Pour offrir les meilleures expériences, nous utilisons des technologies telles que les cookies pour stocker et/ou accéder aux informations des appareils. Le fait de consentir à ces technologies nous permettra de traiter des données telles que le comportement de navigation ou les ID uniques sur ce site. Le fait de ne pas consentir ou de retirer son consentement peut avoir un effet négatif sur certaines caractéristiques et fonctions.
Le stockage ou l’accès technique est strictement nécessaire dans la finalité d’intérêt légitime de permettre l’utilisation d’un service spécifique explicitement demandé par l’abonné ou l’utilisateur, ou dans le seul but d’effectuer la transmission d’une communication sur un réseau de communications électroniques.
Le stockage ou l’accès technique est nécessaire dans la finalité d’intérêt légitime de stocker des préférences qui ne sont pas demandées par l’abonné ou l’utilisateur.
Le stockage ou l’accès technique qui est utilisé exclusivement à des fins statistiques.
Le stockage ou l’accès technique qui est utilisé exclusivement dans des finalités statistiques anonymes. En l’absence d’une assignation à comparaître, d’une conformité volontaire de la part de votre fournisseur d’accès à internet ou d’enregistrements supplémentaires provenant d’une tierce partie, les informations stockées ou extraites à cette seule fin ne peuvent généralement pas être utilisées pour vous identifier.
Le stockage ou l’accès technique est nécessaire pour créer des profils d’utilisateurs afin d’envoyer des publicités, ou pour suivre l’utilisateur sur un site web ou sur plusieurs sites web ayant des finalités marketing similaires.
4. ne pas commettre d'adultère,
Un nouvel instrument qui peut surprendre après le « ne pas tuer ».
Intégré cependant dans ce catalogue, il nous redit plusieurs choses.
La 1°, c’est que notre engagement dans le célibat n’implique pas automatiquement que la question de la chasteté et de la gestion de notre sexualité soit classée une fois pur toutes. Nous le savons trop bien. Nous restons des vivants qui avons à gérer notre sexualité dans toutes ses dimensions pour grandir dans la chasteté. Avec les étapes de la vie, nous découvrons que la question demeure tant nous sommes fondamentalement marqués par notre sexualité. Il nous faut alors apprendre à l’assumer jour après jour avec ses parts d’ombre et d’inconnue, mais aussi avec ses promesses de vie à travers nos rencontres avec des femmes et des hommes qui nous humanisent. Notre célibat pour Dieu en orientant notre cœur vers lui qui est la source de tout amour, libère peu à peu notre capacité d’aimer en vérité et liberté.
Le 2° point à propos de l’adultère nous redit que tout homme et toute femme mariés ou célibataires reste fragile dans ses fidélités. L’adultère est celui qui trahit une confiance, un amour. Jésus pousse loin le sens de cette trahison en parlant de l’adultère vécu dans le cœur de celui qui désire une femme. Nous touchons ici à la racine du mal : notre désir faussé, mal orienté, notre cœur non donné pleinement à notre 1° amour.
Le 3° point que nous pouvons entendre pour nous moines concerne l’alliance avec Dieu. Dans la Bible, les ruptures d’alliance par le peuple sont souvent comparées à des adultères. Dieu exprime alors, à travers les prophètes, la douleur de son amour incompris non-reconnu par son peuple, associé à l’image de l’épouse infidèle. Paul a renouvelé l’image en parlant de l’union entre le Christ et l’Eglise, comparée à l’union de l’homme et de la femme. Par notre engagement dans le célibat, nous sommes, au cœur de l’Eglise, comme les signes mais aussi les veilleurs de ce choix 1° et total pour le Christ, en réponse à son amour qui nous a sauvés.
« Ne pas commettre l’adultère » peut être dès lors pour chacun de nous comme un stimulant dans notre relation avec le Christ, avec son Père. Le Christ veut nous entrainer dans une relation plus vraie, plus entière avec lui et pour lui. C’est un appel à nous donner tout entier à Lui avec un cœur sans partage.
