Pour offrir les meilleures expériences, nous utilisons des technologies telles que les cookies pour stocker et/ou accéder aux informations des appareils. Le fait de consentir à ces technologies nous permettra de traiter des données telles que le comportement de navigation ou les ID uniques sur ce site. Le fait de ne pas consentir ou de retirer son consentement peut avoir un effet négatif sur certaines caractéristiques et fonctions.
Le stockage ou l’accès technique est strictement nécessaire dans la finalité d’intérêt légitime de permettre l’utilisation d’un service spécifique explicitement demandé par l’abonné ou l’utilisateur, ou dans le seul but d’effectuer la transmission d’une communication sur un réseau de communications électroniques.
Le stockage ou l’accès technique est nécessaire dans la finalité d’intérêt légitime de stocker des préférences qui ne sont pas demandées par l’abonné ou l’utilisateur.
Le stockage ou l’accès technique qui est utilisé exclusivement à des fins statistiques.
Le stockage ou l’accès technique qui est utilisé exclusivement dans des finalités statistiques anonymes. En l’absence d’une assignation à comparaître, d’une conformité volontaire de la part de votre fournisseur d’accès à internet ou d’enregistrements supplémentaires provenant d’une tierce partie, les informations stockées ou extraites à cette seule fin ne peuvent généralement pas être utilisées pour vous identifier.
Le stockage ou l’accès technique est nécessaire pour créer des profils d’utilisateurs afin d’envoyer des publicités, ou pour suivre l’utilisateur sur un site web ou sur plusieurs sites web ayant des finalités marketing similaires.
34. Ne pas être orgueilleux,
35. ni adonné au vin,
36. ni grand mangeur,
37. ni ami du sommeil,
38. ni paresseux,
39. ni murmurateur,
40. ni médisant.
Voici 7 instruments que la part intelligente de nous-mêmes admet sans hésiter. C'est
une évidence qu'il ne faut pas « être orgueilleux, ni adonné au vin, ni grand mangeur, ni ami
du sommeil, ni paresseux, ni murmurateur, ni médisant ». Mais chacun découvre souvent une
autre part de lui-même qui montre son nez de temps en temps, et qui aura du mal sur tel ou tel
point à ne pas être orgueilleux, ni adonné au vin etc ... Rien alors n'est plus évident, et notre
pauvreté apparait alors comme une incapacité plus ou moins profonde à surmonter le défaut
ou le péché en question. Une part de nous-mêmes ne veut rien entendre.
Ces instruments peuvent être l'occasion d'accepter de regarder en face telle difficulté
que l'on rencontre comme une incapacité à nous maitriser sur tel ou tel point. Pouvoir le
regarder en face sans sombrer dans la culpabilité qui enferme sur le dépit sur soi, est déjà une
première étape salutaire. Pouvoir en parler, confier cette difficulté dans l'ouverture du cœur,
estune seconde étape salutaire. Elle permet de ne pas porter seul ce fardeau. En parler, c'est
aussi apprendre peu à peu à mieux se connaitre, et surtout à éviter le piège de l'auto
justification. «Je suis comme çà, c'est parce que ceci ou ceci ... et puis je ne changerai
jamais ... » Notre propos de conversion monastique porte en lui une belle espérance: celle de
devenir. Nous sommes appelés à devenir, non pas à rester dans nos ornières. Et devenir quoi?
Devenir peu à peu ce que nous sommes vraiment, des hommes debout et libres, des fils qui se
savent vraiment aimés de Dieu, avec et surtout pas sans leurs blessures ou leurs errances.
Accepter de devenir, c'est accepter de ne pas s'auto-justifier, pour ouvrir, sous la conduite de
la grâce de Dieu, des chemins de vie. La vie monastique est une voie où nous apprenons ~
nous unifier, avec tout ce que nous sommes, avec nos parts plus ténébreuses. C'est une grâce
offerte par la vie commune qui nous entraine vers plus de vérité, c'est aussi une exigence qui
vient nous stimuler et nous bousculer parfois. N'ayons pas peur, Dieu ne nous abandonne pas
dans ce chemin où nous devenons vraiment moine.
(2013-09-24)
20. Se rendre étranger aux actions du monde,
21. ne rien préférer à l'amour du Christ.
