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1. Cependant aux fêtes des saints et à toutes les solennités, on célébrera comme nous avons dit de célébrer le dimanche,
2. excepté qu'on dira les psaumes ou antiennes et leçons qui se rapportent à ce jour. Mais on gardera la mesure indiquée plus haut.
Depuis le concile et la réforme liturgique, nous sommes sensibles à la célébration du temps liturgique en cours, en valorisant la spécificité de chaque temps dans sa dynamique théologique et spirituelle propre... Durant le carême, le temps pascal, I'Avent, le temps de Noël, grâce aux lectures, aux oraisons, aux préfaces, aux hymnes et aux antiennes propres se dessine un chemin spirituel qui fait sens et qui nourrit notre engagement dans la durée. Ensemble, en Eglise, nous marchons à la rencontre du Christ, en célébrant son mystère qui nous incorpore un peu plus à Lui, année après année.
D'une certaine manière les fêtes de saints viennent interrompre la dynamique propre du cycle liturgique. Chaque fête, des mémoires facultatives de Ste Bernadette aux solennités des st Jean Baptiste ou sts Pierre et Paul, chaque fête apporte une note propre plus ou moins exprimée, depuis la seule oraison d'ouverture à la messe à l'office avec textes et antiennes propres. Nous connaitrons cela prochainement en la 4° semaine de Carême avec les fêtes de St Joseph et St Benoit, un jour après l'autre. Ces deux figures nous sortiront-elles du cheminement spirituel dans lequel nous évoluons? D'une certaine manière, elles nous réenracinent dans l'histoire concrète à travers la vie de personnes concrètes. L'histoire de l'Eglise leur est redevable d'un témoignage de foi et de vie unique, sans lequel nous ne serions certainement pas là... Faire mémoire de leur vie et de leur enseignement, c'est rendre grâce au Seigneur d'avoir suscité de telles personnalités qui ont façonné le visage de l'Eglise. C'est aussi nourrir notre propre chemin à la lumière du leur. Autrement dit, accueillir l'interruption de la célébration d'un temps liturgique par ces mémoires ou fêtes de saints peut-être une manière d'élargir notre regard et notre cœur, en retrouvant l'épaisseur du temps d'où nous venons. Je remarque que nous avons tendance globalement dans notre liturgie, à ne pas tellement faire mention des saints, même si nous chantons une hymne spéciale. Je crois qu'il nous faut veiller, célébrants à l'eucharistie et hebdomadiers à l'office, ne pas oublier de faire mention des saints, dans la prière litanique par exemple. Dans le déroulement de l'année liturgique, ils sont comme des voyants gui s'allument dans la nuit. Ils nous assurent: « voilà la bonne route». Leur témoignage et leur fidélité nous encouragent.
12. Assurément, la célébration matinale et vespérale ne s'achèvera jamais sans que, en dernier lieu dans l'ordonnance de l'office, l'oraison dominicale soit dite d’un bout à l’autre par le supérieur, de façon à être entendue par tous, à cause des épines de disputes qui ont accoutumé de se produire.
13. Ainsi l'engagement pris par cette oraison qui leur fait dire : « ;Pardonne-nous comme nous pardonnons nous-mêmes », les mettra en demeure de se purifier de cette sorte de vice.
14. Quant aux autres célébrations, on y dira la dernière partie de cette oraison, en sorte que tous répondent : « Mais délivre-nous du mal. ;»
Dite lors de chaque office, la prière du Notre Père tient une place non négligeable dans notre office. Elle a acquis encore un peu plus de solennité qu'au temps de St Benoit, puisque nous la disons ou chantons tous ensemble, là où elle n'était dite que par le supérieur à Laudes et à Vêpres, tandis qu'aux autres heures elle était dite à voix basse par chacun avant que la communauté ne reprenne que la dernière parole, ce que nous avons gardé à Complies, avant le coucher. Nous lui donnons encore un peu plus de solennité en levant les bras à Laudes et à Vêpres. Ces adaptations liturgiques expriment en elles-mêmes le relief que nous avons pris soin de donner à la prière du Seigneur, l'oraison dominicale. Elles veulent peut-être aussi tout simplement nous aider à ne pas nous habituer à cette prière, à faire en sorte qu'elle ne glisse pas sur nous, comme l'eau sur les plumes d'un canard. St Benoit était attentif à la cohérence entre les paroles dites sur l'engagement au pardon et la vie des frères. Cette exigence garde encore toute sa pertinence pour nous aujourd'hui.