« Unifie mon cœur pour qu’il craigne ton nom »
3. Ensuite « ne pas tuer,
« Ne pas tuer »
Étrange recommandation dans une règle pour des moines, et même étrange recommandation pour des êtres humains tout court ? Car qui a le désir de tuer ? Quels sont en effet les meurtriers qui, aujourd’hui en prison, peuvent dire froidement qu’ils ne regrettent pas d’avoir commis l’irréparable ? Ils sont sûrement une minorité.
Tuer notre prochain ne nous est pas naturel. Ils sont assez fréquents les témoignages de meurtriers qui vivent longtemps sinon toujours avec le poids du remords d’avoir pris la vie de leur semblable ? Ils ont le plus souvent du mal à se le pardonner. A qui donc s’adresse cette recommandation : « ne pas tuer » ? A tout homme pourtant et donc à tout moine, à cette partie blessée de nous qui peut se laisser gagner par l’ombre et par la cécité au point de vouloir la mort de son frère. L’instrument ne pas tuer est là avant tout pour nous rappeler à l’humilité.
Comme tous les hommes, marqués par le péché, nous sommes fragiles, placés dans certaines circonstances en face de certaines situations, l’ombre peut nous gagner et nous emporter dans des actes qui tuent. Cet instrument nous appelle aussi à la vigilance. S’il y a des actes, il y aussi des paroles qui tuent ou qui blessent durablement. Des paroles adressées à la personne elle-même mais aussi des paroles dites sur quelqu’un à son insu. On peut tuer quelqu’un en salissant son image.
Ici nous ne sommes plus dans une possibilité lointaine. Dans nos conversations nous savons qu’il est facile de déraper. Sachons nous entraider pour ne pas nous laisser entrainer dans des propos oiseux sur les autres, qui en salissant le frère, faussent notre regard sur lui. Cette vigilance n’est pas facile à vivre et à tenir. Il nous faut la désirer et la demander dans la prière. Le Christ, devant la femme adultère que l’on veut tuer, ne se laisse pas gagner parle jugement ombreux de ses interlocuteurs. Il demeure libre et aimant dans son regard, car son regard est miséricordieux. Qu’il nous apprenne à avoir ce même regard sur nos frères.
1. En premier lieu, « aimer le Seigneur Dieu de tout son cœur, de toute son âme, de toutes ses forces » ;
2. ensuite « son prochain comme soi-même ».
Dans la vidéo sur Edmond Michelet, j’ai été frappé par le récit et les témoignages sur la vie de cet homme notamment pendant sa captivité à Dachau. Un homme tout donné aux autres, choisissant un travail dangereux (la désinfection) pour lui-même, mais le mettant en contact étroit avec de nombreux autres détenus. « Le Français » comme on l’appelait était ainsi comme l’âme du camp par son grand désir de soutenir les uns et les autres et de tisser des liens entre tous.
« Aimer son prochain comme soi-même » nous redit Benoit ce matin. Aimer l’humanité de l’autre, de tous les autres comme on essaie d’aimer sa propre humanité. Aimer est alors une chose très concrète qui se vit dans la relation. Aimer ne se résume pas dans des choses à faire ou à s’efforcer de faire. Non il s’agit plutôt d’un élan qui nous tourne vers les autres, d’un élan qu’il nous revient de ne pas freiner et encore moins de détourner sur soi-même de façon égoïste. Cet élan qui a touché les camarades d’Ed Michelet. Il était tourné vers les autres et non replié sur lui-même. Les commentateurs ont noté qu’il avait appris cela peu à peu et notamment à travers les Équipes Sociales à Brive. Aimer est une affaire d’entrainement, d’exercices à reprendre pour que cela devienne comme une habitude. Aimer cela se nourrit, Ed Michelet a parlé lui-même du rôle capital de l’Eucharistie reçue en dérobade pendant sa captivité. Pour nous moines, nous voudrions nous aussi vivre de cet élan profond qui nous tourne vers les autres. N’ayons pas peur de commencer aujourd’hui et de recommencer encore. Entrainons-nous dans les gestes les plus quotidiens : répondre oui de bon cœur à une demande, remplacer un frère pour un service ou au nettoyage des tables, aller vers un frère à l’écart, aller rendre visite à un malade. Ne brisons pas l’élan de notre générosité qui est suscité par l’Esprit Saint. Nourrissons cet élan dans la prière à la source d’un autre amour, celui du Christ pour nous.
