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1. Par dessus tout, il faut retrancher du monastère ce vice jusqu'à la racine :
2. que personne ne se permette de rien donner ou recevoir sans permission de l'abbé,
3. ni d'avoir rien en propre, absolument aucun objet, ni livre, ni tablette, ni stylet, mais absolument rien,
4. puisqu'on n'a même pas le droit d'avoir son corps et sa volonté à sa propre disposition.
5. Tout ce dont on a besoin, on le demande au père du monastère, et personne n'a le droit de rien avoir que l'abbé ne lui ait donné ou permis.
6. Que « tout soit commun à tous », comme il est écrit, en sorte que « ;personne ne dise sien quoi que ce soit », ni ne le considère comme tel.
7. Si quelqu'un est pris à se complaire dans ce vice extrêmement pernicieux, on l'avertira une et deux fois ;
Dans ce chapitre, Benoit pose une exigence forte qui caractérise notre vie monastique. Moine, nous choisissons de vivre en n'ayant rien en propre. Et nous acceptons tous les moyens qui nous sont offerts pour atteindre ce but. Benoit les énumère: on donne et on reçoit avec ·la permission de l'abbé, et on ne garde rien pour soi sans l'accord de l'abbé. Exigence forte qui n'a pas de sens en dehors de l'évangile. Ce choix de vie est un choix heureux qui réveille et alimente notre désir d'être tout au Christ sans partage. En entrant, nous avons perçu la joie profonde de ce don total. Et tout au long de la vie commune, grandit cette joie d'être toujours plus libres pour le Christ.
Mais voilà, il peut arriver parfois que nous sommes tentés fortement, de reprendre d'une main ce que nous avons donné de l'autre. Soit sous la forme de quelque chose qu'on veut garder sans en parler, soit sous la forme plus insinueuse de choses qui s'accumulent et qui encombrent. Le malin a ici un fort pouvoir séducteur pour nous suggérer: « J'ai bien le droit d'avoir cela puisque d'autres en ont, et puis moi je n'ai pas la possibilité de faire ce que d'autre peuvent faire ... et puis moi on ne me donne jamais rien ... etc ... » Cette tentation est forte et parfois très mordante. Quand elle survient, ayons le courage de parler et de faire la vérité. Ne nous laissons pas berner ni entrainer dans le mensonge. Ce mensonge a un goût de mort, plus prononcé qu'il n'y parait. Il fait mentir notre propos de conversion d'être tout à Dieu par la mise en commun des biens. Notre profession monastique dont le rituel se conclue par « désormais tout sera commun entre nous» nous engage sur un chemin évangélique exigent de vie et de vérité.
Nous avons parmi nous de beaux exemples de frères dont la cellule est pratiquement vide et la liberté entière. Ils nous disent que la joie n'est pas dans les biens possédés. Ils partiront sans laisser trop de traces sinon celles de ce qu'ils auront semé dans les cœurs de leurs frères. Demandons-la grâce de cette liberté entière pour le Christ, Lui notre Joie véritable.(2016-01-28)
1. Pour l'avoir du monastère en outils, vêtements et biens de toute sorte, l'abbé choisira des frères, de vie et mœurs dont il soit sûr,
2. et il leur remettra ces différents objets, comme il le jugera bon, pour qu'ils les conservent et les recueillent.
3. De ces objets, l'abbé gardera l'inventaire. Ainsi, quand les frères se succèdent à tour de rôle dans l'emploi, il saura ce qu'il donne et ce qu'il reçoit.
