vendredi 3 octobre 2025 : journée de solitude pour la communauté, messe vers 6h45 après Laudes.

Commentaires sur la Règle



Voir le commentaire de Père Abbé Luc / Chapitre 40, v 1-4 De la quantité de boisson écrit le 09 mai 2009
Verset(s) :

1. « Chacun tient de Dieu un don particulier, l'un comme ceci, l'autre comme cela. »

2. Aussi est-ce avec quelques scrupules que nous déterminons la quantité d'aliments pour les autres.

3. Cependant, eu égard à l'infirmité des faibles, nous croyons qu'il suffit d'une hémine de vin par tête et par jour.

4. Mais ceux à qui Dieu donne la force de s'en passer, qu'ils sachent qu'ils auront une récompense particulière.

Commentaire :

De la quantité de boisson.

« Mais, ceux à qui Dieu donne la force de s’en passer qu’ils sachent qu’ils auront une récompense particulière » Pourquoi se passer de vin ou de toutes ces choses qui nous procurent un réel plaisir ? Pourquoi y renoncer alors que cela n’est pas mauvais en soi et que cela nous donne du plaisir ? Pourra obtenir une « récompense particulière », répond Benoît… sous-entendu une récompense supérieure. On a déjà rencontré cette notion de « récompense plus grande » pour le service mutuel que des frères rendent les uns aux autres. Récompense équivalait alors à l’accroissement de la charité qui élargit le cœur. La charité qui dilate (RB 35,2). Benoît est cons désireux que ces moines soient en quête de ces récompenses plus grandes. S’il pense certainement à la récompense dans la vie éternelle, je crois que nous pourrons aussi l’entendre d’une récompense qui signifie, déjà sur cette terre, un supplément de vie, un supplément de qualité.

Oui, Benoît nous invite à chercher toujours loin et plus profond. Il désire que nous goûtions un bonheur qui fait éclater sans cesse les limites de nos plaisirs immédiats. Notre cœur a soif d’un bonheur immense. Nos plaisirs humains ne sont que des signes de cette joie à laquelle nous aspirons. Ils sont là pour aiguiser notre désir et l’entraîner à chercher plus loin la source se son bonheur. Et nos plaisirs humains se révèleront toujours une impasse décevante si nous les prenons pour la fin de notre bonheur, si nous nous arrêtons à eux. C’est là que nous pourrons comprendre « La récompense particulière » que nous promet Benoît. Cette récompense est dans la capacité de dépasser nos plaisirs immédiats, voire d’y renoncer comme ici le vin, parce que notre cœur a perçu que son bonheur ne dépend pas de ces plaisirs sensibles. Les nombreux renoncements que la vie monastique nous invite à vivre ne sont pas à comprendre autrement. Nous choisissons de réordonner tous les plaisirs humains (sexualité, loisirs, nourriture, relations.etc.) en renonçant à bien des possibilités, pour tendre à cette joie offerte en creux… Oui, les moines sont les hommes du creux, de l’espace intérieur laissé libre, toujours ouvert à l’habitation de l’Esprit Saint… Lui, l’Amour de Dieu dans nos cœurs, veut nous entraîner à aimer. Aimer en étant moins préoccupé de retenir ou d’amasser, mais davantage en nous donnant pour notre plus grande joie. (2009-05-09)

Voir le commentaire de Père Abbé Luc / Chapitre 37, v 1-3 Des vieillards et des enfants écrit le 09 mai 2009
Verset(s) :

1. Bien que la nature humaine incline par elle-même à l'indulgence pour ces âges, celui des vieillards et celui des enfants, l'autorité de la règle doit cependant y pourvoir.

2. On aura toujours égard à leur faiblesse et on ne les astreindra nullement aux rigueurs de la règle en matière d'aliments,

3. mais on aura pour eux de tendres égards et ils devanceront les heures réglementaires.