Mais nous sommes aussi peut-être attentifs à la réalité de la relation dans laquelle cette prière nous introduit... En disant Notre Père, nous parlons comme des enfants avec le Dieu qu'Abraham, d'Isaac et de Jacob révéraient avec crainte. Nous entrons avec simplicité dans un dialogue filial avec le Dieu apparu dans le buisson ardent à Moïse qui a appris à qui il avait à faire en se déchaussant. Peut-être avons-nous oublié quel privilège cela représente de pouvoir parler ainsi en grande confiance avec notre Père des Cieux... Depuis Jésus qui, sur une croix, a tant souffert, nous osons le nommer Père, nous qui ne sommes que poussière, pour reprendre les mots de notre hymne de Carême. Car nous savons de manière sûre qu'il est l'Amour toujours offert. En disant le Notre Père, au sein de la communauté monastique où nous vivons coude à coude, nous apprenons à nous regarder les uns les autres comme des frères. Chacun vit une intimité unique avec notre Père commun. « Vous n'avez qu'un seul Père» ... et« vous êtes tous frères» entendrons-nous Jésus nous dire aujourd'hui. En nous entrainant à nous tourner avec confiance vers son Père et notre Père des cieux, Jésus nous entraine inséparablement à regarder avec amour et respect chaque frère, proche d'abord et lointain ensuite, fils comme moi du même Père.
1. Les jours ordinaires, d'autre part, on célébrera la solennité des matines de cette façon,
2. c'est-à-dire qu'on dira le psaume soixante-sixième sans antienne, en traînant un peu, comme le dimanche, en sorte que tous soient présents pour le cinquantième qu'on dira avec antienne.
3. Après quoi on dira deux autres psaumes selon l'usage, c'est-à-dire
4. la deuxième férie, le cinquième et le trente-cinquième,
5. la troisième férie, le quarante-deuxième et le cinquante-sixième,
6. la quatrième férie, le soixante-troisième et le soixante-quatrième,
7. la cinquième férie, le quatre-vingt-septième et le quatre-vingt-neuvième,
8. la sixième férie, le soixante-quinzième et le quatre-vingt-onzième ;;
9. quant au samedi, le cent-quarante-deuxième et le cantique du Deutéronome, qu'on divisera en deux gloria.
10. Mais les autres jours, on lira un cantique des prophètes, chacun à son jour, comme les psalmodie l'Église romaine.
11. Après cela suivront les Laudes ; puis une leçon de l'Apôtre récitée de mémoire, le répons, l'ambrosien, le verset, le cantique de l'Évangile, la litanie et c'est tout.
