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1. Il faut prendre soin que personne au monastère, en aucune occasion, ne se permette de défendre un autre moine ou de lui servir comme de protecteur,
2. même s'ils sont unis par un lien de parenté quelconque.
3. Les moines ne se le permettront d'aucune manière, car cela peut être l'occasion de conflits très graves.
Nous pourrions nous étonner de la vigueur avec laquelle Benoit
réagit dans ce chapitre. Il y a une saine capacité d'indignation, face à
l'injustice et à la méchanceté. Dans certaines situations, nous
pourrions même avoir le sentiment de trahir ce qu'il y a de plus
noble et de plus authentique en nous, si nous ne prenions pas la
défense du plus pauvre, du plus petit.
La Bible est scandée par la défense de la veuve et de l'orphelin, du
pauvre opprimé, du juste persécuté. Jésus lui-même a été le premier
à s'insurger contre ceux qui chargent leurs frères de pesants
fardeaux, ceux qui condamnent sans appel celui ou celle qui a
péché. Cette résistance à l'injustice, à l'oppression, au mensonge,
est au cœur du message évangélique. Elle demande parfois
beaucoup de courage, un authentique don de soi. Il faut même
espérer que la vie monastique, loin d'émousser cette capacité
d'indignation, l'affine et la développe.
Mais ce n'est pas cela que vise Saint Benoit dans ce chapitre. Son
unique but, tout au long de la Règle, est de guérir notre humanité
blessée. Lui rendre sa dignité, sa splendeur originelle. En fait, Benoit
sait que bien souvent, quand nous défendons un frère, c'est d'abord
nos propres intérêts, notre opinion, notre relation avec lui que nous
défendons.
En cherchant à le protéger, c'est plutôt nous même que nous
protégeons. Il faut beaucoup de courage pour aimer vraiment, pour
oser aimer en vérité. Ce courage suppose une profonde lucidité sur
ce qui nous anime, au plus intime de nous-même. Cette lucidité
suppose que nous soyons capables de prendre du recul, même vis-à-
vis de notre propre indignation. Et que nous ayons l'humilité
d'accepter que d'autres nous aident à voir clair. (9/7/16 )
1. Si l'on enjoint à un frère des choses pénibles ou impossibles, il recevra l'ordre de celui qui commande en toute douceur et obéissance.
2. S'il voit que le poids du fardeau excède absolument la mesure de ses forces, il représentera à son supérieur, patiemment et opportunément, les raisons de son impuissance,
3. sans orgueil ou résistance ni contradiction.
4. Si, après ses représentations, l'ordre du supérieur se maintient sans qu'il change d'avis, l'inférieur saura qu'il est bon pour lui d'agir ainsi,
5. et par charité, confiant dans le secours de Dieu, il obéira.
Ces chapitres qui terminent la Règle présentent notre vie de moine
dans toute sa difficulté et la générosité qu'elle demande. Pour les
comprendre, il faut mettre notre vie devant Dieu. Et entendre
l'appel qu'il a adressé à ses serviteurs tout au long de la Bible:
Abraham, Samuel, les prophètes, tous les saints de l'Ancien
Testament. Et Jésus: « le Serviteur ». Et entendre l'appel du Christ
: « Viens, suis-moi ».
« Le poids du fardeau» : Tout le monde passe par là, pas seulement
les moines! Pourquoi? Nous sommes appelés à aimer. Nous
sommes appelés à la perfection de l'amour. Et en même temps nous
sommes marqués par le poids de l'égoïsme, du péché. Avec le recul,
nous pouvons constater que ce qui a été le meilleur pour nous, dans
notre vie, ce n'est pas ce qui a été le plus facile. C'est par rapport à
Dieu que nous devons regarder toutes choses.
« Confiant dans le secours de Dieu, il obéira ». Ce n'est pas un
homme qui nous demande cette chose impossible, c'est Dieu lui-
même. Il n'attend pas de nous une réponse d'esclave qui se soumet
à contre cœur, mais une réponse de fils. Ce n'est plus moi qui obéis,
c'est le Christ qui obéit en moi. Le supérieur peut se tromper, la
chose demandée peut être impossible. La foi est-elle alors mise en
échec? Non. D'abord, est-ce vraiment sûr que ce soit impossible?
