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4. Celui qui, aux vigiles nocturnes, arrivera après le gloria du psaume quatre-vingt-quatorze, – que nous voulons qu'on dise, pour cette raison, à une allure tout à fait traînante et lente, – celui-là ne se tiendra pas à sa place au chœur,
5. mais il se tiendra le dernier de tous ou à l'endroit séparé que l'abbé aura assigné aux négligents de son espèce pour qu'ils soient vus de lui et de tous,
6. jusqu'à ce que, l'œuvre de Dieu achevée, il fasse pénitence par une satisfaction publique.
7. Or si nous avons décidé qu'ils devaient se tenir au dernier rang ou à part, c'est pour qu'ils soient vus de tous et qu'ils se corrigent au moins sous l'effet de la honte.
8. Si d'ailleurs ils restent hors de l'oratoire, il s'en trouvera peut-être un qui se recouchera et dormira ou qui s'assiéra dehors à l'écart, passera son temps à bavarder et donnera occasion au malin.
9. Mieux vaut qu'ils entrent au dedans, de façon à ne pas tout perdre et à se corriger à l'avenir.
10. Aux heures du jour, celui qui n'arrivera pas à l'œuvre de Dieu après le verset et le gloria du premier psaume qu'on dit après le verset, ceux-là, suivant la loi que nous avons dite plus haut, se tiendront au dernier rang,
11. et ils ne se permettront pas de se joindre au chœur de ceux qui psalmodient, jusqu'à ce qu'ils aient satisfait, à moins que l'abbé n'en donne permission en accordant son pardon,
12. non sans que le coupable fasse satisfaction, cependant.
De ceux qui arrivent en retard à l’œuvre de Dieu ou à table
« De façon à se corriger à l’avenir » Benoît mer en place des règles pour le frère qui arrivent en retard se tenir le dernier à l’écart afin d’être vue de tous ne pas rejoindre le chœur pour la psalmodie faire satisfaction à la fin de l’office. Autant de petites pratiques contraignantes qui veulent aider chacun à se corriger…. Nous avons gardé à la Pierre Qui Vire une part de ces pratiques que je rappelle : quand on arrive alors que les tintements de la cloche sonnent ou ont sonné, on reste près de la porte et on attend pour rejoindre sa place que le verset d’entrée soit fini… Jusqu’à l’alléluia ! Et pas avant ! Il est intéressant de voir en effet que l’on a tendance à vouloir regagner sa place au plus vite. Comme pour se faufiler incognito, car aucun d’entre nous n’aime être à cette place à l’écart. Mais tel est son rôle : nous faire mesurer que notre retard nous place à l’écart de la communauté. Il nous met en décalage et nous n’aimons pas que cela soit visible, nous voudrions nous faufiler sans être vu.
Mais cette règle est là pour nous aider à ne pas nous habituer au retard… ne pas nous habituer à vivre à contre-temps de la communauté et plus profondément à contre-temps du temps de Dieu. Car nous sommes appelés à travers l’horaire communautaire à entrer dans ce temps offert par notre Dieu… le temps de la marche avec lui heure après heure, jour après jour. Année après année. Temps d’un long pèlerinage ponctué de ces moments de prières communautaires dans lesquels la communauté et l’Eglise met sa voix à celle de tous les hommes pour louer con créateur. Oui nos, offices en rompant le cour du temps en révèle en fait sa vrai profondeur : Il est temps de rencontre entre la créature et son Créateur, entre les fils et leur Père des Cieux. Alors, ne vivons plus à contre-temps. Ne manquons pas ces rendez-vous offerts tout au long des jours. (2009-06-10)
1. A l'heure de l'office divin, dès qu'on aura entendu le signal, on laissera tout ce qu'on avait en main et l'on accourra en toute hâte,
2. mais avec sérieux, pour ne pas donner matière à la dissipation.