22. Ne pas accomplir l'acte qu'inspire la colère,
23. ne pas réserver un temps pour le courroux.
24. Ne pas entretenir la tromperie dans son cœur,
25. ne pas donner une paix mensongère,
26. ne pas se départir de la charité.
27. Ne pas jurer, de peur de se parjurer,
28. émettre la vérité de son cœur et de sa bouche.
« Se rendre étrangers aux actions du monde» et « ne rien préférer à l'amour du
Christ », ces deux instruments peuvent éclairer la dynamique profonde des instruments
suivants qui sont comme une énumération des actions du monde: accomplir l'acte qu'inspire
la colère, réserver un temps pour le courroux, entretenir la tromperie dans son cœur, donner
une paix mensongère, se départir de la charité, jurer ... Le disciple du Christ qui ne veut rien
préférer à son amour, ajoute à chacune de ses actions un « ne pas»: ne pas accomplir l'acte
qu'inspire la colère, ne pas entretenir la tromperie dans son cœur ... etc ... Le disciple du
Christ qui vit dans le monde exprime son amour pour le Christ en disant « non» à tout ce qui
lui est tellement étranger: la colère, la tromperie, le mensonge, la fausse paix ... Le disciple
du Christ au contraire cherchera à « émettre la vérité de son cœur et de sa bouche ». Le
« oui» pour le Christ implique un « non» pour les actions mondaines qui obéissent, non à la
dynamique de l'amour, mais à la recherche de l'intérêt immédiat pour soi-même. L'amour
pour le Christ nous entraine à demeurer plus ouverts aux autres, plus disponibles à ce qu'ils
sont, et même plus vulnérables. N'ayons pas peur de cela. N'ayons pas peur de perdre la face
parfois devant la colère, la tromperie ou le mensonge. Si cela nous blesse dans un premier
temps, profondément nous ne sommes pas atteints, car nous avons choisi de vivre dans la
vérité du Christ. C'est elle qui est notre rempart et notre lumière. Par contre, exerçons-nous à
toujours chercher, à toujours faire et à toujours dire la vérité, par amour du Christ. Il est le
Chemin, la Vérité et la Vie. Voilà une belle et forte exigence pour nous-même qui nous oblige
à demeurer toujours en alerte, pour ne pas prendre des chemins de tromperie ou de mensonge.
« La vérité vous rendra libre», nous dit Paul. Laissons le Saint Esprit nous conduire vers plus
de vérité et plus de liberté. Laissons-nous fortifier par lui devant les tentations de faire des
demi-mesures, ou de ne pas aller au bout des exigences que nous avons choisies de vivre. La
vérité nous apprend à vivre libre et entier dans le don de nous-mêmes.
(2013-09-17)
10. Se renoncer à soi-même pour suivre le Christ.
11. Châtier le corps,
12. ne pas rechercher les plaisirs,
13. aimer le jeûne.
14. Restaurer les pauvres,
15. vêtir les gens sans habits,
16. visiter les malades,
17. ensevelir les morts,
18. secourir ceux qui sont dans l'épreuve,
19. consoler les affligés.
Je propose de lire ensemble cet ensemble de onze instruments comme un éclairage du
premier: « se renoncer à soi-même pour suivre le Christ », ce précepte qui n'est jamais facile
à bien cerner.
Ainsi, « châtier le corps, ne pas rechercher les plaisirs, aimer le jeûne », peuvent
s'entendre comme une manière de vivre le renoncement dans la relation au corps et à la
sensibilité. St Benoit reprend à son compte cet enseignement des anciens moines qui voyaient
dans une forte discipline corporelle, un moyen d'ordonner tout son désir pour le Christ.
Aujourd'hui, nous sommes plus circonspects par rapport à une vision ascétique trop
volontariste. Mais dans le contexte hédoniste de notre société, avec les impasses que l'on
connait, ces instruments nous rappellent à un certain réalisme. Notre suite du Christ porte en
elle une exigence qui s'inscrit jusque dans notre vie corporelle. Notre corps est fait pour le
Christ, dira Paul, non pour lui-même et la seule jouissance de lui-même par lui-même. En ce
jour de la Croix Glorieuse, le début du jeûne monastique, si modeste soit-il, est un signe qui
inscrit dans notre corps, notre désir de suivre le Christ jusqu'à sa Pâque.