1. En premier lieu, « aimer le Seigneur Dieu de tout son cœur, de toute son âme, de toutes ses forces » ;
Nous retrouvons ce chapitre original avec son énumération de versets, de plus souvent tirés de l’Ecriture. Si RM présente l’ensemble comme l’art spirituel que l’abbé doit enseigner, RB semble vouloir conserver à chaque verset sa valeur d’instruments. Là où le Maitre voit comme différents chapitres d’un chemin spirituel à enseigner, Benoit considère des outils à disposition de chacun pour l’utilisation qu’il jugera bon d’en faire. Et nous savons qu’effectivement certains de ces instruments restent bien présents à notre mémoire pour jouer le moment venu le rôle de repère. Dans telle situation, un instrument revient à notre mémoire. Il oriente notre jugement, voire notre action. Il veut servir à cela.
Ce matin : 1° instrument proposé, le 1° commandement, non dans une forme active : « tu aimeras », mais dans la forme infinitive : «aimer le Seigneur, ton Dieu de tout son cœur, de toute son âme, de toutes ses forces ». Parmi les instruments les plus utiles à sa vie, le moine se voit offrir les commandements essentiels à tout croyant, juif et chrétien.
Le 1° : aimer et aimer de tout son être le Dieu auquel on croit. Ce verbe aimer risque aujourd’hui de perdre de son poids et sa profondeur tant on l’utilise beaucoup. Ici la sobriété empreinte au verset biblique, nous rappelle qu’il s’agit d’engager toute notre vie ni plus, ni moins. Et cela non de façon abstraite mais d’engager tout notre cœur, toute notre âme, toutes nos forces. Rien n’est soustrait à cet engagement dans l’amour de notre Dieu. Si on y réfléchit un peu il n’est pas facile de bien mesurer comment vivre cet amour pour Dieu. Car la mesure de cet amour n’est pas réductible à l’amour du prochain, ce qui en soit reste déjà tellement au delà de nos forces. Si Dieu est amour, s’il nous aime sans mesure, la mesure de notre amour doit prendre tout notre être. Mais plus encore il nous faut en réponse à l’amour sans mesure apprendre à aimer non seulement selon notre mesure pleine et entière, mais à aimer sans mesure. Comme le disait st Bernard, c’est une grâce de l’Esprit à demander. Et nous savons bien que ceci peut nous rejoindre très concrètement : est-ce que je mets des limites dans mon amour pour Dieu, en termes de temps ou de disponibilité ? Est-ce que je mets des cloisons au-delà desquels Dieu n’a pas à entrer, des domaines réservés. Oui aimer Dieu nous laissera sans repos par rapport à notre volonté de nous réserver quelque chose, mais aimer Dieu nous fera entrer dans le repos heureux de celui qui donne tout et cherche à être disponible
7. Tous suivront donc en tout la règle comme leur maîtresse, et nul n'aura la témérité de s'en écarter.
8. Personne au monastère ne suivra la volonté de son propre cœur,
9. et nul ne se permettra de contester avec son abbé insolemment ou en dehors du monastère.
10. Si quelqu'un se le permet, il subira les sanctions de règle.
11. De son côté, cependant, l'abbé fera tout dans la crainte de Dieu et le respect de la règle, sachant qu'il devra sans aucun doute rendre compte de tous ses jugements au juge souverainement équitable qu'est Dieu.