Lorsque nous venons à l'office, nous exerçons tous comme baptisé, notre sacerdoce baptismal. Tous, nous sommes prêtres en ce sens où nous faisons monter vers Dieu le sacrifice de louange. J'aime bien la petite définition qu'offre la lettre aux Hébreux du sacrifice de louange, lorsqu'elle recommande : « En toute circonstance, offrons à Dieu, par Jésus, un sacrifice de louange, c'est-à-dire les paroles de nos lèvres qui proclament ton nom " (He 13, 15). Durant l'office, nous ne cessons de proclamer le Nom béni de notre Dieu, son Nom de Seigneur et Sauveur, Père, Fils et Esprit Saint. Les doxologies concluant chaque Ps en sont comme un condensé sans cesse repris. Il est heureux de nous souvenir de cette dimension sacerdotale de notre présence au chœur. Ensemble, nous officions pour célébrer la louange de Dieu. avec toute l'Eglise. En son sein, nous avons cette vocation particulière de chanter le Nom de Dieu, de le bénir pour tous ses bienfaits, de le louer de nous appeler ses fils, de l'invoquer dans la confiance qu'II nous écoute et de le chercher toujours, Lui dont la sainteté est le chemin (Ps 76, 14). Telle est notre mission première reçue à la fois comme un appel et à la fois comme un don : un appel qui nous sort de nous-mêmes, surtout aux jours où nous trainons les pieds pour venir à l'église, et un don, un cadeau comme le suggère le psalmiste:« à l'ombre de tes ailes, tu abrites les hommes, ils savourent les festins de ta maison, aux torrents du paradis tu les abreuves » (Ps 35, 9). Si nous savons que ce sacrifice de nos lèvres plait à Dieu plus que le sacrifice de taureaux ou d'agneaux gras, nous savons aussi qu'il exige de nous pour être juste une attitude d'humilité et une cohérence de vie. Attitude d'humilité pour être avec le psalmiste devant le Seigneur avec un esprit brisé, c'est-à-dire non suffisant, toujours en recherche: « le sacrifice qui plait à Dieu, c'est un esprit brisé. tu ne repousses pas, ô mon Dieu, un cœur brisé et broyé» (Ps 50, 19) ... Mais il exige aussi une cohérence de vie. L'auteur de l'épitre aux Hébreux ajoute après avoir recommandé d'offrir un sacrifice de louange: « N'oubliez pas d'être généreux et de partager. C'est par de tels sacrifice qu'on plait à Dieu » (He 13, 16). Humilité, partage : en ce temps de carême, nous sommes particulièrement conviés à nous ajuster individuellement et communautairement pour que notre sacrifice de louange rende vraiment gloire à Dieu.
1. Aux matines du dimanche, on dira d'abord le psaume soixante-sixième sans antienne sur le mode direct.
2. Après quoi on dira le cinquantième avec alleluia.
3. Après quoi on dira le cent dix-septième et le soixante-deuxième,
4. puis les Bénédictions et les Laudes, une leçon de l'Apocalypse par cœur et le répons, l'ambrosien, le verset, le cantique de l'Évangile, la litanie, et c'est tout.
Le titre de ce chapitre a tout d'abord retenue mon attention. A propos de ce chapitre sur l'office des Matines ou Laudes du dimanche, c'est la seule fois que St Benoit utilise le mot
« solennité» dans un des titres de ce directoire liturgique. Même si, comme le suggère le P. Adalbert, ce titre pouvait originellement dans la règle du Maitre regrouper les deux chapitres 12 et 13, consacrés aux Laudes, on peut entendre une certaine importance donnée à l'office des Laudes en général, et aux Laudes du dimanche en particulier pour Benoit. Cette importance peut se comprendre car cet office veut faire mémoire de l'évènement de la résurrection du Christ, une mémoire que le dimanche on se doit de solenniser. La victoire du Christ sur la mort et le péché, est la Bonne Nouvelle Chrétienne à célébrer avant tout. A côtés des psaumes 117 et 62, les bénédictions mais aussi les laudes (c'est-à-dire les Ps 148-150) veulent manifester cette louange débordante qui peut sortir du cœur des croyants.
Je voudrais m'arrêter sur les «Bénédictions». St Benoit désigne sous ce terme les cantiques de Daniel, dits des trois enfants que nous chantons aussi en deux parties, les dimanches du temps ordinaires. Ses Bénédictions appellent toute la création du Seigneur à chanter ses louanges« vous les cieux, bénissez le Seigneur ...et vous la terre, vous les enfants des hommes, bénissez les Seigneur ... ». En reprenant ses bénédictions au matin de chaque dimanche, nous voulons associer toute la création à reconnaitre la Seigneurie du Christ Ressuscité sur tout l'univers. Toute la création doit chanter sa louange et l'acclamer. A l'heure où nous retrouvons notre lien profond avec toute la création, au sein de l'univers créé, ce cantique peut nous apprendre à jouer notre rôle de gardien du jardin, conscient à la fois d'être un au milieu des autres êtres. Dans la lumière de la résurrection du Christ qui transfigure toute chose, comme gardiens de la maison commune, nous sommes les témoins et les serviteurs du dessein de Dieu de tout récapituler dans le Christ. Chaque être en lui doit trouver sa juste place, une place ordonnée au bien de tous, pour la louange de sa gloire. Qu'avec le chant du cantique de Daniel repris aux laudes des dimanches et fêtes, nous remplissions notre rôle d'entraineur de toute la création à louer son Créateur, et qu'en notre vie quotidienne, nous en soyons d'heureux artisans de cette harmonie sans cesse recherchée.