4. Si quelqu'un traite les biens du monastère sans propreté ou sans soin, on le réprimandera.
5. S'il ne s'amende pas, il subira les sanctions de règle.
Ce matin, je m'arrêterai simplement sur le titre de ce chapitre: « des outils et biens du monastère ». Tous, nous ne sommes que des usagers de ces biens qui ne nous appartiennent pas en propre. Selon nos emplois, nous est confiée la charge d'administrer une partie de ces biens: au linger, le linge; au cuisinier les denrées; au caviste, le vin; au responsable des transports, les voitures; au responsable des ordinateurs, le matériel informatique, etc ... Qu'il s'agisse de denrées périssables, de biens de consommation ou d'objets plus coûteux, à chacun revient de prendre soin, dit st Benoit, sans négligence, en se rappelant que tout est digne de respect et d'attention. Plus encore, prendre soin des denrées alimentaires que nous manipulons, c'est prendre soin de nous-mêmes qui les mangeons ... Je prends un exemple: Ramasser le pain à la fin du desservice, en le jetant dans le chariot comme si c'était des ordures, ce n'est ni respecter cet aliment symbolique, ni respecter ceux qui le mangeront. Prendre le pain et le poser dans le chariot avec respect, donne une toute autre dimension à ce geste et à la denrée ... Tout ce qu'on jette devient entaché de mépris ... De même garder propre des instruments ou du matériel, c'est honorer les frères ou soi-même qui les utilisons. Les responsables de secteurs ont ici une vigilance particulière à avoir pour que le matériel ou les objets commis à leur garde soient en bon état et restent propres. De même dans les usages communs, quand je laisse un outil ou un objet, je pense à celui qui l'utilisera après moi, afin qu'il le trouve comme j'aimerai le trouver ... Ici se vérifie concrètement combien la charité et l'attention fraternelle sont génératrices de beauté et de propreté.
Concernant les biens, il est heureux que nous changions de responsabilité afin de ne pas nous attacher aux choses. Veillons à ne pas nous créer des besoins ou à nous enchainer à des objets (ordinateurs ou autres), dont on a eu usage un temps mais plus ensuite. Gardons le souci de demeurer libre à l'égard des biens: ils sont au monastère, et non à nous. Un geste symbolique, mais fort de notre désir de liberté, pas toujours facile, est de veiller à bien remettre les clefs et tous les accès à celui succède dans un emploi. On coupe et on permet à l'autre d'être libre. Du coup, on se libère soi-même vraiment. Frères, notre rapport aux biens est le lieu d'une conquête incessante de notre liberté sur nos égoïsmes et sur nos peurs de manquer. Mais le bien de la liberté intérieure n'est-il pas plus précieux que tous les biens? (2016-01-27)
1. Pour l'avoir du monastère en outils, vêtements et biens de toute sorte, l'abbé choisira des frères, de vie et mœurs dont il soit sûr,
2. et il leur remettra ces différents objets, comme il le jugera bon, pour qu'ils les conservent et les recueillent.
3. De ces objets, l'abbé gardera l'inventaire. Ainsi, quand les frères se succèdent à tour de rôle dans l'emploi, il saura ce qu'il donne et ce qu'il reçoit.
4. Si quelqu'un traite les biens du monastère sans propreté ou sans soin, on le réprimandera.
5. S'il ne s'amende pas, il subira les sanctions de règle.
Ce matin, je m'arrêterai simplement sur le titre de ce chapitre: « des outils et biens du monastère ». Tous, nous ne sommes que des usagers de ces biens qui ne nous appartiennent pas en propre. Selon nos emplois, nous est confiée la charge d'administrer une partie de ces biens: au linger, le linge; au cuisinier les denrées; au caviste, le vin; au responsable des transports, les voitures; au responsable des ordinateurs, le matériel informatique, etc ... Qu'il s'agisse de denrées périssables, de biens de consommation ou d'objets plus coûteux, à chacun revient de prendre soin, dit st Benoit, sans négligence, en se rappelant que tout est digne de respect et d'attention. Plus encore, prendre soin des denrées alimentaires que nous manipulons, c'est prendre soin de nous-mêmes qui les mangeons ... Je prends un exemple: Ramasser le pain à la fin du desservice, en le jetant dans le chariot comme si c'était des ordures, ce n'est ni respecter cet aliment symbolique, ni respecter ceux qui le mangeront. Prendre le pain et le poser dans le chariot avec respect, donne une toute autre dimension à ce geste et à la denrée ... Tout ce qu'on jette devient entaché de mépris ... De même garder propre des instruments ou du matériel, c'est honorer les frères ou soi-même qui les utilisons. Les responsables de secteurs ont ici une vigilance particulière à avoir pour que le matériel ou les objets commis à leur garde soient en bon état et restent propres. De même dans les usages communs, quand je laisse un outil ou un objet, je pense à celui qui l'utilisera après moi, afin qu'il le trouve comme j'aimerai le trouver ... Ici se vérifie concrètement combien la charité et l'attention fraternelle sont génératrices de beauté et de propreté.