Commentaire :

Des vieillards et des enfants

« Bien que la nature humaine incline à l’indulgence pour les âges.. » Rien d’étonnant que la règle de Saint Benoît consacre un chapitre aux vieillards et aux enfants. Car déjà la nature humaine assez spontanément est attentive à ces deux périodes riches de l’existence humaine. Deux périodes éloignés dans le temps et pourtant si proches par bien des aspects. C’est le paradoxe de notre existence humaine de rapprocher ainsi ces deux âges de l’éclosion de la vie et son affaiblissement progressif. Dans l’un et l’autre cas, ils vivent une commune fragilité et d’une dépendance totale à l’égard d’autrui pour leurs besoins les plus élémentaires… Mystère de la vie qui commence et finit sous le signe d’une extrême vulnérabilité... « Qu’est-ce que l’homme ? A t-on envie de dire. Et quelle pédagogie porte en elle-même une existence humaine ? Quel est le sens de cette trajectoire qui nous fait vivre de la totale dépendance inconsciente et inconsciente, à la progressive autonomie, pour entrer dans la maturité responsable de soi-même, des autres et du monde, pour peu à peu vivre la perte de ses facultés jusqu’à la dépendance au bon vouloir d’autrui … ?

De la dépendance inconsciente à la dépendance consentie, en passant par l’indépendance responsable de tous. Chacun de nous vit ce beau processus d’humanisation et pour les plus anciens d’entre-nous cette mystérieuse entrée dans la perte progressive de ces facultés… Perte qui est une épreuve. Est-ce une perte qui m’avilit à mes propres yeux ? Est-ce une perte que je vis dégradante ? Ou bien est-ce une perte qui m’entraîne à un plus grand consentement dans la confiance ? Questions fortes et auxquelles il n’est pas possible de répondre pour les autres. Questions qui invitent à un travail intérieur profond et vital. Notre vie monastique ne nous exempte pas de ce travail intérieur lié à l’âge, mais al pédagogie monastique voudrait être en synergie avec cette pédagogie de l’existence, en nous apprenant le dessaisissement de nous-même ? Il s’agit de grandir dans la confiance filiale, comme des fils dans les mains de Notre Père des Cieux, sous la vigilance attentive de nos frères. Heureux sommes-nous de vivre dans une communauté, de plusieurs générations. Ensemble nous apprenons cette pédagogie de la vie vers une plus grande confiance Ensemble nous nous entraidons. (09/05/09)

Voir le commentaire de Père Abbé Luc / Chapitre 39, v 6-11 De la quantité de nourriture écrit le 08 mai 2009
Verset(s) :

6. S'il arrive que le travail devienne plus intense, l'abbé aura tout pouvoir pour ajouter quelque chose, si c'est utile,

7. en évitant avant tout la goinfrerie et que jamais l'indigestion ne survienne à un moine,

8. car rien n'est si contraire à tout chrétien que la goinfrerie,

9. comme le dit Notre Seigneur : « Prenez garde que la goinfrerie ne vous appesantisse le cœur. »

10. Quant aux enfants d'âge tendre, on ne gardera pas pour eux la même mesure, mais une moindre que pour les plus âgés, en gardant en tout la sobriété.

11. Quant à la viande des quadrupèdes, tous s'abstiendront absolument d'en manger, sauf les malades très affaiblis.

Commentaire :

De la quantité de nourriture

« Prenez garde que la goinfrerie ne vous appesantisse le cœur » Sans le dire Benoît présuppose que l’état normal du moine c’est d’avoir le cœur léger, un cœur libre, un cœur limpide… Tout ce qui vient contrarier cet état est au mieux à discerner pour savoir, quelle place lui donner, au pire c’est à rejeter. La goinfrerie fait ainsi partie des débordements à proscrire. Goinfrerie = mal au foie mal à la tête, digestion difficile… les symptômes sont si évidents que l’on peut facilement veiller à ne pas s’y laisser prendre d’autres fois… même si… Mais il y a d’autres points relatifs à l’alimentation qui peuvent venir alourdir et encombrer notre cœur, et cela de façon plus insidieuse. Par exemple une préoccupation exaspérée de ce que l’on mange ou de santé. Face à cette préoccupation, cultiver la confiance en ces frères et ne Dieu et certainement le meilleur antidote. Des frères préparent des régimes pour prendre en compte les soucis de santé. Pour les autres, comme le prévoie la règle, nous avons plusieurs plats qui nous permettent de prendre davantage de l’un et moins de l’autre, si on éprouve une gêne. Evitons les exigences trop singulières ou des approvisionnements parallèles. Notre table commune est une école de confiance et d’abandon. De lâcher prise. En cela, elle est un véritable exercice spirituel que nous pouvons accomplir jour après jour par amour du Christ. Une autre préoccupation insidieuse peut appesantir le cœur, la peur de manquer. Du coup on fait des réserves ou se sert largement au risque d’en laisser moins aux autres. Là encore, ne nous laissons pas de gagner par cette peur de manquer. Résistons-lui ? Je pense aux libres services où comme notre coutume le précise, nous pouvons apprendre cette liberté de cœur en en faisant pas de réserves de dessert notamment. Oui exerçons-nous à la liberté, ne soyons pas esclave de nos peurs ou de nos appétits. Sachons vivre nos repas dans cette vigilance intérieure…nous découvrirons des joies bien plus grandes. « Tu mets dans mon cœur plus de joie que toutes leurs vendanges et leurs moissons ». (2009-05-08)

