vendredi 15 août 2025 : fête de l’Assomption, horaire des dimanches (vigiles la veille à 20h45, messe à 10h) + concert à 16h.

Nota : L’office de None (14h45) sera prié au dolmen de ND de la Pierre-qui-Vire.

Commentaires sur la Règle



Voir le commentaire de Père Abbé Luc / Chapitre 15 v 01-04 En quel temps on dira alléluia écrit le 03 juin 2021
Verset(s) :

1. De la sainte Pâque jusqu'à la Pentecôte, on dira alleluia sans interruption, aussi bien dans les psaumes que dans les répons ;

2. de la Pentecôte au début du carême, toutes les nuits, on le dira seulement aux nocturnes avec les six derniers psaumes.

3. Mais tous les dimanches, sauf en carême, les cantiques, les matines, prime, tierce, sexte et none seront dits avec alleluia, mais vêpres avec antienne.

4. Mais les répons ne seront jamais dits avec alleluia, si ce n'est de Pâques à la Pentecôte.

Commentaire :

La liturgie nous apprend année après année à utiliser les mots justes ou encore les attitudes justes dans le temps qui est juste. L'usage du mot Alleluia en est un exemple des plus frappants. Totalement absent en Carême, il abonde au Temps Pascal. Il est utilisé plus modérément en temps ordinaire, sauf le dimanche où il est plus présent. La position à genoux est normalement exclue en temps pascal, alors qu'elle est recommandée au Carême, en signe de pénitence. Les mots attente, désir ou l'invocation « viens » rythment le temps de l'avent, de même l'appel à la conversion le temps du carême. Ainsi la liturgie nous éduque+elle à unir notre tempo personnel à celui de toute l'Eglise qui chemine d'année en année à la rencontre de son Seigneur. Le cycle des temps liturgiques fait entrer plus profondément dans le mystère du Christ, Sauveur de l'humanité. En Eglise, nous découvrons son Visage de grâce et nous accueillons sa puissance de vie à l'œuvre depuis Pâques et la Pentecôte. Il y a pour chacun de nous une forme d'obéissance à vivre à l'égard de la liturgie. Elle nous précède, nous enseigne et nous guide à travers ces différents usages.

Et nous touchons ici un paradoxe qu'il n'est pas toujours aisé de vivre. La liturgie nous entraine à épouser une certaine vision de la réalité reconnue dans la foi, alors que nous personnellement nous pouvons vivre des émotions ou des évènements très différents. Pour simplifier, la liturgie nous invite à revêtir le blanc et la ioie du temps pascal, alors qu' intérieurement nous souffrons et nous peinons, nous reconnaissant peut-être davantage dans la couleur du carême. Nous pouvons vivre alors une sorte de division intérieure. Comment ne pas subir cette situation? Je vois deux choses. La première me semble être de cultiver l'esprit de foi qui élargit sans cesse le regard, là où nos pesanteurs personnelles risquent toujours de réduire la vie du monde à nos seuls problèmes. La seconde sera au contraire d'apprendre dans la prière personnelle, à parler en vérité au Seigneur de ce qui nous habite et nous fait souffrir. Car lorsque que nous peinons, il y a un réel risque de vivre un monologue, replié sur nous­ mêmes, tournant en boucle nos problèmes. Comment casser ce cercle vicieux autocentré ? En transformant le monologue en dialogue avec le Seigneur. Oui, apprenons à sortir de nous-même, pour parler avec lui de ce qui nous habite. Demandons-lui la lumière, la paix, le discernement. Si les problèmes ne changeront pas d'un seul coup, notre manière de les aborder, elle, va souvent permettre d'ouvrir de nouveaux chemins.

Voir le commentaire de Père Abbé Luc / Chapitre 14 v 01-02 Aux anniversaires des saints comment célébrer les vigiles? écrit le 02 juin 2021
Verset(s) :

1. Cependant aux fêtes des saints et à toutes les solennités, on célébrera comme nous avons dit de célébrer le dimanche,

2. excepté qu'on dira les psaumes ou antiennes et leçons qui se rapportent à ce jour. Mais on gardera la mesure indiquée plus haut.