3. Donc on ne préférera rien à l'œuvre de Dieu.
De ceux qui arrivent en retard à l’œuvre de Dieu ou à table
« On laissera tout ce qu’on avait en main… » L’obéissance à la cloche pour l’office n’est pas sans rappeler l’obéissance sans délai du Christ. C’est l’obéissance de ceux qui n’ont rien de plus cher que le Christ. Pourquoi est-ce si difficile de laisser tout, d’arrêter un travail ou une conversation pour aller à l’office ? Souvent la cloche nous place devant un dilemme : continuer ce que je fais afin de gagner du temps pour ne plus avoir à revenir ensuite ou bien m’arrêter pour me préparer à l’office et arrive dispos… Nous sommes alors devant un choix : poursuivre mes activités selon ma vision des choses, ou bien accepter de les suspendre pour aller prier. Je dirais, nous sommes sans cesse confrontés à refaire ce choix heure après heure, jour après jour. C’est le choix fondamental de notre vocation monastique la préférence pour la prière. La préférence pour le Christ. Ce choix est difficile parce qu’il nous demande de vivre sans cesse dans la lumière de la foi. Si nous travaillons, c’est pour le Christ, nous arrêtons de travailler pour la prière, c’est encore pour le Christ… Nous voulons mettre toute notre vie dans la lumière de notre foi au Christ… La tentation est de préférer rester la tête dans le guidon et de mener nos affaires-notre travail hors de la lumière du Christ. De ce point de vue, la rupture auxquelles nous invite l’office, sont une bonne occasion de nous renouveler dans notre foi au Christ, le maître de nos existences. Quand la cloche sonne et nous coupe dans notre élan, sachons-nous tourner vers le Christ pour lui rendre ce qui est inachevé… Sachons lui confier notre temps, nos activités pour qu’il les ordonne à l’avènement du Royaume. Chacun de nous est inséparablement au service de la communauté et au service du Royaume en vertu de notre engagement à la suite du Christ. La perspective du Royaume nous aide à lever les yeux vers le Christ et à nous arrêter pour la prière si nous sommes tentés de rester river sur notre travail… Le désir de servir la communauté nous entraîne à ne pas vivre en dilettante ou à notre compte…si nous sommes tentés de confondre prière avec évasion facile. (2009-06-03)
5. Si c'est un jour de jeûne, une fois les vêpres dites, après un petit intervalle on passera à la lecture des Conférences, comme nous l'avons dit ;
6. on lira quatre ou cinq feuillets ou autant que l'heure le permettra,
7. tandis que tous se rassemblent grâce à ce délai de la lecture, si l'un ou l'autre était pris par une fonction à lui confiée, –
8. donc une fois que tous seront réunis, ils célébreront complies, et en sortant des complies, on n'aura plus désormais la permission de dire quelque chose à quiconque, –
9. si quelqu'un est pris à transgresser cette règle du silence, il subira un châtiment sévère, ;-
10. sauf s'il survient une nécessité du fait des hôtes ou que l'abbé vienne à commander quelque chose à quelqu'un.
11. Cependant cela même devra se faire avec le plus grand sérieux et la réserve la plus digne.
Que personne ne parle après complies !Le silence que nous sommes appelés à vivre dans notre vie monastique a besoin de règles qui délimitent des temps des espaces, comme la règle du grand silence après complies. Mais le silence que nous recherchons est bien plus grand, que toutes les règles ne peuvent le dire…. Notre silence monastique est davantage un état ou une respiration qu’une discipline plus ou moins suivie.
Le chapitre entendu nous le fait pressentir. A la fois, il insiste sur la règle du silence absolu durant la nuit, et à la fois, il évoque les exceptions possibles et l’importance alors de maintenir « le plus grand sérieux et la réserve la plus digne ». Sérieux et réserve qualifient alors la qualité du silence recherché non comme une obligation mais comme une profonde respiration de l’être intérieur. C’est là, à cette qualité de silence qu’il nous faut tendre. Là, le dérangement nocturne et les nécessités de la charité ne troublent pas et se vivent dans la paix et l’accueil des personnes. Et cette qualité de silence rejoint notre quête spirituelle profonde. Car finalement, pourquoi tenons-nous au silence la nuit, mais aussi le jour ? Pourquoi voulons-nous garder notre à notre maison cette atmosphère de silence ? Pourquoi ne voulons-nous pas parler n’importe où et n’importe quand ? Parce que nous voulons cultiver en notre cœur la présence de Dieu, parce que nous désirons jour après jour nous laisser habiter et pacifier par son Esprit Saint. Le silence veut nous apprendre à devenir des hommes de prière pas seulement à l’office, mais tout au long de nos journées. Homme de la prière continuelle et du dialogue intérieur avec notre Dieu. Chacun habite le silence à sa façon… les uns prient le chapelet durant leur déplacement par exemple, d’autres redisent la prière de Jésus ou un verset des psaumes ou un passage d’Evangile ruminé dans la mouvance de la lectio… Oui n’ayons pas peur du silence dans nos journées, dans notre travail. Il s’offre à nous comme un bel espace de rencontre avec notre Dieu.(2009-05-29)
