Pour offrir les meilleures expériences, nous utilisons des technologies telles que les cookies pour stocker et/ou accéder aux informations des appareils. Le fait de consentir à ces technologies nous permettra de traiter des données telles que le comportement de navigation ou les ID uniques sur ce site. Le fait de ne pas consentir ou de retirer son consentement peut avoir un effet négatif sur certaines caractéristiques et fonctions.
Le stockage ou l’accès technique est strictement nécessaire dans la finalité d’intérêt légitime de permettre l’utilisation d’un service spécifique explicitement demandé par l’abonné ou l’utilisateur, ou dans le seul but d’effectuer la transmission d’une communication sur un réseau de communications électroniques.
Le stockage ou l’accès technique est nécessaire dans la finalité d’intérêt légitime de stocker des préférences qui ne sont pas demandées par l’abonné ou l’utilisateur.
Le stockage ou l’accès technique qui est utilisé exclusivement à des fins statistiques.
Le stockage ou l’accès technique qui est utilisé exclusivement dans des finalités statistiques anonymes. En l’absence d’une assignation à comparaître, d’une conformité volontaire de la part de votre fournisseur d’accès à internet ou d’enregistrements supplémentaires provenant d’une tierce partie, les informations stockées ou extraites à cette seule fin ne peuvent généralement pas être utilisées pour vous identifier.
Le stockage ou l’accès technique est nécessaire pour créer des profils d’utilisateurs afin d’envoyer des publicités, ou pour suivre l’utilisateur sur un site web ou sur plusieurs sites web ayant des finalités marketing similaires.
44. Le cinquième degré d'humilité est que, par une humble confession, on ne cache à son abbé aucune des pensées mauvaises qui se présentent à son cœur, ni des mauvaises actions qu’on a commises en secret.
45. L'Écriture nous y exhorte en disant : « Révèle ta voie au Seigneur et espère en lui. »
46. Et elle dit aussi : « Confessez-vous au Seigneur, parce qu'il est bon, parce que sa miséricorde est à jamais. »
47. Et à son tour le prophète : « Je t'ai fait connaître mon délit et je n'ai pas dissimulé mes injustices.
48. J'ai dit : je m'accuserai de mes injustices devant le Seigneur, et tu as pardonné l'impiété de mon cœur. »
« Le plus court chemin de soi à soi passe par autrui,,. Cette phrase de Ricoeur peut bien éclairer ce 5 ° degré de l'humilité. En effet. c'est humilité de reconnaitre que l'on a besoin des autres pour devenir soi-même. Dans la ligne de la tradition des Pères du désert. St Benoit propose ici une démarche, que l'on a appris depuis lors, à distinguer entre l'ouverture du cœur et le sacrement de réconciliation. Démarche pour devenir soi-même en dévoilant pour mieux
s'en détacher les ombres de nous-mêmes. St Benoit a bien conscience du travail intérieur que peut représenter cette démarche de vérité devant Dieu et devant un frère. Car. il est difficile pour chacun de nous de parler en vérité sous l'oreille et le regard d'un autre. Que va-t-il penser? Que va-t-il me dire" Ce travail nous rabote. il nous humilie clans le sens où il nous oblige à revenir à notre humus. Il nous entraine à aller vers la vérité de nous-mêmes en acceptant l'écoute d'un frère. A travers son écoute. peut-être aussi ses paroles qu'il nous renvoie. nous apprenons à nous regarder en face, sans masque. dans notre réalité la plus intime. Mettre des mots sur des pensées. sur des mouvements du cœur. ou encore sur des écarts pour mesurer que nous ne sommes pas réduits à ces ombres. Souvent. nous préférons passer à côté, feindre d’ignorer plutôt que de regarder et nommer ce qui nous parait si indigne de nous-mêmes. Mais alors. nous risquons de vivre un peu à côté de nous-mêmes en trainant plus ou moins un boulet qui. par son poids. peut nous empêcher de prendre notre vraie mesure. Un autre risque est de nous enfermer sur nos difficultés. peut-être avec un vague sentiment de culpabilité, alors que l'écoute et la parole d'un autre vont souvent remettre les choses sous une toute autre lumière libératrice. Notre orgueil sait mettre bien des obstacles avec un tas de justifications pour nous empêcher de faire ce pas de vérité dans l'ouverture du cœur ou dans le sacrement de réconciliation. Mais heureux sommes-nous si nous écoutons notre désir plus profond d'être plus libre et plus nous mêmes sans fard. Ce désir. mu par la confiance en la miséricorde de Dieu et en l'affection
respectueuse d'un frère, peut soulever la chape pesante qui nous étouffe. Ecoutons-le. Nous sommes faits pour la liberté d'être un peu plus nous-mêmes en passant par un autre.
