vendredi 3 octobre 2025 : journée de solitude pour la communauté, messe vers 6h45 après Laudes.

Commentaires sur la Règle



Voir le commentaire de Père Abbé Luc / Chapitre 46, v 01-06 De ceux qui commettent des manquements en n'importe quelle autre chose écrit le 15 mai 2020
Verset(s) :

1. Si quelqu'un, en travaillant à n'importe quel travail, à la cuisine, au cellier, au service, au pétrin, au jardin, à quelque métier, ou n'importe où, commet quelque manquement

2. ou brise ou perd quoi que ce soit ou tombe dans quelque autre faute où que ce soit,

3. et ne vient pas de lui-même aussitôt faire satisfaction spontanément devant l'abbé et la communauté et avouer son manquement,

4. si on l'apprend par un autre, il sera soumis à une pénitence plus sévère.

5. Mais s'il s'agit d'un péché de l'âme dont la matière est restée cachée, il le découvrira seulement à l'abbé ou à des anciens spirituels,

6. qui sachent soigner leurs propres blessures et celles des autres, sans les dévoiler et les publier.

Commentaire :

Et si nos manquements, des plus simples aux plus lourds étaient une chance sur notre chemin humain et spirituel ? Et si à travers eux- un rendez-vous nous était donné pour devenir plus nous-mêmes, plus humain et plus chrétien ? Simone Weil, la philosophe, a cette parole stimulante : « regarder chaque péché que j 'ai commis comme une faveur de Dieu. C 'est une faveur que l'imperfection essentielle qui est dissimulée au fond de moi se soit en partie manifestée à mes yeux, tel jour, à telle heure, dans telle circonstance » et poursuit-elle : « pour que je sois dans la vérité » (La pesanteur et la grâce, Plon, Paris 1948 p 64). Il est difficile de regarder en face nos faiblesses, notre péché, la part obscure tapie en nous qui nous échappe, qu'on ne maitrise pas. Nous préférons souvent l'occulter, faire comme si elle n'existait pas, plutôt que d'être simplement dans notre vérité de personne faillible, faible... C'est ce mouvement de dissimulation ou d'esquive plus ou moins inconscient que st Benoit met en lumière quand il invite à reconnaitre sur le champ une faute ou un manquement avec humilité. Afin de cesser de chercher toujours à se justifier et à discuter.

En effet, là réside notre chance : pouvoir reconnaitre une faute, un manquement et pouvoir exister sans masque devant les autres ou devant une personne pour les manquements plus personnels. Pouvoir enfin être soi en vérité. Car le juge le plus à craindre, ce ne sont pas les autres témoins de ma faiblesse, moi-même qui peine à voir remise en cause l'image idéale que je me forge de moi-même. La chance offerte par la mise à jour de mon péché, de ma faute ou de ma part obscure, c'est de pouvoir entrer peu à peu dans un chemin de réconciliation avec mon humanité blessée. Car le péché ou la part sombre qui surgit parfois n'est en rien l'essentiel de mon identité. Plus profond se trouve la part délicate, vierge de l’enfant créé à la ressemblance de Dieu et qui ne demande qu'à se déployer. M'aimer avec ma part de faiblesse, c'est me relier à la part plus profonde en moi. Et peu à peu, s’unifie ma vie en son histoire, ainsi qu'en toutes ses dimensions.

Mystérieux chemin d'unification et de connaissance de soi qui doit traverser patiemment les ténèbres... Chance pour nous moines d*être conviés à nous engager sur ce chemin qui dure toute la vie. Grâce surtout donnée par Dieu qui appelle chacun en ces profondeurs. Aussi comme des mendiants, tournons-nous vers notre Père des Cieux avec confiance et abandon, pour lui crier notre indigence et lui permettre de faire son œuvre de lumière et de vie en nous.

Voir le commentaire de Père Abbé Luc / Chapitre 45, v 01-03 De ceux qui se trompent à l'oratoire écrit le 14 mai 2020
Verset(s) :

1. Si quelqu'un se trompe en récitant un psaume, un répons, une antienne ou une leçon, et s'il ne s'humilie pas sur place et devant tous par une satisfaction, il subira une punition plus sévère,

2. pour n'avoir pas voulu réparer par l'humilité le manquement qu'il avait commis par négligence.

3. Quant aux enfants, pour une faute de ce genre ils seront battus.

Commentaire :

St Benoit attache une telle importance à l'office qu'il consacre un chapitre dans sa règle pour prévoir comment faire en cas de manquement ou d'erreurs durant l'office. La RM n'en fait pas mention. On retrouve l'accent prioritaire mis par Benoit qui place au début de sa règle le directoire de l'office, alors que la RM n'en traite qu'au milieu de sa règle.