1. De Pâques aux Calendes de novembre, d'autre part, on maintiendra intégralement toute la quantité de psalmodie indiquée plus haut,
2. excepté qu'on ne lira pas de leçons dans un livre en raison de la brièveté des nuits, mais à la place de ces trois leçons, on en dira de mémoire une de l'Ancien Testament, suivie d'un répons bref.
3. Tout le reste, on l'accomplira comme il a été dit, c'est-à-dire qu'on ne dira jamais aux vigiles nocturnes une quantité moindre que douze psaumes, non compris les psaumes trois et quatre-vingt-quatorze.
En recevant ce chapitre sur les vigiles en saison d'été, je voudrais m'arrêter sur cette dimension essentielle de la veille dans notre vie monastique. La veille nocturne, qu'elle soit au milieu de la nuit, tard le soir ou tôt le matin, est l'exercice concret qui nous rappelle à tous que la vie monastique est pour une part essentielle, une vie de veille au service du Seigneur. Il est intéressant de constater que les autres religieux ont rarement cet office des vigiles, inscrit dans leur horaire. Certains célèbrent l'office des lectures tel qu'il est proposé aussi aux prêtres, mais en une heure qui peut être aussi bien diurne que nocturne. Leur mission n'est pas là d'abord. A 1ïnverse, notre vocation monastique est fondamentalement une vocation de veille pour le Seigneur. Nous veillons la nuit pour nous tenir prêts lorsque le Seigneur viendra, à 1'instar des jeunes filles de la parabole qui savent toujours alimenter leur lampe. Par notre désir gardé en éveil, par notre amour toujours en travail, nous lui ménageons un espace d'accueil dans nos vies déjà, mais aussi au cœur du monde. Nous veillons aussi pour intercéder pour l'humanité. Avec le chant des psaumes, montent à travers nos voix, les cris des hommes et des femmes qui ne savent plus vers gui exprimer leurs souffrances ou tourner leur regard. Bien sûr, notre veille n'est pas limitée à la nuit. Mais cette veille nocturne marque et donne à l'ensemble de notre journée cette dynamique. « Si nous vivons, nous vivons pour le Seigneur », dit Paul (Rm 14, ). Tout au long du jour, nous cherchons à unifier notre vie, nos pensées. nos actions, notre désir dans l'amour du Seigneur et des frères. Comme l'a souligné la visite canonique, tous ne sont pas présents à cet office, et il nous faudra peut-être reprendre cette question. Mais je crois que tous, nous sommes conviés à être des veilleurs, c'est-à-dire des personnes qui ne veulent surtout pas se griser en quoi que ce soit pour oublier ou pour se divertir. Rien de ce qui fait notre quotidien n'est banal. Tout peut nous aider à nous centrer et recentrer sur le lien vital et aimant avec le Seigneur et avec nos frères. Aux frères, qui ne peuvent venir la nuit, je redis qu'ils peuvent avant de se coucher ou bien tôt le matin prendre par exemple un ou deux psaumes, ou bien une des lectures, afin de ne pas être coupés de la communauté. Ce petit exercice les tiendra en éveil à leur mesure, une mesure bien réelle car très personnelle.
67. Lors donc que le moine aura gravi tous ces degrés d'humilité, il arrivera à cet amour de Dieu qui est parfait et qui met dehors la crainte.
68. Grâce à lui, tout ce qu'il observait auparavant non sans frayeur, il commencera à le garder sans aucun effort, comme naturellement, par habitude,
69. non plus par crainte de la géhenne, mais par amour du Christ et par l'habitude même du bien et pour le plaisir que procurent les vertus.
