vendredi 3 octobre 2025 : journée de solitude pour la communauté, messe vers 6h45 après Laudes.

Commentaires sur la Règle



Voir le commentaire de Père Abbé Luc / Chapitre 35, 1-6 Des semainiers de la cuisine. écrit le 11 février 2016
Verset(s) :

1. Les frères se serviront mutuellement et personne ne sera dispensé du service de la cuisine, sauf maladie ou si l'on est occupé à une chose d'intérêt majeur,

2. parce que cela procure une plus grande récompense et charité.

3. Aux faibles, on accordera des aides, pour qu'ils ne le fassent pas avec tristesse,

4. mais ils auront tous des aides suivant l'importance de la communauté et l'état des lieux.

5. Si la communauté est nombreuse, le cellérier sera dispensé de la cuisine, ainsi que ceux qui, comme nous l'avons dit, sont occupés à des tâches d'intérêt supérieur.

6. Les autres se serviront mutuellement dans la charité.

Commentaire :

A « l'école du service du Seigneur» (RB ProI4S), il n'est pas surprenant que Benoit rappelle que l'on doit « se servir mutuellement», particulièrement dans le service de la cuisine et des tables. Le service mutuel est l'expression concrète de notre désir de servir le Christ. Quand Benoit dit «personne ne sera dispensé », l'expression est en fait plus précise pour signifier « que personne ne se tienne pour dispensé », même les plus faibles qui pourront avoir des aides. Plus que l'écueil de l'oisiveté, Benoit tient ici à éviter que quelqu'un reste en dehors de cet élan de charité qui anime profondément la vie communautaire. Que personne ne se tienne pour dispensé de servir, parce que personne n'est dispensé de vivre la charité. Celle-ci n'est pas une option parmi d'autre, elle est la vie même d'une communauté chrétienne. La charité exprimée dans le service mutuel fonde notre vivre ensemble et le consolide. En même temps, elle est toujours un appel qui nous tire plus loin hors de notre égoïsme et de nos replis frileux sur nous-mêmes. A ce propos, je rappelle ici ce que dit très justement notre coutumier: « Chaque frère doit avoir à coeur d'assurer les services qui lui sont demandés. S'il ne peut raisonnablement et durablement accomplir certaines tâches, qu'il en parle aux responsables, et qu'il prenne davantage sa part d'autres services plus à sa mesure. D'autres services nous seront encore demandés, qui ne pourront jamais être prévus: accueil inopiné d'un hôte ou d'un moine, course en voiture, etc ... C'est dans la mesure où chaque frère cherche à être disponible que la communauté vit non seulement dans l'ordre, mais selon l'ordre de la charité»(9). Je remarque que tel ou tel frère ne pouvant être toujours là dans son groupe de desservice, ou ayant peu de service, s'arrange pour donner un coup de main, même dans les autres groupes. Cette disponibilité généreuse qui ne compte pas vivifie tout le corps communautaire. Elle aide à sortir chacun de la logique syndicale: «je fais mon service et pas plus », pour entrer dans la logique de la charité: je me donne et je reste attentif aux besoins afin de rendre service.

Dans la lumière de la fête de N.D. de Lourdes, nous pouvons nous souvenir de la parole de Ste Bernadette:« la Ste Vierge s'est servie de moi, comme d'un balai. Après usage, elle m'a remis derrière la porte », pour signifier l'humble service de sa vie cachée à Nevers. (2016-02-11)

Voir le commentaire de Père Abbé Luc / Chapitre 34, v 1-10 Si tous doivent recevoir également le nécessaire. écrit le 29 janvier 2016
Verset(s) :

1. Comme il est écrit : « On distribuait à chacun selon ses besoins. ;»

2. Ici nous ne disons pas que l'on fasse acception des personnes, – ;à Dieu ne plaise ! – mais que l'on ait égard aux infirmités.

3. Ici, que celui qui a moins de besoins, rende grâce à Dieu et ne s'attriste pas ;

4. quant à celui qui a plus de besoins, qu'il s'humilie de son infirmité et ne s'enorgueillisse pas de la miséricorde qu'on a pour lui,

5. et ainsi tous les membres seront en paix.

