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1. L'abbé qui est digne de gouverner le monastère, doit toujours se rappeler le titre qu'on lui donne, et vérifier par ses actes le nom du supérieur.
2. Il apparaît en effet comme le représentant du Christ dans le monastère, puisqu'on l'appelle d’un des noms de celui-ci,
3. selon le mot de l'Apôtre : « Vous avez reçu l'esprit d'adoption filiale, dans lequel nous crions : abba, père ! »
4. Aussi l'abbé ne doit-il rien enseigner, instituer ni commander qui soit en-dehors du précepte du Seigneur,
5. mais son commandement et son enseignement s'inséreront dans l'esprit de ses disciples comme un levain de justice divine.
En relisant ce chapitre, je suis frappé par la répétition du verbe « devoir»avec lequel
Benoit décline les différents points d'attention qui reviennent à l'abbé: «l'abbé doit toujours
se rappeler le titre qu'on lui donne et vérifier par ses actes son nom de supérieur» et « l'abbé
ne doit rien enseigner, instituer ni commander qui soit en dehors du précepte du Seigneur ... »
En arrière fond de tout ce chapitre, on peut entendre la volonté de Benoit d'en découdre avec
une autorité de l'abbé qui serait trop mondaine, pour lui opposer une autorité selon l'évangile.
L'abbé est au service du Christ. En son nom, il guide ses frères dans une vie de disciple
toujours plus fidèle à l'évangile. Il lui faut alors épouser la manière du Christ d'exercer
l'autorité et se garder en tout temps de la manière du monde. Ainsi va-t-il exercer son autorité
à la manière d'un père et à la manière d'un frère. A la manière d'un père que les frères
reconnaissent comme un serviteur du Christ. A la manière d'un frère, qui comme tout un
chacun conforme ses actes à ses paroles. A la manière d'urI père à qui les frères obéissent
parce qu'ils veulent obéir au Christ. A la manière d'un frère qui se souvient qu'il est faible lui
aussi et qu'il doit être vigilant à sa propre vie. Par cette autorité reconnue comme paternelle et
vécue comme fraternelle, l'abbé est, à l'instar de bien d'autres dans l'Eglise, au service de
l' œuvre de salut que le Christ poursuit. En effet, depuis son incarnation, sa passion et sa
résurrection, le Christ n'a de cesse de se révéler aux hommes afin qu'ils découvrent la joie de
vivre uni à Lui, le Vivant.Et il le fait à travers des hommes. Quand Benoit insiste pour que
l'abbé n'enseigne, n'institue ou ne commande rien en dehors du précepte du Seigneur, il veut
lui rappeler dans quelles limites s'exerce sa fonction. Ces limites, il ne se les donne pas, il les
reçoit du Christ. Fonction et mission redoutables qui oblige à un discernement continuel pour
que ce qui est dit et fait soit comme « un levain de justice divine»dans le cœur de chacun ...
De part en part, Benoit nous entraîne dans une vision sacramentelle de l'autorité, c'est-à-dire
une vision qui fait signe et qui met en œuvre la seule autorité qui soit : celle du Christ.Il nous
provoque tous à la foi: foi du p. abbé lui-même en sa mission qui dépasse ce qu'il peut en
concevoir, foi des frères dans le Christ qui se sert d'homme fragile pour parler et agir. Dans
cette aventure de foi, que l'Esprit Saint nous vienne en aide, et qu'il nous trouve chacun
docile à ses inspirations. - 08.12.2017
10. La quatrième espèce de moines est celle que l'on nomme gyrovague. Toute leur vie, allant par les différentes provinces, ils se font héberger trois ou quatre jours par les celles des différents moines,
11. toujours errants et jamais stables, asservis à leurs propres volontés et aux tentations de la bouche, et en tout plus détestables que les sarabaïtes.
