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1. Pour l'avoir du monastère en outils, vêtements et biens de toute sorte, l'abbé choisira des frères, de vie et mœurs dont il soit sûr,
2. et il leur remettra ces différents objets, comme il le jugera bon, pour qu'ils les conservent et les recueillent.
3. De ces objets, l'abbé gardera l'inventaire. Ainsi, quand les frères se succèdent à tour de rôle dans l'emploi, il saura ce qu'il donne et ce qu'il reçoit.
4. Si quelqu'un traite les biens du monastère sans propreté ou sans soin, on le réprimandera.
5. S'il ne s'amende pas, il subira les sanctions de règle.
Ce chapitre suit assez naturellement celui sur le cellérier. Il le précise même en donnant à l’abbé une responsabilité directe sur tous les objets du monastère dont il confie la garde à ses frères. On mesure à travers ces lignes combien les objets étaient précieux, car sûrement assez rares et couteux. Il exigeait un compte et un soin précis. Nous sommes loin de ce qu’un article récent affirmait dans La Croix « aujourd’hui on ne répare plus, on jette ». Cela visait particulièrement le matériel informatique. Notre monde occidental qui produit en grande quantité et à moindre coût de nombreux objets prend de plus en plus l’habitude de jeter au lieu de réparer. Désormais, c’est le temps passé qui est le critère premier. S’il faut trop de temps d’une main d’œuvre bien payée mieux vaut jeter que réparer. Logique qui prend de plus en plus le dessus sur toute autre considération. Et nous moines que faire ? Spontanément, on n’aime pas jeter, sensible au prix des choses, mais aussi peut être car nous vivons d’une autre intelligence du temps qui passe. Notre temps, si nous ne voulons pas le perdre, nous ne sommes pas angoissés à devoir le rentabiliser à tout prix. Nous voulons vivre le temps non d’abord en vertu de sa valeur marchande ou comptable, mais en vertu de la possibilité qu’il nous offre d’habiter les rencontres et nos activités et d’être présent à Dieu. Pour cela nous acceptons de limiter notre temps de travail et de nous contenter du nécessaire pour nos besoins.
Mais que faire avec les choses qu’on ne peut réparer, puisque nous ne pouvons sortir du système économique qui impose son rythme ? Récemment, nous avons donné à Emmaüs, tout un ensemble d’ordinateurs usagés, inutilisables. Ils ont mis en place un service de récupération avec des possibilités de recyclage de pièces, en direction de l’Afrique. Système qui n’est pas non plus sans poser de questions. Acceptons de ne pas bien savoir toujours ce qu’il faut faire. Veillons, comme je le disais déjà, à notre manière d’utiliser et d’entretenir ce qui est à notre disposition pour ne pas gaspiller, ni laisser perdre. Résistons à l’appétit d’avoir du « toujours neuf » ou du « dernier cri ». Nous aimerions apprendre au monastère à consommer autrement plus sobrement. (2011-05-13)
17. Si la communauté est nombreuse, on lui donnera des auxiliaires, pour que lui aussi, grâce à leur aide, il remplisse la charge qui lui est confiée sans perdre la paix de l'âme.
18. On donnera ce qui est à donner et on demandera ce qui est à demander au moment voulu,
19. afin que personne ne soit troublé ou peiné dans la maison de Dieu.
Ces quelques lignes illustreraient bien à elles seules la devise « Pax » que l’on associe à la vie bénédictine. Celle-ci en effet est soucieuse d’organiser toute chose pour favoriser la paix dans le monastère jusque dans les détails.
Ici l’organisation touche la tâche du cellérier et aussi la vie en général dans la maison de Dieu. Concernant le cellérier, si Benoît lui demande beaucoup, il n’oublie pas cependant qu’il est aussi un homme. Il prévoit donc ainsi qu’on lui adjoigne des collaborateurs pour qu’il fasse son service avec une âme égale, pour traduire mot à mot le latin. Ces collaborations sont bonnes pour le soulager concrètement, mais aussi pour partager entre plusieurs frères la gestion de l’économie du monastère. Qu’avec F.Cyprien, il y ait F.Benoît à la comptabilité, et F.Hubert à la sous-cellérerie est une chose heureuse pour la coresponsabilité dans la communauté. Sans compter de nombreux autres frères associés de loin ou de près à l’organisation de la vie économique du monastère.
