vendredi 15 août 2025 : fête de l’Assomption, horaire des dimanches (vigiles la veille à 20h45, messe à 10h) + concert à 16h.

Nota : L’office de None (14h45) sera prié au dolmen de ND de la Pierre-qui-Vire.

Commentaires sur la Règle



Voir le commentaire de Père Abbé Luc / Chapitre 02, v 1-3 Ce que doit doit être l'abbé? écrit le 17 décembre 2011
Verset(s) :

1. L'abbé qui est digne de gouverner le monastère, doit toujours se rappeler le titre qu'on lui donne, et vérifier par ses actes le nom du supérieur.

2. Il apparaît en effet comme le représentant du Christ dans le monastère, puisqu'on l'appelle d’un des noms de celui-ci,

3. selon le mot de l'Apôtre : « Vous avez reçu l'esprit d'adoption filiale, dans lequel nous crions : abba, père ! »

Commentaire :

Cette vision de la charge de l’abbé enracinée dans la parole de l’apôtre est riche de sens pour nous. En effet, ce sont seulement ceux qui ont reçu l’Esprit Saint, l’Esprit d’adoption filiale qui peuvent oser reconnaître l’un d’entre eux comme le représentant du Christ, au sein de la communauté. Humainement parlant, on veut bien confier à quelqu’un la charge de gouverner. On le voit dans tous les groupes sociaux, les partis, les Etats. Entre l’élu et le groupe, il y a une sorte de contrat qui exprime les désirs du groupe que l’élu est sensé satisfaire.

Mais dans une communauté monastique, qui vit sous la mouvance de l’Esprit celui qu’elle choisit est considéré dans un regard de foi. Il est issu de ses rangs. Elle connait ses forces et ses faiblesses, et pourtant elle veut reconnaitre en lui, le représentant du Christ. «Créditur » dit Benoit. «Il est cru », il est reconnu comme le représentant du Christ. Cet acte de foi, vécu dans l’Esprit Saint ne qualifie pas la personne de l’abbé, qui reste, comme ses frères, un être humain faillible. Il n’y a qu’un Christ. Non, cet acte de foi élève le cœur et le regard de chacun pour reconnaitre et accueillir à travers un homme, la volonté de Dieu. C’est ce regard de foi qui fonde l’autorité de l’abbé. Ce n’est pas en lui-même, ni par lui-même que cette autorité est fondée. Parler ainsi demande à chacun de revenir toujours au cœur de sa vie monastique : la Foi. La foi en Dieu qui parle et agit dans la communauté à travers les médiations humaines.

L’abbé de son côté doit lui aussi avoir ce regard de foi. Se souvenir de la mission à lui confiée. Etre cohérent dans ses actes avec sa mission. Lui aussi est appelé à demeurer dans la foi pour chercher en tout ce qu’il dit et fait à accomplir la volonté de Dieu. Il n’est pas là pour lui-même, ni pour imposer ses vues. Mais il est au service de la communauté pour qu’elle progresse dans le don d’elle-même à Dieu et dans la charité.

En disant cela, j’aurai envie d’ajouter : « il est grand le mystère de la foi » , foi qui unit l’abbé à sa communauté et celle-ci à son abbé dans le seul désir de chercher, ici et maintenant, à répondre à l’appel du Christ dans l’Esprit. (2011-12-17)

Voir le commentaire de Père Abbé Luc / Chapitre 01, v 10-13 Des espèces de moines écrit le 16 décembre 2011
Verset(s) :

10. La quatrième espèce de moines est celle que l'on nomme gyrovague. Toute leur vie, allant par les différentes provinces, ils se font héberger trois ou quatre jours par les celles des différents moines,

11. toujours errants et jamais stables, asservis à leurs propres volontés et aux tentations de la bouche, et en tout plus détestables que les sarabaïtes.

12. La misérable conduite de tous ces gens-là, mieux vaut la passer sous silence que d'en parler.

13. Laissons-les donc et venons-en, avec l'aide du Seigneur, à organiser la valeureuse espèce des cénobites.

Commentaire :

Cette dernière espèce de moines « plus détestable encore que les sarabaïtes, celle des gyrovagues, nous intéresse en ce qu’elle permet de mieux mesurer l’importance de notre stabilité.

