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21. Ceignant donc nos reins de la foi et de l'accomplissement des bonnes actions, avançons sur ses voies, sous la conduite de l'Évangile, afin de mériter de voir celui qui nous a appelés à son royaume.
22. Si nous voulons habiter dans la demeure de ce royaume, on ne saurait y parvenir, à moins d'y courir par de bonnes actions.
23. Mais interrogeons le Seigneur avec le prophète, en lui disant : « ;Seigneur, qui habitera dans ta demeure, et qui reposera sur ta montagne sainte ? »
24. Cette question posée, frères, écoutons le Seigneur nous répondre et nous montrer le chemin de cette demeure,
25. en disant : « C'est celui qui marche sans se souiller et accomplit ce qui est juste ;
26. qui dit la vérité dans son cœur, qui n'a pas commis de tromperie par sa langue ;
27. qui n'a pas fait de mal à son prochain ;; qui n'a pas laissé l'injure atteindre son prochain ;» ;;
28. qui, lorsque le malin, le diable, lui suggérait quelque chose, l'a repoussé loin des regards de son cœur, lui et sa suggestion, l'a réduit à néant, et s'emparant de ses petits – les pensées qu'il lui inspirait – les a écrasés contre le Christ.
29. Ce sont ceux-là qui, craignant le Seigneur, ne s'enorgueillissent pas de leur bonne observance, mais qui, estimant que ce qui est bon en eux ne peut être leur propre œuvre, mais celle du Seigneur,
30. magnifient le Seigneur qui opère en eux, en disant avec le prophète : « Non pas à nous, Seigneur, non pas à nous, mais à ton nom rends gloire ! »,
31. de même que l'Apôtre Paul, lui non plus, ne s'attribuait rien de sa prédication et disait : « C'est par la grâce de Dieu que je suis ce que je suis. »
32. Et il dit encore : « Celui qui se glorifie, qu'il se glorifie dans le Seigneur. »
33. De là aussi la parole du Seigneur dans l'Évangile : « Celui qui écoute ce que je viens de dire et le met en pratique, je le comparerai à un homme sage, qui a bâti sa maison sur la pierre.
34. Les eaux sont venues, les vents ont soufflé et ont heurté cette maison, et elle n'est pas tombée, parce qu'elle était fondée sur la pierre. ;»
Dans ce passage du Prologue, Benoît présente deux fondements de la vie monastique : L’agir juste, et la parole juste. La vie monastique est l’ajustement progressif de nos actions et de notre parole à l’Evangile. Cette transformation ne se fait pas en un jour. Mais elle est la condition d’une expérience spirituelle authentique. Sinon, nous vivons dans l’illusion, et dans le mensonge.
L’agir juste : C’est le programme de Benoît. Il y revient à de nombreuses reprises dans ces versets. Il parle de : l’accomplissement des bonnes actions v.21, Habiter la maison du Seigneur, on ne saurait y parvenir, à moins d’y courir par de bonnes actions v.22, Celui qui marche sans se souiller et accomplit ce qui est juste v.25, Celui qui ne fait pas de mal à son prochain v.27.
Benoît veut nous aider à devenir vrais. Vrais, c’est-à-dire : apparaitre ce que nous sommes. Notre vie se définit par rapport au Christ. Qu’elle manifeste donc la présence du Christ en nous. Voilà ce que nous devons désirer, pour chacun de nous et pour la communauté : qu’elle resplendisse le Christ Jésus. Humilité, simplicité, détachement, intelligence des choses de Dieu, liberté spirituelle.
A cet agir juste correspond donc une parole juste, sur soi-même, mais aussi sur les autres. Celui qui dit la vérité dans son cœur, qui n’a pas commis de tromperie par sa langue, qui n’a pas fait de mal à son prochain v.26-27.
Mais Benoît sait que cet agir juste est un don de Dieu, une grâce. Que celui qui se glorifie, qu’il se glorifie dans le Seigneur v.31.
Agir juste, parole juste : si c’est ce que nous cherchons, cette option de vie nous aidera à traverser toutes les tempêtes, toutes les difficultés, toutes les nuits. Car seule peut traverser la tempête une maison bâtie sur le roc, le Christ. Toutes les autres maisons seront emportées par le torrent des passions, de la jalousie, de la colère, de l’envie, des désirs de la chair. Aujourd’hui, construisons notre maison sur le Roc.