Benoît aborde enfin un autre point plus général pour que « personne ne soit troublé dans la maison de Dieu ». Il énonce dans ce but un principe tout simple : « on donnera ce qui est à donner et l’on demandera ce qui est à demander au moment voulu ». Au « moment voulu » pas avant, pas après. Cette petite notation comme bien d’autres dans la RB est pleine de sagesse. Dans la vie quotidienne, dans nos relations de travail, nous sommes invités à demeurer attentifs « au moment voulu », au moment qui convient, au moment propice pour donner et pour demander les choses. Cette attention au moment opportun veut faire de nous des hommes présents à la réalité concrète de la même manière que nous voulons être des hommes d’écoute dans toute notre vie. C’est un même dynamisme intérieur que nous sommes appelés à vivre. Celui de vivre, non plus à contre temps des autres ou de Dieu, mais de vivre dans le « bon temps ». Cette attention nous enseigne, et à ne pas gaspiller notre temps et à ne pas vouloir le remplir, le bourrer à tout prix. Vivre les choses au moment voulu, comme elles le doivent est une école de pacification. (2011-05-12)
16. Il fournira aux frères la ration prescrite sans arrogance ni délai, de peur qu'ils ne s'irritent, en se souvenant de ce que mérite, selon la parole divine, « celui qui irritera un des petits. »
Comme pour compléter, la recommandation précédente sur la parole aimable en cas d’impossibilité de donner quelque chose, voici ce rappel fait au cellérier. Il doit, pour tout ce qui est en son pouvoir le faire sans arrogance ni délai pour ne pas irriter les frères.
Aucun de nous n’aime attendre quelque chose qui doit venir et curieusement il nous arrive de faire attendre nos frères. Pourquoi ce décalage ? A la fois, nous supportons mal de devoir attendre, mais nous ne voyons pas où est le problème quand des frères s’impatientent à notre égard. Quand nous ne répondons pas à un billet, à une question posée, à un service demandé. Nous sommes souvent très aveugles sur nos fonctionnements et plus intraitables encore sur ceux des autres. Pourquoi cela ? L’association des deux expressions « sans arrogance et sans délai » proposées à l’attention du cellérier, nous donne une piste de compréhension. Il y a une forme d’arrogance à faire attendre, comme il y a une forme d’arrogance à ne pas supporter d’attendre. A l’inverse, il y a une vraie humilité à ne pas vouloir faire attendre les autres, comme il y a une vraie humilité à patienter devant l’insouciance des autre s à notre égard. L’arrogance est ce trop plein de nous-mêmes qui nous aveugle sur nous-mêmes au point de vouloir que les autres s’adaptent à nous « quand je ne suis pas pressé, qu’ils attendent » et « quand je suis pressé, qu’ils ne me fassent pas attendre ». Nous connaissons tous un jour ou l’autre ce genre de réflexe intérieur et ce genre de comportement extérieur qui envenime la vie commune. « Sans arrogance, ni délai » dans l’humble diligence, dans la hâte joyeuse à rendre service, à répondre à un billet, à faire un travail demandé, nous pouvons faire de gros progrès sur nos chemins spirituels. Alors ce n’est plus nous qui sommes au centre infatué de nous-mêmes, mais les frères, la communauté. C’est un chemin de joie qui peut s’ouvrir à nous !! (2011-05-11)
13. Qu'il ait avant tout l'humilité, et quand il n'y a rien à donner à quelqu'un, qu'il lui offre en réponse une parole aimable,
14. comme il est écrit : « Une parole aimable surpasse le don le plus précieux. »