« Restaurer les pauvres, vêtir les gens sans habits, visiter les malades, ensevelir les
morts, secourir ceux qui sont dans l'épreuve, et consoler les affligés » ... sont une autre
manière de renoncer à nous-mêmes pour suivre le Christ. Il s'agit ici de renoncer à sa
tranquillité, à son confort, à son temps pour se donner aux autres. En nous tournant vers eux,
nous suivons le Christ qui n'a cessé d'aller au-devant des plus démunis. En nous tournant vers
eux, nous nous tournons vers le Christ. En eux, nous reconnaissons et servons notre Maître.
Si les premiers instruments nous invitaient à ne pas prendre notre corps comme une
idole, les seconds nous engagent à prendre soin du corps et de la vie blessés de nos frères,
comme s'il était le nôtre propre. Mystère du don de soi qui permet de s'aimer vraiment soi-
même quand on aime les autres. (2013-09-14)
3. Ensuite « ne pas tuer,
4. ne pas commettre d'adultère,
5. ne pas voler,
6. ne pas convoiter,
7. ne pas porter faux témoignage. »
8. Honorer tous les hommes,
9. et « ne pas faire à autrui ce qu'on ne veut pas qu'on nous fasse ;».
Comment réentendre ces instruments de la Règle calqués sur le décalogue et
réinterprétés par St Benoit? Nous pouvons choisir de ne pas les entendre en les considérants
comme bien connus, et donc on passe. Nous pouvons choisir de prêter l'oreille du cœur en
acceptant qu'ils aient toujours quelque chose à nous dire. C'est l'attitude de celui qui s'estime
toujours en chemin, pauvre pécheur parmi les pécheurs, jamais assuré de ne pas tomber.
Il y a une fausse connaissance qui risque toujours de nous endormir ... On sait déjà ce
que dit la Bible. On connait par cœur bien des passages de l'Ecriture. Les accueillir comme
adressé à nous aujourd'hui, c'est dans le même temps et confesser notre faiblesse, et confesser
notre confiance en Dieu qui nous sauve. Le Seigneur sait de quelle pâte nous sommes faits. Et
~a Parole ne cesse de venir nous tirer de notre propension à nous débrouiller seul. Ici elle nous
tient en éveil, contre des périls qu'aucun d'entre nous n'est complètement assuré de dominer
une fois pour toute. Ne pas tuer, ne pas commettre l'adultère, ne pas voler, ne pas convoiter,
ne pas faire de faux témoignage ... Nous avons besoin de ces « ne pas» qui sont comme des
barrières offertes à notre conscience et à notre liberté toujours en quête de son chemin. Peut-
être n'en ai-je pas vraiment compris l'importance ou l'utilité jusqu'à maintenant, mais des
circonstances plus dures peuvent d'un seul coup en révéler la pertinence ... « Vous n'avez pas
encore lutté jusqu'au sang dans votre lutte contre le péché », nous dit l'auteur de l'épitre aux
Hébreux, en fixant les yeux sur Jésus qui a enduré la croix pour nous (He 12,4). Le mystère
du mal qui défigure et du péché qui détourne de la vie nous traverse. Jésus seul l'a
complètement démasqué. S'il a supporté d'être défiguré par le péché, il ne lui a laissé avoir
aucune prisé sur sa personne. En accueillant ces instruments, nous nous souvenons qu'il n'est
pas en notre pouvoir d'échapper à la tromperie du péché. S'ils peuvent nous alerter et nous
tenir en éveil, seul la croix et la résurrection de Jésus nous délivre.
En ce vendredi, que la mémoire de sa passion soit notre force et notre assurance dans
les combats que nous avons à mener. Jésus est le vainqueur du mal et des forces de ténèbres.
(2013-09-13)
2. ensuite « son prochain comme soi-même ».
Nous pouvons nous attacher à trouver la saveur évangélique de chacun
de ces instruments. Ce chapitre est un résumé de tout l'Evangile. Il veut
nous aider à entrer dans un comportement de vie.