1. En tout temps les moines doivent cultiver le silence, mais surtout aux heures de la nuit.
2. Aussi en tout temps, qu'il y ait jeûne ou déjeuner, –
3. si c'est un temps où l'on déjeune, dès qu'ils se seront levés du souper, tous s'assiéront ensemble et quelqu'un lira les Conférences ou les Vies des Pères ou autre chose qui édifie les auditeurs,
4. mais pas l'Heptateuque ou les Rois, parce que ce ne serait pas bon pour les intelligences faibles d'entendre cette partie de l'Écriture à ce moment-là ; on les lira à d'autres moments.
Que personne ne parle après complies !
Nos frères de la sérigraphie vendent des cartes et des posters où l’on voit un jardinier avec la légende : « La bonne humeur, la joie et l’humour cela se cultive tous les jours ». C’est le potager de la bonne humeur. Aujourd’hui avec St Benoît ou pourrait résumer le passage entendu par « Le silence cela se cultive tous les jours ». Et le monastère est le potager du silence. Potager de la bonne humeur et potager du silence ? Dans les deux cas, il s’agit de cultiver, et apparemment de cultiver des plantes différentes : le silence pourrait sembler à première vue être éloigné de la bonne humeur et de la joie. Mais si on y regarde de plus près, on peut remarquer que si les plantes à cultiver sont différentes, les mauvaises herbes qu’il s’agit d’enlever peuvent être assez semblables. C’est mauvaises herbes s’appelleront mutisme, repli sur soi ; pas de vrai silence ni de joie dans le repli sur soi. Elles s’appelleront encore aigreur ou tristesse. Cultiver le silence et cultiver la joie et la bonne humeur nous renvoient certainement à une même purification profonde et à un même but : être vraiment ouvert disponible à Dieu et aux autres. Notre recherche du silence dans la vie monastique, si elle a des aspects à ascète et austères, ne peut que nous ouvrir à cette joie de la rencontre. Rencontre de Dieu dans une prière goûtée dans l’intime du cœur, dans la méditation de la Parole qui peut nourrir nos journées et nos activités. Mais aussi rencontre des frères quand l’occasion est donnée dans la joie d’être vraiment soi même… Non pour bavarder sur les autres mais partager un peu de soi même/
Oui cultivons ensemble la joie – la bonne humeur et le silence… Accueillons cette joie qui est tout autant éloignée de l’extérieure bavarde que de la dispersion. Recueillons-nous dans le silence qui ne ressemble ni à un triste renfermement sur soi ni à une distance qui méprise. Nous désirons en effet mieux accueillir dans notre silence joyeux « cet hôte imprévu qui vient de nuit nouer l’Alliance » Comme nous le chantons chaque soir du temps pascal. Que l’Esprit Saint nous apprenne à vivre en silence et cette joie. (2009-05-28)
1. De la sainte Pâque à la Pentecôte, les frères prendront leur repas à sexte et souperont le soir.
2. À partir de la Pentecôte, pendant tout l'été, si les moines n'ont pas de travaux agricoles et que les ardeurs excessives de l'été ne les incommodent pas, ils jeûneront jusqu'à none les mercredis et vendredis.
3. Les autres jours ils déjeuneront à sexte.
4. S'ils ont du travail aux champs ou si la chaleur de l'été est excessive, il faudra maintenir le déjeuner à sexte, et ce sera à l'abbé d'y pourvoir.
5. Et il équilibrera et réglera toute chose en sorte que les âmes se sauvent et que les frères fassent ce qu'ils font sans murmure fondé.
6. Des Ides de septembre au début du carême, le repas sera toujours à none.
7. En carême, jusqu'à Pâques, le repas sera à vêpres.
8. Cependant les vêpres seront célébrées de telle façon que l'on n'ait pas besoin au repas de la lueur d'une lampe, mais que tout s'achève à la lumière du jour.
9. Et de même en tout temps, l'heure du souper ou du repas sera suffisamment tôt pour que tout se fasse à la lumière.
A quelles heures doit-on prendre les repas ?