Vivre ensemble à plusieurs implique nécessairement la stabilité, stabilité de lieu, stabilité dans la façon de vivre, stabilité dans les relations. Aux yeux de l’homme moderne, cette stabilité peut sembler contraignante, il nous arrive aussi d’être tenté de le penser. Quand nous pensons la vie à partir de l’individu hors de toute communauté. Mais si nous pensons que l’individu se réalise lui-même en même temps qu’il apporte sa pierre à la construction de la communauté, alors les perspectives changent. Le gyrovague pense que son bonheur ne dépend que de lui-même. Il ne compte pas vraiment sur les autres, il veut seulement en profiter pour assouvir ses propres volontés. Le gyrovague est un profiteur.

Le moine stable a cette confiance profonde en Dieu qui l’a appelé en ce lieu, qu’il va pouvoir grandir là et développer les dons reçus de Dieu. Le cénobite sait que cette stabilité est une des conditions pour que le don de sa vie à Dieu et à ses frères soit vrai et réel. C’est dans la durée et la fidélité d’un engagement qu’il va pouvoir se recevoir de Dieu pour donner tout son fruit.

Et pourtant à certains jours, la tentation est là plus ou moins forte d’aller voir ailleurs. A défaut d’être gyrovague on aura alors du vague à l’âme. Les pensées nous tirent au dehors .

Etre cénobite stable, c’est apprendre aussi à traverser ces moments là plus pénibles. Ils font parti du chemin. Il n’est pas facile de consentir au réel qui ressort d’autant mieux que l’on bouge moins. Le réel de ce que je suis, le réel de ma communauté. Le regarder en face, l’accepter et finalement le recevoir comme le don que Dieu me fait aujourd’hui, pour le service de sa Gloire et pour la venue du Royaume. Et si Dieu a donné jusqu’à maintenant, il donnera encore. Car il est le Dieu fidèle, comme nous le contemplons durant ce temps de l’Avent. (2011-12-16)

Voir le commentaire de Père Abbé Luc / Chapitre 01, v 6-9 Des espèces de moines - écrit le 15 décembre 2011
Verset(s) :

6. La troisième et détestable espèce de moines est celle des sarabaïtes. Aucune règle ne les a éprouvés, grâce aux leçons de l'expérience, comme l'or dans la fournaise, mais ils sont devenus mous comme du plomb.

7. Par leurs œuvres, ils restent encore fidèles au siècle, et on les voit mentir à Dieu par leur tonsure.

8. A deux ou trois, voire seuls, sans pasteur, enfermés non dans les bergeries du Seigneur, mais dans les leurs, ils ont pour loi la volonté de leurs désirs.

9. Tout ce qu'ils pensent et décident, ils le déclarent saint ; ce qu'ils ne veulent pas, ils pensent que c'est interdit.

Commentaire :

Les sarabaïtes. Ils sont l’anti-modèle des cénobites. Ils paraissent leur ressembler, mais ils sont en fait à l’opposé.

De nouveau sous le mode du contraste, je relèverai trois traits mentionnés par Benoît au sujet des sarabaïtes qui montrent en contraste les points forts de notre vie cénobitique.

Aucune règle les a éprouvés . Le cénobite accepte de se placer sous une règle. Il consent et il désire être éprouvé, c’est à dire travaillé, façonné par une règle. Celle-ci lui offre des repères qui lui donnent une colonne vertébrale. Il apprend à gérer un horaire, à se donner dans la prière et le service des frères, à être libre par rapport aux biens matériels etc.

Au lieu d’être mou, car enfermé en lui-même, grâce à la règle et à l’expérience des anciens, le cénobite devient plus libre par rapport à ses pulsions diverses.

Ils restent fidèles au siècle nous dit encore Benoît, à propos des sarabaïtes. Le cénobite apprend peu à peu une manière de vivre qui lui fait renoncer à ses habitudes passées, à la vie mondaine. Il reçoit dans la vie commune un mode de vie plus simple, plus vrai, qui voudrait être plus évangélique. Par rapport aux divers soucis qui occupent le monde, le cénobite veut mettre en premier le souci du Seigneur. C’est lui le premier servi dans la prière et dans le frère.