12. La misérable conduite de tous ces gens-là, mieux vaut la passer sous silence que d'en parler.
13. Laissons-les donc et venons-en, avec l'aide du Seigneur, à organiser la valeureuse espèce des cénobites.
« Toujours errants. jamais stables» ... Nous peinons aujourd'hui à imaginer à quoi
pouvaient ressembler ces moines gyrovagues sur lesquels Benoit ne souhaite pas s'attarder. A
l'inverse, il désire s'arrêter sur « la valeureuse espèce des cénobites» qui, elle, est stable,
avec un vœu spécifique de stabilité. Mais de quelle stabilité s'agit-il? Nous savons qu'au long
des siècles, cette stabilité « bénédictine» a pu connaitre des expressions diverses, jusqu'à
notre P. Muard qui ne voyait pas d'incompatibilité entre ce vœu de stabilité et l'activité
missionnaire. C'est encore le cas dans certains monastères des USA aujourd'hui, ou d'une
congrégation comme St Ottilien. Et aujourd'hui, un autre défi se présente à nous dans des
proportions nouvelles: nous pouvons vivre la stabilité physique, et par internet nous
comporter un vrai gvrovague. Comment ne pas devenir des gyrovagues sur la toile ? Quel
sens chercher et donner à notre stabilité au regard des nouveaux moyens de communication?
Ces questions sont grandes et il n'est pas facile d'y répondre. Elles sont pourtant cruciales
pour chacun de nous. Il y va de la qualité de notre quête intérieure.
« Toujours errants. jamais stables », pourraient donc aussi caractériser des moines qui
ne savent pas maitriser leur rapport à internet. Ici à la Pq V, nous avons fait le choix de laisser
l'accès libre à chacun en faisant confiance à son sens de la responsabilité. Que faisons-
nous de cette liberté? Quel temps passons-nous sur internet Ge ne parle pas des nécessités du
travail) et en parallèle quel temps consacrons-nous à la lectio et à la prière? S'il y a un doute
sur l'équilibre, notons le temps passé, et parlons-en avec le p. abbé ou avec le p. spirituel. Nos
équilibres profonds sont enjeu. Si nous sommes ici, c'est pour demeurer des veilleurs dans la
prière et la charité. Cette veille, commencée dans la prière liturgique, est un labeur de tous les
instants. Tout ce que je fais voudrait servir cette veille pour Dieu afin de mieux l'aimer, le
connaitre et le servir. Même notre détente et nos loisirs, nous voulons les vivre sous son
regard, avec action de grâce et reconnaissance pour le beau cadeau de la vie qu'Il nous offre.
Notre stabilité recherchée en Lui et dans le service de nos frères souffrira de distractions ou de
trop longs temps vécus comme des mises entre parenthèses, ou comme des fuites de notre
réalité présente. Ces fuites créent en nous des tiraillements, voire des dichotomies où l'on ne
sait plus où l'on en est ... Au contraire la veille pour Dieu, avec nos frères, nous unifie. Elle
nous comble en même temps qu'elle nous creuse. Car Dieu n'est pas chiche dans ses dons. - 07.12.2017
6. La troisième et détestable espèce de moines est celle des sarabaïtes. Aucune règle ne les a éprouvés, grâce aux leçons de l'expérience, comme l'or dans la fournaise, mais ils sont devenus mous comme du plomb.
7. Par leurs œuvres, ils restent encore fidèles au siècle, et on les voit mentir à Dieu par leur tonsure.
8. A deux ou trois, voire seuls, sans pasteur, enfermés non dans les bergeries du Seigneur, mais dans les leurs, ils ont pour loi la volonté de leurs désirs.
9. Tout ce qu'ils pensent et décident, ils le déclarent saint ; ce qu'ils ne veulent pas, ils pensent que c'est interdit.
« Aucune règle ne les a éprouvés grâce aux leçons de l'expérience» ... Telle est la
grande caractéristique des sarabaïtes, ils n'arrivent pas à se mettre sous une règle, ils sont ~
eux-mêmes leur propre loi. Ou encore, ils prennent leur propre volonté ou leurs désirs pour
loi. N'y-a-t-il pas en chacun de nous une part de sarabaïte cachée? Celle-ci montre le bout du
nez quand quelque chose ne va pas comme nous le voudrions, ou lorsqu'on fait des choses
sans en parler à qui de droit ou encore sous prétexte d'aller plus vite, lorsqu'on décide sans
consulter les collaborateurs etc ...
