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7. Tous suivront donc en tout la règle comme leur maîtresse, et nul n'aura la témérité de s'en écarter.
8. Personne au monastère ne suivra la volonté de son propre cœur,
9. et nul ne se permettra de contester avec son abbé insolemment ou en dehors du monastère.
10. Si quelqu'un se le permet, il subira les sanctions de règle.
11. De son côté, cependant, l'abbé fera tout dans la crainte de Dieu et le respect de la règle, sachant qu'il devra sans aucun doute rendre compte de tous ses jugements au juge souverainement équitable qu'est Dieu.
12. S'il est question de choses moins importantes pour le bien du monastère, il aura recours seulement au conseil des anciens,
13. comme il est écrit : « Fais tout avec conseil, et quand ce sera fait, tu ne le regretteras pas. »
« Ne pas suivre la volonté de son propre cœur »…Voilà l’envers négatif d’une formule que nous affectionnons : « chercher Dieu ». Cette formule positive : « chercher Dieu » nous redit ce désir intime qui nous a fait venir ici et qui nous meut intérieurement. Chercher Celui que notre cœur aime et désire aimer davantage. Le chercher en discernant en toute chose sa volonté… L’envers négatif « ne pas suivre la volonté de son propre cœur » nous rappelle à un certain réalisme. Notre cœur n’est pas d’emblée unifié et totalement tourné vers son Seigneur. Il est capable, et parfois de manière très subtile, d’arranger les choses de telle manière que tout se déroule comme « je » le souhaite, sans plus me soucier de ce que le Seigneur veut. Pour nous aider, à demeurer dans cette attention profonde à la volonté de Dieu, Benoit nous donne deux outils : la règle, comme maitresse de vie, et la demande de conseil…
La règle, maitresse de vie, est ce tuteur auquel nous avons choisi de lier notre vie quotidienne, dans l’espoir de grandir de façon plus affermie, plus rapide, plus droite. Guidée par la règle, nous évitons bien des chemins de traverse ou des facilités qui nous laissent centrés sur nous-mêmes et sur nos illusions. Par ex : obéir à la cloche, au lieu de vouloir continuer ce que l’on fait, nous rend plus libre pour la rencontre du Seigneur à l’office ou pour la rencontre des frères au repas, au chapitre ou la classe de chant. Ne négligeons pas ces détails quotidiens. Il forme en nous l’homme intérieur, l’homme plus libre et plus donné.
Le second point, davantage adressé à l’abbé, vaut je crois pour tous : demander conseil… C’est un bel instrument que Benoit nous offre ici. Savoir s’enquérir d’un conseil, d’un autre regard sur ce que l’on fait, ce n’est pas renoncer à sa responsabilité. C’est plutôt vivre très concrètement le fait que nous en sommes en communauté. Les travaux et les choix de chacun intéressent la marche de la communauté. Nos emplois, nos services sont ordonnés au bien de tous, non à notre seule satisfaction ou à nos ambitions… Comme nous y invite Ezalen, ne craignons pas de perdre du temps à demander conseil ou à faire circuler l’information dans nos emplois ou nos services. Loin de perdre notre temps, nous le gagnons en recueillant davantage d’idées et surtout nous accroissons la qualité de la collaboration entre nous. Je ne vois que du bénéfice, à la différence de décisions prises trop vite qui susciteront ensuite récriminations ou critiques… Je crois ensuite qu’il y a une vraie joie à vivre entre nous, en partageant nos avis et nos recherches. Soyons heureux de nous donner de telle joie !(2015-07-07)
1. Chaque fois qu'il sera question au monastère de quelque chose d'important, l'abbé convoquera toute la communauté et dira lui-même de quoi il est question.
2. Une fois entendu le conseil des frères, il en délibérera à part soi et fera ce qu'il juge le meilleur.
3. Or si nous avons dit que tous seraient appelés au conseil, c'est que souvent le Seigneur révèle à un inférieur ce qui vaut le mieux.
4. Or donc les frères donneront leur avis en toute soumission et humilité, et ils ne se permettront pas de défendre leur opinion effrontément,
5. mais la décision dépendra de l'abbé : celle qu'il juge être plus opportune, tous y obéiront.
6. Toutefois, s'il sied aux disciples d'obéir au maître, il convient que celui-ci dispose toute chose avec prévoyance et justice.