35. Le quatrième degré d'humilité est que, dans l'exercice même de l'obéissance, quand on se voit imposer des choses dures et contrariantes, voire des injustices de toute sorte, on embrasse la patience silencieusement dans la conscience,
36. et que, tenant bon, on ne se décourage ni ne recule, selon le mot de l'Écriture : « Celui qui persévérera jusqu'à la fin, celui-là sera sauvé. ;»
37. Et aussi : « Que ton cœur soit ferme ! Supporte le Seigneur. »
38. Et voulant montrer que le fidèle doit même supporter pour le Seigneur toutes les contrariétés, elle place ces paroles dans la bouche de ceux qui souffrent : « A cause de toi, nous sommes mis à mort chaque jour. On nous regarde comme des brebis de boucherie. »
39. Et sûrs de la récompense divine qu'ils espèrent, ils poursuivent en disant joyeusement : « Mais en tout cela, nous triomphons, à cause de celui qui nous a aimés. »
40. Et ailleurs, l'Écriture dit aussi : « Tu nous as éprouvés, ô Dieu, tu nous as fait passer par le feu, comme on fait passer au feu l'argent. Tu nous as fait tomber dans le filet. Tu nous as mis sur le dos des tribulations. »
41. Et pour montrer que nous devons être sous un supérieur, elle poursuit en ces termes : « Tu as fait chevaucher des hommes sur nos têtes. »
42. En outre, ils accomplissent le précepte du Seigneur par la patience dans les adversités et les injustices : frappés sur une joue, ils présentent aussi l'autre ; à qui ôte leur tunique, ils abandonnent aussi le manteau ; requis pour un mille, ils en font deux ;
43. avec l'Apôtre Paul, ils supportent les faux frères, et ils supportent la persécution et quand on les maudit, ils bénissent.
Dans l'échelle de l'humilité. ce 4° est particulièrement développé. Après le 1° degré sur la crainte de Dieu qui garde la mémoire en éveil, ce degré est le plus long. Alors que Benoit avait beaucoup abrégé le 3° degré repris de la RM, ici il le conserve tel quel. Degré difficile à entendre aujourd'hui en raison des abus commis au nom de l'autorité ou de l'obéissance ! Dès lors que peut nous apprendre ce degré d'humilité ? Tout d'abord. il se situe dans la ligne de Cassien qui parle plutôt de « signe de l'humilité » que de degré. A travers les épreuves de la vie monastique. ce 4° degré se présente moins comme quelque chose gu'ïl faudrait rechercher. mais plutôt comme un signe, comme un indicateur d'une grâce qui est faite au moine. Dans les contrariétés, voire dans les injustices, alors qu'auparavant. il aurait été enclin à se rebeller ou encore à se venger. il supporte dans la patience, en tenant bon. sans se décourager. .. Ensuite dans les difficultés qui ne manquent jamais de se mettre en travers de notre chemin. ce 4° peut être encore une source d'espérance. li révèle une capacité de force d'âme dont nous pouvons faire preuve. La victoire se situe alors dans la manière même de porter les épreuves. et non comme nous le pensons spontanément. dans le fait de vaincre l'adversaire. de le faire taire etc ... A travers les exemples des psalmistes ou de Paul qui sont ici convoqués. ou encore à travers les enseignements de l'évangile,. ce 4° degré met en lumière les ressorts dont peut être capable le croyant. Celui qui met sa confiance en Dieu peut trouver en lui des forces insoupçonnées pour affronter l'épreuve.
Enfin reste que ce 4° indique une ligne de crête spirituelle délicate. Il ne peut en rien être invoqué par le supérieur ou un autre frère pour imposer quelque chose de difficile. S’il y a des choses difficiles qui doivent être traversées. elles viendront d'elles-mêmes par les circonstances ou les évènements. La règle déjà ménageait des garde-fous contre les abus d'autorité en rappelant à .l'abbé notamment les limites de son pouvoir. Nos constitutions en mettent d'autres en œuvre fruit des expériences du passé pour préserver la liberté profonde de chacun dans son intégration de la vie monastique. Nous faisons l'expérience qu'un petit pas fait
avec un profond consentement permet un chemin plus constant qu'un grand pas plus ou moins forcé qui peut occasionner des retours désordonnés ... Ce 4° peut rester alors comme un horizon que peut-être nous n'atteindrons jamais. Mais il est là comme une ressource pour donner sens cl lumière à une expérience qui viendra peut-être un jour.
34. Le troisième degré d'humilité est que, pour l'amour de Dieu, on se soumette au supérieur en toute obéissance, imitant le Seigneur, dont l'Apôtre dit : « S'étant fait obéissant jusqu'à la mort. »
"Pour 1·amour de Dieu " ... Ces quelques mots ajoutés par Benoit à la RM sont là pour nous rassurer. Car est-il possible en régime chrétien d'obéir à un frère sous !"autorité duquel on accepte de se mettre, sinon pour l'amour de Dieu·, De même que l'amour de son Père a été le moteur de l'obéissance du Christ en notre faveur, de même il sera le profond resso1i qui pourra nous permettre d'obéir clans la vie monastique. Ce parallèle fait par Benoit entre l'obéissance du moine à l'abbé et celle du Christ à son Père jusqu'à la mort. est saisissant. li peut donner le
vertige aussi bien à celui qui obéit qu"à l'abbé à qui on obéit. il fait comprendre l'étroite relation qu’il y a entre notre vie consacrée et la vie du Christ. Notre engagement de le suivre au plus près à travers les vœux de stabilité. de conversion et d'obéissance nous configure, nous assimile à sa vie toute donnée. Là où nous sommes clans ce monastère, à l'époque où nous sommes au 21° s, nous choisissons de nous lier étroitement au mouvement de don qui a été celui du Christ. De même qu'il s'est donné jusqu·au bout en renonçant à garder la maitrise de sa destinée. de même nous choisissons de ne plus garder totalement la main sur notre vie.
