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6. En tout temps, en effet, il nous faut lui obéir au moyen des biens qu'il met en nous, de sorte que non seulement, père irrité, il ne vienne jamais à déshériter ses fils,
7. mais aussi que, maître redoutable, courroucé de nos méfaits, il ne nous livre pas au châtiment perpétuel, comme des serviteurs détestables qui n'auraient pas voulu le suivre jusqu'à la gloire.
8. Levons-nous donc enfin, puisque l'Écriture nous éveille en nous disant : « L'heure est venue de nous lever du sommeil »,
9. et les yeux ouverts à la lumière de Dieu, écoutons d'une oreille attentive ce que la voix divine nous remontre par ses appels quotidiens :
10. « Aujourd'hui, si vous entendez sa voix, n'endurcissez pas vos cœurs ;» ;;
11. et encore : « Qui a des oreilles pour entendre, qu'il entende ce que l'Esprit dit aux Églises. »
12. Et que dit-il ? « Venez, mes fils, écoutez-moi, je vous enseignerai la crainte du Seigneur.
13. Courez, pendant que vous avez la lumière de la vie, de peur que les ténèbres de la mort ne vous atteignent. »
Nous retrouvons dans ce passage du Prologue les mêmes thèmes que
dans les premiers versets. Quatre verbes le résument: entendre,
écouter, accueillir, et faire. St Benoit exprime tout cela par un choix de
citations bibliques. « N'endurcissez pas votre cœur ». « Ecoutons d'une
oreille attentive. » « Je vous enseignerai la crainte du Seigneur ».
« Courez tant que vous avez la lumière de la vie ». Ces textes placent ce
cheminement dans une double perspective: celle de l'aujourd'hui. Celle
de l'urgence.
Voyons d'abord ce qui est dit de cet aujourd'hui. « L'heure est venue de
sortir de votre sommeil ». « Ecoutons la voix puissante de Dieu qui nous
presse chaque jour en disant: Aujourd'hui, n'endurcissez pas votre
cœur. » Pour Benoit, il n'est pas question d'attendre un hypothétique
moment favorable. C'est aujourd'hui que Dieu nous appelle. C'est
aujourd'hui qu'II nous attend. Ne vivons pas dans le regret d'un passé
idéalisé. Ni dans le rêve d'un avenir qui chanterait. Cela n'est pas la
vérité. La lumière de Dieu nous éclaire aujourd'hui. C'est en ce moment
que nous pouvons vivre la relation avec Lui.
Mais cet aujourd'hui a quelque chose de pressant. Il y a urgence. « Dieu
chaque jour nous presse ». Alors, « courez tant que vous avez la lumière
de la vie, de peur que les ténèbres de la mort ne vous enveloppent. »
Cela signifie que notre conversion ne supporte pas de délai. Le refus
d'écouter, en nous enfermant dans notre péché, nous rend arides et
stériles. Et la Parole ne porte plus aucun fruit en nous.
Saint Benoit construit sa Règle sur ce double dynamisme. Celui de
l'aujourd'hui, où Dieu vient nous visiter. Et celui de l'urgence. Il ne sert
à rien de regretter les oignons d'Egypte. Ni de rêver de jours
merveilleux dans l'avenir. Accueillons le don que Dieu nous fa it
aujourd'hui, la vie, sa Parole; c'est là que Dieu nous attend. Mais pour
cela nous avons à apprendre à écouter.
Et si Benoit nous invite à entendre, à écouter Dieu aujourd'hui, c'est
afin de pouvoir lui parler, le célébrer. Répondre à l'appel entendu. Etre
attentifs, voilà ce qui nous manque le plus. C'est un don de l'Esprit Saint
qu'il nous faut demander. Etre fidèles à briser toutes les petites
attaches qui nous replient sur nous-mêmes, et nous empêchent
d'entendre la voix de Dieu. - 14/11/17
1. ÉCOUTE, ô mon fils, ces préceptes de ton maître et tends l'oreille de ton cœur. Cette instruction de ton père qui t'aime, reçois-la cordialement et mets-la en pratique effectivement.
