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1. A la porte du monastère on placera un vieillard sage, qui sache recevoir et donner une réponse, et dont la maturité ne le laisse pas courir de tous côtés.
2. Ce portier doit avoir son logement près de la porte, afin que les visiteurs le trouvent toujours présent pour leur répondre.
3. Et aussitôt que quelqu'un frappe ou qu'un pauvre appelle, il répondra Deo gratias ou Benedic ,
4. et avec toute la douceur de la crainte de Dieu, il se hâtera de répondre avec la ferveur de la charité.
5. Si ce portier a besoin d'aide, il recevra un frère plus jeune.
6. Quant au monastère, il doit être, si possible, construit de telle façon que tout le nécessaire, c'est-à-dire l'eau, le moulin, le jardin et les divers métiers, s'exerce à l'intérieur du monastère,
7. de sorte que les moines ne soient pas obligés de courir au-dehors de tous les côtés, car ce n'est pas bon du tout pour leurs âmes.
8. Nous voulons que cette règle soit lue souvent en communauté, pour qu'aucun frère ne s'excuse sur son ignorance.
« Que les moines ne soient pas obligés de courir au dehors de tous les côtés »
Dans quelques jours, au Bec Hellouin, nous nous retrouverons entre abbés français, et une de nos heures de discussion sera autour de notre gestion d’Internet dans les monastères. Informé de cela, une journaliste de la Croix a interrogé quelques abbés. Elle m’a appelé par téléphone sur notre manière d’intégrer ce nouveau média. Elle en fera un article. Une de ces questions portait sur la clôture : « Internet ne fait-il pas reculer ou se déplacer les frontières de la clôture ? » Il est vrai Internet est un outil assez extraordinaire qui vient bousculer notre conception de la clôture… déjà avant lui le téléphone. Notre clôture devient plus poreuse, plus perméable aux informations de toute sorte. Ce n’est pas nous qui allons à l’extérieur, mais c’est le monde qui vient à nous. Cet état de fait est une conséquence de l’évolution rapide de notre société dans laquelle nous sommes pris et dont nous bénéficions aussi. Si autrefois, un mur suffisait pour définir le périmètre à l’intérieur duquel vivre notre vie monastique, aujourd’hui ce n’est plus le cas. Le périmètre de notre vie monastique doit faire l’objet d’une attention plus continue. Il est sans cesse à réexaminer ensemble et personnellement. Avec Internet, notre périmètre de vie peut s’élargir d’un seul coup jusqu’au bout du monde et de la à tout moment. Si nous voulons chercher Dieu dans une vraie profondeur, celle qui nous rejoint dans l’intime du cœur, nous savons qu’il n’est pas possible d’être toujours à l’affût des dernières informations ou des dernières nouveautés. Cette avidité pour les événements immédiats ne peut que nous décevoir et nous laisser vide.
C’est pour cela que nous nous sommes donnés des repères dans notre usage d’Internet : celui de l’horaire fermeture entre 20h30 et 8h, celui de la manière : on ne va sur Internet que dans un but précis pour chercher quelque chose .. on ne va sur Internet pour surfer au risque de divaguer… et enfin, on ne va pas sur Internet pour voir tel émission ou film. Comme pour la Télévision nous faisons le choix de visionner des films ou émissions en groupe ou en communauté, non seul, pour pouvoir en parler ensuite.
Ces règles invitent chacun à une vraie discipline. Elles veulent nous aider à demeurer libres pour aller au bout de notre recherche spirituelle. Si nous les moines, nous fuyons ou nous avons peur du silence ou de la solitude, du retrait pour la prière et la recherche de Dieu, qui le fera ? Le Seigneur nous attend à l’intime de nous-même. N’allons pas par Internet « Courir au dehors de tous les côtés » (2009-09-30)
1. Trop souvent il est arrivé que l'ordination d'un prévôt engendre de graves conflits dans les monastères.
2. Il en est en effet qui s'enflent d'un méchant esprit d'orgueil et qui, estimant être de seconds abbés, usurpent le pouvoir, entretiennent des conflits et mettent la dissension dans les communautés,
3. surtout dans les lieux où le prévôt reçoit l'ordination du même évêque et des mêmes abbés qui ordonnent l'abbé.