Nous choisissons ... Tout d'abord lors de notre engagement, nous avons choisi de mettre toute notre énergie à vivre ce don de nous-mêmes. et il nous revient de choisir encore jour après jour. Comme nous le verrons ensuite. la vie et parfois la complexité de nos rapports fraternels peuvent rendre ce choix rude. peut-être crucifiant. c'est ici que chacun. nous sommes fortement conviés à nous mettre sous la lumière de l'Amour de Dieu ... Puiser dans l'Amour que nous lui portons pour tenir clans l"épreuve quand elle est là. Mais plus encore puiser dans l"Amour plus sûr qu"II nous porte. Seul son Amour peut nous faire comprendre que s'il nous a appelés. ce n'est pas pour nous faire souffrir. mais bien pour notre bonheur et notre plein accomplissement.
Avec toute l'humanité, il désire nous faire passer de la mort à la vie, de l'humiliation à la glorification. Il nous revient de demander la grâce de mieux comprendre la signification profonde de son appel. li vient nous chercher en nos déserts ou en nos incapacités à aimer, pour nous entrainer toujours plus loin dans le don de nous-mêmes. Le passage par la croix et par la mort à nous-mêmes ne sont ni du sadisme de la part de notre Dieu, ni du masochisme de notre part. Si nous y consentons, même avec crainte du fait de notre faiblesse, se manifeste notre mystérieuse participation au salut du monde. Accueillons toujours plus profondément, et l'Amour de notre Père et la profondeur de son appel qui nous associe au mystère de son Fils.
31. Le second degré d'humilité est que, n'aimant pas sa volonté propre, on ne se complaise pas dans l'accomplissement de ses désirs,
32. mais qu'on imite dans sa conduite cette parole du Seigneur disant ;: « Je ne suis pas venu faire ma volonté, mais celle de celui qui m'a envoyé. ;»
33. L'Écriture dit aussi : « La volonté subit un châtiment et la contrainte engendre une couronne. »
Sur le chemin de la vie, nous sommes en partie bien voyant, en partie aveugle... Et selon les moments plus l'un que l'autre. Comme chrétien, nous croyons que faire la Volonté de Dieu ne peut qu'ouvrir un chemin de lumière. En faisant la Volonté de Dieu. ou en cherchant à la foire. nous marchons dans une lumière plus sûre que si nous ne cherchons à faire que ce qui nous intéresse ou ce qui nous plait. Dans le premier cas. l'horizon est large et toujours à découvrir. dans le second il se réduit drastiquement à mon petit univers et à son« déjà connu ".
Ici il vaut la peine de s'arrêter pour réfléchir un peu, car ce mouvement d'ouverture n'est jamais fini. Peut-être même doit-on y veiller un peu plus, l'âge avançant et les petits réflexes de recherche de confort se faisant plus sensibles. Allons-nous nous fermer peu à peu sur nous mêmes. ou bien allons-nous toujours rester vigilants pour savoir prendre de la distance avec nos mouvements premiers à tendance centripète ? St Benoit nous invite donc à nous exercer encore et toujours à « ne pas aimer notre volonté propre ». et à "ne pas nous complaire dans l'accomplissement de nos désirs» ... Autrement dit, il nous invite à tourner notre amour vers Dieu et vers les autres. et à mettre là notre plus profond plaisir. En plaçant le second degré dl1umilité. à la césure entre choix de la volonté de Dieu ou repli sur ma petite volonté. St Benoit nous suggère qu’il peut nous en coûter. Cela nous humilie au sens où cela nous oblige à entrer dans la réalité du mystère de ma vie qui est ordonnée à la Vie de Dieu. à la Vie selon Dieu. Entrer dans une recherche active de la Volonté de Dieu. la désirer, c'est vouloir mettre d'autres lunettes pour regarder la réalité. Contrairement à ce que je pense spontanément. je ne maitrise pas grand-chose. Je suis conduit dans le flot de la vie qui me précède et qui m'emmène vers où j,: ne sais pas toujours. Les appels d'un frère, la demande d'un service, l'évènement qui se met nu travers d'un projet peuvent être autant d'occasion de m'ouvrir à la réalité qui met en branle bien plus que ce que j'imagine ou que je ne projette. Accepter d'entrer dans la danse des interpellations, c·est accepter d'apporter ma part dans la construction du Royaume de Dieu. tel qu’il se déploie ici à la PqV. N'ayons pas peur d'entrer dans cette souplesse de la vie. Découvrons à travers elle une joie profonde. celle de nous donner à un projet bien plus grand. qui passe par l'attention à mon frère à côté de moi, par l'empressement à ne pas faire attendre dans une réponse à un courrier etc... Par tous ses appels de la vie quotidienne. Dieu nous fait lé beau cadeau de nous associer à son projet d'amour pour tous les hommes.