2. Ainsi tu reviendras, par ton obéissance laborieuse, à celui dont tu t'étais éloigné par ta désobéissance paresseuse.
3. À toi donc, qui que tu sois, s'adresse à présent mon discours, à toi qui, abandonnant tes propres volontés pour servir le Seigneur Christ, le roi véritable, prends les armes très puissantes et glorieuses de l'obéissance.
Depuis maintenant quelques semaines, nous lisons le livre d'Ezéchiel aux Vigiles. Un
livre où le prophète ne ménage pas sa peine ni son courage pour interpeler le peuple d'Israël
qui se fourvoie dans les infidélités, dans les idolâtries de toute sorte. Le langage est rude et
tranchant. Mais ne nous donne-t-il pas à entendre le cri d'un Dieu gui nous aime et qui désire
pour son peuple bien mieux que ce vers quoi il se tourne spontanément. L'idolâtrie est ce
mouvement du péché qui nous détourne de la vérité pour nous entrainer vers des illusions ...
illusions de la sécurité, de l'avoir, du pouvoir, du savoir etc ... bref tout ce qui nous donne
l'illusion de pouvoir nous passer de Dieu ou de l'avoir à notre service ... Quelle est l'antidote
à l'idolâtrie? C'est l'écoute, l'écoute « d'un père qui t'aime », nous assure Benoit ce matin.
Oui, Dieu notre Père ne cesse de venir nous parler, de nous dire son amour, de nous
interpeller de mille manières. Son désir est de nous faire entrer dans une relation vivante et
vraie, une relation de confiance et d'amour. Mystérieusement, marqués par le péché nous
peinons à entendre cette parole comme bonne et libérante. Depuis Adam, nous peinons à vivre
l'écoute ou l'obéissance à la Parole de Dieu comme faisant partie naturellement de notre vie.
Nous sommes devenus infirmes, durs d'oreille, durs de cœur. .. Pour revenir vers Dieu, cela
nous demande un vrai labeur.Benoit parle de « l'obéissance laborieuse ».
Ecouter, désirer écouter... pour mieux entendre la voix du Père qui nous aime. C'est un
combat de tous les jours. Il y a tellement de fausses représentations de Dieu et de nous-mêmes
qui voilent et obstruent l'écoute. Elles nous laissent enfermés sur nous-mêmes. Ecouter,
Benoit propose de prendre « les armes de l'obéissance»pour ce combat. Obéissance à un
homme dans le désir d'y « servir le Seigneur Christ, le roi véritable ». Depuis que le Verbe, la
Parole s'est faite chair, il nous est donné de pouvoir entendre avec confiance la voix de Dieu
dans la voix d'un homme, ou dans la voix des évènements de l'histoire. La vie monastique se
propose d'être une école d'écoute de la Parole de Dieu en faisant fond sur toutes les
médiations humaines. Ces médiations nous décentrent de nous-mêmes. Elles nous sortent de
l'illusion tenace d'être notre propre source ... Avec ce début de la règle, retrouvons le goût et
la joie de l'écoute: l'écoute de la Parole proclamée dans la liturgie ou méditée dans la
lectio .. .l'écoute de la parole du frère .. .l'écoute de la parole d'autorité .. .l'écoute des
évènements ... Soyons heureux d'être moins des hommes qui savent que des hommes qui
désirent encore écouter pour apprendre encore ...
11.11.2017
8. Toi donc, qui que tu sois, qui te hâtes vers la patrie céleste, accomplis avec l'aide du Christ cette toute petite règle pour débutants que nous avons fini d'écrire ;;
9. et alors seulement tu parviendras, grâce à la protection de Dieu, à ces sommets plus élevés de doctrine et de vertus que nous venons de mentionner. Amen.