4. Combien cela est absurde, il est facile de s'en rendre compte : dès le début, dès son ordination, on lui donne matière à s'enorgueillir,
5. ses pensées lui suggérant qu'il est soustrait à l'autorité de son abbé,
6. puisque « toi aussi, tu as été ordonné par les mêmes qui ont ordonné l'abbé. ;»
7. Il en résulte envies, disputes, médisances, rivalités, dissensions, destitutions,
8. et ainsi, abbé et prévôt étant de sentiments opposés, il est inévitable que leurs âmes soient en danger, tant que durent ces dissensions,
9. et leurs subordonnés courent à leur perte, du fait qu'ils flattent leurs partisans.
10. La responsabilité de ce dangereux fléau pèse au premier chef sur ceux qui se sont faits les auteurs d'un tel désordre.
« De graves conflits dans les monastères ». Et oui, cela existe malheureusement. Ici on peut entendre la question que pose St Jacques dans son épître « d’où viennent et les guerres, d’où viennent les conflits entre vous ? » (Jc 4,1) Et il répond : « N’est ce pas justement de tous ces instincts qui mènent leur combat en nous-mêmes ? » Mystérieusement la racine de nos conflits ne se trouvent pas d’abord à l’extérieur, mais à l’intérieur dans notre propre conflit interne. Cette constatation nous est toujours difficile à accepter. C’est tellement plus facile de mettre la faute sur le dos des autres, et notre adversaire en particulier. Dire ceci, c’est ouvrir une première porte dans la résolution du conflit : savoir reconnaître ma part dans ce conflit, le poids que je fais peser, est la base de tout progrès vers la réconciliation.
Ensuite, si on veut avancer, il est important de parler avec une tierce personne. Peut-être dans un premier temps pour se décharger de tout son ressenti. Mais ce premier temps de suffit pas ? Un deuxième temps appellera une parole qui sache essayer de voir pourquoi j’ai agi ou réagi comme cela, pourquoi je m’emporte ou pourquoi se suis terrorisé. Poser la question, chercher à comprendre sans tomber dans le piège de l’autojustification est un gage énorme de progrès. Progrès pour apprendre à gérer ce conflit interne qui m’habite et me fragilise. Gérer ne veut pas dire nécessairement résoudre ? Mais gérer veut dire accepter de regarder en face, pour assumer et essayer d’avancer. Nous touchons là un vrai travail humain et spirituel qu’aucun de nous ne peut esquiver. Le conflit extérieur peut servir de révélateur et nous permettre finalement d’aller plus en profondeur, dans une meilleure connaissance de nous-même. La vie monastique nous offre dans l’ouverture du cœur au Père Spirituel un précieux instrument : sans attendre les conflits, nous pouvons nous ouvrir régulièrement de nos combats et de nos conflits intérieurs …. pour mieux les comprendre… et les présenter au Christ. Lui qui veut nous guérir. (2009-09-24)
16. Il ne sera pas agité et inquiet, il ne sera pas excessif et obstiné, il ne sera pas jaloux et soupçonneux à l'excès, car il ne serait jamais en repos.
17. Dans les ordres qu'il donne, il sera prévoyant et réfléchi, et que l'œuvre qu'il commande soit selon Dieu ou selon le siècle, il usera de discrétion et de mesure,
18. en songeant à la discrétion de saint Jacob, qui disait : « Si je fais peiner davantage mes troupeaux à marcher, ils mourront tous en un jour. »
19. Prenant garde à ce texte et aux autres sur la discrétion, mère des vertus, il mettra de la mesure en tout, en sorte que les forts aient à désirer et que les faibles n'aient pas à prendre la fuite.