15. Tout ce que l'abbé lui enjoindra, il en aura la responsabilité ; ce qu'il lui interdira, il ne se le permettra pas.
« Qu’il ait avant tout l’humilité, quand il n’y a rien à donner ». Le cellérier, comme l’abbé, comme chacun des frères responsables d’un domaine n’est pas tout puissant. Il ne peut pas tout donner, ni tout faire, soit parce que ce n’est pas possible matériellement, soit parce que cela n’est pas permis par la règle. Etre responsable ne veut donc pas dire être tout puissant dans ce secteur. Il y aurait une belle illusion à le penser et à se comporter en grand seigneur qui donne abondamment sans compter. L’illusion ne serait pas moindre chez celui qui retient tout comme s’il était propriétaire des choses à lui confiées. C’est dire que chacun de nous responsable d’un secteur devons demeurer vigilants dans notre gestion. Nous avons tous des comptes à rendre, à l’abbé, à la communauté, devant la règle parce que fondamentalement nous voulons être serviteur de Dieu. Le servir lui et nos frères. C’est cette vive conscience qui peut nourrir et fortifier en nous l’humilié. Humilité qui ne sera pas démission ou aplatissement de soi. Mais humilité qui fera signe, qui aidera les regards à se tourner vers Celui que nous voulons tous servir en venant au monastère. Cette humilité ne brise pas la relation fraternelle. Quand on ne peut rien donner, on peut toujours dire une parole aimable. Dans la vive conscience que l’on n’est qu’un serviteur, nous n’avons pas à avoir peur de nos frères. Mais humblement on peut leur donner une parole aimable, une parole de réconfort ou d’encouragement à la patience. Une parole qui signifie que l’on est ensemble pour affronter le fait qu’il n’y a rien ou pour mesurer que l’on marche sur un même chemin avec les mêmes exigences monastiques. Et si le frère qui demande s’entête ou veut faire pression, humblement le frère qui reçoit la demande et ne peut donner renverra à l’abbé ou à un tiers compétent. Apprenons à travers cette recommandation de Benoit à ne pas avoir peur des demandes inopportunes ou impossibles. Avec humilité, gardons avant toute chose le lien de la charité. (2011-05-10)
12. Il ne cédera pas à l'avarice ni ne sera prodigue ou dissipateur de l'avoir du monastère, mais il fera tout avec mesure et selon les ordres de l'abbé.
13. Qu'il ait avant tout l'humilité, et quand il n'y a rien à donner à quelqu'un, qu'il lui offre en réponse une parole aimable,
Céder à l’avarice, être prodigue ou dissipateurs des biens du monastère. Voilà deux attitudes opposées mais qui s’enracine dans une même disposition intérieure : vivre en considérant les biens que l‘on gère comme ses propres biens ; alors qu’ils sont ceux du monastère. Cette tentation peut guetter plus fortement le cellérier, le comptable ou l’abbé mais elle peut aussi toucher chacun des moines dans la gestion de son secteur d’activité ou bien quand il sort. Nous touchons là un lieu très sensible de la désappropriation que nous voulons vivre par notre profession monastique. Nous ne faisons pas vœu de pauvreté au sens strict du terme, mais vœu de conversion selon la RB qui offre des repères précis en ce domaine. La RB nous entraine dans une manière de vivre qui nous laisse libre par rapport aux biens. Loin de l’esprit du propriétaire, loin de l’esprit du richard dépensier. Nous ne sommes que des usagers de tout ce qui est à notre disposition. Sommes-nous conscients de la chaque que nous avons d’apprendre cette manière de vivre : user des choses sans nous y attacher, sans nous y accrocher ? Oui, c’est bien davantage qu’une chance, c’est notre vérité en acte. Sur cette terre où nous sommes de passage, nous ne sommes que des usagers, usagers des dons de la terre, des dons de Dieu, jamais propriétaire au sens profond. Pour nous aider à demeurer dans cette disposition ce liberté du cœur, nous avons deux atouts.
Le premier, c’est le fait de tout recevoir et de tout remettre. Sachons, nous exercer concrètement à être libre, en nous dessaisissant des choses inutiles, en ne recherchant pas ce dont nous n’avons pas vraiment besoin.
Le second atout, c’est de demander les choses ou de savoir demander conseil. Ici la parole nous apprend à garder distance, à maintenir la distance que notre convoitise veut toujours réduire. Ne saisissant les choses. Heureux sommes nous quand nous nous contentons de peu. Sachons vérifier nos besoins réels en prenant le temps de les parler avec l’abbé, ou un frère ; Ne nous laissons illusionner nous-mêmes et encombrer par des choses. (2011-05-05)
11. il ne tiendra rien pour négligeable.