23. Dans les désirs de la chair, croyons que Dieu nous est toujours présent, puisque le prophète dit au Seigneur : « Devant toi sont tous mes désirs. »
24. Il faut donc se garder du désir mauvais, puisque « la mort est placée sur le seuil du plaisir. »
25. Aussi l'Écriture a-t-elle donné ce précepte : « Ne suis pas tes convoitises. »
26. Si donc « les yeux du Seigneur observent bons et méchants »,
27. si « le Seigneur, du haut du ciel, regarde sans cesse les enfants des hommes, pour voir s'il en est un qui soit intelligent et qui cherche Dieu »,
28. et si les anges commis à nous garder rapportent au Seigneur quotidiennement, jour et nuit, les actes que nous accomplissons,
29. il nous faut donc prendre garde à tout instant, frères, de peur que, comme dit le prophète dans un psaume, Dieu ne nous voie à un moment « dévier » vers le mal « et devenir mauvais »,
30. et qu'après nous avoir épargnés dans le temps présent, parce qu'il est bon et qu'il attend que nous nous convertissions à une vie meilleure, il ne nous dise dans le futur : « Tu as fait cela, et je me suis tu. »
« Croyons que Dieu nous est toujours présent, si donc les yeux du Seigneur observent ... Si le Seigneur regarde sans cesse les enfants des hommes ... »
Elles sont très nombreuses dans ce premier degré de l'humilité les mentions du regard de Dieu sur nous les humains... A 1° vue. cette manière de présenter Dieu omniscient et surplombant de son regard chacune de nos pensées de nos volontés. chacun de nos actes et de
nos désirs ·n est pas très enthousiasmante. Elle nous fait plutôt fuir. Et pourtant comment comprendre une telle insistance en si peu de lignes? Plutôt qu'un enseignement sur Dieu lui même. ne nous dit-elle pas quelque chose sur notre vie humaine dans sa relation avec son Dieu'' En substance Benoît nous di1 que c·est ce qui se passe en notre cœur, en son intime qui touche Dieu... il est intéressé par la qualité de notre être profond. Ce sont nos pensées. nos désirs. nos volontés qui, comme autant de manifestations de notre cœur, expriment en fait notre être profond dans sa relation avec Dieu et avec les hommes. Malheureusement. assez souvent nos actes ou nos paroles n'expriment pas totalement la vérité de notre cœur... Nos pensées secrètes, nos désirs cachés ou nos volontés, portent souvent davantage notre être vrai. sans fard ni faux semblant, en ses lumières, comme en ses ombres... Dans l'Evangile, on voit souvent Jésus qui démasque l'hypocrisie de ses adversaires en révélant les pensées secrètes qui se cachent derrière des attitudes de façade... Ce qui intéresse Jésus. c'est l'homme droit, dont les actes et les paroles correspondent aux pensées et aux désirs intimes. Plus encore, comme le suggérait de belle manière au chapitre de jeudi soir la sœur Claire de l'institut Saint François Xavier, Jésus voudrait aider chacun de ses interlocuteurs à rejoindre son désir profond. son « élan de vie créateur» sur lequel va pouvoir se construire sa vie. « Que veux-tu que je fasse pour toi ». demande-t-il à l'aveugle, et à d'autres... Ce 1° degré de l'humilité nous dit-il pas autre chose? Etre humble c'est nous tenir tel que nous sommes. avec notre être en son entier sous le regard de Dieu miséricorde. Ce qui doit nous guider alors, c'est moins la crainte d'être vu avec nos railles ou nos péchés, que l'abandon confiant en la miséricorde de Dieu qui est bon et patient avec nous. Car il veut nous faire accéder à notre désir en son élan créateur et par là. nous rendre plus ferme dans nos pensées, nos désirs et nos volontés, pour mieux le servir en vérité...
