vendredi 15 août 2025 : fête de l’Assomption, horaire des dimanches (vigiles la veille à 20h45, messe à 10h) + concert à 16h.

Nota : L’office de None (14h45) sera prié au dolmen de ND de la Pierre-qui-Vire.

Commentaires sur la Règle



Voir le commentaire de Frère Yvan / Chapitre 69, v 1-4 Prendre la défense d’un autre écrit le 09 octobre 2009
Verset(s) :

1. Il faut prendre soin que personne au monastère, en aucune occasion, ne se permette de défendre un autre moine ou de lui servir comme de protecteur,

2. même s'ils sont unis par un lien de parenté quelconque.

3. Les moines ne se le permettront d'aucune manière, car cela peut être l'occasion de conflits très graves.

4. Si quelqu'un transgresse ce point, on le châtiera rigoureusement.

Commentaire :

La formule du titre est analogue dans ce chapitre et dans le suivant : « Qu’on ne se permette pas de protéger » « Qu’on ne se permette pas de frapper ! ». Les deux actes sont opposés mais les deux sont abusifs. Ils empiètent l’un et l’autre sur la vie du frère, sur sa relation à l’abbé à la communauté, à son père spirituel. Il y a des gens au tempérament de justicier. Les uns et les autres risquent d’intervenir de façon indiscrète dans la vie de leurs proches. S’occuper de ce qui ne les regarde pas. Aujourd’hui St Benoît traite de cette tendance à materner, à protéger, à défendre. Ce qui veut dire encore se mettre au-dessus de l’autre, le traiter comme inférieur. La vie fraternelle, comme l’amitié, suppose l’égalité, comme toute relation saine. Le besoin de protéger, de défendre, de materner, n’aide pas à grandir. Il établit une dépendance. Il maintient sous la coupe. Je préparais ce commentaire hier, alors que l’Evangile du jour était la parabole du Bon Samaritain. Comme il se montre miséricordieux fraternel même. Mais le lendemain il part. Il laisse à l’aubergiste les consignes et il s’en va. Il ne se rend pas propriétaire, ce n’est pas son blessé. Par rapport à nos frères, à notre famille. Par rapport aux hôtes qui nous demandent aide, nous avons à veiller à cette liberté de notre cœur. Laisser l’autre libre, ne pas chercher à maintenir une relation, à emprisonner par des liens affectifs. (2009-10-09)

Voir le commentaire de Frère Yvan / Chapitre 72, v 1-12 Le bon zèle des moines écrit le 09 octobre 2009
Verset(s) :

1. S'il existe un zèle mauvais et amer qui sépare de Dieu et conduit en enfer,

2. il existe aussi un bon zèle qui sépare des vices et conduit à Dieu et à la vie éternelle.

3. Tel est donc le zèle que les moines pratiqueront avec un ardent amour ;:

4. ils « se préviendront d'honneurs mutuels » ;

5. ils supporteront sans aucune impatience leurs infirmités corporelles et morales ;;

6. ils s'obéiront à l'envi ;

7. personne ne recherchera ce qu'il juge être son avantage, mais plutôt celui d'autrui ;;

8. ils pratiqueront la charité fraternelle avec désintéressement ;;

9. avec amour ils craindront Dieu ;

10. ils affectionneront leur abbé d'une charité sincère et humble ;;

11. « ils ne préféreront absolument rien au Christ. ;»

12. Que celui-ci nous fasse parvenir tous ensemble à la vie éternelle ;!

Commentaire :

Le bon zèle des moines.

Ce texte est le plus beau de la Règle ? C’est un peu intimidant de le commenter !