En filigrane de ce chapitre qui veut aider les frères à se corriger- on peut donc entendre la question : comment honorer cette importance donnée à l'office, à la prière commune par Benoit dans la vie du moine ? Comment donner à notre prière sa pleine dimension, toute sa beauté, toute sa ferveur, niais aussi finalement toute sa qualité d'expérience spirituelle ? il n'est pas facile de répondre à cette question. Et pourtant il faut sans cesse se la poser. Le frère Maitre de chœur l'a toujours présente dans son attention à la qualité du chant, aussi bien dans son exécution que dans le choix des textes et des musiques. Le frère responsable de la liturgie porte le souci que les mouvements et les différents rites se déroulent bien, de façon harmonieuse pour tous les acteurs. Que recherche-t-on alors ? Une perfection dans l'exécution ? une esthétique dans laquelle on se fait plaisir ? Nous mesurons que si nous portons uniquement là notre attention, nous courons le risque d'une recherche nombriliste qui ne conduit qu’à l'orgueil ? Parler ainsi nous aide à ne pas absolutiser la crainte de se tromper et de manquer quelque chose. Nos erreurs simplement reconnues sont moins dangereuses spirituellement qu'une satisfaction de soi par soi, Elles disent notre finitude et notre fragilité humaine. Faut-il pour autant abandonner cette quête d'une belle liturgie priante et fervente ? Non, mais il nous faut peu à peu transformer la crainte de nous tromper ou à l’inverse une trop grande insouciance dans notre engagement, en un désir de nous donner plus entièrement à l'action liturgique. Car l’enjeu de notre assiduité dans la liturgie, est réveil de notre désir à la présence de Dieu et à son action, Notre désir est entrainé à entrer dans une œuvre qui le dépasse, [e nourrit et le creuse à la fois. C'est l'œuvre du Christ qui, dans son Eglise et par elle, rassemble et sanctifie l'humanité, pour la gloire de Dieu (cf SC 7 : 10). Aussi en chantant, priant, écoutant, psalmodiant, intercédant ou faisant silence, chacun et tous ensembles, nous sommes entrainés à donner toute la mesure de notre vie baptismale. En quelque sorte, il suffit de se laisser faire par la liturgie. Non pas se laisser aller, mais consentir ce qui est un véritable engagement, consentir au mouvement profond de la liturgie. Celui-ci n'a pas d'autre but que de nous introduire dans une relation filiale et aimante avec notre Père des cieux, uni au Christ, dans la joie de l'Esprit.

Voir le commentaire de Père Abbé Luc / Chapitre 44, v 01-09 De ceux qui sont excommuniés, comment ils satisferont écrit le 13 mai 2020
Verset(s) :

1. Celui qui est excommunié pour faute grave de l'oratoire et de la table, au moment où l'on achève de célébrer l'œuvre de Dieu à l'oratoire, se prosternera devant la porte de l'oratoire et demeurera ainsi sans rien dire,

2. mais seulement la tête contre terre, couché sur le ventre aux pieds de tous ceux qui sortent de l'oratoire.

3. Et il fera ainsi jusqu'à ce que l'abbé juge qu'il a donné satisfaction.

4. Quand, sur l'ordre de l'abbé, il viendra, il se jettera aux pieds de l'abbé, puis de tous, afin que l'on prie pour lui.

5. Et alors, si l'abbé l'ordonne, on l'admettra au chœur, à la place que l'abbé aura décidée,

6. mais sans qu'il ait le droit d'imposer à l'oratoire un psaume, une leçon ou autre chose, si l'abbé à nouveau ne lui en donne l'ordre.

7. Et à toutes les heures, lorsque s'achève l'œuvre de Dieu, il se jettera à terre à l'endroit où il se tient,

8. et il fera ainsi satisfaction jusqu'à ce que l'abbé à nouveau lui ordonne de mettre fin à cette satisfaction.

9. Quant à ceux qui, pour des fautes légères, sont excommuniés seulement de la table, ils satisferont à l'oratoire jusqu'à un ordre de l'abbé.

Commentaire :

La pratique énoncée ici par Benoit reste difficilement compréhensible pour nous aujourd'hui. Le frère excommunié pour une faute doit remplir certaines conditions pour manifester son humilité et sa volonté de retrouver la communion avec ses frères,