Et si oui, vraiment, l'humble ouverture au supérieu r n'en est pas
moins filiale, plus agréable à Dieu que l'exécution aveugle d'un
ordre que l'on sait absurde, afin de prouver au supérieur qu'il s'est
trompé.
En toutes occasions, nous ra lIier à l' obéissa nce du Ch rist. A son
attitude vis-à-vis de son Père. La patience que Dieu nous demande
n'est pas passivité. La passivité est faiblesse, lâcheté. L'impatience
est une forme d'orgueil. Mais la patience est force d'âme. Elle est
humilité. (8/7/16)
1. Les frères qui vont partir en voyage se recommanderont à l'oraison de tous les frères et de l'abbé,
2. et à la dernière oraison de l'œuvre de Dieu, on fera toujours mémoire de tous les absents.
3. Quant aux frères qui reviennent de voyage, le jour de leur retour, à toutes les heures canoniales, quand s'achève l'œuvre de Dieu, ils se prosterneront sur le sol de l'oratoire
4. et demanderont à tous de prier en raison de leurs manquements, de peur de s'être laissé prendre en voyage à voir ou entendre une chose mauvaise ou une parole déplacée.
5. Et personne ne se permettra de rapporter à un autre tout ce qu'il aura vu ou entendu hors du monastère, car cela fait de très grands ravages.
6. Si quelqu'un se le permettait, il subira le châtiment de règle.
7. De même celui qui se permettrait de sortir de la clôture du monastère et d'aller n'importe où et de faire n'importe quoi, même de peu d'importance, sans l'autorisation de l'abbé.
Lorsque nous avons à sortir du monastère, nous pouvons essayer de
le faire en nous inspirant des Evangiles d' « envoi en mission ». Celui
que nous avons entendu dimanche dernier par exemple. Quel que
soit le motif de notre voyage, nous avons toujours à rendre
témoignage au Christ. Par notre simplicité, « comme des agneaux au
milieu des loups ». Par notre réserve et notre discrétion, sur la vie
de la communauté. Par notre paix et notre charité. Nous sentir
envoyé en mission peut nous aider à trouver les attitudes qui
conviennent.
Regardons le Christ, à travers les pages de l'Evangile. Il est passé en
faisant le bien. Faire le bien, c'est donner la vie. « Je suis venu pour
qu'ils aient la vie en plénitude ». Nous de même, lorsque nous
sommes en voyage, nous pouvons nous considérer comme envoyés
pour faire le bien, pour témoigner de la présence de Dieu parmi les
hommes. Passer dans le monde, comme le Christ: non pas en nous
laissant captiver par tous les côtés superficiels, anecdotiques, mais
en nous efforçant de découvrir la Présence de Dieu dans le cœur de
ceux que nous croisons. Car Dieu est présent dans le cœur de
chacun. Il aime chacune de ces personnes.
Nous intéresser d'abord à Dieu. Voir en toute personne un enfant de
Dieu. Cela nous aide à nous intéresser au monde et aux autres, pour
Dieu, et non pas pour nous-mêmes. Cette vue de foi permet de
discerner ce que vous avons à faire et à dire lorsque nous sommes
au dehors. Faut-il faire telle démarche? Faut-il dire telle parole? La
fidélité à Dieu nous donnera la réponse. Ne craignons pas de
surprendre, d'étonner même, parfois. Ne soyons pas du monde. Ne
soyons pas mondains, comme aime à le répéter le Pape François.
Nous sommes faits pour Dieu. C'est le témoignage que nous avons à
donner au monde. Celui dont le monde a besoin. (7/7/16)
6. Quant au monastère, il doit être, si possible, construit de telle façon que tout le nécessaire, c'est-à-dire l'eau, le moulin, le jardin et les divers métiers, s'exerce à l'intérieur du monastère,
7. de sorte que les moines ne soient pas obligés de courir au-dehors de tous les côtés, car ce n'est pas bon du tout pour leurs âmes.
