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1. On donnera aux frères des vêtements selon la nature des lieux où ils habitent et selon le climat de ceux-ci,
2. car dans les régions froides il faut davantage, dans les chaudes moins.
3. Cette appréciation est donc l'affaire de l'abbé.
4. Pour notre part, cependant, nous croyons que dans les lieux moyens il suffit aux moines d'avoir chacun une coule et une tunique, –
5. coule velue en hiver, lisse ou usée en été, –
6. et un scapulaire pour le travail ; pour se couvrir les pieds, des chaussons et des souliers.
7. Quant à la couleur ou à l'épaisseur de tous ces effets, les moines ne s'en plaindront pas, mais ils les prendront tels qu'on peut les trouver dans la province où ils demeurent, ou ce qui peut s'acheter meilleur marché.
8. Cependant l'abbé veillera à la mesure, de façon que ces vêtements ne soient pas trop courts pour ceux qui les portent, mais à leur mesure.
9. En recevant du neuf, on rendra toujours l'ancien, qui devra être déposé temporairement au vestiaire pour les pauvres.
10. Il suffit en effet à un moine d'avoir deux tuniques et deux coules pour la nuit et pour laver ces effets.
11. Ce qui serait en plus, c'est du superflu, il faut le retrancher.
12. De même les chaussons et tout ce qui est ancien ;; on le rendra en recevant du neuf.
13. Ceux qui sont envoyés en voyage recevront du vestiaire des caleçons, qu'ils y remettront à leur retour après les avoir lavés.
14. Les coules et tuniques seront un tant soit peu meilleures que celles qu'ils portent d'ordinaire. Ils les recevront du vestiaire en partant en voyage et les remettront au retour.
Trois verbes caractérisent les relations du moine avec le vêtement : donner, recevoir, rendre. « On donnera aux frères des vêtements adaptés. » « Ceux qui recevront des vêtements neufs rendront toujours immédiatement les vieux ».
Mais Benoit précise davantage : en effet, l’Abbé doit juger de ce qui convient, veiller à ce que les vêtements soient adaptés à la taille des frères. Quand au moine, il doit apprendre à se contenter de ce qui lui est donné, ne pas se mettre en peine de la couleur, ni de la qualité du tissus. Et Benoit fait encore un pas de plus, en précisant que ce qui est acheté l’est au meilleur prix. Et que les vêtements usagés doivent être rendus, et non accumulés. Ils serviront aux pauvres. Le superflu doit être retranché.
En traitant de cet aspect très concret de notre vie, Benoit nous parle encore de notre vie spirituelle, de ce chemin de guérison intérieur où nous sommes engagés, par rapport aux choses, à nous-même, aux autres.
D’abord la guérison par rapport aux choses. Elles sont données et reçues. Nous sommes invités à nous libérer du désir de prendre, d’accaparer, d’accumuler. Comme si ces choses nous faisaient exister. Guérison par rapport à nous-même : Renoncer à soigner notre propre image. Guérison enfin, vis-à-vis des autres : nous pouvons devenir capables de voir le besoin de l’autre, de voir le pauvre, de lui rendre ce que nous gardions jalousement pour nous.
Nous le sentons bien, ce chemin proposé par Benoit, à propos des humbles choses de la vie, est le chemin de la vraie liberté.
Ce chapitre peut être une bonne occasion pour faire de l’ordre dans notre cellule. Ranger, mais aussi rendre ce que nous n’utilisons plus ; ce qui est usagé, ou plus à notre taille. Ne garder que ce que nous utilisons. Ne pas hésiter à demander aussi. Est-ce que je reçois mes vêtements de la communauté ? (15/11/14)
1. Il ne sera aucunement permis à un moine de recevoir ou de donner, sans permission de l'abbé, lettres, eulogies ou petits présents quelconques, ni de ses parents, ni d'aucun homme, ni entre eux.
2. Même si ses parents lui envoient quelque chose, il ne se permettra pas de l'accepter avant d'en avoir référé à l'abbé.
3. Si l'abbé permet qu'on l'accepte, il sera en son pouvoir de donner la chose à qui il veut,
4. et le frère à qui on l'avait envoyée ne s'en fâchera pas, « pour ne pas donner d'occasion au diable. »
5. Celui qui se permettrait de faire autrement, sera soumis à la sanction de règle.
St Benoit termine ces chapitres qui traitent des relations avec les personnes de l’extérieur par cette question des cadeaux reçus ou donnés.