A partir de ce chapitre, on pourrait réfléchir sur la question de la distance, la distance qui peut se créer entre nous du fait de nos négligences. Autant il y a une distance nécessaire et juste qui permet à chacun d'être soi-même, autant il y a une distance qui sépare et creuse un fossé entre nous. Dès lors qu'est-ce qui creuse la distance ? qu'est-ce qui la réduit ? Je pense à des choses toutes simples comme : ne pas tarder à répondre à une demande, fusse en disant qu'on ne le peut tout de suite. Savoir dire merci à un service rendu ou à un billet Vivre ainsi les échanges quotidiens de manière fluide, c'est honorer chaque frère en lui montrant du respect et de la juste considération. Il compte pour moi. / Dans le silence que nous désirons vivre, parfois montre que la distance est habitée. car alors le silence n'est pas vécu au service de mon désir d'être tranquille et de retourner au plus vite à mes affaires. Non, il reste habité par le souci du frère, sans tomber dans l'excès inverse de qui recherche à tout prix le regard de I 'autre ou dont I *empressement peut devenir encombrant. / La distance peut se creuser de façon dangereuse lorsque l'incompréhension s'installe. Pour éviter des quiproquos, ou pire encore la tentation de prêter à l'autre des intentions mauvaises, il faut aller trouver le frère, ou à défaut une tierce personne pour désamorcer ces mécanismes de division. En effet, notre imaginaire a une forte propension à amplifier et à déformer une parole ou un geste. Laisser notre imaginaire seul maitre de notre esprit et notre cœur nous met en danger. Avoir le courage de parler, c'est extraire le poison. D’une manière plus subtile, nous pouvons créer une mauvaise distance entre nous, dans nos échanges en groupe, en commission ou ailleurs, Il y a parfois une manière de rembarrer un frère qui émet une opinion, sans lui laisser le temps de finir, pour asséner une opinion inverse, qui bloque les relations. Cette façon de faire est mortifère. J'attire l'attention sur ce point : veillons à la manière avec laquelle nous échangeons entre nous. Comment mieux nous écouter vraiment ? Quand un frère dit quelque chose qui me heurte ou que je ne comprends pas, avant d'opposer « ma » vérité, apprendre à essayer de comprendre ce que l'autre a dit, poser une question, ou chercher pourquoi le frère dit cela. Sortons des réponses du tac au tac qui sont stériles. Nos échanges pourraient alors gagner en profondeur et être des moments de recherche ensemble, non une simple juxtaposition de points de vue.

Voir le commentaire de Père Abbé Luc / Chapitre 43, v 13-19 De ceux qui arrivent en retard à !'oeuvre de Dieu ou à table écrit le 12 mai 2020
Verset(s) :

13. A table, celui qui ne sera pas arrivé pour le verset, en sorte que tous disent ensemble ce verset, fassent l'oraison et se mettent tous à table au même moment,

14. celui qui ne sera pas arrivé par suite de sa négligence ou d'une faute, on le reprendra pour cela jusqu'à deux fois.

15. Si ensuite il ne s'amende pas, on ne lui permettra pas de partager la table commune,

16. mais on le séparera de la compagnie de tous et il prendra son repas seul, avec privation de sa ration de vin, jusqu'à satisfaction et amendement.

17. Même sanction pour celui qui ne sera pas présent au verset que l'on dit après avoir mangé.

18. Et que personne ne se permette de prendre à part aucun aliment ou boisson avant l'heure prescrite ou après.

19. De plus, si le supérieur offre quelque chose à tel ou tel, et que celui-ci refuse de le prendre, quand il désirera ce qu'il a d'abord refusé ou autre chose, il ne recevra absolument rien jusqu'à ce qu'il s'amende comme il faut.

Commentaire :

R.B. 43, 13-19

Pourquoi la ponctualité est-elle si importante dans la RB, et dans la vie d'un moine cénobite. non seulement à l'office, mais aussi à table, et dans tous les exercices communautaires ? « C'est parce que nous sommes donnés les uns aux autres », nous disait le

P. David lors de la retraite. « La présence de chacun est irremplaçable » ajoutait-il. Le corps communautaire a besoin de chacun de ses membres, et chaque membre a besoin des autres pour vivre. Laissé à nous-mêmes, nous pouvons survivre et trouver de quoi manger, où dormir et un endroit pour se réchauffer. .. Mais vivrons-nous vraiment pour autant? Me manquera alors la présence des autres frères sans laquelle je ne suis pas vraiment moi-même : un frère qui se donne aux autres et qui se reçoit d'eux. La tentation est grande de penser que mon retard n'a pas d'importance. quïl ne va pas changer la face du monde, qu'on peut bien commencer sans moi etc... Mais alors, j'oublie que je suis en relation, et que ce qui me constitue c'est d'être frère d'un corps de frères. En mangeant ensemble, pas l'un à côté de l'autre, en écoutant ensemble, nous devenons un peu plus membre de ce corps, frère les uns des autres, façonnés et façonnant ce corps fraternel. Ainsi dans l'être là tous ensemble au début du repas, il y a un devenir-là plus fraternel qui est en jeu. li en va de même au sujet de cette règle de ne pas manger entre les repas. Sauf bien sûr besoin particulier pour la santé dont on a pu parler, cette règle veut nous ramener à cet être fraternel qui nous constitue profondément. Je vis, je prie et je mange avec des frères (non dans mon coin) dans la recherche d'un bien commun autant important pour mes frères que pour moi. Ce bien est d'acquérir peu à peu mon vrai visage d'homme et de fils de Dieu en devenant toujours un peu plus frère de mes frères, et un peu moins à mon propre compte. L'excommunication au temps de St Benoit voulait manifester ce fossé que les fautes ou manquements creusent entre le frère et la communauté. Ainsi en va-t-il aussi de notre pratique très modeste par laquelle nous attendons à la porte de l'église ou du réfectoire si nous sommes en retard. Si nous arrivons après ou au moment où retentit le tintement de la cloche à l'église, ou si nous arrivons lorsque le chant est commencé au réfectoire, nous attendons là. Et nous restons là jusqu'à la fin du verset d'ouverture de l'office, et jusqu'à la fin de la prière au réfectoire. Ce temps d'attente debout veut nous faire expérimenter combien tout notre être n'a qu'une hâte. celle de regagner le corps com·munautaire. Notre retard nous pèse finalement. mais il nous faut l'assumer, pour essayer d'y remédier à l'avenir.