8. Nous voulons que cette règle soit lue souvent en communauté, pour qu'aucun frère ne s'excuse sur son ignorance.
La porte du monastère est un sas, entre deux mondes. Et le gardien
du passage entre ces deux mondes, c'est le portier. Le monde du
dehors est constitué de tous ceux qui frappent à la porte: des
pauvres d'abord, qu'il convient d'accueillir avec la bonté et la
sérénité que confère la crainte de Dieu. Le monde du dehors, pour
Benoit, n'est pas un monde mauvais, contre lequel il faudrait se
défendre. Car accueillir celui qui frappe à la porte, c'est accueillir le
Christ en personne.
Et puis, il y a le monde du dedans. Et Benoit tient à ce que le
monastère soit organisé de telle sorte que le moine ne soit pas
obligé de sortir sans cesse. Il insiste: l'eau, le moulin, le jardin, les
métiers, tout doit être dedans. Pourquoi donc? Benoit aurait-il
changé d'avis, lui qui vient de nous dire que ce monde du dehors
n'est pas mauvais! Il s'explique: « que les moines ne soient pas
obligés de courir dehors de tous côtés. Car ce n'est pas bon du tout
pour leurs âmes ». Pour Benoit, ce qui est mauvais, ce n'est pas le
monde, mais cette tendance que nous avons tous à nous répandre,
à nous disperser à l'extérieur. Là encore Benoit reste fidèle à
l'Evangile, car ce qui rend l'homme impur, c'est ce qui sort de son
cœur. Ce désir qui nous entraîne à courir de tous côtés, à nous
disperser en choses vaines.
La clôture du monastère est aussi cela: cette conscience de notre
pauvreté, de nos faiblesses, qui nous empêchent de trouver le
chemin de notre cœur, et nous poussent à chercher au dehors, dans
des distractions, ce que nous avons renoncé à chercher au-dedans.
Nous avons à travailler sans cesse pour que notre vie, que notre
cœur, soient bien centrés là où Dieu nous a appelés.
Ce chapitre était sans doute, dans une première rédaction, le
dernier de la Règle. Le dernier verset que nous venons d'entendre
sonne comme une conclusion. Et la R.M. se termine par ce chapitre
sur les portiers. Ces prescriptions sur la porte et le portier sont une
manière très naturelle de clore la Règle, aussi bien que le
monastère. Puis des questions nouvelles ont amené Benoit à insérer
6 chapitres supplémentaires, avant l'épilogue. (6/7/16 )
1. A la porte du monastère on placera un vieillard sage, qui sache recevoir et donner une réponse, et dont la maturité ne le laisse pas courir de tous côtés.
2. Ce portier doit avoir son logement près de la porte, afin que les visiteurs le trouvent toujours présent pour leur répondre.
3. Et aussitôt que quelqu'un frappe ou qu'un pauvre appelle, il répondra Deo gratias ou Benedic ,
4. et avec toute la douceur de la crainte de Dieu, il se hâtera de répondre avec la ferveur de la charité.
5. Si ce portier a besoin d'aide, il recevra un frère plus jeune.
Le rôle du portier est important pour la paix du monastère. St Benoit
demande que ce soit un frère judicieux, prudent, capable de
recevoir, et de donner une réponse. Un homme plein de charité.
Nous remercions frère Alban, et les frères qui l'aident dans cette
charge.
En parlant du portier, ce chapitre parle de la clôture du monastère.
Elle n'est pas le fait d'hommes égoïstes, qui veulent vivre
tranquillement chez eux! « Que les autres nous laissent
tranquilles» n'est pas la définition de la charité! Si c'était cela,
notre clôture serait la pire des choses. Elle est une affaire d'amour:
que le Seigneur puisse travailler dans chacun de nos cœurs. Que les
hôtes, tous ceux qui passent, trouvent une maison habitée par Dieu.
Qu'ils se sentent invités à se mettre à son écoute.