6. Avant tout, que le fléau du murmure ne se manifeste sous aucun prétexte par aucune parole ou signe quelconque.

7. Si l'on y est pris, on subira une sanction très sévère.

Commentaire :

Hier St Benoit insistait sur le fait que tout est commun et que l'on n'a rien en propre.

Aujourd'hui, il prend en compte le fait que les besoins de chacun sont différents. Bel équilibre

évangélique enraciné dans l'exemple de la première communauté chrétienne qui mettait tout

en commun, en ayant égard aux besoins de chacun. La vie selon l'évangile n'est pas le

communisme égalitariste.

Mais cette attention aux besoins de chacun demande autant, sinon plus, une vigilance

intérieure que l'attention à mettre tout en commun. L'esprit d'envie ou de jalousie peut

s'insinuer. St Benoit propose une parade: rendre grâce à Dieu. Rendre grâce à Dieu de ne pas

avoir ce besoin-là. L'esprit de vanité ou d'orgueil peut habiter celui que l'on gratifie de

choses que tous n'auront pas. La parade est l'humilité devant Dieu et les autres. Reconnaître

qu'on a des faiblesses ou des limites auxquels on concède des faveurs. Dans tous les cas,

Benoit invite à se référer à Dieu. Regarder mon frère et ses besoins, se regarder soi-même

dans la lumière de Dieu. Oui, apprenons non pas à mesurer les besoins des autres à nos

propres besoins, mais à la mesure de la bonté de Dieu qui sait s'adapter à chacun. Et de

même, apprenons à nous regarder nous-mêmes comme ne méritant pas tout ce que nous

recevons de la bonté de Dieu et de celle des frères. Cultivons ce regard de la reconnaissance

émerveillée devant les largesses de notre Dieu pour nous et pour chacun.

« Ainsi tous seront en paix », dit St Benoit. La vie commune est une école de paix, car

elle nous entrai ne chacun à dépasser les jugements immédiats et à tout regarder dans la

lumière de Dieu. Non pas se boucher les yeux, mais les ouvrir selon la miséricorde de Dieu.

La paix est au prix de cette purification du regard et du cœur.Ici nous sommes tous plus ou

moins des mal voyants ou des aveugles, et sur nos propres besoins que nous avons tendance à

majorer, et sur ceux des autres que nous minorons très facilement. Dieu ne fait pas ainsi. Il

donne abondamment à chacun, non pour satisfaire nos appétits infantiles, mais pour faire

grandir notre désir d'homme. Dieu ne nous cajole pas, il nous aime en nous donnant à chacun

d'acquérir notre vraie stature d'homme adulte qui se donne et s'engage à aimer. (2016-01-29)

Voir le commentaire de Père Abbé Luc / Chapitre 34, v 1-10 Si tous doivent recevoir également le nécessaire. écrit le 29 janvier 2016
Verset(s) :

1. Comme il est écrit : « On distribuait à chacun selon ses besoins. ;»

2. Ici nous ne disons pas que l'on fasse acception des personnes, – ;à Dieu ne plaise ! – mais que l'on ait égard aux infirmités.

3. Ici, que celui qui a moins de besoins, rende grâce à Dieu et ne s'attriste pas ;

4. quant à celui qui a plus de besoins, qu'il s'humilie de son infirmité et ne s'enorgueillisse pas de la miséricorde qu'on a pour lui,

5. et ainsi tous les membres seront en paix.

6. Avant tout, que le fléau du murmure ne se manifeste sous aucun prétexte par aucune parole ou signe quelconque.

7. Si l'on y est pris, on subira une sanction très sévère.

Commentaire :

Hier St Benoit insistait sur le fait que tout est commun et que l'on n'a rien en propre.

Aujourd'hui, il prend en compte le fait que les besoins de chacun sont différents. Bel équilibre

évangélique enraciné dans l'exemple de la première communauté chrétienne qui mettait tout

en commun, en ayant égard aux besoins de chacun. La vie selon l'évangile n'est pas le

communisme égalitariste.