Sans pasteur, ils ont pour loi le volonté de leurs désirs relève Benoît. Par contraste le cénobite s’appuie sur un supérieur et désire vivre l’obéissance vraie et profonde. Dans son désir de chercher avant tout la volonté du Seigneur, il sait que c’est une illusion et un piège de prendre pour loi ses propres désirs et volontés . Il veut au contraire peu à peu prendre distance par rapport à eux pour discerner ce que le Seigneur lui demande.

La vie cénobitique est exigeante et forte. Elle nous demande sans cesse de nous ouvrir et de nous élargir sous la poussée de l’Esprit Saint.

N’ayons pas peur d’être parfois éprouvés et sortis de nous-mêmes.

Le Seigneur a une grande confiance en nous.

(2011-12-15)

Voir le commentaire de Père Abbé Luc / Chapitre 01, v 3-5 Des espèces de moines - écrit le 14 décembre 2011
Verset(s) :

3. Ensuite la seconde espèce est celle des anachorètes, autrement dit, des ermites. Ce n'est pas dans la ferveur récente de la vie religieuse, mais dans l'épreuve prolongée d'un monastère

4. qu'ils ont appris à combattre le diable, instruits qu'ils sont désormais grâce à l'aide de plusieurs,

5. et bien armés dans les lignes de leurs frères pour le combat singulier du désert, ils sont désormais capables de combattre avec assurance les vices de la chair et des pensées, sans le secours d'autrui, par leur seule main et leur seul bras, avec l'aide de Dieu.

Commentaire :

Paradoxalement ces lignes entendues à propos de la seconde espèce de moines, les anachorètes, nous parlent aussi de notre vie cénobitique.

L’anachorète qi sort des rangs des cénobites doit être avant tout un cénobite éprouvé. Et qu’est-ce qu’un cénobite éprouvé ? Je retiens plusieurs éléments offerts ici.

Tout d’abord, c’est un moine qui vit l’épreuve prolongée d’un monastère . Un cénobite ne devient tel qu’à travers le temps. Le temps nous façonne et il nous construit. Mais de quel temps s’agit-il ? S’agit-il simplement du temps qui passe sans qu’on y fasse trop attention ?

Le second point que je relèverais nous donne une ébauche de réponse : ils ont appris à combattre le diable, instruits qu’ils sont grâce à l’aide de plusieurs . Le temps nous est profitable dans la vie monastique, si nous demeurons attentifs au combat qu’il nous faut mener combat contre le diable . Benoît précise plus loin combat des vices et des pensées . Oui un combat se joue en nous entre les tendances égoïstes qui enferment sur soi et qui excluent, ou ignorent ou maltraitent les autres, et les tendances qui nous ouvrent à Dieu et aux autres, nous entrainent à nous donner, à rendre service. Oui ce combat est parfois très fort au niveau de nos pensées : qu’elles soient de jugement ou de colère, d’exclusion des autres ou de tristesse sur soi-même. Si nous n’y prenons pas garde elles peuvent nous submerger et nous empêcher réellement d’avoir des relations fraternelles justes et libres.

Grâce à l’aide de plusieurs . Oui, c’est une grâce de la vie cénobitique que de nous offrir l’aide des frères et cela de deux manières.

En effet, les frères nous aident simplement déjà par leur présence. Présence éprouvante qui nous oblige à sortir de notre moi orgueilleux pour voir que je ne suis pas seul au monde, ni le centre du monde.

Présence réconfortante, car sans le savoir les frères m’aident par leur élan, leur exemple, leur fidélité. Par ce qu’ils sont, ils m’entrainent à être moi-même fidèle.

En second lieu, l’aide des frères sera précieuse par le soutien à travers une parole, un encouragement, la reconnaissance d’un travail. Et inversement, le fait que je puisse à mon tour les aider, leur être attentif, leur rendre service est un don précieux. Grâce aux frères, je peux devenir davantage moi-même, un homme de relation et de communion, un frère plus fraternel et un fils de Dieu plus filial.

