vendredi 3 octobre 2025 : journée de solitude pour la communauté, messe vers 6h45 après Laudes.

Commentaires sur la Règle



Voir le commentaire de Père Abbé Luc / Chapitre 07, v 67 L’humilité écrit le 01 février 2011
Verset(s) :

67. Lors donc que le moine aura gravi tous ces degrés d'humilité, il arrivera à cet amour de Dieu qui est parfait et qui met dehors la crainte.

Commentaire :

Le contraste est toujours saisissant entre le 12° degré et la conclusion de ce chapitre de l’humilité dont nous avons lu seulement la première phrase. Contraste entre la conscience profonde qui habite le moine d’être rien devant Dieu et la découverte à laquelle il parvient ; l’amour de Dieu qui chasse la crainte. Le contraste est si fort qu’on peut se demander : comment est-ce possible que la conscience aigüe d’être pécheur soit quasi simultanément une entrée dans l’amour de Dieu qui chasse la crainte.

La première chose que l’on peut dire, c’est que la mention de l’amour qui chasse la crainte nous éclaire sur ce qu’était la conscience aigüe d’être pécheur. Celle-ci n’était pas cette culpabilité qui enferme l’homme sur son dépit de ne pouvoir briller à ses propres yeux. Elle ressemble plutôt à cette humble reconnaissance de son incapacité à aimer vraiment, reconnaissance qui loin de replier l’homme sur lui-même l’ouvre totalement à Dieu, comme un enfant qui va se jeter dans les bras de son père. Là où la culpabilité est toujours au fond une recherche d’autojustification de soi par soi, la reconnaissance de notre être pécheur est l’abandon total de soi dans les bras de Dieu qui seul nous justifie. En ce sens se reconnaitre pécheur, dans cette radicalité, c’est déjà s’ouvrir à cet amour qui chasse la crainte.

Pour comprendre encore autrement ce contraste entre conscience aigüe d’être pécheur et la découverte de l’amour de Dieu qui chasse la crainte, on peut prendre une image, celle de l’éponge. Tout se passe comme si le long chemin de l’humilité consistait à se vider de nos illusoires prétention à exister par nous-mêmes ; à se vider de notre désir de nous sauver par nous-mêmes. Le chemin nous fait revivre en fait le combat que Jésus a mené jusqu’à son paroxysme sur la croix. A ceux qui lui disaient : « Sauve-toi, toi-même », il n’a répondu que par son silence et par son abandon total dans les mains du Père. Dans la conscience aigüe d’être pécheur, le moine confesse son incapacité foncière à se sauver lui-même. Il est vide de toute volonté d’autojustification. Il est là vide, comme une éponge totalement vidée de son eau. Il n’est alors que désir de l’amour sauveur de Dieu. Tout ce qu’il a laissé se creuser en lui sur le chemin de l’humilité peut se remplir de cet amour de Dieu qui est sans crainte. (2011-02-01)

Voir le commentaire de Frère Damase / Chapitre 01, v 1 Les espèces de moines - écrit le 02 août 2010
Verset(s) :

1. Il est clair qu'il existe quatre espèces de moines.

Commentaire :

St Benoît distingue quatre espèces de moines ; volontiers je dirai qu’il y en a autant que de monastères. Nos différentes communautés sont bien diverses dans les us et coutumes, même à l’intérieur d’une congrégation ; même s’il y a des familles d’esprit, de sentir vis-à-vis de la Règle, nos monastères sont façonnés par le lieu, les coutumes, les frères, les abbés ; en un mot par la vie locale.

Chaque moine aime sa communauté, sa tradition et ses coutumes ; nous n’aimons pas être critiqués, ridiculisés par un journaliste de plus ou moins bonne foi. Peut être qu’il faudrait avoir cette délicatesse fraternelle, non seulement entre frères, mais encore entre communautés. ''Ne pas juger'' nous dit le Christ.