Dans ces quelques phrases sur le portier, nous trouvons aussi la
définition du cœur du moine, de tout chrétien. Nous sommes ceux
qui avons entendu une parole, et qui devons donner une réponse.
Avant de répondre, commencer par entendre, par écouter, par
goûter cette parole. Cette parole est celle de Dieu. Dieu n'a qu'une
Parole, sa Parole incarnée, Jésus. Notre vie entière est un écho,
prolongé à tous les instants de notre vie, de cette Parole unique.
Mais comment donnerons-nous notre réponse, à chaque coup
frappé à la porte de notre cœur, si nous ne nous sommes pas rendus
attentifs, à l'écoute de cette Parole. Dans notre vie, il ya des temps
forts, des heures privilégiées, où il nous est donné de recevoir plus
directement cette parole, de la méditer, de nous laisser pénétrer et
assimiler par elle: l'Office Divin, la Lectio Divina, l'Eucharistie,
l'Oraison. Mais c'est à toutes les heures du jour et de la nuit que se
réalise l'Incarnation, et qu'il nous faut être là.
Que le Seigneur, quand il s'adresse à nous, trouve toujours
quelqu'un à qui parler! (5/7/16 )
11. Aussi nous semble-t-il opportun, pour la sauvegarde de la paix et de la charité, que l'abbé règle à son gré l'organisation de son monastère.
12. Si faire se peut, c'est par des doyens que l'on organisera, comme nous l'avons établi antérieurement, tous les services du monastère, selon que l'abbé l'établira.
13. Ainsi, plusieurs en étant chargés, un seul ne s'enorgueillira pas.
14. Si le lieu l'exige ou si la communauté le demande raisonnablement avec humilité et que l'abbé le juge opportun,
15. l'abbé choisira qui il voudra avec le conseil des frères qui craignent Dieu, et il se l'ordonnera lui-même comme prévôt.
16. Ce prévôt, cependant, exécutera respectueusement ce que son abbé lui commande, sans rien faire contre la volonté ou les ordres de l'abbé,
17. car plus il est élevé au-dessus des autres, plus il lui faut observer avec soin les prescriptions de la règle.
18. Si ce prévôt se montre vicieux ou que, séduit par l'élèvement, il s'enorgueillisse, ou qu'il soit convaincu de mépris pour la sainte règle, on l'avertira verbalement jusqu'à quatre fois.
19. S'il ne s'amende pas, on lui appliquera la correction des sanctions de règle.
20. Si même alors il ne se corrige pas, on le destituera de son rang de prévôt, et l'on mettra à sa place un autre qui en soit digne.
21. Si même ensuite il n'est pas tranquille et obéissant en communauté, on ira jusqu'à le chasser du monastère.
22. Cependant l'abbé songera qu'il doit rendre compte à Dieu de tous ses jugements, de peur que le feu de l'envie ou de la jalousie ne brûle son âme.
Ce chapitre n'est pas, comme je le disais, très agréable à entendre. Mais dans cette
seconde partie, il nous donne un bon exemple de processus de discernement pour savoir s'il
est opportun ou non d'avoir un prieur. Dans ce discernement, tous les rouages de la vie
communautaire interviennent: l'abbé, la communauté, le conseil des frères. L'abbé donne
l'impulsion en vue de régler comme bon lui semble « l'organisation du monastère N. C'est à
lui que revient la décision finale. Ici, Benoit penche plutôt pour une organisation qui se passe
d'un prieur. Mais l'abbé n'est pas autocrate. Il écoute la communauté qui peut exprimer le
désir d'avoir un prieur. Comment discerner si cette demande est juste? Benoit donne un
critère qui lui est cher: que la communauté exprime sa requête « raisonnablement avec
humilité ». Si c'est le cas, l'abbé prend conseil pour choisir qui il voudra. Il s'appuie sur les
frères qui craignent Dieu, pas nécessairement ceux qui sont au conseil.