Comme le dit St Benoit, la règle nous éprouve ... mais pas pour le plaisir de nous
éprouver. De même que l'or est purifié dans la fournaise, la règle vient affiner en nous le
meilleur. Sans règle, nous n'irions pas au bout de ce que nous pouvons donner et devenir. Elle
vient nous chercher au lieu de nos faiblesses pour nous entrainer plus loin. « Grâce aux leçons
de l'expérience»ajoute St Benoit ... Comme tout corpus de lois, la règle est un condensé
d'expériences passées. Dans sa composition, déjà, elle est un tissu de citations ou d'allusions
à d'autres règles, fruits expériences du passé. De plus, à plusieurs reprises, Benoit fait appel à
l'expérience: à celle des anciens au chap.7 ou encore à une expérience négative sur la manière
de nommer le prieur, etc ... Ainsi, en nous laissant guider par la règle, nous nous appuyons sur
les recherches et les tâtonnements des moines qui nous précèdent. Sans que l'on en connaisse
toutes les raisons, ils nous signalent: ici attention danger, ou là, laisse toi-faire tu
comprendras plus tard, ou vas-y fais confiance ... Cette obéissance n'est pas une obéissance
aveugle, mais plutôt une obéissance abandon. J'accepte de ne pas connaitre tous les tenants et
aboutissants, mais je consens à avancer sur la parole et l'expérience de ceux qui me précèdent.
Et chemin faisant, je vais découvrir que ma vie prend de la consistance. Quelque chose de
profond et de solide se construit. Je suis moins le jouet de mes envies ou de mes caprices. Peu
à peu, je comprends les raisons profondes de la règle. Une intelligence plus large de ma vie
monastique dans le dessein de Dieu se dégage. Partagée avec les frères, elle est une pièce
nécessaire dans la communauté, et plus largement dans le grand corps de l'Eglise. - 06.12.2017
3. Ensuite la seconde espèce est celle des anachorètes, autrement dit, des ermites. Ce n'est pas dans la ferveur récente de la vie religieuse, mais dans l'épreuve prolongée d'un monastère
4. qu'ils ont appris à combattre le diable, instruits qu'ils sont désormais grâce à l'aide de plusieurs,
5. et bien armés dans les lignes de leurs frères pour le combat singulier du désert, ils sont désormais capables de combattre avec assurance les vices de la chair et des pensées, sans le secours d'autrui, par leur seule main et leur seul bras, avec l'aide de Dieu.
Entre cénobites et ermites, il y a toujours eu, au mieux une émulation qui engendre
l'estime et le respect réciproque, et au pire une rivalité source de jugements et de mépris.
Avec St Benoit, nous pouvons considérer la vocation érémitique comme un fruit de la vie
cénobitique dans laquelle elle s'est préparée, sans qu'il y ait nécessité à rechercher qui est
plus ceci ou qui est moins cela. La vocation érémitique, un peu comme celle des chartreux, est
une vocation limite qui nous rappelle à tous le cœur de toute vocation chrétienne: être tout à
Dieu, totalement consacré à Lui. En effet, on peut dire que toute vocation porte en elle
quelque chose de limite. Selon l'évangile, suivre Jésus se présente non comme une voie large
et facile, mais comme une voie étroite. Cette voie invite chacun à aller toujours au-delà de
quelque chose, à toujours dépasser les limites d'un confort ou d'une situation qu'on pourrait
croire enfin établie. Oui, l'appel initial comme l'appel renouvelé chaque jour, nous engage à
nous donner, et à nous donner encore. Car l'appel porte en même temps et l'exigence et la
grâce d'y répondre. Que ce soit dans le mariage vécu selon l'évangile, dans une vie de célibat,
dans la vie consacrée ou dans la vie sacerdotale, chaque baptisé est appelé à aller aux limites
de ce qu'il peut donner. Une vocation chrétienne vivante ne supporte pas la demi-mesure. Elle
s'accommode mal de la tiédeur. Aussi est-ce la raison pour laquelle nous restons tous des
pèlerins tendus vers le Royaume où s'accomplit toute vie humaine. En ce sens, on pourrait
dire que la vocation chrétienne, c'est que notre vie soit accomplie en Christ. Qu'avec lui, en
lui, par lui, comme nous le célébrons en chaque eucharistie, notre vie prenne toute sa mesure
de don dans l'amour reçu et offert. Et pour chacun la mesure est propre. Ce n'est pas l'état
(marié, célibataire, consacré) qui détermine cette mesure. Celle-ci, chacun la cherche et la
recherche sans cesse dans l'écoute attentive de la Parole, afin de tenter de répondre le plus
fidèlement pour sa propre joie, pour celle de ceux qui nous entourent et pour la joie de notre
Père des Cieux qui aime nous voir venir et revenir à lui. En ce jour, nous entourons nos frères
Jean Noël, Placide et Fernando. Nous rendons grâce pour leur vie qui fut réponse à l'appel
initial. Nous remercions Dieu pour la belle partie du chemin déjà parcouru 70 et 50 ans, avec
constance et patience dans les épreuves, avec fidélité et amour dans le service le plus souvent
caché des frères, avec humilité dans le cœur à cœur avec Dieu qui guide chacun dans le secret.
