie soit une prière, et non une récitation machinale ? Et la deuxième question : sommes nous des hommes de prière ? Sommes-nous en relation avec le Christ, habités par l’Esprit ? Que faisons-nous pour que cette relation soit réellement vivante et vraie ? (2011-03-01)

La RM avait une toute autre façon d’utiliser le psautier dans l’office : on reprenait la suite des psaumes à chaque office, là où on l’avait arrêté à l’office précédent.

Benoît lui s’inspire de l’office romain, avec deux principes de base : l’utilisation de certains psaumes des offices précis. Et la récitation hebdomadaire du psautier.

Il fait commencer l’office par le verset du Ps 69 : « Dieu viens à mon aide », c’est sans doute à cause de la conférence 10 de Cassien, où il vante ce verset comme formule de prière appropriée à tout besoin, à toute circonstance. Pour Cassien, ce verset répété était un moyen pour arriver à prier sans cesse. Chez Benoît, il ne s’agit plus d’une formule répétée sans cesse par chaque moine, dans sa prière personnelle. Mais c’est l’introduction liturgique aux heures de l’office, et à la semaine de service des frères cuisiniers. St Colomban, dans sa règle, demande de dire trois fois ce verset dans le temps de prière silencieuse qui suit chaque psaume de l’office. Ces utilisations limitées et réglées diffèrent beaucoup de l’usage incessant et spontané préconisé par Cassien. Il n’a pas réussi à convaincre les moines latins d’utiliser le « Dieu viens à mon aide » pour prier sans cesse. Mais la récitation de ce verset au début des offices est précieuse : elle nous rappelle que notre prière est l’œuvre de Dieu en nous. Prier, c’est s’adresser au Père, que le Fils nous révèle, dans l’Esprit qui nous fait crier « Abba » et Seigneur-Jésus. Sans l’Esprit nous ne savons pas prier. En demandant à Dieu son aide, nous entrons dans la prière par sa seule porte : l’humble reconnaissance du don mystérieux dont tout dépend.

Ce chapitre nous renvoie à deux questions importantes : comment prions-nous pour que la psalmodie soit une prière, et non une récitation machinale ? Et la deuxième question : sommes nous des hommes de prière ? Sommes-nous en relation avec le Christ, habités par l’Esprit ? Que faisons-nous pour que cette relation soit réellement vivante et vraie ? (2011-03-01)

Voir le commentaire de Frère Yvan / Chapitre 17, v 1-10 Combien de psaumes faut-il dire écrit le 26 février 2011
Verset(s) :

1. Nous avons déjà disposé l'ordonnance de la psalmodie aux nocturnes et aux matines ; voyons maintenant les heures suivantes.

2. A l'heure de prime, on dira trois psaumes séparément et non sous un seul gloria,

3. l'hymne de cette même heure après le verset : « Dieu, viens à mon aide », avant de commencer les psaumes.

4. Après l'achèvement des trois psaumes, d'autre part, on récitera une leçon, le verset et Kyrie eleison , et le renvoi.

5. A tierce, sexte et none, d'autre part, on célébrera la prière de même, selon cette ordonnance, c'est-à-dire le verset, les hymnes de ces mêmes heures, trois psaumes à chacune, la leçon et le verset, Kyrie eleison et le renvoi.

6. Si la communauté est plus nombreuse, on psalmodiera avec antiennes, mais si elle est moins nombreuse, sur le mode direct.

7. Pour la synaxe vespérale, on se bornera à quatre psaumes avec antiennes.

8. Après ces psaumes, on récitera la leçon, puis le répons, l'ambrosien, le verset, le cantique de l'Evangile, la litanie, et par l'oraison dominicale se fera le renvoi.

9. Pour les complies, on se bornera à dire trois psaumes. Ces psaumes seront dits directement, sans antiennes.

10. Après quoi l'hymne de cette même heure, une leçon, le verset, Kyrie eleison , et par la bénédiction se fera le renvoi.