70. Cet état, daigne le Seigneur le faire apparaître par le Saint-Esprit dans son ouvrier purifié de ses vices et de ses péchés !
Sommet de l'échelle de l'humilité, cette conclusion peut être considérée comme le sommet de notre vie monastique: l'expérience de l'amour de Dieu gui se libère en nous. Il est heureux, qu'à la différence du Maitre, St Benoit place ce sommet dans la vie présente. non dans l'au-delà de la vie éternelle. Cet horizon n'est donc pas hors de notre portée, il est plutôt là comme une promesse, la promesse de l'efficacité du travail de l'humilité. Celle-ci, loin de nous rabougrir, ouvre, en un retournement saisissant, à la dilatation de l'amour. Pour Benoit, celle ci est synonyme d'aisance (sans aucun effort), d'assurance (sans crainte) et de plaisir dans la recherche des vertus pour accomplir le bien.
On peut se demander : comment !'humilité produit-elle ce résultat désirable ? Je reprends l'un après l'autre les trois aspects d'aisance, d'assurance et de plaisir. Si alors qu'auparavant, on vivait les observances monastiques comme quelque chose de laborieux, l'humilité produit l'aisance, n'est-ce pas parce que l'humilité est venue désarmer nos résistances à nous donner ? Nous peinons à faire ceci ou cela, parce que nous ne nous donnons pas entièrement. Soit, nous nous réservons, soit, nous faisons d'autres choix que ce qui est demandé. Une tension surgit du fait que nous voulons rester maitre encore de notre vie L'humilité nous rend serviteur du dessein de Dieu. L'humilité nous donne plus d'assurance car elle nous apprend à ne plus mettre notre confiance en nous-mêmes. Nous entrainant toujours plus loin dans la connaissance de notre pauvreté, elle nous jette en quelque sorte dans les bras du Seigneur. En Lui seul, nous pouvons trouver notre force et notre salut. Qu'avons-nous à craindre, qu'avons-nous à perdre si c'est sur lui que nous nous appuyons? L'humilité enfin est source de plaisir, le plaisir de vivre selon les vertus, comme par habitude... Les vertus : on peut entendre aussi bien les vertus théologales (foi espérance, charité) que les vertus cardinales (prudence, force, tempérance,justice). Est-ce surprenant? Non car l'humilité nous ramenant à notre humus, aux racines de notre humanité, nous redonnent accès à ces potentialités que nous portons en nous, comme créature à l'image de Dieu, potentialités qui ne demandent qu'à s'épanouir sous la conduite de ]'Esprit. Car c'est lui le grand artisan de notre humilité en devenir. Oui confions-nous à Lui. Qu'il daigne nous entrainer sur ce chemin avec confiance et joie.
62. Le douzième degré d'humilité est que, non content de l'avoir dans son cœur, le moine manifeste sans cesse son humilité jusque dans son corps à ceux qui le voient,
63. autrement dit, qu'à l'œuvre de Dieu, à l'oratoire, au monastère, au jardin, en voyage, aux champs, partout, qu'il soit assis, en marche ou debout, il ait sans cesse la tête inclinée, le regard fixé au sol,
64. et se croyant à tout instant coupable de ses péchés, il croie déjà comparaître au terrible jugement,
65. en se disant sans cesse dans son cœur ce que le publicain de l'Évangile disait, les yeux fixés au sol : « Seigneur, je ne suis pas digne, pécheur que je suis, de lever les yeux vers le ciel. »
66. Et aussi avec le prophète : « Je suis courbé et humilié au dernier point. »