«Avant tout aimer ». Qu'est-ce qu'aimer? Ces instruments de l'Art
Spirituel vont nous aider, l'un après l'autre, à entrer dans ce long
chemin. Aimer, c'est notre vocation. La vocation de tout chrétien. De
tout homme. Personne ne peut s'en dispenser, s'il cherche le bonheur.
Tous les événements de notre vie sont autant d'appels, d'invitations de
Dieu. Il ne nous a créés que pour cela. « Ne rien préférer à l'amour du
Christ }). Mais, nous le savons, la charité fraternelle est le test de la
vérité de notre amour pour le Christ.
Le prochain, le frère, tient une grande place dans cette liste
d'instruments. Comme le Bon Samaritain, nous sommes invités à nous
rendre proches de toute personne, à répondre à son besoin du
moment. La communauté, ses hôtes, tous ceux que nous rencontrons,
sont là pour rendre présent à chaque instant ces personnes qui ont
besoin d'un prochain et d'être aidées. Si nous sommes fidèles à leur
invitation silencieuse, nous apprendrons à ouvrir notre cœur à la
souffrance et à la joie de tous.
Que vraiment notre vie soit centrée tout entière sur ce désir d'aimer
Dieu, notre Père, et tous nos frères. Est-ce ce que nous cherchons?
Notre cœur ne se laisse-t-il pas encombrer par des misères, des
bricoles? N'est-il pas obsédé par des riens? Ouvrons notre cœur à la
Présence de Dieu. A la sainteté qui nous est proposée. A tous les
hommes sans aucune exception consentie. Combattons avec courage,
car le Seigneur est avec nous. (2013-09-12)
l
1. En premier lieu, « aimer le Seigneur Dieu de tout son cœur, de toute son âme, de toutes ses forces » ;
Pour St Benoit le monastère est un atelier. Dans ce chapitre, il énumère
les outils que le moine doit employer pour se convertir. Les instruments
de l'art spirituel. 74 instruments, toute une panoplie d'outils. Le moine
doit apprendre à les reconnaitre et à les manier, pour devenir artisan
de sa vie monastique. Pour construire la maison de Dieu. Ces outils, il
ne suffit pas de les connaitre, de les classer, il faut les utiliser. Péguy
disait: « Attendre les bienfaits de Dieu, sans se mettre soi-même à
l'ouvrage, c'est être mal élevé! »
Pour Benoit, il y a deux sortes de moines: ceux qui essaient de l'être, et
ceux qui prétendent l'être. A travers les différences; qui tiennent à la
culture, au tempérament, à l'âge, à quoi va-t-on reconnaitre un moine?
Cette question est importante. Non pas pour juger les autres. Mais
d'abord pour nous-mêmes. Cette vie me conduit-elle vers Dieu, ou
m'éloigne-t-elle de Lui? Pour Benoit, la vie monastique est un travail.
Ce travail du moine n'est pas l'aspect dont on parle le plus aujourd'hui.
Le moine se définit plus volontiers comme chercheur de Dieu. C'est
aussi son travail. Mais notre expérience rejoint ce que dit Benoit: Le
combat est là, jour après jour. La paix du moine n'est pas une paix
facile! Elle est une victoire sans cesse remise en cause. Victoire sur tout
ce monde de pensées obscures, de tentations, de désirs inavoués. Le
premier travail du moine, c'est de prendre conscience, peu à peu, de la
présence de cet adversaire dans son propre cœur. Ce combat ne
diminue pas avec le temps; mais il s'éclaire: nous repérons mieux nos
faiblesses. Surtout, ce combat est nécessaire: C'est grâce à lui que nous
nous accrochons au Christ. Car Il est notre bouclier. Il nous aime. Dans
ce chapitre, Benoit nous indique quelles armes utiliser.
Le premier de ces outils, c'est la pièce maîtresse de l'atelier. « Avant
,
tout, aimer le Seigneur de tout son cœur, de toute son âme, de toute sa
force ». « Avant tout» : Il s'agit d'antériorité dans le temps, mais aussi
de dépendance dans l'importance. Rien de tout le reste ne sera possible
sans cela. « Avant tout» : Benoit avait déjà employé cette expression
dans le Prologue: « Avant tout, demande à Dieu, par une très instante
prière qu'il mène à bonne fin tout le bien que tu entreprendras. » Avant
tout bien, avant tout autre bonne œuvre, il y a la prière. Il y a l'amour.