Commentaire :

Pour résumer ce chapitre, on pourrait dire que, pour Benoit, les fêtes et solennités ne bousculent pas la cadre de l'office, même s'il y a un choix des psaumes et des antiennes propre. Se dégage ainsi une forte impression de constance dans notre office, une grande régularité de fond. C'est une force pour notre fidélité dans la prière. En même temps, les mémoires des saints, les fêtes et les solennités font intervenir de la variété. Ces célébrations mettent du relief dans la célébration de l'unique mystère du Christ. Des figures humaines ressortent avec plus ou moins d'éclat (St Justin hier, Ste Blandine aujourd'hui, St Boniface bientôt...) A travers elles, nous touchons du doigt combien le Christ qui s'est incarné une seule fois, ne cesse d'être présent dans des vies humaines bien concrètes. Ces femmes et ces hommes qui ont été fidèles totalement dans le martyr de sang comme dans le martyr de charité pour les autres, manifestent la puissance du Christ ressuscité qui est à l'œuvre. Ils sont les « vivantes icônes où son mystère est apparu sur nos chemins ...heureux femmes et hommes qui ont su refléter pour leurs frères la lumière du Christ» (Hymne:« Heureux celui que ton visage a fasciné») ... Les Saints sont saints, non pas tant parce qu'ils seraient sans défaut, comme le soulignait C. Salenson, mais certainement parce qu'ils se sont offerts totalement à l'œuvre du Christ en eux. En quelque sorte, ils sont tellement devenus transparents à sa grâce, qu'ils reflètent le visage de leur Seigneur. Faire mémoire d'eux dans la liturgie, c'est dire merci à Dieu de susciter ces personnes dans notre pâte humaine. Car elles deviennent comme des ferments pour toute l'humanité. Le bien est contagieux, bien plus profondément que le mal qui semble en apparence le gagner de vitesse. Célébrer la mémoire des saints, c'est raviver en nous le sens du Royaume qui vient. Ils nous précèdent dans la gloire de Dieu. A la fois, leur vie terrestre fait ressortir les vraies valeurs du Royaume qui ne trompent pas et qui sont porteuses de vie, fusse au prix d'une mort réelle. Et à la fois, la communion vécue avec eux dans la prière, nourrit notre Espérance. La liturgie met tout cela en lumière, au gré des hymnes, des oraisons ou des préfaces qui, souvent par un seul mot ou une phrase, savent saisir un aspect saillant de la personnalité fêtée. La sobriété heureuse de notre liturgie latine nous invite à redoubler d'attention pour ne pas passer à côté de ces nuances propres à chaque fête de saint. Je voudrais inviter les frères hebdomadiers à y être eux-mêmes attentifs pour aider toute la communauté à être à l'écoute. Par exemple, il est dommage lorsqu'aucune mention n'est faite du saint fêté... En contemplant ce que le Seigneur

a fait pour eux, il nous faut apprendre à les recevoir dans nos vies comme des frères et sœurs proches de nous qui poursuivons notre pèlerinage.

Voir le commentaire de Père Abbé Luc / Chapitre 13 v 12-14 Aux jours ordinaires comment célébrer les matines ? écrit le 01 juin 2021
Verset(s) :

12. Assurément, la célébration matinale et vespérale ne s'achèvera jamais sans que, en dernier lieu dans l'ordonnance de l'office, l'oraison dominicale soit dite d’un bout à l’autre par le supérieur, de façon à être entendue par tous, à cause des épines de disputes qui ont accoutumé de se produire.

13. Ainsi l'engagement pris par cette oraison qui leur fait dire : « ;Pardonne-nous comme nous pardonnons nous-mêmes », les mettra en demeure de se purifier de cette sorte de vice.

14. Quant aux autres célébrations, on y dira la dernière partie de cette oraison, en sorte que tous répondent : « Mais délivre-nous du mal. ;»

Commentaire :

De l'attention particulière que porte Benoit dans la RB, à la prière du Notre Père, nous pouvons entendre que cette prière n'est pas une prière comme les autres et qu'elle mérite un soin particulier. Elle est« l'oraison dominicale», c'est-à-dire mot à mot, la prière du Seigneur, celle que le Seigneur Jésus nous a laissé. Quand on y réfléchit, il n'est pas banal d'avoir reçu de la bouche même de Jésus, les mots par lesquels nous pouvons en toute assurance nous tourner vers « son Père et notre Père ». Je crois ne pas me tromper en disant que dans la bible, la prière du Notre Père est la seule gui soit vraiment enseignée comme une prière à adresser à Dieu. Nous trouvons beaucoup d'exhortations à prier. De nombreuses prières sont rapportées de celle de Salomon le jour de la dédicace du Temple, à celles des psaumes, en passant par celle de Daniel ou de Judith. Mais a-t-on une formule dont on nous dise quand tu veux prier dit .. Avec le

« Notre Père », nous avons comme une clé pour oser entrer en présence de Dieu, pour nous

tenir debout face à Lui, comme un fils qui s'entretient avec son père. Simone Weil, cette philosophe juive, devenue chrétienne, sans faire cependant le pas décisif du baptême, raconte dans une lettre autobiographique qu'elle ne savait prier qu'avec le Notre Père. « Je récitais le Pater en grec chaque jour avant le travail, et je l'ai répété bien souvent dans la vigne. Depuis lors, je me suis imposé pour unique pratique de le réciter une fois chaque matin avec une attention absolue. Si pendant la récitation mon attention s'égare ou s'endort, fut-ce d'une manière infinitésimale, ;e recommence jusqu'à ce que j'aie obtenu une fois une attention absolument pure .... La vertu de cette pratique est extraordinaire et me surprend chaque fois, car quoique je l'éprouve chaque jour elle dépasse chaque fois mon attente. Parfois les premiers mots déjà m'arrachent ma pensée à mon corps et la transportent en un lieu hors de l'espace d'où il n'y a ni perspective, ni point de vue. L'espace s'ouvre ... » (S. Weil, Œuvres, Autobiographie spirituelle, Quarto Gallimard, 1999, p 773)

