Pour offrir les meilleures expériences, nous utilisons des technologies telles que les cookies pour stocker et/ou accéder aux informations des appareils. Le fait de consentir à ces technologies nous permettra de traiter des données telles que le comportement de navigation ou les ID uniques sur ce site. Le fait de ne pas consentir ou de retirer son consentement peut avoir un effet négatif sur certaines caractéristiques et fonctions.
Le stockage ou l’accès technique est strictement nécessaire dans la finalité d’intérêt légitime de permettre l’utilisation d’un service spécifique explicitement demandé par l’abonné ou l’utilisateur, ou dans le seul but d’effectuer la transmission d’une communication sur un réseau de communications électroniques.
Le stockage ou l’accès technique est nécessaire dans la finalité d’intérêt légitime de stocker des préférences qui ne sont pas demandées par l’abonné ou l’utilisateur.
Le stockage ou l’accès technique qui est utilisé exclusivement à des fins statistiques.
Le stockage ou l’accès technique qui est utilisé exclusivement dans des finalités statistiques anonymes. En l’absence d’une assignation à comparaître, d’une conformité volontaire de la part de votre fournisseur d’accès à internet ou d’enregistrements supplémentaires provenant d’une tierce partie, les informations stockées ou extraites à cette seule fin ne peuvent généralement pas être utilisées pour vous identifier.
Le stockage ou l’accès technique est nécessaire pour créer des profils d’utilisateurs afin d’envoyer des publicités, ou pour suivre l’utilisateur sur un site web ou sur plusieurs sites web ayant des finalités marketing similaires.
3. Ensuite « ne pas tuer,
4. ne pas commettre d'adultère,
5. ne pas voler,
6. ne pas convoiter,
7. ne pas porter faux témoignage. »
8. Honorer tous les hommes,
9. et « ne pas faire à autrui ce qu'on ne veut pas qu'on nous fasse ;».
(Ne pas ... Ne pas faire le mal, c'est déjà aimer, peut-on dire si on essaie de lire les 72
instruments comme un déploiement du dble commandement de l'amour en tête de ce chapitre
Ne pas tuer: la vie vient de Dieu, et retourne à Lui après avoir fructifié en vie donnée
et en amour partagé. La vie appartient à Dieu. Ne pas tuer sonne comme une limite radicale à
ne pas dépasser en vertu du respect dû au prochain bien sûr. Mais il retentit aussi comme une
reconnaissance de la Seigneurie de Dieu sur tout être vivant sorti de ses mains.
Ne pas commettre l'adultère: cet interdit signe la grandeur de l'amour qui peut habiter
l'homme, un amour porteur en germe d'une alliance et d'une fidélité jusqu'au bout. Le Dieu
fidèle désire faire goûter à l'homme la joie et la grandeur de l'amour qui n'a pas de fin.
Ne pas voler: Accepter de dépendre des autres et de Dieu, de manquer peut-être, mais
en aucun cas: prendre à autrui. Ne pas voler pour éviter une blessure faite à l'homme qu'on
lèse, et pour éviter une injure faite à Dieu qu'on ne pense pas capable de venir à notre secours.
Ne pas convoiter: après le vol, et l'adultère, la convoitise peut trouver de nombreuses
expressions, depuis la convoitise d'un chocolat à celle d'une voiture. Ne pas laisser s'installer
en nous la convoitise, c'est vivre dans l'échange oùje prends conscience que je reçois
toujours davantage que je donne.
Ne pas porter de faux témoignages: ne pas tuer la réputation d'autrui par la médisance
ou la calomnie, en les présentant comme des vérités. Si la vérité rend libre, elle préserve avant
tout la vie. Ne nous laissons pas aveugler et ne soyons pas complaisants par rapport aux
paroles qui blessent et qui tuent la vie des autres.
Ne pas faire à autrui ce qu'on ne veut pas qu'on nous fasse. Parole proverbiale reprise
par Jésus qui se fonde sur la propre conscience de soi. Plus je connais ma fragilité et mes
limites, moins je suis tenté de faire ce que je ne peux supporter moi-même. Mais se connaitre
soi-même est difficile. Beaucoup de nos conflits ne trouvent-il pas là leur source?
Honorer tous les hommes, dit St Benoit: cette formule résume en positif tous les
ne ... pas énumérés ci-dessus. Oui, cultivons en ce désir d'honorer tous les hommes, à
commencer par les plus petits à nos côtés. Demandons à l'Esprit Saint de nous donner ce
regard divin sur chaque être. - 31.01.2018
1. En premier lieu, « aimer le Seigneur Dieu de tout son cœur, de toute son âme, de toutes ses forces » ;
2. ensuite « son prochain comme soi-même ».