(2011-11-25)
14. Et se cherchant un ouvrier dans la foule du peuple, à laquelle il lance cet appel, le Seigneur dit de nouveau :
15. « Quel est l'homme qui veut la vie et désire voir des jours heureux ? »
16. Si, en entendant cela, tu réponds : « C'est moi ! », Dieu te dit :
17. « Si tu veux avoir la vie véritable et perpétuelle, interdis le mal à ta langue et que tes lèvres ne prononcent point la tromperie. Évite le mal et fais le bien, cherche la paix et poursuis-la.
18. Et quand vous aurez fait cela, j'aurai les yeux sur vous et je prêterai l'oreille à vos prières, et avant que nous m'invoquiez, je dirai : me voici ! »
19. Quoi de plus doux que cette voix du Seigneur qui nous invite, frères bien aimés ?
20. Voici que, dans sa bonté, le Seigneur nous montre le chemin de la vie.
Quel est l’homme qui veut la vie, et désire voir des jours heureux ? Benoît donne à cette paraphrase des versets 13 à 16 du Psaume 33 la forme d’un dialogue. Dieu se cherche un ouvrier. Il appelle à la vie. A celui qui répond, il trace une ligne de conduite pour y parvenir.
L’appel vient de Dieu. C’est Dieu qui nous appelle. Nous ne pouvons crier vers Dieu, que parce que Lui-même nous appelle. C’est Lui qui, le premier, m’a aimé. Il m’a créé pour Lui.
Pour Benoît, la vie monastique est réponse à cet appel. Ce n’est pas nous qui avons choisi Dieu, c’est Dieu qui nous a créés, choisis, formés, rachetés. C’est Lui qui nous a appelés par notre nom, et qui attend chaque jour notre réponse.
Qui donc aime la vie, et désire le bonheur ? Ce désir du bonheur, tous les hommes le ressentent, en dehors même de toute relation à Dieu. Mais la réponse vient de Dieu. Il nous appelle à son bonheur, qui est sa propre vie. La vraie Vie, tel est le bonheur à la mesure du désir de l’homme. Notre vie monastique est heureuse dans la mesure où nous l’envisageons sous la forme d’une réponse à Dieu. Une réponse de tous les instants, à l’appel éternel de Dieu. Notre bonheur est dans la présence de l’Autre, cette relation avec Celui qui nous donne la vie.
Dans ces quelques lignes Benoît indique aussi un obstacle dans cette quête du bonheur. Il nous faut éviter tout ce qui nuit à la charité fraternelle. Mettre une garde à sa langue. Ne pas dire le mensonge. Notre recherche de Dieu, notre vie de bonheur ne peut s’épanouir que dans un climat de charité fraternelle.
Offrons à Dieu cette journée. Soyons heureux à son service. Michel Rondet dit ceci : Ne faites pas à Dieu l’offense d’être malheureux à son service . Notre bonheur rend gloire à Dieu. C’est sa gloire, de trouver des hommes qui mettent en Lui tout leur bonheur.
(2011-11-24)
8. Levons-nous donc enfin, puisque l'Écriture nous éveille en nous disant : « L'heure est venue de nous lever du sommeil »,
9. et les yeux ouverts à la lumière de Dieu, écoutons d'une oreille attentive ce que la voix divine nous remontre par ses appels quotidiens :
10. « Aujourd'hui, si vous entendez sa voix, n'endurcissez pas vos cœurs ;» ;;
11. et encore : « Qui a des oreilles pour entendre, qu'il entende ce que l'Esprit dit aux Églises. »
12. Et que dit-il ? « Venez, mes fils, écoutez-moi, je vous enseignerai la crainte du Seigneur.
13. Courez, pendant que vous avez la lumière de la vie, de peur que les ténèbres de la mort ne vous atteignent. »
Cinq fois le mot audire , écouter, revient dans ce petit passage du Prologue. Benoit décrit ici toute une pédagogie de l’écoute : ce n’est pas inutile de reprendre ce qu’il dit.