Cette façon qu’à Benoît de présenter les heures de repas en fonction des temps liturgiques est un précieux témoin pour nous d’une intelligence de la vie quotidienne ancrée dans la vision plus large de l’année chrétienne. C’est cette large perspective de l’année chrétienne qui donne sens à la vie tout court des moines, et cela jusque dans les détails des repas. S’agit-il d’un détail ? Pour les moines d’alors, sûrement pas. Comme les orthodoxes aujourd’hui, Mgr Séraphin nous le disait, la dimension du jeûne est plus qu’une simple observance, elle est une manière de vivre assez permanente. On pourrait dire la vie du moine était une vie dans le jeûne ; le jeûne inscrivant dans le corps, le désir de Dieu et l’attente de la Venue du Christ.
Le jeûne ne nous est plus aussi aisé ou familier aujourd’hui ? Il n’est plus pour les chrétiens d’occident en général et pour nous moines, un repère aussi clair, ce mode de vivre le temps chrétien dans l’attente de l’Epoux. A la Pierre qui Vire, se serai tenté de penser que nos Vigiles jouent ce rôle similaire en inscrivant dans notre rythme corporel cette ouverture à un Autre, cette attention qui décentre… L’office en général joue aussi ce rôle en nous décentrant de nous-même. Dans notre corps, nous pouvons mesurer l’impact de ces rythmes de la nuit et du jour… A certains jours il peut y avoir une tension, qui se traduit par une fatigue un énervement ou une tristesse. Il faut reconnaître le rythme est rude parfois compte tenu des impératifs de travail ou des aléas de la vie faite de conflits… Notre corps est le 1er souvent à en donner des signes d’alerte. Sachons écouter… Savoir écouter ne signifie pas s’écouter et se la couler douce… Non, je crois quand notre corps nous donne des signaux de fatigue, c’est un appel à reconsidérer nos priorités, et aussi notre manière d’aborder les choses. Ma priorité est-elle la vie que je reçois de la communauté ou bien d’autres priorités que je me donne moi-même viennent-elles ajouter du poids ? Entre priorité reçue de notre vie monastique et priorité que je me donne. Il y a un discernement à faire…. Et si la charge reçue du service de la communauté est trop importante, il faut pouvoir en parler. Autre point : comment aborder les choses ? Est-ce que je fais les choses en fonçant tête baissée pour abattre le plus de travail possible ou est-ce que je les fais dans un esprit de foi et désireux d’être attentif à Dieu et à mes frères ? Entre les deux natures, le risque d’épuisement et dessèchement n’est pas le même… Il nous faut aujourd’hui plus qu’hier, ensemble et personnellement, soignez notre manière de vivre pour nous donner vraiment, mais sans jamais perdre de vue celui que l’on veut servir et que l’on attend le Christ.(2009-05-27)
5. Si les conditions locales et le travail ou la chaleur de l'été font qu'il en faut davantage, le supérieur en aura le pouvoir, en veillant toujours à ne pas laisser survenir la satiété ou l'ivresse.
6. Nous lisons, il est vrai, que « le vin n'est absolument pas fait pour les moines », mais puisqu'il est impossible d'en convaincre les moines de notre temps, accordons-nous du moins à ne pas boire jusqu'à satiété, mais plus sobrement,
7. puisque « le vin fait apostasier même les sages. »
8. Quand les conditions locales feront que l'on ne puisse même pas trouver la quantité indiquée ci-dessus, mais beaucoup moins ou rien du tout, les habitants du lieu béniront Dieu et ne murmureront pas.
9. Car nous recommandons ceci avant tout : qu'on s'abstienne de murmurer.
De la quantité de boisson.
« Les habitants du lieu béniront Dieu » Quand on ne pourra se procurer du vin. Et « ne murmureront pas »
Bénir Dieu ou murmurer ? Bénir Dieu ou nous plaindre et geindre sur manque ? La vie quotidienne nous donne de vivre de bien des situations qui nous placent devant ce dilemme. Face à une contrariété, ici manque de vin, face à événement qui ne se passe pas comme on le voudrait, comment réagissons-nous ? St Benoît nous invite à prendre de la hauteur en nous tournant vers notre Dieu… en le bénissant ? Nous le présentons cette attitude qui ne nous est pas spontanée, ne se commande pas aisément. On voudrait bien réagir comme cela, mais souvent c’est le dépit ou la tristesse qui l’emporte. Au lieu d’être trouvé libre par rapport aux choses (ici le vin) ou aux événements, on est pris en flagrant délit -pourrait-on dire- d’attachement extrême ou de volonté de puissance… On aimerait tant tout maîtriser et que les choses aillent comme on le voudrait. Mais non, la réalité se dérobe et nous laisse seul avec nos illusions.