Oui nous pouvons vraiment rendre grâce de ce que la vie cénobitique nous offre de devenir ; des frères et des fils !!

(2011-12-14)

Voir le commentaire de Père Abbé Luc / Chapitre 01, v 1-2 Des espèces de moines - écrit le 10 décembre 2011
Verset(s) :

1. Il est clair qu'il existe quatre espèces de moines.

2. La première est celle des cénobites, c'est-à-dire vivant en monastères ; ils servent sous une règle et un abbé.

Commentaire :

On connait cet apophtegme des Pères du Désert. On demande un jour à un moine : Qu’est-ce qu’un moine ? et ce dernier de répondre : ''C’est celui qui dit'' : Qu’est-ce qu’un moine ? !

Un peu énigmatique, cet apophtegme nous touche en ceci qu’il rejoint une conviction profonde : nous ne savons jamais bien ce qu’est un moine. Chemin faisant, en avançant dans la vie monastique, nous mesurons que l’identité du moine est à chercher plus profondément que dans les seules formes extérieures. On ne finit pas de chercher et de comprendre ce que nous sommes !!

A cet égard, la définition qui nous propose Benoît ce matin est intéressante par sa concision.

Les cénobites sont des moines vivant en monastères, ils servent sous une règle et sous un abbé. Petite définition ramassée en cinq mots qui ont leur poids et qui se présentent comme le squelette de la vie monastique : cénobite, monastère, servent, règle, abbé.

Monastère dit que nous vivons sous un même toit, et que là nous trouvons le gite et le couvert, sans avoir besoin de le chercher ailleurs.

Ils servent : seul verbe de la phrase, il exprime l’action principale du moine qui à l’image de son Seigneur, le Christ, est là pour servir avant tout, servir son Dieu et servir ses frères, à la manière d’un soldat, c’est à dire qu’il voudrait être toujours prêt.

Sous une règle, c'est-à-dire que le moine veut être un disciple, et apprendre une discipline de vie pour mieux incarner l’Evangile dans son existence concrète.

Sous un abbé : seule figure humaine de la définition, il est la médiation humaine qui, pas sa parole et par son autorité acceptée, rappelle au moine qu’il se reçoit d’un seul Seigneur, le Christ, et qu’il est en recherche et en marche vers le Père.

(2011-12-10)

Voir le commentaire de Père Abbé Luc / Chapitre 00, v 50 Prologue - écrit le 07 décembre 2011
Verset(s) :

50. Ainsi, n'abandonnant jamais ce maître, persévérant au monastère dans son enseignement jusqu'à la mort, nous partagerons les souffrances du Christ par la patience, afin de mériter de prendre place en son royaume. Amen.

Commentaire :

Persévérant au monastère dans son engagement jusqu’à la mort .

Il y a quelques temps, on me posait la question : Ne pourrait-il pas y avoir un monachisme temporaire ? La question n’est pas nouvelle quand on mesure la difficulté pour beaucoup aujourd’hui d’envisager un engagement dans la durée. Tout semble si fragile et si sujet à changement. Persévérer jusqu’à la mort , nous dit Benoît.

Effectivement je répondrais à la question en disant que notre monachisme chrétien portait en lui la forte conception d’un engagement pour toujours.

Comment comprendre cela ? D’où tirons-nous cette conviction ?

Il me semble que c’est du mystère du Christ lui-même. Notre engagement nous fait nouer avec le Christ une relation qui appelle un pour toujours . D’une part, comme en toute relation, une fidélité se tisse qui nous permet de nous donner plus en vérité, au fur et à mesure du chemin. Les difficultés et les épreuves nous apprennent ce que c’est qu’aimer et nous aident à grandir en humanité.

D’autre part, plus profondément peut être, ce suivre le Christ pour toujours , jusqu’à la mort, nous fait participer au mystère pascal du Christ. En étant fidèle jusqu’au bout, en partageant ses souffrances jusqu’à la mort par la patience

nous laissons sa vie de Ressuscité nous habiter et faire son œuvre de salut en nous et dans le monde.

Ce n’est qu’au prix de ce lent travail de patience et de vérité que son salut peut atteindre en nous tous nos recoins rebelles et ténébreux.