Il y a quelques jours, nous entendions aux vigiles dans le livre du Deutéronome, ce
premier commandement: « Tu aimeras le Seigneur ton Dieu, de tout ton cœur, de toute ton
âme et de toute ta force» ... l'ai été frappé cette fois par la suite: « Ces paroles que je te
donne aujourd 'hui resteront dans ton cœur. Tu les rediras à tes fils, tu les répèteras sans
cesse, à la maison ou en voyage, que tu sois couché ou que tu sois levé; tu les attacheras à
ton poignet comme un signe, elles seront un bandeau sur le front, tu les inscriras à l'entrée de
ta maison et aux portes de la ville» (Dt 6, 5-9). A sa manière, le livre du Deutéronome avait
cette notion de parole-instrument pour la vie spirituelle que l'on trouve dans ce chapitre 4 de
la RB. Le commandement de l'amour de Dieu que l'on répète, que l'on écrit comme un signe
au poignet, sur un bandeau sur le front ou aux portes de la ville, devient l'instrument de
l'alliance avec Dieu. La répétition du commandement, de même que le fait de l'écrire sur des
supports, veut soutenir et creuser la mémoire du cœur.La parole, que Dieu adresse à chaque
israélite, est appelée à demeurer dans le cœur pour y porter un fruit d'intimité avec Dieu.
Cette insistance forte nous laisse entendre combien Dieu prend très au sérieux sa relation avec
nous, et combien il nous croit capable de la prendre au sérieux à notre tour. Il s'engage tout
entier dans la relation en nous aimant avec une puissance d'amour que nous peinons à
imaginer. Et il nous fait cet honneur de nous croire capable de nous engager tout entier dans
notre amour pour lui, de « tout» notre cœur, de « toute» notre âme, et de « toute» notre
force. De même qu'en Dieu, il n'y a pas de mesure à son amour offert pour nous, de même il
nous propose d'aller au bout de nous-même, pour l'aimer en donnant toute notre mesure ... En
mettant ce premier commandement de l'amour au début des 74 instruments des bonnes
œuvres, St Benoit fixe l'horizon de tout l'effort de l'homme appelé à aimer son Dieu. Les 73
instruments suivants seront des applications et des manières avec lesquelles chacun va
déployer cet amour de Dieu inséparable de l'amour du prochain ... S'exprimeront 73 manières
de vivre cet engagement pour Dieu de tout son cœur, de toute son âme et de toute sa force.
Recevons-les avec la Parole de Dieu entendue chaque jour comme un appel et une chance
pour sans cesse déployer et renouveler notre capacité à airrer, en laquelle Dieu a grande
confiance ... - 30.01.2018
7. Tous suivront donc en tout la règle comme leur maîtresse, et nul n'aura la témérité de s'en écarter.
8. Personne au monastère ne suivra la volonté de son propre cœur,
9. et nul ne se permettra de contester avec son abbé insolemment ou en dehors du monastère.
10. Si quelqu'un se le permet, il subira les sanctions de règle.
11. De son côté, cependant, l'abbé fera tout dans la crainte de Dieu et le respect de la règle, sachant qu'il devra sans aucun doute rendre compte de tous ses jugements au juge souverainement équitable qu'est Dieu.
12. S'il est question de choses moins importantes pour le bien du monastère, il aura recours seulement au conseil des anciens,
13. comme il est écrit : « Fais tout avec conseil, et quand ce sera fait, tu ne le regretteras pas. »
«Tous suivront la règle comme leur maitresse». Suivre la règle s'oppose ici à « suivre
la volonté de son propre cœur» ... Expression que l'on retrouve sous des termes semblables au
chapitre 72, 7 : « nul ne recherchera (suivra en latin) ce qu'il juge être son avantage, mais
plutôt celui d'autrui ». Avec cette opposition entre «suivre la règle» et « suivre la volonté de
son propre cœur» nous avons une bonne part du travail spirituel qui a court dans l'école du
service du Seigneur. Jour après jour, sous la conduite de la règle, nous nous entrainons à faire
des choses que, laissés à nous-mêmes, nous ne ferions peut-être pas. Si la cloche ne venait
nous appeler à l'office serions-nous aussi assidus à prier? Si la règle ne nous entrainait à
vivre côte à côte avec des frères, les aurions-nous choisis spontanément? Oui la règle est une
maitresse de vie. Elle nous tire, elle nous sort de nous-mêmes pour un dépassement. Laissés à
nous-mêmes, nous n'aurions pas exploré d'autres capacités de don. Le lever de nuit, ou le
lever tôt pour la prière, l'attention et l'amour pour des frères que j'aurai peut -être méprisé
dans le monde, le silence qui m'enseigne le poids de ma parole, la vigilance dans mes pensées
pour ne pas être ballotté au gré de n'importe quelle idée, l'attention aux objets et à la valeur
des choses par souci de pauvreté ... etc ... Avec la règle l'évangile s'incarne dans la réalité
concrète, et peu à peu se façonne un être nouveau. A l'heure de l'informatique, une grosse
erreur serait cependant de confondre cette formation avec un formatage. Non, la règle