Avec ce petit chapitre, nous avons une application politique de l’écoute que St Benoit ne cesse de demander à ses moines… Ecoute personnelle et communautaire afin de gérer la marche concrète et les questions qui se posent à la communauté. On pourrait résumer en une phrase : dans un monastère, la vie politique, entendue comme la gestion des affaires, est fondée sur l’écoute.
Premier moment de cette écoute : celle de l’abbé qui discerne le bien fondé de proposer ou non un sujet à traiter. Second moment : la communauté accueille cette question et y réfléchit. En général, aujourd’hui, on laisse souvent un laps de temps entre l’annonce du sujet et le temps de l’échange. Ces deux premiers moments sont ceux d’une écoute qui appelle une réflexion en vue d’un discernement …
Ensuite, c’est l’abbé qui écoute les avis de chacun, avec une attention particulière aux plus jeunes. La prise de parole des frères elle-même se vit sous le mode de l’écoute. Le frère donne son avis, avec humilité. Il veut chercher avant tout la volonté de Dieu, et non pas s’accrocher à tout prix à son point de vue. Une fois entendue les paroles des frères, l’abbé délibère, mot à mot, « il fait une pesée dans sa pensée ». Il cherche et écoute ce qui peut être la volonté de Dieu. Deux adjectifs sont employés par Benoit pour qualifier ce qui guide la décision : « utilius » (le plus utile, traduit ici « le meilleur ») et « salubrius » (le plus salubre, le plus propice à la santé, traduit par « le plus opportun ». Décider le plus utile, c’est être attentif à ce que les choses marchent. Décider le plus opportun, c’est être attentif au temps et au moment. Chercher la volonté de Dieu passe par cette double attention d’une efficacité et d’une opportunité. Se faisant, on espère entrer et nous tenir dans le dessein de Dieu pour la communauté, dans l’histoire concrète qu’elle construit jour après jour.
Dernière précision sur la qualité de l’écoute en vue des prises de décisions : si les moines sont invités à obéir à l’abbé, ce dernier est fortement invité à demeurer en état de discernement pour prévoir les choses et les faire avec justice. Dans la RB, cette façon habituelle de rappeler les responsabilités de chacun, affirme qu’il n’y en fait qu’un Maitre que l’on cherche à écouter ensemble : c’est Dieu. Chacun à notre place, nous n’avons pas d’autres propos que de chercher toujours à faire ce qui lui plait, aujourd’hui… (2015-07-04)
1. Chaque fois qu'il sera question au monastère de quelque chose d'important, l'abbé convoquera toute la communauté et dira lui-même de quoi il est question.
2. Une fois entendu le conseil des frères, il en délibérera à part soi et fera ce qu'il juge le meilleur.
3. Or si nous avons dit que tous seraient appelés au conseil, c'est que souvent le Seigneur révèle à un inférieur ce qui vaut le mieux.
4. Or donc les frères donneront leur avis en toute soumission et humilité, et ils ne se permettront pas de défendre leur opinion effrontément,
5. mais la décision dépendra de l'abbé : celle qu'il juge être plus opportune, tous y obéiront.
6. Toutefois, s'il sied aux disciples d'obéir au maître, il convient que celui-ci dispose toute chose avec prévoyance et justice.
Avec ce petit chapitre, nous avons une application politique de l’écoute que St Benoit ne cesse de demander à ses moines… Ecoute personnelle et communautaire afin de gérer la marche concrète et les questions qui se posent à la communauté. On pourrait résumer en une phrase : dans un monastère, la vie politique, entendue comme la gestion des affaires, est fondée sur l’écoute.
Premier moment de cette écoute : celle de l’abbé qui discerne le bien fondé de proposer ou non un sujet à traiter. Second moment : la communauté accueille cette question et y réfléchit. En général, aujourd’hui, on laisse souvent un laps de temps entre l’annonce du sujet et le temps de l’échange. Ces deux premiers moments sont ceux d’une écoute qui appelle une réflexion en vue d’un discernement …
Ensuite, c’est l’abbé qui écoute les avis de chacun, avec une attention particulière aux plus jeunes. La prise de parole des frères elle-même se vit sous le mode de l’écoute. Le frère donne son avis, avec humilité. Il veut chercher avant tout la volonté de Dieu, et non pas s’accrocher à tout prix à son point de vue. Une fois entendue les paroles des frères, l’abbé délibère, mot à mot, « il fait une pesée dans sa pensée ». Il cherche et écoute ce qui peut être la volonté de Dieu. Deux adjectifs sont employés par Benoit pour qualifier ce qui guide la décision : « utilius » (le plus utile, traduit ici « le meilleur ») et « salubrius » (le plus salubre, le plus propice à la santé, traduit par « le plus opportun ». Décider le plus utile, c’est être attentif à ce que les choses marchent. Décider le plus opportun, c’est être attentif au temps et au moment. Chercher la volonté de Dieu passe par cette double attention d’une efficacité et d’une opportunité. Se faisant, on espère entrer et nous tenir dans le dessein de Dieu pour la communauté, dans l’histoire concrète qu’elle construit jour après jour.