St Benoît commence ce chapitre en opposant les deux zèles : le zèle mauvais, amer, qui sépare de Dieu – Le bon zèle qui sépare des vices et mène à Dieu. On pense au texte de « la cité de Dieu » de St Augustin = « deux amants ont fait deux cités : l’amour de soi jusqu’au mépris de Dieu, la cité terrestre » - l’amour de Dieu jusqu’au mépris de soi, la cité céleste » XIV/28. St Benoît décrit ce bon zèle en 8 courtes sentences, qui rappellent les instruments des bonnes œuvres. Mais ici Benoît laisse de côté l’ascèse personnelle. Il ne parle, que des relations entre frères et il débouche sur l’amour du Christ. « Supporter sans impatience les infirmités corporelles et morales de nos frères » C’est notre combat quotidien et c’est réciproque : mes frères ont besoin d’autant de patience que moi, sans doute plus « Ne pas chercher ce qui est le meilleur pour moi » Ce verset aussi est d’application courante dans nos vies, pour la nourriture, par exemple, est-ce que je pense à laisser le meilleur à mes frères ?

« Aimer son abbé d’une charité sincère et humble » La fête de Père Luc approche, elle est une occasion de lui témoigner notre affection et notre reconnaissance.

« Ne préférer absolument rien au Christ ». Frère Adalbert nous dit que Benoît emprunte cette formule à St Cyprien. Se savoir aimé par le Christ. Que cette relation habite notre cœur de plus en plus. (2009-10-09)

Voir le commentaire de Frère Yvan / Chapitre 71, v 1-9 Relation entre frères écrit le 08 octobre 2009
Verset(s) :

1. Ce n'est pas seulement envers l'abbé que tous doivent pratiquer le bien de l'obéissance, mais en outre les frères s'obéiront mutuellement,

2. sachant que par cette voie de l'obéissance ils iront à Dieu.

3. Aussi, mis à part les ordres de l'abbé ou des prévôts qu'il institue, ordres auxquels nous ne permettons pas que l'on préfère ceux des particuliers,

4. pour le reste tous les inférieurs obéiront à leurs anciens en toute charité et empressement.

5. Si quelqu'un est pris à contester, on le réprimandera.

6. De plus, si un frère reçoit une réprimande quelconque de l'abbé ou de n'importe lequel de ses anciens pour quelque raison que ce soit, si mince qu'elle puisse être,

7. et s'il sent que l'esprit de n'importe quel ancien est légèrement irrité contre lui ou ému si peu que ce soit,

8. aussitôt et sans délai il se prosternera à terre et fera satisfaction, étendu à ses pieds, jusqu'à ce qu'une bénédiction vienne calmer cette émotion.

9. Celui qui refuse de faire cela, on lui infligera un châtiment corporel, ou bien, s'il est obstiné, on le chassera du monastère.

Commentaire :

Relation entre frères.

Comme les deux précédents chapitres, il s’agit dans ce chapitre des relations fraternelles : après « ne pas défendre un autre frère » « ne pas se permettre de frapper », il s’agit aujourd’hui de « l’obéissance mutuelle et comment réagir aux réprimandes »

Benoît parle ici d’une obéissance hiérarchisée : les plus jeunes doivent obéir aux plus anciens. C’est seulement au chapitre suivant, sur le bon zèle, que l’obéissance deviendra pleinement réciproque. Mais déjà ce chapitre élargit le cadre : l’obéissance n’est pas dire seulement à l’abbé et aux doyens : elle est dire à tout frère ancien. Elle prend une place unique, elle régit toute la vie commune. Peu importe que l’ancien soit plus ou moins qualifié pour donner l’ordre, peu importe la qualité objective de ce qui est demandé : l’obéissance est toujours un bien pour le moine. Elle lui fait pratiquer le renoncement, l’humilité, l’amour fraternel. Elle le met à la suite du Christ. « Elle est la voie par laquelle on va à Dieu » dit Benoît. Ce qui nous rappelle le prologue : « revenir par l’obéissance laborieuse à celui dont on s’était écarté par une désobéissance paresseuse » Tout au long de la Règle cette perspective générale du prologue a été précisée et concrétisée dans toute l’existence du moine. Comme au troisième degré d’humilité, comme à propos de l’obéissance dans les choses impossibles. Benoît indique d’un mot pourquoi le moine obéit : par charité, l’amour du Christ et des frères. Et ce que nous savons, c’est que le fruit de l’obéissance, c’est la liberté du cœur.