monastique ne veut pas formater, mettre tout le monde sous un même format, mais elle veut
former des hommes debout, charpentés pour être plus libre et pour aimer. Plus libre par
rapport à quoi? Pas tant vis-à-vis d'une oppression extérieure que vis-à-vis de nos démons
intérieurs, de nos fausses représentations de nous-mêmes qui déprécient autant qu'elles
glorifient. Ces fausses représentations de nous-mêmes nous font vouloir ou désirer des choses
qui ne sont pas nécessaires, ni bonnes pour nous. C'est la volonté propre dont parle à
plusieurs reprises St Benoit, cette part de notre volonté qui se croit libre alors qu'elle est
victime de ses illusions. Comment sortir de l'illusion?En sachant demander conseil, en se
mettant à l'écoute d'une parole. La recommandation finale faite à l'abbé: «fais tout avec
conseil », peut être comme un bâton secourable pour tous dans notre marche. Oui sachons
demander conseil,sachons soumettre nos idées ou projets à un regard autre ... Si la règle peut
être un précieux garde-fou, le conseil d'un frère affermira le pas.
- 26.01.2018
1. Chaque fois qu'il sera question au monastère de quelque chose d'important, l'abbé convoquera toute la communauté et dira lui-même de quoi il est question.
2. Une fois entendu le conseil des frères, il en délibérera à part soi et fera ce qu'il juge le meilleur.
3. Or si nous avons dit que tous seraient appelés au conseil, c'est que souvent le Seigneur révèle à un inférieur ce qui vaut le mieux.
4. Or donc les frères donneront leur avis en toute soumission et humilité, et ils ne se permettront pas de défendre leur opinion effrontément,
5. mais la décision dépendra de l'abbé : celle qu'il juge être plus opportune, tous y obéiront.
6. Toutefois, s'il sied aux disciples d'obéir au maître, il convient que celui-ci dispose toute chose avec prévoyance et justice.
Ce petit chapitre donne la clef d'un possible vivre ensemble selon St Benoit. Il
constitue comme la pierre de fondation sur laquelle s'édifie le vivre ensemble communautaire.
Cette pierre de fondation consiste en une manière propre d'opérer le discernement dans les
décisions à prendre. Ce discernement n'est ni le fruit de la pensée d'un seul (l'abbé ou un
frère), ni le fruit de la majorité. Il est le fruit d'une écoute commune de tous les avis, et d'une
décision finale prise par l'abbé. Cet équilibre entre le tous et l'un est subtil. Il n'est pas
aisément réductible à des schémas humains habituels de gouvernement. Humainement, nous
voyons les systèmes politiques osciller entre la décision fruit d'une majorité et entre la
décision d'un seul. Nos systèmes démocratiques se font souvent l'écho de cette tension,
comme l'exemple récent de l'abrogation du projet de l'aéroport de Notre Dame des Landes en
témoigne. Beaucoup ont été étonnés voire scandalisés par cette décision. En effet elle va
contre une majorité démocratique exprimée sur le plan local, ainsi que contre les promesses
exprimées par le candidat Macron et validées démocratiquement lors de son élection. Dans
une logique démocratique pure, l'aéroport avait deux bonnes raisons d'être réalisé. Dans notre
fonctionnement monastique, comment St Benoit organise-t-il la gestion de la tension entre le
tous et l'un? Cette tension n'est gérable pour lui qu'à la lumière de la foi. Celle-ci conduit les
moines à entrer dans une écoute spirituelle afin de chercher quelle est la volonté de Dieu.
Chaque frère est invité à aborder les « affaires importantes» pour lesquelles la communauté
est réunie, avec responsabilité pour donner son avis, et avec liberté vis-à-vis de sa propre
parole. Cherchant à faire la volonté de Dieu, il garde toujours une distance par rapport à son
propre avis pour mieux écouter celui des autres. Il n'en va pas autrement pour l'abbé qui doit
se mettre à l'écoute de tous sans préjugé, de telle sorte qu'il soit capable d'entendre dans la
parole d'un plus jeune ou d'un frère dont on l'attend moins, une lumière précieuse sur la
volonté de Dieu. Le discernement de la volonté de Dieu est à ce prix: responsabilité et liberté
de chacun, abbé y compris. La décision qui revient à l'abbé sera alors d'autant plus ajustée
qu'elle sera sous-tendue par ce climat de disponibilité à l'œuvre de l'Esprit qui restera alors
vraiment le maitre du jeu ... Demandons la grâce les uns pour les autres de cette écoute et de
cette liberté profonde pour discerner la volonté de Dieu dont « les pensées sont au-dessus de
nos pensées. » (Is 55,9) - 25.01.2018
37. Et qu'il sache que, quand on se charge de diriger les âmes, on doit se préparer à en rendre compte.
38. Et autant il sait avoir de frères confiés à ses soins, qu'il soit bien certain qu'il devra rendre compte au Seigneur de toutes ces âmes au jour du jugement, sans parler de sa propre âme, bien entendu.