Je retiens de ce témoignage vécu par S. Weil, son effort d'attention. Avons-nous d'autres outil entre nos mains quand nous disons cette prière, pour faire qu'elle soit un moment privilégié de notre dialogue filial avec notre Père? A ce moment-là, redoubler d'attention. Prendre appui sur le geste des mains tendues qui veut exprimer notre disponibilité et notre ouverture, notre adoration aussi. Oui, à chaque office, essayer de faire que la récitation du Notre Père ne soit jamais machinale ni banale.

Voir le commentaire de Père Abbé Luc / Chapitre 13 v 01-11 Aux jours ordinaires comment célébrer les matines ? écrit le 29 mai 2021
Verset(s) :

1. Les jours ordinaires, d'autre part, on célébrera la solennité des matines de cette façon,

2. c'est-à-dire qu'on dira le psaume soixante-sixième sans antienne, en traînant un peu, comme le dimanche, en sorte que tous soient présents pour le cinquantième qu'on dira avec antienne.

3. Après quoi on dira deux autres psaumes selon l'usage, c'est-à-dire

4. la deuxième férie, le cinquième et le trente-cinquième,

5. la troisième férie, le quarante-deuxième et le cinquante-sixième,

6. la quatrième férie, le soixante-troisième et le soixante-quatrième,

7. la cinquième férie, le quatre-vingt-septième et le quatre-vingt-neuvième,

8. la sixième férie, le soixante-quinzième et le quatre-vingt-onzième ;;

9. quant au samedi, le cent-quarante-deuxième et le cantique du Deutéronome, qu'on divisera en deux gloria.

10. Mais les autres jours, on lira un cantique des prophètes, chacun à son jour, comme les psalmodie l'Église romaine.

11. Après cela suivront les Laudes ; puis une leçon de l'Apôtre récitée de mémoire, le répons, l'ambrosien, le verset, le cantique de l'Évangile, la litanie et c'est tout.

Commentaire :

« Et que tout être vivant chante louange au Seigneur » venons-nous de chanter avec le dernier verset du Ps 150, lui-même concluant le psautier, « le livre des louanges » ... Parmi tous nos offices, l'office des Laudes est celui qui porte le plus la marque de la louange gratuite pour Dieu. Cette dimension de louange gratuite est bien soulignée par les psaumes 148 à 150 qui achèvent tour à tour la psalmodie des jours en semaine. Dans le passage de la règle entendu, St Benoit les appelle d'ailleurs « les Laudes». Cet aspect de louange ressort un peu plus le dimanche lorsqu'avant le chant du Ps 99, on reprend les cantiques tirés du livre de Daniel qui magnifient la gloire de Dieu pour l'un, et la beauté de la création pour l'autre. Chaque matin, lorsque la création s'éveille, lorsque le repos nocturne a effacé les peines du jour passé, le corps reposé, nous sommes là pour chanter la vie plus forte que la mort. A ce titre, !'office des Laudes du dimanche qui fait mémoire de la résurrection du Christ se présente comme le modèle de cet office pour toute la semaine. Fort de notre espérance dans le Christ vivant, et contemplant le miracle perpétuel du réveil matinal de la nature, notre cœur chante son Créateur et son Sauveur.

Aux vigiles de Vendredi, nous avons une belle antienne tirée Ps 49 qui éclaire bien tout notre service de louange, et plus spécialement celui des Laudes : « Offrez à Dieu le sacrifice de louange qui vous délivre et lui donne gloire ». Par nos voix unies pour chanter, nous présentons à Dieu un sacrifice de louange. Vers lui monte ainsi notre reconnaissance, le débordement de gratitude pour tous ses bienfaits. Ces mots qui expriment les sentiments de notre cœur envers notre Père des cieux ont valeur de sacrifice. C'est-à-dire qu'ils consistent en une offrande de notre part, une offrande gui coûte, l'offrande de notre temps, celle de notre attention à la vie qui s'écoule, mais aussi celle de notre communion qui fait effort pour unir chacune de nos voix en un chant harmonieux. « Ce sacrifice nous délivre », poursuit notre antienne, et « donne gloire à Dieu ,,. Il nous délivre, en ce sens qu'il nous sort de nous-même. Il brise notre repli sur notre seul horizon terrestre. Il nous ouvre à une vie de relation bien plus large, relation avec notre Dieu reconnu comme la source de toute chose, et relation avec nos frères reconnus comme des partenaires pour chanter et œuvrer sur cette terre. Enfin, le sacrifice de louange rend gloire à Dieu, au sens propre tout d'abord qu'il lui donne du poids (sens du mot gloire en hébreu). Notre louange qui retourne toute chose à son Auteur manifeste son existence bienfaisante. Elle magnifie ensuite toute la grandeur de son œuvre créatrice et de son dessein de salut. Ensemble, nous nous émerveillons d'entrevoir un projet immense qui se déploie sous nos yeux et dans nos existences.