Un objet peut être considéré de divers points de vue : il a une valeur objective, son utilité, ou la matière qui le compose. Et il a une valeur subjective, liée à ce qu’il évoque pour nous. Pour l’utilité, Benoit nous dit que chacun de nous doit recevoir de l’Abbé ce dont il a besoin. Mais qu’il doit se contenter de choses simples. La valeur subjective vient de ce que cet objet évoque pour nous, une personne, une période de notre vie, un lieu qui nous a marqué. L’objet prend alors une valeur symbolique. Un cadeau a donc cette triple dimension : son utilité, sa matière, sa charge symbolique.
Dans ce chapitre, Benoit ne considère ni l’utilité, ni la valeur de l’objet, mais le poids affectif que nous lui donnons. Recevoir et donner des cadeaux, même infimes, c’est une manière d’exister aux yeux d’autrui. Comme dans les chapitres précédents, Benoit met le doigt sur un point essentiel de la construction de l’être humain, son affectivité.
On nous dit que « l’avoir n’est qu’une pathologie de l’être », le signe d’une carence. Mais nous devons reconnaitre que nous souffrons tous plus ou moins de ce déséquilibre, lié à notre histoire. Il est bon d’en prendre conscience, d’oser le reconnaitre. C’est une condition essentielle pour pouvoir grandir. Se justifier, ou se fermer le coeur et l’esprit, en lisant ces chapitres de la Règle, c’est se condamner à rester emprisonné en soi-même.
Le but de St Benoit n’est pas de nous coincer, ni de nous culpabiliser. Il veut nous aider à grandir. A voir plus clair sur nous-mêmes. La Règle nous offre une bonne grille de lecture, pour discerner nos points faibles. Sans les maquiller avec de belles justifications. Si nous arrivons à reconnaitre nos petitesses, alors nous pourrons grandir. Nous pourrons advenir à l’être que nous sommes. Celui que Dieu nous appelle à devenir. (14/11/14)
16. La cuisine de l'abbé et des hôtes sera à part, afin que les hôtes arrivant à des heures incertaines, – ils ne manquent jamais au monastère, – les frères n'en soient pas dérangés.
17. Dans cette cuisine entreront en charge pour l'année deux frères qui remplissent bien la fonction.
18. S'ils en ont besoin, on leur procurera des aides, pour qu'ils servent sans murmure, et inversement, quand ils ont moins d'occupation, ils iront au travail là où on leur commande.
19. Et l'on y veillera, non seulement pour eux, mais aussi dans tous les services du monastère :
20. quand ils en ont besoin, on leur attribuera des aides, et inversement, quand ils sont libres, ils obéiront aux commandements qu'on leur donne.
21. Quant au logement des hôtes, il sera confié à un frère dont l'âme est pénétrée de la crainte de Dieu.
22. Il y aura là des lits garnis en nombre suffisant, et la maison de Dieu sera administrée par des sages et sagement.
23. Celui qui n'en a pas reçu l'ordre n'entrera aucunement en rapport avec les hôtes ni ne conversera avec eux,
24. mais s'il les rencontre ou les aperçoit, il les saluera humblement, comme nous l'avons dit, et demandant une bénédiction, il passera son chemin en disant qu'il n'a pas permission de converser avec un hôte.
Pour reprendre ce que dit Benoit sur l’accueil des hôtes, je retiens trois points : Le Monastère est la maison de Dieu. La pratique de la liberté dans l’accueil. Le monastère est la maison des moines.
Le monastère, maison de Dieu. L’expression est de St Benoit. Elle nous dépossède de notre maison. Nous sommes tous les hôtes de Dieu. Nous sommes tous reçus par Lui. Le moine qui accueille n’est pas un propriétaire qui ouvre la porte de sa maison. Il est lui-même l’hôte de Dieu. Il lui demande la grâce de demeurer dans sa maison. C’est un lieu où doit se manifester la gloire de Dieu, sa présence. Christ est vraiment là. Le Christ est présent dans la personne des frères qui accueillent. Et c’est le Christ qui frappe à notre porte, en la personne de l’hôte.