Nous avons ici donc un bel exemple de la manière de discerner dans une communauté
monastique: chacun est à l'écoute de l'autre. La communauté écoute l'abbé, mais l'abbé
écoute la communauté et il prend conseil de frères sages. Comment vit-on cette écoute
mutuelle? Pour St Benoit, la manière de vivre les choses est toujours très importante. Chacun
sera un instrument utile dans le discernement communautaire, s'il est d'abord lui-même dans
une attitude d'écoute spirituelle, c'est-à-dire toujours à l'affût de faire la volonté de Dieu. La
communauté manifestera la qualité de son écoute de Dieu en parlant « raisonnablement avec
humilité », Les frères qui donnent leur conseil à l'abbé, sont des frères « qui craignent Dieu »,
c'est-à-dire des frères qui veulent demeurer attentifs à Dieu. Enfin l'abbé lui-même est
sommé de ne pas oublier le jugement de Dieu, qui en dernier recours discernera entre le juste
et l'injuste. L'abbé est ainsi engagé à veiller sur lui-même, afin que ses décisions ne soient
pas mues «par lefeu de l'envie ou de la jalousie ». Benoit nous donne une méthode pour
apprendre à nous écouter et à nous concerter dans la recherche du bien commun. Mais ces
moyens ne porteront tous leurs fruits, que si chacun cherche pour lui-même à se tenir au plus
juste devant Dieu ... Ne nous lassons pas d'essayer de nous accorder à la volonté de Dieu. (02/07/2016)
1. Trop souvent il est arrivé que l'ordination d'un prévôt engendre de graves conflits dans les monastères.
2. Il en est en effet qui s'enflent d'un méchant esprit d'orgueil et qui, estimant être de seconds abbés, usurpent le pouvoir, entretiennent des conflits et mettent la dissension dans les communautés,
3. surtout dans les lieux où le prévôt reçoit l'ordination du même évêque et des mêmes abbés qui ordonnent l'abbé.
4. Combien cela est absurde, il est facile de s'en rendre compte : dès le début, dès son ordination, on lui donne matière à s'enorgueillir,
5. ses pensées lui suggérant qu'il est soustrait à l'autorité de son abbé,
6. puisque « toi aussi, tu as été ordonné par les mêmes qui ont ordonné l'abbé. ;»
7. Il en résulte envies, disputes, médisances, rivalités, dissensions, destitutions,
8. et ainsi, abbé et prévôt étant de sentiments opposés, il est inévitable que leurs âmes soient en danger, tant que durent ces dissensions,
9. et leurs subordonnés courent à leur perte, du fait qu'ils flattent leurs partisans.
10. La responsabilité de ce dangereux fléau pèse au premier chef sur ceux qui se sont faits les auteurs d'un tel désordre.
Au jour de sa fête, nous retrouvons le chapitre austère et peu sympathique du prieur. Il
se fait l'écho de problèmes rencontrés de telle sorte qu'ils ne se reproduisent surtout pas. Du
coup, il occulte en bonne part le rôle du prieur considéré avant tout sous l'angle redouté d'un
potentiel contre-pouvoir. Mais ceci ne fait pas droit au rôle de suppléance, de médiation, mais
aussi de présence aux frères que peut remplir le prieur.
Rôle de suppléance. En l'absence de l'abbé, il est important qu'un frère assure la
présidence de la communauté. La communauté continue à être conduite et à se tenir dans la
paix pour vivre le quotidien. Le fait que le prieur commente la règle au chapitre le matin,
permet à la communauté de demeurer dans l'écoute commune d'une parole de vie. Cette
parole au chapitre, même en l'absence de l'abbé, tient la communauté dans la vigilance de son
propos de conversion. Tous sont responsables de la vie commune qui se déroule ici. Le prieur
incarne dans sa parole ce sens de la responsabilité partagée. L'animation des chapitres du soir
est l'autre pôle qui lui revient: maintenir la communauté dans l'attention et l'écoute mutuelle,
à travers le partage des nouvelles et des expériences vécues par les frères.
Rôle d'écoute et de présence aux frères. Le prieur accueille tous les frères qui désirent
parler avec lui, soit plus personnellement, soit en lien avec la vie commune. Il a la confiance
de l'abbé pour cela. Proche de l'abbé et proche des frères, il peut offrir une écoute autorisée.