39. Et ainsi, craignant sans cesse l'examen que le pasteur subira un jour au sujet des brebis qui lui sont confiées, en prenant garde aux comptes d'autrui, il se rend attentif aux siens,
40. et en procurant aux autres la correction par ses avertissements, lui-même se corrige de ses vices.
En ces lignes, Benoit rappelle pour la 5° fois à l'abbé qu'il devra rendre compte de sa
conduite et de la croissance de ceux qui sont confiés à sa vigilance (RB 2,6, 14,34,38,39).
En ces lignes, nous avons une sorte de concentré sur la personne de l'abbé pasteur, d'une
conviction biblique que nous sommes tous responsables les uns des autres. Ezéchielle disait:
« Toi aussi fils d'homme, je t'ai fait sentinelle pour la maison d'Israël.Lorsque tu entendras
une parole de ma bouche, tu les avertiras de ma part .... Si tu ne parles pas pour avertir le
méchant d'abandonner sa conduite, c'est lui le méchant qui mourra dans son péché, mais
c'est à toi que je demanderai compte de son sang ... » (Ez 33,7-9) Jésus, le Fils de l'homme a
été par excellence « sentinelle» pour notre humanité, par sa parole d'autorité de justice et de
vérité. Il a été une sentinelle fragile puisqu'il ayant parlé en vérité, il en est mort. Mais la
vérité qu'il a proclamé n'en ressort que plus grande. A sa suite, membres les uns des autres en
Jésus, nous sommes des sentinelles, les uns vis à vis des autres. Dans le monastère, l'abbé est
sentinelle à un titre spécial, pour aider, reprendre, interroger et interpeller. Mais je crois que
chacun des frères à sa place est aussi sentinelle pour ses frères. Il n'est pas rare qu'un frère me
dise « un tel a/ait ceci ou cela », il faudrait faire quelque chose. Sous-entendu, toi le P. Abbé,
fais quelque chose ... Mais, n'ayant rien vu, seulement entendu ce qui est rapporté, le P. Abbé
est-il toujours le mieux placé pour dire quelque chose? Parfois oui, mais pas toujours ... Dans
l'évangile, Jésus dit d'abord: « Si ton frère vient à pécher, va le trouver et reprends-le seul à
seul» (Mt 18,15) ... Je remarque que trop souvent les frères n'osent pas« aller trouver seul à
seul un frère» pour lui dire ce qui ne va pas ... Je crois qu'il faut que nous grandissions dans
cette qualité de vie fraternelle où l'on arrête de parler du frère dans son dos, pour lui parler en
face. Je le reconnais, cela n'est pas facile. Cette démarche requiert du courage, mais aussi de
l'amour que l'on puisera dans la prière, et parfois dans le jeûne. Il ne s'agit pas d'invectiver
en disant: « tu as fait cela, tu es comme cela etc» ... mais plutôt de dire: « j'ai vu cela, j'ai
entendu cela, et cela m'a choqué, et semblé injuste » ... Non pas parler en « tu » mais en « je».
De cette manière, je me situe en frère devant un autre frère, dans une même responsabilité vis-
à-vis de notre vie commune qui demande une vigilance constante. Je ne me situe pas en
juge ... Si le frère réagit mal à cause de sa susceptibilité blessée, c'est son problème. J'ai dit ce
qui me semblait devoir être dit. Si Jésus la Sentinelle de l'humanité est mort, ne pouvons-nous
pas supporter les égratignures de réactions un peu vives? 23.01.2018
30. L'abbé doit toujours se rappeler ce qu'il est, se rappeler le titre qu'on lui donne, et savoir que « plus on commet à la garde de quelqu'un, plus on lui réclame ».
31. Et qu'il sache combien difficile et ardue est la chose dont il s'est chargé, de diriger les âmes et de se mettre au service de caractères multiples : l'un par la gentillesse, un autre par la réprimande, un autre par la persuasion... ;
32. et selon la nature et l’intelligence d’un chacun, il se conformera et s’adaptera à tous, de façon non seulement à ne pas subir de perte dans le troupeau commis à sa garde, mais aussi à se féliciter de l’accroissement d’un bon troupeau.
