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70. Et vénérer les anciens,
71. aimer les jeunes.
« Vénérer les anciens» .... Dans notre contexte social actuel, cet instrument a une vraie
pertinence. Comme un monastère n'est pas une ile hors de ce monde, les questions que porte
notre société contemporaine sont aussi les nôtres. Les anciens appartiennent à une catégorie
de personnes davantage en souffrance. En raison de l'allongement de la durée de vie, ils
peuvent être marginalisés, supportés mais peu aimés.
Dans notre communauté, comment entendre ce «vénérer les anciens» ? Je crois qu'il
s'agit avant tout d'une manière de les regarder.Allons-nous les regarder à l'échelle de
l'efficacité et de la rapidité ou bien à l'échelle de la présence fidèle et persévérante? Si la
mesure de notre estimation est l'efficacité et la rapidité, la lenteur et les handicaps des anciens
sont un obstacle qu'il faut à tout prix éviter, au mieux contourner ... Ils ralentissent le soi-
disant « vrai» rythme de nos journées bien remplies. Si l'échelle de notre regard est la prise
en compte de leur présence fidèle, donnée à la mesure de forces qui diminuent, nous entrons
alors dans un autre type de relation, et d'abord de relation à nous-mêmes. En effet au contact
de nos frères anciens, nous apprenons une autre dimension de notre propre vie: celle de la
vérité et de la profondeur des choses simples. Ces choses auxquelles on ne fait plus attention
parce que l'on court. Au contact de nos frères anciens, apparait aussi fortement que le plus
important n'est pas le service rendu, mais la manière avec lequel nous le rendons. Sert-on le
repas parce qu'il faut le servir, ou bien prenons-nous le temps de nous intéresser au frère par
une question, un geste délicat ... Il est vrai que nous avons beaucoup de choses à faire, mais
n'avons-nous pas à progresser? J'entends parfois une certaine souffrance d'un manque de
considération. Nos frères anciens se sentent mis à l'écart ou regardés de haut, pas vraiment
comme des frères. En fait ces frères qui n'ont plus peu à peu que leur présence à nous offrir,
nous interpellent sur la qualité de la présence que nous leur rendons. Ils ne peuvent plus briller
par ce qu'ils font. Ils sont là simplement.Et nous, où sommes-nous? Acceptons-nous d'être
là avec eux, sans courir ou penser à ce qu'on va faire ensuite. Oui, nos frères anciens nous
offrent ce magnifique cadeaude nous aider à être comme eux, simplement dans le moment
présent. Au contact de nos anciens, avec f. Ambroise, acceptons leur présence comme un
cadeau. Elle vient susciter notre propre qualité de présence fraternelle et délicate. Sans nous
en rendre compte, nos frères anciens nous rendent à nous-mêmes, si nous y consentons. - 14.04.2018 -
66. ne pas avoir de jalousie,
67. ne pas agir par envie,
68. ne pas aimer la contestation,
69. fuir l'élèvement.
En entendant ces quatre instruments, je pense aux tentations du peuple d'Israël dans le
désert, principalement dans les récits de Nb Il et Nb 12. Tout d'abord, à propos de « ne pas
agir par envie, ne pas aimer la contestation ». Le récit de Nb Il met bien en évidence le lien
entre l'envie et la contestation. Le peuple d'Israël, fatigué de manger de la manne, réclame de
la viande. Le murmure gronde à la mesure de l'envie. Le peuple préfère les poissons de
l'esclavage d'Egypte à la frugalité de sa liberté dans le désert. « Qui nous donnera de la
viande à manger ? .... Maintenant nous dépérissons, privés de tout; nos yeux ne voient plus
que de la manne» (Nb Il, 5-7) Dans sa grande mansuétude, Dieu répond favorablement au
peuple, mais il abandonne le peuple à son envie, qui va le conduire au dégoût, et certains à la
mort. « Le Seigneur vous donnera de la viande à manger. Vous n'en mangerez pas un jour
seulement, ou deux ou cinq ou dix ou vingt, mais bien tout un mois, ;usqu'à ce qu'elle vous
sorte par les narines et vous soit en dégoût, puisque vous avez rejeté le Seigneur qui est au
milieu de vous et que vous avez pleuré devant lui en disant: Pourquoi donc être sortis
d'Egypte ? » (Nb Il, 18-20) Et un peu plus loin. « La viande était encore entre leurs dents,
elle n'était pas encore mâchée, que la colère du Seigneur s'enflamma contre le peuple. Le
Seigneur lefrappa d'une très grande plaie. On donna à ce lieu le nom de Qibrot-ha-Taava,
car c'est là qu'on enterra les gens qui s'étaient abandonnés à leur fringale»(Nb Il,33-34).