Ecoutons d’une oreille attentive la voix puissante de Dieu qui chaque jour nous presse . Une oreille attentive. L’écoute suppose une qualité d’attention. Pas seulement une attention occasionnelle. Car Dieu nous parle chaque jour. C’est nous qui ne savons pas l’entendre, qui sommes trop souvent inattentifs, distraits.
Aujourd’hui, si vous entendez sa voix, n’endurcissez pas vos cœurs . L’endurcissement du cœur est le grand obstacle à l’écoute. Le cœur endurci, habitué, obstiné, la nuque raide. L’habitude du péché qui finit par assoupir notre capacité d’aimer. L’humilité est le contraire de cet endurcissement du cœur.
Celui qui a des oreilles pour entendre, qu’il entende ce que l’Esprit dit aux Eglises . Il s’agit d’écouter le murmure de l’Esprit, cette brise légère qui souffle là où on ne l’attend pas. Mais cette brise, c’est dans l’Eglise qu’on peut l’entendre, ce que Benoît souligne en reprenant cette citation de l’Apocalypse. L’écoute se produit dans la communion fraternelle. Quand deux ou trois sont réunis au Nom du Christ .
Enfin Benoît précise que l’écoute engendre la crainte de Dieu. Venez mes fils, écoutez-moi, je vous enseignerai la crainte du Seigneur , Ps 33/12. Nous savons que cette crainte n’a rien à voir avec la peur. Elle signifie le respect, l’amour filial. La crainte de Dieu, c’est cette prise de conscience de sa grandeur. Dieu n’est jamais celui que j’imagine !
Dans ces versets, Benoît nous donne les règles fondamentales de toute écoute authentique : l’attention, l’humilité, la communion fraternelle, et le sens de l’altérité de l’autre.
(2011-11-23)
4. Avant tout, quand tu commences à faire quelque bien, demande-lui très instamment, dans la prière, de le conduire à sa perfection,
5. afin que lui qui a daigné nous mettre au nombre de ses fils, n'ait jamais à s'attrister de nos mauvaises actions.
6. En tout temps, en effet, il nous faut lui obéir au moyen des biens qu'il met en nous, de sorte que non seulement, père irrité, il ne vienne jamais à déshériter ses fils,
7. mais aussi que, maître redoutable, courroucé de nos méfaits, il ne nous livre pas au châtiment perpétuel, comme des serviteurs détestables qui n'auraient pas voulu le suivre jusqu'à la gloire.
Obéissance et désobéissance. Obéissance et volonté propre. Obéir ou agir en mauvais serviteur. Ces oppositions marquent l’alternative où nous sommes sans cesse placés. La désobéissance d’Adam. L’obéissance du Christ : Ce choix entre les deux chefs de l’humanité, nous avons à le vivre jour après jour, passer de la désobéissance du premier à l’obéissance de second.
Le premier verset de ce Prologue énumérait les quatre attitudes qui résument notre chemin spirituel. Ecouter. Prêter l’oreille. Accepter les conseils. Les suivre effectivement. C’est ce chemin spirituel qui va être développé tout au long de la Règle.
Mais les versets que nous avons entendus aujourd’hui nous rappellent aussi que nous devons demander l’aide de Dieu. Le moine ne fait pas ce retour à Dieu par ses seules forces. Dieu, viens à mon aide ! Nous répétons cette prière tout au long du jour. Car la tâche est immense, démesurée à nos forces d’homme. Le Christ n’est pas seulement le roi qui commande. Ni le guide qu’il faut tenter de suivre. Le Baptême a fait de nous des fils et des héritiers. Nous sommes destinés à partager sa gloire. Ce don et cette promesse de vie exigent de nous une action qui nous dépasse. Mais elles fondent en même temps la possibilité de tout obtenir. Par la prière.
La prière, car l’œuvre à entreprendre n’est pas une œuvre humaine, mais une œuvre divine. Il s’agit de nous mettre sous l’emprise de Dieu, de le laisser répandre en nous sa vie divine. Dans notre vie de chercheurs de Dieu, la prière a la première place. Il s’agit de nous y mettre. Chaque jour de nous y remettre. D’être prêts à tout sacrifier de ce qui nous empêche d’arriver à cette communion avec Dieu.