Mais cette attention aux besoins de chacun demande autant, sinon plus, une vigilance

intérieure que l'attention à mettre tout en commun. L'esprit d'envie ou de jalousie peut

s'insinuer. St Benoit propose une parade: rendre grâce à Dieu. Rendre grâce à Dieu de ne pas

avoir ce besoin-là. L'esprit de vanité ou d'orgueil peut habiter celui que l'on gratifie de

choses que tous n'auront pas. La parade est l'humilité devant Dieu et les autres. Reconnaître

qu'on a des faiblesses ou des limites auxquels on concède des faveurs. Dans tous les cas,

Benoit invite à se référer à Dieu. Regarder mon frère et ses besoins, se regarder soi-même

dans la lumière de Dieu. Oui, apprenons non pas à mesurer les besoins des autres à nos

propres besoins, mais à la mesure de la bonté de Dieu qui sait s'adapter à chacun. Et de

même, apprenons à nous regarder nous-mêmes comme ne méritant pas tout ce que nous

recevons de la bonté de Dieu et de celle des frères. Cultivons ce regard de la reconnaissance

émerveillée devant les largesses de notre Dieu pour nous et pour chacun.

« Ainsi tous seront en paix », dit St Benoit. La vie commune est une école de paix, car

elle nous entrai ne chacun à dépasser les jugements immédiats et à tout regarder dans la

lumière de Dieu. Non pas se boucher les yeux, mais les ouvrir selon la miséricorde de Dieu.

La paix est au prix de cette purification du regard et du cœur.Ici nous sommes tous plus ou

moins des mal voyants ou des aveugles, et sur nos propres besoins que nous avons tendance à

majorer, et sur ceux des autres que nous minorons très facilement. Dieu ne fait pas ainsi. Il

donne abondamment à chacun, non pour satisfaire nos appétits infantiles, mais pour faire

grandir notre désir d'homme. Dieu ne nous cajole pas, il nous aime en nous donnant à chacun

d'acquérir notre vraie stature d'homme adulte qui se donne et s'engage à aimer. (2016-01-29)

Voir le commentaire de Père Abbé Luc / Chapitre 33, v 1-7 Si les moines doivent avoir quelque chose en propre. écrit le 28 janvier 2016
Verset(s) :

1. Par dessus tout, il faut retrancher du monastère ce vice jusqu'à la racine :

2. que personne ne se permette de rien donner ou recevoir sans permission de l'abbé,

3. ni d'avoir rien en propre, absolument aucun objet, ni livre, ni tablette, ni stylet, mais absolument rien,

4. puisqu'on n'a même pas le droit d'avoir son corps et sa volonté à sa propre disposition.

5. Tout ce dont on a besoin, on le demande au père du monastère, et personne n'a le droit de rien avoir que l'abbé ne lui ait donné ou permis.

6. Que « tout soit commun à tous », comme il est écrit, en sorte que « ;personne ne dise sien quoi que ce soit », ni ne le considère comme tel.

7. Si quelqu'un est pris à se complaire dans ce vice extrêmement pernicieux, on l'avertira une et deux fois ;

Commentaire :

Dans ce chapitre, Benoit pose une exigence forte qui caractérise notre vie monastique. Moine, nous choisissons de vivre en n'ayant rien en propre. Et nous acceptons tous les moyens qui nous sont offerts pour atteindre ce but. Benoit les énumère: on donne et on reçoit avec ·la permission de l'abbé, et on ne garde rien pour soi sans l'accord de l'abbé. Exigence forte qui n'a pas de sens en dehors de l'évangile. Ce choix de vie est un choix heureux qui réveille et alimente notre désir d'être tout au Christ sans partage. En entrant, nous avons perçu la joie profonde de ce don total. Et tout au long de la vie commune, grandit cette joie d'être toujours plus libres pour le Christ.