Leur don au Seigneur et à la communauté est un beau cadeau pour nous tous. - 29.11.2017
1. Il est clair qu'il existe quatre espèces de moines.
2. La première est celle des cénobites, c'est-à-dire vivant en monastères ; ils servent sous une règle et un abbé.
Une nouvelle fois, nous entendons cette belle définition de la vie monastique
cénobitique : « vivant en monastère, ils servent sous une règle et un abbé ». Cette définition
est précieuse car elle exprime un équilibre subtil qui, comme tout équilibre, est toujours à
intérioriser afin de le garder vivant et vivifiant.Equilibre donc entre un groupe: la
communauté, une loi: la règle et une autorité: l'abbé. Au cœur de cet équilibre, il y a le
moine qui s'engage à vivre et à servir. Ici, « l'esprit de service» pourrait être regardé comme
l'huile qui permet aux trois éléments de s'articuler ensemble harmonieusement. En effet,
Benoit dit: « ils servent» sous une règle et un abbé ... Cet esprit de service est l'huile ou
encore la sève qui rend la vie communautaire possible. Les frères veulent servir ensemble le
Christ sous une règle et un abbé. L'abbé lui-même, sous la règle, est invité par la règle à servir
ses frères comme le Christ. Et la règle elle-même a pour vocation de servir la vie en Christ de
chacun et de tous. Elle n'est pas un absolu intangible qui imposerait un ordre immuable.
Parfois elle s'adaptera aux nécessités du moment et aux besoins des uns et des autres.
Chaque moine apprend ainsi à servir le Christ dans une triple référence à un groupe, à
une loi et à une autorité. Quand une des références manque, ou bien qu'elle est délaissée,
quelque chose de bancal peut s'instaurer. Le moine risque alors de passer à côté des fruits que
la vocation monastique veut offrir à chacun, et en même temps à l'Eglise et au monde. Si le
moine s'isole du groupe, il perd le soutien, l'encouragement mais aussi la garde que peuvent
lui offrir les frères. Il devient plus vulnérable à ses propres démons ainsi qu'aux illusions de
toute sorte. Il se dessèche pour avoir oublié que le Christ se donne et se reçoit à travers chaque
frère aimé et servi. Si le moine s'habitue à une fausse liberté vis-à-vis de la règle, il risque de
se prendre pour la seule norme. Son imaginaire personnel devient sa propre loi avec toutes les
errances fâcheuses et toutes les conséquences de cet aveuglement. Il oublie que la règle est
une balise précieuse pour une suite concrète du Christ. Si le moine s'émancipe de l'autorité
pour s'autogérer à son gré, il perd ce lien vivant de dépendance dans lequel s'incarne son
désir d'être tout au Christ. L'autorité non reconnue dans la foi, devient pour lui une source
d'oppression. Comme tout équilibre, celui-ci proposé par Benoit se vit dans le mouvement.
Que l'Esprit Saint nous donne de nous y inscrire avec souplesse, profondeur et générosité. - 28.11.2017
45. Il nous faut donc instituer une école pour le service du Seigneur.
46. En l'organisant, nous espérons n'instituer rien de pénible, rien d'accablant.
47. Si toutefois une raison d'équité commandait d'y introduire quelque chose d'un peu strict, en vue d'amender les vices et de conserver la charité,
48. ne te laisse pas aussitôt troubler par la crainte et ne t'enfuis pas loin de la voie du salut, qui ne peut être qu'étroite au début.
49. Mais en avançant dans la vie religieuse et la foi, « le cœur se dilate et l'on court sur la voie des commandements » de Dieu avec une douceur d'amour inexprimable.
50. Ainsi, n'abandonnant jamais ce maître, persévérant au monastère dans son enseignement jusqu'à la mort, nous partagerons les souffrances du Christ par la patience, afin de mériter de prendre place en son royaume. Amen.