« Accomplis avec l'aide du Christ cette toute petite règle». Dans l'article entendu en
début de semaine sur la vision du pape François, il y avait en final une réflexion sur notre
monde « sans loi », en face duquel le pape donnait des repères, qui pouvaient inciter à
rechercher sans cesse la paix et la concorde. Face à ce constat d'un monde « sans loi », nous
pouvons nous réjouir de vivre sous une règle qui nous enseigne comment vivre sous la loi de
l'Evangile. La petite règle écrite par Benoit vient traduire dans une existence concrète le
dynamisme de l'évangile pour des frères qui veulent ensemble chercher Dieu. A la manière
d'un aiguillon, elle nous stimule à aller toujours plus loin dans le don de nous-mêmes. Que
serions-nous sans elle? Serions-nous capable de durer dans la prière quotidienne? Aurions-
nous assez d'énergie pour nous lever tôt afin de chanter la gloire de Dieu? Serions-nous
constants dans le service mutuel? Pourrions-nous demeurer dans la patience et l'accueil des
infirmités de nos frères, et d'abord des nôtres? La règle, si petite soit-elle, nous offre un cadre
de vie empreint de sagesse spirituelle. Elle éclaire de sa lumière tous les aspects de notre vie
humaine (le manger, le dormir, le travailler, le vivre ensemble, la parole et le silence, l'étude,
la prière). En chacun de ces aspects, elle nous aide à incarner la quête de Dieu que l'Esprit
Saint éveille en nos cœurs. En toute vérité, sans gommer nos faiblesses et nos chutes, la règle
nous propose un chemin exigeant et bon à la fois. Ainsi balisée, la vie monastique est
traversée par un élan spirituel qui nous entraine à chercher et à chercher encore. Il y a comme
une sorte d'insatisfaction dans la vie monastique. Quelque chose, il vaudrait mieux dire
Quelqu'un en nous, l'Esprit Saint pour ne pas le nommer, nous pousse ou nous tire vers un
don toujours plus entier de nous-mêmes. Le moine reste toujours insatisfait ... Pourquoi ?
Certainement parce qu'il sait plus ou moins confusément, que le bonheur plein est encore à
venir. La qualité de vie humaine et spirituelle vers laquelle nous tendons ensemble sur cette
terre, n'est que l'ébauche de la plénitude que nous vivrons dans le Royaume. Oui, sous la
conduite de l'Esprit Saint, demeurons des insatisfaits, toujours à l'écoute et à la recherche de
ce bonheur à venir, bonheur que nous pressentons parfois dans la prière et dans la charité
fraternelle vécue humblement. N'est-ce pas cela que Benoit suggère quand il parle du moine
qui se hâte vers la patrie céleste... ? - 10.11.2017
1. Si d’ailleurs nous avons écrit cette règle, c'est pour qu'en l'observant dans les monastères, nous fassions preuve au moins d'une certaine décence morale et d'un commencement de vie religieuse.
2. Mais pour celui qui se hâte vers la perfection de la vie religieuse, il est des enseignements des saints Pères dont l'observation conduit l'homme jusqu'aux cimes de la perfection.
3. Quelle est en effet la page, quelle est la parole ayant Dieu pour auteur, dans l'Ancien et le Nouveau Testament, qui ne soit une norme parfaitement droite pour la vie humaine ;?
4. Quel est le livre des saints Pères catholiques qui ne nous fasse entendre comment courir tout droit jusqu'à ce que nous parvenions à notre créateur ;?
5. Et encore les Conférences des Pères et leurs Institutions et leurs Vies , ainsi que la Règle de notre saint Père Basile,
6. que sont-elles d'autre que les instruments des vertus donnés par les moines de bonne conduite et obéissants ;?
7. Mais pour nous qui sommes paresseux, de mauvaise conduite et négligents, il y a de quoi rougir de confusion.
Ce dernier chapitre est bien dans la tonalité de l'humilité que Benoit souhaite placer
au centre de la vie monastique. En conclusion de sa règle, il estime que celle-ci n'est pas un
absolu. Elle n'épuise pas tous les moyens que l'on peut utiliser pour progresser. Il est
nécessaire de pouvoir s'appuyer sur les Ecritures, l'AT et le NT, sur les écrits des Pères
Catholiques et Monastiques, tel que Cassien, Basile, et les Pères du désert.