Voir le commentaire de Père Abbé Luc / Chapitre 43, v 10-12 De ceux qui arrivent en retard à l'oeuvre de Dieu ou à table écrit le 09 mai 2020
Verset(s) :

10. Aux heures du jour, celui qui n'arrivera pas à l'œuvre de Dieu après le verset et le gloria du premier psaume qu'on dit après le verset, ceux-là, suivant la loi que nous avons dite plus haut, se tiendront au dernier rang,

11. et ils ne se permettront pas de se joindre au chœur de ceux qui psalmodient, jusqu'à ce qu'ils aient satisfait, à moins que l'abbé n'en donne permission en accordant son pardon,

12. non sans que le coupable fasse satisfaction, cependant.

Commentaire :

Lors du précédent chapitre, je disais que notre service de la prière des heures était avant tout celui de la louange de Dieu parce qu'il est Dieu, pour la manifestation de son amour et de sa gloire. S'agissant des retards, les lignes entendues ce matin peuvent nous suggérer plusieurs questions. Quand je peine à quitter un travail, une tâche pour me rendre à l'église, gui est Dieu pour moi? Quand j'arrive souvent juste ou en retard, qui est mon Dieu?

Oui est Dieu pour moi ? Est-il le premier servi et celui dont je veux faire avant tout la volonté? La cloche qui sonne retentit comme un appel, une manifestation de sa volonté. ici et maintenant. Comment est-ce que j'y consens? Si ce n'est le cas, qu'est ce gui résiste en moi, à lâcher ce que je fais? Une des difficultés n'est-elle pas d'absolutiser ce que je suis en train de faire? Je veux absolument finir quelque chose, ou en faire encore un peu plus? Mais ce faisant. est-ce que je ne me comporte pas comme un aveugle ou comme un coureur gui a le nez dans le guidon et qui risque de ne pas voir l'obstacle? Je ne vis plus mon travail dans la lumière d'un tout. Mon activité n'est plus insérée dans le dessein global de Dieu. Je perds le sens du temps gui passe. Mon temps de travail, si je le remets volontairement au service de Dieu et de sa volonté, va prendre tout son sens dans la prière gui va suivre. Loin d'être entravé ou perdu par cette interruption, il va recevoir la pleine lumière d'être ressaisi dans le temps de Dieu. Petite pierre qui prend place dans le grand édifice du Royaume en train de s'élaborer mystérieusement à travers toutes nos activités. Je crois qu'il nous faut sans cesse cultiver ce regard de foi sur notre travail et sur nos activités qui n'aiment pas être interrompus par l'appel de la prière. Sinon nous risquons de demeurer des aveugles qui seront toujours décalés, en dehors du tempo dans lequel Dieu nous offre d'entrer en faisant sa volonté. Car alors le risque serait d'oublier qu'il est« le Seul Maitre des temps », comme nous le chantons le lundi soir au T.O. Et dans ce cas, se pose l'autre question: gui est alors mon Dieu? Quel est le Dieu que je sers vraiment? Est que je ne suis pas en train de m'attacher à une idole? Et à quelle idole? La réussite de mon travail? L'efficacité? L'image de moi-même? Le combat contre les idoles dont !'Ecriture se fait si souvent l'écho n'est pas loin... Chaque cloche qui rencontre notre résistance, nous le fait vivre...

Voir le commentaire de Père Abbé Luc / Chapitre 43, v 01-09 De ceux qui arrivent en retard à !'oeuvre de Dieu ou à table écrit le 07 mai 2020
Verset(s) :

1. A l'heure de l'office divin, dès qu'on aura entendu le signal, on laissera tout ce qu'on avait en main et l'on accourra en toute hâte,

2. mais avec sérieux, pour ne pas donner matière à la dissipation.

3. Donc on ne préférera rien à l'œuvre de Dieu.

4. Celui qui, aux vigiles nocturnes, arrivera après le gloria du psaume quatre-vingt-quatorze, – que nous voulons qu'on dise, pour cette raison, à une allure tout à fait traînante et lente, – celui-là ne se tiendra pas à sa place au chœur,

5. mais il se tiendra le dernier de tous ou à l'endroit séparé que l'abbé aura assigné aux négligents de son espèce pour qu'ils soient vus de lui et de tous,

6. jusqu'à ce que, l'œuvre de Dieu achevée, il fasse pénitence par une satisfaction publique.