Le murmure était alimenté par l'envie, et l'envie vécue en dehors de la confiance dans le
Seigneur a été source de mort. Des membres du peuple sont morts pour s'être laissés guider
par leur envie, et non par leur foi dans le Seigneur au milieu d'eux. Envie et murmure sont
l'expression de notre manque de foi dans le Seigneur qui prend soin de nous.
Le second récit de Nb 12 éclaire l'autre couple jalousie-élèvement.Myriam et Aaron,
sœur et frère de Moïse contestent que ce dernier ait pris une femme kushite. Ils remettent en
cause l'autorité de Moïse. « Le Seigneur ne parlerait-il donc qu'à Moïse? N'a-t-il pas parlé à
nous aussi? » (Nb 12,2) Mû par un certain élèvement mêlé de jalousie, ils ne voient pas que
« Moïse était un homme très humble, le plus humble que la terre ait porté» poursuit le texte
(Nb 12,3). Myriam connait alors l'épreuve de la lèpre qui entraine sa mise en quarantaine.
Cette épreuve peut faire comprendre combien l'élèvement défigure et la jalousie isole alors
que 1 'humilité embellit et tisse la communion. Moïse ne se laisse pas démonter par cette
opposition fraternelle. Humblement, il intercède pour sa sœur et sort grandi de cette épreuve. - 13.04.2018 -
65. ne haïr personne,
«Ne haïr personne » ... Dans les évangiles, Jésus retourne le précepte qui permettait
de haïr ses ennemis: « Eh bien moi je vous dis: aimez vos ennemis, et priez pour ceux qui
vous persécutent afin d'être vraiment les fils de votre Père qui est aux cieux; car il fait lever
son soleil sur les méchants et sur les bons ... » (Mt 5, 44-45.). Entre les humains, depuis Jésus,
il n'est plus possible à quiconque se dit être son disciple d'avoir de la haine pour une autre
personne. St Jean, dans son épitre, a développé une doctrine très cohérente à ce sujet:« Celui
qui déclare être dans la lumière et qui a de la haine contre son frère est dans les ténèbres
jusqu'à maintenant ... il marche dans les ténèbres sans savoir où il va parce que les ténèbres
ont aveuglé ses yeux» (1 Jn 2,9, Il) «Nous, nous savons que nous sommes passés de la mort
à la vie parce que nous aimons nos frères. Celui qui n'aime pas demeure dans la mort.
Quiconque a de la haine contre son frère est un meurtrier, et vous savez que pas un meurtrier
n'a la vie éternelle demeurant en lui. » (1 Jn 3, 14-15) Et enfin : «Si quelqu'un dit: 'J'aime
Dieu', alors qu'il a de la haine contre son frère, c'est un menteur. En effet, celui qui n'aime
pas son frère, qu'il voit, est incapable d'aimer Dieu qu'il ne voit pas.»(1 Jn 4,20) Ces textes
de Jean sont éclairants. Ils nous montrent qu'avoir de la haine ou ne pas en avoir, n'est pas un
problème moral, au sens de « il faut ou il ne faut pas faire », ou au sens de « c'est bien ou ce
n'est pas bien». Non, cela touche plus profondément à l'enracinement de la vie nouvelle en
nous. La vraie question que nous pouvons entendre devient alors: sommes-nous vraiment
passés de la mort à la vie avec le Christ pour ne plus donner prise à la haine ou au refus de
l'autre en notre cœur? Sommes-nous vraiment habités par la lumière du Christ qui seule
change notre regard et notre cœur sur les autres? Si la liturgie nous fait célébrer d'année en
année le temps pascal n'est-ce pas pour permettre aux parties ombreuses de notre cœur d'être
habitées par la lumière du Christ? N'est-ce pas pour apprendre à regarder nos frères de
manière nouvelle, en laissant la douceur du Christ désarmer nos cœurs ? Oui, depuis notre
baptême, nous sommes dans le camp de la Vie et de la Lumière du Christ Vivant.Dès lors