Parfois, il aura un rôle de médiation entre l'abbé et la communauté, le plus souvent en
permettant de faire remonter des difficultés rencontrées par les frères. Ce rôle intermédiaire
délicat est précieux pour que la parole circule, surtout quand un conflit ou un problème la
rend plus difficile. Présent aux frères, il est attentif à tel ou tel qui peine davantage et peut en
alerter l'abbé. D'autres fois, il lui revient de faire des remarques lorsque la vie commune
souffre d'un certain laisser aller.
Plus qu'une fonction honorifique, la charge de prieur, davantage encore peut-être que
celle de l'abbé, est un service. Service discret de la communion et de la circulation de la
parole entre frères, dans le souci de garder vivant notre désir de chercher Dieu dans la prière
et la vie fraternelle. Avec l'abbé, il est au service du dynamisme spirituel de la communauté:
qu'elle reste tonique et fervente dans son désir de se donner à Dieu,aux frères et aux hommes. (24/06/2016)
16. Il ne sera pas agité et inquiet, il ne sera pas excessif et obstiné, il ne sera pas jaloux et soupçonneux à l'excès, car il ne serait jamais en repos.
17. Dans les ordres qu'il donne, il sera prévoyant et réfléchi, et que l'œuvre qu'il commande soit selon Dieu ou selon le siècle, il usera de discrétion et de mesure,
18. en songeant à la discrétion de saint Jacob, qui disait : « Si je fais peiner davantage mes troupeaux à marcher, ils mourront tous en un jour. »
19. Prenant garde à ce texte et aux autres sur la discrétion, mère des vertus, il mettra de la mesure en tout, en sorte que les forts aient à désirer et que les faibles n'aient pas à prendre la fuite.
20. Et surtout, qu'il garde en tous ses points la présente règle,
21. afin qu'après avoir bien servi, il entende le Seigneur lui dire, comme au bon serviteur qui distribua en son temps le froment à ses compagnons de service :
22. « En vérité, je vous le dis, il l'établira sur tous ses biens. »
« Il ne serait jamais en repos ». Cet avertissement de Benoit peut surprendre. Pour
mettre en garde l'abbé contre les excès possibles de jalousie, d'agitation ou de soupçons, il
invoque le bienfait du repos à préserver. Non pas une raison morale (« ce n'est pas bien de
faire cela »), mais une raison spirituelle : la paix intérieure. St Benoit a certainement en tête
l'exemple des pères du désert qui cherchent à garder la paix du cœur, le repos intérieur. . .les
grecs parlaient de « l'hésychia». Qu'est-ce que ce repos? On le cherche tous.
La vie de l'abbé, comme celles d'un certain nombre de frères, se caractérise par une
grande diversité de tâches et de rencontres, avec beaucoup d'imprévus, qui font que le
programme d'abord envisagé le matin ne sera parfois pratiquement pas réalisé le soir, ou le
plus souvent seulement en partie ... Comment vais-je réagir? En râlant intérieurement parce
que je n'ai pas fait ce que je devais faire, ou bien en abandonnant cela à Dieu qui connait tout
et qui dirige nos chemins d'une manière plus profonde que tout ce que nous prévoyons?
Parfois il faut traverser des situations de conflits ou de relations entre frères qui s'enveniment.
Comment garder la paix intérieure? Comment ne pas laisser les pensées de jugement ou les
récriminations occuper le cœur, notamment au temps de la prière? Un apophtegme rapporte:
« Quand abba Agathon voyait une chose et que sa pensée voulait la juger, il se disait :
'Agathon, ne fais pas cela, toi '. Et ainsi, sa pensée se calmait» (Agathon 18). Nous
entendions il y a peu: « ne jugez pas et vous ne serez pas jugés ». Notre cœur perd souvent sa
paix, car il oublie qu'il ne lui revient pas de juger le frère. Aveuglé par sa propre faiblesse, il
entre dans un processus sans fin d'auto-défense stérile car la plupart du temps illusoire.