Commentaire :

Au chapitre 16, Benoît avait précisé combien de fois par jour le moine doit faire halte pour la prière. Dans ce chapitre 17, après avoir déterminé la répartition au long du jour, il précise la mesure des psaumes à dire à ces heures. Dans le chapitre suivant, il indiquera de manière plus exacte quels psaumes il faut dire, en fonction de chaque heure et de chaque jour.

L’office se caractérise donc par plusieurs traits : d’abord il revient à intervalles réguliers tout au long de la journée. Ensuite on distingue les petites heures et les autres offices. Cela ne signifie pas que les petites heures ont moins d’importance. Qu’on peut les oublier au gré de son intérêt personnel. C’est le rythme des offices qui est important. Au son de la cloche, revenir des occupations et des préoccupations à l’unique essentiel, à ce qui fait le fond de notre vocation, à ce qui nous a amenés au monastère.

Ces offices qui rythment nos journées, nous font toucher, de manière très concrète, notre difficulté à rester ouverts à ce qui vient d’ailleurs, d’un autre, même quand cet autre est Dieu.

Il peut sembler plus facile d’organiser nos journées selon nos goûts, à notre rythme propre, selon nos choix. Mais nous savons par expérience que la liberté du cœur, cette disponibilité aux appels de Dieu, est source de beaucoup plus de paix et de beaucoup plus de joie. La cloche nous rappelle que nous sommes ici parce que Dieu nous a appelés. Nous avons été choisis par Dieu, appelés par notre nom. Nous sommes appelés à entrer dans un projet qui nous dépasse. « Là où est notre trèsor, là aussi sera notre cœur ». (2011-02-26)

Voir le commentaire de Frère Yvan / Chapitre 16, v 1-5 Comment célébrer l’office divin écrit le 25 février 2011
Verset(s) :

1. Comme dit le prophète : « Sept fois le jour, j'ai dit ta louange. »

2. Ce nombre sacré de sept, nous le réaliserons en nous acquittant des devoirs de notre service au moment du matin, de prime, de tierce, de sexte, de none, de vêpres et de complies,

3. car c'est de ces heures du jour qu'il a dit : « Sept fois le jour, j'ai dit ta louange. »

4. Quant aux vigiles nocturnes, le même prophète dit à leur sujet : « ;Au milieu de la nuit, je me levais pour te rendre grâce. »

5. C'est donc à ces moments que nous ferons monter nos louanges vers notre créateur « pour les jugements de sa justice » : à matines, prime, tierce, sexte, none, vêpres et complies ; et la nuit, « nous nous lèverons pour lui rendre grâce ».

Commentaire :

Benoît dans ce chapitre replace l’office divin dans sa véritable perspective, qui est celle de la création. Ce chiffre sept est celui des sept jours de la Création au livre de la genèse. Chiffre sacré, en lien avec notre Créateur.

La journée du moine, rythmée par l’office, est une hymne à la Création, c’est une création nouvelle où toute activité prend un sens nouveau.

Notre journée n’est pas une plate succession d’activités, c’est une histoire d’amour, un crescendo qui part de la Création du monde, au cœur de la nuit, qui passe par la Passion et la Résurrection du Christ, et qui se termine dans l’attente du Seigneur, qui vient. Nous pouvons vivre notre journée, au fils des heures de l’office, comme une histoire d’amour avec notre Dieu. L’office divin devient alors, non une obligation à accomplir, mais une suite de rendez-vous avec le véritable compagnon de notre vie. Des moments où nous nous arrêtons pour lui, pour écouter sa parole.

Pour Benoît le nombre des offices est important puisqu’il le rattache à deux versets de l’Ecriture. Mais au fond, ce n’est pas cela qui importe. Pour Benoit, les offices sont là, tout au long de la journée, comme des points d’appuis, des rappels, des oasis dans le désert.