Cette fin du prologue se veut réaliste et encourageante à propos de la trajectoire de la
vie monastique. Réaliste, elle ne cache pas les difficultés qui peuvent susciter de la crainte,
voire engendrer le désir de fuir. Encourageante, elle nous fait entrevoir que « l'école du
service du Seigneur» tient la promesse de toute école: elle fait grandir, plus exactement, elle
élargit le cœur.. .En cela, la vie monastique est vraiment « une voie du salut». A la suite du
Christ, elle nous entraine sur un chemin exigeant, mais qui est source de vie. Jésus proposait à
qui voulait le suivre de prendre sa croix. St Benoit ne parle pas de croix, mais de « partager
les souffrances du Christ par la patience». Cette façon de parler est très éclairante. En effet,
tous, nous ne sommes pas appelés au témoignage suprême du sang versé. Mais tous, nous
pouvons participer au mystère de la croix. Et pour les moines, Benoit résume cela en un mot:
« la patience». Patience dans la persévérance fidèle et cachée jusqu'à la mort. Patience dans
la retenue et le respect opposé à un frère qui fait ou dit des choses désagréables. Patience dans
la présence offerte au frère que l'on porte davantage car il ne peut assumer vraiment un travail
ni même la vie quotidienne. Patience quand les choses ne vont pas comme ni aussi vite que je
le voudrais. Cette patience-là est sans éclat, mais elle est bienfaisante pour soi-même et pour
ceux qui nous entoure. Elle nous libère de nous-même, en même temps qu'elle soutient,
rassure, réconforte le frère qui est mal et qui ne peut pas faire autrement. Durant sa passion,
Jésus a affronté le mal des injures, et la violence des coups en leur opposant la patience de
l'amour et du pardon. Sans connaitre le paroxysme de la mort offerte de Jésus, notre patience
fidèle de plus en plus aimante vient collaborer à l'œuvre de salut que Jésus ne cesse de
réaliser dans son Eglise et dans le monde. Au sein de la communauté, elle distille la paix et
l'amour. Vécue jusqu'à la mort dans la persévérance, elle exhale la bonne odeur de
l'espérance. Celui qui persévère dans la patience, malgré les épreuves et les adversités,
témoigne qu'il met son espérance non dans la jouissance immédiate de ce monde, mais dans
le Royaume à venir.Il sait que ce monde ne peut lui donner une joie parfaite. Celle-ci est à
venir. Déjà goûtée dans le cœur qui aime par la patience avec plus de liberté et de vérité, la
joie présente nous tourne un peu plus vers celle du Royaume. - 25.11.2017
38. Car le Seigneur dit, dans sa bonté : « Je ne veux pas la mort du pécheur, mais qu'il se convertisse et qu'il vive. »
39. Nous avons donc interrogé le Seigneur, frères, au sujet de celui qui habitera dans sa demeure, et nous avons entendu le précepte donné pour y habiter, mais pourvu que nous remplissions les devoirs incombant à l'habitant.
40. Il nous faut donc tenir nos cœurs et nos corps prêts à servir sous la sainte obéissance due aux préceptes.
41. Et pour ce que la nature en nous trouve impossible, prions le Seigneur d'ordonner au secours de sa grâce de nous l'accorder.
42. Et si, fuyant les châtiments de la géhenne, nous voulons parvenir à la vie perpétuelle,
43. tandis qu'il en est encore temps et que nous sommes en ce corps et qu'il reste le temps d'exécuter tout cela à la lumière de cette vie,
44. il nous faut à présent courir et accomplir ce qui nous profitera pour toujours.
« Il nous faut à présent courir et accomplir» ... Courir et accomplir.Ces deux verbes
nous disent et le désir et l'engagement concret. Notre vie monastique est portée par le désir
d'être au Christ.Et elle consiste en un agir à son service. Un verset du Ps 44 nous dit bien
cela. On le chante le samedi soir, en mémoire du Christ ressuscité: « Ton honneur, c'est de
courir au combat, pour lajustice, la clémence et la vérité» CPs 44,5) ... Le psaume 44 se
présente comme un poème adressé à un roi qui est beau, mais surtout qui remplit vraiment sa
mission royale en exerçant la justice. Il est tout empli de l'onction reçue de Dieu. Vers lui se
tourne une fille de roi, toute parée, vêtue d'étoffe d'or. Ce psaume a été relu par la tradition,
comme un psaume éminemment christologique. Il nous parle et du Christ et de l'Eglise qui
s'avance vers Lui. On reconnait aussi dans la jeune fille de roi, une figure de la Vierge Marie.