La deuxième partie de notre texte se rattache aux deux précédents, elle traite des réprimandes. Mais Benoît ne s’adresse plus à celui qui réprimande. Il parle aux jeunes frères. Il les invite à recevoir humblement toutes les remarques de leurs aînés, même si le frère ancien est irrité : l’humilité est désarmante. Elle calme les émotions de la colère. Elle rétablit la relation.

Nous pouvons nous demander : est-ce que je reconnais avoir tord, parfois ? Puis-je accepter une remarque ? Est-ce que je demande pardon ? (2009-10-08)

Voir le commentaire de Frère Yvan / Chapitre 70, v 1-7 On n’osera pas frapper un frère. écrit le 07 octobre 2009
Verset(s) :

1. On évitera, au monastère, toute occasion de présomption,

2. et nous décrétons que personne n'aura le droit d'excommunier ou de frapper aucun de ses frères, s'il n'en a reçu pouvoir de l'abbé.

3. Mais « on reprendra les coupables en présence de tous, afin de faire peur aux autres. ;»

4. Quant aux enfants jusqu'à l'âge de quinze ans, tous auront soin de les maintenir dans l'ordre et les surveilleront,

5. mais en toute mesure et raison.

6. Si quelqu'un se permet quoi que ce soit contre un adulte sans instructions de l'abbé ou s'emporte sans discrétion contre des enfants, il subira les sanctions de règle,

7. car il est écrit : « Ce que tu ne veux pas qu'on te fasse, ne le fais pas à autrui. ;»

Commentaire :

« Ce que tu ne veux qu’on te fasse, ne le fais pas à autrui » Cette « Règle d’or » on la retrouve de nombreuses fois dans l’Ecriture – Jésus dit qu’elle résume toute la loi et les prophètes. Benoît la cite plusieurs fois : au chap 4 à propos des moines étrangers et ici encore. Nous avons tendance à utiliser une mesure différente quand il s’agit de nous-même, ou quand il s’agit d’un autre frère. Ce que nous faisons n’a pas beaucoup d’importance, n’est pas si grave, C’est chez nous signe de liberté nous n’en sommes plus là.. Par contre, si nous surprenons un frère en défaut, surtout sur un point qui nous est sensible, nous sommes bouleversés ! Le monde s’écroule, le monastère est perdu si on laisse faire cela. Deux poids, deux mesures ! Jésus parle de la poutre que nous avons dans l’œil, qui fausse notre appréciation de la paille qui est dans l’œil de notre frère. Alors que faire ? Laisser aller ? Ce n’est pas ce que dit

St Benoît : il encourage à la correction fraternelle. Il cite la première lettre à Timothée : « On reprendra les coupables… « Un verset qu’il a déjà utilisé deux fois. Mais cette correction fraternelle ne peut porter du fruit que dans un certain climat spirituel. D’après ce que dit ce chapitre 70 on peut caractériser ce climat par trois points :

- D’abord il n’est permis à personne de frapper, ni d’exclure : nous sommes des frères.

- Ensuite le bon ordre est à la charge de tous : nous n’avons pas à démissionner, à laisser aller.

- Enfin, si on est irrité, mieux vaut s’abstenir : rien de bon ne se fait sous l’emprise de la colère.

Cela suppose donc que nous regardions l’autre comme un frère, tous les autres comme des frères. Que nous nous comportions en responsable du bien commun, de la vie de la communauté. Que nous fassions passer l’amour de l’autre avant notre agacement. (2009-10-07)

Voir le commentaire de Père Abbé Luc / Chapitre 68, v 1-5 Si l’on en joint à un frère des choses impossibles. écrit le 03 octobre 2009
Verset(s) :

1. Si l'on enjoint à un frère des choses pénibles ou impossibles, il recevra l'ordre de celui qui commande en toute douceur et obéissance.