Dans ma vie, quels sont les temps que je dérobe à la prière ? Les moments que je pourrais redonner à Dieu ?
(2011-11-22)
2. Ainsi tu reviendras, par ton obéissance laborieuse, à celui dont tu t'étais éloigné par ta désobéissance paresseuse.
3. À toi donc, qui que tu sois, s'adresse à présent mon discours, à toi qui, abandonnant tes propres volontés pour servir le Seigneur Christ, le roi véritable, prends les armes très puissantes et glorieuses de l'obéissance.
Prends les armes très puissantes et glorieuses de l’obéissance .
Ces paroles de Benoît me font penser en souriant, au début de la Marseillaise, aux armes citoyens !! Le ton de la règle n’est pas si claironnant, ni si mobilisateur, mais l’appel est là, impératif : prends les armes . Il y a une urgence pour le Service du Christ, le vrai Roi. Envisager notre service du Christ comme un combat, comme une guerre avec des armes nous déplace toujours un peu.
Et quel est l’ennemi ?
Ici, pas d’ennemis extérieurs, ni même de mauvais esprits. Non l’ennemi est en nous, dans cette tendance qui nous écartèle et nous défigure : la désobéissance.
Désobéir, se boucher les oreilles ou s’enfermer sur soi et ses propres points de vue : voilà l’ennemi à combattre. Cette attitude ou cette inclination qui nous centre sur nous-mêmes est bien plus redoutable que les ennemis extérieurs. Car elle nous entraine sur des chemins d’isolement et de non-communion. La désobéissance nous berce d’illusions en nous faisant penser pouvoir trouver notre bonheur à faire notre volonté propre, c’est à dire à tout réduire à nous-mêmes. Bien triste et bien étroite perspective !
Contre cet ennemi, pas d’autres armes que celles de l’obéissance. Armes car l’obéissance est forte et capable de trancher les chaines qui nous aliènent. L’obéissance nous resitue dans la juste et profonde posture de notre condition humaine.
Nous sommes des êtres de relation appelés à la communion avec les autres et avec Dieu, à travers la parole et à travers l’écoute.
L’obéissance n’est pas une discipline qui nous régirait de l’extérieur. Non elle est cette attitude profonde où nous sommes vraiment nous-mêmes, des fils et des frères. Parce que la facilité, ou la négligence nous en fait perdre souvent la trace et le goût, parce que la désobéissance tend à nous centrer sur nous-mêmes, il nous faut alors prendre les armes très concrètes de l’obéissance monastiques, pour reconquérir en nous cette obéissance heureuse, celle qui nous rend vraiment libre.
(2011-11-19)
1. ÉCOUTE, ô mon fils, ces préceptes de ton maître et tends l'oreille de ton cœur. Cette instruction de ton père qui t'aime, reçois-la cordialement et mets-la en pratique effectivement.
Écoute … Tend l’oreille de ton cœur .
Nous retrouvons ce matin ces mots familiers, des mots qui parlent spontanément à notre être de moine. Et en même temps, ces mots nous interpellent de nouveau, car l’écoute vraie n’est jamais acquise, elle est de chaque instant. Elle est de chaque jour pour qui désire grandir sur la voie de l’amour. Car il ne s’agit pas de l’écoute uniquement physique, fruit d’un phénomène d’ondes vibratoires qui viennent frapper notre tympan. Il s’agit de tendre l’oreille de son cœur . La tendre comme on tend une peau de tambour afin que les coups donnés dessus produisent de beaux sons. Si la peau du tambour n’est pas tendue, les impacts des mains qui frappent ne produisent aucun son. Ainsi pour l’oreille de notre cœur, si elle n’est pas tendue, elle ne pourra pas vibrer aux impacts de tout genre et ne pourra informer notre cœur.
Que signifie dès lors avoir l’oreille tendue ? Certainement pas une oreille comprimée, ni raide, encore moins dure. Non tendre l’oreille, la préparer pour qu’effectivement elle puisse recueillir tous les sons possibles, toutes les paroles, mais aussi les mouvements plus intimes de l’Esprit Saint.