Mais voilà, il peut arriver parfois que nous sommes tentés fortement, de reprendre d'une main ce que nous avons donné de l'autre. Soit sous la forme de quelque chose qu'on veut garder sans en parler, soit sous la forme plus insinueuse de choses qui s'accumulent et qui encombrent. Le malin a ici un fort pouvoir séducteur pour nous suggérer: « J'ai bien le droit d'avoir cela puisque d'autres en ont, et puis moi je n'ai pas la possibilité de faire ce que d'autre peuvent faire ... et puis moi on ne me donne jamais rien ... etc ... » Cette tentation est forte et parfois très mordante. Quand elle survient, ayons le courage de parler et de faire la vérité. Ne nous laissons pas berner ni entrainer dans le mensonge. Ce mensonge a un goût de mort, plus prononcé qu'il n'y parait. Il fait mentir notre propos de conversion d'être tout à Dieu par la mise en commun des biens. Notre profession monastique dont le rituel se conclue par « désormais tout sera commun entre nous» nous engage sur un chemin évangélique exigent de vie et de vérité.

Nous avons parmi nous de beaux exemples de frères dont la cellule est pratiquement vide et la liberté entière. Ils nous disent que la joie n'est pas dans les biens possédés. Ils partiront sans laisser trop de traces sinon celles de ce qu'ils auront semé dans les cœurs de leurs frères. Demandons-la grâce de cette liberté entière pour le Christ, Lui notre Joie véritable.(2016-01-28)

Voir le commentaire de Père Abbé Luc / Chapitre 32, v 1-5 Des outils et biens du monastère écrit le 27 janvier 2016
Verset(s) :

1. Pour l'avoir du monastère en outils, vêtements et biens de toute sorte, l'abbé choisira des frères, de vie et mœurs dont il soit sûr,

2. et il leur remettra ces différents objets, comme il le jugera bon, pour qu'ils les conservent et les recueillent.

3. De ces objets, l'abbé gardera l'inventaire. Ainsi, quand les frères se succèdent à tour de rôle dans l'emploi, il saura ce qu'il donne et ce qu'il reçoit.

4. Si quelqu'un traite les biens du monastère sans propreté ou sans soin, on le réprimandera.

5. S'il ne s'amende pas, il subira les sanctions de règle.

Commentaire :

Ce matin, je m'arrêterai simplement sur le titre de ce chapitre: « des outils et biens du monastère ». Tous, nous ne sommes que des usagers de ces biens qui ne nous appartiennent pas en propre. Selon nos emplois, nous est confiée la charge d'administrer une partie de ces biens: au linger, le linge; au cuisinier les denrées; au caviste, le vin; au responsable des transports, les voitures; au responsable des ordinateurs, le matériel informatique, etc ... Qu'il s'agisse de denrées périssables, de biens de consommation ou d'objets plus coûteux, à chacun revient de prendre soin, dit st Benoit, sans négligence, en se rappelant que tout est digne de respect et d'attention. Plus encore, prendre soin des denrées alimentaires que nous manipulons, c'est prendre soin de nous-mêmes qui les mangeons ... Je prends un exemple: Ramasser le pain à la fin du desservice, en le jetant dans le chariot comme si c'était des ordures, ce n'est ni respecter cet aliment symbolique, ni respecter ceux qui le mangeront. Prendre le pain et le poser dans le chariot avec respect, donne une toute autre dimension à ce geste et à la denrée ... Tout ce qu'on jette devient entaché de mépris ... De même garder propre des instruments ou du matériel, c'est honorer les frères ou soi-même qui les utilisons. Les responsables de secteurs ont ici une vigilance particulière à avoir pour que le matériel ou les objets commis à leur garde soient en bon état et restent propres. De même dans les usages communs, quand je laisse un outil ou un objet, je pense à celui qui l'utilisera après moi, afin qu'il le trouve comme j'aimerai le trouver ... Ici se vérifie concrètement combien la charité et l'attention fraternelle sont génératrices de beauté et de propreté.

Concernant les biens, il est heureux que nous changions de responsabilité afin de ne pas nous attacher aux choses. Veillons à ne pas nous créer des besoins ou à nous enchainer à des objets (ordinateurs ou autres), dont on a eu usage un temps mais plus ensuite. Gardons le souci de demeurer libre à l'égard des biens: ils sont au monastère, et non à nous. Un geste symbolique, mais fort de notre désir de liberté, pas toujours facile, est de veiller à bien remettre les clefs et tous les accès à celui succède dans un emploi. On coupe et on permet à l'autre d'être libre. Du coup, on se libère soi-même vraiment. Frères, notre rapport aux biens est le lieu d'une conquête incessante de notre liberté sur nos égoïsmes et sur nos peurs de manquer. Mais le bien de la liberté intérieure n'est-il pas plus précieux que tous les biens? (2016-01-27)