Dernière précision sur la qualité de l’écoute en vue des prises de décisions : si les moines sont invités à obéir à l’abbé, ce dernier est fortement invité à demeurer en état de discernement pour prévoir les choses et les faire avec justice. Dans la RB, cette façon habituelle de rappeler les responsabilités de chacun, affirme qu’il n’y en fait qu’un Maitre que l’on cherche à écouter ensemble : c’est Dieu. Chacun à notre place, nous n’avons pas d’autres propos que de chercher toujours à faire ce qui lui plait, aujourd’hui… (2015-07-04)
7. Tous suivront donc en tout la règle comme leur maîtresse, et nul n'aura la témérité de s'en écarter.
8. Personne au monastère ne suivra la volonté de son propre cœur,
9. et nul ne se permettra de contester avec son abbé insolemment ou en dehors du monastère.
10. Si quelqu'un se le permet, il subira les sanctions de règle.
11. De son côté, cependant, l'abbé fera tout dans la crainte de Dieu et le respect de la règle, sachant qu'il devra sans aucun doute rendre compte de tous ses jugements au juge souverainement équitable qu'est Dieu.
12. S'il est question de choses moins importantes pour le bien du monastère, il aura recours seulement au conseil des anciens,
13. comme il est écrit : « Fais tout avec conseil, et quand ce sera fait, tu ne le regretteras pas. »
« Ne pas suivre la volonté de son propre cœur »…Voilà l’envers négatif d’une formule que nous affectionnons : « chercher Dieu ». Cette formule positive : « chercher Dieu » nous redit ce désir intime qui nous a fait venir ici et qui nous meut intérieurement. Chercher Celui que notre cœur aime et désire aimer davantage. Le chercher en discernant en toute chose sa volonté… L’envers négatif « ne pas suivre la volonté de son propre cœur » nous rappelle à un certain réalisme. Notre cœur n’est pas d’emblée unifié et totalement tourné vers son Seigneur. Il est capable, et parfois de manière très subtile, d’arranger les choses de telle manière que tout se déroule comme « je » le souhaite, sans plus me soucier de ce que le Seigneur veut. Pour nous aider, à demeurer dans cette attention profonde à la volonté de Dieu, Benoit nous donne deux outils : la règle, comme maitresse de vie, et la demande de conseil…
La règle, maitresse de vie, est ce tuteur auquel nous avons choisi de lier notre vie quotidienne, dans l’espoir de grandir de façon plus affermie, plus rapide, plus droite. Guidée par la règle, nous évitons bien des chemins de traverse ou des facilités qui nous laissent centrés sur nous-mêmes et sur nos illusions. Par ex : obéir à la cloche, au lieu de vouloir continuer ce que l’on fait, nous rend plus libre pour la rencontre du Seigneur à l’office ou pour la rencontre des frères au repas, au chapitre ou la classe de chant. Ne négligeons pas ces détails quotidiens. Il forme en nous l’homme intérieur, l’homme plus libre et plus donné.
Le second point, davantage adressé à l’abbé, vaut je crois pour tous : demander conseil… C’est un bel instrument que Benoit nous offre ici. Savoir s’enquérir d’un conseil, d’un autre regard sur ce que l’on fait, ce n’est pas renoncer à sa responsabilité. C’est plutôt vivre très concrètement le fait que nous en sommes en communauté. Les travaux et les choix de chacun intéressent la marche de la communauté. Nos emplois, nos services sont ordonnés au bien de tous, non à notre seule satisfaction ou à nos ambitions… Comme nous y invite Ezalen, ne craignons pas de perdre du temps à demander conseil ou à faire circuler l’information dans nos emplois ou nos services. Loin de perdre notre temps, nous le gagnons en recueillant davantage d’idées et surtout nous accroissons la qualité de la collaboration entre nous. Je ne vois que du bénéfice, à la différence de décisions prises trop vite qui susciteront ensuite récriminations ou critiques… Je crois ensuite qu’il y a une vraie joie à vivre entre nous, en partageant nos avis et nos recherches. Soyons heureux de nous donner de telle joie ! (2015-07-04)
30. L'abbé doit toujours se rappeler ce qu'il est, se rappeler le titre qu'on lui donne, et savoir que « plus on commet à la garde de quelqu'un, plus on lui réclame ».