La pratique de la liberté dans l’accueil. Nous retrouvons là les difficultés provoquées par le tempérament de chacun. Pour accueillir, il faut d’abord être disponible : le moine surchargé, ou préoccupé de lui-même, ne peut accueillir. Ni le bavard, ni le dominateur. Ni le moine qui fuit le silence. Ni celui qui est constamment soupçonneux. Tous ces défauts nouent l’intelligence et le coeur. Ils rendent difficile l’accueil de qui que ce soit.
Le monastère, maison des moines. La vraie liberté humaine et chrétienne exige un effort constant. Le monastère est bien la maison d’hommes en quête de cette liberté du coeur. Elle seule permet d’entendre Dieu, et d’accueillir l’autre. Non seulement parce qu’il nous plaît, ou parce qu’il nous flatte. Mais parce qu’il est toujours, même mal croyant, même filou, envoyé par Dieu. C'est-à-dire que le nouveau venu a pour effet de ramener le moine à sa propre liberté et à sa conscience. L’hôte joue donc un rôle actif dans la conversion du moine. Lequel, parmi nous, n’a pas reçu des hôtes de fortes leçons de vie chrétienne ? C’était le Christ que nous avions reçu. Comme toujours, sa Parole n’est pas demeurée sans porter du fruit.
Un frère me disait hier : « Avant de rencontrer un hôte, je prends toujours un temps de prière ». C’est ce que nous devrions faire, toujours. Car il y a ce lien entre accueillir, et se recueillir. Pas d’accueil de l’autre, s’il n’y a pas en nous ce silence du coeur qui nous permet d’être attentif à celui qui est devant nous, à qui il est pour Dieu. (13/11/14)
1. Tous les hôtes qui se présentent doivent être reçus comme le Christ, car il dira : « J'ai été hôte et vous m'avez reçu. »
2. « A tous » on rendra les honneurs qui leur sont dus, « surtout aux frères dans la foi » et aux étrangers.
3. Lors donc qu'un hôte sera annoncé, le supérieur et les frères iront à sa rencontre avec toutes les politesses de la charité.
4. On commencera par prier ensemble, et ensuite on échangera la paix.
5. Ce baiser de paix ne doit se donner qu'après qu'on ait prié, à cause des illusions du diable.
6. En saluant, on donnera toutes les marques d'humilité à tous les hôtes qui arrivent ou qui partent.
7. La tête inclinée, le corps prosterné par terre, on adorera en eux le Christ que l'on reçoit.
8. Une fois reçus, on conduira les hôtes à l'oraison, et après cela le supérieur s'assiéra avec eux, lui ou celui qu'il aura désigné.
9. On lira devant l'hôte la loi divine, pour l'édifier. Après quoi, on lui donnera toutes les marques d'hospitalité.
10. Le supérieur rompra le jeûne à cause de l'hôte, sauf si c'est un jour de jeûne majeur que l'on ne puisse violer,
11. tandis que les frères continueront à observer les jeûnes accoutumés.
12. L'abbé versera l'eau sur les mains des hôtes.
13. L'abbé, ainsi que toute la communauté, lavera les pieds de tous les hôtes.
14. Après le lavement des pieds, on dira ce verset : « Nous avons reçu, ô Dieu, ta miséricorde au milieu de ton temple. »
15. On accordera le maximum de soin et de sollicitude à la réception des pauvres et des étrangers, puisque l'on reçoit le Christ davantage en leur personne, la crainte des riches obligeant par elle-même à les honorer.
« Tous les hôtes doivent être accueillis comme le Christ ». « On adorera en eux le Christ que l’on reçoit ». « On reçoit davantage le Christ dans la personne des pauvres ».
Trois fois, au début de ce chapitre sur l’accueil des hôtes, Benoit nous répète que, en recevant l’hôte, c’est le Christ Lui-même que nous recevons. Il veut ainsi nous inviter à recevoir avec tous les égards de la charité celui qui se présente à la porte du monastère, et surtout le pauvre.
Mais la venue des hôtes n’est que l’un des signes de la venue continuelle de Dieu dans notre vie. Le Christ se présente à nous dans les hôtes, mais pas seulement. Il se présente aussi dans chacun de nos frères. Il vient à nous dans les circonstances de la vie. Dans les appels intérieurs, dans la parole du Père Abbé. La lectio divina est un moment important de notre accueil de Dieu. Et la Liturgie des Heures. Et l’Eucharistie. En réalité, le Christ se présente à nous à chaque instant, et notre vie de moine pourrait se définir comme une reconnaissance du Christ qui vient à notre rencontre, comme l’accueil de sa venue.