Ce petit chapitre peut être l'occasion de nous demander chacun: où et comment nous
puisons la nourriture spirituelle qui va nous permettre de rester éveillés? Lire, méditer,
prendre appui sur des auteurs peut nous aider à demeurer vivants, en affutant notre désir de
grandir.Les Ecritures, mais aussi les Pères et les auteurs spirituels offrent des enseignements,
des expériences et des exemples qui nous permettent de relire et de mieux comprendre notre
propre manière d'aller vers Dieu. Ici, il ne s'agit de pas de lire pour se cultiver ou pour avoir
lu. Mais bien de lire et méditer, prier, afin que quelque chose change dans notre cœur. En
quelque sorte, il s'agit d'un travail spirituel afin d'être davantage des disciples de Jésus. St
Benoit nous suggère donc d'être plus que des observants, ou de bons pratiquants. Il souhaite
que nous grandissions dans une connaissance plus fine, et du chemin de conversion - ce
seront les exemples des Pères du désert ou des saints, par exemple- et de l'intimité avec Dieu
- ce seront les Institutions et les conférences de Cassien par exemple-. Préparant une
conférence sur Cassien, je retrouve avec intérêt ses écrits qui nous entrainent vers la quête de
la charité, inséparable de la pureté du cœur et de l'humilité, dans la ligne d'Evagre. Il est
important de ne jamais oublier cette finalité, sans cesse recherchée. Oui, si notre vie
monastique est une pratique qui ne se paie pas de mots, elle ouvre à une intelligence plus
profonde de ce qu'est l'être humain devant Dieu: un être fait pour aimer en vérité. De même
elle nous introduit dans une compréhension plus ample du projet de Dieu sur notre monde: il
désire nouer avec chacun une alliance unique. Les Ecritures, les écrits monastiques, comme
les écrits spirituels remettent devant nos yeux expériences et réflexions muries par d'autres
avant nous. Vis-à-vis d'eux, nous sommes toujours comme des nains sur des épaules de
géants, bénéficiant de leur sagesse qui a balisé en quelque sorte le chemin. - 08.11.2017
10. ils affectionneront leur abbé d'une charité sincère et humble ;;
11. « ils ne préféreront absolument rien au Christ. ;»
12. Que celui-ci nous fasse parvenir tous ensemble à la vie éternelle ;!
« Ils ne préfèreront absolument rien au Christ. Que celui-ci nous fasse parvenir tous
ensemble à la vie éternelle». Lire ensemble ces deux versets apporte une belle lumière à la
dynamique spirituelle dans laquelle nous propose d'entrer st Benoit. Celle-ci est tout à la fois
très personnelle et très communautaire. Personnelle dans la relation unique que chacun vit
avec le Christ, le préféré absolument; et communautaire dans le but recherché: jouir tous
ensemble de la vie éternelle. Le Christ est le centre de notre vie personnelle et le centre de
notre vie commune. D'un côté, chrétiens baptisés dans le sang du Christ, nous sommes
appelés à connaitre le Christ et à l'aimer d'une façon toujours plus personnelle. Comme un
ami parle et chemine avec son ami. Sachons mettre à profit nos temps de lectio et d'oraison,
pour nourrir un dialogue plus intime et vrai avec le Christ. Si Jésus lui-même a dit: « Nul ne
connait le Fils, sinon le Père» (Mt Il, 27), nous devons demander au Père, par exemple au
début de notre lectio ou de notre prière, qu'il nous donne la grâce de mieux connaitre son Fils,
le Christ ... d'une connaissance plus intérieure. D'un autre côté, le Christ est le centre de notre
vie commune. A travers elle, école de vie et de charité, il ne cesse de nous parler. Il se sert de
l'exemple ou de la remarque d'un frère pour nous enseigner. Le soutien fraternel, un sourire
ou un geste de réconfort sont des signes de la sollicitude du Christ pour nous. Bon Pasteur, il
nous offre sa vie et son pardon à travers les sacrements de son Eglise. En cette vie présente, il
nous conduit, les uns avec les autres, les uns par les autresvers la Patrie. Le visage du frère
m'oblige à élargir ma compréhension du mystère du Christ. Celui-ci est toujours plus grand
que l'image que je m'en fais à travers la relation, si intime soit-elle, que je peux avoir avec
lui. Mon frère me révèle dans sa recherche d'autres facettes du visage du Christ.
