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61. ainsi qu'il est écrit : « Le sage se reconnaît à la brièveté de son langage. »
62. Le douzième degré d'humilité est que, non content de l'avoir dans son cœur, le moine manifeste sans cesse son humilité jusque dans son corps à ceux qui le voient,
63. autrement dit, qu'à l'œuvre de Dieu, à l'oratoire, au monastère, au jardin, en voyage, aux champs, partout, qu'il soit assis, en marche ou debout, il ait sans cesse la tête inclinée, le regard fixé au sol,
64. et se croyant à tout instant coupable de ses péchés, il croie déjà comparaître au terrible jugement,
65. en se disant sans cesse dans son cœur ce que le publicain de l'Évangile disait, les yeux fixés au sol : « Seigneur, je ne suis pas digne, pécheur que je suis, de lever les yeux vers le ciel. »
66. Et aussi avec le prophète : « Je suis courbé et humilié au dernier point. »
Le corps parle du cœur... L'attitude du moine, en ce 12°, n'est en rien empreinte et
encore moins feinte. Il est devant les hommes comme il est devant son Dieu en son cœur. Ce
dernier degré est le seul qui fasse mention d'une attitude corporelle, la tête inclinée. Tous les
degrés précédents visaient des dispositions intérieures, ou des attitudes comme rire ou parler,
comme pour mieux nous signifier que là est d'abord le vrai lieu du travail spirituel. En vie
spirituelle, il ne s'agit pas de se composer une attitude de façade, mais de se laisser travailler
au cœur par l'Esprit Saint. L'énumération que Benoit fait des lieux et des activités du
monastère nous renforce dans la conviction que l'humilité n'est pas limitée à l'église, ou bien
à la prière. Elle embrasse au contraire tous les lieux et tous les moments de notre existence :
«Au jardin, en voyage, aux champs, assis, en marche ou debout » ... L'humilité est la vérité
de notre être devant Dieu et devant les autres. Elle a ce bel effet de nous unifier en toute
chose. Il n'y a pas d'un côté le moine pieux et abimé en Dieu à l'heure de la prière, et de
l'autre, le moine qui fait ce qu'il veut et qui pourra envoyer promener des frères importuns.
L'humilité à laquelle nous sommes appelés prend tout l'être, et le transforme à l'image du
Christ notre seul Maitre et Seigneur.
Ici, nous balbutions en entrevoyant une manière d'être à la fois très enviable et loin de
nous, désirable et pourtant bien dépouillante. Comment tendre vers ce sommet qui est
abaissement? Comment garder le désir de devenir un peu plus conforme au Christ? En
consentant à commencer chaque jour.« On disait d'Abba Pambo qu'alors qu'il était mourant,
à l 'heure même de sa mort, il dit aux saints hommes qui se tenaient près de lui: 'Depuis que
je suis venu en ce lieu du désert, et que j y ai construit ma cellule et que j y habite, je ne me
souviens pas d'avoir mangé du pain qui ne soit pas le fruit de mes mains, et je me suis pas
repenti d'une parole que j'ai dite jusqu'à l 'heure présente. Et pourtant, je vais vers Dieu
comme si je n'avais jamais commencé à le servir' » (Pambo 8). « Je vais vers Dieu comme si
je n'avais jamais commencé à le servir ». Pambo ne s'appuie pas sur ses qualités ou ses
réalisations, mais sur sa faiblesse... se considérant comme un débutant qui a tout à apprendre
et tout à recevoir. Aujourd'hui, allons vers Dieu, vers nos frères, comme si nous n'avions pas
commencé à les servir. (23/11/2016)
59. Le dixième degré d'humilité est que l'on ne soit pas facile et prompt à rire, car il est écrit : « Le sot élève la voix pour rire. »
60. Le onzième degré d'humilité est que, quand le moine parle, il le fasse doucement et sans rire, humblement, avec sérieux, en ne tenant que des propos brefs et raisonnables, et qu'il se garde de tout éclat de voix,
61. ainsi qu'il est écrit : « Le sage se reconnaît à la brièveté de son langage. »
« Le sage se reconnaît à la brièveté de son langage ... » C'est à la sagesse que St
Benoît ambitionne de conduire ses moines qui gravissent les degrés de l'échelle de
l'humilité ... Mais, non pas tant la sagesse des idées, que la sagesse de vie qui unifie tout l'être.