« Ils iront l’accueillir avec une charité toute prête au dévouement ». C’est vrai de l’accueil de l’hôte. Mais c’est vrai aussi de notre accueil du Christ. Nous pouvons demander au Christ de nous donner lui-même cet amour pour Lui, afin que nous sachions le recevoir, l’accueillir. Qu’il soit toujours mieux reconnu par nous, reçu en nous.
Et il faut dire encore ceci : Non seulement c’est le Christ errant et sans toit que nous recevons. Mais c’est encore le Christ, en nous, qui reçoit. Nous avons à offrir l’hospitalité d’une communauté qui vit de l’Evangile. L’hospitalité doit être pour nous une occasion sans cesse renouvelée de percevoir l’urgence de l’Evangile dans notre vie. (12/11/14)
1. L'oratoire sera ce que signifie son nom, et on n'y fera ou déposera rien d'autre.
2. L'œuvre de Dieu achevée, tous sortiront dans un silence complet et l'on aura le respect de Dieu,
3. en sorte qu'un frère qui voudrait prier à par soi en particulier, n'en soit pas empêché par l'importunité d'un autre.
4. Si en outre, à un autre moment, il voulait prier à part soi en privé, il entrera et il priera sans bruit, non à voix haute, mais avec larmes et application du cœur.
5. Donc celui qui ne fait pas ainsi, on ne lui permettra pas de demeurer à l'oratoire, une fois achevée l'œuvre de Dieu, comme il a été dit, de peur qu'un autre n'y trouve un empêchement.
Nous aimons ce chapitre, car nous y trouvons la pensée de Benoit sur notre relation à Dieu, sur notre vie de prière. Notre église est le centre du monastère et de notre vie commune. C’est la Maison de Dieu, le lieu où nous passons du temps avec Lui. Tous ensemble, ou seul avec Lui. Le lieu où nous pouvons reprendre conscience de l’appel que Dieu nous adresse continuellement : vivre dans son intimité et lui redonner notre vie, chaque jour.
Si nous voulons que notre oratoire soit un lieu de prière, il faut d’abord que notre coeur le soit. C’est vrai, nous devons tout faire pour que l’oratoire du monastère soit ce que signifie son nom. Mais nous devons surtout faire effort de détachement intérieur, afin de devenir Temple de Dieu, habité par l’Esprit. Plus nous ferons effort en ce sens, et plus nous nous approcherons de Dieu avec joie, à l’oratoire, nous aidant les uns les autres à prier.
Benoit organise toute notre vie en fonction de cette double réalité : Dieu, toujours présent et agissant en nous. La créature que nous sommes, faite pour prier sans cesse, pour rendre grâce, mais incapable de se maintenir dans cet acte de prière. Le climat du monastère doit être favorable à la prière : silence, humilité, obéissance, vie fraternelle. Mais quand il s’agit de l’acte même de la prière, du temps à lui consacrer, Benoit est d’une grande discrétion. Il n’impose pas à la communauté un temps trop long. Par contre, il demande à chacun de ne pas nuire au silence et au besoin de prière de ses frères. C’est encourageant : aucun d’entre nous ne peut dire : Ce n’est pas pour moi. Hommes de prière, nous pouvons tous le devenir. Long travail de docilité à l’Esprit Saint qui travaille sans cesse en chacun de nous.
Que notre église soit vraiment la maison de Dieu, qu’elle ne soit que cela. Venons souvent prier à l’église, y retrouver Dieu dans le secret de notre coeur. Aimons aller à l’église. (11/11/14)
10. Des Calendes d'octobre au début du carême, ils vaqueront à la lecture jusqu'à la fin de la deuxième heure.
11. À la deuxième heure, on célébrera tierce, et jusqu'à none tous travailleront à l'ouvrage qui leur est assigné.
12. Au premier signal de la neuvième heure, chacun quittera son ouvrage, et ils se tiendront prêts pour le moment où retentira le second signal.
13. Après le repas, ils vaqueront à leurs lectures ou aux psaumes.
14. Aux jours de carême, depuis le matin jusqu'à la fin de la troisième heure, ils vaqueront à leurs lectures, et jusqu'à la fin de la dixième heure ils feront ce qui leur est assigné.