En cette veille de Toussaint, qui tourne nos regards vers le but ultime de la vie
éternelle, nous pouvons nous réjouir d'être en route tous ensemble, en communauté, en
Eglise. Le Christ, Grand berger des brebis, nous conduit et nous rassemble en Lui, de telle
façon que tous ensemble nous devenions le Christ Total, le Christ à l'état d'adulte. Dans
l'immensité de la foule qui chante devant le trône de Dieu, chacun a une place unique tout en
n'étant qu'une infime partie du Corps ... Partie précieuse qui tisse avec la Tête, en même
qu'avec les autres cellules du Corps, une relation privilégiée. Mystérieuse communion
d'amour que le temps présent nous donne d'accueillir avec labeur et fatigue, mais qui porte en
germe la vie éternelle. - 31.10.2017
9. avec amour ils craindront Dieu ;
«Avec amour, ils craindront Dieu » ... Crainte et amour. .. De façon étonnante, ce
couple de mots antinomiques traverse toute la bible pour essayer de caractériser notre relation
avec Dieu. Parfois on nous dit « tu aimeras Dieu », parfois « tu craindras ton Dieu », parfois
les deux dans un même verset comme en Dt 10, 12 : « Et maintenant que te demande le
Seigneur ton Dieu? Sinon de craindre le Seigneur ton Dieu, de suivre toutes ses voies, de
l'aimer,de servir le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur et de toute ton âme, de garder les
commandements du Seigneur et ses lois ... ». Craindre, aimer, servir, suivre, garder les
commandements: aurait-on là différentes facettes d'un même engagement vis-à-vis de Dieu?
Par ailleurs, nous pourrions être tentés de résoudre un peu vite l'apparente opposition entre
crainte et amour de Dieu, en allant tout de suite à la conclusion apportée par st Jean qui
affirme que l'amour chasse la crainte (1 Jn 4, 18). St Benoit ne le fait pas ici en choisissant de
tenir ensemble amour et crainte pour exprimer la relation avec Dieu. Pourquoi?
Il n'est pas facile de répondre. Cette tension volontairement maintenue entre amour et
crainte de Dieu, nous remet devant le mystère de notre relation avec Dieu. Que pouvons-nous
dire de notre relation avec lui. Sommes-nous assurés de l'aimer, pouvons-nous dire que nous
le craignons? Difficile d'être juge et partie. Si nous sommes sûrs de ne pas nous tromper,
c'est en disant: « Seigneur, viens à mon aide. Apprends-moi à aimer, pécheur que je suis ».