l'instrument que nous laisse Benoit sonne comme une invitation à prendre toute notre mesure
d'enfant de lumière et de vie. La Vie du Christ nous est offerte en abondance. Plus nous nous
ouvrons à elle dans la liturgie, la lectio, l'eucharistie, plus elle nous transforme. Alléluia. - 12.04.2018 -
64. aimer la chasteté,
« Aimer la chasteté ». Voilà un petit instrument dérangeant, comme un autre
instrument déjà rencontré « aimer le jeûne» (4, 13). Mais à travers ces deux instruments,
Benoit ne nous donne-t-il pas une précieuse indication sur la profondeur de notre désir? Notre
désir le plus profond est-il d'aimer assouvir à tout prix nos pulsions de manger, ainsi que nos
pulsions sexuelles ou nos besoins affectifs? Ou bien au contraire, notre désir le plus profond
n'est-il pas d'aimer le jeûne et à travers lui d'apprécier notre capacité à nous maitriser, ou
encore d'aimer la chasteté et de goûter la joie de la continence ainsi que la joie de relations
libérantes? Oui notre désir n'est pas condamné à être toujours dupe de lui-même. De faux
désirs peuvent nous entrainer dans leurs illusions de jouissance, je pense à la masturbation ou
la complaisance dans des images pornographiques ou encore à des relations fantasmées, par
exemple. Mais notre désir le plus profond a soif d'autre chose ... Soif de justesse dans la
relation à soi-même, soif de liberté respectueuse dans la relation à autrui. Quand St Benoit
nous exhorte à aimer la chasteté, il nous engage à écouter et à rejoindre ce désir le plus
profond en nous. Comment l'écouter? En sachant relire et regarder en face quand nous
sommes entrainés parfois dans des impasses. Ecouter alors combien ces impasses
appesantissent le cœur et le laissent vide. Regarder en face ces moments de trouble, c'est
aussi pouvoir en parler, et apprendre ainsi à mieux nous connaitre dans nos forces et nos
faiblesses. Comment encore rejoindre notre désir profond? En demeurant vigilants dans nos
relations, afm de ne pas induire quelque chose de trouble par des gestes aux intentions
douteuses, ou par des regards ou des paroles qui attirent à soi. Etre chaste dans nos relations
entre frères ainsi qu'avec tout homme et toute femme rencontrés, est un perpétuel exercice
d'ajustement de soi à l'autre afin de le respecter. Oui, en notre désir le plus profond, nous
souhaitons vivre des relations où chacun est vraiment libre, c'est-à-dire où chacun est
vraiment lui-même dans sa vocation ... dans notre vocation monastique lorsque nous sommes
entre frères, dans nos vocations mutuelles lorsque nous sommes avec d'autres personnes
laïques ou consacrées. Aimer la chasteté, c'est choisir résolument avec détermination mais
aussi avec joie d'être vigilant en ce domaine toujours subtil de notre affectivité et de notre
sexualité, domaine si beau, et si souvent dans l'illusion des pensées ou des imaginations.
Demandons avec force cette grâce de vigilance que le Christ veut nous offrir en même temps
qu'Il nous appelle à lui donner tout notre amour. - 10.04.2018 -
62. Ne pas vouloir être appelé saint avant de l'être, mais l'être d'abord, afin d'être appelé ainsi avec plus de vérité.
63. Accomplir chaque jour par ses actes les commandements de Dieu,
Qu'est-ce qu'être saint? St Benoit, qui met en garde contre de possibles illusions, ne
le dit pas. Dans la parole du Lévitique: « Soyez saints.car moi, le Seigneur votre Dieu, je suis
saint» (Lv 19,2), on entend le désir de notre Dieu de nous voir partager sa propre sainteté.
Lui seul est saint. Mais Dieu ne craint pas, et même désire que nous vivions de sa sainteté.