31. Et qu'il sache combien difficile et ardue est la chose dont il s'est chargé, de diriger les âmes et de se mettre au service de caractères multiples : l'un par la gentillesse, un autre par la réprimande, un autre par la persuasion... ;
32. et selon la nature et l’intelligence d’un chacun, il se conformera et s’adaptera à tous, de façon non seulement à ne pas subir de perte dans le troupeau commis à sa garde, mais aussi à se féliciter de l’accroissement d’un bon troupeau.
33. Avant tout, qu'il ne laisse point de côté ni ne compte pour peu de chose le salut des âmes commises à sa garde, en prenant plus de soin des choses passagères, terrestres et temporaires,
34. mais qu'il songe sans cesse qu'il est chargé de diriger des âmes, dont il devra aussi rendre compte.
35. Et pour ne pas se plaindre d'un éventuel manque de ressources, qu'il se souvienne qu'il est écrit : « Cherchez d'abord le royaume de Dieu et sa justice, et tout cela vous sera donné par surcroît » ;
36. et encore : « Rien ne manque à ceux qui le craignent. »
37. Et qu'il sache que, quand on se charge de diriger les âmes, on doit se préparer à en rendre compte.
38. Et autant il sait avoir de frères confiés à ses soins, qu'il soit bien certain qu'il devra rendre compte au Seigneur de toutes ces âmes au jour du jugement, sans parler de sa propre âme, bien entendu.
39. Et ainsi, craignant sans cesse l'examen que le pasteur subira un jour au sujet des brebis qui lui sont confiées, en prenant garde aux comptes d'autrui, il se rend attentif aux siens,
40. et en procurant aux autres la correction par ses avertissements, lui-même se corrige de ses vices.
St Benoit se fait une haute idée du ministère de l’abbé : celle d’être un instrument privilégié entre les frères et Dieu…le pasteur qui a pour mission de diriger et servir, chacune et toutes ensembles, les brebis qui lui sont confiées. Benoit se fait insistant pour que l’abbé sache s’adapter aux multiples caractères, « l’un par la gentillesse, l’autre par la réprimande, un autre par la persuasion… » Cette attention aux multiples caractères est difficile. Elle demande à l’abbé du tact, de la patience, mais aussi de la fermeté. Elle peut être aussi difficile à accepter pour les frères. En effet, tous voudraient être traités avec gentillesse, et surtout pas par la réprimande… Les frères doivent reconnaitre parfois qu’il y a une part aveugle en eux. La réprimande ou la persuasion sera alors la manière adaptée pour prendre conscience d’une mauvaise habitude qu’on ne voit pas par soi-même…Tel est un des rôles confiés à l’abbé : celui de faire en sorte que les frères ne restent pas dans l’illusion sur eux-mêmes. Les réveiller, les exhorter à avancer toujours pour ne pas passer à côté de la grâce qu’il y a à rechercher le Royaume et sa justice.
La justice du Royaume n’a rien à voir avec la tranquillité ou avec une vie installée. Si notre vie monastique fait de nous des gens installés, qui râlent aux moindres contrariétés, et qui ne sont pas capables de se laisser déplacer dans leurs habitudes, c’est qu’elle a perdu de son sel et de sa saveur. Le ministère de l’abbé est d’aider chacun et toute la communauté à demeurer des moines en éveil. Jamais blasés ou découragés, mais demeurant vivants dans leur propos de conversion qui ne s’achèvera qu’avec la mort. Pour cela, l’abbé se doit lui-même de veiller sur sa vie et de se corriger de ses vices. Sans complaisance pour l’abbé, Benoit l’invite à ne pas oublier qu’il est un homme et un moine comme les autres qui aura aussi à rendre compte pour lui-même. C’est aussi sa chance : vivre la recherche de Dieu avec ses frères. Je me confie à votre prière. Et ensemble en cette veille de jubilé, nous pouvons rendre grâce avec notre frère Yvan pour ce que la vie monastique nous donne de devenir : des hommes chaque jour un peu plus libres et un peu plus heureux…
(2015-06-27)
30. L'abbé doit toujours se rappeler ce qu'il est, se rappeler le titre qu'on lui donne, et savoir que « plus on commet à la garde de quelqu'un, plus on lui réclame ».