Voir le commentaire de Père Abbé Luc / Chapitre 36, v 7-10 Des frères malades écrit le 08 mai 2009
Verset(s) :

7. Ces frères malades auront un logement à part affecté à leur usage, et un serviteur qui ait la crainte de Dieu et qui soit attentionné, soigneux.

8. Toutes les fois que c'est utile, on offrira aux malades de prendre des bains, mais à ceux qui sont bien portants et surtout aux jeunes, on ne le permettra que plus rarement.

9. En outre, on permettra aux malades très affaiblis de manger de la viande, pour qu'ils se remettent ; mais quand ils seront mieux, ils se passeront tous de viande comme à l'ordinaire.

10. L'abbé prendra le plus grand soin que les malades ne soient pas négligés par les cellériers ou par les serviteurs. Lui aussi, il est responsable de toute faute commise par ses disciples.

Commentaire :

Des frères malades.

Pour les frères malades, la règle prévoit donc un logement à part et un frère, appelé serviteur, qui ait la crainte de Dieu… attentionné, soigneux.

Nous sommes entrain de refaire « le logement à part », notre infirmerie avec ses quatre chambres un peu plus vastes et équipées d’un cabinet de toilette. Plus de commodité donc pour les malades et pour les soignants. Nous pourrons mieux honorer ainsi que par le passé la recommandation de « prendre les bains toutes les fois que cela est utile » Comme on le disait déjà, cette nouvelle installation pourrait nous permettre aussi de considérer différemment l’usage de notre infirmerie. Jusqu’à présent, on ne descendait là qu’en cas d’urgence et pour y vivre son dernier passage. Tout en gardant bien sur cette finalité, l’infirmerie pourrait aussi devenir le lieu de résidence habituelle des frères plus diminués dans leur possibilité de mouvement et dans leur autonomie pour le repas ou pour les soins. On pourrait aussi passer peu à peu de l’expression « descendre à l’infirmerie » quand il n’y a pas d’autres possibilités à l’expression « habiter à l’infirmerie » quand les conditions de vie deviennent plus pénibles pour le frère. L’étage des anciens garderait sa vocation d’accueillir là les frères à la mobilité réduite et qui ont besoin de l’ascenseur. Nous le mesurons bien ces lieux spécifiques plus adaptés aux nécessités de l’âge marquent des étapes pour chacun des frères… Les étapes par lesquelles ils apprennent peu à peu à laisser des activités et des choses qu’ils ne peuvent plus faire. Une étape par laquelle ils vivent le lâcher prise par rapport à des objets ou à un environnement familier pour finalement apprendre peu à peu à s’abandonner dans la perspective du grand passage sur l’autre rive. C’est le chemin de tout homme appelé à se préparer dans la liberté à la rencontre avec son Seigneur. Nous nous réjouissons de pouvoir offrir pour ces étapes dures de la vie, des lieux qui soient dignes et agréables. Que frère Mathias soit ici remercié pour son attention aux travaux en cours et surtout pour sas présence auprès de chacun des frères malades. (08/05/09

Voir le commentaire de Père Abbé Luc / Chapitre 36, v 1-6 Des frères malades écrit le 07 mai 2009
Verset(s) :

1. Il faut prendre soin des malades avant tout et par-dessus tout, en les servant vraiment comme le Christ,

2. puisqu'il a dit : « J'ai été malade, et vous m'avez rendu visite »,

3. et : « Ce que vous avez fait à l'un de ces plus petits, c'est à moi que vous l'avez fait. »

4. Mais les malades, de leur côté, considéreront que c'est en l'honneur de Dieu qu'on les sert, et ils ne peineront pas, par leurs vaines exigences, leurs frères qui les servent.