20. Et surtout, qu'il garde en tous ses points la présente règle,
21. afin qu'après avoir bien servi, il entende le Seigneur lui dire, comme au bon serviteur qui distribua en son temps le froment à ses compagnons de service :
22. « En vérité, je vous le dis, il l'établira sur tous ses biens. »
« Que les forts aient à désirer et que les faibles n’aient pas à prendre la fuite »
Une fois un frère me disait en souriant à propos de recommandations concrètes que j’avais donné sur notre vie monastique : « Tout cela, je l’ai fait, que me manque-t-il encore ? » Que les forts aient à désirer. Peut-être certains frères qui ont bien intégré notre vie et ses coutumes reprendraient-ils cette réflexion du frère. Je dirais tout d’abord heureux sont-ils pour deux raisons : parce qu’ils sont entrés dans ce qui est proposé et l’on fait-leur.. mais surtout heureux sont-ils car ils désirent encore progresser et ne pas s’en tenir à une simple observance de pratiques et de rites. Car notre vie veut nous ouvrir d’autres espaces de recherche et d’approfondissement. La vie régulière, ses horaires, ses coutumes sont les structures de notre maison, ses murs son toit. Ils nous assurent une stabilité et une certaine aisance. Mais il faut encore veiller à l’aménagement intérieur de la maison… et là le champs d’action est vaste. Car il s’agit de préparer notre maison, notre cœur à vivre une relation toujours plus amicale et familière avec le Christ et avec tous nos frères. Que le Christ, que nos frères soient à l’aise chez nous avec nous. On sait aujourd’hui le soin que les gens apportent à peaufiner leur intérieur d’habitation. Mettons-nous le même soin à embellir notre être intérieur ? Là l’attention, voire le combat est de tous les jours. Tous les jours, il nous faut faire le ménage par rapport aux pensées de jugement, par rapport aux critiques… mais aussi plus subtil par rapport aux pensées de justification ou de tristesse, voire de découragement. Ces pensées sont comme la poussière qui se dépose insensiblement et peu à peu encrasse tout. Mais surtout dans notre être intérieur, il nous faut toujours garder une place pour le Christ par la prière, par l’attention à sa parole. C’est lui, l’hôte que nous désirons honorer, connaître et aimer toujours plus. Si notre maison a un toit qui fuit… si notre intérieur est encombré de pensées pesantes ou acides nous peinerons à lui faire une place. Heureusement, il sait aussi s’inviter chez nous car il aime les pauvres et les pécheurs. Qu’il nous prenne en pitié par son amour. (2009-09-23)
11. « Qu'il haïsse les vices et qu'il aime les frères. »
12. Dans ses réprimandes même, qu'il agisse prudemment et « ;sans rien de trop », de peur qu'en voulant trop gratter la rouille, il ne brise le vase.
13. Il ne perdra jamais de vue sa propre fragilité, et se souviendra « ;qu'il ne faut pas écraser le roseau cassé. »
14. Nous ne voulons pas dire par là qu'il permettra aux vices de se développer, mais qu'il les retranchera prudemment et avec charité, suivant qu'il lui semblera opportun pour chaque individu, comme nous l'avons déjà dit.