Comment revenir à la réalité? Prier, prier pour le frère que Dieu aimes autant que moi. Jeûner
parfois aussi, pour être instrument de paix. Souvent, il faut parler à un frère dont le cœur est
libre. Il saura toujours préserver l'estime des frères qui sont plus grands que leurs faiblesses.
Comme moine, nous savons que cette quête du vrai repos nous tiendra jusqu'à notre
dernier souffle. Nous avons choisi d'affronter le combat et non de le fuir par notre vie
commune. Ne nous décourageons pas. Regardons Jésus, fondons-nous sur sa Parole: « Venez
à moi, vous tous qui peinez, et vous trouverez le repos », comme sur un Roc qui ne nous fera
jamais défaut. (23/06/2016)
7. Quant à l'abbé qui a été ordonné, il songera toujours à la charge qu'il a reçue et à celui auquel il devra « ;rendre compte de sa gestion ;».
8. Il saura qu'il doit plutôt « servir que régir ».
9. Il doit donc être « savant » dans la loi divine, pour savoir et avoir d'où « tirer le neuf et l'ancien », chaste, sobre, miséricordieux.
10. Et que « la miséricorde l'emporte toujours sur le jugement », afin qu'il obtienne pour lui le même traitement.
11. « Qu'il haïsse les vices et qu'il aime les frères. »
12. Dans ses réprimandes même, qu'il agisse prudemment et « ;sans rien de trop », de peur qu'en voulant trop gratter la rouille, il ne brise le vase.
13. Il ne perdra jamais de vue sa propre fragilité, et se souviendra « ;qu'il ne faut pas écraser le roseau cassé. »
14. Nous ne voulons pas dire par là qu'il permettra aux vices de se développer, mais qu'il les retranchera prudemment et avec charité, suivant qu'il lui semblera opportun pour chaque individu, comme nous l'avons déjà dit.
15. Et il s'efforcera « d'être plus aimé que redouté ».
« Il doit donc être savant dans la loi divine, pour savoir et avoir d'où tirer le neuf et
l'ancien ». Il doit donc ... Les « donc» sont toujours importants chez Benoit dans la RB pour
mettre en lumière des liens concrets qui vont de soi, qui s'impose selon une logique
spirituelle. Ici le « donc» fait le lien avec la recommandation de « servir plutôt que régir ».
Pour cela, l'abbé doit être savant dans la loi divine. St Benoit suggère que l'abbé ne pourra
servir plutôt que régir qu'au prix d'une grande familiarité avec les Ecritures. Ce n'est pas à la
portée de la seule bonne volonté ou de la seule intelligence humaine, de servir lorsqu'on a le
pouvoir. Beaucoup de tentations viennent contrecarrer celui qui voudrait s 'y essayer. L'abbé
doit accepter de se mettre à l'école du Christ s'il veut, à travers son ministère, faire signe de la
sollicitude du Christ pour chacun. Les Ecritures sont la mémoire de la grande geste de Dieu
pour sauver son peuple, geste qui culmine dans la croix de Jésus. Serviteur bafoué, il
manifeste combien Dieu souffre de nos souffrances depuis toujours. Il prend sur lui notre
mort et notre péché. Revenir aux Ecritures, pour mieux connaitre avec son cœur, ce Dieu qui
aime et veut servir l'humanité, est nécessaire à l'abbé. Celui-ci est l'instrument pour la
communauté du service que Jésus désire poursuivre aujourd'hui par son Eglise, pour notre
monde.