Voir le commentaire de Père Abbé Luc / Chapitre 32, v 1-5 Des outils et biens du monastère. écrit le 27 janvier 2016
Verset(s) :

1. Pour l'avoir du monastère en outils, vêtements et biens de toute sorte, l'abbé choisira des frères, de vie et mœurs dont il soit sûr,

2. et il leur remettra ces différents objets, comme il le jugera bon, pour qu'ils les conservent et les recueillent.

3. De ces objets, l'abbé gardera l'inventaire. Ainsi, quand les frères se succèdent à tour de rôle dans l'emploi, il saura ce qu'il donne et ce qu'il reçoit.

4. Si quelqu'un traite les biens du monastère sans propreté ou sans soin, on le réprimandera.

5. S'il ne s'amende pas, il subira les sanctions de règle.

Commentaire :

Ce matin, je m'arrêterai simplement sur le titre de ce chapitre: « des outils et biens du monastère ». Tous, nous ne sommes que des usagers de ces biens qui ne nous appartiennent pas en propre. Selon nos emplois, nous est confiée la charge d'administrer une partie de ces biens: au linger, le linge; au cuisinier les denrées; au caviste, le vin; au responsable des transports, les voitures; au responsable des ordinateurs, le matériel informatique, etc ... Qu'il s'agisse de denrées périssables, de biens de consommation ou d'objets plus coûteux, à chacun revient de prendre soin, dit st Benoit, sans négligence, en se rappelant que tout est digne de respect et d'attention. Plus encore, prendre soin des denrées alimentaires que nous manipulons, c'est prendre soin de nous-mêmes qui les mangeons ... Je prends un exemple: Ramasser le pain à la fin du desservice, en le jetant dans le chariot comme si c'était des ordures, ce n'est ni respecter cet aliment symbolique, ni respecter ceux qui le mangeront. Prendre le pain et le poser dans le chariot avec respect, donne une toute autre dimension à ce geste et à la denrée ... Tout ce qu'on jette devient entaché de mépris ... De même garder propre des instruments ou du matériel, c'est honorer les frères ou soi-même qui les utilisons. Les responsables de secteurs ont ici une vigilance particulière à avoir pour que le matériel ou les objets commis à leur garde soient en bon état et restent propres. De même dans les usages communs, quand je laisse un outil ou un objet, je pense à celui qui l'utilisera après moi, afin qu'il le trouve comme j'aimerai le trouver ... Ici se vérifie concrètement combien la charité et l'attention fraternelle sont génératrices de beauté et de propreté.

Concernant les biens, il est heureux que nous changions de responsabilité afin de ne pas nous attacher aux choses. Veillons à ne pas nous créer des besoins ou à nous enchainer à des objets (ordinateurs ou autres), dont on a eu usage un temps mais plus ensuite. Gardons le souci de demeurer libre à l'égard des biens: ils sont au monastère, et non à nous. Un geste symbolique, mais fort de notre désir de liberté, pas toujours facile, est de veiller à bien remettre les clefs et tous les accès à celui succède dans un emploi. On coupe et on permet à l'autre d'être libre. Du coup, on se libère soi-même vraiment. Frères, notre rapport aux biens est le lieu d'une conquête incessante de notre liberté sur nos égoïsmes et sur nos peurs de manquer. Mais le bien de la liberté intérieure n'est-il pas plus précieux que tous les biens? (2016-01-27)

Voir le commentaire de Père Abbé Luc / Chapitre 31, v 17-19 Du cellerier du monastère, ce qu'il sera ? écrit le 26 janvier 2016
Verset(s) :

17. Si la communauté est nombreuse, on lui donnera des auxiliaires, pour que lui aussi, grâce à leur aide, il remplisse la charge qui lui est confiée sans perdre la paix de l'âme.

18. On donnera ce qui est à donner et on demandera ce qui est à demander au moment voulu,

19. afin que personne ne soit troublé ou peiné dans la maison de Dieu.