7. Or si nous avons décidé qu'ils devaient se tenir au dernier rang ou à part, c'est pour qu'ils soient vus de tous et qu'ils se corrigent au moins sous l'effet de la honte.

8. Si d'ailleurs ils restent hors de l'oratoire, il s'en trouvera peut-être un qui se recouchera et dormira ou qui s'assiéra dehors à l'écart, passera son temps à bavarder et donnera occasion au malin.

9. Mieux vaut qu'ils entrent au dedans, de façon à ne pas tout perdre et à se corriger à l'avenir.

Commentaire :

« Ne rien préférer à l 'œuvre de Dieu. » En ces jours de confinement, notre office célébré sans hôte prend un relief paiiiculier. Nous sommes ramenés à notre vocation de priant en ce qu'elle a de plus originelle. Nous ne sommes pas là pour offrir une prestation à un public, par notre chant sur lequel vont s'appuyer d'autres chercheurs de Dieu. Nous sommes là simplement pour louer Dieu et chanter sa gloire parce qu'il est Dieu. Sans autre motif.

Notre chant voudrait ainsi faire la joie de Dieu. Comme le dit le psalmiste : « Je veux

chanter au Seigneur tant que je vis, je veux jouer pour mon Dieu tant je dure. Que mon poème lui soit agréable, moi je me réjouis dans le Seigneur» (Ps 103, 33). En écoutant ce chantre du Seigneur, nous mesurons que faire la joie de Dieu, son bon plaisir, nous ouvre à la joie.

Notre chant voudrait toujours confesser le vrai Dieu. Non les idoles, ou les fausses images de Dieu car il échappe toujours, et nous le cherchons sans cesse. Avec le psalmiste, nous demandons : « Scrute moi mon Dieu, tu sauras ma pensée, éprouve-moi, tu connaitras mon cœur. Vois sije prends le chemin des idoles et conduis-moi sur le chemin d'éternité» (Ps 138. 23-24). Car « Oui donc là-haut est comparable au Seigneur ? Qui d'entre les dieux est semblable au Seigneur ? » (Ps 88, 7).

A la suite de tout un peuple de croyants, notre chant voudrait être émerveillement devant les œuvres de Dieu et son amour. Nous sommes entrainés par le psalmiste : « Rendez-grâce au

Seigneur, proclamez son nom, chantez et jouez pour lui, redites sans fin ses mervei/les ...joie pour les cœurs qui cherchent Dieu» (Ps 104, 1-3). Ou encore « Ou'if est bon de rendre grâce au Seigneur, de chanter pour ton nom, Dieu Très-Haut, d'annoncer dès le matin ton amour, ta

fidélité au long des nuit » (Ps 91, 2-3).

Comme nous le célébrons en ce temps pascal, en Jésus vivant. notre chant, enraciné dans la louange d'Israël, devient louange pour le dessein de Dieu manifesté à la fin des temps. Avec Paul, nous chantons Dieu pour « la richesse de sa grâce qui déborde jusqu ·à nous en toute intelligence et sagesse. Car il nous dévoile le mystère de sa volonté, selon que sa honté l'avait prévu dans le Christ, pour mener les temps à leur plénitude. récapituler toutes choses dans le Christ, celles du ciel et celles de la terre » (Ep 1, 8-10). La liturgie ouvre nos yeux de la foi et nous permet d'entrevoir l'œuvre immense de notre Dieu, réalisée en Jésus Ressuscité. Car c'est encore chanter la gloire de Dieu que de confesser notre espérance que notre humanité est promise à une vie d'amitié et de lumière en Celui qui l'a créée et sauvée.

Voir le commentaire de Père Abbé Luc / Chapitre 42, v 05-11 Que personne ne parle après complies. écrit le 06 mai 2020
Verset(s) :

5. Si c'est un jour de jeûne, une fois les vêpres dites, après un petit intervalle on passera à la lecture des Conférences, comme nous l'avons dit ;

6. on lira quatre ou cinq feuillets ou autant que l'heure le permettra,

7. tandis que tous se rassemblent grâce à ce délai de la lecture, si l'un ou l'autre était pris par une fonction à lui confiée, –

8. donc une fois que tous seront réunis, ils célébreront complies, et en sortant des complies, on n'aura plus désormais la permission de dire quelque chose à quiconque, –

9. si quelqu'un est pris à transgresser cette règle du silence, il subira un châtiment sévère, ;-

10. sauf s'il survient une nécessité du fait des hôtes ou que l'abbé vienne à commander quelque chose à quelqu'un.