15. Et il s'efforcera « d'être plus aimé que redouté ».
Ces quelques lignes pourraient être appelées : « Traite d’orfèvrerie spirituelle » Car tout y est dit avec délicatesse et finesse, profondeur et force en même temps. A travers elles, St Benoît nous fait repeindre le mystère de nos vies humaines et la grandeur de l’évangile. Mystère de nos vies humaines qui sont atteintes par le mal, comme le fer est atteint par la rouille. Il en découle une fragilité qui appelle action efficace pour ne pas laisser la rouille ronger tout le fer, et en même temps attention délicate pour ne pas briser les êtres. Car chacun est plus grand que ses vices ou ses errances. Tous les frères sont dignes d’un grand amour. « Qu’il haïsse les vices et qu’il aime les frères » Je disais mystère de nos vices humains et grandeur de l’évangile. En effet l’abbé est invité à être au service de la Bonne Nouvelle apportée par la Christ en aidant les frères à se libérer de leur mal. Comme le Christ Serviteur, et en son Nom, il doit établir « fidèlement le droit » (Isaïe 42,3) « En veillant à ne pas écraser le roseau cassé » (Mt 12, 20) Notre vie monastique est ainsi la poursuite de l’œuvre de guérison et de libération instaurée par le Christ. Pour chacun, un chemin de Salut est offert, une opportunité de guérir est donnée. Dans cette œuvre de discernement pour aider chacun à se libérer du joug du mal et des vices, la Prudence et la Charité sont les deux instruments que l’abbé doit sans cesse garder à cœur en se souvenant aussi de sa propre fragilité. Ainsi à travers tous ses moyens humains et spirituels le Christ poursuit son œuvre pour redonner santé et force à chacun de nous. Le grand orfèvre, c’est lui… et l’abbé un modeste instrument en ses mains, ainsi que tous les frères qui savent allier écoute et parole de réconfort, parole de discernement et présence attentive auprès des autres. Que l’Esprit Saint nous vienne en aide par sa lumière. (2009-09-19)
11. Aussi nous semble-t-il opportun, pour la sauvegarde de la paix et de la charité, que l'abbé règle à son gré l'organisation de son monastère.
12. Si faire se peut, c'est par des doyens que l'on organisera, comme nous l'avons établi antérieurement, tous les services du monastère, selon que l'abbé l'établira.
13. Ainsi, plusieurs en étant chargés, un seul ne s'enorgueillira pas.
14. Si le lieu l'exige ou si la communauté le demande raisonnablement avec humilité et que l'abbé le juge opportun,
15. l'abbé choisira qui il voudra avec le conseil des frères qui craignent Dieu, et il se l'ordonnera lui-même comme prévôt.
Hier je soulignais un élément de base dans la résolution des conflits : savoir regarder, assumer et gérer ses propres conflits internes qui ont toujours des interactions dans les conflits avec les frères.. qu’on s’en rende compte ou non. Plus nous chercherons à pacifier notre cœur, nos pensées et nos désirs, plus nous serons des hommes pacifiant autour de nous. C’est le combat premier du moine : « Poursuis la paix, recherche là … »
Ce matin, Benoît indique une autre piste de travail, plus directement adressée à l’abbé : elle regarde l’organisation du monastère. Cernant le prévôt, il s’agit d’éviter qu’il soit institué par l’abbé lui-même, pour éviter jalousie ou rivalité, s’il est institué par l’évêque comme l’abbé. Mais de façon plus générale, Benoît suggère un partage des responsabilités, en particulier ici avec les doyens. » Plusieurs en étant chargés, un seul ne s’enorgueillira pas … » C’est une grâce de notre vie cénobitique que de nous rendre tous responsable de la vie au monastère. Ensemble, nous portons la charge, le mumus » qui nous permet de faire communauté. Et le « ensemble » n’est jamais acquis uns fois pour toute. Les plus rapides doivent accepter de ralentir le pas pour attendre les plus lents et les plus brillants accepter de chercher avec le plus simple.