La prière qui demande le don de l'amour. (2013-09-11)
7. Tous suivront donc en tout la règle comme leur maîtresse, et nul n'aura la témérité de s'en écarter.
8. Personne au monastère ne suivra la volonté de son propre cœur,
9. et nul ne se permettra de contester avec son abbé insolemment ou en dehors du monastère.
10. Si quelqu'un se le permet, il subira les sanctions de règle.
11. De son côté, cependant, l'abbé fera tout dans la crainte de Dieu et le respect de la règle, sachant qu'il devra sans aucun doute rendre compte de tous ses jugements au juge souverainement équitable qu'est Dieu.
12. S'il est question de choses moins importantes pour le bien du monastère, il aura recours seulement au conseil des anciens,
« Tous suivront donc en tout la Règle ». « De son côté l'Abbé fera tout
dans la crainte de Dieu, et le respect de la Règle ».
L'intérêt de ce chapitre est grand. St Benoit nous a déjà dit que les
cénobites vivent sous une Règle et un Abbé. Maintenant nous assistons
à l'interaction de ces trois termes. L'Abbé consulte la communauté. La
communauté obéit à l'Abbé. L'un comme l'autre se soumet à la Règle.
L'Abbé n'est pas seulement le Pasteur, le guide spirituel, décrit au
chapitre précédent. Il est aussi le responsable d'un groupe d'hommes
qui cherche à se mettre à l'écoute de la Parole de Dieu. Dans la
première fonction, il a pour norme l'Ecriture. Dans la seconde, il a pour
guide la Règle. En lui, autorité spirituelle et temporelle se conjuguent. Il
n'y a pas au monastère deux pouvoirs, mais un seul. Le monastère
requiert cette fusion des deux ordres: c'est grâce à elle que la Parole de
Dieu peut informer l'existence entière des frères de la communauté. Le
monastère n'est pas une démocratie, mais il ne fonctionne pas sans
consultation. Tous ensembles cherchent ce que Dieu leur demande, ce
qu'il attend d'eux. Sous l'autorité de la Règle, la loi la plus importante
est d'éviter toutes divisions.
La Règle est donc le propos qui nous est commun à tous de chercher
Dieu, dans une existence monastique, organisée en fonction de notre
désir spirituel. Il y a pour nous un but commun. Une volonté commune.
Et nous reconnaissons dans la Règle l'expression de ce désir. Ce texte a
besoin de notre adhésion pour être utile.
Il y a des adaptations nécessaires. Des impératifs de la vie qui jaillissent
à chaque instant, pour lesquels la Règle ne donne pas de solution. Car
,
elle est liée à une autre culture. Mais nous avons besoin de sentir cette
unanimité, ce désir communautaire de faire de la Règle notre guide. Ce
désir d'être fidèles ensembles à l'Esprit qui l'habite. (2013-09-10)
1. Chaque fois qu'il sera question au monastère de quelque chose d'important, l'abbé convoquera toute la communauté et dira lui-même de quoi il est question.
2. Une fois entendu le conseil des frères, il en délibérera à part soi et fera ce qu'il juge le meilleur.
3. Or si nous avons dit que tous seraient appelés au conseil, c'est que souvent le Seigneur révèle à un inférieur ce qui vaut le mieux.
4. Or donc les frères donneront leur avis en toute soumission et humilité, et ils ne se permettront pas de défendre leur opinion effrontément,
5. mais la décision dépendra de l'abbé : celle qu'il juge être plus opportune, tous y obéiront.
6. Toutefois, s'il sied aux disciples d'obéir au maître, il convient que celui-ci dispose toute chose avec prévoyance et justice.