Ne pas trainer dans la poussière une communauté parce qu’elle vit comme ceci ou comme cela. Ce n’est pas notre sensibilité monastique, ni nos choix ecclésiaux, il est légitime de le dire ; il est inutile d’en rajouter, ou même de médire. D’autant que généralement nous parlons plutôt par oui dire que par expérience longue.

Nous savons très bien que le pont aux ânes de la persévérance, n’est pas dans l’observance (horaire alimentation, confort, silence, travail) ; mais dans la vie commune, le vie fraternelle (se porter les uns les autres, vivre ensemble toute une vie dans la stabilité à une communauté), et la prière (écouter un Dieu qui ne parle jamais, ou tout au moins dont la parole incessante ne nous dit rien pour le quotidien). Et cette vie commune et cette prière existent dans toutes nos communautés.

Partout il y a des frères qui persévèrent dans ce combat, ils n’ont pas moins de mérite que nous. Les chartreux n’ont pas plus de mérite que nous.

Ayons une charité attentive entre nos monastères, comme à l’égard de toutes les communautés chrétiennes. Mieux vaut s’encourager à vivre la vie chrétienne que semer la zizanie.

Voir le commentaire de Frère Yvan / Chapitre 73, v 1-9 Un règle pour débutant écrit le 10 octobre 2009
Verset(s) :

1. Si d’ailleurs nous avons écrit cette règle, c'est pour qu'en l'observant dans les monastères, nous fassions preuve au moins d'une certaine décence morale et d'un commencement de vie religieuse.

2. Mais pour celui qui se hâte vers la perfection de la vie religieuse, il est des enseignements des saints Pères dont l'observation conduit l'homme jusqu'aux cimes de la perfection.

3. Quelle est en effet la page, quelle est la parole ayant Dieu pour auteur, dans l'Ancien et le Nouveau Testament, qui ne soit une norme parfaitement droite pour la vie humaine ;?

4. Quel est le livre des saints Pères catholiques qui ne nous fasse entendre comment courir tout droit jusqu'à ce que nous parvenions à notre créateur ;?

5. Et encore les Conférences des Pères et leurs Institutions et leurs Vies , ainsi que la Règle de notre saint Père Basile,

6. que sont-elles d'autre que les instruments des vertus donnés par les moines de bonne conduite et obéissants ;?

7. Mais pour nous qui sommes paresseux, de mauvaise conduite et négligents, il y a de quoi rougir de confusion.

8. Toi donc, qui que tu sois, qui te hâtes vers la patrie céleste, accomplis avec l'aide du Christ cette toute petite règle pour débutants que nous avons fini d'écrire ;;

9. et alors seulement tu parviendras, grâce à la protection de Dieu, à ces sommets plus élevés de doctrine et de vertus que nous venons de mentionner. Amen.

Commentaire :

Une règle pour débutant.

Plusieurs fois, au long de la Règle, Benoît a demandé de la lire aux frères ? Dans ce dernier chapitre, il explique pourquoi il l’a écrite ? Il situe son œuvre à l’intérieur de la littérature chrétienne, et il nous éclaire sur le sens de la vie monastique : elle est la mise en pratique de ce que nous révèle l’Ecriture, l’un et l’autre testament. Elle est l’épanouissement de l’Evangile dans la tradition. Ce chapitre tout entier est une recommandation de lire l’Ecriture, guide de la vie. Les livres des Pères et la tradition monastique ne font que répéter et éclairer l’Ecriture. En face de la Parole de Dieu, des textes des Saints, Benoît présente sa Règle comme un petit opuscule qui ne mène pas loin ! La perfection est à chercher ailleurs « Une petite règle pour débutants » Deux fois dans ce chapitre, Benoît recommande aux moines de se hâter : « Se hâter vers la perfection » « Se hâter vers la patrie céleste » Le premier de ces buts est ici-bas, le second dans l’au delà. Cette hâte n’est pas étrangère à l’Ecriture. On la trouve même tout au long de l’Evangile : Marie est la Première à se hâter chez sa cousine Elisabeth. Les bergers, avertis de la naissance du Sauveur, se hâtent vers l’étable de Bethléem. Zachée se hâte de descendre de son Sycomore pour aller accueillir Jésus dans sa maison. Et Jésus lui-même nous dit sa hâte que le feu, qu’il est venu allumer sur la terre, embrase tous les hommes. Et nous ? vers qui, vers quoi nous hâtons-nous, au fil de nos journées ? (2009-10-10)