Aussi en vivant pleinement notre fidélité jusqu’au bout, une plénitude de vie dans l’Esprit nous est offerte, modestement à chacun, qui est un don pour toute l’Eglise dès ici bas, et un signe du Royaume qui vient.

Le ''jusqu'à la mort'' sur cette terre porte en lui-même le germe fort du ''pour toujours'' qui n’aura pas de fin dans le partage de la vie éternelle.

La conversation de plus en plus intime avec le Christ, commencée maintenant, se poursuivra sous un mode que nous peinons à imaginer, mais que nous n’espérons pas moins fortement.

(2011-12-07)

Voir le commentaire de Père Abbé Luc / Chapitre 00, v 47-49 Prologue - écrit le 06 décembre 2011
Verset(s) :

47. Si toutefois une raison d'équité commandait d'y introduire quelque chose d'un peu strict, en vue d'amender les vices et de conserver la charité,

48. ne te laisse pas aussitôt troubler par la crainte et ne t'enfuis pas loin de la voie du salut, qui ne peut être qu'étroite au début.

49. Mais en avançant dans la vie religieuse et la foi, « le cœur se dilate et l'on court sur la voie des commandements » de Dieu avec une douceur d'amour inexprimable.

Commentaire :

Quel étonnant contraste, celui que souligne Benoît ce matin, entre la voie étroite et le cœur qui se dilate ! Finalement est-ce la voie qui est étroite, ou bien est-ce le cœur qui est à l’étroit au début et qui se dilate peu à peu ?

Oui, à travers ces lignes, on entrevoit le peu de perspectives qui est souvent très présent, dans notre vie monastique en particulier. Une vie qui se présente avec une discipline bien réglée apparait à nos regards immédiats comme une voie étroite. En effet, les repères sont fortement marqués et les balises bien en vue, ce qui obligent à une attention soutenue.

Prendre une telle voie nous coute car elle demande de renoncer à bien d’autres possibilités. Et cela on n’aime pas.

On aimerait tant que tout soit possible et pouvoir disposer de tout et tout faire à note gré. Cette façon d’envisager les choses nous donne l’impression d’être au large dans notre cœur. Mais est-ce si vrai ? C’est en fait une illusion.

Notre cœur qui voudrait que tout soit possible sans limites, n’est que l’ombre de lui-même. C’est le cœur superficiel qui n’est pas descendu au lieu de sa vraie profondeur, au lieu de son engagement véritable pour aimer.

La voie exigeante de la discipline monastique révèle la superficialité de notre cœur, et finalement son étroitesse.

Peu à peu pourtant quand nous entrons dans l’humble obéissance à notre vie monastique, notre cœur s’approfondit et s’élargit. Nous sommes entrés parce que nous avons été touchés par un amour, celui du Christ. Si patiemment nous traversons ce qui est rude au nom de cet Amour, notre cœur apprend qu’aimer est davantage que ce qu’il croyait au début. Il découvre qu’il ne sait pas vraiment aimer, mais cette découverte, loin de l’accabler, le stimule.

Car l’amour du Seigneur et l’amour des frères nous creusent comme un appel incessant.

C’est notre pauvreté et notre joie.

(2011-12-06)

Voir le commentaire de Père Abbé Luc / Chapitre 00, v 45-48 Prologue - écrit le 03 décembre 2011
Verset(s) :

45. Il nous faut donc instituer une école pour le service du Seigneur.

46. En l'organisant, nous espérons n'instituer rien de pénible, rien d'accablant.

47. Si toutefois une raison d'équité commandait d'y introduire quelque chose d'un peu strict, en vue d'amender les vices et de conserver la charité,

48. ne te laisse pas aussitôt troubler par la crainte et ne t'enfuis pas loin de la voie du salut, qui ne peut être qu'étroite au début.

Commentaire :

Une école du service du Seigneur .

Cette expression pour désigner notre vie monastique est touchante de modestie. Aucune autre prétention ne motive le propos de cette règle, sinon celle d’ouvrir un apprentissage ; celui du service du Seigneur.