2. S'il voit que le poids du fardeau excède absolument la mesure de ses forces, il représentera à son supérieur, patiemment et opportunément, les raisons de son impuissance,

3. sans orgueil ou résistance ni contradiction.

4. Si, après ses représentations, l'ordre du supérieur se maintient sans qu'il change d'avis, l'inférieur saura qu'il est bon pour lui d'agir ainsi,

5. et par charité, confiant dans le secours de Dieu, il obéira.

Commentaire :

Ce petit chapitre nous place au cœur de notre vie monastique, il nous en fait rejoindre l’essentiel : le don de soi dans une communauté très humaine par amour du Christ… don de soi qui passe concrètement par la remise de soi dans l’obéissance. Et ici, Benoît nous invite à regarder en face le fait que l’obéissance n’est pas facile toujours. Il parle de fardeau, il utilise aussi le verbe « enjoindre » verbe bâti sur la même racine que mot « joug ». Enjoindre pourrait se traduire « mettre sous un joug », pour garder l’image. Ces images sont fortes ; mais elles traduisent sûrement bien ce que l’on peut ressentire, quand l’obéissance est difficile. Il y a quelque chose de pesant ….. ou l’on ne semble pas vraiment libre. Ce ressenti est lui aussi à regarder en face et en à parler avec un tiers, si c’est possible, pour essayer d’y voir plus clair. Car il s’agit de discerner dans le dialogue avec celui qui commande. D’où vient ce sentiment de poids d’écrasement ? Vient-il de mes peurs ou de mes résistances ou bien vient-il d’un réel excès dans l’exigence, excès que je ne saurai pas gérer ? Le discernement est à vivre dans le dialogue et dans la foi, les yeux fixés sur le Christ. Car c’est à lui qu’on choisit d’obéir en désirant obéir à des hommes très concrets. L’obéissance, vécues au monastère, dans ses petites comme dans ses grandes expressions, veut nous faire goûter que le joug du Christ est facile et son fardeau léger, plus facile et plus léger que la propre tyrannie de nos illusions, de nos peurs et de nos passions. St Benoît parle pour vivre ce discernement dans la lumière, de douceur et de charité. Douceur et charité sont comme deux lampes qui éclairent dans leur discernement et le frère et celui qui commande. (2009-10-03)

Voir le commentaire de Frère Yvan / Chapitre 18, v 1-6 Dans quel ordre doit-on dire ces psaumes ? écrit le 03 octobre 2009
Verset(s) :

1. Tout d'abord, on dira le verset « Dieu, viens à mon aide ; Seigneur, hâte-toi de m'aider », gloria ; puis l'hymne de chaque heure.

2. Ensuite à l'heure de prime, le dimanche, on dira quatre sections du psaume cent-dix-huit.

3. Aux autres heures, à savoir tierce, sexte et none, on dira chaque fois trois sections du susdit psaume cent-dix-huit.

4. A prime de la seconde férie, on dira trois psaumes, à savoir le premier, le deuxième et le sixième.

5. Et ainsi, chaque jour à prime jusqu'au dimanche, on dira à la suite trois psaumes chaque fois jusqu'au psaume dix-neuf, en divisant en deux les psaumes neuf et dix-sept.

6. De la sorte, on commencera toujours par le vingtième aux vigiles du dimanche.

Commentaire :

Dans quel ordre doit-on dire ces psaumes ?