33. Avant tout, qu'il ne laisse point de côté ni ne compte pour peu de chose le salut des âmes commises à sa garde, en prenant plus de soin des choses passagères, terrestres et temporaires,
34. mais qu'il songe sans cesse qu'il est chargé de diriger des âmes, dont il devra aussi rendre compte.
35. Et pour ne pas se plaindre d'un éventuel manque de ressources, qu'il se souvienne qu'il est écrit : « Cherchez d'abord le royaume de Dieu et sa justice, et tout cela vous sera donné par surcroît » ;
36. et encore : « Rien ne manque à ceux qui le craignent. »
Après la coupure de Noël et de la retraite, nous retrouvons la règle. Je la reprends là où
nous l'avions arrêtée. Dans la tonalité globale de ce chapitre, st Benoit rappelle l'abbé à ses
responsabilités... responsabilités qui sont liées à la mission d'abord spirituelle qui lui est
confiée. « Diriger les âmes et se mettre au service de caractères multiples ... » Comme
serviteur du troupeau de Dieu, cette attention au chemin de chacun lui revient. Mission
« difficile et ardue» dit Benoit, mission impossible? Quand St Benoit suggère qu'il devra
« se conformer et s'adapter à chacun », on peut penser que c'est une attitude spirituelle, et pas
seulement psychologique, qu'il vise. Est présupposée: la foi de l'abbé en l'action de l'Esprit
Saint en chacun. De même que les frères sont invités à poser l'acte de foi qu'à travers l'abbé
le Christ les guide, de même l'abbé est invité à croire que l'Esprit Saint œuvre en chacun ...
Car Dieu est le Bon Pasteur qui prend soin de chacun. Il nous a rassemblé ici, ses enfants afin
que, personnellement et tous ensemble, soutenus les uns par les autres, nous puissions grandir
dans l'intimité de son Amour et dans l'amour mutuel partagé. Lui le Bon Pasteur connait
vraiment les raisons pour lesquelles il nous a appelés ici, en cette époque précise, et avec ses
frères là. L'abbé doit se mettre à l'écoute avec les frères, du projet de Dieu, le Bon Pasteur
afin d'en être un bon serviteur pour chacun et pour la communauté.
Pour ma part, je trouve une grande aide dans la citation faite par Benoit: « Cherchez
d'abord le Royaume de Dieu et sa justice,et tout cela vous sera donné ». Chercher la justice
du Royaume, avec les frères, dans les échanges, mais aussi dans la prière, dans l'écoute
attentive de la Parole de Dieu. Cette justice ne se laisse jamais saisir ni enfermer dans une
seule façon de voir, dans un concept ou une idée. L'histoire de l'Eglise nous dit même qu'elle
se découvre parfois aussi à travers bien des tribulations, finalement à travers le mystère de la
Croix. Oui, en regardant Jésus, nous apprenons que la quête de justice des hommes qui tend
vers la justice du Royaume, ne l'équivaut jamais. Lajustice du Royaume intègre le passage
par la petitesse, la faiblesse, comme ce que nous visons ces jours-ci autour de F.Jacques dans la patience, l’amour, la présence gratuite, finalement la mort et la résurrection. Apprenons à considérer nos difficultés, nos lenteurs ou nos échecs dans cette lumière-là. Ainsi nous nous fonderons non
pas sur nos succès humains, mais bien sur l’espérance que Jésus Vivant est a oeuvre a
travers tout cela. Ne cessons pas de nous appuyer sur Lui. - 20.01.2018
23. Dans son enseignement, d'autre part, l'abbé doit toujours observer la norme que l'Apôtre exprime ainsi : « Reprends, supplie, réprimande »,
24. c'est-à-dire que, prenant successivement des attitudes diverses, mêlant les amabilités aux menaces, il se montrera farouche comme un maître et tendre comme un père.
25. C'est dire qu'il doit reprendre durement les indisciplinés et les turbulents, supplier d'autre part les obéissants, les doux et les patients de faire des progrès ; quant aux négligents et aux méprisants, nous l'avertissons de les réprimander et de les reprendre.
26. Et qu'il ne laisse point passer les fautes des délinquants, mais qu'il les retranche jusqu'à la racine dès qu'elles commencent à se montrer, pendant qu'il en a encore le pouvoir, se souvenant de la condamnation d'Héli, le prêtre de Silo.