Il est toujours touchant de voir une personne mal entendant tendre son oreille, en mettant même la main derrière, pour bien saisir ce que l’on est en train de dire. Tendre l’oreille de son cœur a à voir avec cette belle attitude de disponibilité profonde et d’ouverture pour ne rien laisser échapper de la Parole divine et de la parole fraternelle.
Un cœur qui ne veut rien laisser échapper de la parole de l’autre, voilà un cœur dont l’oreille est toute tendue, ouverte, vivre ainsi n’est pas spontanée. Cela nous demande un vrai travail pour laisser tous nos verrous et nos barrières.
Tendre l’oreille, c’est renoncer à être sûr d’avoir toujours raison, cela c’est l’oreille dure. C’est renoncer à ne vouloir entendre que ce qui m’intéresse. Cela c’est l’oreille molle.
La vie quotidienne sait se charger de nous montrer combien tendre l’oreille de notre cœur est du labeur de chaque instant. A la manière de ces instruments qu’il faut toujours accorder.
Nous pouvons faire nôtre la prière de Salomon : Donne à ton serviteur un cœur attentif (1 R 3.9), un cœur qui écoute.
(2011-11-18)
8. Toi donc, qui que tu sois, qui te hâtes vers la patrie céleste, accomplis avec l'aide du Christ cette toute petite règle pour débutants que nous avons fini d'écrire ;;
9. et alors seulement tu parviendras, grâce à la protection de Dieu, à ces sommets plus élevés de doctrine et de vertus que nous venons de mentionner. Amen.
Toi qui que tu sois, qui te hâtes vers la patrie céleste
. De cette adresse, nous pourrons retenir deux choses.
La première est qu’elle interpelle chacun de nous qui que tu sois .
Chacun de nous qui sommes là au monastère pour suivre le Christ, qu’il soit doué ou non, fort ou faible, jeune ou vieux, malade ou bien portant. Chacun avec ce qu’il est, est engagé à se hâter et à ne pas trainer le pas. Le qui que tu sois peut être entendu encore comme une exhortation à ne pas trop vite se mettre sur le bord de la route sous prétexte de ceci ou de cela. La règle s’adresse à chacun, dans tous nos états. Même malade ou fatigué ou en difficulté, il s’agit de ne pas perdre le cap, de tenir bon sa boussole, même si le pas ralentit ou s’adapte. Car le chemin à parcourir est d’abord un chemin du cœur et du désir.
Le second point que je retiens est le but vers lequel nous oriente Benoît : la patrie céleste. En ce jour, où nous faisons mémoire de tous nos frères défunts, ce but nous apparait plus clairement. Toute notre vie sur terre est traversée par un appel et un amour, celui du Christ qui nous réjouit. Et elle voudrait être toute entière une réponse aimante dans l’attente de cette communion dans la lumière et dans l’amour du Père et du Fils dans l’Esprit Saint. C’est là notre espérance, la patrie céleste, ce lieu où nous serons pleinement nous-mêmes, car renouvelés et transfigurés par l’amour du Christ mort et ressuscité pour nous.
Bien sûr, nous balbutions en parlant ainsi. Benoît ne veut pas cependant que l’on se berce de rêves. Pour moi la hâte vers la patrie céleste est aussi hâte vers la perfection de la vie religieuse qu’il mentionne au début de ce chapitre.
C’est en soignant du mieux que l’on peut notre vie présente, la qualité de notre vie monastique, que nous nous hâtons sans illusion vers la patrie céleste.
En accomplissant, avec tout notre cœur, cette petite règle pour débutant, en implorant l’aide du Christ et la protection de Dieu, nous parviendrons !
(2011-11-17)
1. Si d’ailleurs nous avons écrit cette règle, c'est pour qu'en l'observant dans les monastères, nous fassions preuve au moins d'une certaine décence morale et d'un commencement de vie religieuse.
2. Mais pour celui qui se hâte vers la perfection de la vie religieuse, il est des enseignements des saints Pères dont l'observation conduit l'homme jusqu'aux cimes de la perfection.
3. Quelle est en effet la page, quelle est la parole ayant Dieu pour auteur, dans l'Ancien et le Nouveau Testament, qui ne soit une norme parfaitement droite pour la vie humaine ;?