En écho, avec nos catégories modernes, on peut même ajouter qu’il ne s’agit pas d’une université, ni même d’un collège, mais d’une école. L’apprentissage veut nous prendre à tout âge et à tout niveau de compétence intellectuelle ou technique.

Quand il s’agit de servir le Seigneur, ce qui est requis, c’est avant tout un désir et un cœur bien disposé. Et cela chacun de nous en a un. Chacun de nous vient au monastère et y reste parce que son désir a été éveillé et a été mis en route pour apprendre toujours mieux à servir le Seigneur.

Parler d’école, d’apprentissage en parlant de notre vie monastique, c’est affirmer avec force que nous sommes en train d’être éduqués, que notre formation est vraiment continue.

Nous voulons devenir des moines, des serviteurs de Dieu. Ce beau titre que l’on aime bien attribué, sans peur de se tromper aux saints, Benoît par exemple.

Et qu’est-ce donc servir le Seigneur ? Ce n’est pas faire telle chose plus que telle autre, chanter l’office plus que travailler ou rencontrer un frère. En toute chose nous sommes appelés à servir le Seigneur. Servir le Seigneur, c’est peu à peu laisser grandir en soi, en son cœur cette profonde disponibilité, ce profond désir de vivre et de faire toute chose en se donnant au Seigneur.

C’est en cela que se trouve l’apprentissage. Jour après Jour, nous ajuster pour vivre vraiment toute chose dans une relation filiale avec le Seigneur et dans une relation vraiment fraternelle avec nos frères.

L’habitude, les soucis, nos impatiences, notre somnolence sont des forces contraires qui peuvent nous ralentir ou nous égarer.

Alors humblement, il nous faut reprendre le chemin de l’école du service du Seigneur, en prenant appui sur des petits moyens tout simples qui nous aident à nous ressaisir.

Humblement soyons attentifs à soigner les détails de notre vie, là où nous sommes plus faibles ou fragiles.

Jour après jour, assurément nous ferons des progrès.

(2011-12-03)

Voir le commentaire de Père Abbé Luc / Chapitre 00, v 39-44 Prologue - écrit le 01 décembre 2011
Verset(s) :

39. Nous avons donc interrogé le Seigneur, frères, au sujet de celui qui habitera dans sa demeure, et nous avons entendu le précepte donné pour y habiter, mais pourvu que nous remplissions les devoirs incombant à l'habitant.

40. Il nous faut donc tenir nos cœurs et nos corps prêts à servir sous la sainte obéissance due aux préceptes.

41. Et pour ce que la nature en nous trouve impossible, prions le Seigneur d'ordonner au secours de sa grâce de nous l'accorder.

42. Et si, fuyant les châtiments de la géhenne, nous voulons parvenir à la vie perpétuelle,

43. tandis qu'il en est encore temps et que nous sommes en ce corps et qu'il reste le temps d'exécuter tout cela à la lumière de cette vie,

44. il nous faut à présent courir et accomplir ce qui nous profitera pour toujours.

Commentaire :

En ce temps de l’Avent, ces mots de Benoît nous engageant à courir dès à présent pour accomplir ce qui nous profitera toujours, sont bienvenus. Courir tandis qu’il est encore temps précise-t-il.

De même que Benoît dit que notre vie monastique est une vie marquée en tout temps par l’exigence de conversion propre au Carême, de même je crois que l’on pourrait dire qu’elle est tout autant une vie traversée par l’élan et le désir qui caractérise le temps de l’Avent.

Chaque temps liturgique veut nous aider à cultiver et faire fructifier une dimension de notre cœur en quête de la rencontre avec son Dieu.

Ce temps de l’avent vient raviver en nous le désir de courir vers notre Dieu.

Ce désir, c’est celui de l’Eglise qui veut nous entrainer chacun à cette légèreté du cœur. Il s’agit de ne pas trop regarder nos pieds ou notre nombril, mais de tourner nos regards vers le Seigneur qui vient et désire vivre avec nous une vraie rencontre.

Un des moyens concrets de demeurer dans cette course, nous dit Benoît ce matin, c’est de tenir nos cœurs et nos corps prêts à servir, prêt à obéir . Cultiver cette disponibilité intérieure dans la vie de tous les jours, dans le désir de faire avant tout la volonté du Seigneur, et pas d’abord ce qui me plait ou me convient. Cultiver cette ouverture équivaut à courir dès à présent à la rencontre du Seigneur.