Ainsi tenir ensemble crainte et amour peut nous aider à être en vérité devant Celui qui
surpasse tout ce qu'on peut imaginer, qui tient en sa main tout l'univers créé, et qui daigne
pourtant venir converser et marcher avec chacun. La crainte nourrit la conscience de notre
petitesse: qui sommes-nous devant Dieu pour lever les yeux et nous adresser à Lui, Dieu au-
delà de tout créé. ? D'un autre côté, l'amour que la bible ne cesse d'éveiller dans le cœur des
croyants vient au contraire nous dire l'infini désir de Dieu de nous voir nouer avec lui, une
relation aimante. Le Dieu immense se révèle être en même temps un Dieu immensément
proche et familier, dans le visage de Jésus. Il désire être aimé: « Pierre m'aimes-tu? ». Lui
seul peut nous faire entrer dans cet amour vrai et profond qui chasse la criante. Profitons des
temps offerts par la liturgie, par la lectio et l'oraison du soir, pour nous laisser approcher par
notre Dieu. N'ayons pas peur de lui donner du temps. Faisons-lui l'honneur de notre
disponibilité, de notre présence ouverte et écoutante ... Il parle. Il nous aime. - 28.10.2017
8. ils pratiqueront la charité fraternelle avec désintéressement ;;
«Ils pratiqueront la charité fraternelle chastement » ... On pourrait se poser la
question: pourquoi Benoit éprouve-t-ille besoin de préciser « chastement})quand il parle de
charité fraternelle? Certainement parce qu'une charité fraternelle qui ne serait pas chaste ne
serait plus charité fraternelle. Dans les relations entre moines, des déviances ou des
contrefaçons peuvent s'introduire qui altèrent, voire tuent la charité fraternelle. Des gestes
ambigües, des attitudes fusionnelles qui enveloppent l'autre ne sont pas possibles. Ils
témoignent de besoins affectifs qui devront trouver dans notre vie monastique, une autre
expression faite de respect et de juste distance. Ou sinon la vie monastique n'est pas possible.
Jamais l'affection pour un frère ne pourra se vivre dans une relation gui enferme ou gui isole
dans un face à face mortifère. La charité fraternelle sera chaste car elle laissera toujours de
l'espace pour un tiers. Elle se vivra toujours dans la lumière. Rien de caché ou de dissimulé.
Parce que rien de trouble. Parler avec un tiers, avec le père spirituel ou avec le P. Abbé de nos
relations nous aidera à demeurer juste et dans la vérité. Plus la relation peut être forte, plus
cette parole sera nécessaire.
Cette parole permettra de mettre des mots sur des mouvements ou des élans que l'on
peut éprouver. Notre affectivité reste en partie un mystère à nos propres yeux. Elle nous
façonne et nous donne d'éprouver des sentiments d'attirance comme de répulsion d'ailleurs.
Ces sentiments ne valent pas argent comptant. Ils sont là, mais ils méritent d'être compris, mis
à la lumière et discernés pour vérifier ce qu'ils expriment réellement de ma capacité à aimer.
Ils sont là, mais ils peuvent nous égarer et n'être que le signe d'un grand besoin de
reconnaissance ou de soutien, plus que d'amour de l'autre. Prendre la mesure de notre
affectivité, mieux nous connaitre est important dans une communauté. Car être trop aveugle
sur nous-mêmes en ce domaine, peut conduire à blesser l'autre. Des gestes ou des attitudes
ambigües peuvent déstabiliser, tromper et mettre un frère en difficulté. Soyons donc nets en
ce domaine. Soyons aussi responsables et courageux pour oser une parole. Celle-ci, en nous
libérant, rendra plus vivantes et heureuses nos relations fraternelles. Pratiquer la charité
fraternelle chastement nous fera entrer dans une délicatesse et une vraie présence. Dès lors pas
besoin de beaucoup de démonstrations affectives, mais une constance dans le service de
l'autre et l'attention discrète. Rien qui s'impose. Dans une grande docilité à l'Esprit, appre-
nons à aimer nos frères, tous nos frères, pour être à leur côté de bons appuis, sûrs et fidèles. - 27.10.2017
6. ils s'obéiront à l'envi ;
7. personne ne recherchera ce qu'il juge être son avantage, mais plutôt celui d'autrui ;;
Il y a quelques jours,je commentais le chapitre précédent sur l'obéissance mutuelle.