Ce matin, j'aime bien relire le passage du prologue qui exhorte le moine « à courir et
à accomplir» dans la lumière de ce psaume 44. D'une manière très cachée, le moine est
associé au grand combat du Christ,«pour la justice, la clémence et la vérité ». Cette lutte ne
se mène pas contre des ennemis extérieurs ou contre des structures insatisfaisantes, mais avant
tout contre les tendances égoïstes qui nous replient sur nous-mêmes, plus ou moins à notre
insu. Quand nous nous plaçons sous l'autorité du Christ en prenant les armes de l'obéissance,
nous choisissons de faire de notre existence entière, une œuvre de « justice, de clémence et de
vérité». Avec des frères, nous menons le combat du Christ pour qu'advienne dans notre chair,
et dans nos relations mutuelles le Royaume. Dans le psaume, le roi combat certes, mais il
coure au combat.L'évangile nous montre Jésus qui se hâte vers Jérusalem. Autrement dit,
Jésus coure vers le combat ultime. Il se hâte vers la mort pour la traverser librement afin
qu'elle puisse être vaincue. Jésus ne traine pas, il ne tergiverse pas. Il se hâte. Puissions-nous
ce matin, faire nôtre quelque chose de cette hâte du Christ sur nos propres chemins. Il n'y a
pas à trainer pour choisir de nous convertir et de nous donner plus résolument dans ce que
nous avons à faire. Chacun, nous pouvons repérer un point ou un autre à propos duquel nous
nous laissons aller, où sur lequel nous sommes tièdes, voire injustes. Avec le Christ, courons
pour la« justice, la clémence et la vérité». Puissions-nous découvrir que là est notre honneur,
notre joie profonde. - 24.11.2017
32. Et il dit encore : « Celui qui se glorifie, qu'il se glorifie dans le Seigneur. »
33. De là aussi la parole du Seigneur dans l'Évangile : « Celui qui écoute ce que je viens de dire et le met en pratique, je le comparerai à un homme sage, qui a bâti sa maison sur la pierre.
34. Les eaux sont venues, les vents ont soufflé et ont heurté cette maison, et elle n'est pas tombée, parce qu'elle était fondée sur la pierre. ;»
35. Achevant ainsi son discours, le Seigneur attend que nous répondions chaque jour par des actes aux saints enseignements qu'il vient de nous donner.
36. Voilà pourquoi les jours de cette vie nous sont accordés comme un sursis en vue de l'amendement de notre mauvaise conduite,
37. selon le mot de l'Apôtre : « Ne sais-tu pas que la patience de Dieu te conduit à la pénitence ? »
38. Car le Seigneur dit, dans sa bonté : « Je ne veux pas la mort du pécheur, mais qu'il se convertisse et qu'il vive. »
Bâtir sur le roc ou sur le sable? Spontanément nous désirons bâtir sur le roc. Mais
combien de fois ne nous surprenons-nous pas bien défaillant, perdant pied... Combien de fois
ne mesurons-nous pas que nos bonnes intentions sont fragiles et souvent bien peu suivies
d'actions concrètes. Nous croyions notre maison bâtie sur le roc, mais c'était sur du sable ...