Benoît craint que le moine « trop facile et prompt à rire », toujours en quête de raconter une
bonne blague ne soit qu'un homme qui reste extérieur à lui-même, un homme de surface. La
vie en Christ que nous embrassons dans la profession monastique ne peut pas être une vie de
surface. Elle nous engage à descendre en nous-même pour nous tenir toujours plus uni au
Christ. .. En lui, nous sommes appelés à mourir à notre vieil homme pour renaître à sa vie en
toutes nos fibres humaines ... Quand nous restons à la surface de nous-même, quand nous
nous distrayons pour oublier, c'est toute la part profonde de notre cœur qui est en
souffrance Nous nous amusons en surface, mais le cœur profond est en dés errance, comme
abandonné Le chemin de l'humilité veut nous permettre de rejoindre notre être profond,
celui qui ne triche pas et qu'a le désir immense d'exister en vérité ... d'aimer en vérité sans
fard ... et de toutes ses forces. Ici plus besoin de d'éclats de voix pour exister, mais une
certaine gravité dans les propos raisonnables, car tout nous ancre dans notre réalité la plus
naturelle.
Notre vie quotidienne nous offre bons nombres de temps et d'occasions pour
expérimenter ce travail de rentrée en soi-même pour nous tenir en présence du Christ sous son
regard. Les moments avant les offices sont certainement des temps privilégiés. Je note que
bon nombre de frères font l'effort pour être plus à l'heure à l'office ... pour arriver avant et
peu à peu se recueillir en Dieu. De même quand nous sortons de l'office, le temps de
circulation dans le cloitre jusqu'à la salle des coules, peut nous aider à rester en nous-mêmes
sans nous disperser. Mettons à profit ces circulations autour de l'office, mais aussi dans la
maison pour nous recueillir, nous rassembler en nous-mêmes. En allant à l'office, laissons les
soucis, et marchons vers Celui qui nous attend. Quand nous sortons de l'église, laissons
résonner une parole entendue ou un mot. .. Demeurons à l'écoute du Christ, sans nous laisser
trop vite happer par les soucis et les activités. La paix de notre cœur sous le regard du Christ
est comme une nappe phréatique dans laquelle nous savons toujours pouvoir puiser. (22/11/2016)
56. Le neuvième degré d'humilité est que le moine interdise à sa langue de parler et que, gardant le silence, il attende pour parler qu'on l'ait interrogé.
57. En effet, l'Écriture indique qu'« en parlant beaucoup, on n'évite pas le péché »,
58. et que « l'homme bavard ne marche pas droit sur la terre ».
St Benoit redoute le bavardage, que nous nous laissions entrainer par
notre besoin de parler. Il constate que, souvent, cela aboutit à dire du
mal de l'autre. Ce 9ème degré consiste à prendre conscience que cette
pente existe en chacun de nous. Et reconnaitre que cela peut avoir de
graves conséquences, pour celui qui est critiqué, pour la communauté,
pour nous-mêmes.
Nous avons à devenir des hommes qui écoutent. Avoir un avis et des
idées sur tout n'est plus notre objectif. Nous voulons être à l'écoute de
ce que Dieu nous dit. Dieu nous parle, au plus intime de nous-même,
par son Esprit. Il nous parle par sa Parole, méditée, entendue à l'office.
Il nous parle par les événements, et aussi par les personnes
rencontrées.
Il ne s'agit pas de devenir passif. Bien au contraire, il s'agit de devenir
véritablement un homme d'action. Mais à la manière de Dieu. Cette
manière d'agir n'a rien à voir avec les projets et les réussites humaines,
celles-ci consistent à faire des plans, les mettre à exécution à la force
du poignet, en écrasant tous les obstacles. Ici, il s'agit d'entrer dans le
grand œuvre de Dieu. Non pas faire son petit travail à soi. Ni faire de la
résistance passive, ce qui revient au même. Mais entrer dans ce travail
de l'Esprit, qui renouvelle le monde.
Cela nous demande de nous laisser transformer intérieurement, pour
apprendre à voir, à écouter ce formidable travail de l'Esprit Saint, en
nous et autour de nous.