On la retrouve ici en une maxime brève: « ils s'obéiront à l'envi» ... Dans cette expression,
on perçoit bien l'élan du bon zèle. Il ne s'agit plus d'une obéissance vécue, de plus ou moins
bon gré, mais d'une obéissance dont on a envie, une obéissance qui vient du désir.. .le désir
d'obéir. Ici, nous touchons à la racine de l'obéissance: le désir. L'obéissance ne peut venir de
l'extérieur. Elle ne peut être imposée comme une règle à laquelle on se soumet. Dans un
monastère, dans la vie religieuse, nous obéissons parce que nous désirons obéir. D'où vient ce
désir? N'est-il pas en nous comme un don, un cadeau qui est inséparable de notre appel à
suivre le Christ? Cet appel nous a fait pressentir combien obéir au Christ dans la vie
monastique était une chose bonne et heureuse, une chose désirable. La fidélité durant notre
vie va consister en une fidélité à ce désir ... et on peut l'espérer aussi, elle va consister en un
approfondissement et en un élargissement de notre désir.L'épreuve vient parfois quand une
sorte de brouillard ou de voile semble pour un temps nous couper de notre désir ou nous le
cacher. Les moines du désert parlaient de l'acédie, ce dégoût ou cette perte d'élan. Traverser
cette épreuve avec patience sans se décourager, sans abandonner la course, nous donne
d'expérimenter et de rejoindre notre désir plus profond qui est là comme un don. Pour nous
aider à demeurer sans cesse en contact avec notre désir, St Jean Climaque a cette belle
définition du moine qu'on entend chaque année au martyrologe: « Est moine, celui qui garde
sa ferveur de tout refroidissement et, jusqu'à son passage, chaque jour, ajoute feu sur feu,
désir sur désir».
Ajouter désir sur désir. .. dans l'obéissance et le don de soi, non de façon superficielle
ou volontariste, peut trouver différentes applications. La seconde recommandation de Benoit
entendue ce matin, nous offre un moyen très simple et à portée de main: ne pas chercher son
avantage, mais plutôt celui d'autrui ... Dans la vie quotidienne, nombreuses sont les
possibilités de faire passer l'intérêt de l'autre avant le sien: lorsqu'un plat de fruit passe,
prendre le plus petit ou celui qui est un peu gâté; lorsqu'on rentre en voiture, veiller à ce que
la voiture ait de l'essence pour le suivant; ne pas faire de bruit dans les couloirs ou les
cellules; être ouvert quand un frère m'aborde pour me dire ou demander quelque chose, non
sur la défensive; lui donner de mon temps pour l'accueillir.. . Frères, cultivons cette ouverture
à nos frères, et notre désir d'aimer et d'être au Christ grandira en vérité. - 26.10.2017
4. ils « se préviendront d'honneurs mutuels » ;
5. ils supporteront sans aucune impatience leurs infirmités corporelles et morales ;;
Lire ensemble ces deux prescriptions de ce chapitre 72 : « ils se préviendront
d'honneurs mutuels» et « ils supporteront leurs infirmités », peut offrir bien des avantages.
L'avantage principal me semble être de redonner une dimension positive au fait de devoir se
supporter les uns les autres, ce qui nous apparait de prime abord difficile. En effet, nous le
redisons à souhait: la vie commune nous éprouve. Vivre ensemble avec des caractères
différents et avec des cultures nationales ou familiales propres est un défi permanent.Mais à
force de souligner la difficulté réelle, nous risquons d'entendre et de vivre comme un fardeau
cette recommandation de se supporter avec nos infirmités morales et physiques. « On ne peut
pas faire autrement, alors il faut bien faire avec ». « De toute façon, on ne peut pas y
échapper ». Ce genre de posture relève plus de la méthode « couet » ou d'une attitude stoïque,
que d'une dynamique vraiment chrétienne. C'est déjà pas mal, me direz-vous. Certes, et
parfois, on fait ce qu'on peut. .. !