27. Les âmes bien nées et intelligentes, qu'il les reprenne une et deux fois par des admonitions verbales,
28. mais les mauvais sujets, durs, orgueilleux, désobéissants, que les coups et le châtiment corporel les arrêtent dès le début de leur faute, vu qu'il est écrit : « On ne corrige pas un sot avec des mots »,
29. et encore : « Frappe ton fils de la verge et tu délivreras son âme de la mort. »
« On ne corrige pas un sot avec des mots » .... Cette formule tirée du livre des
proverbes est abrupte. Elle montre bien les limites de la parole entre les hommes, et plus
particulièrement entre nous au sein d'une communauté. Celle-ci est parfois impuissante.
Cependant St Benoit exhorte l'abbé à dire les choses, à « reprendre, supplier et
réprimander » ... Il laisse entendre qu'il croit en la puissance de la parole pour alerter un frère
sur son comportement, et pour lui éviter de s'égarer. Mais, à la fin du passage entendu, st
Benoit fait appel à une autre pédagogie, celle des coups quand la pédagogie de la parole
n'obtient rien. « On ne corrige pas un sot avec des mots ». La traduction de la Bible de
Jérusalem diffère un peu: « On ne corrige pas un esclave avec des mots, même s'il comprend
il n'obéit pas» (Pr 29, 19). La mention de l'esclave est suggestive. Elle peut éclairer notre
situation. Parfois des frères me disent: « tu devrais dire cela à un frère» ... Il m'arrive assez
souvent de répondre: « Tu sais, je l'ai déjà dit au frère, mais cela n'a rien changé ». La parole
n'atteint pas ce frère. Pourquoi? Peut-être est-il esclave à son insu de quelque chose qui le
rend imperméable à cette parole, ou de quelque chose qui le rend impuissant à obéir. .. Il n'est
pas complètement maitre de lui. Ce constat est toujours douloureux. Mais qui peut dire qu'il
est complètement libre face à une parole qui l'interpelle? La révélation biblique met sous nos
yeux l'histoire tumultueuse du dialogue entre Dieu et son peuple, entre Dieu et chacun de ses
enfants. Dieu ne cesse d'ouvrir les voies d'un dialogue vrai et intime avec chacun. Et
cependant une part en nous ne veut pas entendre quand c'est trop exigeant. Nous supportons
mal d'être remis en cause: orgueil? peur? angoisse de paraitre dévalorisé à nos propres
yeux? Dieu ne se résigne pourtant pas. Il s'obstine même à s'adresser à nous. Cette
obstination divine est une école pour l'abbé et pour notre vie commune. Même face à un frère
qui ne semble pas entendre, il s'agit de trouver les moyens de faire comprendre, d'interpeller
quand le frère lui-même est en danger ou qu'il met en danger la vie commune. Rude école
d'amour face à une liberté qui se pense libre alors qu'elle est en partie aveugle sur elle-
même ... Mystère de notre humanité blessée qui peine à se laisser guérir, accompagner et
sauver. Pauvres que nous sommes, nous sommes associés ici à Jésus qui le premier a fait les
frais de cet endurcissement d'oreille et de cœur. Mais sa victoire sur la mort fait de lui, le
Soleil de justice qui repousse les ombres de la mort. Viens, Seigneur, viens nous sauver. 21.12.2017
16. Il ne fera pas de distinction entre les personnes dans le monastère.
17. Il n'aimera pas l'un plus que l'autre, à moins qu'il ne l'ait reconnu meilleur dans les bonnes œuvres ou l'obéissance.
18. A l'homme venu de l'esclavage qui entre en religion, il ne préférera pas l'homme libre, à moins qu'il n'existe une autre cause raisonnable.
19. Que si l'abbé en décide ainsi, la justice l'exigeant, il fera de même pour le rang de qui que ce soit ; sinon, ils garderont leur place normale,
20. car « esclave ou libre, nous sommes tous un dans le Christ », et sous un même Seigneur nous portons d'égales obligations de service, car « Dieu ne fait pas acception de personnes. »
21. Notre seul titre à être distingués par lui, c'est d'être reconnus meilleurs que les autres en bonnes œuvres et humbles.
22. L'abbé doit donc témoigner une charité égale à tous, avoir les mêmes exigences dans tous les cas suivant les mérites.
Dans ces lignes entendues, St Benoit demande à l'abbé d'être un témoin de l'égale
charité de Dieu pour tous. Sa position d'autorité doit montrer que ce qui est important n'est
pas la condition ou les qualités humaines des personnes, mais la recherche menée par chacun
pour servir le Christ dans l'humilité et l'obéissance ... L'autorité de l'abbé voudrait faire signe
de cette autorité divine qui autorise chacun à prendre toute sa mesure ... Tâche rude, voire
impossible pour un homme, ou du moins tâche toujours en quête d'être accomplie ... L'enjeu
spirituel est pourtant important puisqu'il s'agit de manifester à chacun qu'il est aimé à part
entière par le Christ qui est mort pour tous. Lui ne regarde que les dispositions intérieures de
chacun à s'engager dans le bien et la conversion.