Je voudrais insister sur ce point du « faire ensemble » Il n’est pas rare quand on cherche à organiser quelque chose d’être bloqué parce que des frères refusent de collaborer ensemble ou parce que si un tel est là, un autre ne viendra pas.. etc. Ces genres de réactions stérilisent la vie en évitant d’affronter la réalité. Certes il y a parfois des situations relationnelles trop difficiles qu’il incombe à l’abbé d’anticiper. Mais il revient aussi à chaque frère de prendre sa part du poids, ou sa part de travail pour collaborer avec des frères avec lesquels il ne se sent pas immédiatement à l’aise. On pourrait ici paraphraser la parole du Christ : « Si vous ne collaborez qu’avec des frères que vous aimez bien, qu’elle récompense pouvez vous attendre ? Les gens du monde n’en font-ils pas autant ? La vie fraternelle est vraiment fraternelle quand nous savons dépasser nos inimitiés et nos susceptibilités… et vivre vraiment comme des fils du même Père. (2009-09-19)
7. Quant à l'abbé qui a été ordonné, il songera toujours à la charge qu'il a reçue et à celui auquel il devra « ;rendre compte de sa gestion ;».
8. Il saura qu'il doit plutôt « servir que régir ».
9. Il doit donc être « savant » dans la loi divine, pour savoir et avoir d'où « tirer le neuf et l'ancien », chaste, sobre, miséricordieux.
10. Et que « la miséricorde l'emporte toujours sur le jugement », afin qu'il obtienne pour lui le même traitement.
« Plutôt servir que régir » La charge de l’abbé comme un service. Cela est une constante dans la Règle et notamment dans ce chapitre. Benoît y insiste fortement dans la ligne de l’Evangile. Il est intéressant de voir que dans ce chapitre il se réfère à deux paraboles : la première évoquée ce matin par la mention « il devra rendre compte de sa gestion » renvoie à celle de l’intendant infidèle qui fut dénoncé pour avoir dilapidé les biens de son maître (Lc 16,1-8) La deuxième qui conclue ce chapitre renvoie à la parabole du serviteur que le maître à son retour trouve fidèle à son service de donner la nourriture en temps voulu aux gens de sa maison (Mt 24,45-51) Deux figures de serviteur : la première laisse entendre que le serviteur peut dilapider les biens de son maître, et la seconde montre que sa fidélité sera récompensée par le maître. Appliquée à l’abbé, ces figures viennent sans concession remettre devant ses yeux l’importance de la charge à lui confiée. L’abbé a la charge des gens et des biens de la maison du maître. Il doit administrer de telle façon que le maître à son retour ne soit pas lésé, ni fâché de mauvais traitements que l’abbé aurait infligés à ses frères. Ce contexte évangélique pour considérer la fonction de l’abbé est heureux. Il invite l’abbé et ses frères à porter leurs regards sans cesse vers le Christ. C’est lui que nous désirons servir, chacun à notre poste. L’abbé qui administre la vie du monastère n’est rien sans la collaboration des frères. Car ensemble, nous cherchons à demeurer en état de veille pour le jour ou il viendra…. veille dans la prière, veille dans la charité, veille dans la simplicité de vie pour qu’apparaisse toujours plus significative notre attente du Christ… et que brille notre Espérance dans un monde qui en manque cruellement. Ainsi chacun à notre place, nous sommes des éveilleurs, des témoins de l’Espérance, pour l’œuvre que Dieu veut mener à son accomplissement. Laissons cette Espérance éclairer notre quotidien qui n’a pas sa fin en lui-même. (2009-09-18)
1. Dans l'ordination de l'abbé, on prendra toujours pour règle d'instituer celui que se sera choisi toute la communauté unanime dans la crainte de Dieu, ou même une partie de la communauté, si petite soit-elle, en vertu d'un jugement plus sain.
2. C'est pour le mérite de sa vie et la sagesse de son enseignement que l'on choisira celui qui doit être ordonné, même s'il est le dernier par le rang dans la communauté.
3. Si même toute la communauté choisissait d'un commun accord une personne complice de ses vices, – ;à Dieu ne plaise ;! ;–
4. et que ces vices viennent tant soit peu à la connaissance de l'évêque au diocèse duquel appartient ce lieu et des abbés ou des chrétiens du voisinage,
5. ils empêcheront la conspiration des méchants de l'emporter, et ils institueront dans la maison de Dieu un administrateur qui en soit digne,
6. sachant qu'ils en recevront une bonne récompense, s'ils le font avec une intention pure et par zèle pour Dieu, de même qu'ils commettraient au contraire un péché, s'ils négligeaient de le faire.