Voir le commentaire de Père Abbé Luc / Chapitre 12 v 01-04 De quelle manière célébrer la solennité des matines ? écrit le 28 mai 2021
Verset(s) :

1. Aux matines du dimanche, on dira d'abord le psaume soixante-sixième sans antienne sur le mode direct.

2. Après quoi on dira le cinquantième avec alleluia.

3. Après quoi on dira le cent dix-septième et le soixante-deuxième,

4. puis les Bénédictions et les Laudes, une leçon de l'Apocalypse par cœur et le répons, l'ambrosien, le verset, le cantique de l'Évangile, la litanie, et c'est tout.

Commentaire :

Lorsqu'on entend les différents chapitres qui composent ce directoire liturgique, on peut être frappé par le fait qu'il n'y ait pas question de silence. Les fois où St Benoit recommande avec insistance le silence sont toute hors cadre liturgique.

Depuis plusieurs décennies, notre pratique actuelle a introduit des petits silences après chaque psaume, ainsi qu'après la lecture du passage de !'Ecriture. Là où autrefois, les psaumes étaient enfilés à la suite les uns des autres, aujourd'hui les silences permettent une petite respiration. Respirer pourquoi ? Certainement pour éviter un automatisme trop mécanique d'un chant qui roulerait sur lui-même. C'est le temps réservé concrètement pour trouver la page du psaume suivant. Mais cette respiration peut aussi nous permettre de laisser résonner un mot, un verset, l'antienne ... petite résonance à travers laquelle nous assimilons et faisons nôtre ces mots sortis d'un autre âge et de situation humaine bien différente de la nôtre. Cette résonance n'est souvent pas fortuite. Il y a peut-être une parole à entendre pour moi aujourd'hui.

Après la lecture du capitule, le silence est davantage; prolongé. Comment habitons-nous ce silence? N'est-ce pas un moment privilégié pour méditer la parole entendue? Méditer, c'est faire revenir à la mémoire, se répéter une phrase ou plusieurs pour nous en imprégner. C'est peut-être faire un lien avec un autre passage de !'Ecriture pour mieux entrer dans l'intelligence des Ecritures. Faisons de ce moment, un moment actif pour mieux écouter, mieux nous laisser toucher par la Parole. A Laudes, nous avons la chance d'écouter en temps ordinaire, le NT à la suite, y compris certains passages jamais lus par ailleurs. Aux Vêpres, la lecture de l'évangile de la messe permet d'en raviver la mémoire, et peut-être de préparer le temps d'oraison suivant. Il n'est pas rare d'entendre une parole, ou de remarquer un geste de Jésus auquel nous n'avions pas prêté attention le matin. Aux Vigiles, le silence vient après une longue pmtion de! 'Ecriture, plus abondante, et voulue comme telle, en cette heure nocturne plus favorable à l'écoute. Parfois, le silence n'est pas aisé. Outre la fatigue plus sensible parfois, les passages entendus ne sont pas toujours très inspirants, comme par exemple le livre de Josué que nous entendons en ce moment. Comment faire de ce silence un temps vivant et nourrissant ? Je crois que nous pouvons nous appuyer sur le répons qui suit. La plupart du temps, celui-ci offre une mini-lectio avec la reprise de tel verset entendu, mais aussi le renvoi à d'autres passages de !'Ecriture qui viennent éclairer. Nous pouvons alors faire parfois l'expérience de la harizah, le collier de perle, qui fait jaillir la lumière, notamment par l'éclairage que donne le Christ.

Voir le commentaire de Père Abbé Luc / Chapitre 11 v 01-13 Comment célébrer les vigiles le dimanche? écrit le 21 mai 2021
Verset(s) :

1. Le dimanche, on se lèvera plus tôt pour les vigiles.

2. A ces vigiles, on gardera la mesure, c'est-à-dire qu'après avoir modulé, comme nous l'avons réglé plus haut, six psaumes et le verset, tous s'assiéront, en bon ordre et selon leur rang, sur les banquettes, et on lira dans un livre, comme nous l'avons dit plus haut, quatre leçons avec leurs répons.