N'est-ce pas la raison pour laquelle, chaque jour patiemment nous nous mettons à l'écoute de
la Parole de Dieu?Chaque jour, dans la lectio, la liturgie, dans la prière personnelle, nous
nous laissons creuser par la Parole pour mieux fonder notre existence sur le Christ notre
Roc ... Il nous faut reprendre sans cesse cette écoute afin d"entendre la vraie Parole, celle qui
nous fonde sur le Roc. En effet tant d'autres paroles ou désirs illusoires nous habitent qui
parasitent ou obscurcissent, et qui nous font bâtir sur le sable. Ce seront des formes de peur
bien dissimulées sous de fausses prudences. Ce seront des désirs illusoires enjolivés sous de
fervents propos de conversion. Ce seront des jugements blessants qui se parent d'être des
paroles de discernement. ... Nous remettre sous la Parole chaque jour, avec persévérance et
assiduité, n'est-ce pas notre manière de cultiver une relation juste avec le Seigneur et avec les
autres? Choisir la Parole pour démasquer les fausses paroles, les fausses pensées qui
reviennent souvent comme d'illusoires propos de sagesse ... Ainsi nous apprenons à affiner
notre écoute et notre discernement. St Benoit nous assure que le Seigneur ne veut pas la mort
du pécheur, mais qu'il se convertisse et qu'il vive. Il est bon de ré entendre cette conviction
qui nous replace devant le bon projet de notre Père des cieux. Comme nous l'entendions,
dimanche, il ne désire rien d'autre que de nous faire entrer dans sa joie. La parabole des
talents met bien en scène cette fausse parole qui brouille les cartes et conduit à l'impasse le
possesseur du seul talent. Il se laisse guider par une parole ou une idée de peur. Cela le
, paralyse. Sans cesse, il nous faut discerner dans l'appel à la conversion, non pas la voix d'un
Père qui empêche de vivre, mais la voix d'un Père qui désire nous faire entrer dans sajoie de
Dieu. L'appel à la conversion ou celui à faire fructifier des talents déplace notre désir pour
l'élargir. .. Réjouissons-nous-en. N'ayons pas peur. Notre Père des cieux veut une vie bien
meilleure que celle que nous pouvons imaginer par nous-mêmes. -21.11.2017
21. Ceignant donc nos reins de la foi et de l'accomplissement des bonnes actions, avançons sur ses voies, sous la conduite de l'Évangile, afin de mériter de voir celui qui nous a appelés à son royaume.
22. Si nous voulons habiter dans la demeure de ce royaume, on ne saurait y parvenir, à moins d'y courir par de bonnes actions.
23. Mais interrogeons le Seigneur avec le prophète, en lui disant : « ;Seigneur, qui habitera dans ta demeure, et qui reposera sur ta montagne sainte ? »
24. Cette question posée, frères, écoutons le Seigneur nous répondre et nous montrer le chemin de cette demeure,
25. en disant : « C'est celui qui marche sans se souiller et accomplit ce qui est juste ;
26. qui dit la vérité dans son cœur, qui n'a pas commis de tromperie par sa langue ;
27. qui n'a pas fait de mal à son prochain ;; qui n'a pas laissé l'injure atteindre son prochain ;» ;;
28. qui, lorsque le malin, le diable, lui suggérait quelque chose, l'a repoussé loin des regards de son cœur, lui et sa suggestion, l'a réduit à néant, et s'emparant de ses petits – les pensées qu'il lui inspirait – les a écrasés contre le Christ.
29. Ce sont ceux-là qui, craignant le Seigneur, ne s'enorgueillissent pas de leur bonne observance, mais qui, estimant que ce qui est bon en eux ne peut être leur propre œuvre, mais celle du Seigneur,
30. magnifient le Seigneur qui opère en eux, en disant avec le prophète : « Non pas à nous, Seigneur, non pas à nous, mais à ton nom rends gloire ! »,
31. de même que l'Apôtre Paul, lui non plus, ne s'attribuait rien de sa prédication et disait : « C'est par la grâce de Dieu que je suis ce que je suis. »
32. Et il dit encore : « Celui qui se glorifie, qu'il se glorifie dans le Seigneur. »
Dans ce passage, St Benoit présente deux des fondements de la vie
monastique: l'agir juste, et la parole juste. Nous apprenons peu à peu
au monastère à rendre nos paroles et nos actes plus conformes à
l'enseignement du Christ, à l'Evangile. Cette transformation ne se fait
pas en un jour. Il y faut toute la vie. Mais elle est nécessaire pour que
nous ne vivions pas dans l'illusion, ni dans le mensonge.
Plusieurs fois dans ce passage St Benoit revient sur l'agir juste: il parle
de « la pratique des bonnes actions ». Il s'adresse à « celui qui marche
sans tache et pratique la justice », à « celui qui ne fait pas de mal à son
prochain ». Mais St Benoit sait que cet agir juste est un don de Dieu,
une grâce. C'est pourquoi il précise: « Ces hommes-là ne se vantent pas
de leur bonne conduite. Il estiment que ce qu'il y a de bien en eux ne
peut pas être leur propre œuvre, mais celle du Seigneur ». « Il glorifient
Dieu qui agit en eux ». Et il ajoute: « Que celui qui se glorifie se glorifie
dans le Seigneur ».