L’office permet d’imprimer le visage de Dieu dans le temps, De rendre à Dieu ce qui est à Dieu, le temps de l’homme. L’office est un point d’appui : il nous garde du découragement, de la fatigue, de l’acédie. Quand on commence à dérailler dans la vie monastique, cela débute toujours par là, notre fidélité à l’Office. Car l’Office a un rôle de rappel. Il est là pour nous rappeler l’essentiel de notre vie ce que nous sommes venus chercher quand nous avons frappé à la porte du monastère. Celui pour qui nous sommes ici. L’Office est aussi comme une oasis dans le désert. Oasis pour nous-mêmes, mais aussi pour tous les hommes et les femmes du monde qui souffrent et qui peinent. Notre vocation n’est pas une villégiature tranquille, à l’abri des problèmes et des soucis des autres. Si nous sommes ici, si Dieu nous appelle ici, c’est pour que nous accomplissions cette œuvre de prière au service du monde. Nous sommes à l’Office pour cela, pour cette mission que Die nous confie pour le monde. (2011-02-25)

Voir le commentaire de Frère Yvan / Chapitre 15, v 1-4 L’alléluia écrit le 24 février 2011
Verset(s) :

1. De la sainte Pâque jusqu'à la Pentecôte, on dira alleluia sans interruption, aussi bien dans les psaumes que dans les répons ;

2. de la Pentecôte au début du carême, toutes les nuits, on le dira seulement aux nocturnes avec les six derniers psaumes.

3. Mais tous les dimanches, sauf en carême, les cantiques, les matines, prime, tierce, sexte et none seront dits avec alleluia, mais vêpres avec antienne.

4. Mais les répons ne seront jamais dits avec alleluia, si ce n'est de Pâques à la Pentecôte.

Commentaire :

L’alléluia : il ne s’agit pas d’un détail ! Ce n’est pas une rubrique sans importance : Benoît nous parle de l’année liturgique. Comment elle rythme notre vie sur le mystère pascal du Christ. C’est le but de l’année liturgique : nourrir et enrichir notre relation au Christ. Chacun de ces temps a un répondant du côté de Dieu, permet de célébrer un aspect du mystère pascal. C’est un des meilleurs relais pour faire entrer l’histoire, le temps de notre histoire dans la vision de Dieu. Voir Dieu à l’œuvre sous les différents modes de ses interventions. Dans l’histoire du salut comme dans chacune de nos vies.

La RB évoque le cycle liturgique surtout en mentionnant les particularités du Carême, au chapitre 49, et du Temps pascal, dans notre chapitre. Benoît note sagement que notre vie ne peut se soumettre à une seule observance, qui serait celle du Carême. Il est dans la nature de l’homme de connaître des temps et des saisons. C’est d’ailleurs sous l’angle de la plus ou moins grande abstinence : Carême, Pâques Pentecôte, de la plus ou moins grande allégresse liturgique que Benoît évoque les temps liturgiques.

Et le temps Ordinaire est aussi un temps liturgique : celui de la Parole; c’est aussi le cycle du pain quotidien. Le don de Dieu à chaque aujourd’hui, dans sa banalité et sa fidélité. Ce temps pascal tout entier, c’est aujourd’hui.

Ce chapitre nous rappelle aussi que l’alléluia doit être le climat habituel de notre cœur. Nous sommes ressuscités avec le Christ. Nous avons reçu l’Esprit Saint. L’éternité a fait son irruption dans le temps. Nous attendons le jour de la manifestation, où Dieu sera tout en tous. Cette attente, loin de nous distraire de l’accomplissement de notre tâche quotidienne, doit nous permettre de nous y donner plus librement, plus fidèlement. C’est dans ce climat tout à fait réaliste que Benoît nous invite à vivre. Etre dans le temps des hommes d’éternité. Notre vie se déroule dans la lumière de Pâques. C’est ce que signifie l’alléluia. (2011-02-24)