3. C'est seulement au quatrième répons que celui qui chante dira le gloria. Quand il l'entonnera, aussitôt tous se lèveront avec révérence.

4. Après ces leçons suivront six autres psaumes pris dans l'ordre, avec antiennes comme les précédents, et le verset.

5. Après quoi on lira de nouveau quatre autres leçons avec leur répons, selon l'ordonnance indiquée plus haut.

6. Après quoi on dira trois cantiques des prophètes, déterminés par l'abbé ; ces cantiques seront psalmodiés avec alleluia.

7. On dira aussi un verset, l'abbé bénira, et on lira quatre autres leçons du Nouveau Testament, selon l'ordonnance indiquée plus haut,

8. mais après le quatrième répons, l'abbé entonnera l'hymne Te Deum laudamus .

9. Celle-ci achevée, l'abbé lira la leçon de l'Évangile, tous se tenant debout avec honneur et crainte.

10. La lecture de celle-ci achevée, tous répondront Amen , et l'abbé enchaînera aussitôt l'hymne Te decet laus , et la bénédiction donnée, on entonnera les matines.

11. Cette ordonnance des vigiles sera gardée le dimanche également en toute saison, que ce soit en été ou en hiver,

12. sauf si – à Dieu ne plaise – on se lève en retard : on abrégera un peu les leçons ou les répons.

13. Mais qu'on mette tous ses soins à éviter que cela n'arrive. Si cela se produisait, que celui qui est responsable de l'accident par sa négligence en fasse une digne satisfaction à Dieu dans l'oratoire.

Commentaire :

De ce chapitre centré sur la célébration des vigiles le dimanche, je retiens les notations corporelles que st Benoit donne. « Tous se lèveront avec révérence » au moment du gloria qui conclue le 4° répons... « Tous se tenant debout, avec honneur et crainte» lors de la proclamation finale de l'Evangile. Deux notations qui veulent qualifier la position debout et qui nous disent que dans la liturgie, on est debout d'une certaine manière, pas n'importe comment, ni comme dans la vie quotidienne. Il y a des manières d'être debout qui ne conviennent pas alors à l'instant vécu: par ex quelqu'un qui aurait les mains dans les poches (si caricaturale qu'elle puisse paraitre, cette attitude se rencontre de temps en temps dans la nef à la PqV), ou encore quelqu'un un peu déhanché, ou encore les bras croisés lors de la prière eucharistique ... St Benoit nous invite à soigner notre posture debout, pour rendre honneur à la présence de Dieu que nous accueillons et célébrons ensemble. Notre posture va dire beaucoup de Celui, invisible aux yeux, à qui nous parlons et que nous reconnaissons comme notre Dieu, notre Père, source de nos vies. Pour prendre un parallèle, au chapitre, nous avons cette belle habitude de nous lever lorsqu'une personne étrangère entre et vient nous parler. De cette façon, nous lui signifions sans rien lui dire, qu'elle est accueillie, et qu'elle compte à nos yeux. Nous faisons l'effort de nous lever et nous lui exprimons notre respect. Comment faire avec Dieu qu'on ne voit pas? Il est partout présent. Avec la rencontre fraternelle, la liturgie t:st un des lieux privilégiés où nous exerçons notre sens de l'altérité, notre sens de la présence d'un Autre. Les postures que nous adoptons aiguisent ce sens de l'altérité, autant pour nous-mêmes et pour les autres que pour Dieu. Pour nous-mêmes, la juste posture corporelle vient exprimer et soutenir notre acte de foi en Celui qui est là et que nous désirons adorer. Pour les autres, nos postures mutuelles nous aident à porter ensemble le service de la louange de Dieu. Devant Dieu nous sommes aussi un corps communautaire où chacun apporte une part irremplaçable et nécessaire à tous. Me tenir de façon juste aide les autres à se tenir de facon juste. Pour Dieu, enfin, dans notre manière d'être debout, assis, ou à genou, dans la façon de nous incliner, notre corps se joint à notre cœur pour lui dire notre amour, notre profond respect, notre adoration... F. Mathias et Maiiine Buhrig nous ont donné des repères qui s'avèrent justes anthropologiquement, et qui sont au service de cette attitude juste devant notre Dieu. Ecoutons le langage de notre corps, grandissons dans l'attention à la beauté et à la profondeur de nos gestes. Ils manifestent notre être là en vérité devant nos frères et devant Celui qui est toujours là...

Voir le commentaire de Père Abbé Luc / Chapitre 10 v 01-03 Comment célébrer la louange nocturne en saison d'été? écrit le 20 mai 2021
Verset(s) :

1. De Pâques aux Calendes de novembre, d'autre part, on maintiendra intégralement toute la quantité de psalmodie indiquée plus haut,

2. excepté qu'on ne lira pas de leçons dans un livre en raison de la brièveté des nuits, mais à la place de ces trois leçons, on en dira de mémoire une de l'Ancien Testament, suivie d'un répons bref.