5. Il faut pourtant les supporter avec patience, car des hommes de cette espèce font gagner une plus grande récompense.

6. L'abbé veillera donc avec le plus grand soin à ce qu'ils ne souffrent d'aucune négligence.

Commentaire :

Des frères malades

« Il faut prendre soin avant tout et par-dessus tout des malades en les servant vraiment comme le Christ… »

L’insistance de Benoît est forte. « Avant tout et par dessus tout » afin que l’on soigne les malades « en servant comme le Christ » l’insistance est ici profondément évangélique pour ouvrir le cœur en changeant de regard. Celui qui est malade est le Christ pour moi, pour nous. Le Christ qui est venu en notre chair et qui s’est livré aux mains des hommes, s’identifie à chaque être humain surtout les plus faibles. On pourrait dire qu’en chaque être humain dépendant, le Christ est là livré entre nos mains. Allons-nous l’abandonner par notre négligence ou nos manques d’attention ou bien allons-nous l’honorer et le servir en prenant soin de lui ?

Voilà jusqu’où va la Bonne Nouvelle du Christ venu dans notre chair : il s’offre à nous, livré à notre charité, en chaque homme et particulièrement les plus fragiles. Car dans la faiblesse de la maladie et de l’épreuve, chaque homme est au plus proche du Christ livré en totale dépendance, du bon plaisir des hommes.

Les saints jusqu’à une Mère Térésa ont compris cela magnifiquement et tant de personnes qui agissent dans l’obscurité. Ils l’ont compris avec leur cœur et leurs mains pour se faire proche de tout homme blessé fragile. A notre niveau, au sein de la communauté, en contact de certains hôtes aussi, nous pouvons vivre cette attention du cœur très concrète. Plus nous essayons d’être présents au Christ à travers la lectio et la prière plus nous saurons le reconnaître caché, parfois défiguré en nos frères malades. Cette reconnaissance est une grâce à toujours demander et à sans cesse recueillir. Elle n’est pas connaissance de l’ordre du savoir intellectuel mais elle est autant un acte de foi qu’une attitude d’ouverture qui fait place, dans l’accueil du frère, à toute l’épaisseur de son mystère. On pourrait dire : « il est grand le mystère du frère » et c’est en nous mettant à son service que nous l’approcherons le mieux. (07/05/09)

Voir le commentaire de Père Abbé Luc / Chapitre 35, v 12-18 Des semainiers de la cuisine écrit le 02 mai 2009
Verset(s) :

12. Quand il n'y a qu'un repas, les semainiers recevront auparavant, en plus de la ration normale, un coup à boire et un pain chacun,

13. pour que, au moment du repas, ils servent leurs frères sans murmure et sans trop de fatigue.

14. Mais aux jours sans jeûne, ils attendront jusqu'aux grâces.

15. Le dimanche, aussitôt après la fin des matines, les hebdomadiers entrant et sortant se courberont à tous les genoux à l'oratoire, en demandant que l'on prie pour eux.

16. Celui qui sort de semaine dira ce verset : « Tu es béni, Seigneur Dieu, qui m'as aidé et consolé. »

17. L'ayant dit trois fois, celui qui sort recevra la bénédiction. Puis celui qui entre continuera en disant : « Dieu, viens à mon aide ; Seigneur, hâte-toi de m'aider. »

18. Tous répéteront les mêmes mots par trois fois, et ayant reçu la bénédiction, il entrera.

Commentaire :

Des semainiers de la cuisine.

Cette fin de chapitre nous donne le petit rituel hebdomadaire que pratiquaient les moines de St Benoît pour l’entrée et la sortie de leur service. Rituel aux allures liturgiques qui donne à tous nos services mutuels leur juste place, dans nos journées qui désirent être toutes entières vécues sous la lumière de Dieu. Dans quelques instants, nous vivrons ce petit rituel de façon plus sobre, mais bien significative. Ensemble nous demanderons « Grâce et pardon pour les services de la semaine passée et pour les jours qui viennent, l’esprit de foi et d’amour grâce et pardon, car parfois nous traînons les pieds pour nous lever et nous mettre au service des autres. Grâce et pardon quand nous le faisons à « la va vite » comme pour être au plus vite débarrassé. Notre faiblesse implore donc « l’esprit de foi et d’amour » pour ce service que nous sommes appelés à remplir afin que nous le vivions vraiment avec tout ce que nous sommes en nous donnant vraiment… par à moitié. Avant cette prière, nous allons entendre les différents services demandés pour la liturgie la plupart et parmi eux on trouvera ceux de président de l’Eucharistie et de confesseur. Les frères prêtres au service de leurs frères. Il est heureux en ce jour où nous entourons notre frère Bruno pour son jubilé sacerdotal de relever ce bel exercice du sacerdoce dans le service quotidien de la communauté et de l’Eglise. Parmi tous les services de l’action liturgique lecteurs acolytes, le prêtre tient une place particulière qui l’associe étroitement au Christ tête du corps. Chaque prêtre porte avec le Christ, en lui, le souci de tout le corps. Dans l’Eucharistie, il préside à l’offrande de tous qui s’unissent à l’offrande du Christ. Humble serviteur de l’action liturgique pour que tous soient vraiment rassemblés et s’unissent à l’Unique grand prêtre qu’est le Christ. Dans la confession, le prêtre se met avec le Christ à l’écoute du pénitent pour lui signifier l’accueil du Père et pour l’assurer de son pardon à travers l’absolution. Humble service de l’écoute et du pardon offert. Humble service et comme il n’est pas facile d’être humble dans ce service assez exposé, la tentation serait d’avoir cœur de le remplir. Non, c’est encore humilité que de l’assurer avec ses limites ans le souci de vraiment servir la communauté et d’être à son écoute comme frère.