Commentaire :

« On donnera ce qui est à donner, et on demandera ce qui à demander au moment

voulu ». «Au moment voulu» en latin horis conpetentibus, mot à mot aux heures qui sont

accordées, ou qui conviennent parce qu'on en a convenu ... Il vient du verbe « competo, ere »

qui veut dire « se rencontrer au même point, répondre à, s'accorder avec ». Le « moment

voulu» est l'heure où l'on s'accorde avec un autre avec d'autres. Pour que la vie soit possible

à plusieurs, il nous faut avoir un commun rapport au temps. Que ce soit la vie en société, en

famille ou en communauté. Qu'on pense aux horaires de train, aux horaires des repas en

famille, au travail, à l'heure d'un spectacle ou d'une manifestation. En ce sens, notre vie

commune n'est pas exceptionnelle. Elle s'appuie sur un horaire sur lequel nous nous

accordons, mais aussi sur des manières de vivre le temps (grand silence de la nuit, respect du

silence à l'heure de la sieste, plus largement le temps de la liturgie qui informe nos années). St

Benoit lie la paix dans la maison de Dieu à ce juste rapport au temps communautaire. Comme

c'est vrai! Si chacun voulait imposer son tempo, soit la dictature d'un seul l'emporterait, soit

règnerait le chaos de l'individualisme où il n'y a plus de possibilité de vivre ensemble.

Notre vie communautaire est belle, forte et pacifiée dans la mesure où chacun cherche

à s'accorder au rythme et au temps de la communauté. A chacun, il nous est demandé de nous

dessaisir de notre tempo, afin de faire corps avec la communauté. Et nous savons que cela

peut être un vrai combat, car nous avons des rythmes personnels qui nous marquent. Etre du

soir ou du matin. L'un aura la montre dure et sera plutôt en avance, l'autre aura la montre

molle et sera plutôt en retard. Le premier doit se battre contre l'impatience, le second contre la

nonchalance. La conversion à laquelle St Benoit nous appelle, c'est travailler sur nous-même

et sur nos tendances plus ou moins tenaces, afin de nous accorder au bel élan communautaire.

Le rapport au temps est particulièrement sensible, comme le rapport à la nourriture, car nous y

sommes sans cesse confrontés. Cherchons avec joie et conviction à nous accorder à la vie de

la communauté, pour ne pas être retard, pour ne pas faire attendre les autres, pour rendre le

service demandé en son temps, pour faire une requête à l'heure appropriée ... Sortons de notre

autoréférence, pour reprendre un mot du pape François. « Je me hâte et ne tarde pas

d'observer tes volontés », pouvons dire et demander avec le psalmiste. (2016-01-26) -

Voir le commentaire de Père Abbé Luc / Chapitre 31, v 13-16 Du cellerier du monastère, ce qu'il sera ? écrit le 21 janvier 2016
Verset(s) :

13. Qu'il ait avant tout l'humilité, et quand il n'y a rien à donner à quelqu'un, qu'il lui offre en réponse une parole aimable,

14. comme il est écrit : « Une parole aimable surpasse le don le plus précieux. »

15. Tout ce que l'abbé lui enjoindra, il en aura la responsabilité ; ce qu'il lui interdira, il ne se le permettra pas.

16. Il fournira aux frères la ration prescrite sans arrogance ni délai, de peur qu'ils ne s'irritent, en se souvenant de ce que mérite, selon la parole divine, « celui qui irritera un des petits. »

Commentaire :

Dans le passage de ce beau chapitre 31, trois type de parole sont évoqués: « la parole aimable» que le cellérier donnera quand il ne peut rien donner d'autre, la parole de l'abbé sous laquelle le cellérier fait ou ne fait pas certaines choses, et enfin la parole divine dont le cellérier se souvient pour donner la ration aux frères sans arrogance ni délai. Le cellérier est donc un homme d'écoute et un homme de parole. N'est-ce pas la qualité de son écoute qui sera le gage de la qualité de sa parole?