31. Et qu'il sache combien difficile et ardue est la chose dont il s'est chargé, de diriger les âmes et de se mettre au service de caractères multiples : l'un par la gentillesse, un autre par la réprimande, un autre par la persuasion... ;
32. et selon la nature et l’intelligence d’un chacun, il se conformera et s’adaptera à tous, de façon non seulement à ne pas subir de perte dans le troupeau commis à sa garde, mais aussi à se féliciter de l’accroissement d’un bon troupeau.
33. Avant tout, qu'il ne laisse point de côté ni ne compte pour peu de chose le salut des âmes commises à sa garde, en prenant plus de soin des choses passagères, terrestres et temporaires,
34. mais qu'il songe sans cesse qu'il est chargé de diriger des âmes, dont il devra aussi rendre compte.
35. Et pour ne pas se plaindre d'un éventuel manque de ressources, qu'il se souvienne qu'il est écrit : « Cherchez d'abord le royaume de Dieu et sa justice, et tout cela vous sera donné par surcroît » ;
36. et encore : « Rien ne manque à ceux qui le craignent. »
37. Et qu'il sache que, quand on se charge de diriger les âmes, on doit se préparer à en rendre compte.
38. Et autant il sait avoir de frères confiés à ses soins, qu'il soit bien certain qu'il devra rendre compte au Seigneur de toutes ces âmes au jour du jugement, sans parler de sa propre âme, bien entendu.
39. Et ainsi, craignant sans cesse l'examen que le pasteur subira un jour au sujet des brebis qui lui sont confiées, en prenant garde aux comptes d'autrui, il se rend attentif aux siens,
40. et en procurant aux autres la correction par ses avertissements, lui-même se corrige de ses vices.
St Benoit se fait une haute idée du ministère de l’abbé : celle d’être un instrument privilégié entre les frères et Dieu…le pasteur qui a pour mission de diriger et servir, chacune et toutes ensembles, les brebis qui lui sont confiées. Benoit se fait insistant pour que l’abbé sache s’adapter aux multiples caractères, « l’un par la gentillesse, l’autre par la réprimande, un autre par la persuasion… » Cette attention aux multiples caractères est difficile. Elle demande à l’abbé du tact, de la patience, mais aussi de la fermeté. Elle peut être aussi difficile à accepter pour les frères. En effet, tous voudraient être traités avec gentillesse, et surtout pas par la réprimande… Les frères doivent reconnaitre parfois qu’il y a une part aveugle en eux. La réprimande ou la persuasion sera alors la manière adaptée pour prendre conscience d’une mauvaise habitude qu’on ne voit pas par soi-même…Tel est un des rôles confiés à l’abbé : celui de faire en sorte que les frères ne restent pas dans l’illusion sur eux-mêmes. Les réveiller, les exhorter à avancer toujours pour ne pas passer à côté de la grâce qu’il y a à rechercher le Royaume et sa justice.
La justice du Royaume n’a rien à voir avec la tranquillité ou avec une vie installée. Si notre vie monastique fait de nous des gens installés, qui râlent aux moindres contrariétés, et qui ne sont pas capables de se laisser déplacer dans leurs habitudes, c’est qu’elle a perdu de son sel et de sa saveur. Le ministère de l’abbé est d’aider chacun et toute la communauté à demeurer des moines en éveil. Jamais blasés ou découragés, mais demeurant vivants dans leur propos de conversion qui ne s’achèvera qu’avec la mort. Pour cela, l’abbé se doit lui-même de veiller sur sa vie et de se corriger de ses vices. Sans complaisance pour l’abbé, Benoit l’invite à ne pas oublier qu’il est un homme et un moine comme les autres qui aura aussi à rendre compte pour lui-même. C’est aussi sa chance : vivre la recherche de Dieu avec ses frères. Je me confie à votre prière. Et ensemble en cette veille de jubilé, nous pouvons rendre grâce avec notre frère Yvan pour ce que la vie monastique nous donne de devenir : des hommes chaque jour un peu plus libres et un peu plus heureux…
(2015-06-27)
23. Dans son enseignement, d'autre part, l'abbé doit toujours observer la norme que l'Apôtre exprime ainsi : « Reprends, supplie, réprimande »,
24. c'est-à-dire que, prenant successivement des attitudes diverses, mêlant les amabilités aux menaces, il se montrera farouche comme un maître et tendre comme un père.