Comme nous l’avons déjà perçu dans ce chapitre toutes les qualités demandées ou souhaitées pour le cellérier sont d’abord des qualités humaines et spirituelles. Si l’on devait faire une description du poste de cellérier, à la manière des embauches dans l’entreprise moderne, on serait assez embarrassé. On ne trouve pas en effet d’énumération de compétences techniques, en gestion comptable, administrative, ou économique. Certes, nous avons appris à rationnaliser toutes les tâches pour tenter de mieux les maitriser. Benoît n’est pas préoccupé par un savoir faire technique, mais par le maintient d’une profonde cohérence spirituelle dans le domaine des choses temporelles. « Il ne tiendra rien pour négligeable » veut inviter à un autre regard. Tout a du prix, tout a une valeur, les choses, les objets, l’avoir du monastère. Autrement dit, il y a une qualité de regard et de relation à entretenir avec les choses, les objets, les brusquer, les malmener, les négliger, ne pas les entretenir, ce n’est pas digne d’un moine. Celui-ci veut apprendre à reconnaître toute chose à sa juste place. Et nos objets divers ont cette place tout à fait honorable d’être le fruit d’une élaboration, d’une mise en œuvre qui a demandé beaucoup de soin, d’intelligence et d’énergie humaine. Notre risque aujourd’hui que nous partageons avec nos contemporains, c’est de réduire l’objet, les choses fabriquées à leur valeur marchande. « Cela ne vaut que dix euros, on ne va se casser la tête ». Nous risquons alors de perdre le sens de la beauté et de la simplicité des choses de la vie quotidienne qui sont l’œuvre du génie des hommes, de leur travail. « Ne rien tenir pour négligeable », cette recommandation ne veut pas faire de nous des « maniaques du bout de ficelle à ne pas jeter ». Non mais elle veut nous apprendre à poser un regard plus large sur toute chose sortie du travail des hommes, qu’elle coûte dix ou mille Euros. Un respect du travail d’autrui s’impose, qui me renvoie à la juste considération de mon propre travail si humble soit-il dans la communauté et dans le monde. Chacun de nous apporte une pierre, un savoir –faire, au service de la vie. (2011-05-04)
10. Il considérera tous les vases du monastère et tout son avoir comme les vases sacrés de l'autel ;
« Ils considéreront tout comme des vases sacrés de l’autel ». Nous aimons cette phrase de la RB et nous la tenons comme une des perles qui émaille le texte de Benoît. Même si le F.Adalbert note qu’il s’agit d’un lieu commun dans la littérature ancienne, cette sentence nous semble porteuse de sens jusqu’aujourd’hui.
Nous l’aimons car elle charme notre esprit en suggérant l’abolition d’une limite trop stricte entre sacré et profane. Mais en vivons- nous vraiment ? Cette conviction de Benoît suggère que tout désormais est sacré, tout objet, tout espace. Mais vivons nous vraiment à la hauteur de cette conviction pourtant séduisante ?
Comment prenons nous effectivement soin de tout ce qui nous est confié : nos vêtements, nos chaussures. Comme veillons-nous à les entretenir et les utiliser à bon escient, des chaussures de ville ne conviennent pas pour aller dans les bois, de même les vêtements. Dans nos effets personnels pour la cellule, pour le bureau. Est-ce qu’on veille à ne pas entasser, à ne pas laisser perdre, à ne pas gaspiller (savons, dentifrice, papier, crayons). Est-ce que l’on sait rendre ou se détacher de ce dont on n’a pas besoin (vieux effets, objets divers) ? On le mesure ici aisément dans les objets ou effets personnels, la vigilance porte autant sur les objets eux-mêmes que sur la gestion de notre espace. Allons-nous nous laisser envahir – encombré au point de perdre le sens de notre espace, par exemple en cellule ou au bureau ? Le laisser s’encombrer non rangé, c’est lui faire perdre son caractère sacré, de lieu de vie qui veut favoriser la vie avec Dieu et avec les autres. Serait- ce exagéré de dire qu’une cellule devenue un foutoir est une cellule profanée ? Viennent ensuite tous les objets mis à notre disposition pour le travail : outils divers, produit d’entretien, ordinateur. L’attention est requise car il s’agit des biens de tous, je pense à celui qui va les utiliser après moi ? Vais-je les lui laisser dans l’état où j’aimerais les trouver (par exemple : les balais et aspirateurs aux étages). La vraie question est alors : est-ce que je me sens responsable de la vie concrète de la communauté, de la propreté et des biens, ou bien suis-je seulement soucieux de moi-même et de mes affaires ?