S'il se fait une haute idée de ce que nous pouvons ainsi devenir, plus que nous ne l'imaginons
nous-même, n'est-ce pas parce que lui-même veut nous donner la sainteté. Celle-ci n'est pas à
notre portée. Elle est un don. En ces jours où nous fêtons la résurrection de Jésus, n'est-ce pas
cette sainteté que nous accueillons avec le don surabondant de vie qu'il nous offre. Hier
matin, dans l' épitre aux Romains, nous entendions: « Maintenant que vous avez été libérés du
péché et que vous êtes devenus les esclaves de Dieu, vous récoltez ce qui mène à la sainteté,
et cela aboutit à la vie éternelle. » (Rm 6, 22) La résurrection de Jésus nous libère de
l'emprise de la mort et du péché. Elle nous donne en partage la sainteté de Dieu en nous
conformant à Jésus, le Fils et en nous donnant l'Esprit Saint. N'est-ce pas là le cœur de la
sainteté à laquelle nous sommes promis: vivre de la vie même de la Ste Trinité? Disant cela,
est-ce que je ne risque pas d'en rester à un niveau théologique trop théorique? En fait j'ai
l'impression que dire cela rejoint ce que je disais jeudi matin à propos d'Ezalen. Nous
prenons conscience de nos difficultés de dialoguer et de collaborer pour avancer ensemble.
Pourquoi cela? N'est-ce pas parce que chacun reste trop prisonnier de ses points de vue, ou
de ses peurs? Nous sommes encore trop centrés sur nous-mêmes, incapables de mesurer que
ce que l'autre vit et dit est une richesse qui m'est offerte. Nous sommes encore loin de la
sainteté du Dieu Trinité: en Lui, nous croyons que chaque Personne vit toute tournée vers
l'autre, le Père vers le Fils, le Fils vers le Père, et l'Esprit étant lui-même élan qui unit le Père
et le Fils. L'hymne que nous avons le dimanche soir en T.O le dit très bien, notamment quand
à propos du Fils et de l'Esprit, il est dit: « tout son désir. en s'oubliant c'est d'être
seulement ...» Oui, la clé de la sainteté en Dieu n'est-elle pas là : dans le désir de s'oublier
pour l'autre. La vie divine ne peut se communiquer ad intra et ad extra qu'à ce prix-là. Il en va
de même pour nous: unis au Christ désormais, la sainteté se vit en un double mouvement:
nous oublier pour être totalement uni au Christ en vivant pleinement de son Esprit, et nous
oublier pour nous ouvrir totalement aux autres en nous décentrant de nous-mêmes. Notre Père
désire cette sainteté-là pour nous, sa sainteté. Que son Esprit nous prenne dans son élan. - 07.04.2018 -
59. Ne pas assouvir les désirs de la chair,
60. haïr sa volonté propre,
61. obéir en tout aux commandements de l'abbé, même s'il agit lui-même autrement – ce qu'à Dieu ne plaise – en se souvenant du commandement du Seigneur : « Ce qu'ils disent, faites-le ; quant à ce qu'ils font, ne le faites pas. »
62. Ne pas vouloir être appelé saint avant de l'être, mais l'être d'abord, afin d'être appelé ainsi avec plus de vérité.
La succession de ces trois instruments est porteuse de sens. Aux deux premiers
instruments qui se présentent sous une forme négative: ne pas assouvir les désirs de la chair,
haïr sa volonté propre, succède un instrument plus positive: obéir en tout aux
commandements de l'abbé. Si les deux premiers renvoient chacun à une vigilance intérieure,
le dernier offre une objectivité dans la relation à l'abbé, qui ouvre sur une possible résolution
de la difficulté. En effet, on peut entendre, et nous en faisons tous l'expérience, qu'il existe
souvent en nous un conflit interne. La poussée de désirs plus ou moins désordonnés, ainsi que
le besoin d'affirmer sa volonté coûte que coûte peuvent nous faire vivre des tensions
intérieures dont nous n'avons pas toujours conscience. Sans bien savoir comment, nous
sommes emmenés par ces désirs ou par cette volonté d'affirmation de soi. Si ceux-ci prennent
de plus en plus de place, la tension se manifeste par de la fatigue, du stress ou de l'impatience,
des paroles injustes. Il est important de prendre la mesure de ces mouvements intérieurs. En
parler alors qu'on ne voit pas clair est salutaire pour mieux les appréhender. Peu à peu entrer
dans une meilleure connaissance de soi, permet de mieux comprendre comment fonctionnent
ces désirs désordonnés: qu'est ce qui les réveille, qu'est-ce qui les fait se dissiper, qu'est ce
qui les alimente ... Contrairement à ce que le mot « charnel» suggère, ces désirs n'ont pas
leur source dans notre corps, mais bien dans notre cœur, comme du reste la volonté propre ...