Concernant les biens, il est heureux que nous changions de responsabilité afin de ne pas nous attacher aux choses. Veillons à ne pas nous créer des besoins ou à nous enchainer à des objets (ordinateurs ou autres), dont on a eu usage un temps mais plus ensuite. Gardons le souci de demeurer libre à l'égard des biens: ils sont au monastère, et non à nous. Un geste symbolique, mais fort de notre désir de liberté, pas toujours facile, est de veiller à bien remettre les clefs et tous les accès à celui succède dans un emploi. On coupe et on permet à l'autre d'être libre. Du coup, on se libère soi-même vraiment. Frères, notre rapport aux biens est le lieu d'une conquête incessante de notre liberté sur nos égoïsmes et sur nos peurs de manquer. Mais le bien de la liberté intérieure n'est-il pas plus précieux que tous les biens? (2016-01-27)
17. Si la communauté est nombreuse, on lui donnera des auxiliaires, pour que lui aussi, grâce à leur aide, il remplisse la charge qui lui est confiée sans perdre la paix de l'âme.
18. On donnera ce qui est à donner et on demandera ce qui est à demander au moment voulu,
19. afin que personne ne soit troublé ou peiné dans la maison de Dieu.
« On donnera ce qui est à donner, et on demandera ce qui à demander au moment
voulu ». «Au moment voulu» en latin horis conpetentibus, mot à mot aux heures qui sont
accordées, ou qui conviennent parce qu'on en a convenu ... Il vient du verbe « competo, ere »
qui veut dire « se rencontrer au même point, répondre à, s'accorder avec ». Le « moment
voulu» est l'heure où l'on s'accorde avec un autre avec d'autres. Pour que la vie soit possible
à plusieurs, il nous faut avoir un commun rapport au temps. Que ce soit la vie en société, en
famille ou en communauté. Qu'on pense aux horaires de train, aux horaires des repas en
famille, au travail, à l'heure d'un spectacle ou d'une manifestation. En ce sens, notre vie
commune n'est pas exceptionnelle. Elle s'appuie sur un horaire sur lequel nous nous
accordons, mais aussi sur des manières de vivre le temps (grand silence de la nuit, respect du
silence à l'heure de la sieste, plus largement le temps de la liturgie qui informe nos années). St
Benoit lie la paix dans la maison de Dieu à ce juste rapport au temps communautaire. Comme
c'est vrai! Si chacun voulait imposer son tempo, soit la dictature d'un seul l'emporterait, soit
règnerait le chaos de l'individualisme où il n'y a plus de possibilité de vivre ensemble.
Notre vie communautaire est belle, forte et pacifiée dans la mesure où chacun cherche
à s'accorder au rythme et au temps de la communauté. A chacun, il nous est demandé de nous
dessaisir de notre tempo, afin de faire corps avec la communauté. Et nous savons que cela
peut être un vrai combat, car nous avons des rythmes personnels qui nous marquent. Etre du
soir ou du matin. L'un aura la montre dure et sera plutôt en avance, l'autre aura la montre
molle et sera plutôt en retard. Le premier doit se battre contre l'impatience, le second contre la
nonchalance. La conversion à laquelle St Benoit nous appelle, c'est travailler sur nous-même
et sur nos tendances plus ou moins tenaces, afin de nous accorder au bel élan communautaire.
Le rapport au temps est particulièrement sensible, comme le rapport à la nourriture, car nous y
sommes sans cesse confrontés. Cherchons avec joie et conviction à nous accorder à la vie de
la communauté, pour ne pas être retard, pour ne pas faire attendre les autres, pour rendre le
service demandé en son temps, pour faire une requête à l'heure appropriée ... Sortons de notre
autoréférence, pour reprendre un mot du pape François. « Je me hâte et ne tarde pas
d'observer tes volontés », pouvons dire et demander avec le psalmiste. (2016-01-26) -
13. Qu'il ait avant tout l'humilité, et quand il n'y a rien à donner à quelqu'un, qu'il lui offre en réponse une parole aimable,
14. comme il est écrit : « Une parole aimable surpasse le don le plus précieux. »
15. Tout ce que l'abbé lui enjoindra, il en aura la responsabilité ; ce qu'il lui interdira, il ne se le permettra pas.
16. Il fournira aux frères la ration prescrite sans arrogance ni délai, de peur qu'ils ne s'irritent, en se souvenant de ce que mérite, selon la parole divine, « celui qui irritera un des petits. »
Dans le passage de ce beau chapitre 31, trois type de parole sont évoqués: « la parole aimable» que le cellérier donnera quand il ne peut rien donner d'autre, la parole de l'abbé sous laquelle le cellérier fait ou ne fait pas certaines choses, et enfin la parole divine dont le cellérier se souvient pour donner la ration aux frères sans arrogance ni délai. Le cellérier est donc un homme d'écoute et un homme de parole. N'est-ce pas la qualité de son écoute qui sera le gage de la qualité de sa parole?