Voir le commentaire de Frère Yvan / Chapitre 69, v 1-4 Prendre la défense d’un autre écrit le 09 octobre 2009
Verset(s) :

1. Il faut prendre soin que personne au monastère, en aucune occasion, ne se permette de défendre un autre moine ou de lui servir comme de protecteur,

2. même s'ils sont unis par un lien de parenté quelconque.

3. Les moines ne se le permettront d'aucune manière, car cela peut être l'occasion de conflits très graves.

4. Si quelqu'un transgresse ce point, on le châtiera rigoureusement.

Commentaire :

La formule du titre est analogue dans ce chapitre et dans le suivant : « Qu’on ne se permette pas de protéger » « Qu’on ne se permette pas de frapper ! ». Les deux actes sont opposés mais les deux sont abusifs. Ils empiètent l’un et l’autre sur la vie du frère, sur sa relation à l’abbé à la communauté, à son père spirituel. Il y a des gens au tempérament de justicier. Les uns et les autres risquent d’intervenir de façon indiscrète dans la vie de leurs proches. S’occuper de ce qui ne les regarde pas. Aujourd’hui St Benoît traite de cette tendance à materner, à protéger, à défendre. Ce qui veut dire encore se mettre au-dessus de l’autre, le traiter comme inférieur. La vie fraternelle, comme l’amitié, suppose l’égalité, comme toute relation saine. Le besoin de protéger, de défendre, de materner, n’aide pas à grandir. Il établit une dépendance. Il maintient sous la coupe. Je préparais ce commentaire hier, alors que l’Evangile du jour était la parabole du Bon Samaritain. Comme il se montre miséricordieux fraternel même. Mais le lendemain il part. Il laisse à l’aubergiste les consignes et il s’en va. Il ne se rend pas propriétaire, ce n’est pas son blessé. Par rapport à nos frères, à notre famille. Par rapport aux hôtes qui nous demandent aide, nous avons à veiller à cette liberté de notre cœur. Laisser l’autre libre, ne pas chercher à maintenir une relation, à emprisonner par des liens affectifs. (2009-10-09)

Voir le commentaire de Frère Yvan / Chapitre 72, v 1-12 Le bon zèle des moines écrit le 09 octobre 2009
Verset(s) :

1. S'il existe un zèle mauvais et amer qui sépare de Dieu et conduit en enfer,

2. il existe aussi un bon zèle qui sépare des vices et conduit à Dieu et à la vie éternelle.

3. Tel est donc le zèle que les moines pratiqueront avec un ardent amour ;:

4. ils « se préviendront d'honneurs mutuels » ;

5. ils supporteront sans aucune impatience leurs infirmités corporelles et morales ;;

6. ils s'obéiront à l'envi ;

7. personne ne recherchera ce qu'il juge être son avantage, mais plutôt celui d'autrui ;;

8. ils pratiqueront la charité fraternelle avec désintéressement ;;

9. avec amour ils craindront Dieu ;

10. ils affectionneront leur abbé d'une charité sincère et humble ;;

11. « ils ne préféreront absolument rien au Christ. ;»

12. Que celui-ci nous fasse parvenir tous ensemble à la vie éternelle ;!

Commentaire :

Le bon zèle des moines.

Ce texte est le plus beau de la Règle ? C’est un peu intimidant de le commenter !