25. C'est dire qu'il doit reprendre durement les indisciplinés et les turbulents, supplier d'autre part les obéissants, les doux et les patients de faire des progrès ; quant aux négligents et aux méprisants, nous l'avertissons de les réprimander et de les reprendre.
26. Et qu'il ne laisse point passer les fautes des délinquants, mais qu'il les retranche jusqu'à la racine dès qu'elles commencent à se montrer, pendant qu'il en a encore le pouvoir, se souvenant de la condamnation d'Héli, le prêtre de Silo.
27. Les âmes bien nées et intelligentes, qu'il les reprenne une et deux fois par des admonitions verbales,
28. mais les mauvais sujets, durs, orgueilleux, désobéissants, que les coups et le châtiment corporel les arrêtent dès le début de leur faute, vu qu'il est écrit : « On ne corrige pas un sot avec des mots »,
29. et encore : « Frappe ton fils de la verge et tu délivreras son âme de la mort. »
Un nouveau devoir incombe à l’abbé, celui de « reprendre, supplier et réprimander… ». C’est la partie la plus redoutable du ministère abbatial. Elle est dans la continuité de son ministère d’enseignement…Il enseigne, mais parfois cela résiste… Il rappelle des façons de faire pour que nous marchions ensemble. Mais des frères continuent de marcher comme si de rien n’était. Aveuglement ? Endurcissement ? Faiblesse ? Oubli ? Ici l’abbé doit discerner d’où vient la résistance et en fonction adapter sa manière de corriger : par l’encouragement ou par la remontrance.
St Benoit demande à l’abbé de ne pas relâcher son attention pour aider les frères à progresser. Car il est serviteur d’un projet plus grand que lui. A travers sa parole et son ministère, Dieu veut dire quelque chose au frère et réaliser son projet d’amour sur le frère. Ce dernier a choisi la vie monastique pour se convertir, pour marcher plus concrètement et plus réellement à la suite du Christ. Normalement, il est prêt à accepter toute remarque pour avancer… Quelques frères me disent de temps en temps : « surtout n’hésite pas à me dire s’il y a quelque chose qui ne va pas, que je dois corriger…. » Est-ce que chacun a en lui cette disposition intérieure de liberté pour recevoir une remarque ou une remontrance éventuelle ? Si on ne sent pas très libre, voulons-nous le devenir davantage ? C’est là que se joue vraiment pour chacun le dynamisme de la conversion. Voulons-nous vraiment progresser ? Acceptons-nous d’être aidés par une parole autre qui vient éclairer la part aveugle de nos comportements ? Cette question est centrale. Si nous cultivons en nous ce désir, si chaque jour, devant Dieu nous lui demandons cette grâce de progresser, nous accepterons plus profondément les remarques ou les remontrances qui viendront toujours nous déranger…. Nous sommes si aveugles sur nous-mêmes !
Plus le frère cultivera en lui cette liberté et ce désir de progresser, et plus il acceptera d’être éventuellement corrigé, plus l’abbé pourra être regardé comme un père, et non plus comme un surveillant ou comme un gardien que l’on craint. Derrière cela, c’est la propre relation de chacun avec Dieu qui se dessine : le laisse-ton vraiment nous conduire, nous enseigner, et éventuellement nous corriger, parce qu’on a confiance en Lui comme envers un Père ? (2015-06-25)
23. Dans son enseignement, d'autre part, l'abbé doit toujours observer la norme que l'Apôtre exprime ainsi : « Reprends, supplie, réprimande »,
24. c'est-à-dire que, prenant successivement des attitudes diverses, mêlant les amabilités aux menaces, il se montrera farouche comme un maître et tendre comme un père.
25. C'est dire qu'il doit reprendre durement les indisciplinés et les turbulents, supplier d'autre part les obéissants, les doux et les patients de faire des progrès ; quant aux négligents et aux méprisants, nous l'avertissons de les réprimander et de les reprendre.
26. Et qu'il ne laisse point passer les fautes des délinquants, mais qu'il les retranche jusqu'à la racine dès qu'elles commencent à se montrer, pendant qu'il en a encore le pouvoir, se souvenant de la condamnation d'Héli, le prêtre de Silo.