C’est l’élan de l’Avent qui redonne à notre vie présente des horizons toujours plus larges. Notre quotidien n’est pas la somme d’actions insignifiantes et répétitives. Il s’inscrit alors au contraire dans cette course dans laquelle nous apprenons à tourner nos regards vers Celui qui vient déjà remplir toute chose de sens et de beauté.

Pour nous garder bien vivant dans cette course et pour nous éviter les mauvais essoufflements, j’invite chacun à porter une attention toute particulière à la ponctualité. Je vois beaucoup de retardataires. Prenons le temps d’arriver à l’avance à l’office. Ne trainons pas avant l’office, avant un chapitre ou un repas. Aidons nous être bien à l’heure.

Apprenons à être prêt.

( 2011-12-01)

Voir le commentaire de Frère Yvan / Chapitre 00, v 35-38 Prologue - écrit le 26 novembre 2011
Verset(s) :

35. Achevant ainsi son discours, le Seigneur attend que nous répondions chaque jour par des actes aux saints enseignements qu'il vient de nous donner.

36. Voilà pourquoi les jours de cette vie nous sont accordés comme un sursis en vue de l'amendement de notre mauvaise conduite,

37. selon le mot de l'Apôtre : « Ne sais-tu pas que la patience de Dieu te conduit à la pénitence ? »

38. Car le Seigneur dit, dans sa bonté : « Je ne veux pas la mort du pécheur, mais qu'il se convertisse et qu'il vive. »

Commentaire :

Achevant ainsi son discours, le Seigneur attend que nous répondions, chaque jour, par des actes, aux saints enseignements qu’Il vient de nous donner .

A la fin du Sermon sur la Montagne, Matthieu utilise la même expression : Quand Jésus eut achevé son discours . C’est à cette parole que Benoît veut faire allusion. Son discours achevé, Jésus attend que nos actes répondent à son enseignement. La réponse qu’Il attend de nous n’est pas verbale. Il ne suffit donc pas d’écouter la Parole. Même pas de l’entendre avec son cœur et la laisser s’enraciner en nous. Il faut aussi la mettre en pratique. Il ne suffit pas de dire : Seigneur, Seigneur, pour entrer dans le Royaume. Il faut accomplir la volonté du Père . Jésus Lui-même nous l’a dit.

Mais de quelle pratique s’agit-il ? Les pharisiens n’étaient-ils pas les champions de la pratique ? Jusqu’à filtrer le moindre moucheron, mais en avalant le chameau ! S’il suffisait d’être en règle avec tout un ensemble de pratiques, les pharisiens nous seraient donnés en exemple. Ils ne se seraient pas heurtés aussi violement à Jésus. De quelle pratique s’agit-il donc ?

Pour Benoît, cette mise en pratique de la Parole se caractérise par deux traits essentiels. Non seulement elle implique tout l’être, jusque dans les profondeurs de notre cœur : c’est le but de la vie monastique, ramener l’homme à l’unité. Mais pour que cela soit possible, il faut aussi que nous ne prenions pas appui sur nous-mêmes. Prendre appui sur le Seigneur. Que notre gloire soit dans le Seigneur. Que notre vie soit en Lui.

Le Seigneur dit dans sa bonté : je ne veux pas la mort du pécheur, mais qu’il se convertisse, et qu’il vive . Au cœur de notre vocation de moine, il y a le désir de vivre. On a souvent décrit la vie monastique comme un renoncement, une mort au monde, un dépouillement… On oublie qu’il s’agit d’abord d’une vie. Ou plus exactement, comme le dit Benoît, d’un changement de vie.

Nous sommes entrés au monastère parce que nous sentions qu’il nous manquait quelque chose, que la vraie vie était ailleurs. Ce désir d’une vie autre peut s’étioler avec le temps. Il peut s’assoupir en nous. Nous avons à le réveiller chaque jour, tout au long de notre vie. Cela fait partie de notre pratique.

(2011-11-26)