La vie monastique nous enseigne cela: plus on sait écouter, plus on sait donner une bonne parole. L'expérience nous le montre jour après jour, et parfois à nos propres dépens. Pour n'avoir pas su bien écouter, on dit des bêtises. Pour ne pas être dans cette disposition foncière d'humilité et d'obéissance, on parle trop et on le regrette. Comment valoriser ce trésor précieux de la parole échangée entre nous? Comment faire pour ne pas galvauder nos échanges en les transformant en joute verbale, à qui aura le dernier mot? Pour prendre une image, il nous faut « ôter nos sandales» devant le mystère de l'autre, comme nous essayons de le faire en présence de Dieu qui nous parle. Une expression familière dit: « venir avec ses gros sabots ». Une autre dit: «arriver comme un éléphant dans un magasin de porcelaine ». Ces deux manières manifestent une attitude pleine de soi-même et bien peu à l'écoute de l'autre dont on ne se préoccupe pas. L'écoute de la Parole divine dans la liturgie et la lectio nous apprend à enlever « nos gros sabots» plein de jugements et de prétentions. Comme Dieu, l'autre est toujours plus grand que ce que j'en perçois. De même l'obéissance à l'abbé contribue à prendre distance par rapport à notre moi-« éléphant» encombrant trop sûr de lui. Elle m'enseigne que je ne suis pas le centre du monde. Heureuse écoute et heureuse obéissance qui nous rendent plus ouvert sans crainte d'être diminué. Elles nous agrandissent au contraire. Elles nous rendent « magnanime», mot à mot avec une âme grande, capable de donner une parole de paix qui réconforte. La vie commune ne cesse de nous travailler, au sens de malaxer, afin de faire de nous des êtres écoutant et parlant. C'est là notre dignité de fils de Dieu et de frères du Christ. Laissons-nous faire, laissons déplacer. C'est salutaire. (2016-01-21)
9. Il prendra soin des malades, des enfants, des hôtes et des pauvres avec toute sa sollicitude, sachant sans aucun doute qu'il devra rendre compte pour toutes ces personnes au jour du jugement.
10. Il considérera tous les vases du monastère et tout son avoir comme les vases sacrés de l'autel ;
11. il ne tiendra rien pour négligeable.
12. Il ne cédera pas à l'avarice ni ne sera prodigue ou dissipateur de l'avoir du monastère, mais il fera tout avec mesure et selon les ordres de l'abbé.
Soin des personnes-soin des objets. Dans les malades, les enfants, les hôtes et les pauvres, dont doit prendre soin le cellérier, on reconnaît le Christ. De même aux objets du monastère, commis à sa garde, on donne une valeur semblable à celle des vases sacrés de l'autel qui honorent le Christ. En quelques phrases, St Benoit ressaisit les relations et le travail dans la lumière du Christ. Tout est ordonné à sa gloire. « Rien» ni personne ne peut être tenu «pour négligeable » "dans la maison de Dieu ».