Tirée de Ga 5,16, I'expression « ne pas assouvir les désirs charnels» vise en positif, à
développer la docilité à l'Esprit qui est le guide sûr. Si les désirs charnels vont nous conduire
à des déchirements, à des divisions internes et externes (disputes, débauche, dissensions,
envie), la docilité à l'Esprit produira la charité, la joie, la paix, la patience etc ... Notre cœur
va-t-il être docile à l'Esprit ou non? Une vraie écoute nous est proposée qui est bien plus
profonde que l'écoute des désirs spontanés ou de la volonté propre qui nous laissent à la
surface de nous-mêmes et des images tronquées de notre personnalité. Comment grandir dans
cette écoute qui est en même temps discernement? La pédagogie monastique, par
l'obéissance nous offre un rempart contre notre propension à nous illusionner sur nous-
mêmes, soit pour nous survaloriser, soit pour nous dévaloriser. Obéir, faire ce qui est
demandé sans discuter indéfiniment nous oblige à aller chercher plus profondément d'autres
ressources: la ressource de la foi et de la confiance dans le Seigneur à qui on a donné notre
vie. Il nous guide avec sûreté car il nous connait mieux que nous-mêmes. - 17.03.2018
57. confesser chaque jour à Dieu dans la prière, avec larmes et gémissements, ses fautes passées,
58. se corriger de ces fautes à l'avenir.
Parlant de confession des péchés, j'aimerai considérer quelques instruments actuels
qui sont à notre disposition pour grandir dans notre chemin d'amitié avec le Seigneur ... Je
pense à la confession individuelle et à la célébration de la réconciliation que nous aurons
prochainement. Voilà deux instruments exigeants, et en même temps deux instruments
libérant.Exigeant: il n'est pas facile de nous tenir pécheur devant Dieu, représenté par un
ministre de sa Parole. Libérant car l'humilité libère notre être véritable de ses masques
inutiles.
Oui ce sacrement est le sacrement de la liberté. V écu personnellement ou
communautairement, il fait résonner à nos oreilles la Bonne Nouvelle de la libération que le
Seigneur Jésus est venu apporter. Tout y est grâce: la grâce de pouvoir me tenir en vérité
devant notre Père des Cieux, la grâce d'être encouragé par la Parole de Dieu et la parole
humaine qui lui fait écho, la grâce enfin de cette parole rituelle qui m'assure du pardon offert.
C'est je crois, une forme de tentation que de penser: «je suis pécheur, j'en demande pardon à
Dieu dans ma prière, pas besoin de passer par un intermédiaire ... c'est une affaire entre Dieu
et moi ». Le Seigneur Jésus, venu dans notre chair, a redonné tout son poids à la parole
humaine, aux mots que nous pouvons dire et entendre. La Parole vient libérer en nous l'être
pécheur de deux facons. En disant notre péché, nous sommes libérés de la prétention à exister
par nous-mêmes. Nous sortons d'une certaine suffisance en acceptons notre fragilité foncière
devant notre Père. Même si l'on n'a pas commis de grosses fautes, objectivement
quantifiables, nous apprenons à reconnaitre notre incapacité radicale à rester orienté vers
Dieu, et donné aux autres. Notre péché est là comme une tendance à nous centrer sur nous-
mêmes. Le reconnaitre avec nos lèvres ... c'est entrer dans la conversion, dans ce
retournement qui nous détourne de nous-mêmes ... La Parole nous libère enfm quand nos
oreilles entendent « je te pardonne tous tes péchés». Elles ont besoin de l'entendre par la voix
d'un tiers. Cette objectivité me sort de la possible illusion de croire que le pardon offert n'est
que la production de mon imagination ou d'une autosuggestion. Il est affirmé et confié à mon
acte de foi par un frère qui parle au nom du Père. Oui, sachons utiliser ce précieux instrument
spirituel qu'est le sacrement de la réconciliation lors des Célébrations communautaires, mais
aussi de façon plus personnelle. - 15.03.2018
« Ecouter, se prosterner, prier. .. volontiers, fréquemment»
Comment ne pas se fatiguer de lire les Ecritures, comment ne pas se lasser de prier?