(02/05/09)

Voir le commentaire de Père Abbé Luc / Chapitre 35, v 7-11 Des semainiers de la cuisine écrit le 29 avril 2009
Verset(s) :

7. Celui qui va sortir de semaine fera les nettoyages le samedi.

8. Ils laveront les linges avec lesquels les frères s'essuient les mains et les pieds.

9. Ils laveront aussi les pieds de tous, non seulement celui qui sort, mais aussi celui qui va entrer.

10. Il rendra au cellérier, propres et en bon état, les ustensiles de son service.

11. Le cellérier, à son tour, les remettra à celui qui entre, de façon à savoir ce qu'il donne et ce qu'il reçoit.

Commentaire :

. Des semainiers de la cuisine.

Ce bref passage nous décrit l’organisation que Benoît vivait à son époque. Une organisation concrète d’entraide entre ceux qui quittent et ceux qui entrent en service. Et au milieu de recommandations très concrètes, le lavement des pieds. A côté du lavage des linges pour maintenir la propreté, le lavement des pieds pour honorer les frères. Cette notation et cette pratique nous surprend, nous qui avons conservé ce geste uniquement dans le cadre liturgique de la célébration du Jeudi Saint. Au temps de Benoît, le commandement du Seigneur de faire comme il avait fait pour les disciples, avait trouvé une expression concrète dans le service des frères, et aussi dans l’accueil des hôtes (RB 53). Aussi au moment de passer les consignes et les instruments enfin de semaine, ce geste vient rappeler aux uns et aux autres, la portée théologale de tout service fraternel. Ce que le cuisinier fera durant la semaine pour préparer les repas des frères, c’est dans l’esprit du lavement des pieds qu’il lui est proposé de le faire. Comme le Christ et pour le Christ présent en chaque frère.

Notre organisation des services et des emplois n’est plus exactement celle décrite par la règle. Certains services d’alors sont devenus pour nous des emplois en raison de l’ampleur de la tâche et de la complexité. Et différents frères sont associés par exemple à la cuisine, pour les pluches, ou des nettoyages. Je remercie les frères de la cuisine et les frères qui travaillent aux légumeries, aux nettoyages de la plonge, au réfectoire, aux fruits, aux fromages, à la cave. Merci à chacun d’apporter son savoir-faire, son temps, sa disponibilité, son esprit de responsabilité puisque ce secteur important de notre vie communautaire fonctionne mieux, dans un climat de paix. Ce travail quotidien porte un poids bien réel de charité et de dévouement, reçu le plus souvent de façon obscure. Il participe à l’échange des dons entre nous, à l’échange de la vie qui nous est offerte pour être donnée. Rendons grâce à Dieu pour cette circulation de la vie entre frères à travers les tâches les plus simples et les plus nobles à la fois, car elles visent le bien des hommes dans leurs besoins les plus élémentaires. (29/04/09)

Voir le commentaire de Père Abbé Luc / Chapitre 35, v 1-6 Des semainiers de la cuisine écrit le 28 avril 2009
Verset(s) :

1. Les frères se serviront mutuellement et personne ne sera dispensé du service de la cuisine, sauf maladie ou si l'on est occupé à une chose d'intérêt majeur,

2. parce que cela procure une plus grande récompense et charité.