Nous commençons un long chapitre particulièrement précis. Le maître faisait dire tous les Psaumes à la suite, en reprenant à chaque office là où l’on s’était arrêté à l’office précédent. Les monastères récitaient tout le psautier chaque semaine, mais il le pratiquait en deux parties = une partie nocturne, les PS 1 à 108, une partie vespérale, les Ps 109 à 147. Le système romain est la base de celui de Benoît : quand il modifie, c’est pour diminuer les répétitions et réduire la longueur des offices. « Tout d’abord on dira le verset « Dieu vient à mon aide, Seigneur à notre secours » puis l’hymne de chaque heure » C’est Cassien certainement, qui est à l’origine de l’usage de Verset du Ps 69 au début de chaque office, et comme prière dans certaines circonstances. La conférence 10 de Cassien, sur la prière très belle, nous dit que la répétition de verset est le meilleur moyen pour arriver à la prière continuelle. Prier sans cesse Cassiodore nous dit que les moines d’Italie répétaient ce verset 3 fois, au début de tout ce qu’ils entreprenaient. Le Règle de St Colomban demande de le dire trois fois, dans le temps de prière silencieuse qui suit chaque Psaume de l’office. Pour Benoît, il ne s’agit plus d’une formule continuellement répétée par chacun pour alimenter sa vie de prière personnelle. C’est l’introduction de chaque office du jour. Le Chapitre 35 demande aussi aux semainiers de la cuisine de dire trois fois ce verset au début de la semaine. Cassien n’a pas réussi à persuader les moines latins d’employer le « Dieu vient à mon aide » pour prier sans cesse. Son éloge de cette formule l’a seulement fait adopter de façon plus restreinte. Mais grâce à lui, l’usage du verset, au début de chaque office s’est imposé à toute l’Eglise d’Occident.

Le verset du Psaume 69 nous rappelle une chose importante notre prière est l’œuvre de Dieu en nous. Sans l’Esprit Saint nous ne savons prier. En demandant l’aide du Seigneur nous entrons dans la prière par sa porte unique : l’humble reconnaissance du don mystérieux dont tout dépend. Les moines et les moniales d’Occident aujourd’hui sont eux aussi en recherche de prier sans cesse. Le « Dieu vient à mon aise » Le « suscipe » surtout la prière des vêpres est dans notre carquois, avec bien d’autres versets de l’Ecriture. Nous n’oublions pas l’enseignement de Mgr Séraphin sur la prière du cœur, la prière de vêpres en lien avec la dimension corporelle de notre prière. (2009-10-03)

Voir le commentaire de Père Abbé Luc / Chapitre 67, v 1-7 Des frères envoyés en voyage écrit le 01 octobre 2009
Verset(s) :

1. Les frères qui vont partir en voyage se recommanderont à l'oraison de tous les frères et de l'abbé,

Commentaire :

« Des frères envoyés en voyage »

L’expression du titre de ce chapitre est heureuse. Les moines quand ils voyagent sont « Envoyés » Ils ne voyagent pas au gré de leurs désirs ou de leurs caprices comme les gyrovagues. Non ils sont envoyés, mandatés, par l’abbé et la communauté pour une affaire ou une mission précise. Nos voyages et nos sorties, comprises de la sorte, ne nous extraient pas de notre mission fondamentale de moine. A l’extérieur nous poursuivons notre vocation de prière et de vigilance dans l’amour pour Dieu et les frères. Il serait triste en effet si , une fois la porte du monastère franchie, le moine se sentait libéré des obligations de notre vie et perdait ses repères intérieurs ? Comme si la vie qu’il menait au monastère n’était qu’un manteau extérieur que l’on a vite enlevé. Il est vrai que nos voyages à l’extérieur peuvent constituer une épreuve car le rythme et le style de vie sont soudain différents. Les voyages nous éprouvent dans notre fidélité à l’office : allons-nous savoir nous préserver des rendez-vous avec le Seigneur ? Allons-nous savoir nous arrêter pour lui ? Peut être à d’autres moments qu’habituellement.. mais le plus important est de se donner ces temps de rendez-vous pour la prière. Notre coutume de loger habituellement dans une communauté religieuse offre un réel soutien. Les voyages nous éprouvent aussi dans notre manière de vivre : par exemple allons-nous faire des dépenses que personne nous a demandées ? Au retour saurons-nous rendre nos comptes avec précision comme de bons gérants de biens qui appartiennent à la communauté ? Si quelque chose a été difficile à vivre, saurons-nous en parler ? Oui les voyages nous éprouvent dans notre fidélité profonde, et ils sont une belle opportunité d’exercer notre responsabilité d’homme qui assume sa vie ses choix, en relation avec sa communauté, comme un moine envoyé toujours en tenue de service. (2009-10-01)