3. Tout le reste, on l'accomplira comme il a été dit, c'est-à-dire qu'on ne dira jamais aux vigiles nocturnes une quantité moindre que douze psaumes, non compris les psaumes trois et quatre-vingt-quatorze.

Commentaire :

En France, un repas sans pain, n'est pas un repas, au Vietnam, un repas sans riz n'est pas un repas, ou encore au Burundi, un repas sans haricot... De même un office des vigiles sans une certaine quantité de psaumes n'est pas un office des vigiles... St Benoit met la barre assez haute, puisqu'il fixe à 12 le nombre minimum, sans compter les Ps 3 et 94. Nous avons gardé de notre côté la mesure de 6 psaumes, plus l'invitatoire. Veiller avec le Seigneur pour le monde a besoin de temps, mais aussi de nourriture : un plus grand nombre de psaumes, des lectures plus longues. En effet, cette abondance nous rappelle que notre service de louange dépasse la mesure de chacun et nous place dans le champ de l'humanité toute entière. Si je suis invité à faire mienne la prière des psaumes, les mots que je prononce et que j'écoute, élargissent ma prière qui devient celle de tous les hommes. Ces mots sont les médiateurs de tant de prières non exprimées. La répétition des psaumes, apparemment bien monotone, nous insère dans le grand balbutiement humain en quête de sens, en recherche d'une relation avec l' Au-delà, avec ce Dieu inconnu pour beaucoup. Notre foi nous donne d'oser redire ces mots prononcés des milliers de fois dans la certitude qu'ils expriment la soif du cœur humain. Joies, peines, douleurs, angoisses, détresses, louanges trouvent à travers nos lèvres et notre cœur un porte-parole, un ambassadeur auprès de Celui que nous pouvons appeler notre Père. Si nous cherchons son visage comme tous les humains, la foi nous donne cette assurance que ces mots prononcés ne le sont pas dans le vide. Nous croyons qu'ils touchent les oreilles de notre Père, en même temps qu'ils nourrissent notre propre cœur. A travers nous, notre humanité accomplit sa vocation filiale de porter vers Dieu la vie reçue, de la chanter avec reconnaissance et de la crier dans l'attente de sa plénitude espérée. Mystère de cette relation que notre Dieu désire pour toute l'humanité et pour chacun, pour lui partager sa vie. Et sa vie atteint en sa plénitude lorsque nous pouvons répondre dans la prière, lorsque nous pouvons dire «tu» à Dieu avec notre «je» filial... ou encore avec notre« nous» communautaire. N'est-ce pas le bonheur de notre Dieu de voir ses enfants se tourner vers lui avec confiance, même si c'est pour crier, voire râler et se rebiffer. .. Cette prière signe la grâce de l'Alliance qui se noue, qui prend corps en devenant voix, nôtre voix et à travers la nôtre celle de toute l'humanité. Soyons heureux d'être là cachés dans la nuit, comme des porte-voix de tant de voix étouffées, inquiètes ou désabusées qu'elles ne peuvent plus s'exprimer, ne sachant quelles oreilles trouver qui les entendent vraiment.

Voir le commentaire de Père Abbé Luc / Chapitre 09 v 01-11 Combien de psaumes faut-il dire aux heures de la nuit? écrit le 17 mai 2021
Verset(s) :

1. En la saison d'hiver définie ci-dessus, on dira d'abord trois fois le verset : « Seigneur, tu ouvriras mes lèvres, et ma bouche annoncera ta louange. »

2. On y joindra le psaume trois et le gloria.

3. Après cela, le psaume quatre-vingt-quatorze avec antienne, ou du moins chanté d'un trait.

4. Alors suivra l'ambrosien ; ensuite six psaumes avec antiennes.

5. Quand on les aura dits, et qu’on aura dit le verset, l'abbé bénira, tous s'assiéront sur les bancs et des frères liront tour à tour dans un livre posé sur le pupitre trois leçons, entre lesquelles on chantera trois répons.

6. Deux répons seront dits sans gloria, mais après la troisième leçon, celui qui chante dira le gloria.

7. Quand le chantre commencera de le dire, aussitôt tous se lèveront de leurs sièges en signe d'honneur et de révérence pour la Sainte Trinité.

8. On lira aux vigiles les livres d'autorité divine de l'Ancien Testament aussi bien que du Nouveau, ainsi que les commentaires qu'en ont faits les Pères catholiques réputés et orthodoxes.

9. Après ces trois leçons avec leurs répons, suivront les six psaumes restants, qu'on chantera avec alleluia.

10. Après ceux-ci suivra la leçon de l'Apôtre, qu'on récitera par cœur, le verset et la supplication de la litanie, c'est-à-dire Kyrie eleison ,

11. et ainsi s'achèveront les vigiles nocturnes.