Le choix d’un supérieur dans une communauté monastique est toujours un moment grave, important… qui à vue humaine, peut faire peur. Mais Benoît n’a pas peur apparemment. A la différence de la Règle Monastique, il n’opte pas pour la désignation du nouveau supérieur par l’ancien. Il fait confiance en la capacité de la communauté de choisir l’un des siens. « On prendra pour règle d’instituer celui que se sera choisi la communauté » Et sur quoi fonde-t-il sa confiance ? Sur la capacité de la communauté à se rassembler dans un regard de foi, et dans une concorde sous le regard de Dieu. Dans « La maison de Dieu » ou tout est fait pour favoriser cette concorde et ce regard de foi. L’élection est comme le révélateur de ce patient travail spirituel quotidien. Nous touchons là, la beauté et la grandeur de la vie communautaire chrétienne. Elle est capable de rassembler des hommes très différents par les tempéraments, par l’âge, l’histoire et le parcours personnel…. Sous une Règle et un abbé, elle veut permettre à chacun de trouver son propre pas pour répondre à l’appel de Dieu… tout en marchant avec d’autres. Chacun est épaulé par les autres et chacun soutient les autres dans le désir de servir Dieu. Et cette marche commune à la suite du Christ, sous la conduite de l’Evangile n’est pas aisée tous les jours, nous le savons. Elle demande patience et oubli de soi très souvent, vécus dans une charité très concrète. C’est là que réside le plus solide ciment pour unir ensemble des pierres si différentes. Plus que les belles activités ou entreprises se sont la patience, les renoncements, le service très humble et l’attention discrète de chacun pour les autres qui édifient très sûrement la communauté. Ce ciment là est solide, car il est l’œuvre de l’Esprit Saint, auquel humblement nous voulons consentir et dont humblement nous demandons le secours. (2009-09-17)
15. Chaque fois que les frères se rencontrent, le plus jeune demandera la bénédiction de l'ancien.
16. Au passage d'un supérieur, l'inférieur se lèvera et lui offrira le siège où il était assis. Et le plus jeune ne se permettra pas de se rasseoir avant que son ancien ne le lui commande,
17. pour faire ce qui est écrit : « Prévenez-vous d'honneurs mutuels. ;»
18. Les petits enfants et les adolescents, à l'oratoire et aux tables, garderont leur rang en bon ordre.
19. Mais au dehors et partout, ils seront surveillés et maintenus dans l'ordre, jusqu'à ce qu'ils arrivent à l'âge où l'on comprend.
Hier nous avions la recommandation d’appeler le supérieur « Abbé » « pour l’honneur et l’amour du Christ » aujourd’hui : « prévenez-vous d’honneurs mutuels » Honneur rendu au Christ et honneurs rendus les uns aux autres. L’honneur ici n’est pas flatterie ou volonté d’encenser pour flatter l’amour propre et emplir le frère de vaine gloire. Voir l’honneur proposé se présente davantage comme une expression de la charité. Le jeune est invité à laisser sa place pour l’ancien. Il s’empresse de faire une place à l’autre. Son souci n’est pas son propre confort, mais celui de son frère. Il s’efface pour lui … Voilà en quoi consiste cette recherche de l’honneur rendu aux autres. Benoît précise : « se prévenir » d’honneurs mutuels. On pourrait aussi traduire « prendre les devants » La charité nous presse de prendre les devants pour nos frères. Cette charité là ne résonne pas, elle se donne. Elle nous donne les uns aux autres… moins soucieux de notre confort ou de nos prérogatives mais de la joie de nos frères. Prendre les devants pour donner de la joie sans penser d’abord à soi. Ici nous avons rendez-vous avec mille gestes de notre vie quotidienne : se proposer pour remplacer un frère dans un service, s’arrêter pour écouter un frère qui est en peine, tenir une porte à un ancien et l’attendre avec un sourire, durant les desservices des tables, faire les choses avec la joie de servir la communauté. Se prévenir d’honneur mutuel : nous avons là un instrument spirituel précieux par lequel nous nous livrons à la charité. Celle-ci est en nous une source qui nous demande qu’à être libérée. Ne la retenons pas captive par tous nos repliements sur nous-mêmes, ou par nos pensées de tristesse. L’Esprit Saint nous presse et nous appelle à nous donner avec joie. (2009-09-16)