A cet agir juste, correspond donc un parole juste, sur soi-même, mais
.
aussi sur les autres. Car la parole juste conduit à l'humilité, mais aussi
au respect de l'autre. Le premier conseil à ceux qui désirent faire un pas
dans la vie intérieure c'est de garder sa langue, supprimer tout
commérage. On ne peut ne peut entendre la Parole de Dieu quand
notre cœur est occupé de paroles mondaines. Ni parler à Dieu dans le
bruit d'une conversation où Dieu n'a pas de place.
Agir juste, parole juste. Voilà un choix de vie qui aide à traverser les
tempêtes, les difficultés, les épreuves. Car seule la maison bâtie sur le
roc peur résister à la tempête. Toutes les autres seront emportées par
le torrent des passions: la jalousie, la colère, l'envie, les désirs de la
chair.
Ce passage est aussi un bel exemple de christianisation du psautier. Ici,
St Benoit a repris le Psaume 14. Ille cite, il le paraphrase, il le
commente. Il met le Christ au cœur du Psaume. -16/11/17
14. Et se cherchant un ouvrier dans la foule du peuple, à laquelle il lance cet appel, le Seigneur dit de nouveau :
15. « Quel est l'homme qui veut la vie et désire voir des jours heureux ? »
16. Si, en entendant cela, tu réponds : « C'est moi ! », Dieu te dit :
17. « Si tu veux avoir la vie véritable et perpétuelle, interdis le mal à ta langue et que tes lèvres ne prononcent point la tromperie. Évite le mal et fais le bien, cherche la paix et poursuis-la.
18. Et quand vous aurez fait cela, j'aurai les yeux sur vous et je prêterai l'oreille à vos prières, et avant que nous m'invoquiez, je dirai : me voici ! »
19. Quoi de plus doux que cette voix du Seigneur qui nous invite, frères bien aimés ?
20. Voici que, dans sa bonté, le Seigneur nous montre le chemin de la vie.
Si nous nous mettons à l'écoute, comme nous y invite le premier mot
de la Règle, un jour, nous entendrons le Seigneur. Il nous parle à travers
l'Ecriture. Pour Benoit, c'est l'essence de la vocation monastique: avoir
fait l'expérience que la Parole de Dieu est une parole pour moi.
Mais cette parole que Dieu adresse à celui qui frappe à la porte du
monastère, a une double tonalité. Elle est une invitation au bonheur:
« Quel est l'homme qui aime la vie, et désire voir des jours heureux? »
Mais elle est aussi une invitation à la conversion: « Garde ta langue du
mal, et tes lèvres des paroles trompeuses. Détourne-toi du mal, et fais
le bien. Cherche la paix, et poursuis-la. »
1/ s'agit donc d'abord d'une invitation au bonheur. Pour devenir moine,
il faut aimer la vie. Si nous avons laissé de côté le monde et ses plaisirs,
ce n'est pas par mépris de la vie. Au contraire, c'est l'amour de la vie
qui vous pousse à désirer ce qu'il y a de plus précieux, de plus beau, de
plus vrai, de meilleur: Dieu lui-même!
Mais pour trouver le chemin qui mène à Dieu, il faut laisser tomber bien
des choses: le mal, le mensonge, tout ce qui ne satisfait qu'un instant.
Pour Benoit, le renoncement n'est qu'une conséquence de notre amour
de la vie. Et une condition pour qu'il puisse aboutir un jour. Bien sûr, il y
a des routes qui semblent plus attrayantes, plus faciles, plus larges. Et il
peut nous arriver de le penser quand nous peinons. Mais l'expérience
nous l'apprend, il n'y a pas de chemin facile pour celui cherche le vrai
bonheur. Apprendre à aimer est toujours un chemin de renoncement à
soi-même.
St Bernard, disait à ses moines: « Ne cherchez rien comme Dieu, rien
plus que Dieu, rien hors de Dieu. » Ayons donc le cœur assez silencieux
pour entendre l'appel de Dieu, et pour y répondre. Nous voulons être
fidèles à son appel. Nous voulons être vivants. Nous voulons aimer.
Nous cherchons le bonheur. -15/11/17