4. Quel est le livre des saints Pères catholiques qui ne nous fasse entendre comment courir tout droit jusqu'à ce que nous parvenions à notre créateur ;?
5. Et encore les Conférences des Pères et leurs Institutions et leurs Vies , ainsi que la Règle de notre saint Père Basile,
6. que sont-elles d'autre que les instruments des vertus donnés par les moines de bonne conduite et obéissants ;?
7. Mais pour nous qui sommes paresseux, de mauvaise conduite et négligents, il y a de quoi rougir de confusion.
Chapitre 73, v 1-7
Cette fin de règle est touchante par son ton modeste. Benoit s’efface derrière d’autres enseignements, et surtout d’abord derrière l’autorité divine qu’il reconnait dans les Écritures. Il voit la différence entre la règle qu’il a écrite « pour faire preuve d’une certaine décence morale et d’un commencement de vie religieuse » et les autres enseignements. Ceux-ci sont présentés comme pouvant permettre assurément d’atteindre le but recherché : parvenir à notre Créateur, et mener une vie vraiment humaine. Un mot revient deux fois ; c’est l’adjectif « rectus - droit ». Tout se passe comme si aux yeux de Benoit, les Écritures offraient la norme vraiment sûre et directe. La norme droite par laquelle la vie humaine va pouvoir être vécue dans toute sa justesse et sa noblesse. Car dans ces Écritures, chacun peut entendre la parole qui a Dieu pour auteur. De même les Saints Pères catholiques vont permettre de « courir tout droit » pour parvenir à notre Créateur. Pouvoir mener une vie droite et pouvoir courir tout droit vers le Créateur, telles sont les vertus que Benoit reconnait et trouve dans les Écritures et les écrits des Pères. Par là, il indique deux tuteurs solides et sûrs entre lesquelles la vie du moine pourra s’élancer et s’épanouir sans se perdre ou s’enliser. Ils offrent une garantie à toute épreuve.
Que retenir pour nous aujourd’hui ? Qu’il y a une heureuse et féconde interaction entre la Rège de Benoit, les Écritures et les écrits des Père monastiques. Tous nous instruisent en s’éclairant mutuellement. Les Écritures se présentent comme la source de toute rencontre avec Dieu, par le Christ. Elles inspirent la Règle et les Écrits monastiques. Elles demeurent aussi pour chacun de nous dans la lectio et la liturgie le terreau quotidien dans lequel nous puisons, pour nourrir notre relation avec Dieu. Les écrits des Pères nous livrent des témoignages précieux sur la manière d’avancer à la suite du Christ dans la vie monastique. Ils nous redisent le but cherché : nous unir au Christ dans la prière. Mais aussi les écueils à éviter et les lieux de vigilance intérieure à avoir. La Règle de Benoit offre un cadre de vie cénobitique plein d’équilibre et de sagesse.
Sachons prendre appui sur ces trois tuteurs, Écritures, Règle et Pères, pour avancer droit et tout droit !! (2011-11-16)
1. S'il existe un zèle mauvais et amer qui sépare de Dieu et conduit en enfer,
2. il existe aussi un bon zèle qui sépare des vices et conduit à Dieu et à la vie éternelle.
3. Tel est donc le zèle que les moines pratiqueront avec un ardent amour ;:
4. ils « se préviendront d'honneurs mutuels » ;
5. ils supporteront sans aucune impatience leurs infirmités corporelles et morales ;;
6. ils s'obéiront à l'envi ;
7. personne ne recherchera ce qu'il juge être son avantage, mais plutôt celui d'autrui ;;
8. ils pratiqueront la charité fraternelle avec désintéressement ;;
9. avec amour ils craindront Dieu ;
10. ils affectionneront leur abbé d'une charité sincère et humble ;;
11. « ils ne préféreront absolument rien au Christ. ;»
12. Que celui-ci nous fasse parvenir tous ensemble à la vie éternelle ;!
Le zèle, c’est l’ardeur, la ferveur. Au chapitre 4, Benoit avait parlé du zèle mauvais, la jalousie. Arrivé à la fin de cette Règle, il veut réveiller notre ferveur, notre « amour fervent ». Pour nos frères, et pour le Christ.