A ce degré de l'humilité, le silence n'est plus seulement une absence de
parole. Il devient une présence attentive et bienveillante. Il ne s'agit pas
d'indifférence, de distance, de refus ou de négation de l'autre. Il s'agit
d'un accueil paisible, attentif. Le murmure, ce discours intérieur négatif,
ne vient plus nous boucher l'horizon et envahir le terrain. L'homme
silencieux un homme d'écoute, il est présent, disponible. (12/11/16)
55. Le huitième degré d'humilité est que le moine ne fasse rien qui ne se recommande de la règle commune du monastère et des exemples des supérieurs.
Ce 8ème degré peut faire illusion par sa simplicité, et son apparente
facilité. Quoi de plus facile que de faire comme tout le monde!
Mais nous sommes souvent avides d'originalité et de changement:
beaucoup veulent éviter de faire comme tout le monde, pour affirmer
la singularité de leur personnalité. Est-ce que St Benoit serait opposé à
l'éclosion de la personnalité de chacun? La vie monastique serait-elle
un moule étriqué dans lequel on veut nous contraindre à nous couler?
Au risque de perdre notre personnalité?
St Benoit ne nous demande pas de disparaitre, de nous fondre dans le
groupe. Ce qu'il attend du moine, c'est qu'il prenne conscience de ce
qui le fonde en vérité. Sans s'appuyer sur de fausses fondations.
La Règle se situe dans la perspective de l'Evangile. Dans cette vision la
conversion est toujours une double découverte. D'abord, je ne suis pas
celui que je prétends être, et l'affirmation d'une personnalité originale
n'est souvent qu'une comédie. Et puis, je suis plus grand que je ne le
crois: « Je est un autre )}, disait Maurice Zundel, en citant Rimbaud. Cet
autre, c'est le Christ qui vit en moi.
Ce 8ème degré d'humilité est celui d'une découverte; d'une expérience
intérieure bouleversante. Le problème n'est plus de jouer un
personnage, de se donner des airs, d'entretenir une image. Mais
d'entrer en communion avec Celui qui nous habite, au plus intime de
nous-mêmes. Et comment découvrir cette relation, sinon en suivant la
voie ouverte par l'exemple des anciens, comme le dit St Benoit. Ce n'est
ni une contrainte extérieure, ni un effort que nous nous imposons à
nous-mêmes. C'est l'ouverture au plus profond de nous-mêmes d'un
autre espace de liberté. Ce 8ème degré nous indique le chemin d'une
autre fécondité, d'une autre originalité. Celle voulue par Dieu. Et c'est
l'Esprit de Dieu qui nous conduit sur ce chemin. (11/11/16 )
51. Le septième degré d'humilité est que, non content de déclarer avec sa langue qu'on est le dernier et le plus vil de tous, on le croie en outre dans l'intime sentiment de son cœur,
52. en s'humiliant et en disant avec le prophète : « Pour moi, je suis un ver et non un homme, l'opprobre des hommes et le rebut du peuple.
53. J'ai été exalté, humilié et confondu. »
54. Et aussi : « Il m'est bon que tu m'aies humilié, pour que j'apprenne tes commandements. »
« Il m'est bon que tu m'aies humilié, pour que j'apprenne tes
commandements! » Ce 7° degré d'humilité peut se résumer par cette
citation du Psaume 118. La version liturgique dit: « C'est pour mon bien
que j'ai souffert, ainsi ai-je appris tes commandements ». L'idée est la
même: Pour apprendre Dieu, il faut passer par des chemins étroits.
L'humilité est un passage nécessaire.
Mais ce degré d'humilité, comme le précédent, n'est pas facile à bien
vivre. Nous hésitons souvent entre deux attitudes contraires. Nous
sentir en dessous de tout, parce que nous avons vécu un échec, nous
nous sommes heurtés à nos limites, à notre incompétence: nous
pouvons croire alors que nous sommes arrivés au 7° degré d'humilité.
Ou bien nous avons le désir de vivre ce degré par vertu, mais dès que
quelqu'un nous fait sentir qu'il nous voit bien ainsi en effet, limité,
incompétent, nous nous révoltons, nous devenons amers.
Le grand problème de l'humilité, c'est que ni l'humiliation, ni la vertu,
ne suffisent pour qu'elle devienne effective. Il ne suffit pas de tout rater
pour être humble. Ni de vouloir l'être par vertu. Dans les deux cas nous
risquons fort nous tromper de chemin.