Voir le commentaire de Père Abbé Luc / Chapitre 66, v 1-8 Des portiers du monastère. écrit le 30 septembre 2009
Verset(s) :

1. A la porte du monastère on placera un vieillard sage, qui sache recevoir et donner une réponse, et dont la maturité ne le laisse pas courir de tous côtés.

2. Ce portier doit avoir son logement près de la porte, afin que les visiteurs le trouvent toujours présent pour leur répondre.

3. Et aussitôt que quelqu'un frappe ou qu'un pauvre appelle, il répondra Deo gratias ou Benedic ,

4. et avec toute la douceur de la crainte de Dieu, il se hâtera de répondre avec la ferveur de la charité.

5. Si ce portier a besoin d'aide, il recevra un frère plus jeune.

6. Quant au monastère, il doit être, si possible, construit de telle façon que tout le nécessaire, c'est-à-dire l'eau, le moulin, le jardin et les divers métiers, s'exerce à l'intérieur du monastère,

7. de sorte que les moines ne soient pas obligés de courir au-dehors de tous les côtés, car ce n'est pas bon du tout pour leurs âmes.

8. Nous voulons que cette règle soit lue souvent en communauté, pour qu'aucun frère ne s'excuse sur son ignorance.

Commentaire :



« Que les moines ne soient pas obligés de courir au dehors de tous les côtés »

Dans quelques jours, au Bec Hellouin, nous nous retrouverons entre abbés français, et une de nos heures de discussion sera autour de notre gestion d’Internet dans les monastères. Informé de cela, une journaliste de la Croix a interrogé quelques abbés. Elle m’a appelé par téléphone sur notre manière d’intégrer ce nouveau média. Elle en fera un article. Une de ces questions portait sur la clôture : « Internet ne fait-il pas reculer ou se déplacer les frontières de la clôture ? » Il est vrai Internet est un outil assez extraordinaire qui vient bousculer notre conception de la clôture… déjà avant lui le téléphone. Notre clôture devient plus poreuse, plus perméable aux informations de toute sorte. Ce n’est pas nous qui allons à l’extérieur, mais c’est le monde qui vient à nous. Cet état de fait est une conséquence de l’évolution rapide de notre société dans laquelle nous sommes pris et dont nous bénéficions aussi. Si autrefois, un mur suffisait pour définir le périmètre à l’intérieur duquel vivre notre vie monastique, aujourd’hui ce n’est plus le cas. Le périmètre de notre vie monastique doit faire l’objet d’une attention plus continue. Il est sans cesse à réexaminer ensemble et personnellement. Avec Internet, notre périmètre de vie peut s’élargir d’un seul coup jusqu’au bout du monde et de la à tout moment. Si nous voulons chercher Dieu dans une vraie profondeur, celle qui nous rejoint dans l’intime du cœur, nous savons qu’il n’est pas possible d’être toujours à l’affût des dernières informations ou des dernières nouveautés. Cette avidité pour les événements immédiats ne peut que nous décevoir et nous laisser vide.