St Benoît commence ce chapitre en opposant les deux zèles : le zèle mauvais, amer, qui sépare de Dieu – Le bon zèle qui sépare des vices et mène à Dieu. On pense au texte de « la cité de Dieu » de St Augustin = « deux amants ont fait deux cités : l’amour de soi jusqu’au mépris de Dieu, la cité terrestre » - l’amour de Dieu jusqu’au mépris de soi, la cité céleste » XIV/28. St Benoît décrit ce bon zèle en 8 courtes sentences, qui rappellent les instruments des bonnes œuvres. Mais ici Benoît laisse de côté l’ascèse personnelle. Il ne parle, que des relations entre frères et il débouche sur l’amour du Christ. « Supporter sans impatience les infirmités corporelles et morales de nos frères » C’est notre combat quotidien et c’est réciproque : mes frères ont besoin d’autant de patience que moi, sans doute plus « Ne pas chercher ce qui est le meilleur pour moi » Ce verset aussi est d’application courante dans nos vies, pour la nourriture, par exemple, est-ce que je pense à laisser le meilleur à mes frères ?

« Aimer son abbé d’une charité sincère et humble » La fête de Père Luc approche, elle est une occasion de lui témoigner notre affection et notre reconnaissance.

« Ne préférer absolument rien au Christ ». Frère Adalbert nous dit que Benoît emprunte cette formule à St Cyprien. Se savoir aimé par le Christ. Que cette relation habite notre cœur de plus en plus. (2009-10-09)

Voir le commentaire de Frère Yvan / Chapitre 71, v 1-9 Relation entre frères écrit le 08 octobre 2009
Verset(s) :

1. Ce n'est pas seulement envers l'abbé que tous doivent pratiquer le bien de l'obéissance, mais en outre les frères s'obéiront mutuellement,

2. sachant que par cette voie de l'obéissance ils iront à Dieu.

3. Aussi, mis à part les ordres de l'abbé ou des prévôts qu'il institue, ordres auxquels nous ne permettons pas que l'on préfère ceux des particuliers,

4. pour le reste tous les inférieurs obéiront à leurs anciens en toute charité et empressement.

5. Si quelqu'un est pris à contester, on le réprimandera.

6. De plus, si un frère reçoit une réprimande quelconque de l'abbé ou de n'importe lequel de ses anciens pour quelque raison que ce soit, si mince qu'elle puisse être,

7. et s'il sent que l'esprit de n'importe quel ancien est légèrement irrité contre lui ou ému si peu que ce soit,

8. aussitôt et sans délai il se prosternera à terre et fera satisfaction, étendu à ses pieds, jusqu'à ce qu'une bénédiction vienne calmer cette émotion.

9. Celui qui refuse de faire cela, on lui infligera un châtiment corporel, ou bien, s'il est obstiné, on le chassera du monastère.

Commentaire :

Relation entre frères.

Comme les deux précédents chapitres, il s’agit dans ce chapitre des relations fraternelles : après « ne pas défendre un autre frère » « ne pas se permettre de frapper », il s’agit aujourd’hui de « l’obéissance mutuelle et comment réagir aux réprimandes »

Benoît parle ici d’une obéissance hiérarchisée : les plus jeunes doivent obéir aux plus anciens. C’est seulement au chapitre suivant, sur le bon zèle, que l’obéissance deviendra pleinement réciproque. Mais déjà ce chapitre élargit le cadre : l’obéissance n’est pas dire seulement à l’abbé et aux doyens : elle est dire à tout frère ancien. Elle prend une place unique, elle régit toute la vie commune. Peu importe que l’ancien soit plus ou moins qualifié pour donner l’ordre, peu importe la qualité objective de ce qui est demandé : l’obéissance est toujours un bien pour le moine. Elle lui fait pratiquer le renoncement, l’humilité, l’amour fraternel. Elle le met à la suite du Christ. « Elle est la voie par laquelle on va à Dieu » dit Benoît. Ce qui nous rappelle le prologue : « revenir par l’obéissance laborieuse à celui dont on s’était écarté par une désobéissance paresseuse » Tout au long de la Règle cette perspective générale du prologue a été précisée et concrétisée dans toute l’existence du moine. Comme au troisième degré d’humilité, comme à propos de l’obéissance dans les choses impossibles. Benoît indique d’un mot pourquoi le moine obéit : par charité, l’amour du Christ et des frères. Et ce que nous savons, c’est que le fruit de l’obéissance, c’est la liberté du cœur.