La vie monastique nous enseigne cela: plus on sait écouter, plus on sait donner une bonne parole. L'expérience nous le montre jour après jour, et parfois à nos propres dépens. Pour n'avoir pas su bien écouter, on dit des bêtises. Pour ne pas être dans cette disposition foncière d'humilité et d'obéissance, on parle trop et on le regrette. Comment valoriser ce trésor précieux de la parole échangée entre nous? Comment faire pour ne pas galvauder nos échanges en les transformant en joute verbale, à qui aura le dernier mot? Pour prendre une image, il nous faut « ôter nos sandales» devant le mystère de l'autre, comme nous essayons de le faire en présence de Dieu qui nous parle. Une expression familière dit: « venir avec ses gros sabots ». Une autre dit: «arriver comme un éléphant dans un magasin de porcelaine ». Ces deux manières manifestent une attitude pleine de soi-même et bien peu à l'écoute de l'autre dont on ne se préoccupe pas. L'écoute de la Parole divine dans la liturgie et la lectio nous apprend à enlever « nos gros sabots» plein de jugements et de prétentions. Comme Dieu, l'autre est toujours plus grand que ce que j'en perçois. De même l'obéissance à l'abbé contribue à prendre distance par rapport à notre moi-« éléphant» encombrant trop sûr de lui. Elle m'enseigne que je ne suis pas le centre du monde. Heureuse écoute et heureuse obéissance qui nous rendent plus ouvert sans crainte d'être diminué. Elles nous agrandissent au contraire. Elles nous rendent « magnanime», mot à mot avec une âme grande, capable de donner une parole de paix qui réconforte. La vie commune ne cesse de nous travailler, au sens de malaxer, afin de faire de nous des êtres écoutant et parlant. C'est là notre dignité de fils de Dieu et de frères du Christ. Laissons-nous faire, laissons déplacer. C'est salutaire. (2016-01-21)

Voir le commentaire de Père Abbé Luc / Chapitre 31, v 9-12 Du cellerier du monastère, ce qu'il sera ? écrit le 20 janvier 2016
Verset(s) :

9. Il prendra soin des malades, des enfants, des hôtes et des pauvres avec toute sa sollicitude, sachant sans aucun doute qu'il devra rendre compte pour toutes ces personnes au jour du jugement.

10. Il considérera tous les vases du monastère et tout son avoir comme les vases sacrés de l'autel ;

11. il ne tiendra rien pour négligeable.

12. Il ne cédera pas à l'avarice ni ne sera prodigue ou dissipateur de l'avoir du monastère, mais il fera tout avec mesure et selon les ordres de l'abbé.

Commentaire :

Soin des personnes-soin des objets. Dans les malades, les enfants, les hôtes et les pauvres, dont doit prendre soin le cellérier, on reconnaît le Christ. De même aux objets du monastère, commis à sa garde, on donne une valeur semblable à celle des vases sacrés de l'autel qui honorent le Christ. En quelques phrases, St Benoit ressaisit les relations et le travail dans la lumière du Christ. Tout est ordonné à sa gloire. « Rien» ni personne ne peut être tenu «pour négligeable » "dans la maison de Dieu ».

Il est éclairant ici de s'arrêter sur le mot « négliger» et toute la famille de mots dérivés (négligeable, négligence ... ). Ces mots reviennent à plusieurs reprises tout au long de la RB. Le verbe latin est « neglego », formé des deux mots « nec» et « lego », mot à mot ne pas recueillir, ne pas lire. Négliger des choses ou des personnes, c'est ne pas savoir recueillir leur valeur, ne pas savoir lire et voir vraiment ce qu'ils sont. En lien avec ce que l'on vient de dire, St Benoit invite donc le cellérier et finalement chacun des moines (cf. 32,4) à savoir lire la réalité des relations aux personnes et aux objets. Lire dans ma relation avec le pauvre et malade ma relation avec le Christ (cf aussi 36,10). Lire et reconnaître dans ma relation aux objets, ma relation aux vases sacrés de l'autel. Et ainsi de suite dans tous les aspects de notre vie. La négligence à l'office, c'est ne pas savoir lire que là se joue l'œuvre de Dieu; la négligence dans la vie communautaire, c'est ne pas savoir lire que là s'édifie Corps du Christ ... Voilà une évidence : nous ne savons pas lire ni reconnaître la réalité et les évènements dans leur vraie profondeur. Nous sommes toujours plus ou moins des aveugles. Sans cesse, nous risquons de passer à côté de la réalité de la vie en manquant le Christ qui nous attend, dans le frère, mais aussi dans le soin porté aux choses comme une marque de révérence envers Lui, l'auteur et la fin de tout bien. «Ne rien tenir pour négligeable », mot à mot « ne rien tenir comme ne devant pas être lu» : autrement dit, « tout doit être lu» et reconnu à la lumière du Christ. S'il en ainsi, la vie monastique nous entraine dans un vaste exercice de lecture. Toute notre vie doit être lue à la lumière du Christ. Rien n'est dépourvu d'intérêt à ses yeux. Toutes nos lectures, notre lectio divina voudraient nous apprendre à lire toute chose en Dieu, et à ouvrir nos yeux. « Ouvre mes yeux, que je contemple les merveilles de ta loi» (Ps 118,18). (2016-01-20)