On le voit cette petite phrase de Benoît nous entraine loin. Elle ne nous laisse jamais quitte car le soin des objets nous renvoie en fait au soin de la communauté et des frères. Tout cela est sacré !! (2011-04-30)
8. Il veillera sur son âme, en se souvenant toujours de cette parole de l'Apôtre : « Qui fait bien son service, se procure une belle place. »
9. Il prendra soin des malades, des enfants, des hôtes et des pauvres avec toute sa sollicitude, sachant sans aucun doute qu'il devra rendre compte pour toutes ces personnes au jour du jugement.
« Il veillera sur son âme, il prendra soin des malades, des enfants, des hôtes et des pauvres ». Ces deux recommandations simultanées sont bonnes à entendre ensemble. Elles s’éclairent et se confortent l’une l’autre. Elles rappellent au cellérier et à chacun de nous, que nous ne nous réduisons jamais à la tâche que nous faisons. Nous remplissons un service pour la communauté, mais nous le faisons comme moine, comme chercheur de Dieu ; Il n’y pas d’un côté le travail, et de l’autre la vie spirituelle, d’un côté l’action et de l’autre la contemplation. Dans ce sens, il est intéressant de noter le lien que Benoît fait à travers la citation de Paul, entre « veiller sur son âme » et « bien faire son service ».
« Veiller sur son âme » n’est pas uniquement lié à l’attention nécessaire requise pour prier et faire lectio divina. Si ces moments sont indispensables à notre équilibre monastique, ils n’épuisent pas toute la réalité de cette attention spirituelle à vivre. « Faire bien son service », c’est aussi prendre soin de son âme. S’habituer à travailler avec conscience, avec régularité et rigueur, avec application, est bénéfique pour notre âme. Nous expérimentons par là combien notre vie peut alors s’unifier et nous permettre un don réel de nous-mêmes aux autres. Benoît parle de sollicitude envers les malades, les enfants, les hôtes, les pauvres, et il évoque un rendre compte lors du jugement. Là encore se retrouve le lien entre le « veiller sur son âme » et le « service des frères ». Le don d’eux-mêmes aux autres appelle une qualité d’âme à sans cesse cultiver. Le vrai service est lié à cette qualité d‘âme que l’on y met. Il ne suffit pas de servir ou de faire sa BA. Servir nos frères, nous donner à eux représente un engagement de tout l’être, ou alors cela risque vite de devenir insignifiant, voir inutile. C’est sur cette qualité d’âme, sur cette qualité d’engagement que nous serons jugés. Notre vie monastique qui est une quête d’unification de notre vie sous le regard de Dieu voudrait nous conduire à vivre nos services de la communauté et de frères avec une grande qualité d’âme. (2011-04-28)
1. On choisira pour cellérier du monastère un membre de la communauté qui ait sagesse, maturité de caractère, sobriété ; qui ne soit pas grand mangeur, hautain, turbulent, injuste, lent, prodigue,
2. mais qui ait la crainte de Dieu. Il sera comme un père pour toute la communauté.
Ce chapitres sur le cellérier, outre les prescriptions qu’il donne pour la charge elle-même, offre bon nombre de point de repères précieux pour tout moine et pour toute la communauté monastique. Affleure, à l’occasion d’un enseignement sur une charge aux prises avec les affaires temporelles une vraie sagesse chrétienne, faite de mesure et de respect des personnes.
Ces premiers versets énoncent des qualités humaines st spirituelles qui forment comme un socle sur lequel pourront se vivre des relations équilibrées et justes avec les frères. Les qualités énumérées ici sont à mettre en relation directe avec ce qu’on lui demande : être un père pour la communauté. Sagesse et maturité de caractère lui seront nécessaires pour savoir prendre distance par rapport aux évènements et aux situations toujours inédits. Sobriété et ne pas être gros mangeur l’aideront à ne pas d’abord penser à soi, mais aux autres. Ne pas être hautain, agité, ni injuste, ni lent, ni prodigue ; autant de rappels qui montrent combien la charge de cellérier expose celui-ci à de nombreux dangers. Il peut être hautain à cause de son pouvoir, agité du fait des affaires qui n’arrêtent pas, injuste car il est difficile de s’adapter à tous, lent dans l’indécision, prodigue par manque de prudence.