15. En ces jours de carême, chacun recevra un livre de la bibliothèque, qu'il devra lire à la suite et intégralement.
16. Ces livres doivent être distribués au début du carême.
17. Avant tout, bien sûr, il faut désigner un ou deux anciens qui circulent dans le monastère aux heures où les frères vaquent à la lecture.
18. Ils veilleront à ce qu'il ne se trouve pas de frère atteint d'acédie, qui vaque à l'oisiveté ou au bavardage au lieu de s'appliquer à la lecture, et qui non seulement se fait tort à lui-même, mais en outre distrait les autres.
19. Si l'on en trouve un, – à Dieu ne plaise, – on le réprimandera une fois, deux fois ;
20. s'il ne s'amende pas, il subira la réprimande de règle, de telle façon que les autres en conçoivent de la crainte.
21. Un frère n'entrera pas en rapport avec un autre frère à des heures qui ne conviennent pas.
Quand il parle de la Lectio Divina, St Benoit emploi le verbe « vacare ». C’est le terme qui a donné le mot vacances. Vacare, c’est faire le vide, vider son cœur et son esprit de toute préoccupation. Laisser les soucis à la porte pour se mettre à l’écoute. La lectio suppose donc une démarche pour trouver le silence du cœur. Pour que la Parole de Dieu résonne en nous, pour qu’elle descende dans notre cœur, il faut que celui-ci ne soit pas trop encombré.
Cette parole n’est pas quelque chose de nouveau pour nous, elle nous habite déjà, comme une musique. Ce qui se passe au moment de la lectio, ce n’est pas tant une affaire de connaissance, que de reconnaissance. L’Ecriture ne fait que traduire par des mots ce qui est déjà présent en nous.
Notre écoute de la Parole de Dieu s’approfondit tout au long de notre vie, de notre cheminement spirituel. Comprendre l’Ecriture, c’est bien plus que comprendre un texte. C’est entrer dans le mystère de ce que nous sommes. De ce que nous sommes sous le regard de Dieu.
A propos de ce chapitre, et de la Lectio Divina, le P. Christian de Tibhirine dit ceci :
D’abord, c’est toute la Règle qui est le fruit d’une lectio divina. C’est évident par le nombre de citations de l’Ecriture, explicites ou implicites.
La lectio est l’un des axes principaux de la conversion du moine. C’est l’un des instruments de l’Art Spirituel : « Entendre volontiers les Saintes Lectures. »
La Règle parle d’abord d’écoute. Pour une lecture intérieure.
La lectio, pour Benoit, comme pour toute la tradition biblique, est école de la mémoire. On ne lit que pour enregistrer, ruminer, assimiler.
Enfin la lectio demande du temps, que nous lui donnions de notre temps, pour nous laisser imprégner par la Parole de Dieu. (2014-05-14)
1. L'oisiveté est ennemie de l'âme. Aussi les frères doivent-ils être occupés en des temps déterminés au travail manuel, et à des heures déterminées aussi à la lecture divine.
2. Nous croyons donc que ces deux occupations seront bien réparties selon les temps dans l'horaire que voici :
3. de Pâques aux Calendes d'octobre, depuis le matin en sortant de prime ils travailleront, là où c'est nécessaire, presque jusqu'à la quatrième heure.
4. De la quatrième heure jusqu'à l'heure où ils célébreront sexte, ils vaqueront à la lecture.
5. Après sexte, en sortant de table, ils se reposeront sur leurs lits dans un silence complet, ou si quelqu'un veut lire pour son compte, il lira de façon à ne déranger personne.
6. On célébrera none à l'avance, au milieu de la huitième heure, et ils se remettront au travail qui est à faire jusqu'aux vêpres.
7. Si les conditions locales ou la pauvreté exigent qu'ils s'occupent de rentrer les récoltes par eux-mêmes, ils n'en seront pas fâchés,
8. car c'est alors qu'ils sont vraiment moines, s'ils vivent du travail de leurs mains, comme nos Pères et les apôtres.
9. Cependant tout doit se faire avec mesure à cause des faibles.
Le F. Adalbert fait remarquer que le titre de ce chapitre est « lacunaire ». Il passe sous silence la lectio divina, alors que Benoit s’applique, tout au long de ce texte, à alterner ces deux activités, travail manuel et lectio divina.