Il est éclairant ici de s'arrêter sur le mot « négliger» et toute la famille de mots dérivés (négligeable, négligence ... ). Ces mots reviennent à plusieurs reprises tout au long de la RB. Le verbe latin est « neglego », formé des deux mots « nec» et « lego », mot à mot ne pas recueillir, ne pas lire. Négliger des choses ou des personnes, c'est ne pas savoir recueillir leur valeur, ne pas savoir lire et voir vraiment ce qu'ils sont. En lien avec ce que l'on vient de dire, St Benoit invite donc le cellérier et finalement chacun des moines (cf. 32,4) à savoir lire la réalité des relations aux personnes et aux objets. Lire dans ma relation avec le pauvre et malade ma relation avec le Christ (cf aussi 36,10). Lire et reconnaître dans ma relation aux objets, ma relation aux vases sacrés de l'autel. Et ainsi de suite dans tous les aspects de notre vie. La négligence à l'office, c'est ne pas savoir lire que là se joue l'œuvre de Dieu; la négligence dans la vie communautaire, c'est ne pas savoir lire que là s'édifie Corps du Christ ... Voilà une évidence : nous ne savons pas lire ni reconnaître la réalité et les évènements dans leur vraie profondeur. Nous sommes toujours plus ou moins des aveugles. Sans cesse, nous risquons de passer à côté de la réalité de la vie en manquant le Christ qui nous attend, dans le frère, mais aussi dans le soin porté aux choses comme une marque de révérence envers Lui, l'auteur et la fin de tout bien. «Ne rien tenir pour négligeable », mot à mot « ne rien tenir comme ne devant pas être lu» : autrement dit, « tout doit être lu» et reconnu à la lumière du Christ. S'il en ainsi, la vie monastique nous entraine dans un vaste exercice de lecture. Toute notre vie doit être lue à la lumière du Christ. Rien n'est dépourvu d'intérêt à ses yeux. Toutes nos lectures, notre lectio divina voudraient nous apprendre à lire toute chose en Dieu, et à ouvrir nos yeux. « Ouvre mes yeux, que je contemple les merveilles de ta loi» (Ps 118,18). (2016-01-20)
4. il ne fera rien sans l'ordre de l'abbé ;
5. il observera les ordres reçus,
6. il ne fera pas de peine aux frères.
7. Si un frère lui présente une requête déraisonnable, il ne le peinera pas en le repoussant avec mépris, mais avec humilité il opposera à cette mauvaise demande un refus raisonnable.
8. Il veillera sur son âme, en se souvenant toujours de cette parole de l'Apôtre : « Qui fait bien son service, se procure une belle place. »
RB 31, 4 - 8 Du cellérier du monastère, ce qu'il sera.
Pourrait-on résumer les lignes entendues par cette formule lapidaire: « pour être juste avec les autres, il faut savoir veiller sur son âme »? Le cellérier qui prend soin de tout et tous dans le monastère, ne doit pas oublier de prendre soin de lui-même.« Il veillera sur son âme» dit St Benoit. Cette notation spirituelle après une énumération de traits et de recommandations de type plus managérial, dit bien le lien indissoluble dans notre vie monastique entre justesse humaine et justesse spirituelle. Il n'y a pas d'un côté les affaires matérielles, administratives, en bref le travail, et de l'autre les affaires spirituelles, l'office et la prière. Nous sommes un. Si les deux pôles de notre vie ne s'irriguent pas mutuellement, nous allons boiter et vite nous fatiguer. Il y a le risque de s'enfermer dans la prière, ou dans une pseudo-spiritualité qui ne se préoccupe pas des choses de la vie quotidienne. Ce risque existe, mais peut-être pas beaucoup chez nous. Aujourd'hui, très solidaires que nous sommes de notre culture, nous courons davantage le risque de nous immerger tellement dans les activités que nous pouvons passer à côté de la profondeur de notre vie. Pour être efficace, pour ne pas perdre de temps, nous déployons une grande énergie. Aussi perdre du temps pour la prière, consentir à prendre quelques minutes avant l'office pour nous tenir en présence du Seigneur, nous demande davantage d'effort. Nous arrêter pour lire et nous nourrir spirituellement nous éprouve. Et pourtant nous savons le bénéfice de cet effort à consentir. Nous en connaissons le fruit qui donne du goût à notre quotidien, et lui confère sans bruit tout son poids et toute sa beauté. Il en va de même dans nos relations humaines et fraternelles. Celles-ci seront illuminées et fortifiées par la relation privilégiée que chacun de nous essaie du cultiver avec son Seigneur. Et plus les relations peuvent nous placer dans des situations inconfortables, plus la relation avec le Seigneur nous enseigne à nous situer de façon juste. Opposer un refus raisonnable à qui fait une demande déraisonnable, ne nous est pas spontané. Celui qui veille sur son âme et -qui apprend à confier sa faiblesse à plus grand qui lui, sera mieux armé pour faire face. Il sera moins dans l'illusion sur lui-même et plus ouvert à l'imprévu. Rendons grâce pour notre vie monastique qui est une école d'unification et de progrès permanent. (2016-01-19)
1. ÉCOUTE, ô mon fils, ces préceptes de ton maître et tends l'oreille de ton cœur. Cette instruction de ton père qui t'aime, reçois-la cordialement et mets-la en pratique effectivement.