12° degré d'humilité. Ce qui ressort fortement de ce 12° c'est l'adéquation profonde qu'il y a entre l'intérieur et l'extérieur du moine. Benoit présente comme un gage d'authenticité !'attitude extérieure du moine, attitude faite de modestie, de recueillement, d'effacement, car elle reflète l'attitude intérieure d'un homme qui se sait profondément pécheur et qui n'ose pas lever les yeux vers le ciel, comme le publicain. Sa démarche, son corps, toute sa personne dit sa remise totale à Dieu dont il attend de lui seul, la justification. Sur le chemin de l'humilité, nous ne sommes souvent pas là encore. Entre masque, façade, apparence et notre intérieur, nos émotions, nos pensées persistantes, se trouvent souvent une forte distance. Comment demeurer vigilant pour ne pas nous tromper nous-mêmes ? St François de Sales que nous entendions il y a quelques jours parlait ainsi à Philothée : « C'est un des grands artifices de l'ennemi de faire que plusieurs s'amusent aux paroles et contenances extérieures des deux vertus de l'humilité et de la douceur, qui, n'examinant pas bien leurs affections intérieures, ne le sont néanmoins nullement en effet ; ce que l'on reconnait, parce que nonobstant leur cérémonieuse douceur et humilité, à la moindre parole qu'on leur dit de travers, à la moindre petite injure qu'ils reçoivent, ils s'élèvent avec une arrogance non pareille» (Intro à la Vie dévote, Pléiade p 153). Ainsi St François de Sales met bien en évidence la distance entre une attitude extérieure plus ou moins consciemment feinte, et les affections intérieures qui se révèlent à la moindre injure ou parole de travers. Sur la voie d'unification de notre être et de notre vie, quel point d'attention pouvons-nous retirer pour notre quotidien? A l'instar du publicain, nous pouvons cultiver la juste compréhension de notre être pécheur devant Dieu. Non pas autodépréciation, mais regard lucide sur notre faiblesse à aimer vraiment et entièrement, lorsque nous sommes laissés à nos seules forces. Nous pouvons aussi cultiver la vigilance vis-à-vis des pensées pharisiennes qui rôdent toujours pour nous enfermer dans une vision idéale et fausse de nous-mêmes. Ne les laissons pas nous embrumer l'esprit et lorsqu'elles se présentent, invoquons le Seigneur:
« Préserve ton serviteur de l'orgueil, qu'il n'ait sur moi aucune emprise» (Ps 18, 14).
56. Le neuvième degré d'humilité est que le moine interdise à sa langue de parler et que, gardant le silence, il attende pour parler qu'on l'ait interrogé.
57. En effet, l'Écriture indique qu'« en parlant beaucoup, on n'évite pas le péché »,
58. et que « l'homme bavard ne marche pas droit sur la terre ».
Certains pensent que l'humilité est une forme de faiblesse, voire de lâcheté. qui serait le fait d'une personnalité fragile. Ce 9° nous laisse un indice. un verbe qui montre qu’il n'en est rien. Lorsqu’il recommande que le moine« interdise à sa langue de parler", et t'attendre qu'on l’interroge, ce 9° nous fait pressentir que l'humilité est aussi le fait d'une décision forte. Autre chose est ce qu'on m'interdit de l'extérieur, autre chose est de s'interdire soi-même quelque chose par sa seule volonté. Il en va d'un tout autre dynamisme intérieur qui demande une vraie détermination. Je pense à des personnes ou à des frères qui s'interdisent de faire ceci ou de manger ou boire cela dans un but précis. par ex celui de communier à la difficulté d'autres personnes. A l'inverse du volontarisme qui centre sur soi, dénoncé par le pape François. cette décision se veut toute tournée vers autrui. Parfois même, Dieu seul voit ce qui se fait. Mais une conviction intime est là que cette attitude a du poids devant lui en faveur des personnes pour lesquelles elle est vécue.