11. Cependant cela même devra se faire avec le plus grand sérieux et la réserve la plus digne.

Commentaire :

Apparaissent bien dans ce chapitre des nuances importantes à propos du silence, nuances auxquels tient particulièrement St Benoit : ce sont celles qui existent entre un climat de silence, et une absence totale de parole. Ainsi au début, Benoit recommande+il aux moines de

« cultiver en tout temps le silence», et pour cela il utilise le substantif« silentium ». Il s'agit du climat de silence global dans la maison, d'une « atmosphère de silence » disait hier soir le P. Basil Hume. Par contre, à la fin du chapitre, Benoit dit expressément que les moines« n ·auront plus la permission de dire quelque chose», et qu'on ne peut « transgresser cette règle du silence », et là il utilise le mot « taciturnitas ». En d'autres passages de la règle, le mot

« silentium », suggère le silence comme un climat général. C'est ainsi que dans le chapitre sur le lecteur au réfectoire. Benoit recommande qu'il y ait un« silence complet» qui comprend et dépasse l'absence de paroles (38,5). De même ce climat de silence est-il recommandé pour l'heure de la sieste (48,5) et lorsque l'on sort de l'oratoire (52,2) par respect pour Dieu et pour le frère qui voudrait rester prier. Dans chaque cas, le silence visé est un bien pour la vie commune, par respect des frères qu'on ne doit pas gêner. Avec le mot« taciturnitas ». le silence a plus explicitement la nuance de se taire, de ne rien dire. li se présente comme une discipline volontaire par laquelle on choisit de ne pas parler. Ce silence est de rigueur après Complies. li est devenu dans notre langage monastique « le grand silence». C'est encore ce mot qu'on retrouve dans le chapitre sur le silence, en RB 6, où est mise en lumière l'attitude du disciple qui choisit de ne parler que si on l'interroge. préférant même taire de bonnes choses. De même dans le chapitre sur l'humilité. le 9° degré veut que le mc,ine interdise à sa langue de parler. gardant le silence attendant qu'on l'interroge.

Il est bon pour nous d'avoir en tête ces nuances de silence suggérées par la règle. A la fois, elles permettent de ne pas durcir le silence : nous souhaitons préserver un climat de silence dans la maison, ce qui n'interdit pas toute parole. Et à la fois. le silence nous demande parfois une discipline plus stricte : à certaines heures. en certains lieux, on ne parle pas. Cette discipline veut stimuler en nous la guète intérieure, l'écoute el l'attention à la présence de Dieu. Avec le silence de la nuit, je pense ici à celui qu'on veut préserver dans la salle des coules ou le cloitre, deux lieux qui nous préparent au recueillement de l'office. Si on a besoin de parler, on se fait signe pour aller dans un parloir. Cette discipline simplement acceptée va nous tirer vers le haut, et contribuer à la paix de tous.

Voir le commentaire de Père Abbé Luc / Chapitre 42, v 01-05 Que personne ne parle après complies. écrit le 05 mai 2020
Verset(s) :

1. En tout temps les moines doivent cultiver le silence, mais surtout aux heures de la nuit.

2. Aussi en tout temps, qu'il y ait jeûne ou déjeuner, –

3. si c'est un temps où l'on déjeune, dès qu'ils se seront levés du souper, tous s'assiéront ensemble et quelqu'un lira les Conférences ou les Vies des Pères ou autre chose qui édifie les auditeurs,

4. mais pas l'Heptateuque ou les Rois, parce que ce ne serait pas bon pour les intelligences faibles d'entendre cette partie de l'Écriture à ce moment-là ; on les lira à d'autres moments.

5. Si c'est un jour de jeûne, une fois les vêpres dites, après un petit intervalle on passera à la lecture des Conférences, comme nous l'avons dit ;

Commentaire :

Avec ce chapitre qui parle de l'avant complies et de l'après, j'aimerai dire quelques mots sur la prière à Marie que nous honorons particulièrement chaque soir à Complies avec l'antienne qui lui est dédiée. Marie est la femme du seuil. Entre le jour et la nuit à cet office de complies, seuil entre notre monde d'où elle est issue et le monde de Dieu auquel elle prend paii dès maintenant en toute sa personne. Pleinement de chez nous et déjà dans la lumière de Dieu. Au seuil de la nuit, nous aimons nous confier à elle pour qu'à sa prière. nous demeurions fidèles dans la foi et l'attente du Christ. Car si nous nous mettons sous sa garde, comme des enfants confiants. c'est parce que nous avons cette conviction profonde qu'elle nous entraine vers le Christ son fils. Chacune des antiennes latines traditionnelles que nous chantons porte ce regard de foi. Celle que nous chantons en ce temps pascal. le Regina Caeli. qui supplante le traditionnel angélus, impulse un mouvement de joie avec les tintements de cloches plus rapides. Curieusement, cette antienne invite Marie à se réjouir de la résurrection de Jésus, qu'elle a porté, avant de lui demander de prier pour nous. Comme si notre joie voulait rejoindre celle des cieux, la convoquer pour mieux chanter avec nous la résurrection du Christ. Marie est là dans la joie, comme elle a su être là dans la douleur de la croix. De cette présence douloureuse auprès de son Fils agonisant, nous tirons l'assurance de pouvoir nous adresser à elle. lorsque « nous soupirons, gémissons » depuis « noire exil », depuis cette « vallée de larmes». comme le chantons dans le Salve Regina. Mère de miséricorde, douceur de notre vie. elle nous permet de tenir dans l'espérance. Sans peur, elle nous apprend à regarder vers son Fils.