« A certaines heures,… à d’autres heures ». Ici Benoit établit deux principes essentiels. Le premier, c’est que l’oisiveté est ennemie de l’âme, il faut donc l’occuper par le travail, et par la lectio. Le second, c’est que ces deux activités doivent occuper alternativement le moine, pour qu’il soit vraiment moine. Ce balancement des heures, des jours et des saisons, des temps liturgiques, comme les rythmes de la vie qui scandent nos existences, ont une très grande importance. D’abord parce que la monotonie pourrait nous décourager. Mais surtout parce qu’ils expriment quelque chose de fondamental de l’être humain : nous sommes faits pour donner et pour recevoir. Pour faire et pour nous laisser faire. Le travail et la lectio expriment ces deux moments, ces deux attitudes fondamentales de l’être humain. Dans le travail, on peut trouver la joie de se donner, de donner de son temps, de son énergie, de sa force, de sa créativité, de son enthousiasme. Et dans la lectio on peut reconnaitre cette capacité de recevoir, d’écouter, de se laisser prendre par la main, de se laisser guider par un autre, de se laisser conduire par Dieu là où nous ne serions pas allés de nous-mêmes.
Il est peut-être utile, pour chacun de nous, de prendre conscience de notre tendance profonde. Et ensuite de nous laisser rééquilibrer par la vie monastique. Elle nous offre cette grâce de découvrir, de développer l’autre part de nous-mêmes. Si nous sommes de ceux qui se laissent dévorer par les activités, elle nous permet de découvrir la joie de nous arrêter, de recevoir, de nous mettre à l’écoute de Dieu, de sa Parole. Si nous sommes de ceux qui ont du mal à s’engager au service des autres, elle nous permet de découvrir la joie de donner notre vie pour nos frères.(2014-05-13)
2. Quant aux psaumes et antiennes, ils seront imposés, après l'abbé, par ceux qui en recevront l'ordre, suivant leur rang.
3. Quant à chanter et lire, on ne s'y risquera pas si l'on ne peut accomplir cette tâche de façon à édifier les auditeurs.
4. Cela se fera avec humilité, gravité et crainte, et sur l'ordre de l'abbé.
Ce petit chapitre traite de deux questions : L’annonce de l’Office. Et la manière de le réciter.
D’abord, c’est l’Abbé qui est responsable de l’annonce de l’œuvre de Dieu. Ce qui dit déjà l’importance de l’Office Divin. Ensuite, St Benoit ne dit pas : Sonner pour l’œuvre de Dieu. Ni : Donner un signal. Il dit : annoncer. Annoncer l’œuvre de Dieu, c’est tout autre chose. Lorsque sonne la cloche pour l’Office, c’est une annonce. Une annonce joyeuse, et toujours nouvelle. Comme fut pour Marie l’annonce de la Bonne Nouvelle. C’est Dieu qui nous visite, et Il nous invite à la rencontre. Le P. Muard disait : « Dieu qui m’appelle ». Heureux sommes nous quand ces annonces de l’Œuvre de Dieu sont chaque fois un appel. Heureux l’homme qui sait découvrir à tout instant, dans sa vie, l’appel du Christ.
Les prescriptions de Benoit, sur la façon d’exécuter les Psaumes et les Antiennes, sont imprégnées du même sens de la majesté de Dieu. Ce chapitre nous rappelle que le chant, comme la lecture, sont un service. Ils le sont s’ils sont accomplis avec « humilité, crainte de Dieu, respect ». Ces trois expressions sont tout un programme. Une manière de décrire notre vie de moine. Ils en disent long sur la profondeur de notre conversion personnelle. Sur les défis que nous avons à relever.
Jour après jour, nous apprenons à être serviteurs de Dieu, à être disponibles. Nous sommes à la place que Dieu veut pour nous. (2014-05-10)
1. Si quelqu'un, en travaillant à n'importe quel travail, à la cuisine, au cellier, au service, au pétrin, au jardin, à quelque métier, ou n'importe où, commet quelque manquement
2. ou brise ou perd quoi que ce soit ou tombe dans quelque autre faute où que ce soit,
3. et ne vient pas de lui-même aussitôt faire satisfaction spontanément devant l'abbé et la communauté et avouer son manquement,
4. si on l'apprend par un autre, il sera soumis à une pénitence plus sévère.