14. C'est ce que le prophète nous fait voir, quand il montre Dieu toujours présent à nos pensées, en disant : « Dieu scrute les cœurs et les reins. »
15. Et encore : « Le Seigneur connaît les pensées des hommes. »
16. Et il dit encore : « Tu as compris mes pensées de loin. »
17. Et : « Car la pensée de l'homme s'ouvrira à toi. »
18. D'autre part, pour être attentif à veiller sur ses pensées perverses, le frère vertueux dira toujours dans son cœur : « Je ne serai sans tache devant lui que si je me tiens en garde contre mon iniquité. »
19. Quant à notre volonté propre, on nous interdit de la faire, quand l'Écriture nous dit : « Et détourne-toi de tes volontés. »
20. Et nous demandons aussi à Dieu, dans l'oraison, que sa volonté soit faite en nous.
21. Avec raison on nous enseigne donc de ne pas faire notre volonté, quand nous prenons garde à ce que dit l'Écriture : « Il est des voies qui paraissent droites aux hommes, et dont l'extrémité plonge au fond de l'enfer »,
22. et aussi quand nous redoutons ce qui est dit des négligents : « Ils se sont corrompus et rendus abominables dans leurs volontés. »
Comment vivre notre quotidien, en faisant en sorte que nos pensées et notre volonté
s·ordonnent à la pensée et à la volonté de Dieu? Telle est en substance la question que St Benoit se pose en ce premier degré. pour fuir l'oubli de Dieu. li me semble que notre vie monastique nous offre deux voies pour tenter de nous ajuster à la pensée et à la volonté de
Dieu. la voie du discernement et celle de la connaissance. Deux voies qui se conjuguent rune l"autre pour s'éclairer mutuellement. La voie du discernement nous rend attentif au roulement des pensées et des mouvements qui traversent notre esprit et notre cœur. Sont-ils de Dieu ou bien viennent-ils de notre humus encore un peu brut'? En quelque sorte. ce discernement nous aide à prendre de la distance par rapport à nous-mêmes. Il fait de nous des spectateurs de notre propre cinéma intérieur. « Tiens aujourd'hui. clans telle circonstance. j'ai réagi comme cela. mais pourquoi? Qu'est-ce qui m'a fait agir ou parler comme cela ? Ai-je pensé. agi, selon le bon Esprit ? Et telle pensée qui me taraude, me trouble ou m'obsède pourquoi ? » Ici cependant un clignotant s'allume pour nous dire: attention. il ne s'agit pas de se complaire clans une introspection plus ou moins morbide. clans un désir plus ou moins avoué de maitrise de soi. Non, ce discernement. nous le vivons dans la foi, sous la lumière de la présence d"un Dieu gui nous aime. C'est Lui qu·on cherche à écouter et à reconnaitre à J"œuvre clans notre vie. Ici il nous faut prendre très vite l'autre voie nécessaire pour nous ajuster à la pensée et à la volonté de Dieu : celle de la connaissance de notre Dieu. Qui est-il 9 Nous le cherchons. Que pense-t-il de telle situation que je vis aujourd'hui et que veut-il pour moi'? Qu'est-il bon que je fasse'? Grâce à la lectio, à la liturgie, aux études, peu à peu nous entrons dans une finesse plus grande de l'écoute et de la connaissance de notre Dieu et de son projet d"amour pour nous. Grâce aux échanges fraternelles et à l"écoute spirituelle vécue clans l'accompagnement. une familiarité grandit qui nous rend plus sensible. Peu à peu telles des scories passées au feu, se détachent les fausses images d'un Dieu juge qui écrase ou d'un Dieu Papa gâteau qui endort. En contemplant le visage de Jésus le Christ. pour y accueillir le visage du Père. nous devenons un peu plus chrétiens. Notre labeur de moine ·n est-il pas alors de consentir à chercher autant qu'à nous laisser chercher ? à apprendre à connaitre qui est notre Dieu, et finalement pour nous laisser connaitre par Lui. Et en même temps, cette connaissance nous échappe toujours... Savons-nous plus'' Ce n·est pas sûr, mais devenons-nous plus familiers de la manière avec laquelle le Seigneur nous conduit, plus souple dans la manière d'écouter... Que le Seigneur nous vienne en aide.
10. Le premier degré d'humilité est donc que, plaçant toujours devant ses yeux la crainte de Dieu, on fuie tout à fait l'oubli,
11. et que l'on se souvienne toujours de tout ce que Dieu a prescrit, en repassant toujours dans son esprit de quelle façon la géhenne brûle à cause de leurs péchés ceux qui méprisent Dieu, ainsi que la vie éternelle qui est préparée pour ceux qui craignent Dieu.
12. Et se gardant à toute heure des péchés et des vices, à savoir ceux des pensées, de la langue, des mains, des pieds et de la volonté propre, ainsi que des désirs de la chair,
13. l'homme doit être persuadé que Dieu le regarde toujours du haut des cieux à tout instant, que le regard de la divinité voit ses actions en tout lieu et que les anges en font à toute heure le rapport.
14. C'est ce que le prophète nous fait voir, quand il montre Dieu toujours présent à nos pensées, en disant : « Dieu scrute les cœurs et les reins. »
Le premier degré d'humilité: fuir tout à fait l'oubli de Dieu en se gardant de tout péché... Tout un programme en soi ! J'ai été intéressé de chercher dans le psautier comment le psalmiste aborde cette question de l'oubli. Sans prétendre aucunement ce matin faire le tour de la question. j'en partage quelques flashs. Je me suis arrêté SLtr le mot « oubli » dans notre traduction liturgique. sans avoir le temps ni la compétence de retrouver la ou les racines hébraïques derrière. J'ai laissé de côté d'autres mots comme« se rappeler,,.« se souvenir».« mémoire»,
" mémorial » ...