Ce chapitre dit tout ce que nous voulons être. C’est dit avec tant de naturel et de simplicité qu’on pourrait presque n’y voir qu’une énumération d’évidences. Mais on peut comparer ce chapitre aux Béatitudes. Il nous arrive aussi de les entendre de cette façon-là, sans réaction, comme si nous les fréquentions au quotidien, comme si nous en vivions ! Comme si notre vie n’avait que ce langage-là pour se déchiffrer. D’ailleurs il y a autant de notes du bon zèle qu’il y a de Béatitudes, huit.
Pourtant, dans chacune de ces phrases nous trouvons un appel adressé par le Christ à chacun d’entre nous. Il veut habiter notre cœur. Redonnons-Lui notre vie, avec tout ce qu’elle comporte de richesses, de désirs, mais aussi de pauvreté et de misères. En nous redonnant au Christ, nous resserrons les liens qui nous unissent et font la communauté.
Concrètement, c’est l’attention aux autres, la patience entre nous, l’obéissance mutuelle, l’oubli de soi, la crainte d’amour pour Dieu. L’amour de notre Abbé. Cela implique de vérifier nos intentions, sous le regard du Christ. « Ne préférer absolument rien au Christ ». Il nous attend. Notre travail monastique est notre façon de servir Dieu et l’Eglise.
« Revenir à l’école de St Benoit, ce maître à qui nous avons prêté quelque chose de notre oreille intérieure, pour qu’il nous éduque à la vie de charité. » C’est ce que disait Christian de Chergé, dans son dernier commentaire de la Règle, le commentaire de ce chapitre 72, le 16 mars 1996. (2011-11-12)
6. De plus, si un frère reçoit une réprimande quelconque de l'abbé ou de n'importe lequel de ses anciens pour quelque raison que ce soit, si mince qu'elle puisse être,
7. et s'il sent que l'esprit de n'importe quel ancien est légèrement irrité contre lui ou ému si peu que ce soit,
8. aussitôt et sans délai il se prosternera à terre et fera satisfaction, étendu à ses pieds, jusqu'à ce qu'une bénédiction vienne calmer cette émotion.
9. Celui qui refuse de faire cela, on lui infligera un châtiment corporel, ou bien, s'il est obstiné, on le chassera du monastère.
Cette seconde partie du chapitre est un peu inattendue, car elle n’a pas été annoncée par le titre. Il y est question de la façon de recevoir les remarques, les reproches.
Ce que Benoit indique ici se rattache avec évidence, non seulement à cette charte des relations fraternelles, que sont les derniers chapitres de la Règle, mais encore aux deux chapitres précédents. Comme ceux-ci, ces lignes traitent de correction. Mais au lieu de l’excommunication et des coups mentionnés au chapitre précédent, il s’agit maintenant de simples réprimandes verbales. Après avoir refusé aux anciens le droit de punir, sauf mandat spécial, Benoit nous dit comment doit réagir celui qui est repris.
Car ce discours ne s’adresse pas aux anciens, mais aux plus jeunes. La Règle les invite à recevoir humblement toute réprimande de leurs aînés. En agissant ainsi, ils imiteront l’humilité des Pères du Désert que beaucoup d’Apophtegmes nous donnent en exemple. L’humilité est désarmante. Elle calme toutes les émotions de la colère.
Benoit met en scène un frère qui s’aperçoit qu’il a contristé un ancien. Aussitôt, il se jette à ses pieds pour obtenir une bénédiction. Certains d’entre nous ont gardé cet usage, quand ils perçoivent de la contrariété chez celui qui leur adresse la parole. Il m’est arrivé qu’un frère tombe à genoux parce que je m’étais emporté : le plus grand des deux était à genoux !
Pour Benoit, la voie de l’obéissance passe par ce grand respect de l’autre. C’est un chemin d’oubli de soi. L’obéissance n’est donc pas une conformité un peu raide à des ordres reçus d’une hiérarchie. Elle est plutôt une attention à ce qui n’est pas moi. Y compris aux émotions que je peux ressentir chez celui qui m’adresse la parole.
La vie de l’obéissance est donc bien un chemin d’amour. (2011-11-11)