Comment demeurer volontiers à l'écoute? Ce n'est pas facile tous les jours. Il y a des jours
avec et des jours sans. La répétition peut user.Elle peut aussi entrainer à ne pas s'arrêter trop
vite. Pour la plupart d'entre nous quand nous étions enfants, si nos parents nous avaient
écoutés quand nous disions notre ras le bol de l'école, nous serions les premiers à le regretter
aujourd'hui ... Dans la vie monastique, la régularité vient nourrir et creuser en nous le désir de
l'écoute de la Parole ainsi que le goût de la prière. Lorsqu'on arrive au noviciat, la ferveur
semble rendre tout plus aisé. Mais l'âge venant, il nous faut prendre appui sur la régularité. Ne
la lâchons pas. Car plus on se tient à elle, plus on a des chances de progresser dans la relation
avec Celui qui nous cherche le premier. La régularité, mais aussi l'intelligence pour varier les
manières de prier ou de lire les Ecritures seront des aides précieuses pour avancer. En effet,
dans la familiarité avec les Ecritures, comme dans la prière, nous sommes destinés à grandir.
Grandir dans une certaine connaissance. Mais plus encore grandir dans la disponibilité à
l'œuvre de Dieu dans nos vies. Mystérieusement lire les Ecritures avec assiduité tous les
jours, les écouter dans la liturgie, prier requiert de notre part un vrai travail. Mais en fait, c'est
Dieu qui vient nous travailler de l'intérieur. Oui, par notre régularité qui ne relâche rien, par
notre fidélité à la prière, nous nous offrons à l'oeuvre de notre Père des Cieux.
Reconnaissons-le, il y a souvent en nous une carapace qui nous rend dur d'oreille et de cœur.
Pour nous en rendre compte, il suffit d'être un peu lucide sur nos manières de regarder nos
frères, ou sur nos difficultés à les accueillir. .. S'il en est ainsi avec nos frères, peut-il en être
autrement avec Dieu ... C'est avec le même cœur que nous cherchons à aimer, et les frères et
Dieu. Oui, utilisons les difficultés fraternelles de la vie quotidienne pour ouvrir les yeux sur la
distance qui nous sépare de notre Dieu. Et à l'inverse, tenons avec fermeté notre engagement
dans la prière et la lectio divina. Là, Dieu qui travaille notre cœur pour le rendre plus souple
au son de sa voix, le rendra plus aimant vis-à-vis de nos frères. Il n'y qu'un atelier pour
apprendre à aimer: c'est l'atelier de notre cœur.Dieu y œuvre d'autant plus facilement que
nous le lui ouvrons en lui donnant notre temps et notre bonne volonté. - 13.03.2018
51. Garder sa bouche des paroles mauvaises et déshonnêtes,
52. ne pas aimer à beaucoup parler ;
53. ne pas dire des paroles vaines ou qui portent à rire,
54. ne pas aimer le rire prolongé ou aux éclats.
Nous aimons dire volontiers, que notre religion chrétienne est la religion du Verbe, de
la Parole, du Verbe fait chair. Le Verbe de Dieu, le Fils du Père, a consenti à apprendre de
Marie sa mère, nos mots humains, comme s'en émerveillait si bien notre P. Angelico. Pour
accomplir l'AT, Jésus est venu nous parler de la part du Père. Il a voulu nous faire entendre
combien nous sommes aimés de Lui, et combien notre Père des Cieux désire nouer une
relation toujours plus profonde avec son peuple, avec chacun d'entre nous. N'est-ce pas
seulement à la lumière de ce grand projet divin que nous pouvons entendre les instruments
proposés à notre écoute aujourd'hui: « garder sa bouche des paroles mauvaises, ne pas aimer
à beaucoup parler, ou dire des paroles vaines ou qui portent à rire ... ? Moines, disciples du
Verbe fait chair, nous avons choisi d'être davantage à l'écoute de la Parole. Nous taire,
savoir-faire silence est une voie essentielle pour entrer dans cette écoute. Mais nous sommes
aussi porteurs de cette Parole ... Comme le disait déjà le Deutéronome: « La parole est tout
près de toi, elle est dans ta bouche et dans ton cœur pour que tu la mettes en pratique» (Dt
30,14). Désormais, l'écoute de la Parole passe aussi à travers ce qui sort de notre bouche,
comme de celle de tous disciples nos frères. Disciple du Verbe fait chair, de notre bouche
peut-il sortir le mauvais et le bon? Peut-il sortir le mépris et l'amour? La dérision et le
respect? Malheureusement oui parfois. Les instruments de ce jour veulent nous aider à lutter.