« Tous suivront la règle comme leur maitresse ». Nous avons de la chance de vivre sous une règle. Si à certains jours, une part de nous-mêmes râle ou se rebiffe contre le règle, quand nous prenons un peu de hauteur, nous mesurons les bienfaits de vivre sous une règle de vie. Nous sommes guidés, soutenus, portés par son équilibre et ses orientations pour aller plus loin. Je suis frappé de voir que la plus part des grands hommes qui marquent notre histoire, sont des hommes qui ont su se donner une règle de vie très ferme. Que ce soit les savants, les artistes, des hommes politiques ou militaires, dans leur domaine propre, ils ont su se donner des repères concrets de lever, de manger, d’équilibre horaire pour atteindre le but recherché. Ainsi en va-t-il pour nous moines. Nous choisissons de nous mettre sous une règle pour mieux atteindre le but recherché. Et quel est ce but ? Chercher Dieu, c’est à dire chercher à nous ajuster toujours davantage pour mieux le connaitre et mieux faire sa volonté. Être tout entier dans notre corps, notre cœur, notre volonté, notre intelligence, à son service. Chercher à lui plaire en toute chose. Et quel est le lieu principal de notre travail à accomplir en vivant sous une règle? Le lieu premier de notre travail, c’est notre cœur. Notre cœur appelé à être libre et pur, pour aimer Dieu et nos frères. Un cœur qui ne cherche pas à faire ses propres volontés, mais un cœur qui cherche à vouloir ce que Dieu veut comme il veut. Si les artistes travaillent leur art (musique, peinture etc ;;) Si les savants perfectionnent leur savoir, le moine applique son attention à purifier son cœur pour qu’il soit tout donné à Dieu et à ses frères. C’est là ce que la règle veut lui permettre de vivre. C’est là sa joie, c’est là sa peine laborieuse, c’est là que la grâce de Dieu opère pour faire de lui un homme libre, un fils de Dieu. (2012-01-20)
1. Chaque fois qu'il sera question au monastère de quelque chose d'important, l'abbé convoquera toute la communauté et dira lui-même de quoi il est question.
2. Une fois entendu le conseil des frères, il en délibérera à part soi et fera ce qu'il juge le meilleur.
3. Or si nous avons dit que tous seraient appelés au conseil, c'est que souvent le Seigneur révèle à un inférieur ce qui vaut le mieux.
4. Or donc les frères donneront leur avis en toute soumission et humilité, et ils ne se permettront pas de défendre leur opinion effrontément,
5. mais la décision dépendra de l'abbé : celle qu'il juge être plus opportune, tous y obéiront.
6. Toutefois, s'il sied aux disciples d'obéir au maître, il convient que celui-ci dispose toute chose avec prévoyance et justice.
En relisant ce chapitre, il est intéressant de noter qu’il met trois acteurs en présence : l’abbé, la communauté, et le Seigneur. Le rôle de l’abbé est de convoquer les frères et de préciser le sujet dont on va parler. Il est dit aussi qu’il doit veiller à disposer toute chose avec « prévoyance et justice ». L’abbé écoute les frères et délibère pour faire ce qu’il juge le meilleur.
Les frères sont invités à donner leur avis, sans le défendre absolument, c’est à dire avec humilité. Ils obéissent à la décision prise ensuite.
Et le Seigneur ? Il révèle ce qui « vaut le mieux » et « souvent » par l’intermédiaire d’un inférieur ou plus jeune. Cette discrète mention du Seigneur qui se révèle à travers les frères est propre à Benoit, par rapport à la RM. Mais elle est essentielle pour donner à cette rencontre son vrai caractère d’écoute de « ce qui vaut le mieux » selon le Seigneur. Si l’abbé écoute les frères, si les frères obéissent à l’abbé dans les deux cas, c’est le Seigneur que les uns et les autres veulent écouter. Car c’est de lui que l’on désire avoir la lumière pour faire plus surement sa volonté.
Cette disposition de foi est notre force. Elle nous sort de nos préoccupations trop immédiates qui voudraient nous laisser penser que tout dépend de nous. Ce regard de foi sur le Seigneur qui parle dans nos chapitres peut nous aider à mieux nous écouter et à mieux parler en vérité. Il ne s’agit pas de se casser la tête pour vouloir dire absolument « la» Parole. Mais certainement, cela demande à chacun de chercher à dire «sa» parole à lui. Ainsi dans ce souci de vérité mené par chacun, ensemble nous nous mettons à l’écoute du Seigneur. Dans l’apparente diversité, il parle et pas nécessairement dans l’unanimité. Car le discernement ne résulte pas d’abord dans l’équilibre des forces en présence. Demandons chacun quand nous préparons une prise de parole la lumière de l’Esprit Saint.