Que signifie ici « Bénir Dieu » ? Certainement pas de se voiler la face sur l’âpreté de la réalité, mais plutôt apprendre à la regarder autrement, dans le regard de Dieu. Trop souvent nos yeux sont fixés sur nos seuls intérêts. La réalité équivaut à ce que j’en perçois et du coup à ce que j’en fais. Mais n’est-ce pas se mettre à la place de Dieu ? N’est-ce pas me poser inconsciemment comme le seul maître à bord ? Bénir Dieu, c’est redonner à Dieu le manche du gouvernail, le commandement de ma vie. C’est lui qui fonde nos existences. Depuis les premiers mots de l’Alliance scellée avec les hommes. Il désire nous apprendre à vivre notre vie dans la lumière de sa présence. Une présence à nos côtés qui n’enlève pas les difficultés, mais qui veut nous aider à les assumer. Tout vient de Dieu et tout retourner à Dieu. Entre les deux temps de notre existence humaine, Dieu est là qui marche avec nous dans la foi, nous apprenons à le reconnaître et jour après jour, nous pouvons alors découvrir la densité de nos vies humaines. « Vraiment Dieu est en ce lieu, et moi je ne le savais pas » Disait déjà Jacob (Gn 28,16) (2009-05-26)
1. Nous croyons qu'il suffit à toutes les tables pour le repas quotidien, qu'il ait lieu à sexte ou à none, de deux plats cuits, en raison des diverses infirmités,
2. pour que celui qui ne peut manger de l'un, fasse son repas de l'autre.
3. Donc deux plats cuits suffiront à tous les frères ; et s'il y a moyen d'avoir des fruits ou des légumes tendres, on en ajoutera un troisième.
4. Une livre de pain bien pesée suffira pour la journée, qu'il y ait un seul repas ou déjeuner et souper.
5. Si l'on doit souper, le cellérier gardera le tiers de cette même livre pour le rendre au souper.
De la quantité de nourriture.
Je ne sais pas s’il vous est arrivé en regardant des vaches dans un pré, ou des moutons, de vous faire cette réflexion : C ‘est étonnant de voir qu’elles passent la plupart de leur temps à manger…Tout le jour se passe à brouter et à ruminer, quel drôle de vie ! Mais ainsi en est-il peut être de tous les animaux. Et nous les humains ? Il me semble que toute l’éducation humaine tout notre humanisation consiste au contraire à bien déterminer les temps où l’on mange pour les distinguer des autres temps où l’on travaille, où l’on instruit, où l’on s’adonne à tout autres activités humaines. E la différence des animaux, nous ne sommes pas faits pour « Brouter » toute la journée. Et cette différence qui est notre fierté, il nous faut cependant la cultiver pour bien la préserver. Nous savons aujourd’hui le risque, et pour la santé et pour l’éducation, de cette culture qui veut que l’on grignote à tout moment. Les petits enfants américains notamment font les frais de cette dérive en étant anormalement obèses et en perdant des repères temporels indispensables à leurs processus d’humanisation.
Quand St benoît insiste dans ce chapitre sur le « Il suffit » pour déterminer la ration de nourriture, il s’inscrit dans ces processus d’humanisation. En effet il veut que les moines soient toujours plus libres par rapport à la nourriture et à sa quantité. Le « Il suffit » est là pour donner une mesure commune à tous les frères, afin de les aider ensemble à progresser vers plus d’humanité. Nous pouvons nous réjouir d’avoir cette norme commune pour notre nourriture et ne pas être laissée à nos envies passagères. Certes cela peut être contraignant certains jours. Mais sachons alors tirer profit spirituellement des limites imposées. Ces limites nous alertent sur le danger de n’obéir qu’à nos pulsions et elles nous aident au contraire à écouter notre désir profond qui a faim d’une autre nourriture. « L’homme ne vit pas seulement de pain mais de toute parole qui sort de la bouche de Dieu ». Oui, réjouissons-nous d’être ainsi éduqués par notre vie monastique et toujours plus préférer les nourritures de la Parole à celle de la table. Notre désir profond et nos cœurs ont faim de cette Parole. (2009-05-19)
1. « Chacun tient de Dieu un don particulier, l'un comme ceci, l'autre comme cela. »
2. Aussi est-ce avec quelques scrupules que nous déterminons la quantité d'aliments pour les autres.
3. Cependant, eu égard à l'infirmité des faibles, nous croyons qu'il suffit d'une hémine de vin par tête et par jour.
4. Mais ceux à qui Dieu donne la force de s'en passer, qu'ils sachent qu'ils auront une récompense particulière.
De la quantité de boisson.