5. Mais s'il s'agit d'un péché de l'âme dont la matière est restée cachée, il le découvrira seulement à l'abbé ou à des anciens spirituels,
6. qui sachent soigner leurs propres blessures et celles des autres, sans les dévoiler et les publier.
Le chapitre précédent parlait des fautes commises pendant la liturgie. Ce chapitre concerne la vie courante, en particulier le travail. Mais Benoit y établit aussi une distinction, que l’on retrouve dans toute la tradition spirituelle. Entre les fautes extérieures, et les péchés secrets de l’âme. Dans le premier cas, il prévoit que l’on fasse réparation devant l’Abbé et la communauté. Dans le second cas, il convient de ne s’en ouvrir qu’à l’Abbé ou au Père Spirituel.
Cette distinction entre faute et péché, nous avons souvent du mal à la faire dans notre propre vie. C’est pour cette raison que nous peinons à reconnaitre nos fautes extérieures : nous nous sentons coupables, alors que, souvent, il ne s’agit pas de culpabilité. Pour Benoit, la faute n’est pas un péché, elle fonctionne sur un autre registre, à un autre niveau.
La faute touche notre rapport à la communauté, qui se trouve gênée par un acte, ou par un comportement. Le péché touche la racine de notre être, dans notre relation à Dieu et aux frères. La faute est une constatation objective, observable par tous. Le péché concerne l’intention du cœur, le mouvement de l’âme.
Casser un objet, arriver accidentellement en retard à un exercice de communauté, il s’agit de désordres à réparer. Tandis que le péché, comme le précise St Benoit, concerne les blessures secrètes de l’âme. Pour éviter la confusion, il délimite très clairement le processus à suivre dans l’un et l’autre cas. Car il y a deux écueils à éviter. D’une part la transparence. La communauté a le droit au respect de son mode de vie. Si on la gêne, il est normal de lui demander pardon. Mais pas au-delà : elle n’a pas à vouloir tout savoir d’un frère. Et d’autre part, s’il convient de dévoiler ses péchés au père spirituel, cela ne dispense pas de reconnaitre ses manquements devant la communauté.
En établissant cette distinction entre le manquement et le péché, Benoit construit la communauté sur des bases très saines : le respect de la communauté, le respect de chaque frère, et l’ouverture du cœur. Notre vie de moine est toujours un chemin de guérison pour chacun de nous. (2014-05-09)
1. Si quelqu'un se trompe en récitant un psaume, un répons, une antienne ou une leçon, et s'il ne s'humilie pas sur place et devant tous par une satisfaction, il subira une punition plus sévère,
2. pour n'avoir pas voulu réparer par l'humilité le manquement qu'il avait commis par négligence.
3. Quant aux enfants, pour une faute de ce genre ils seront battus.
Dans ce chapitre, St Benoit fait le lien entre la satisfaction, et l’humilité. Il y revient à deux reprises. Savoir demander pardon est un signe d’humilité. Refuser de le faire est une marque d’orgueil. Et contre tout mouvement d’orgueil, Benoit est très sévère.
Mais qu’est-ce que l’orgueil ? Cassien distingue l’orgueil de la vanité, par une nuance qui permet d’en comprendre le mécanisme. La vanité se nourrit du regard d’autrui. L’orgueil, au contraire, méprise l’autre, il nie son existence. Nous voyons mieux, alors, l’enjeu de ce chapitre.
Réparer, prendre le temps de s’excuser, demander pardon, c’est redonner sa place à l’autre dans notre vie. Donner à notre vie une dimension supplémentaire, que l’orgueil avait aplatie. Et l’un des signes les plus évidents de la conversion du cœur, c’est cette attention sans cesse renouvelée à l’autre.
L’orgueilleux ne se rend même pas compte qu’il fait souffrir, qu’il gêne, qu’il agace. Sa vie n’a qu’une seule dimension, son propre intérêt. Le vaniteux a au moins quelque peu cette dimension de l’altérité, même si elle est encore centrée sur lui-même.
Ainsi, les petits gestes de la vie sont les meilleurs indicateurs, pour nous ramener à la vérité de ce que nous vivons. Ils peuvent nous aider à grandir. Ils peuvent nous rendre plus lucides sur nous-mêmes. Nous remettre en relation avec le Christ. (2014-05-08)