(2012-01-19)
37. Et qu'il sache que, quand on se charge de diriger les âmes, on doit se préparer à en rendre compte.
38. Et autant il sait avoir de frères confiés à ses soins, qu'il soit bien certain qu'il devra rendre compte au Seigneur de toutes ces âmes au jour du jugement, sans parler de sa propre âme, bien entendu.
39. Et ainsi, craignant sans cesse l'examen que le pasteur subira un jour au sujet des brebis qui lui sont confiées, en prenant garde aux comptes d'autrui, il se rend attentif aux siens,
40. et en procurant aux autres la correction par ses avertissements, lui-même se corrige de ses vices.
La vie appelle la vie. Cette vie terrestre appelle la vie éternelle de toutes ses forces. C’est dans cette lumière que l’on peut entendre ces paroles fortes sur le jugement de Dieu. Apparamment ce genre de parole nous semble terrible et nous rebute spontanément. Nous n’aimons pas faire endosser à notre Père ces cieux l’image d’un juge et nous avons raison car notre Dieu est foncièrement père. Père car origine de toute vie, père qui engendre le Fils et qui nous adopte en celui-ci comme ses fils.
Comment entendre cette finale du chapitre adressée à l’abbé sur les comptes qu’il devra rendre de sa gestion des frères et de la communauté ? Certainement tout d’abord comme un rappel renouvelé fait à l’abbé pour qu’il se souvienne que son autorité est entièrement subordonnée à celle de Dieu. Dieu seul est Père des frères et de la communauté.
Ensuite ce «rendre compte», ici de l’abbé, mais chacun aura à vivre pour sa propre part, nous rappelle à tous que la vie appelle la vie. Cette vie sur terre est un don merveilleux qui nous a été fait. Nous l’avons reçu pour qu’il fructifie en plénitude de vie pour nous-mêmes et pour les autres. Dieu nous a partagés sa vie pour qu’elle éclate abondamment selon toutes ses potentialités. Le «rendre compte » que nous aurons à vivre ne sera pas à mon sens vécu à la manière des comptes que l’on rend à notre frère comptable. Mais il sera plutôt comme la prise de conscience étonnée de la surabondance de la vie que nous avons reçue. Et peut-être cette prise de conscience sera –telle entachée de tristesse, voire de regret devant tout ce que nous avons gaspillé, de ce don de vie. C’est là que se trouve le jugement : face à la lumière de la vie et de l’amour de notre Père nous mesurerons notre petitesse de vue, et nos étroitesses de cœur qui ont bloqué la vie pour nous-mêmes et pour les autres. Si cela est vrai, la perspective de ce rendre compte des ouvriers de l’évangile à leur Seigneur et Père nous invite à une grande humilité. Elle nous engage surtout à sortir du désir de s’autojustifier par nous-mêmes, Mais au contraire, cela nous entraine à nous abandonner toujours plus avec confiance comme des enfants dans les bras de notre Père. Confiance pour lui demande sa grâce fin que la vie qu’il nous offre produise toujours plus de vie qui demeure en vie éternelle. (2012-01-18)
30. L'abbé doit toujours se rappeler ce qu'il est, se rappeler le titre qu'on lui donne, et savoir que « plus on commet à la garde de quelqu'un, plus on lui réclame ».
31. Et qu'il sache combien difficile et ardue est la chose dont il s'est chargé, de diriger les âmes et de se mettre au service de caractères multiples : l'un par la gentillesse, un autre par la réprimande, un autre par la persuasion... ;
32. et selon la nature et l’intelligence d’un chacun, il se conformera et s’adaptera à tous, de façon non seulement à ne pas subir de perte dans le troupeau commis à sa garde, mais aussi à se féliciter de l’accroissement d’un bon troupeau.
33. Avant tout, qu'il ne laisse point de côté ni ne compte pour peu de chose le salut des âmes commises à sa garde, en prenant plus de soin des choses passagères, terrestres et temporaires,
34. mais qu'il songe sans cesse qu'il est chargé de diriger des âmes, dont il devra aussi rendre compte.