C’est pour cela que nous nous sommes donnés des repères dans notre usage d’Internet : celui de l’horaire fermeture entre 20h30 et 8h, celui de la manière : on ne va sur Internet que dans un but précis pour chercher quelque chose .. on ne va sur Internet pour surfer au risque de divaguer… et enfin, on ne va pas sur Internet pour voir tel émission ou film. Comme pour la Télévision nous faisons le choix de visionner des films ou émissions en groupe ou en communauté, non seul, pour pouvoir en parler ensuite.

Ces règles invitent chacun à une vraie discipline. Elles veulent nous aider à demeurer libres pour aller au bout de notre recherche spirituelle. Si nous les moines, nous fuyons ou nous avons peur du silence ou de la solitude, du retrait pour la prière et la recherche de Dieu, qui le fera ? Le Seigneur nous attend à l’intime de nous-même. N’allons pas par Internet « Courir au dehors de tous les côtés » (2009-09-30)

Voir le commentaire de Père Abbé Luc / Chapitre 65, v 1-10 Du prévôt du monastère. écrit le 24 septembre 2009
Verset(s) :

1. Trop souvent il est arrivé que l'ordination d'un prévôt engendre de graves conflits dans les monastères.

2. Il en est en effet qui s'enflent d'un méchant esprit d'orgueil et qui, estimant être de seconds abbés, usurpent le pouvoir, entretiennent des conflits et mettent la dissension dans les communautés,

3. surtout dans les lieux où le prévôt reçoit l'ordination du même évêque et des mêmes abbés qui ordonnent l'abbé.

4. Combien cela est absurde, il est facile de s'en rendre compte : dès le début, dès son ordination, on lui donne matière à s'enorgueillir,

5. ses pensées lui suggérant qu'il est soustrait à l'autorité de son abbé,

6. puisque « toi aussi, tu as été ordonné par les mêmes qui ont ordonné l'abbé. ;»

7. Il en résulte envies, disputes, médisances, rivalités, dissensions, destitutions,

8. et ainsi, abbé et prévôt étant de sentiments opposés, il est inévitable que leurs âmes soient en danger, tant que durent ces dissensions,

9. et leurs subordonnés courent à leur perte, du fait qu'ils flattent leurs partisans.

10. La responsabilité de ce dangereux fléau pèse au premier chef sur ceux qui se sont faits les auteurs d'un tel désordre.

Commentaire :

« De graves conflits dans les monastères ». Et oui, cela existe malheureusement. Ici on peut entendre la question que pose St Jacques dans son épître « d’où viennent et les guerres, d’où viennent les conflits entre vous ? » (Jc 4,1) Et il répond : « N’est ce pas justement de tous ces instincts qui mènent leur combat en nous-mêmes ? » Mystérieusement la racine de nos conflits ne se trouvent pas d’abord à l’extérieur, mais à l’intérieur dans notre propre conflit interne. Cette constatation nous est toujours difficile à accepter. C’est tellement plus facile de mettre la faute sur le dos des autres, et notre adversaire en particulier. Dire ceci, c’est ouvrir une première porte dans la résolution du conflit : savoir reconnaître ma part dans ce conflit, le poids que je fais peser, est la base de tout progrès vers la réconciliation.

Ensuite, si on veut avancer, il est important de parler avec une tierce personne. Peut-être dans un premier temps pour se décharger de tout son ressenti. Mais ce premier temps de suffit pas ? Un deuxième temps appellera une parole qui sache essayer de voir pourquoi j’ai agi ou réagi comme cela, pourquoi je m’emporte ou pourquoi se suis terrorisé. Poser la question, chercher à comprendre sans tomber dans le piège de l’autojustification est un gage énorme de progrès. Progrès pour apprendre à gérer ce conflit interne qui m’habite et me fragilise. Gérer ne veut pas dire nécessairement résoudre ? Mais gérer veut dire accepter de regarder en face, pour assumer et essayer d’avancer. Nous touchons là un vrai travail humain et spirituel qu’aucun de nous ne peut esquiver. Le conflit extérieur peut servir de révélateur et nous permettre finalement d’aller plus en profondeur, dans une meilleure connaissance de nous-même. La vie monastique nous offre dans l’ouverture du cœur au Père Spirituel un précieux instrument : sans attendre les conflits, nous pouvons nous ouvrir régulièrement de nos combats et de nos conflits intérieurs …. pour mieux les comprendre… et les présenter au Christ. Lui qui veut nous guérir. (2009-09-24)