L'humilité n'est pas d'abord un regard négatif sur soi. C'est plutôt un
regard renouvelé sur l'autre. Elle ne consiste pas à se déprécier, à ne
voir que ses limites et ses défauts. Au contraire. L'humilité véritable,
c'est reconnaitre les dons que Dieu nous a faits, sans que nous y soyons
pour rien. Et surtout s'émerveiller de ce que la grâce fait dans nos
frères. L'humilité n'est donc pas une force négative. Plutôt une
puissance positive qui sait reconnaitre l'œuvre de Dieu.
Seul celui qui aime sait voir la beauté de son frère. Seul celui qui aime
voit, au-delà des apparences. Il discerne le don caché, le trésor dans le
champ, la perle rare, qui fait de chacun de nos frères un trésor.
L'humilité, c'est d'abord un cœur qui aime, des yeux qui s'ouvrent. (10/11/16)
49. Le sixième degré d'humilité est que le moine se contente de tout ce qu'il y a de plus vil et de plus abject, et que, par rapport à tout ce qu'on lui commande, il se juge comme un ouvrier mauvais et indigne,
50. en se disant avec le prophète : « J'ai été réduit à néant et je n'ai rien su. J'ai été comme une bête brute auprès de toi et je suis toujours avec toi. »
« Etre satisfait de tout ce qu'il y a de vil et d'abject » ! Quel instrument
difficile à entendre! Et pourtant, par notre vocation chrétienne et
monastique, nous sommes appelés à cela: participer à l'abaissement de
notre Seigneur.
Benoit nous a amenés à ce degré si rude par les degrés précédents:
Vivre sous le regard de Dieu. Désirer participer à la Passion de Jésus, et
trouver en lui la force d'obéir. Avoir avec notre Père Abbé des rapports
de foi. Entrer dans cette démarche, peut nous aider à aborder cette
étape. Sinon, c'est désespérant! L'homme qui connait sa misère sans
être en relation avec le Christ peut s'enfoncer dans un abîme sans fond.
Notre Salut, c'est d'apprendre à aimer. Le salut n'est pas à faire, mais à
recevoir. La vie divine nous est donnée, comme un don purement
gratuit: le don de Dieu. L'obstacle, ce serait de nous présenter devant
Dieu comme des ayants droit. Jour après jour, travailler à écarter tout
ce qui peut faire obstacle à cette effusion de la vie divine en nous. « J'ai
été réduit à rien et je n'ai rien su. J'ai été comme une brute auprès de
toi, mais moi, je suis toujours avec toi », dit Benoit, en citant le Psaume
72. C'est cet effacement de nous-même devant le Seigneur qui nous est
demandé. Mais ce consentement, cette reddition, ne vont pas de soi!
Nous devons nous habituer aux façons de faire de Dieu. Il faut que Dieu
nous élève au-dessus de nous-mêmes, car nous en sommes incapables
par nos seules forces. Cela suppose des détachements dans tous les
domaines. Dans la mesure où nous consentons à ces détachements,
souvent inattendus, le torrent de la vie de Dieu pourra se répandre en
nous. Mais, nous le savons bien, Il y a toutes ces manières subtiles dont
nous nous recherchons, sous prétexte de nous épanouir. Alorsjque cet
épanouissement nous sera donné par Dieu, dans la relation avec Lui.
Le monastère est le lieu idéal où nous pouvons apprendre à devenir
humbles. Il nous est bon de perdre la face devant les autres. Tant que
nous n'en sommes pas là, nous jouons plus ou moins la comédie aux
yeux des autres, et à nos propres yeux. Aidons nous les uns les autres,
par notre fidélité, par notre charité, à faire cette expérience, en
communion avec le Christ. (9/11/16)
44. Le cinquième degré d'humilité est que, par une humble confession, on ne cache à son abbé aucune des pensées mauvaises qui se présentent à son cœur, ni des mauvaises actions qu’on a commises en secret.