3. Aux faibles, on accordera des aides, pour qu'ils ne le fassent pas avec tristesse,

4. mais ils auront tous des aides suivant l'importance de la communauté et l'état des lieux.

5. Si la communauté est nombreuse, le cellérier sera dispensé de la cuisine, ainsi que ceux qui, comme nous l'avons dit, sont occupés à des tâches d'intérêt supérieur.

6. Les autres se serviront mutuellement dans la charité.

Commentaire :

Des semainiers de la cuisine.

Cela procure une plus grande récompense et charité. Se servir mutuellement, ici à la cuisine, est une belle chose aux yeux de St Benoît, car « cela procure une plus grande récompense et charité » Elle est intéressante cette association des deux notes « Récompense et charité ». Comme si la récompense était associée à la charité. N’y a t-il pas en effet plus belle récompense qu’un cœur qui est de plus en plus capable d’aimer de plus en plus dégagé de lui-même pour se donner aux autres ? Spontanément, quand on rend un service, on attend plus ou moins consciemment et rapidement une récompense. Au moins un merci, un geste de reconnaissance qui montre que l’autre a perçu mon effort et mon dévouement. Peut-être faut-il aussi entendre le mot « récompense » pris isolément… le service mutuel sur cette terre nous promet ainsi une belle récompense dans la vie éternelle. Mais Benoît nous propose de chercher plus profondément notre récompense quand il ajoute le mot « Charité » de façon un peu inattendue… Ce faisant, il nous entraîne plus loin, à sortir du schéma trop naturel du donnant-donnant, de l’échange de bons et loyaux services entre frères.. Schéma qui risque toujours de mesurer notre service pour les autres à la mesure de celui qu’ils nous rendent. En nous invitant à chercher notre récompense dans un accroissement de charité Benoît veut nous faire accéder à un niveau supérieur dans l’ordre de l’amour : l’amour qui donne sans soucis d’abord de recevoir en retour. Aimer toujours plus pour apprendre à aimer dans mesure. Là est notre récompense, une récompense qui ne nous fera jamais défaut, car elle nous fait communier à l’amour de Dieu qui n’a pas de limites. Je voudrais relever un lieu où l’on peut expérimenter cela, mais il y en bien d’autres : je pense au desservisse après les repas. Quand on fait une première tâche va-t-on vite s’esquiver ou bien cherche-t-on à aider les autres frères qu n’ont pas fini leur service ? Se sauver ou bien prendre un peu de temps pour aider les autres ? Le Seigneur veut nous partager sa joie d’aimer, comme le psalmiste l’avait pressenti : « mon cœur incline à pratiquer tes commandements, c’est à jamais ma récompense »

Ps 118,112 (28/04/09)

Voir le commentaire de Père Abbé Luc / Chapitre 34, v 1-7 Si tous doivent recevoir également le nécessaire écrit le 25 avril 2009
Verset(s) :

1. Comme il est écrit : « On distribuait à chacun selon ses besoins. ;»

2. Ici nous ne disons pas que l'on fasse acception des personnes, – ;à Dieu ne plaise ! – mais que l'on ait égard aux infirmités.

3. Ici, que celui qui a moins de besoins, rende grâce à Dieu et ne s'attriste pas ;

4. quant à celui qui a plus de besoins, qu'il s'humilie de son infirmité et ne s'enorgueillisse pas de la miséricorde qu'on a pour lui,

5. et ainsi tous les membres seront en paix.

6. Avant tout, que le fléau du murmure ne se manifeste sous aucun prétexte par aucune parole ou signe quelconque.

7. Si l'on y est pris, on subira une sanction très sévère.

Commentaire :

Si tous doivent recevoir également le nécessaire.