Commentaire :

Ce chapitre nous présente le cursus abondant des psaumes à dire et de lectures à entendre durant les vigiles. Nous pouvons réaliser alors combien, dans notre office, la Parole nous est offerte de deux manières, par notre bouche qui la profère et par nos oreilles qui l'entendent. Comme le suggère le Dt 30. 14, la Parole nous est offerte par notre bouche qui la chante : « Elle est tout près de toi cette Parole, elle est dans ta bouche et dans ton cœur, afin que tu la mettes en pratique ». Et comme le dit le psalmiste, au Ps 62. 5-6, chanté le dimanche matin, cette louange est un vrai festin : « Toute ma vie, je vais te bénir, lever les mains en invoquant ton nom. Comme par un fèstin ie serai rassasié, la joie sur les lèvres, je dirai ta louange ». En même temps que nous chantons, que nous faisons un effort pour donner de notre voix, de notre attention, de notre présence, nous sommes nourris, et nourris très abondamment.

Il est heureux de reprendre conscience de cette richesse offerte à chacun de nos offices, et aux vigiles particulièrement. Comme c'est le cas de toutes les réalités de notre vie chrétienne, dans la liturgie, en même temps que nous nous donnons, nous recevons. Dans le même temps, où nous nous fatiguons, nous sommes revigorés. L'office nous fait entrer dans cette dynamique vertueuse qui est profondément spirituelle. Elle est l'œuvre de !'Esprit Saint en nous, lui qui est

« repos dans le labeur, fraicheur dans la fièvre », comme nous le chanterons dans la séquence avant l'évangile, le jour de la Pentecôte. Comme dans toutes les œuvres de !'Esprit Saint, nous mesurons qu'il se passe quelque chose, mais nous ne savons ni bien comment, ni quand ni d'où cela vient... Durant nos offices, est requise de nous une attitude active-passive, qui nous fait être simultanément bien présent dans l'exécution des chants et des lectures, et bien écoutant disponible à la Parole... La Parole dite par nous est toujours une Parole dite pour nous. Les mots se succèdent à profusion. Nous aurions tort de vouloir nous attacher à tous. A travers eux, est semée la Parole gui se fraie un chemin jusqu'à notre cœur. S'il ne nous est pas possible d'être toujours dans une attention soutenue, il nous revient de chercher à être là, et à revenir lorsqu'on part dans les nuages. Par ce mouvement d'attention renouvelée, offrons notre désir d'être disponible à la Parole. Le fruit ne nous appartient pas, mais la terre qui s'offre oui. Soyons devant notre Dieu comme une terre assoiffée...

Voir le commentaire de Père Abbé Luc / Chapitre 08 v 01-04 Des offices divins au cours des nuits écrit le 06 mai 2021
Verset(s) :

1. En saison d'hiver, c'est-à-dire depuis les Calendes de novembre jusqu'à Pâques, il faut, suivant la norme raisonnable, se lever à la huitième heure de la nuit,

2. afin de se reposer un peu plus de la moitié de la nuit et d'être dispos au lever.

3. Quant à ce qui reste après les vigiles, les frères qui ont besoin d'apprendre quelque chose du psautier ou des leçons, l'emploieront à cette étude.

4. De Pâques aux susdites Calendes de novembre, on réglera l'heure de telle sorte que l'office des vigiles, après un tout petit intervalle où les frères pourront sortir pour les besoins de la nature, soit immédiatement suivi des matines, qui doivent être dites au point du jour.

Commentaire :

Après les chapitres spirituels, les chapitres formant le directoire de l'office liturgique. Sur les 13 chapitres qu'il comprend, 5 sont consacrés aux vigiles, preuve s'il en est de l'importance que Benoit accorde à la prière de la nuit, dans la ligne de la tradition ancienne reçue de l’Égypte. De manière très concrète, St Benoit commence par donner le cadre à cet office : le temps réservé au sommeil pour être dispos au lever, la manière d'utiliser le temps gui suit avant les matines (études en hiver, temps plus court pour les besoins de la nature en été).