« Mais, ceux à qui Dieu donne la force de s’en passer qu’ils sachent qu’ils auront une récompense particulière » Pourquoi se passer de vin ou de toutes ces choses qui nous procurent un réel plaisir ? Pourquoi y renoncer alors que cela n’est pas mauvais en soi et que cela nous donne du plaisir ? Pourra obtenir une « récompense particulière », répond Benoît… sous-entendu une récompense supérieure. On a déjà rencontré cette notion de « récompense plus grande » pour le service mutuel que des frères rendent les uns aux autres. Récompense équivalait alors à l’accroissement de la charité qui élargit le cœur. La charité qui dilate (RB 35,2). Benoît est cons désireux que ces moines soient en quête de ces récompenses plus grandes. S’il pense certainement à la récompense dans la vie éternelle, je crois que nous pourrons aussi l’entendre d’une récompense qui signifie, déjà sur cette terre, un supplément de vie, un supplément de qualité.
Oui, Benoît nous invite à chercher toujours loin et plus profond. Il désire que nous goûtions un bonheur qui fait éclater sans cesse les limites de nos plaisirs immédiats. Notre cœur a soif d’un bonheur immense. Nos plaisirs humains ne sont que des signes de cette joie à laquelle nous aspirons. Ils sont là pour aiguiser notre désir et l’entraîner à chercher plus loin la source se son bonheur. Et nos plaisirs humains se révèleront toujours une impasse décevante si nous les prenons pour la fin de notre bonheur, si nous nous arrêtons à eux. C’est là que nous pourrons comprendre « La récompense particulière » que nous promet Benoît. Cette récompense est dans la capacité de dépasser nos plaisirs immédiats, voire d’y renoncer comme ici le vin, parce que notre cœur a perçu que son bonheur ne dépend pas de ces plaisirs sensibles. Les nombreux renoncements que la vie monastique nous invite à vivre ne sont pas à comprendre autrement. Nous choisissons de réordonner tous les plaisirs humains (sexualité, loisirs, nourriture, relations.etc.) en renonçant à bien des possibilités, pour tendre à cette joie offerte en creux… Oui, les moines sont les hommes du creux, de l’espace intérieur laissé libre, toujours ouvert à l’habitation de l’Esprit Saint… Lui, l’Amour de Dieu dans nos cœurs, veut nous entraîner à aimer. Aimer en étant moins préoccupé de retenir ou d’amasser, mais davantage en nous donnant pour notre plus grande joie. (2009-05-09)
1. Bien que la nature humaine incline par elle-même à l'indulgence pour ces âges, celui des vieillards et celui des enfants, l'autorité de la règle doit cependant y pourvoir.
2. On aura toujours égard à leur faiblesse et on ne les astreindra nullement aux rigueurs de la règle en matière d'aliments,
3. mais on aura pour eux de tendres égards et ils devanceront les heures réglementaires.
Des vieillards et des enfants
« Bien que la nature humaine incline à l’indulgence pour les âges.. » Rien d’étonnant que la règle de Saint Benoît consacre un chapitre aux vieillards et aux enfants. Car déjà la nature humaine assez spontanément est attentive à ces deux périodes riches de l’existence humaine. Deux périodes éloignés dans le temps et pourtant si proches par bien des aspects. C’est le paradoxe de notre existence humaine de rapprocher ainsi ces deux âges de l’éclosion de la vie et son affaiblissement progressif. Dans l’un et l’autre cas, ils vivent une commune fragilité et d’une dépendance totale à l’égard d’autrui pour leurs besoins les plus élémentaires… Mystère de la vie qui commence et finit sous le signe d’une extrême vulnérabilité... « Qu’est-ce que l’homme ? A t-on envie de dire. Et quelle pédagogie porte en elle-même une existence humaine ? Quel est le sens de cette trajectoire qui nous fait vivre de la totale dépendance inconsciente et inconsciente, à la progressive autonomie, pour entrer dans la maturité responsable de soi-même, des autres et du monde, pour peu à peu vivre la perte de ses facultés jusqu’à la dépendance au bon vouloir d’autrui … ?