A ces possibles écarts, Benoît présente un antidote « qu’il ait la crainte de Dieu ». Comme une règle intérieure, la crainte de Dieu réfère toute action et toute chose Dieu. Elle est cette boussole spirituelle qui aide à garder le juste cap. Benoît recommande cette boussole spirituelle à bien des reprises, et notamment à tous ceux qui ont une charge vis-à-vis d’autres personnes : l’abbé, l’hôtelier, le portier, l’infirmier. Dans la maison de Dieu, tous les serviteurs de Dieu doivent être pénétrés de cet amour respectueux et filial envers leur Seigneur pour accomplir de façon juste les tâches qui sont confiés à l’égard de leurs frères. Au cellérier, comme à tous les officiers du monastère, il n’est pas demandé d’être sans défaut, mais de demeurer toujours ajusté à cette boussole spirituelle de la crainte de Dieu. C’est elle qui oriente de façon appropriée actions et relations. Nous remercions F.Cyprien qui veille sur nous et nous l’assurons de notre prière.
(2011-04-27)
1. Tout âge et degré d'intelligence doit recevoir un traitement approprié.
2. Aussi chaque fois que des enfants et des adolescents par l'âge, ou des adultes qui ne peuvent comprendre ce qu'est la peine d'excommunication,
3. quand donc ceux-là commettent une faute, on les punira par des jeûnes rigoureux ou on les châtiera rudement par des coups, afin de les guérir.
Nous n’avons plus d’enfants dans l’enceinte du monastère, comme autrefois. Ce chapitre est comme tel obsolète. Mais le rapport entre enfant et faute ne nous est pas étranger, voire ce rapport est souvent en nous-mêmes très sensible. Il n’est pas rare si on y fait attention que lorsque nous sommes en situation de fautes ou de manquement et si une remarque nous est faite, que nous réagissions avec des réflexes de défense qui trouvent souvent leur racine dans nos expériences d’enfance. Comme enfant, nous avons tous vécu des situations plus ou moins difficiles à traverser où nous avons été confronté et mis en face de nos fautes ou de nos faiblesses. La manière avec laquelle nos éducateurs nous ont aidés à assumer cela et à le dépasser est pour beaucoup dans notre construction d’adulte. Si la figure d’autorité a été trop forte ou au contraire trop absente, si la parole a manqué pour laisser place simplement au ressenti de colère ou de reproche cela peut avoir laissé en nous des réflexes qui témoignent de notre difficulté à assumer notre réel fragile. Une hyper culpabilisation ou une fuite devant un écart commis peuvent alors nous encombrer intérieurement et entraver le chemin de notre vie d’adulte en devenir. Prendre peu à peu conscience de ces mécanismes peut être une vraie libération pour des moines qui sont sans cesse confrontés à une règle et à une vie commune. Celles-ci nous mettent nécessairement un jour ou l’autre à l’épreuve dans ces tâtonnements inévitables, dans nos chutes peut-être, dans nos égarements parfois. La règle et la vie commune ne nous demandent pas d’être des hommes parfaits du jour au lendemain. Elles nous demandent d’être des adultes debout qui apprennent à assumer tout ce qu’ils sont dans le désir de progresser à la lumière de l’Evangile et dans la force de l’Esprit Saint. Etre adulte c’est pouvoir reconnaitre que l’on s’est trompé, qu’on est tombé, c’est pouvoir demander pardon. C’est ne pas laisser la voix enfantine s’élever spontanément en nous pour dire : « C’est pas moi, c’est un tel qui a fait cela, c’est de sa faute » etc.. Ces réflexes enfantins sont des entraves à notre croissance humaine et spirituelle. Demandons au Christ Jésus de nous prendre par la main et de rendre plus fort par son Esprit Saint notre homme intérieur, plus adulte. (2011-04-16)