« Mets une garde à mes lèvres Seigneur.veille au seuil de ma bouche. Ne laisse pas mon
cœur pencher vers le mal» demanderons-nous ce soir avec le Ps 140. Veiller à nos paroles,
c'est inséparablement veiller sur notre cœur et tout ce qu'il peut ruminer. Les moines que
nous sommes voudraient grandir dans la qualité de ce silence intérieur, pour mieux être
capable d'une parole vraie, d'une parole bienfaisante jusque dans les situations difficiles. Pour
nous entrainer à cette vigilance, prenons soin de notre cadre de silence. Sachons préserver les
temps et les espaces de silence, les couloirs, le cloitre, le secteur de la plonge en
particulier. .. Durant le travail, sachons aussi préserver le silence. Un silence à plusieurs, qui
n'a rien à voir avec le mutisme est un soutien précieux pour grandir dans le silence intérieur.
Fuyons le bavardage qui disperse et qui peut vite devenir médisance ou racontars stériles.
Ensemble nous pouvons nous entraider dans la qualité de ce recueillement, c'est aussi une des
grâces de notre vie commune. - 10.03.2018
50. Quand des pensées mauvaises se présentent au cœur, les briser aussitôt contre le Christ et les découvrir à l'ancien spirituel.
« Quand des pensées mauvaises se présentent au cœur, les briser aussitôt contre le
Christ et les découvrir à l'ancien spirituel » ... Quel mystérieux être que nous sommes ?! En
effet, nous sommes traversés par un flot incessant de pensées. A l'image du Trinquelin qui
passe sous nos pieds et qui charrie tantôt des eaux tranquilles, tantôt des eaux tumultueuses,
nous sommes habités tantôt par des pensées paisibles, tantôt par des pensées qui grondent en
ne nous laissant aucun repos. Plus nous nous connaissons nous-mêmes, plus nous pouvons
repérer combien les pensées qui nous traversent ne sont pas toujours neutres. Elles nous disent
quelque chose sur nous-mêmes dans la situation présente que nous vivons sous le regard de
Dieu. Evagre distingue trois types de pensées: les pensées neutres, les pensées bonnes et les
pensées mauvaises. Les pensées neutres sont le fruit de l'activité de notre esprit qui ne cesse
de penser pour s'adapter à la réalité. Les pensées bonnes, inspirées par l'Esprit Saint nous
suggèrent telle action ou telle parole en vue de notre bien qui est de servir Dieu et notre
prochain. Les mauvaises pensées viennent de l'Adversaire qui tend à nous opposer à Dieu et
aux autres. Comment discerner entre toutes ces pensées? Comment repérer d'où elles
viennent et où elles nous mènent? Apprendre ce discernement est le véritable but de
l'ouverture du cœur que nous recommande aujourd'hui st Benoit. .. Dans un premier temps,
nous savons qu'il y a un réel bienfait à dire les pensées troubles, celles qui nous encombrent
et nous tirent vers le bas. Nommer ces pensées, essayer de comprendre pourquoi elles
reviennent souvent, ou au contraire très épisodiquement. Mesurer qu'elles trouvent peut-être
dans tel trait de ma personnalité ou de mon histoire un terreau favorable pour se développer. Il
y a en moi telle faiblesse qui prête le flanc à leur incursion ... Repérer mes lieux de fragilités
peut m'aider à être plus vigilant afin de ne pas les laisser m'entrainer là oùje ne voudrais pas
aller. Certaines situations sont plus périlleuses pour moi. « Il ne faut pas tenter le diable» dit
la sagesse populaire. Mais l'ouverture du cœur veut nous entrainer plus loin, dans le
discernement de l'œuvre de l'Esprit Saint en nos vies. Comment Celui-ci me conduit dans la
foi en Dieu, présent à mes côtés dans le combat de chaque jour? Comment l'Esprit Saint
m'enseigne et me guide à travers la Parole largement semée dans la liturgie et la lectio?
Quelles forces nouvelles me donnent-ils, quels points d'appui? Quels appels à mieux faire la
volonté de Dieu, je perçois à travers ces mouvements? Oui, frères, faisons ce travail intérieur
lorsque nous ouvrons notre cœur. Il est source de lumière et force sur le chemin, de stabilité
aussi pour être moins ballottés à tout vent de pensées. - 28.02.2018