Voir le commentaire de Père Abbé Luc / Chapitre 64, v 16-22 De l’ordination de l’abbé. écrit le 23 septembre 2009
Verset(s) :

16. Il ne sera pas agité et inquiet, il ne sera pas excessif et obstiné, il ne sera pas jaloux et soupçonneux à l'excès, car il ne serait jamais en repos.

17. Dans les ordres qu'il donne, il sera prévoyant et réfléchi, et que l'œuvre qu'il commande soit selon Dieu ou selon le siècle, il usera de discrétion et de mesure,

18. en songeant à la discrétion de saint Jacob, qui disait : « Si je fais peiner davantage mes troupeaux à marcher, ils mourront tous en un jour. »

19. Prenant garde à ce texte et aux autres sur la discrétion, mère des vertus, il mettra de la mesure en tout, en sorte que les forts aient à désirer et que les faibles n'aient pas à prendre la fuite.

20. Et surtout, qu'il garde en tous ses points la présente règle,

21. afin qu'après avoir bien servi, il entende le Seigneur lui dire, comme au bon serviteur qui distribua en son temps le froment à ses compagnons de service :

22. « En vérité, je vous le dis, il l'établira sur tous ses biens. »

Commentaire :

« Que les forts aient à désirer et que les faibles n’aient pas à prendre la fuite »

Une fois un frère me disait en souriant à propos de recommandations concrètes que j’avais donné sur notre vie monastique : « Tout cela, je l’ai fait, que me manque-t-il encore ? » Que les forts aient à désirer. Peut-être certains frères qui ont bien intégré notre vie et ses coutumes reprendraient-ils cette réflexion du frère. Je dirais tout d’abord heureux sont-ils pour deux raisons : parce qu’ils sont entrés dans ce qui est proposé et l’on fait-leur.. mais surtout heureux sont-ils car ils désirent encore progresser et ne pas s’en tenir à une simple observance de pratiques et de rites. Car notre vie veut nous ouvrir d’autres espaces de recherche et d’approfondissement. La vie régulière, ses horaires, ses coutumes sont les structures de notre maison, ses murs son toit. Ils nous assurent une stabilité et une certaine aisance. Mais il faut encore veiller à l’aménagement intérieur de la maison… et là le champs d’action est vaste. Car il s’agit de préparer notre maison, notre cœur à vivre une relation toujours plus amicale et familière avec le Christ et avec tous nos frères. Que le Christ, que nos frères soient à l’aise chez nous avec nous. On sait aujourd’hui le soin que les gens apportent à peaufiner leur intérieur d’habitation. Mettons-nous le même soin à embellir notre être intérieur ? Là l’attention, voire le combat est de tous les jours. Tous les jours, il nous faut faire le ménage par rapport aux pensées de jugement, par rapport aux critiques… mais aussi plus subtil par rapport aux pensées de justification ou de tristesse, voire de découragement. Ces pensées sont comme la poussière qui se dépose insensiblement et peu à peu encrasse tout. Mais surtout dans notre être intérieur, il nous faut toujours garder une place pour le Christ par la prière, par l’attention à sa parole. C’est lui, l’hôte que nous désirons honorer, connaître et aimer toujours plus. Si notre maison a un toit qui fuit… si notre intérieur est encombré de pensées pesantes ou acides nous peinerons à lui faire une place. Heureusement, il sait aussi s’inviter chez nous car il aime les pauvres et les pécheurs. Qu’il nous prenne en pitié par son amour. (2009-09-23)