« Il sera comme un père pour la communauté» ... Avec le P. Abbé, le cellérier reçoit le titre de « père », ce qui lui confère un rôle particulier au milieu de ses frères. « Il prendra soin de tout» pourrait peut-être résumer cette attitude paternelle. A voir une attention sur tout et sur tous. Bien sûr, cette attention est en rien indiscrète. Elle ne se supplée pas aux responsabilités des uns et des autres. Mais elle veille à que la vie circule entre les secteurs et entre les frères. Je redis ma gratitude au f. Cyprien pour cette attention qu'il porte à la vie de notre maison.
Hier, je soulignais que nous étions tous des enfants de Dieu éduqués « grâce à » la vie quotidienne, par notre Père des Cieux qui conduit nos vies. Aujourd'hui j'aurai envie de dire, nous avons tous une « part paternelle» à développer dans un sens de la responsabilité. Tous, .nous avons à accroitre, et le sens de la responsabilité du bien commun de notre monastère ainsi que le sens du bien des personnes et de la communauté. Concernant le bien commun du monastère ... les exemples ne manquent pas. Développer le sens du service fait jusqu'au bout et pas à moitié ... je pense au desservice par ex. Ensemble avec les autres, on va jusqu'au bout en s'assurant que les choses sont faites. De même quand on voit quelque chose qui ne marche pas, le signaler aux frères compétents. Quand quelque chose est sale ou anormalement dérangé, faire en sorte que la maison demeure propre et en ordre. Concernant le bien des personnes, ce sens paternel rendra plus attentif à un frère qui peine ou qui reste à l'écart. Pouvoir en parler à un autre frère, ou au P. Abbé pour ne pas laisser s'installer quelque chose qui pourrait nuire au frère ou à la communauté. Ce sens de la paternité s'élargit en nous quand chacun porte ses frères ou tel frère plus particulièrement dans la prière parce qu'on voit qu'il peine. Sans rien dire, on présente ce frère à Dieu. Ou encore, quand on s'intéresse à tel aspect important de la vie d'un frère, pour l'honorer sur ce point. Fondamentalement, ce sens de la paternité vécu entre frères nous rend sensibles aux besoins et aux attentes des uns et des autres. Sans ingérence, ni ostentation. De manière légère, presqu'invisible pour ne pas en tirer vaine gloire. Le sens de la paternité donne la priorité à l'intérêt de l'autre, sans chercher à en retirer un quelconque profit. Ainsi fait le père avec ses enfants dans le désir de les voir développer en eux toutes leurs potentialités. Ici je suis toujours touché quand un frère vient me suggérer de faire ou de dire quelque chose pour le bien d'un autre frère, de façon désintéressée. Il participe à la paternité de l'abbé. (2016-01-15)
1. Tout âge et degré d'intelligence doit recevoir un traitement approprié.
2. Aussi chaque fois que des enfants et des adolescents par l'âge, ou des adultes qui ne peuvent comprendre ce qu'est la peine d'excommunication,
3. quand donc ceux-là commettent une faute, on les punira par des jeûnes rigoureux ou on les châtiera rudement par des coups, afin de les guérir.
Aujourd'hui, quel enfant reste-t-il à corriger dans un monastère sinon nous-mêmes, les enfants de Dieu? L'idée de correction ne nous emballe pas beaucoup. Parler de correction fraternelle nous fait parfois peur. En allant voir dans l'Ecriture, dans He, j'ai trouvé une façon surprenante de considérer cette notion de « correction» L'auteur de la lettre invite les premiers chrétiens soumis à l'épreuve de la persécution à considérer celle-ci comme une manière avec laquelle Dieu les éduque et les corrige.« Ce que vous endurez est une leçon. Dieu se comporte envers vous comme envers des fils; et quel est le fils auquel son fils ne donne pas de leçons? ... Les leçons de Dieu sont vraiment pour notre bien, et il veut nous faire partager sa sainteté Quand on s'est repris grâce à la leçon, plus tard, on trouve la paix et l'on devient juste » (He12, 3-13). Le mot grec utilisé est paideia, et le verbe paideuo, traduit en latin par le verbe corripio Cere), le même mot utilisé ici par la RB.