Les mots « oubli. oublier" reviennent fois 47 fois, ils ont Dieu pour sujet. Le psalmiste exprime alors une grande confiance en son amour. Dieu peut oublier le mal qu'on lui fait, mais ne peut pas oublier celui qu'il aime : « Oublie les révoltes. les péchés de ma jeunesse ; dans ton amour ne m'oublie pas» (24.7). Ou encore: « Le Seigneur écoute les humbles. il n'oublie pas les siens emprisonnés» (68,34). En d'autres passages. le psalmiste se fait suppliant« Lève-toi. Seigneur, Dieu, étends la main ! N'oublie pas le pauvre!» (9b. 12). face à l'impie qui affirme que Dieu oublie. Et plusieurs fois, il questionne : « Je dirai à Dieu, mon rocher: « Pourquoi m'oublies-tu? » (41,10) face à l'ennemi qui oppresse. ou encore « Dieu oublierait-il d'avoir pitié. dans sa colère a-1-il fermé ses entrailles ? » (76. 10) au moment de l'épreuve où disparaissent toutes les évidences.
Par 9 fois, l'usage des mots a le peuple pour sujet. Et à chaque fois. c·est pour dénoncer l'oubli auquel il se laisse aller. C'est l'expérience du désert dans lequel« ils s'empressent d'oublier ce que Dieu a fait, sans attendre de connaître ses desseins,, (105. 13). Le psalmiste en va même à demander dans sa prière face aux ennemis : « Ne les supprime pas. Seigneur. de peur que mon peuple n'oublie '» (58, 12). Face à l'oubli. la recommandation est de cultiver la mémoire des hauts faits de Dieu, accompagnant l'histoire de son peuple comme nous le chantions celle nuit
: « Qu 'ils se lèvent et les racontent à leurs fils pour qu'ils placent en Dieu. leur espoir et n'oublient pas les exploits du Seigneur mais observent ses commandements » (77. 7).
Le psalmiste lui-même se présente souvent comme un veilleur dans la mémoire de la loi. Il se fait souvent l'écho en lui-même de cette quête pour ne pas oublier. « Les pièges de l'impie m 'environnent, je n'oublie pas ta loi » (118, 9) ou encore « Si je t'oublie, Jérusalem. que ma
main droiite m'oublie!" (136.5).
<A travers ces quelques citations, j'ai l"impression qu'il nous est donné d'entendre en filigrane le dialogue entre Dieu et son peuple. Le psalmiste sûr dans sa foi que Dieu ne peut oublier son peuple, l'interpelle parfois vigoureusement.mais il est lucide aussi sur l'inconstance du peuple à demeurer dans l'alliance, parce qu'ils oublient les grâces qu'il a reçu. La mémoire de la loi et de ses préceptes est alors un rempart contre l'oubli, comme la vigilance sur ses pensées et ses désirs en sera un en parallèle pour le moine en quête d'humilité .
5. Aussi, frères, si nous voulons atteindre le sommet de la suprême humilité et si nous voulons parvenir rapidement à cette élévation céleste, à laquelle on monte par l'humilité de la vie présente,
6. il nous faut, pour la montée de nos actes, dresser cette échelle qui apparut en songe à Jacob, et sur laquelle il voyait des anges descendre et monter.
7. Cette descente et cette montée n'ont assurément pas d'autre signification, selon nous, sinon que l'élévation fait descendre et l'humilité monter.
8. Quant à l'échelle dressée, c'est notre vie ici-bas. Quand le cœur a été humilié, le Seigneur la dresse jusqu'au ciel.
9. D'autre part, les montants de cette échelle, nous disons que c’est notre corps et notre âme. Dans ces montants, l'appel divin a inséré différents degrés d'humilité et de bonne conduite, pour qu'on les gravisse.