27. Les âmes bien nées et intelligentes, qu'il les reprenne une et deux fois par des admonitions verbales,
28. mais les mauvais sujets, durs, orgueilleux, désobéissants, que les coups et le châtiment corporel les arrêtent dès le début de leur faute, vu qu'il est écrit : « On ne corrige pas un sot avec des mots »,
29. et encore : « Frappe ton fils de la verge et tu délivreras son âme de la mort. »
Un nouveau devoir incombe à l’abbé, celui de « reprendre, supplier et réprimander… ». C’est la partie la plus redoutable du ministère abbatial. Elle est dans la continuité de son ministère d’enseignement…Il enseigne, mais parfois cela résiste… Il rappelle des façons de faire pour que nous marchions ensemble. Mais des frères continuent de marcher comme si de rien n’était. Aveuglement ? Endurcissement ? Faiblesse ? Oubli ? Ici l’abbé doit discerner d’où vient la résistance et en fonction adapter sa manière de corriger : par l’encouragement ou par la remontrance.
St Benoit demande à l’abbé de ne pas relâcher son attention pour aider les frères à progresser. Car il est serviteur d’un projet plus grand que lui. A travers sa parole et son ministère, Dieu veut dire quelque chose au frère et réaliser son projet d’amour sur le frère. Ce dernier a choisi la vie monastique pour se convertir, pour marcher plus concrètement et plus réellement à la suite du Christ. Normalement, il est prêt à accepter toute remarque pour avancer… Quelques frères me disent de temps en temps : « surtout n’hésite pas à me dire s’il y a quelque chose qui ne va pas, que je dois corriger…. » Est-ce que chacun a en lui cette disposition intérieure de liberté pour recevoir une remarque ou une remontrance éventuelle ? Si on ne sent pas très libre, voulons-nous le devenir davantage ? C’est là que se joue vraiment pour chacun le dynamisme de la conversion. Voulons-nous vraiment progresser ? Acceptons-nous d’être aidés par une parole autre qui vient éclairer la part aveugle de nos comportements ? Cette question est centrale. Si nous cultivons en nous ce désir, si chaque jour, devant Dieu nous lui demandons cette grâce de progresser, nous accepterons plus profondément les remarques ou les remontrances qui viendront toujours nous déranger…. Nous sommes si aveugles sur nous-mêmes !
Plus le frère cultivera en lui cette liberté et ce désir de progresser, et plus il acceptera d’être éventuellement corrigé, plus l’abbé pourra être regardé comme un père, et non plus comme un surveillant ou comme un gardien que l’on craint. Derrière cela, c’est la propre relation de chacun avec Dieu qui se dessine : le laisse-ton vraiment nous conduire, nous enseigner, et éventuellement nous corriger, parce qu’on a confiance en Lui comme envers un Père ? (2015-06-25)
16. Il ne fera pas de distinction entre les personnes dans le monastère.
17. Il n'aimera pas l'un plus que l'autre, à moins qu'il ne l'ait reconnu meilleur dans les bonnes œuvres ou l'obéissance.
18. A l'homme venu de l'esclavage qui entre en religion, il ne préférera pas l'homme libre, à moins qu'il n'existe une autre cause raisonnable.
19. Que si l'abbé en décide ainsi, la justice l'exigeant, il fera de même pour le rang de qui que ce soit ; sinon, ils garderont leur place normale,
20. car « esclave ou libre, nous sommes tous un dans le Christ », et sous un même Seigneur nous portons d'égales obligations de service, car « Dieu ne fait pas acception de personnes. »
21. Notre seul titre à être distingués par lui, c'est d'être reconnus meilleurs que les autres en bonnes œuvres et humbles.
22. L'abbé doit donc témoigner une charité égale à tous, avoir les mêmes exigences dans tous les cas suivant les mérites.