Comment ensemble, l'abbé et la communauté avec lui, nous entrainer et nous habituer
à développer ce regard du Christ sur nos frères, un regard qui perçoit le mouvement profond,
l'élan du coeur? Nous devons nous méfier des fascinations que peuvent exercer les qualités
humaines ou les aptitudes intellectuelles, artistiques ou manuelles. Les reconnaitre, c'est bien.
Mais leur donner une trop grande importance porte toujours le risque d'introduire des
discriminations entre celui qui a ces aptitudes et celui qui ne les a pas. Sans s'en rendre
compte alors, cela risque toujours de laisser quelqu'un dans l'ombre. Peut-être aussi devons-
nous être vigilants lorsque nous soulignons les qualités humaines de quelqu'un. Qu'est-ce
qu'on fait en pareille occasion? Il peut arriver que plus ou moins inconsciemment on dévalue
un autre en montant un frère sur le pinacle ... Je me souviens du f. Martin à qui je disais de
bonnes choses sur lui en présence de sa famille, réunie autour de lui. Il m'avait répondu assez
fermement: « le Seigneur a dit: « tu ne jugeras pas » ... Qui sommes-nous en effet pour juger
même des bonnes choses? Aux yeux de st Benoit, seuls méritent d'être mis en valeur les
frères qui se distinguent par leur obéissance, leur humilité ou leurs bonnes œuvres. Faire
ressortir ainsi ces qualités vise en fait moins à mettre un frère en valeur qu'à rappeler à tous ce
que nous devons sans cesse rechercher. « Tous nous portons d'égales obligations de service »
tous nous sommes dignes du même amour de la part de Dieu. Son amour nous prend comme
nous sommes, et en même temps nous entraine à faire fructifier l'amour reçu... -20.12.2017
11. Quand donc quelqu'un prend le titre d'abbé, il doit diriger ses disciples par un double enseignement,
12. c'est-à-dire qu'il montrera tout ce qui est bon et saint par les actes plus encore que par la parole. Ainsi, aux disciples réceptifs il exposera les commandements du Seigneur par la parole, aux cœurs durs et aux plus simples il fera voir les préceptes divins par ses actes.
13. Inversement, tout ce qu'il enseigne aux disciples à regarder comme interdit, qu'il fasse voir par ses actes qu'on ne doit pas le faire, « ;de peur qu'en prêchant aux autres, il ne soit lui-même réprouvé »,
14. et qu'un jour Dieu ne lui dise, à cause de ses péchés : « ;Pourquoi proclames-tu mes ordonnances et recueilles-tu dans ta bouche mon alliance, alors que tu hais la discipline et que tu as rejeté mes paroles derrière toi ? ;»
15. Et : « Toi qui voyais le fétu dans l'œil de ton frère, dans le tien tu n'as pas vu la poutre. »
Dire et faire ce que l'on dit... Un défi pour nous tous, et plus spécialement pour l'abbé
qui enseigne souvent. Une exigence rude, et en même temps, cette exigence est salutaire. Car
elle nous évite de vouloir changer le monde, en oubliant qu'il faut commencer par nous-
même. Un journaliste demandait une fois à Mère Térésa de Calcutta: « Que faut-il faire, que
faut-il changer pour que le monde devienne meilleur? » Elle avait répondu: « Vous et moi».
Se changer soi-même est la seule voie efficace pour changer notre monde et pour changer
notre communauté. Quand nous nous plaignons au sujet d'un frère ou de tel aspect de notre
communautaire qui se perd, c'est peut-être le signe qu'il nous faut travailler un peu plus sur
nous-même. Selon la parole de Jésus, nous risquons toujours de voir le fétu dans l'œil de
notre frère, alors que la poutre en nous, nous ne la voyons pas. Derrière notre plainte se cache
souvent l'aveu de notre propre incapacité et de nos mangues. Car aucun de nous ne peut
s'estimer quitte au regard du propos de vie monastique. Tous nous pouvons progresser.
Progresser, c'est un beau mot de la règle. Progresser dans le don de nous-mêmes dans la
prière et la lectio, dans la qualité de notre présence aux frères, dans notre investissement pour
la vie de la communauté. Dans quelques jours, nous aurons la célébration de la réconciliation.