La deuxième partie de notre texte se rattache aux deux précédents, elle traite des réprimandes. Mais Benoît ne s’adresse plus à celui qui réprimande. Il parle aux jeunes frères. Il les invite à recevoir humblement toutes les remarques de leurs aînés, même si le frère ancien est irrité : l’humilité est désarmante. Elle calme les émotions de la colère. Elle rétablit la relation.

Nous pouvons nous demander : est-ce que je reconnais avoir tord, parfois ? Puis-je accepter une remarque ? Est-ce que je demande pardon ? (2009-10-08)

Voir le commentaire de Frère Yvan / Chapitre 70, v 1-7 On n’osera pas frapper un frère. écrit le 07 octobre 2009
Verset(s) :

1. On évitera, au monastère, toute occasion de présomption,

2. et nous décrétons que personne n'aura le droit d'excommunier ou de frapper aucun de ses frères, s'il n'en a reçu pouvoir de l'abbé.

3. Mais « on reprendra les coupables en présence de tous, afin de faire peur aux autres. ;»

4. Quant aux enfants jusqu'à l'âge de quinze ans, tous auront soin de les maintenir dans l'ordre et les surveilleront,

5. mais en toute mesure et raison.

6. Si quelqu'un se permet quoi que ce soit contre un adulte sans instructions de l'abbé ou s'emporte sans discrétion contre des enfants, il subira les sanctions de règle,

7. car il est écrit : « Ce que tu ne veux pas qu'on te fasse, ne le fais pas à autrui. ;»

Commentaire :

« Ce que tu ne veux qu’on te fasse, ne le fais pas à autrui » Cette « Règle d’or » on la retrouve de nombreuses fois dans l’Ecriture – Jésus dit qu’elle résume toute la loi et les prophètes. Benoît la cite plusieurs fois : au chap 4 à propos des moines étrangers et ici encore. Nous avons tendance à utiliser une mesure différente quand il s’agit de nous-même, ou quand il s’agit d’un autre frère. Ce que nous faisons n’a pas beaucoup d’importance, n’est pas si grave, C’est chez nous signe de liberté nous n’en sommes plus là.. Par contre, si nous surprenons un frère en défaut, surtout sur un point qui nous est sensible, nous sommes bouleversés ! Le monde s’écroule, le monastère est perdu si on laisse faire cela. Deux poids, deux mesures ! Jésus parle de la poutre que nous avons dans l’œil, qui fausse notre appréciation de la paille qui est dans l’œil de notre frère. Alors que faire ? Laisser aller ? Ce n’est pas ce que dit

St Benoît : il encourage à la correction fraternelle. Il cite la première lettre à Timothée : « On reprendra les coupables… « Un verset qu’il a déjà utilisé deux fois. Mais cette correction fraternelle ne peut porter du fruit que dans un certain climat spirituel. D’après ce que dit ce chapitre 70 on peut caractériser ce climat par trois points :

- D’abord il n’est permis à personne de frapper, ni d’exclure : nous sommes des frères.

- Ensuite le bon ordre est à la charge de tous : nous n’avons pas à démissionner, à laisser aller.

- Enfin, si on est irrité, mieux vaut s’abstenir : rien de bon ne se fait sous l’emprise de la colère.

Cela suppose donc que nous regardions l’autre comme un frère, tous les autres comme des frères. Que nous nous comportions en responsable du bien commun, de la vie de la communauté. Que nous fassions passer l’amour de l’autre avant notre agacement. (2009-10-07)

Voir le commentaire de Père Abbé Luc / Chapitre 68, v 1-5 Si l’on en joint à un frère des choses impossibles. écrit le 03 octobre 2009
Verset(s) :

1. Si l'on enjoint à un frère des choses pénibles ou impossibles, il recevra l'ordre de celui qui commande en toute douceur et obéissance.

2. S'il voit que le poids du fardeau excède absolument la mesure de ses forces, il représentera à son supérieur, patiemment et opportunément, les raisons de son impuissance,

3. sans orgueil ou résistance ni contradiction.