45. L'Écriture nous y exhorte en disant : « Révèle ta voie au Seigneur et espère en lui. »
46. Et elle dit aussi : « Confessez-vous au Seigneur, parce qu'il est bon, parce que sa miséricorde est à jamais. »
47. Et à son tour le prophète : « Je t'ai fait connaître mon délit et je n'ai pas dissimulé mes injustices.
Il Y a quelques jours, je rapportais des points sensibles de vie communautaires qui, mal
vécus, peuvent entrainer vers des dérives sectaires. L'ouverture du cœur, ou le rapport entre
for interne et for externe en est un. Une mauvaise lecture de ce 5° de l'humilité pourrait
légitimer des pratiques déviantes. Que nous dit St Benoit? L'ouverture du cœur est le signe
d'un frère qui avance sur le chemin de l'humilité. Elle manifeste son désir de ne rien
« cacher» de ses ombres à son Abbé, et par là de ne rien « dissimuler au Seigneur de ses
injustices ». Le moine humble ne craint pas d'apparaitre tel qu'il est devant un autre dans le
désir d'être en vérité devant son Dieu. La seconde chose que manifeste l'ouverture du cœur
est la foi en la miséricorde de Dieu et en sa bonté. Reconnaitre ses pauvretés rend gloire à
Dieu, car cela atteste en acte que je lui fais vraiment confiance.
Que ne nous dit pas St Benoit? S'il suggère ici, et s'il invite en d'autres passages (46,
5-6; 4,50) le moine à dire ses pensées, il n'oblige pas à ouvrir son coeur.L'ancien spirituel ou
l'abbé n'ont pas à demander l'ouverture du cœur. A la suite de Benoit, ils ne peuvent que la
conseiller comme une pratique spirituelle très fructueuse. Celle-ci ne peut se vivre que dans la
liberté en vue d'une plus grande liberté intérieure. S'ouvrir pour dire les choses les plus
délicates qui peuvent peser ou dont on n'est pas fier, cela demande du courage. Il nous en
coûte tous. Mais ceci n'est rien au regard de la libération éprouvée et la liberté retrouvée pour
poursuivre le chemin. St Benoit sait par expérience qu'un moine ne peut aller loin sur le
chemin de la vie monastique s'il conserve en lui ces poids qui paralysent et qui empêchent de
vivre. St Benoit ne connait pas la distinction que nous avons, entre ouverture du cœur et
confession. La confession nous apprend à venir avec confiance déposer nos péchés devant
notre Père des cieux, dans l'assurance qu'il les remet à travers le ministre qui nous écoute.
L'ouverture du cœur nous engage davantage sur le chemin de la liberté et de l'humilité, en
acceptant de parler de tout ce qui habite notre cœur, des souvenirs du passé, des pensées
lourdes ou obsédantes etc ... La parole dite et l'écoute qui l'accueille sont ici en elles-mêmes
thérapeutiques: en se posant sous le regard et l'écoute d'un autre, notre vie apprend à
s'ajuster, à se ré ordonner. St Benoit ne connait pas la distinction « for interne et for externe»
selon laquelle on ne dirait rien à l'autorité, à l'abbé, de sa vie intérieure. L'ouverture du cœur
touche tellement l'ensemble de la vie du moine, qu'il parait difficile de couper entre c,e qui
serait de l'ordre plus intime et ce qui serait de l'ordre plus extérieur. Ouvrir son cœur à l'abbé
peut permettre au moine d'avancer plus librement et à l'abbé d'aider le frère au plus près de
ce qu'il vit.Cependant, notre tradition monastique a intégré une mesure de prudence en
évitant que l'abbé ou le maitre des novices ne soit aussi les confesseurs obligés des frères. La
chose est possible mais elle restera exceptionnelle, pour qui le veut. La confession demeure
cet espace privilégié et préservé entre Dieu et le moine. (08/11/2016)
35. Le quatrième degré d'humilité est que, dans l'exercice même de l'obéissance, quand on se voit imposer des choses dures et contrariantes, voire des injustices de toute sorte, on embrasse la patience silencieusement dans la conscience,
36. et que, tenant bon, on ne se décourage ni ne recule, selon le mot de l'Écriture : « Celui qui persévérera jusqu'à la fin, celui-là sera sauvé. ;»
37. Et aussi : « Que ton cœur soit ferme ! Supporte le Seigneur. »
38. Et voulant montrer que le fidèle doit même supporter pour le Seigneur toutes les contrariétés, elle place ces paroles dans la bouche de ceux qui souffrent : « A cause de toi, nous sommes mis à mort chaque jour. On nous regarde comme des brebis de boucherie. »
39. Et sûrs de la récompense divine qu'ils espèrent, ils poursuivent en disant joyeusement : « Mais en tout cela, nous triomphons, à cause de celui qui nous a aimés. »
40. Et ailleurs, l'Écriture dit aussi : « Tu nous as éprouvés, ô Dieu, tu nous as fait passer par le feu, comme on fait passer au feu l'argent. Tu nous as fait tomber dans le filet. Tu nous as mis sur le dos des tribulations. »
41. Et pour montrer que nous devons être sous un supérieur, elle poursuit en ces termes : « Tu as fait chevaucher des hommes sur nos têtes. »
42. En outre, ils accomplissent le précepte du Seigneur par la patience dans les adversités et les injustices : frappés sur une joue, ils présentent aussi l'autre ; à qui ôte leur tunique, ils abandonnent aussi le manteau ; requis pour un mille, ils en font deux ;
43. avec l'Apôtre Paul, ils supportent les faux frères, et ils supportent la persécution et quand on les maudit, ils bénissent.