En ce traditionnel mois de Marie, le pape François a recommandé aux chrétiens la prière du rosaire. Prière simple qui simplifie le cceur, et l'approfondit au fur et à mesure qu'elle l'introduit, sous la conduite de Marie, dans la méditation et la contemplation des mystères de la vie de Jésus. En reprenant comme l'angélus, les paroles évangéliques, cette prière nous entraine dans l'émerveillement. Nous nous émerveillons pour ce que Dieu a fait à travers Marie, « la bénie entre /ou/es les.femmes». en Jésus,« lefj,uil béni de son sein». Ne craignons pas d'entrer dans cette prière simple dont la répétition vient nous recentrer sur l'essentiel et nous apaiser dans la joie profonde de l'émerveillement. Prière du pauvre, elle peut convenir aussi au moine dans la liberté et l'inspiration de !"Esprit. Car elle nous permet d'être là devant notre Père des Cieux, sans prétention, ni crainte, pécheur aimé et assisté de la présence et de la protection de Marie.

Voir le commentaire de Père Abbé Luc / Chapitre 41, v 01-09 A quelle heure doit-on prendre le repas? écrit le 01 mai 2020
Verset(s) :

1. De la sainte Pâque à la Pentecôte, les frères prendront leur repas à sexte et souperont le soir.

2. À partir de la Pentecôte, pendant tout l'été, si les moines n'ont pas de travaux agricoles et que les ardeurs excessives de l'été ne les incommodent pas, ils jeûneront jusqu'à none les mercredis et vendredis.

3. Les autres jours ils déjeuneront à sexte.

4. S'ils ont du travail aux champs ou si la chaleur de l'été est excessive, il faudra maintenir le déjeuner à sexte, et ce sera à l'abbé d'y pourvoir.

5. Et il équilibrera et réglera toute chose en sorte que les âmes se sauvent et que les frères fassent ce qu'ils font sans murmure fondé.

6. Des Ides de septembre au début du carême, le repas sera toujours à none.

7. En carême, jusqu'à Pâques, le repas sera à vêpres.

8. Cependant les vêpres seront célébrées de telle façon que l'on n'ait pas besoin au repas de la lueur d'une lampe, mais que tout s'achève à la lumière du jour.

9. Et de même en tout temps, l'heure du souper ou du repas sera suffisamment tôt pour que tout se fasse à la lumière.

Commentaire :

Ce chapitre nous donne un nouvel exemple de discernement à l'œuvre dans la vie quotidienne. Après la quantité de la boisson, c'est à propos de l'heure du repas qui varie selon les temps liturgiques, pour honorer le jeùne ou l'absence de jeùne. A côté des temps liturgiques forts comme le Carême ou le Temps pascal où la discipline est bien établie, il y a ce qu'on appelle aujourd'hui le temps ordinaire que St Benoit sépare en deux moments : avant et après le 15 septembre. Si après le 15 septembre, la discipline est claire, en revanche avant le 15 septembre, à la faveur de l'été et des travaux agricoles qui peuvent être durs, latitude est laissée à l'abbé d'avancer le repas à midi, les mercredis et vendredis, jours où le repas se fait normalement vers 15h00.

St Benoit invite l'abbé à« équilibrer et à régler toute chose en sorte que les âmes se sauvent el que les fi-ères fàssent ce qu'ils font sans murmure fimdé ». Equilibrer et régler. temperare et disponere en latin... Ces deux verbes latins suggèrent une commune action de régler. de disposer convenablement mais chacun avec un accent différent. D'un côté, il s'agit disposer. régler, équilibrer. organiser en mettant ensemble, en combinant plusieurs choses, c'est temperare, de l'autre il s'agit de disposer, de régler et ordonner en distinguant. en distribuant.

c'est disponere... Avec ce couple de verbes, St Benoit met bien en évidence le travail de discernement à l'œuvre : il s'agit de mettre de l'ordre, de régler les choses en étant capable d'unir. de mettre ensemble, et dans le même temps, en étant capable de distinguer. de séparer. D'un côté, dans une vie commune, il s'agit de marcher ensemble, donc ici d'avoir des horaires communs pour les repas. De l'autre, il faut prendre en compte des exceptions, les cas inédits comme les conditions de travail ou la saison, donc distinguer, pour ne pas arriver à quelque chose qui serait trop lourd à porter, voire invivable pour certains. Le but de cet art du discernement qui met ensemble et distingue à la fois est que « les âmes se sauvent ». Bien plus que de la recherche du juste milieu pour contenter le plus grand nombre. il s'agit de permettre à tous et à chacun de trouver dans les dispositions de la vie concrète, les moyens d'aller à Dieu dans la paix. Marcher ensemble en tenant compte de chacun... quelque chose d'impossible? S'il s'agit du salut des âmes. il s'agit donc d'une œuvre de grâce. Dieu en nous appelant tous si différents que nous sommes à marcher ensemble, sait ce qu'il fait. Avec l'exigence, il donne aussi la grâce. la force et la joie afin que cette école qu'est la vie monastique nous fasse grandir chacun et tous ensemble. li ne demande pas que tout soit parfait, mais que peu à peu s'ouvre des chemins de croissance pour chacun et pour tous.