On pourrait se demander: qu'est-ce qui distingue l'attitude humble de celui qui ne prend la parole que si on la lui donne de l'attitude peut-être orgueilleuse de celui qui choisit de se taire par mutisme? Dans le second cas. le mutisme s'accompagne souvent d'un repli sur soi qui peut devenir pesant pour l'entourage qui perçoit une volonté délibérée de ne pas communiquer. Dans le premier cas, la retenue dans la parole reste attentive à ce qui s'échange. Même en silence. elle participe et s'associe guettant le moment juste pour parler ou attendant qu'on lui donne la parole. La retenue délibérée est humble et elle est perçue comme aidante pour le groupe dès lors que le frère peut apporter sa parole au moment opportun. Humilité se conjugue alors avec justesse et à propos. Nos groupes peuvent être un bon lieu pour s’exercer à cette parole bonne et constructive. Un bon lieu d'exercice d'humilité pour apprendre à parler au moment opportun pour faire avancer la discussion. ou bien pour mettre en valeur la parole d'autres frères. L'humilité nous exerce alors à quitter nos désirs d'en placer une à tout prix, ou de raconter nos campagnes. ce qui peut peser sur les autres. Décider de contenir sa parole est un exercice dï1umilité. Il demande en effet de se connaitre assez bien soi-même pour mettre un frein à sa langue et ne pas encombrer de paroles inutiles l'entourage. Nous n'avons pas fini d'apprendre à nous connaitre et nous ajuster les uns aux autres pour privilégier l'attention et l'amour des autres. Profitons de nos groupes pour nous exercer ...
55. Le huitième degré d'humilité est que le moine ne fasse rien qui ne se recommande de la règle commune du monastère et des exemples des supérieurs.
Cc 8° peut surprendre par sa simplicité. Ne rien faire qui ne se recommande de la règle commune et des exemples des anciens. Dans sa dernière lettre apostolique sur St Francois de Sales. le pape François cite une citation du saint évêque de Genève. qui peut éclairer à mon sens le propos de la règle. Je le le cite : « Lors de sa dernière rencontre de ces jours-là. à Lyon avec ses Visitandines ... St François leur avait laissé cette expression ... : 'J'ai tout résumé dans ces deux mots quand je vous ai dit de ne rien refuser ni désirer: je n'ai plus rien à vous dire· (Entretiens spirituels, Dernier entretien [21], in Œuvres, éd, André Ravier, Gallimard. Paris 1969, p. 1319). Ne rien refuser ni désirer. Le pape commente : « Il ne s'agissait cependant pas d'un exercice de pur volontarisme, « une volonté sans humilité»... Il ne s'agissait pas non plus d'un pur quiétisme, d'un abandon passif et sans affect à une doctrine sans chair et sans histoire. Cette formule naissait plutôt de la contemplation de la vie même du Fils incarné. Le 26 décembre le Saint s'adressait ainsi aux Sœurs au cœur du mystère de Noël : « Voyez-vous l'Enfant Jésus clans la crèche :' Il reçoit tous les ravages du temps, le froid et tout ce que le Père permet qu'il lui arrive. Il ne refuse pas les petites consolations que sa mère lui donne, et il n'est pas écrit qu'il ne tende jamais les mains pour avoir le sein de Mère, mais il laisse tout à ses soins et à sa prévoyance: ainsi nous ne devons rien désirer ni refuser. supportant tout ce que Dieu nous envoie le froid et les ravages du temps» (ibid)... À l'école de l'Incarnation. St François avait appris à lire l'histoire et à l'habiter avec confiance". Il me semble que c'est à une même expérience de confiance que renvoie ce 8° degré : confiance en la vie monastique qui se donne, à travers une tradition éprouvée et héritée des générations précédentes. L'humilité se fait ici confiance pour recevoir et se laisser former comme Jésus. le Verbe fait chair. Il a accepté de se laisser façonner en notre terre et par une culture humaine. La contemplation de la vie de Jésus suggérée par le pape peut encore être éclairante pour ne pas s'enfermer ; avec ce 8° dans une sorte d'immobilisme interdisant toute innovation. Après ses 30 années de vie cachée durant lesquelles Jésus s'est laissé façonner en sa personnalité, il est parti prêcher et ouvrir les voies nouvelles du Royaume de Dieu. De même, après le temps durant lequel chacun s·enracine avec humilité dans la tradition du monastère, vient le temps des responsabilités où propositions. remises en cause et autres recherches trouvent aussi leur place. Le temps de l'enracinement
vécu humblement dans l'écoute de la tradition. permettra d'être à l'écoute, on peut le penser. cl,:s appels du temps présent. pour leur donner une expression monastique juste et humble.