4. Si, après ses représentations, l'ordre du supérieur se maintient sans qu'il change d'avis, l'inférieur saura qu'il est bon pour lui d'agir ainsi,

5. et par charité, confiant dans le secours de Dieu, il obéira.

Commentaire :

Ce petit chapitre nous place au cœur de notre vie monastique, il nous en fait rejoindre l’essentiel : le don de soi dans une communauté très humaine par amour du Christ… don de soi qui passe concrètement par la remise de soi dans l’obéissance. Et ici, Benoît nous invite à regarder en face le fait que l’obéissance n’est pas facile toujours. Il parle de fardeau, il utilise aussi le verbe « enjoindre » verbe bâti sur la même racine que mot « joug ». Enjoindre pourrait se traduire « mettre sous un joug », pour garder l’image. Ces images sont fortes ; mais elles traduisent sûrement bien ce que l’on peut ressentire, quand l’obéissance est difficile. Il y a quelque chose de pesant ….. ou l’on ne semble pas vraiment libre. Ce ressenti est lui aussi à regarder en face et en à parler avec un tiers, si c’est possible, pour essayer d’y voir plus clair. Car il s’agit de discerner dans le dialogue avec celui qui commande. D’où vient ce sentiment de poids d’écrasement ? Vient-il de mes peurs ou de mes résistances ou bien vient-il d’un réel excès dans l’exigence, excès que je ne saurai pas gérer ? Le discernement est à vivre dans le dialogue et dans la foi, les yeux fixés sur le Christ. Car c’est à lui qu’on choisit d’obéir en désirant obéir à des hommes très concrets. L’obéissance, vécues au monastère, dans ses petites comme dans ses grandes expressions, veut nous faire goûter que le joug du Christ est facile et son fardeau léger, plus facile et plus léger que la propre tyrannie de nos illusions, de nos peurs et de nos passions. St Benoît parle pour vivre ce discernement dans la lumière, de douceur et de charité. Douceur et charité sont comme deux lampes qui éclairent dans leur discernement et le frère et celui qui commande. (2009-10-03)

Voir le commentaire de Frère Yvan / Chapitre 18, v 1-6 Dans quel ordre doit-on dire ces psaumes ? écrit le 03 octobre 2009
Verset(s) :

1. Tout d'abord, on dira le verset « Dieu, viens à mon aide ; Seigneur, hâte-toi de m'aider », gloria ; puis l'hymne de chaque heure.

2. Ensuite à l'heure de prime, le dimanche, on dira quatre sections du psaume cent-dix-huit.

3. Aux autres heures, à savoir tierce, sexte et none, on dira chaque fois trois sections du susdit psaume cent-dix-huit.

4. A prime de la seconde férie, on dira trois psaumes, à savoir le premier, le deuxième et le sixième.

5. Et ainsi, chaque jour à prime jusqu'au dimanche, on dira à la suite trois psaumes chaque fois jusqu'au psaume dix-neuf, en divisant en deux les psaumes neuf et dix-sept.

6. De la sorte, on commencera toujours par le vingtième aux vigiles du dimanche.

Commentaire :

Dans quel ordre doit-on dire ces psaumes ?