10. Les jeunes honoreront leurs anciens, les anciens aimeront leurs inférieurs.
11. En ce qui concerne les noms dont on s'appellera, il ne sera permis à personne d'en appeler un autre par son nom tout court,
12. mais les anciens appelleront les jeunes du nom de frères, tandis que les jeunes donneront à leurs anciens le titre de nonni, qui signifie « ;Révérend Père ;».
13. Quant à l'abbé, puisqu'il apparaît comme le représentant du Christ, on lui donnera les titres de seigneur et d'abbé, non qu'il se les arroge de lui-même, mais pour l'honneur et l'amour du Christ.
14. Mais de son côté, il devra y songer et se conduire de façon à être digne d'un tel honneur.
Lors du jubilé du frère Pius, je parlai avec plusieurs personnes en passant saluer les hôtes au réfectoire. Une femme m’a demandé : « mais pourquoi on vous appelle « Père Abbé » ? Elle était intriguée par ce titre et bien consciente de la redondance qu’il contenait. J’ai essayé de lui expliquer que pour une part St Benoît dans sa Règle invitait à appeler « Abbé » le supérieur et que d’autre part, avec le temps l’usage avait voulu qu’on ajoute le mot « Père » Là où Benoît parlait de « Seigneur et d’abbé », la tradition postérieure à privilégiée « Père abbé »… expression en usage pas seulement en français mais aussi en italien, ou en anglais. « Comme si avec le temps, l’usage avait voulu que l’abbé soit regardé davantage comme un « Père » que comme un « Seigneur »… « Abbé » exprimait davantage la fonction et la charge, et « Père » traduisant une marque d’affection. On aurait là une évolution qui tout en débordant la Règle de St Benoît reste bien dans sa ligne. En effet, là ou la Règle Monastique préconise uniquement le respect et la crainte dans la relation à l’abbé, la Règle de St Benoît invite les moines à aimer leur abbé (RB 72) et celui-ci à être plus aimé que craint (RB64)
A propos de ce titre, on reste toujours étonné de la liberté de Benoît, comme de la tradition ancienne, par rapport à la prescription évangélique « Vous n’appellerez personne « père » ni « maître ». En quelque sorte, La Règle de St Benoît prend le contre-pied de l’évangile… et pour quelle raison ? Pour mieux honorer et aimer le Christ « Pour l’honneur et l’amour du Christ ». Comme si le souci de St Benoît était de favoriser le regard de foi des moines dans leur relation avec l’abbé, pour les aider à reconnaître à travers lui la volonté du Christ. Nous sommes ici sur un terrain sensible et subtil où se perçoit le lien profond que Dieu établit avec chacun, à travers les médiations humaines. Le titre « Père abbé » est une tentative pour exprimer ce lien. Et le plus important n’est pas le titre, mais le regard de foi… foi du moine qui veut être à l’écoute du Christ au travers des médiations humaines, ici son abbé.. et foi de l’abbé qui veut être à l’écoute de la volonté de Dieu dans sa relation avec les frères et la communauté. Que le Christ reste unique Seigneur de notre écoute et de notre recherche (2009-09-15).
1. Au monastère, on gardera les rangs comme ils sont établis par le temps de l'entrée en religion et par le mérite de la vie, et comme en décide l'abbé.