C'est ici où la première recommandation peut nous être d'un précieux secours:« ils se
préviendront d'honneurs mutuels ». Elle donne un élan vraiment chrétien qui peut changer
mon regard et finalement mon attitude profonde vis-à-vis de chaque frère. Ce frère que je
peine à supporter est un frère digne d'être honoré. Il en est digne parce que très aimé de Dieu
et sauvé par le même Christ que moi. Avant que je pense ou que je fasse quoi que ce soit à
son sujet, il est un fils de Dieu aimé et béni. Me remettre dans ce regard de foi m'apprend à
regarder le trésor caché en lui, que ses défauts ou ses infirmités masquent à mes yeux. Ce
frère a du prix aux yeux de Dieu. Se peut-il qu'il ne soit à mes yeux qu'un fardeau à
supporter? Ou bien n'est-ce pas mon regard qui est trop court? Peut-être est-ce moi qui ai un
glaucome, cette maladie des yeux qui restreint le champ de vision ? Oui, notre difficulté à
supporter nos frères en leurs infirmités physiques et morales nous replace devant l'étroitesse
de notre regard... Etroitesse qui signe souvent l'étroitesse de notre cœur. L'invitation de St
Benoit à nous « honorer mutuellement» posée comme un préalable de foi, vient à notre
secours. Elle nous élargit le regard et le cœur. Mon frère n'est en aucun cas réductible à ses
limites. Accueillir mon frère toujours autre peut libérer en moi l'humour, la bienveillance ou
la compassion. Cette attitude de communion chassera tout relent de mépris ou de distance
hautaine. De juge distant, elle me fera devenir davantage frère humblement compatissant.
Demandons à l'Esprit Saint de faire son œuvre de communion en nous. - 25.10.2017
1. ÉCOUTE, ô mon fils, ces préceptes de ton maître et tends l'oreille de ton cœur. Cette instruction de ton père qui t'aime, reçois-la cordialement et mets-la en pratique effectivement.
« Le bon zèle» ... A l' entendre trop rapidement, on pourrait penser que cette
expression est synonyme de « bonne volonté» ... ou encore « d'avoir de bonnes intentions ». Il
y aurait ici un risque un peu angélique, et en même temps trompeur, de penser que parce que
je désire faire bien les choses, je suis animé du bon zèle dont parle ici St Benoit ... La vie
monastique n'a pas à voir avec cet angélisme où il suffirait d'avoir de grands désirs pour se
convaincre d'être moine. St Benoit affirme du bon zèle « qu'il sépare des viceset conduit à
Dieu» et plus loin « que les moines le pratiqueront avec un ardent amour» ... Dans le bon
zèle, il y a quelque chose de ferme, de l'ordre d'un combat sévère contre les vices, ces
tendances au mal qui nous salissent et nous vicient; dans le bon zèle, il y a aussi quelque
chose de l'ordre du feu, d'un « ardent amour », non de soi mais de Dieu et des autres, comme
la suite du chapitre l'enseignera.
Le bon zèle qui sépare des vices ... , cette expression rappelle la conclusion du chapitre
sur l'humilité:« cet état (celui de l'amour sans crainte) daigne le Seigneur le faire
apparaitre par le St Esprit dans son ouvrier purifié de ses vices et de ses péchés» ... Le bon
zèle a à voir avec la quête de l'humilité. L'un et l'autre contribuent à nous purifier de nos
vices. Le bon zèle et l'humilité sont un don de l'Esprit Saint qui vient ouvrir en nous de
nouvelles voies de vie et de liberté. Le bon zèle dit l'élan. L'humilité dit la prise au sérieux de
notre humanité avec ses ombres et ses tendances égoïstes. Notre humanité accueillie avec
douceur, mais aussi considérée en vérité, ne demande qu'à retrouver l'élan du don et de
l'amour.Cela requiert de la patience, de la simplicité pour parler en vérité de soi, et du
courage pour affronter une à une les difficultés.
Feu ardent de l'amour, le bon zèle vient réchauffer nos froideurs et tous nos replis sur
nous-mêmes, afin de nous tourner plus résolumentvers les autres. Le bon zèle nous entraine à
ne pas calculer, et nos efforts et notre don. Il ne fait pas de sélection entre les frères, tous
méritent notre générosité. Il nous aide à aller plus loin que nos peurs ou nos répulsions face à
telle situation difficile ou rebutante. Avec f. Jean Pascal qui va renouveler ses vœux
maintenant, laissons-nous saisir par le l'Esprit Saint, source du bon zèle en nous. - 24.10.2017