St Benoit poursuit: « être savant dans la loi divine pour savoir et avoir d'où tirer du
neufet de l'ancien». Dans l'évangile, Jésus dit: « les paroles que je vous dis sont esprit et
elles sont vies ». La familiarité avec les Ecritures nous rend plus sensibles à l'œuvre de
l'Esprit Saint dans la vie de son peuple. Il fait jaillir du neuf et il met en lumière la valeur de
l'ancien. La combinaison des deux produit la vie sous la mouvance de l'Esprit.Les Ecritures
sont le témoin de ce subtil travail auquel il nous faut chacun nous prêter pour être fidèle. Nos
vies de communautés sont un perpétuel tissage entre le neuf et l'ancien. Ainsi l'équilibre entre
nos chapitres du soir plus traditionnels avec des formes nouvelles de rencontre comme les
groupes ou le dimanche soir, en est un exemple. Tisser avec le neuf et l'ancien est le propre
de la tradition vivante et de la vie en marche. Pour que ce tissage soit profond et durable,
source de fruits spirituels, il nous faut tous, abbé et communauté, aimer toujours plus les
Ecritures, afin de laisser l'Esprit Saint nous informer, et nous renouveler dans notre pensée. (18/06/2016)
1. Dans l'ordination de l'abbé, on prendra toujours pour règle d'instituer celui que se sera choisi toute la communauté unanime dans la crainte de Dieu, ou même une partie de la communauté, si petite soit-elle, en vertu d'un jugement plus sain.
2. C'est pour le mérite de sa vie et la sagesse de son enseignement que l'on choisira celui qui doit être ordonné, même s'il est le dernier par le rang dans la communauté.
3. Si même toute la communauté choisissait d'un commun accord une personne complice de ses vices, – ;à Dieu ne plaise ;! ;–
4. et que ces vices viennent tant soit peu à la connaissance de l'évêque au diocèse duquel appartient ce lieu et des abbés ou des chrétiens du voisinage,
5. ils empêcheront la conspiration des méchants de l'emporter, et ils institueront dans la maison de Dieu un administrateur qui en soit digne,
6. sachant qu'ils en recevront une bonne récompense, s'ils le font avec une intention pure et par zèle pour Dieu, de même qu'ils commettraient au contraire un péché, s'ils négligeaient de le faire.
Elire ou nommer le nouvel abbé? La solution adoptée par Benoit de faire élire l'abbé par la communauté n'était pas très répandue à son époque. Seuls les monastères du sud de la Gaule, de Lérins en particulier, avaient cette procédure. Dans les autres traditions monastiques, Pacôme, les Pères du désert, les Pères du Jura, le Maitre, l'abbé était désigné par le prédécesseur. Chez Basile, l'abbé était élu par des personnes extérieures au monastère. La législation de l'empereur Justinien stipule que c'est à l'évêque de choisir l'abbé (cf Michaela Puzicha, Commentaire de la RB, TIl P 264). Benoit s'inscrit donc dans la tradition des monastères de la Gaule. Il a fait un choix qui témoigne d'une belle confiance donnée à la communauté capable, dans la crainte de Dieu, de se choisir elle-même son supérieur. Cette façon situe bien aussi le monastère comme communauté dans l'environnement ecclésial. La communauté est responsable de son avenir et garde son autonomie par rapport aux influences extérieures, notamment à l'égard de l'autorité de l'évêque. Est préservé ainsi son caractère propre, son charisme de vie monastique au sein de l'église locale.
C'est l'évêque qui institue dans sa charge le nouvel abbé. La Règle du Maitre donne le déroulement de la cérémonie de cette installation célébrée au cours d'une messe. Celle-ci conjugue ce que nous appelons aujourd'hui l'installation, faite au lendemain de l'élection par celui qui a présidé les scrutins (avec remise des clefs par ex) et la bénédiction donnée par l'évêque local (avec remise de la Règle par ex). C'est impressionnant de voir cette stabilité dans les règles institutionnelles qui régissent nos vies. Bien sûr, il ne s'agit pas d'un copié- collé, mais les grandes structures demeurent ... Elles témoignent d'une sagesse donnée dès le départ, sagesse que tous les travaux menés autour du Concile Vatican II ont permis de retrouver et de dépoussiérer. L'histoire a pu connaitre entre temps bien des périodes où les choses étaient beaucoup plus complexes, avec un imbroglio entre les pouvoirs religieux et civils qui étaient loin d'être sains. La lecture du livre sur les moniales de Port Royal était assez éloquente sur les dérapages possibles. Nos histoires restent des histoires humaines et fragiles. Que le Seigneur nous garde dans l'unité et l'élan spirituel. (15 juin 2016)