Nous commençons un long chapitre particulièrement précis. Le maître faisait dire tous les Psaumes à la suite, en reprenant à chaque office là où l’on s’était arrêté à l’office précédent. Les monastères récitaient tout le psautier chaque semaine, mais il le pratiquait en deux parties = une partie nocturne, les PS 1 à 108, une partie vespérale, les Ps 109 à 147. Le système romain est la base de celui de Benoît : quand il modifie, c’est pour diminuer les répétitions et réduire la longueur des offices. « Tout d’abord on dira le verset « Dieu vient à mon aide, Seigneur à notre secours » puis l’hymne de chaque heure » C’est Cassien certainement, qui est à l’origine de l’usage de Verset du Ps 69 au début de chaque office, et comme prière dans certaines circonstances. La conférence 10 de Cassien, sur la prière très belle, nous dit que la répétition de verset est le meilleur moyen pour arriver à la prière continuelle. Prier sans cesse Cassiodore nous dit que les moines d’Italie répétaient ce verset 3 fois, au début de tout ce qu’ils entreprenaient. Le Règle de St Colomban demande de le dire trois fois, dans le temps de prière silencieuse qui suit chaque Psaume de l’office. Pour Benoît, il ne s’agit plus d’une formule continuellement répétée par chacun pour alimenter sa vie de prière personnelle. C’est l’introduction de chaque office du jour. Le Chapitre 35 demande aussi aux semainiers de la cuisine de dire trois fois ce verset au début de la semaine. Cassien n’a pas réussi à persuader les moines latins d’employer le « Dieu vient à mon aide » pour prier sans cesse. Son éloge de cette formule l’a seulement fait adopter de façon plus restreinte. Mais grâce à lui, l’usage du verset, au début de chaque office s’est imposé à toute l’Eglise d’Occident.

Le verset du Psaume 69 nous rappelle une chose importante notre prière est l’œuvre de Dieu en nous. Sans l’Esprit Saint nous ne savons prier. En demandant l’aide du Seigneur nous entrons dans la prière par sa porte unique : l’humble reconnaissance du don mystérieux dont tout dépend. Les moines et les moniales d’Occident aujourd’hui sont eux aussi en recherche de prier sans cesse. Le « Dieu vient à mon aise » Le « suscipe » surtout la prière des vêpres est dans notre carquois, avec bien d’autres versets de l’Ecriture. Nous n’oublions pas l’enseignement de Mgr Séraphin sur la prière du cœur, la prière de vêpres en lien avec la dimension corporelle de notre prière. (2009-10-03)

Voir le commentaire de Père Abbé Luc / Chapitre 67, v 1-7 Des frères envoyés en voyage écrit le 01 octobre 2009
Verset(s) :

1. Les frères qui vont partir en voyage se recommanderont à l'oraison de tous les frères et de l'abbé,

Commentaire :

« Des frères envoyés en voyage »

L’expression du titre de ce chapitre est heureuse. Les moines quand ils voyagent sont « Envoyés » Ils ne voyagent pas au gré de leurs désirs ou de leurs caprices comme les gyrovagues. Non ils sont envoyés, mandatés, par l’abbé et la communauté pour une affaire ou une mission précise. Nos voyages et nos sorties, comprises de la sorte, ne nous extraient pas de notre mission fondamentale de moine. A l’extérieur nous poursuivons notre vocation de prière et de vigilance dans l’amour pour Dieu et les frères. Il serait triste en effet si , une fois la porte du monastère franchie, le moine se sentait libéré des obligations de notre vie et perdait ses repères intérieurs ? Comme si la vie qu’il menait au monastère n’était qu’un manteau extérieur que l’on a vite enlevé. Il est vrai que nos voyages à l’extérieur peuvent constituer une épreuve car le rythme et le style de vie sont soudain différents. Les voyages nous éprouvent dans notre fidélité à l’office : allons-nous savoir nous préserver des rendez-vous avec le Seigneur ? Allons-nous savoir nous arrêter pour lui ? Peut être à d’autres moments qu’habituellement.. mais le plus important est de se donner ces temps de rendez-vous pour la prière. Notre coutume de loger habituellement dans une communauté religieuse offre un réel soutien. Les voyages nous éprouvent aussi dans notre manière de vivre : par exemple allons-nous faire des dépenses que personne nous a demandées ? Au retour saurons-nous rendre nos comptes avec précision comme de bons gérants de biens qui appartiennent à la communauté ? Si quelque chose a été difficile à vivre, saurons-nous en parler ? Oui les voyages nous éprouvent dans notre fidélité profonde, et ils sont une belle opportunité d’exercer notre responsabilité d’homme qui assume sa vie ses choix, en relation avec sa communauté, comme un moine envoyé toujours en tenue de service. (2009-10-01)