« Frères. si nous voulons atteindre le sommet de la suprême humilité ... il nous faut dresser cette échelle qui apparût en songe à Jacob ... ». Et un peu plus loin st. Benoit poursuit:
« quant à l'échelle dressée, c'est notre vie ici-bas. Quand le cœur a été humilié, le Seigneur la
dresse jusqu'au ciel». Ainsi pour Benoit. l'humilité est-elle autant l'objet d'une décision,« il nous faut dresser celle échelle» que d'une grâce reçue: « quand le cœur a été humilié. le Seigneur la dresse jusqu'au ciel». Une décision et une grâce. Une décision en réponse à un appel : hier soir, nous entendions le prophète Sophonie nous dire : « cherchez le Seigneur, vous les humbles du pays qui accomplissez sa loi. Cherchez la justice, cherchez l'humilité » (So 2.3 ). J'aime ce rapprochement fait par le prophète entre justice et humilité qui laisse penser à
une équivalence entre les deux recherches, celle de la justice et celle de l'humilité. On peut entendre le mot justice tout d'abord dans le sens usuel, de quête de relations justes et équitables entre les hommes, quête qui ne voudrait laisser personne de côté, hors de la jouissance normale de la vie. Vivre cette quête de la justice. c'est vivre une quête de l'humilité dans le sens où. à travers elle. nous nous enracinons un peu plus dans notre humus commun à tous. La recherche du bien pour tous, me rend plus humble dans la conscience de ma propre petitesse et de ma dépendance à !"égard de tous pour être vraiment ce que je suis. Dans un second sens plus théologique. la recherche de la justice peut être entendue comme l'ouverture à la grâce du Seigneur qui seul rend juste. De lui seul, vient le salut qui me fait fils de Dieu. Cherchez cette justice-là. m'ouvrir à la grâce. c'est entrer dans une attitude humble qui sait ne rien pouvoir prétendre être ou avoir par soi-même. surtout pas le salut. Cette seconde acception rejoint l’intuition que vivre la recherche de l'humilité, est non seulement une décision, mais toujours u11e grâce. Une grâce qui nous vient du Christ, le vrai humble de la terre. Comme nous le chantons : « Agneau que Dieu nous promettait, réponse au cri de nos détresses. Jésus commence en notre chair, un long chemin d'abaissement». Par sa venue en notre chair. Jésus. Verbe de Dieu a dessiné l'échelle de l'humilité. Par amour pour nous. tombés par orgueil, il a consenti à sÏ1Urnilier. Et par son humiliation jusqu·à la mort de la croix. il a relevé notre humanité blessée pour la porter dans la force de sa résurrection à la gloire divine. En quelque sorte. il est lui-même. en sa vie abaissée et glorifiée, l'échelle de l'humilité par laquelle nous est parvenu le salut. Désormais, c·est vraiment en lui, avec lui et par lui, en sa grâce, que notre vie ici-bas peut devenir l'échelle de l'humilité dressée vers le ciel. Demandons à Jésus. le Christ d'avoir en nous les mêmes dispositions qui étaient les siennes (Ph 2. 5).
1. La divine Écriture, frères, nous proclame : « Quiconque s'élève sera humilié, et qui s'humilie sera élevé. »
2. En parlant ainsi, elle nous montre que toute élévation est une sorte d'orgueil.
3. Le prophète fait voir qu'il s'en garde, lorsqu'il dit : « Seigneur, mon cœur ne s'est pas élevé et mes yeux ne se sont pas levés. Je n'ai pas marché dans les grandeurs, ni dans des merveilles au-dessus de moi. »
4. Mais qu'arrivera-t-il, « si mes sentiments n'étaient pas humbles, si j'ai exalté mon âme ? Comme l'enfant sevré sur sa mère, ainsi tu traiteras mon âme. »
Ces lignes sont comme une introduction à l'ensemble du chapitre. Elles offrent le fondement scripturaire en deux citations tirées de Luc et du Ps 130. sur lequel se fonde le propos de Benoit sur l'humilité. La première citation se présente comme une sorte de théorème de l'humilité: « Quiconque s'élève sera humilié, et qui s'humilie sera élevé,,. Cette sentence de Jésus est affectionnée particulièrement par l'évangéliste Luc qui la reprend deux fois explicitement, en conclusion des deux paraboles. celle du choix des places. et celles du pharisien et du publicain (14,1 l ; 18,4). et une fois implicitement dans le magnificat: « Il renverse les puissants de leur 1rône, il élève les humbles,, (]. 5:?.-53). Cette phrase de Jésus annonce le développement qui va suivre avec l'image de l'échelle de Jacob sur laquelle on monte par l'humilité et on descend par l'orgueil. La seconde citation est tirée du Ps 130, dans sa formulation basée sur la traduction latine de la Vulgate. « Mon cœur ne s'est pas élevé et mes yeux ne se sont pas levés» nous introduit davantage dans le corps du chapitre. En effet les l l degrés qui suivent sont comme l’illustration de la première partie de la citation « mon cœur ne s·est pas élevé,, pour mettre en lumière le travail gui se vit dans le cœur du moine. Travail du cœur en ses désirs. en ses volontés, en ses pensées pour qu'il ne s'élève pas, comme soulignera fortement le 1°degré. Concrètement qu'est-ce qu'un cœur qui ne s'élève pas'' Les degrés suivants s'attachent à en repérer les signes. Cela se manifestera dans la capacité à obéir (2°-3°),
à supporter les injustices (4°), à vivre dans la conscience de ses limites et d'en être content (5-7°). à vivre selon la règle commune (8°), à être discret dans sa manière de parler et de rire (9- 11°). De la citation du Ps 130. nous avons laissé le second membre : "Mes yeux ne se sont pas levés". Elle annonce le dernier degré. le 12°, dans lequel je vois une illustration. lorsque le moine conscient de ses péchés garde les veux fixés au sol. à l'exemple du publicain, qui ne sent pas digne de lever les yeux au ciel. La dernière partie du Ps 130, en sa traduction latine ne trouve heureusement pas d'illustration dans ce chapitre. Je la cite : « qu 'arrivera-t-il si mes sentiments n'étaient pas humbles. si j'ai exalté mon âme ? Comme l'enfant sevré sur sa mère. ainsi tu traiteras mon âme». Mais on pourrait dire que la dernière partie du chapitre en est comme un contrexemple. En effet, lorsque le moine qui a gravi tous les degrés de l'humilité connait l'amour de Dieu parfait, alors il jouit comme l'enfant contre sa mère. d'une grande union avec Dieu. Loin d'être séparé de lui, par l'orgueil, il se trouve uni par l'humilité dans une étroite relation d'amour. qui lui donne une aisance et une assurance dans la pratique du bien et de toute chose dans la vie monastique.