Elle est l'occasion de nous remettre sous la lumière, non d'un règlement que l'on aurait plus
ou moins bien accompli, mais sous la lumière d'une parole, celle du Christ. Ce dernier nous
interpelle pour aller toujours plus loin dans le don de nous-même, dans l'abandon à sa volonté
et dans le service de nos frères. Sa parole ne nous juge pas, elle nous montre avec délicatesse
nos insuffisances pour que peu à peu grandisse et s'affermisse notre désir d'être davantage uni
à Lui. De célébration en célébration de la réconciliation, s'affine en nous le sens de notre
condition de pécheur, d'homme qui, laissé à lui-même, peine à se tourner vers Dieu et ses
frères. Nous savons, nous disons, mais nous peinons à faire, à accomplir la Parole. En ce jour,
l'antienne « 0 » nous fait acclamer « le Rameau de Jessé» qui, sur la croix, est signe pour les
nations, « signum populorum ». Jésus a fait ce qu'il a dit: il a aimé jusqu'au bout, en
consentant par amour à être livré. Il avait remis le souci de lui-même à Dieu son Père. Il nous
a ainsi libérés de cet excessif souci de soi pour nous apprendre l'abandon dans la confiance.
Avec les humbles de la terre, bénissons-le, Lui vaingueur sur le bois d'infamie.- 19.12.2017
6. L'abbé se rappellera toujours que son enseignement et l'obéissance des disciples, l'une et l'autre chose, feront l'objet d'un examen au terrible jugement de Dieu.
7. Et l'abbé doit savoir que le pasteur portera la responsabilité de tout mécompte que le père de famille constaterait dans ses brebis.
8. En revanche, si le pasteur a mis tout son zèle au service d'un troupeau turbulent et désobéissant, s'il a donné tous ses soins à leurs actions malsaines,
9. leur pasteur sera absous au jugement du Seigneur et il se contentera de dire au Seigneur avec le prophète : « Je n'ai pas caché ta justice dans mon cœur, j'ai dit ta vérité et ton salut. Mais eux s'en sont moqués et ils m'ont méprisé. »
10. Et alors, les brebis qui auront désobéi à ses soins auront enfin pour châtiment la mort triomphante.
L'idée d'un jugement de Dieu, ici jugement de l'enseignement de l'abbé et de
l'obéissance des disciples, n'est pas d'emblée une idée très réjouissante. Elle peut faire peur et
renvoyer à l'image d'un Dieu terrible ou impitoyable ... Si St Benoit ne craint pas de l'utiliser
assez souvent, on peut penser qu'elle devait avoir une visée pédagogique utile pour les gens
de son époque. De nos jours, nous savons qu'elle pourrait avoir l'effet contraire de celui
recherché, et contribuer à éloigner plus qu'à rapprocher de Dieu. Que retenir donc de ces
lignes qui s'adressent en premier lieu à l'abbé, et ensuite à tous les moines? Je retiens un
appel au sens de la responsabilité de chacun au regard de sa conduite et de son propos de
conversion. Chacun aura à rendre compte de sa conduite et de sa vie. Qu'est-ce que cela veut
dire? Comment le comprendre? Je cherche moi aussi. Une première chose nous est dite:
notre vie ici-bas nous accompagne dans l'au-delà. Ce que nous aurons été en ce monde n'est
pas sans relation avec ce que nous serons dans l'autre. En second lieu, plus cela va, plus
j'aurai tendance à voir ce jugement, moins comme celui de Dieu, que comme celui de nous-
mêmes vis-à-vis de nous-mêmes. En effet Dieu nous apparaitra tel qu'il est, amour, pardon et
bonté lumineuse. Face à la lumière magnifique et face à l'amour immense de Dieu, nous
apparaitrons tels que nous sommes. En st Jean (Jn 3,19), Jésus dit: « Dieu a envoyé son Fils dans le 'monde, non pas pour juger le monde, mais pour que par lui le monde soit sauvé. Celui qui
croit en lui échappe au jugement ... Et le jugement le voici: la lumière est venue dans le
monde et les hommes ont préféré les ténèbres à la lumière, parce que leurs œuvres étaient
mauvaises » ... A travers ce passage, je comprends que, face à la lumière, le jugement s'opère
si on la refuse et si on se replie sur les ténèbres de ses œuvres mauvaises. C'est la lumière qui
manifeste en elle-même le jugement face aux ténèbres, ou encore l'amour face à tout ce qui
n'est pas amour. Devant Dieu, chacun de nous aura à affronter cette épreuve de voir
apparaitre tout ce qui n'a pas été amour, ni lumière, nijustice ... tous ces manques à l'amour
dont notre vie aura été pleine. Ce jugement aura prise sur nous si nous nous replions sur nous-
mêmes, sur nos ténèbres en nous culpabilisant. Mais si par notre foi, notre confiance en Jésus
nous nous tournons vers lui, en nous reconnaissant humblement pécheur, et en nous ouvrant à
son pardon, nous échapperons au jugement. Oui, confions-nous avec lucidité sur nous-mêmes
à sa grande miséricorde, Lui Jésus qui est venu sauver ce qui était perdu. -16.12.2017