De la dépendance inconsciente à la dépendance consentie, en passant par l’indépendance responsable de tous. Chacun de nous vit ce beau processus d’humanisation et pour les plus anciens d’entre-nous cette mystérieuse entrée dans la perte progressive de ces facultés… Perte qui est une épreuve. Est-ce une perte qui m’avilit à mes propres yeux ? Est-ce une perte que je vis dégradante ? Ou bien est-ce une perte qui m’entraîne à un plus grand consentement dans la confiance ? Questions fortes et auxquelles il n’est pas possible de répondre pour les autres. Questions qui invitent à un travail intérieur profond et vital. Notre vie monastique ne nous exempte pas de ce travail intérieur lié à l’âge, mais al pédagogie monastique voudrait être en synergie avec cette pédagogie de l’existence, en nous apprenant le dessaisissement de nous-même ? Il s’agit de grandir dans la confiance filiale, comme des fils dans les mains de Notre Père des Cieux, sous la vigilance attentive de nos frères. Heureux sommes-nous de vivre dans une communauté, de plusieurs générations. Ensemble nous apprenons cette pédagogie de la vie vers une plus grande confiance Ensemble nous nous entraidons. (09/05/09)
6. S'il arrive que le travail devienne plus intense, l'abbé aura tout pouvoir pour ajouter quelque chose, si c'est utile,
7. en évitant avant tout la goinfrerie et que jamais l'indigestion ne survienne à un moine,
8. car rien n'est si contraire à tout chrétien que la goinfrerie,
9. comme le dit Notre Seigneur : « Prenez garde que la goinfrerie ne vous appesantisse le cœur. »
10. Quant aux enfants d'âge tendre, on ne gardera pas pour eux la même mesure, mais une moindre que pour les plus âgés, en gardant en tout la sobriété.
11. Quant à la viande des quadrupèdes, tous s'abstiendront absolument d'en manger, sauf les malades très affaiblis.
De la quantité de nourriture
« Prenez garde que la goinfrerie ne vous appesantisse le cœur » Sans le dire Benoît présuppose que l’état normal du moine c’est d’avoir le cœur léger, un cœur libre, un cœur limpide… Tout ce qui vient contrarier cet état est au mieux à discerner pour savoir, quelle place lui donner, au pire c’est à rejeter. La goinfrerie fait ainsi partie des débordements à proscrire. Goinfrerie = mal au foie mal à la tête, digestion difficile… les symptômes sont si évidents que l’on peut facilement veiller à ne pas s’y laisser prendre d’autres fois… même si… Mais il y a d’autres points relatifs à l’alimentation qui peuvent venir alourdir et encombrer notre cœur, et cela de façon plus insidieuse. Par exemple une préoccupation exaspérée de ce que l’on mange ou de santé. Face à cette préoccupation, cultiver la confiance en ces frères et ne Dieu et certainement le meilleur antidote. Des frères préparent des régimes pour prendre en compte les soucis de santé. Pour les autres, comme le prévoie la règle, nous avons plusieurs plats qui nous permettent de prendre davantage de l’un et moins de l’autre, si on éprouve une gêne. Evitons les exigences trop singulières ou des approvisionnements parallèles. Notre table commune est une école de confiance et d’abandon. De lâcher prise. En cela, elle est un véritable exercice spirituel que nous pouvons accomplir jour après jour par amour du Christ. Une autre préoccupation insidieuse peut appesantir le cœur, la peur de manquer. Du coup on fait des réserves ou se sert largement au risque d’en laisser moins aux autres. Là encore, ne nous laissons pas de gagner par cette peur de manquer. Résistons-lui ? Je pense aux libres services où comme notre coutume le précise, nous pouvons apprendre cette liberté de cœur en en faisant pas de réserves de dessert notamment. Oui exerçons-nous à la liberté, ne soyons pas esclave de nos peurs ou de nos appétits. Sachons vivre nos repas dans cette vigilance intérieure…nous découvrirons des joies bien plus grandes. « Tu mets dans mon cœur plus de joie que toutes leurs vendanges et leurs moissons ». (2009-05-08)