Voir le commentaire de Père Abbé Luc / Chapitre 40, v 01-09 De la quantité de boisson écrit le 30 avril 2020
Verset(s) :

1. « Chacun tient de Dieu un don particulier, l'un comme ceci, l'autre comme cela. »

2. Aussi est-ce avec quelques scrupules que nous déterminons la quantité d'aliments pour les autres.

3. Cependant, eu égard à l'infirmité des faibles, nous croyons qu'il suffit d'une hémine de vin par tête et par jour.

4. Mais ceux à qui Dieu donne la force de s'en passer, qu'ils sachent qu'ils auront une récompense particulière.

5. Si les conditions locales et le travail ou la chaleur de l'été font qu'il en faut davantage, le supérieur en aura le pouvoir, en veillant toujours à ne pas laisser survenir la satiété ou l'ivresse.

6. Nous lisons, il est vrai, que « le vin n'est absolument pas fait pour les moines », mais puisqu'il est impossible d'en convaincre les moines de notre temps, accordons-nous du moins à ne pas boire jusqu'à satiété, mais plus sobrement,

7. puisque « le vin fait apostasier même les sages. »

8. Quand les conditions locales feront que l'on ne puisse même pas trouver la quantité indiquée ci-dessus, mais beaucoup moins ou rien du tout, les habitants du lieu béniront Dieu et ne murmureront pas.

9. Car nous recommandons ceci avant tout : qu'on s'abstienne de murmurer.

Commentaire :

Ce petit chapitre illustre bien le sens de la mesure qui parcoure toute la règle, et qui en fait sa force. La mesure bénédictine touche beaucoup de lecteurs ou d'observateurs extérieurs car elle rejoint tous les domaines de la vie. Jusque dans la boisson, elle intervient. Détail inutile ? Pas pour Benoit, car le boire comme le manger sont deux actions si vitales et si communes qu'elles disent quelque chose de notre cœur en quête de son propre équilibre de vie. Car justement, jusque dans ces domaines, il lui faut discerner pour trouver la bonne mesure.

En ce cas concret, comment Benoit propose-t-il de discerner? Il pose en principe la modestie, tant il est difficile de donner une règle commune, car tous arrivent avec des dons variés, des aptitudes différentes. Ce premier constat de nécessaire modestie, Benoit le fait dans la lumière de Dieu: c'est lui qui donne à chacun des possibilités différentes. Ainsi évite-t-il de juger. Le jugement appartient à Dieu. Ensuite pour établir la norme, il part des moins dotés :

« eu égard à l'infirmité des faibles, nous croyons qu'il suffit cl'une hémine de vin par jour el

par tête». La bonne mesure est donnée à partir des plus faibles. En même temps, ils encouragent les plus forts qui peuvent se passer de vin à demeurer dans une visée spirituelle : celle de la grâce qu'ils ont reçue : « Dieu leur donne la force des 'en passer» et celle de la récompense, du don que Dieu leur fait à travers l'abstinence. Ainsi à partir des plus faibles, est établi un premier critère de conduite communautaire. Mais là ne s'arrête pas le discernement de St Benoit. Il faut prendre aussi en compte les moments exceptionnels comme « les conditions locales, le travail ou la chaleur». Ceux-ci peuvent conduire l'abbé à ajouter davantage de vin. Alors que Benoit n'est pas favorable à l'introduction du vin qui peut «faire apostasier même les sages », il prévoit qu'on peut ajouter une quantité supplémentaire, selon les besoins. Grande liberté. La force de son discernement est de prendre en compte le réel des personnes qu'il a devant lui. S'il semble impossible de convaincre les moines de son temps de s'abstenir de vin, comme le voudrait la tradition, il en permet donc la consommation avec la recommandation de la sobriété.« Accordons-nous du moins à ne pas boirejusqu 'à la satiété, mais plus sobrement».

Dernier point de discernement : comment se situer face au mangue, quand il y a « beaucoup moins ou rien du tout? Il faut se tourner vers Dieu et le bénir : « les habitants du lieu béniront Dieu et ne murmureront pas». Comme il avait commencé au début du chapitre, il achève toutes ces considérations sous le regard de Dieu. C'est lui qui dote chacun de dons différents, c'est lui qui donne ou ne donne pas la nouriture ou le vin. Il nous revient de demeurer dans la gratitude à son égard, pour ce qu'il donne comme pour ce qu'il ne donne pas. Ainsi l'ultime visée du discernement est-elle de nous établir dans la paix du cœur et la confiance en Dieu.