Supporter, tenir bon, ne pas se décourager ne pas reculer, persévérer, embrasser la
patience. Voici tous les synonymes qui parsèment les lignes entendues au sujet du 4ème degré
de l'humilité ... Lorsque survient l'adversité, les contrariés, voire les injustices dans la vie
monastique, et plus particulièrement dans l'exercice de l'obéissance, voilà la stratégie
proposée pour avancer plus profondément dans l'humilité. Au lieu de se mettre en colère:
supporter; au lieu de se rebeller, tenir bon ;au lieu d'abandonner, embrasser la patience. Loin
d'être une manœuvre tactique pour lâches voulant éviter le combat, cette stratégie de
l'humilité porte le moine au cœur du combat spirituel. Là où la contrariété, voire les injustices
réveillent en nous le désir de revanche et la volonté de ne pas perdre la face, la stratégie de
l'humilité nous fait entrer par la patience à un autre niveau de combat..C'est le niveau où le
Christ lui-même a combattu comme quelques citations scripturaires employées le suggèrent ...
« On nous regarde comme des brebis de boucherie ... » Le Christ seul a connu l'injustice
totale, lui qui n'a pas péché et qui soutient l'univers. Il a souffert avec patience ce qu'il ne
méritait en aucun cas. Par son attitude de patience, de pardon et d'amour pour ceux qui le
faisaient souffrir, il a vaincu le mal en sa racine. Par son humilité il a accepté d'être compté
pour rien ... et il nous a délivrés de tout orgueil et de toute prétention à exister par et pour
nous-même. Sa Résurrection signe sa Victoire.
Ce 4ème degré ne veut rien moins que nous faire entrer dans le dynamisme pascal du
Christ par la patience, supporter les contrariétés, voire les injustices, avec cette profonde
conviction « qu'en tout cela, nous triomphons, à cause de celui qui nous a aimés»Que le
Christ mort et Ressuscité, nous vienne en aide ! (03.11.2016 )
34. Le troisième degré d'humilité est que, pour l'amour de Dieu, on se soumette au supérieur en toute obéissance, imitant le Seigneur, dont l'Apôtre dit : « S'étant fait obéissant jusqu'à la mort. »
R.B.
A ce 30 degré, repris de la règle du Maitre, comme l'ensemble du chapitre, St Benoit ajoute la mention: « pour l'amour de Dieu ». « Pour l'amour de Dieu, on se soumet au supérieur en toute obéissance, imitant le Christ ». Ajout précieux. L'obéissance à un autre homme, à un supérieur, serait servile si elle n'était faite par amour. L'amour de Dieu nous a conduits au monastère. Nous avons entrevu combien cet amour pouvait nous faire vivre. Si nous choisissons de demeurer et de continuer à obéir, ce ne peut-être que par amour de Dieu. « Imitant le Seigneur» dit encore Benoit. Le Seigneur Jésus a obéi par amour de son Père. Comme je le disais hier, cela n'a pas été facile pour lui. Mais il a tenu bon. Il est resté fidèle à l'appel initial qui l'a conduit du désert au baptême, puis sur les routes de Palestine. Peu à peu il a compris que l'annonce du Royaume ne prendrait vraiment corps qu'avec le passage par la croix et la résurrection. Jusqu'au bout, Jésus a tenu bon dans la confiance aimante en son Père.