35. Et pour ne pas se plaindre d'un éventuel manque de ressources, qu'il se souvienne qu'il est écrit : « Cherchez d'abord le royaume de Dieu et sa justice, et tout cela vous sera donné par surcroît » ;
36. et encore : « Rien ne manque à ceux qui le craignent. »
Ce passage de la RB est d’une force et d’une profondeur qui fait trembler tout abbé. L’insistance est mise sur la dimension de paternité spirituelle de sa charge et cela en plusieurs touches.
La première concerne le titre donné à un homme : abbé. Ce n’est pas lui qui s’arroge ce titre, mais ce sont ses frères et la communauté qui le reconnaissent comme père. On le mesure ici, ce n’est pas le titre comme titre qui importe mais c’est ce qu’il engage : une fonction d’autorité perçue et attendue comme paternelle. Ses frères ne demandent pas de vivre sous l’autorité d’un général ou d’un chef, mais d’un père.
Le second point à relever manifeste bien comment Benoit envisage cette autorité paternelle. L’abbé, appelé à diriger les âmes devra «se mettre au service de caractères multiples». Diriger et servir apparemment c’est contradictoire. Cela replace cette autorité dans une lumière exclusivement évangélique selon laquelle le premier se met au service de tous. Cela souligne aussi combien cette autorité paternelle est uniquement orientée vers le bien des personnes. Selon la nature et l’intelligence d’un chacun, l’abbé se conformera et s’adaptera à tous. Tâche difficile et ardue, dit Benoit. Tâche impossible, dirions-nous peut-être aujourd’hui ? Seule une vision sacramentelle des choses peut nous permettre d’avancer sans fuir. L’abbé dans son service et sa fonction paternelle est signe et instrument du seul Père, notre Père qui est aux cieux. Si l’abbé doit mettre toute son intelligence, son cœur et sa diligence au service des caractères de chacun, il ne peut que renvoyer au Père, révélé par Jésus. C’est à une intimité et à une relation filiale avec Dieu que l’industrie de l’abbé veut conduire.
Un troisième point caractérise la fonction paternelle du service de l’abbé, c’est la primauté de l’attention à la vie spirituelle des frères sur les soucis touchant à la vie matérielle de la communauté. Cette primauté et cette priorité donne la première place aux personnes. Elle invite en conséquence, non pas à une négligence à l’égard des choses matérielles, mais à une confiance redoublée en Dieu qui veille à ce que rien ne manque à ceux qui le craignent.
Voilà tout ce que l’abbé est appelé à devenir selon Benoit. Je vous demande pardon pour ce qui, dans ma façon de faire ou d’être, a été obstacle et je me confie à votre prière. (2012-01-17)
23. Dans son enseignement, d'autre part, l'abbé doit toujours observer la norme que l'Apôtre exprime ainsi : « Reprends, supplie, réprimande »,
24. c'est-à-dire que, prenant successivement des attitudes diverses, mêlant les amabilités aux menaces, il se montrera farouche comme un maître et tendre comme un père.
25. C'est dire qu'il doit reprendre durement les indisciplinés et les turbulents, supplier d'autre part les obéissants, les doux et les patients de faire des progrès ; quant aux négligents et aux méprisants, nous l'avertissons de les réprimander et de les reprendre.