« Recevoir également » de façon égale. Est-ce possible ? Benoît répond rapidement « non ». Ce qui est important n’est pas la part de gâteau qui devrait être strictement égale aux autres, mais celui à qui elle est destinée… Quand les enfants sont réunis autour de la tarte que la mère de famille est en train de couper ; ils surveillent l’opération afin que toutes les parts soient bien égales. Gare à l’injustice ! Benoît avec l’évangile nous engage à tourner nos regards non plus vers le gâteau mais vers les frères qui vont le recevoir. Il nous enseigne à savoir considérer nos besoins différents et à les accepter heureusement dans la confiance que chacun aura bien la part qui lui convient. Et comme il y a toujours en chacun de nous un enfant qui sommeille et qui est prêt à se réveiller pour dénoncer le part plus grosse qui va dans l’assiette du voisin, Benoît nous invite à un travail spirituel. Pour ne pas laisser l’enfant jaloux et grincheux être le maître de nos sentiments intérieurs, il faut nous remettre humblement dans la lumière de Dieu. Devant Dieu apprenons à reconnaître nos besoins réels pour laisser s’évanouir les besoins imaginaires et toutes les peurs de manquer. Devant Dieu notre Père, sachons grandir dans la confiance afin de ne pas nous sentir oublié ou méprisé parce qu’un frère a reçu quelque chose que je n’aie pas reçu. Et « Rendons grâce » d’avoir moins de besoin. Rendons grâce de pourvoir exister dans certains objets ou instruments que d’autre utilisent. Ne laissons pas l’enfant en nous avoir le dernier mot. Soyons adultes, c’est à dire des hommes libres capables de reconnaître leurs justes besoins. Des hommes capables de se réjouir du bien fait aux autres. « Ainsi tous les membres seront en pais », ainsi nous goûterons cette paix profonde de dépendre de moins en moins de ce qu’on nous donne ou de ce que on ne nous donne pas pour exister. Que l’Esprit Saint donné à chacun selon ses besoins nous apprenne cette paix là. (25/04/09)

Voir le commentaire de Père Abbé Luc / Chapitre 33, v 1-8 Si les moines doivent avoir quelque chose en propre écrit le 24 avril 2009
Verset(s) :

1. Par dessus tout, il faut retrancher du monastère ce vice jusqu'à la racine :

2. que personne ne se permette de rien donner ou recevoir sans permission de l'abbé,

3. ni d'avoir rien en propre, absolument aucun objet, ni livre, ni tablette, ni stylet, mais absolument rien,

4. puisqu'on n'a même pas le droit d'avoir son corps et sa volonté à sa propre disposition.

5. Tout ce dont on a besoin, on le demande au père du monastère, et personne n'a le droit de rien avoir que l'abbé ne lui ait donné ou permis.

6. Que « tout soit commun à tous », comme il est écrit, en sorte que « ;personne ne dise sien quoi que ce soit », ni ne le considère comme tel.

7. Si quelqu'un est pris à se complaire dans ce vice extrêmement pernicieux, on l'avertira une et deux fois ;

8. s'il ne s'amende pas, il subira une réprimande.

Commentaire :

Si les moines doivent avoir quelque chose en propre.

Le ton avec lequel parle St Benoît ici est particulièrement vif. Cela traduit chez lui une insistance avec laquelle on ne transige pas ; « que personne ne se permette de rien donner ou de recevoir, sans permission de l’abbé, ni d’avoir reçu en propre » Pourquoi une telle insistance ? Certainement tout d’abord par fidélité à l’évangile qui est résumé ici dans cette situation : « que tout soit commun à tous » tiré des actes … Les moines ont un grand désir d’imiter le détachement et la pauvreté des premiers chrétiens qui, touchés par la Bonne Nouvelle, renonçaient à leur propriété pour mettre tout en commun. Mais l’insistance de Benoît vise plus profondément à développer chez chacun des moines une vraie dynamique spirituelle que le souci d’accaparer des biens vient freiner voir étouffer. On peut reprendre les trois verbes avec lesquels Benoît dénonce le vice rejeter : recevoir, donner ou avoir sans permission de l’abbé et les transformer un pour avoir cette dynamique spirituelle : plutôt que recevoir des choses l’importance est d’apprendre à se recevoir de Dieu des frères… Plutôt que de donner des choses, il s’agit de se donner, plutôt que d’avoir, d’accumuler, il nous faut apprendre à être des hommes libres. Se recevoir, se donner, être : telle est la visée de notre vie monastique que pour rien au monde, Benoît voudrait nous voir perdu. Il pose en cela un moyen et un lieu de discernement en la personne de l’abbé. Concernant les biens à recevoir, à donner ou à avoir personnellement, c’est en parlant avec lui que l’on vérifiera où en est notre liberté … Cette recommandation de Benoît n’a rien perdu de son actualité. J’invite chacun à savoir parler quand il reçoit ou donne quelque chose. J’entends parfois les frères libraires être étonnés que des frères fassent facilement des cadeaux depuis la librairie. Que chacun sache en parler avec l’abbé avant. Personne ne vit à son compte dans la maison de Dieu. (24/04/09)