Voir le commentaire de Père Abbé Luc / Chapitre 31, v 4-8 Du cellerier du monastère, ce qu'il sera ? écrit le 19 janvier 2016
Verset(s) :

4. il ne fera rien sans l'ordre de l'abbé ;

5. il observera les ordres reçus,

6. il ne fera pas de peine aux frères.

7. Si un frère lui présente une requête déraisonnable, il ne le peinera pas en le repoussant avec mépris, mais avec humilité il opposera à cette mauvaise demande un refus raisonnable.

8. Il veillera sur son âme, en se souvenant toujours de cette parole de l'Apôtre : « Qui fait bien son service, se procure une belle place. »

Commentaire :

RB 31, 4 - 8 Du cellérier du monastère, ce qu'il sera.

Pourrait-on résumer les lignes entendues par cette formule lapidaire: « pour être juste avec les autres, il faut savoir veiller sur son âme »? Le cellérier qui prend soin de tout et tous dans le monastère, ne doit pas oublier de prendre soin de lui-même.« Il veillera sur son âme» dit St Benoit. Cette notation spirituelle après une énumération de traits et de recommandations de type plus managérial, dit bien le lien indissoluble dans notre vie monastique entre justesse humaine et justesse spirituelle. Il n'y a pas d'un côté les affaires matérielles, administratives, en bref le travail, et de l'autre les affaires spirituelles, l'office et la prière. Nous sommes un. Si les deux pôles de notre vie ne s'irriguent pas mutuellement, nous allons boiter et vite nous fatiguer. Il y a le risque de s'enfermer dans la prière, ou dans une pseudo-spiritualité qui ne se préoccupe pas des choses de la vie quotidienne. Ce risque existe, mais peut-être pas beaucoup chez nous. Aujourd'hui, très solidaires que nous sommes de notre culture, nous courons davantage le risque de nous immerger tellement dans les activités que nous pouvons passer à côté de la profondeur de notre vie. Pour être efficace, pour ne pas perdre de temps, nous déployons une grande énergie. Aussi perdre du temps pour la prière, consentir à prendre quelques minutes avant l'office pour nous tenir en présence du Seigneur, nous demande davantage d'effort. Nous arrêter pour lire et nous nourrir spirituellement nous éprouve. Et pourtant nous savons le bénéfice de cet effort à consentir. Nous en connaissons le fruit qui donne du goût à notre quotidien, et lui confère sans bruit tout son poids et toute sa beauté. Il en va de même dans nos relations humaines et fraternelles. Celles-ci seront illuminées et fortifiées par la relation privilégiée que chacun de nous essaie du cultiver avec son Seigneur. Et plus les relations peuvent nous placer dans des situations inconfortables, plus la relation avec le Seigneur nous enseigne à nous situer de façon juste. Opposer un refus raisonnable à qui fait une demande déraisonnable, ne nous est pas spontané. Celui qui veille sur son âme et -qui apprend à confier sa faiblesse à plus grand qui lui, sera mieux armé pour faire face. Il sera moins dans l'illusion sur lui-même et plus ouvert à l'imprévu. Rendons grâce pour notre vie monastique qui est une école d'unification et de progrès permanent. (2016-01-19)