Il nous est difficile d'envisager l'épreuve, l'opposition voire la persécution, comme une pédagogie de Dieu à notre égard pour nous affermir dans la persévérance et dans la foi. Peut-être nous faut-il davantage cultiver ce regard de foi? L'auteur de l'épitre aux hébreux dit: « grâce à la leçon» ... Ainsi nous aussi, au lieu de nous attrister face à une parole blessante, apprenons à dire « grâce» à cette parole j'ai quelque chose à retirer sur moi, sur ma manière d'être en relation. Au lieu de nous lamenter sur les contrariétés ou les incompréhensions de la vie quotidienne, apprenons à dire « grâce» à elles je mesure mieux mon impuissance à faire le bien. Grâce à elle, je découvre que seul le Seigneur peut me donner de dire et de faire le bien. Apprenons à vivre notre réalité quotidienne sous le mode du « grâce à » pour tirer profit de toutes les situations difficiles. Plus qu'une méthode quae, il s'agit de cultiver le regard de foi sur tout ce que nous vivons. Profiter de tout ce qui arrive pour en rechercher le profit humain et spirituel. Le premier profit est de mieux nous connaître dans nos réactions spontanées: énervement, découragement, abattement. Grâce à cette difficulté, je peux reconnaître que je ne suis pas tout puissant. Grâce à cette difficulté, je découvre des facettes de 'ma personnalité que je n'avais peut-être pas regardé en face. Grâce à cette contrariété j'apprends à me tourner plus humblement vers le Seigneur qui veut m'enseigner quelque chose, là et m'aider. Oui apprenons à dire « grâce à » au lieu de gémir ou de chercher querelle ... Dieu nous éduque à travers tout ce que nous vivons. (2016-01-14)
1. Un frère qui est sorti du monastère par sa propre faute, s'il veut revenir, commencera par promettre de s'amender complètement du défaut qui l'a fait sortir,
2. et alors on le recevra au dernier rang, pour éprouver par là son humilité.
3. S'il s'en va de nouveau, il sera reçu ainsi jusqu'à trois fois, en sachant qu'ensuite on lui refusera toute autorisation de retour.
Ce petit chapitre nous laisse entendre que la stabilité au temps de St Benoit n'était pas
forcément plus évidente, ni plus facile que pour nous moines contemporains. Des frères pouvaient claquer la porte, pour parler familièrement, suffisamment fréquemment pour qu'on
envisage un possible retour jusqu'à 3 fois. Deux conditions sont requises pour accepter qu'il
revienne: qu'il s'amende du défaut qui l'a fait sortir et qu'il accepte d'être éprouvé dans son
humilité en prenant la dernière place.
Benoit fait preuve ici d'une mansuétude qui n'a son équivalent que chez le Maitre. La
tradition monastique, excepté quelques pères du désert miséricordieux, est en général fermée
à l'idée d'un retour d'un frère fautif d'abandon de sa profession. Benoit retrouve ici les
accents de miséricorde d'un Cyprien de Carthage à l'égard des lapsis, ces chrétiens apostats
lors des persécutions. Ce dernier a dû se battre parfois contre sa propre communauté pour
permettre le retour de renégats au sein de l'Eglise. Nous retrouvons ce que nous entendions
lors de lecture du midi sur la compréhension de la miséricorde à l'occasion de cette année
jubilaire. St Benoit nous engage donc à avoir un regard miséricordieux toujours plus profond
à l'égard de ceux qui tombent et qui désertent. Dieu merci, ces situations restent
exceptionnelles. Mais ce faisant St Benoit ne nous engage-t-il pas à cultiver à fortiori ce
regard miséricordieux à l'égard de nos frères qui manquent à tel ou tel aspect de la règle? A
la lumière de l'article du P. D. Bourgeois, que serait ce regard miséricordieux? Un regard qui
n'est pas compassion sentimentale pour reprendre la pointe de l'article, avec le désir
d'excuser trop facilement comme si nous étions juge nous-mêmes de ce que vit le frère. Un
regard qui n'est pas non plus compromission ou laxisme sur notre propos monastique et
reviendrait à dire: puisqu'il fait cela, je peux aussi me le permettre. Ce regard miséricordieux
nous apprend à regarder le frère qui peine sans jugement, ni mépris, mais comme un frère que
Dieu ne cesse de chercher. Ce regard miséricordieux m'entraine à aimer ce frère, à prier pour
lui, à demander la grâce d'être pour lui un frère utile sur son chemin. Cela ira aussi jusqu'à
reconnaître le bien qu'il me fait, même dans les oppositions. Ce regard miséricordieux les uns
pour les autres, nous maintient humbles et égaux sous le seul regard vraiment miséricordieux:
celui de notre Père des Cieux. De lui, nous sommes tous des débiteurs insolvables. (2016-01-13)