La Règle du Maître ne comportait pas de chapitre sur l'appel des frères
en conseil. Seulement quelques lignes à la fin du chapitre sur l'Abbé:
Pour le temporel, il devait s'entourer du conseil des frères. Benoit fait
de cet appendice un chapitre distinct. F. Adalbert disait ceci: « En
matière spirituelle, St Benoit se contente de reproduire le Maître, avec
quelques modifications. Mais quand il s'agit de choses pratiques, il
prend la peine de rédiger personnellement. »
La bonne décision est celle que Dieu révèle. Il ne s'agit pas de compter
les voix, mais de chercher la volonté de Dieu. La clé de cette quête,
c'est le mot que Benoit utilise au sujet des jeunes frères: « Le Seigneur
révèle souvent à un plus jeune ce qui est préférable ». Pour la Tradition
Monastique, qui nourrit St Benoit, l'une des conséquences du péché,
c'est le voile posé sur la réalité, sur les Ecritures, sur le cœur de
l'homme même. Pour les Pères, la découverte de la Vérité, du Bien, du
Beau, est un processus de dévoilement. Les yeux s'ouvrent à une réalité
déjà présente, mais voilée. Dieu nous révèle sa Volonté comme un voile
se déchire. Comme le voile du Temple au moment de la mort du Christ.
Pour Benoit, il ne s'agit pas de compter les voix, mais de l'attitude
profonde de ceux à qui l'Abbé demande conseil. C'est pourquoi il lie le
conseil donné, son poids, sa valeur, à l'obéissance du frère.
L'obéissance, l'écoute profonde. Elle s'oppose à la défense de son avis,
de son opinion, de sa volonté. L'obéissance, cette ouverture du cœur,
permet ce dévoilement de la volonté de Dieu.
« Donner son avis en toute humilité et soumission ». C'est difficile.
Quand on croit voire ce qui est la bonne solution, on veut que tous s'y
rallient. Nous cherchons ce que Dieu veut. C'est une démarche de Foi.
)
Ce n'est pas toujours ce qui me semble le plus raisonnable, ou le plus
génial. Tous ensembles, nous acceptons de nous laisser transformer par
ce qu'expriment les autres. Nous sommes surtout renvoyés à l'attitude
du Christ par rapport à son Père. Il est le messager joyeux du Oui au
Père. Pas de vie chrétienne sans appel à le suivre sur cette voie-là. (2013-09-07)
37. Et qu'il sache que, quand on se charge de diriger les âmes, on doit se préparer à en rendre compte.
38. Et autant il sait avoir de frères confiés à ses soins, qu'il soit bien certain qu'il devra rendre compte au Seigneur de toutes ces âmes au jour du jugement, sans parler de sa propre âme, bien entendu.
39. Et ainsi, craignant sans cesse l'examen que le pasteur subira un jour au sujet des brebis qui lui sont confiées, en prenant garde aux comptes d'autrui, il se rend attentif aux siens,
40. et en procurant aux autres la correction par ses avertissements, lui-même se corrige de ses vices.
« Ils veillent, dans la perspective du compte qu'ils auront à rendre pour
les âmes ». C'est ce que l'Epitre aux Hébreux disait des responsables de
l'Eglise. Ce compte que le supérieur devra rendre au Jugement, on le
retrouve dans toute la tradition monastique: dans la Règle d'Augustin,
dans le Testament d'Orsise, dans la Règle du Maître. Chez Benoit, il y a
ce précieux corollaire: responsable des brebis, le Pasteur profite
personnellement des efforts qu'il fait pour les améliorer.
Pour commenter ce chapitre, le P. Christian de Chergé citait 1 Co 3/12 :
« Que l'on bâtisse sur ce fondement, le Christ, avec de l'or, de l'argent,
des pierres précieuses, du bois, du foin ou de la paille, l'œuvre de
chacun sera mise en évidence. Le Jour du Jugement la fera connaitre,
car il se manifeste par le feu, et le feu prouvera ce que vaut l'œuvre de
chacun. Celui dont la construction subsistera recevra un salaire; celui
dont l'œuvre sera consumée en sera privé. » Si on lit Benoit à la lumière
d-e cet enseignement de Paul, on peut comprendre que l'Abbé ne
construit pas sa propre maison. Il est l'architecte de la communion:
C'est-à-dire que tous les matériaux engagés par chacun vont se
retrouver dans la construction du pasteur. Celui-ci a mis de l'or: le
pasteur n'y est pour rien, mais il en bénéficiera pour l'édifice commun.
Celui-là a mis du foin ou de la paille: Cela va se voir dans l'édifice
commun. On va l'imputer à la faute du chef de chantier. Mais en fait,
notre cœur est si mélangé que nous apportons tous, à la fois, de l'or et
de la paille. Comment discerner ce qui est l'or, ou la paille? Dieu seul
est juge. C'est l'amour qui rend chacun de nos actes utiles pour la
construction de cette maison de Dieu que veut être le monastère. Pour
construire l'Eglise de Dieu.