Comment demeurer dans une obéissance vivante, une obéissance qui ouvre en nous des chemins de liberté? N'est-ce pas en regardant Jésus et en scrutant dans les évangiles, sa manière à lui d'être fidèle et aimant dans l'obéissance? Nous n'imiterons pas le Christ, en vivant comme lui, le chemin de croix du Golgotha. Cela, lui seul pouvait l'accomplir. Mais à chacun de nous, il revient d'être disponible aux évènements et aux circonstances pour obéir à l'appel gui retentira. A travers le P.Abbé ou les frères, la vie quotidienne ne cesse de nous lancer des appels qui requièrent notre consentement. Le plus souvent, nous obéissons. Nous mesurons alors combien notre consentement nous inscrit dans un mouvement de vie qui est bon. Parfois nous faisons la sourde oreille, remettant à plus tard. Parfois nous refusons sans que les raisons invoquées soient bien vérifiées ou fondées. Consentir à se laisser déplacer par une demande, accepter d'être remis en cause par une remarque, c'est cela notre chemin de croix à la suite de Jésus. Rien de sanglant ni d'héroïque. Cette obéissance peut coûter cependant car elle vient toucher notre coeur encore trop enfermé sur lui-même. Allons-nous avec Jésus, nous donner dans l'instant présent, en nous laissant conduire dans une offrande plus libre? (26.10.2016)
31. Le second degré d'humilité est que, n'aimant pas sa volonté propre, on ne se complaise pas dans l'accomplissement de ses désirs,
32. mais qu'on imite dans sa conduite cette parole du Seigneur disant ;: « Je ne suis pas venu faire ma volonté, mais celle de celui qui m'a envoyé. ;»
33. L'Écriture dit aussi : « La volonté subit un châtiment et la contrainte engendre une couronne. »
R.B.
Pour bien comprendre les lignes entendues ce matin, le 2d degré d'humilité, il nous faut sûrement d'abord revivifier notre foi en la Volonté divine ... Celle-ci ne peut-être que très bonne. Dieu veut le bonheur de tout homme. Tel est le vouloir qui a guidé son projet créateuret son dessein rédempteur. Dieu nous aime en soi, et il nous témoigne encore davantage d'amour en nous appelant à prendre part à son dessein de salut pour le monde. Tel est notre appel radical: nous unir au Christ pour devenir par lui, avec lui et en lui des instruments de son salut comme nous le célébrons en chaque eucharistie. Ainsi avec ce second degré, St Benoit nous entraine à suivre le Christ qui n'a voulu faire que la volonté de son Père: «Je ne suis pas venu faire ma volonté, mais celle de celui qui m'a envoyé ». Le propos de la règle n'est autre que de nous donner les moyens d'être au plus près du Christ, et de rendre plus effectif notre engagement à sa suite.
Faire la volonté de Dieu et ne pas faire sa volonté propre: comment bien comprendre? En effet, il ne s'agit pas de ne pas avoir de volonté. Jésus lui-même a eu une volonté humaine pleine, comme elle se manifeste à son paroxysme au jardin de Gethsémani. Là, la volonté humaine de Jésus exprime tout d'abord sa crainte de faire la volonté du Père: « S'il est possible que cette coupe passe loin de moi» ... puis dans un second temps, y consent et la fait sienne: « Cependant non pas ce que je veux, mais ce que tu veux» ... La volonté de Jésus serait restée « volonté propre» en refusant d'entrer dans le dessein du Père ... Une volonté centrée sur soi, et du coup limitée aux seuls horizons de la vie présente. Au contraire, la volonté humaine de Jésus trouve toute sa plénitude en consentant à la volonté du Père. Elle s'unit pleinement à la volonté divine pour traverser la mort et permettre l'avènement de la résurrection. F. Jean Pascal, ce matin, nous prions avec toi. Que le Seigneur Jésus te donne comme à chacun de nous, la force et aussi la joie de convertir tout ce gui en ta volonté est « volonté propre », celle qui cherche ses propres intérêts. Que ta volonté soit pleinement unie à celle de Jésus pour qu'advienne davantage en ta vie, mais aussi dans la communauté et le monde, la victoire de la résurrection. (25.10.2016)