Ce matin, on retrouve l’injonction faite à l’abbé en termes de « devoir », cette fois-ci, à propos de sa manière d’aimer les frères. « L’abbé doit donc témoigner une charité égale à tous, avoir les même exigences dans tous les cas suivant les mérites ». Même charité et même exigence pour tous. Les mêmes exigences pour tous sont données principalement par la règle commune. Il y a parfois des exceptions que l’abbé peut permettre pour tenir compte des personnes et de leur situation. Plus difficile est d’avoir une même charité pour tous. Ici les mots que Benoit utilise peuvent nous aider. Quand il demande : « l’abbé n’aimera pas l’un plus que l’autre », il utilise le verbe « amare ». Quand il conclue : « L’abbé doit donc témoigner une charité égale à tous », il utilise le mot « caritas ». « Amor, amare » d’un côté, « caritas » de l’autre. L’amour, « amor », nous fait spontanément préférer l’un à un autre. Nous ne maitrisons pas ce premier mouvement. Nous portons cette capacité d’être touché par un frère plus qu’un autre et de donner de l’affection. C’est humain. Mais Benoit invite l’abbé à aller plus loin, à vivre de la charité qui est le nom de l’amour quand il vient de Dieu, afin d’aimer de façon égale tous les frères. La charité répandue dans nos cœurs par l’Esprit Saint est ce dynamisme qui élargit notre capacité spontanée à aimer. Elle pousse les barrières que nous mettons instinctivement à notre amour, pour nous protéger ou pour rester confiner dans des relations faciles…
Dans la lumière de cet amour-charité, chaque frère a sa place. C’est une place unique et précieuse, la place qu’il a aux yeux de Dieu. L’abbé est appelé à entrer dans ce regard de Dieu sur ces hommes confiés à sa responsabilité. Il est entrainé à se faire serviteur de l’amour de Dieu pour chacun, sans faire acception de personne. Serviteur d’un amour qui veut faire grandir car il porte en lui un germe infini d’amour et de vie. C’est l’œuvre de l’Esprit Saint en chacun. (2015-06-24)
16. Il ne fera pas de distinction entre les personnes dans le monastère.
17. Il n'aimera pas l'un plus que l'autre, à moins qu'il ne l'ait reconnu meilleur dans les bonnes œuvres ou l'obéissance.
18. A l'homme venu de l'esclavage qui entre en religion, il ne préférera pas l'homme libre, à moins qu'il n'existe une autre cause raisonnable.
19. Que si l'abbé en décide ainsi, la justice l'exigeant, il fera de même pour le rang de qui que ce soit ; sinon, ils garderont leur place normale,
20. car « esclave ou libre, nous sommes tous un dans le Christ », et sous un même Seigneur nous portons d'égales obligations de service, car « Dieu ne fait pas acception de personnes. »
21. Notre seul titre à être distingués par lui, c'est d'être reconnus meilleurs que les autres en bonnes œuvres et humbles.
22. L'abbé doit donc témoigner une charité égale à tous, avoir les mêmes exigences dans tous les cas suivant les mérites.
Ce matin, on retrouve l’injonction faite à l’abbé en termes de « devoir », cette fois-ci, à propos de sa manière d’aimer les frères. « L’abbé doit donc témoigner une charité égale à tous, avoir les même exigences dans tous les cas suivant les mérites ». Même charité et même exigence pour tous. Les mêmes exigences pour tous sont données principalement par la règle commune. Il y a parfois des exceptions que l’abbé peut permettre pour tenir compte des personnes et de leur situation. Plus difficile est d’avoir une même charité pour tous. Ici les mots que Benoit utilise peuvent nous aider. Quand il demande : « l’abbé n’aimera pas l’un plus que l’autre », il utilise le verbe « amare ». Quand il conclue : « L’abbé doit donc témoigner une charité égale à tous », il utilise le mot « caritas ». « Amor, amare » d’un côté, « caritas » de l’autre. L’amour, « amor », nous fait spontanément préférer l’un à un autre. Nous ne maitrisons pas ce premier mouvement. Nous portons cette capacité d’être touché par un frère plus qu’un autre et de donner de l’affection. C’est humain. Mais Benoit invite l’abbé à aller plus loin, à vivre de la charité qui est le nom de l’amour quand il vient de Dieu, afin d’aimer de façon égale tous les frères. La charité répandue dans nos cœurs par l’Esprit Saint est ce dynamisme qui élargit notre capacité spontanée à aimer. Elle pousse les barrières que nous mettons instinctivement à notre amour, pour nous protéger ou pour rester confiner dans des relations faciles…
Dans la lumière de cet amour-charité, chaque frère a sa place. C’est une place unique et précieuse, la place qu’il a aux yeux de Dieu. L’abbé est appelé à entrer dans ce regard de Dieu sur ces hommes confiés à sa responsabilité. Il est entrainé à se faire serviteur de l’amour de Dieu pour chacun, sans faire acception de personne. Serviteur d’un amour qui veut faire grandir car il porte en lui un germe infini d’amour et de vie. C’est l’œuvre de l’Esprit Saint en chacun. (2015-06-24)