49. Le sixième degré d'humilité est que le moine se contente de tout ce qu'il y a de plus vil et de plus abject, et que, par rapport à tout ce qu'on lui commande, il se juge comme un ouvrier mauvais et indigne,
50. en se disant avec le prophète : « J'ai été réduit à néant et je n'ai rien su. J'ai été comme une bête brute auprès de toi et je suis toujours avec toi. »
51. Le septième degré d'humilité est que, non content de déclarer avec sa langue qu'on est le dernier et le plus vil de tous, on le croie en outre dans l'intime sentiment de son cœur,
52. en s'humiliant et en disant avec le prophète : « Pour moi, je suis un ver et non un homme, l'opprobre des hommes et le rebut du peuple.
53. J'ai été exalté, humilié et confondu. »
54. Et aussi : « Il m'est bon que tu m'aies humilié, pour que j'apprenne tes commandements. »
Quelle est la différence entre un SDF et un moine humble? Le SDF n'a pas le choix. il doit se contenter de tout ce qu'il y a de plus vil et de plus abject. Le moine humble est celui qui trouve un sens à se contenter de tout ce qu’il y a de plus vil et de plus abject. Cette différence met en lumière combien nous sommes des riches. Non seulement nous ne manquons de rien, mais il nous est possible de donner du sens là où apparemment personne n'en trouverait. Dans la ligne du 4°. ces 6° et 7° dessinent une ligne de crête qu'il faut considérer avant tout comme un possible chemin de grâce à recevoir. et surtout pas comme une recherche volontaire à mener. Cette ligne de crête fait passer entre deux abîmes : celui de l'humiliation qui écrase et celui de 1·autodépréciation qui enfonce. L'humiliation qui écrase et qui ne peut en aucun cas être promus comme système. L'autodépréciation est une tentation pour le moine qui pourrait la confondre avec l'humilité. Humiliation et autodépréciation ont en commun de conduire à une perte de ce juste amour de soi, nécessaire à chacun comme un minimum vital. Entre humiliation subie et autodépréciation consentie. St Benoit donne un repère sur le chemin de l'humilité: se contenter de tout. Être content en toutes circonstances. même dans les plus difficiles. Comment comprendre ce contentement pour qu'il ne soit pas du masochisme malsain ? La référence au Ps 72: «j'ai été réduit à néant ....comme une bête brute auprès de toi, et je suis toujours avec lui » nous offre une lumière. Le psalmiste a fait l'expérience du succès de l'arrogance des impies. Il les a, un temps, enviés et jalousés, nu point d'être tenté de faire comme eux. Mais lorsqu’il mesure que tout ceci entraine vers la ruine et que le Seigneur chasse l'image des impies comme un songe au sortir du sommeil, il se ressaisit. Il découvre qu'il s'est aigri pour rien, qu’inutilement il a souffert. pour se reconnaitre stupide comme une bête. parce qu'ïl avait oublié que le Seigneur était avec lui. Cette expérience du psalmiste peut guider le moine lorsqu'on lui commande des choses difficiles. Alors qu’il semble n'être rien à ses propres yeux. cette expérience du psalmiste peut l'aider à demeurer content et confiant dans le Seigneur qui est avec lui. En toute humilité. il peut se juger comme un ouvrier mauvais et indigne, ou encore comme un ver car à l'instar du psalmiste. il s'appuie non sur lui-même. mais sur le Seigneur. li n'est pas atteint en son estime de lui-même par l'image peu flatteuse de sa situation. Plus profondément. il se sait sous le regard de Dieu ... Nous mesurons le profond chemin que cela peut représenter: passer de l'amertume vis-à-vis de l'image peu avantageuse de nous-mêmes au contentement de ce qui est, parce qu'assuré d'être avec le Seigneur. Peut-être est-ce à une expérience semblable que nous sommes ou que nous serons appelés avec le vieillissement ou la maladie, alors notre corps nous lâche et qu'avec lui l'image de nous-mêmes part en lambeaux. Accueillir dans cette humiliation, un chemin d'humilité dans la confiance que le Seigneur est toujours avec nous. Il est là et il regarde le coeur. Que le Seigneur nous vienne en aide .