« Reprends, supplie, réprimande », ainsi parle Paul à Timothée, ainsi parle Benoit à l’abbé. Et pourquoi faut-il reprendre, supplier, et réprimander ? Parce que Paul et Benoit vivent de cette forte et belle conviction que chaque disciple du Christ et chaque moine est capable de faire des progrès. Faire des progrès, avancer, grandir : le croyons nous , nous pensons nous en capable ? C’est là qu’une aide fraternelle, un regard extérieur peut être un soutien, un stimulant. Laissés à nous-mêmes, nous pouvons parfois être tentés par le découragement ou par le « à quoi bon » ? Découragement parce qu’on a l’impression de buter sur les mêmes difficultés ou l’impression d’être toujours dans les mêmes ornières. Ou tentation du « à quoi bon ? » c’est le tentation d’une certaine satisfaction et l’immobilisme pour ne pas trop se risquer. Dans les deux cas, il est juste de parler de tentation, car ceci est l’œuvre du mauvais esprit et non du Saint Esprit. Celui-ci ne cesse de désirer nous aimer, soit en nous poussant (cf Syméon poussé au Temple ou Jésus au désert), soit en nous tirant ou nous appelant (Paul appelé à venir en Macédoine). Là où nous voudrions nous satisfaire d’un rythme tranquille ou d’une route toujours bien connue, l’Esprit Saint nous entraine à avancer pour devenir toujours plus vivant. C’est un des rôles de l’abbé que de rappeler cela, d’exhorter ses frères à être à l’écoute de l’Esprit Saint, de les alerter quand ils risquent d’errer en prenant de mauvaises habitudes ou de somnoler. Oui, être vigilants sur notre manière de vivre, réagir et de penser est le signe que nous demeurons des vivants. Etre attentifs à ne pas nous laisser aller est le signe que nous sommes à l’écoute de l’Esprit. La parole de l’abbé veut nous aider à cela, demeurer des vivants , des éveillés dans l’Esprit Saint .. (2012-01-07)
16. Il ne fera pas de distinction entre les personnes dans le monastère.
17. Il n'aimera pas l'un plus que l'autre, à moins qu'il ne l'ait reconnu meilleur dans les bonnes œuvres ou l'obéissance.
18. A l'homme venu de l'esclavage qui entre en religion, il ne préférera pas l'homme libre, à moins qu'il n'existe une autre cause raisonnable.
19. Que si l'abbé en décide ainsi, la justice l'exigeant, il fera de même pour le rang de qui que ce soit ; sinon, ils garderont leur place normale,
20. car « esclave ou libre, nous sommes tous un dans le Christ », et sous un même Seigneur nous portons d'égales obligations de service, car « Dieu ne fait pas acception de personnes. »
21. Notre seul titre à être distingués par lui, c'est d'être reconnus meilleurs que les autres en bonnes œuvres et humbles.
22. L'abbé doit donc témoigner une charité égale à tous, avoir les mêmes exigences dans tous les cas suivant les mérites.
Ce chapitre sur l’abbé est certainement un des chapitres à travers lequel nous mesurons le mieux la dimension sacramentelle de nos relations. L’abbé sacrement du Père, comme ailleurs le pauvre, l’hôte et le malade sont les sacrements du Christ. Oui toutes nos relations vécues en communautés ont une dimension sacramentelle. Au cœur de leur épaisseur humaine, elles portent bien plus qu’elles-mêmes. Elles font signe et elles rendent présent le Christ.
Ainsi l’abbé doit-il ne pas faire acception de personne. Il ne doit pas distinguer entre les frères, pour aimer l’un plus que l’autre. Car de même que « Dieu ne fait pas acception de personne », l’abbé aura une égale charité pour tous. Il ne se permettra pas ainsi de préférer l’un plus qu’un autre, en vertu de catégories humaines (richesse, culture etc). Benoit fait une exception, l’abbé pourra reconnaitre l’un des moines pour son humilité ou son obéissance, et éventuellement lui offrir une autre place plus élevée. D’où vient cette exception, peut-on se demander ? Est-elle juste ? De nouveau, ici, nous sommes dans l’ordre sacramentel. Quand Dieu lui-même préfère quelqu’un, c’est toujours les petits et les humbles de cœur. Marie le chante dans son magnificat : «Il s’est penché sur son humble servante ». Et le psalmiste aussi : « Dieu n’aime pas la vigueur des guerriers, mais il se plait avec ceux qui le craignent, avec ceux qui espèrent son amour», c'est-à-dire les humbles de cœur. Dans la lumière de Dieu, c’est l’humilité et la pauvreté de cœur qui attirent les regards et les grâces. Benoit propose qu’il en soit ainsi dans le monastère. S’il y a une échelle de valeurs à manifester peu à peu, c’est bien celle-là. C’est la primauté de l’amour qui ne peut être qu’humble. (2012-01-06)