On peut entendre dans ces remarques très simples, la conviction que cette prière nocturne fait vraiment partie de la vie quotidienne du moine dans un équilibre global. Nous nous sommes plusieurs fois posés la question à la Pierre-qui-Vire s'il fallait ou non continuer de célébrer les vigiles au milieu de la nuit. Et à chaque fois, conscients de notre fragilité, nous avons pensé qu'il était bon de garder cet horaire, tout en regrettant l'absence d'une petite ou plus grande moitié de la communauté selon les nuits... Les santés ne permettent pas à plusieurs d'y participer, comme elles ne le permettraient pas à un petit nombre en d'autres heures. Ce choix de maintenir les vigiles la nuit a été guidé en premier lieu par la conscience de vivre là une grâce particulière : celle d'une prière gratuite, en lien avec notre monde, une veille d'amour pour le Seigneur. A la différence du jour, la nuit avec son silence et son recueillement permet une aisance réelle dans la prière. Plus profondément, la prière de la nuit imprime à nos journées et à toute notre vie, la marque de la veille. De même que la nuit est raccourcie, et ouverte en quelque sorte, de même nos journées sont comme ouvertes par un certain inconfort ressenti dans notre corps. Nous pouvons éprouver parfois le poids d'une certaine fatigue. Nous devons alors faire attention à notre équilibre, veiller à ne pas être toujours à 150 à l'heure, faire la sieste peut-être, ne pas tarder à nous coucher le soir. Cet inconfort laisse en nous la marque d'un mangue (on ne peut pas faire toutes les lectures qu'on souhaiterait. .. ). Bien sûr, si nous sommes trop fatigués, il faut dormir. Mais il demeure que nous apprenons ainsi à chercher moins à jouir du moment présent, comme s'il était un absolu, qu'à vivre d'une autre attention, celle de la présence au Seigneur, qui est déjà là et qui vient. En quelque sorte, nos vigiles nous font davantage pèlerins, pèlerins toujours en quête d'une rencontre, d'un visage dont nous pressentons confusément qu'ils donneront tout son poids à notre existence...

Voir le commentaire de Père Abbé Luc / Chapitre 07 v 67-70 De l'humilité écrit le 05 mai 2021
Verset(s) :

67. Lors donc que le moine aura gravi tous ces degrés d'humilité, il arrivera à cet amour de Dieu qui est parfait et qui met dehors la crainte.

68. Grâce à lui, tout ce qu'il observait auparavant non sans frayeur, il commencera à le garder sans aucun effort, comme naturellement, par habitude,

69. non plus par crainte de la géhenne, mais par amour du Christ et par l'habitude même du bien et pour le plaisir que procurent les vertus.

70. Cet état, daigne le Seigneur le faire apparaître par le Saint-Esprit dans son ouvrier purifié de ses vices et de ses péchés !

Commentaire :

Le moine qui a gravi tous les degrés de l'échelle de !'humilité est en fait un homme gui est descendu jusqu'aux profondeurs de ses propres abimes, comme le laissait bien entendre le 12° entendu hier. Abime de son cœur broyé par la reconnaissance de son péché... Abime où de façon inattendue, il découvre en lui une source nouvelle qui s'ouvre : « l'Amour de Dieu qui est parfait et met dehors la crainte ... » Mystérieux travail de l'humilité qui, loin d'enfermer sur les misères reconnues, permet de les traverser pour ouvrir une nouvelle possibilité d'aimer. Nous peinons à imaginer comment cela peut se faire, car il s'agit à proprement parler d'une restauration de l'être. Elle est l'œuvre de !'Esprit qui fait apparaitre un tel état en chacun

« purifié de ses vices et de ses péchés... » S'accomplit ainsi la vie nouvelle annoncée par les prophètes. Le moine qui observe« comme naturellement. par habitude et par amour du Christ» les commandements, expérimente la réalisation de la promesse transmise par Jérémie : « Je mettrai ma loi au plus profond d'eux-mêmes; je l'inscrirai sur leur cœur. Je serai leur Dieu, et ils seront mon peuple» (Jr 31, 33). Nous sommes devant le profond travail de la grâce en nous... comme une promesse de vie surabondante, elle opère déjà.

Il est heureux de garder cet horizon en ligne de mire. Il éclaire notre quotidien très simple et parfois monotone. Cela est d'autant plus heureux que cet horizon est de l'ordre d'un cadeau dont on ne sait pas bien comment il arrive. On peut se demander : comment ne pas manquer ce cadeau? Peut-être n'y-a-t-il rien d'autre à faire que de nous appliquer à vivre notre vie monastique dans une attention de plus en plus fine. Être bien présent dans l'écoute de la Parole, dans la prière, dans l'écoute des frères, dans l'obéissance, dans le service. Il nous revient surtout de garder le désir d'être disponible, de nous laisser faire par !'Esprit qui nous incline ici ou là, nous laisser faire par les évènements qui bousculent les programmes et par les frères qui peuvent nous interpeller. .. Ecoute et humilité vont de pair. Docilité et humilité aussi... Nous touchons là la profondeur du travail spirituel, ce travail mené sous la conduite de !'Esprit. Si nous sommes « des ouvriers » comme le dit St Benoit, notre travail consiste autant, et peut-être plus, à nous laisser travailler qu'à travailler, ou à accomplir des choses. Depuis que lors de notre baptême, l'Amour a été répandu dans nos cœurs, il nous revient de laisser cette source irriguer tout notre être et le transformer. Chercher l'humilité, contribue à éviter les obstructions et à ouvrir toutes les vannes possibles à cette source vivifiante.