« Se corriger des vices ». Ces derniers mots du chapitre sont notre plus
belle espérance à tous. Benoit disait de l'ermite qu'il était en lutte
contre « les vices de la chair et des pensées» 1/5. La vie monastique,
solitaire ou communautaire, n'est rien d'autre qu'un combat pour la
purification du cœur. Pour ouvrir celui-ci tout entier à Dieu.
(2013-09-05)
30. L'abbé doit toujours se rappeler ce qu'il est, se rappeler le titre qu'on lui donne, et savoir que « plus on commet à la garde de quelqu'un, plus on lui réclame ».
31. Et qu'il sache combien difficile et ardue est la chose dont il s'est chargé, de diriger les âmes et de se mettre au service de caractères multiples : l'un par la gentillesse, un autre par la réprimande, un autre par la persuasion... ;
32. et selon la nature et l’intelligence d’un chacun, il se conformera et s’adaptera à tous, de façon non seulement à ne pas subir de perte dans le troupeau commis à sa garde, mais aussi à se féliciter de l’accroissement d’un bon troupeau.
33. Avant tout, qu'il ne laisse point de côté ni ne compte pour peu de chose le salut des âmes commises à sa garde, en prenant plus de soin des choses passagères, terrestres et temporaires,
34. mais qu'il songe sans cesse qu'il est chargé de diriger des âmes, dont il devra aussi rendre compte.
35. Et pour ne pas se plaindre d'un éventuel manque de ressources, qu'il se souvienne qu'il est écrit : « Cherchez d'abord le royaume de Dieu et sa justice, et tout cela vous sera donné par surcroît » ;
36. et encore : « Rien ne manque à ceux qui le craignent. »
« Diriger les âmes ». Que l'Abbé sache combien cela est difficile et
ardu! St Benoit nous dit ce matin que cela exige à la fois l'adaptation
aux différents tempéraments des frères, et la liberté par rapport aux
soucis matériels. La mission de l'Abbé est pastorale, et spirituelle.
Certains peuvent être tentés de se consacrer à la gestion des biens
matériels, plus concrets et rassurants. Mais ce n'est pas ce que Dieu et
les frères attendent d'eux.
Benoit insiste, la mission de l'Abbé est de conduire les âmes. L'image du
pasteur vient naturellement sous sa plume. Elle nous permet de
comprendre en profondeur le sens de son invitation: « Cherchez
d'abord le Royaume de Dieu et sa Justice ». En effet, le Christ, Bon
Pasteur, modèle unique de l'Abbé, nous dit: « Je connais le Père, et je
donne ma vie pour mes brebis» Jn 10/15. C'est dans sa mystérieuse
intimité avec le Père que le Christ puise l'intelligence de sa mission de
Pasteur, et la force de la conduire jusqu'au bout. Ainsi du Père Abbé,
pour qui nous devons toujours demander cette connaissance du Père.
Mais ainsi aussi de nous, car il est écrit également: « Je connais mes
brebis, et mes brebis me connaissent ». Ou en est notre désir de le
connaitre?
« Diriger les âmes ». Dieu seul sait ce qu'il y a dans le cœur d'un
homme. Un professeur peut dire parfois: « Je tiens bien ma classe en
main ». Un Abbé jamais, heureusement! L'Esprit souffle où il veut: nul
ne sait ni d'où" vient, ni où " va. C'est cela qui rend la tâche de l'Abbé
si délicate. Consentir à entrer dans le plan de Dieu, se laisser guider et
conduire par Lui. Etre attentif à ce qu'il peut inspirer à un frère. Là où
on ne l'attend pas. « Souvent le Seigneur révèle au plus jeune ce qui
vaut le mieux », dira Benoit au chapitre sur le Conseil de l'Abbé. Cela
veut dire: Accepter de n'avoir aucune prise sur les événements, ni sur
les cœurs. Sauf la connaissance que Dieu nous en donne. Cela demande
à l'Abbé, une liberté intérieure. C'est de cette ouverture à l'Esprit que la
communauté, a le plus besoin. (2013-09-04)