2. Cependant l'abbé ne mettra pas le trouble dans le troupeau qui lui est confié, et il ne prendra pas de disposition injuste, comme s'il jouissait d'un pouvoir sans limite,
3. mais il songera toujours qu'il devra rendre compte à Dieu de tous ses jugements et œuvres.
4. C'est donc suivant les rangs qu'il aura établis ou que les frères auront d'eux-mêmes, qu'ils iront recevoir la paix, communier, imposer les psaumes, et qu'ils se tiendront au chœur.
5. Et absolument partout, l'âge ne modifiera pas les rangs ni ne portera préjudice,
6. puisque Samuel et Daniel enfants ont jugé des anciens.
7. Donc à l'exception de ceux que l'abbé, comme nous l'avons dit, fera monter à bon escient ou fera descendre pour des raisons déterminées, tous les autres seront comme ils sont entrés en religion ;:
8. par exemple, celui qui arrive au monastère à la deuxième heure du jour se considérera comme plus jeune que celui qui est arrivé à la première heure, quel que soit son âge ou sa dignité.
9. Cependant les enfants seront maintenus dans l'ordre par tous et en tout domaine.
Ce long chapitre parle de la communauté. Si l’on considère le nombre de fois où ce sujet de l’ordre des rangs ou des places revient dans la Règle – environ – 15 fois, nous touchons là un point sensible pour Benoît. Etrangement beaucoup moins pour nous. En fait ce chapitre a deux parties : la première où Benoît parle de la manière selon laquelle les frères sont rapportés les uns aux autres ou rangés les uns par rapport aux autres. La deuxième partie s’attarde sur la manière avec laquelle les frères doivent se rapporter les uns aux autres, c’est à dire la façon de s’aborder et de s’appeler.
Nous venons de lire la première partie. Dans une société où l’ordre des classes sociales avait encore sûrement une grande importance, selon la tradition latine ancienne, Benoît est soucieux de voir un autre ordre s’établir dans la communauté. Celui-ci ne sera plus basé sur des considérations sociales ou sur les richesses, mais sur l’heure de l’entrée au monastère, le mérite de la vie et toute autre décision de l’abbé. Autant dire que s’il y a une manière de rapporter les frères entre eux, cette manière ne peut-être que spirituelle. Elle sera soit le fait de la Providence divine soit le fait de l’humilité qui vaut d’être élevé. S’il faut un 1er, ce ne peut être que le plus humble. Nous ne sommes plus dans une société d’ordre, liée à la condition sociale où la richesse. Au moins en théorie nous sommes dans une société démocratique où tous sont égaux devant la loi. Et en même temps, n’y a t-il plus d’ordre ? Aujourd’hui l’ordre est souvent celui de la compétence, du savoir faire, ou encore de façon plus sournoise : seront premiers ou perçus comme tel ceux qui savent se faire entendre ou faire parler d’eux dans les médias. Notre façon actuelle de ne plus avoir les rangs d’entrée laisse une belle liberté fondée sur l’égalité de tous en droit et en honneur. Il n’y a donc pas de « Loi de l’ancien » qui pourrait se prévaloir de droits particuliers sur les plus jeunes. La liberté laissée à chacun n’est pas liberté de se caser ou de se planquer, en évitant les frères dérangeants. Cette liberté là est encore puérile. Non, la liberté de nous mettre à n’importe quelle place peut devenir une vraie liberté spirituelle : en prenant la place qui vient, sans calcul, j’accepte, et les lieux et les frères tels qu’ils me sont donnés, ici et maintenant. Veillons donc à ne pas transformer cette liberté qui nous est offerte en une opportunité pour prendre des habitudes de vieux garçons. Cette liberté veut nous entraîner à être plus libre intérieurement en toute circonstance. Cette liberté contribuera à faire de notre communauté un corps vivant, non scléroser par des habitudes (2009-09-05)