1. Faisons ce que dit le prophète : « J'ai dit : je surveillerai mes voies, afin de ne pas pécher par ma langue. J'ai placé une garde devant ma bouche. Je me suis tu et j'ai été humilié et j'ai gardé le silence sur les choses bonnes. »
2. En ce passage, le prophète montre que, si l'on doit parfois renoncer à des paroles bonnes à cause de la taciturnité, à bien plus forte raison l'on doit s'interdire les discours mauvais à cause du châtiment qui frappe le péché.
3. Donc, même s'il s'agit de paroles bonnes, saintes et édifiantes, les disciples parfaits ne recevront que rarement la permission de parler, pour qu'ils gardent un silence plein de gravité,
4. car il est écrit : « En parlant beaucoup, tu n'éviteras pas le péché ;» ;;
5. et ailleurs : « Mort et vie sont au pouvoir de la langue. »
6. Car parler et enseigner convient au maître, se taire et écouter sied au disciple.
7. Aussi, lorsqu'on aura quelque chose à demander à un supérieur, on le demandera en toute humilité et respectueuse soumission.
8. Quant aux bouffonneries, ainsi qu'aux paroles oiseuses et portant à rire, nous les condamnons en tous lieux à la réclusion perpétuelle, et nous ne permettons pas au disciple d'ouvrir la bouche pour de tels propos.
« Faisons ce que dit le prophète: j'ai dit : Je surveillerai mes voies. afin de ne pas pécher par ma langue'. La taciturnité ou l'apprentissage du silence est pour st Benoit une
discipline qu'il enracine dans les Ecritures comme un moyen pour éviter le péché. Il permet ainsi d'atteindre 1'idéal de sagesse que l'on trouve souvent exposé dans les psaumes et les livres sapientiaux : faire silence pour mieux écouter et devenir disciple. A cette façon de Benoit de voir le silence, nous sommes peut-être plus sensibles aujourd'hui avant tout à l'expérience du silence. Dans notre monde de plus en plus bruyant. apprendre à faire silence est moins le fait de l'obéissance à une règle qu'une expérience à vivre, et à vivre positivement. Car le silence a un enseignement à délivrer à chacun de nous. Il s'offre comme un espace apparemment inconfortable, vers lequel on a peur d'aller. On craint de quitter le flot des paroles ou des occupations, pour aller vers cet espace apparemment vide. Mais cet espace n'est pas vide. Si nous osons nous y aventurer et y demeurer, il nous apprend peu à peu quelque chose d'une plénitude, une plénitude d'être où nous pouvons habiter sans crainte, ni frayeur. Le silence est comme l'antichambre de la maison où nous habitons peu à peu avec nous-mêmes, un peu plus heureux d'être ce que nous sommes. Certes pour garder l'image de la maison, entre les bruits du dehors et le calme de l'intérieur, le sas, cet espace vide peut être encore remplis de bruits non désirables. Proportionnellement, certains bruits vont même résonner plus fortement dans le silence : des agacements, des paroles qui ont blessé, le cinéma intérieur qu·on imagine contre un frère, les tentations de toutes sortes. Le silence peut alors nous faire peur. Il nous faut courageusement apprendre à traverser et affronter ces zones de turbulences. Une manière très féconde de le faire sera de transformer nos peurs ou nos énervements en prière pour que le Seigneur nous aide à vivre autrement ces bruits parasites. pour en faire quelque chose. Car le Seigneur n'est pas dans le tumulte, mais clans« le bruit d'un fin silence». Ce silence qui apaise et fortifie. C'est au service de ce silence plein, car lieu de communion avec le Seigneur, que sont ordonnées nos différentes rè11les de silence au monastère. Par le silence vécu de manière habituelle clans la maison, nous voulons nous faire ce cadeau d'un espace où chacun peut
apprendre à entrer dans la paix intérieure, clans une prière plus familière. De même vivre le travail en silence de manière habituelle, sans se crisper non plus, sera une grâce que l'on se partage mutuellement. Cultivons ce goût du silence libre et fraternel. Il ouvrira en retour des espaces de rencontres fraternelles plus profonds.