vendredi 15 août 2025 : fête de l’Assomption, horaire des dimanches (vigiles la veille à 20h45, messe à 10h) + concert à 16h.

Nota : L’office de None (14h45) sera prié au dolmen de ND de la Pierre-qui-Vire.

Commentaires sur la Règle



Voir le commentaire de Père Abbé Luc / Chapitre 66 06-08 Des portiers du monastère. écrit le 10 novembre 2023
Verset(s) :

6. Quant au monastère, il doit être, si possible, construit de telle façon que tout le nécessaire, c'est-à-dire l'eau, le moulin, le jardin et les divers métiers, s'exerce à l'intérieur du monastère,

7. de sorte que les moines ne soient pas obligés de courir au-dehors de tous les côtés, car ce n'est pas bon du tout pour leurs âmes.

8. Nous voulons que cette règle soit lue souvent en communauté, pour qu'aucun frère ne s'excuse sur son ignorance.

Commentaire :

Quelle est la motivation de la clôture monastique? St Benoit en livre ici une motivation d'abord spirituelle : « Que les moines ne soient pas obligés de courir au dehors de tous les côtés, car ce n'est pas bon pour leurs âmes ». Déjà il invoquait ce point de discernement pour le choix du frère Portier, « un vieillard sage ...dont la maturité ne le laisse pas courir de tous côtes ». En entendant ces lignes, il apparait clairement que pour Benoit, il y a deux manières de courir: la course qu'il préconise dès le prologue ou le moine se hâte vers le Royaume par une vie donnée dans les bonnes actions (Prol 23, 44... ), et puis la course ici comprise plus comme une errance, ou l'on va de-ci de-là sans propos ferme. Pour cette deuxième acception, nous avons d'autres verbes en latin(vacare, vagari) d'où a été tire en français le mot vagabondage ... La clôture monastique voudrait nous aider à mettre toutes nos énergies au service de cette course pour le Royaume, une course où l'être s'unifie au service de Dieu et des frères. Là le moine trouve sa vraie maturité, une sorte de solidité intérieure qui ne le laisse pas être secoué à tout

vent de distractions.

Ce critère de discernement donné par St Benoit, entre une course qui centre et une course qui disperse, garde toute son actualité pour nous aujourd'hui. A l'heure où la clôture devient poreuse du fait des moyens de communication que Benoit ne pouvait imaginer, comment vais-je me situer ? Est-ce que je vais me laisser entrainer par la curiosité à vagabonder dans les

journaux ou sur internet ou bien est-ce que je reste vigilant pour rester centré sur mon propos monastique ? Intérieurement, cela correspond à des choix très précis. Alors que nous faisons

appel à la responsabilité de chacun, une forte discipline personnelle est requise. Pour vérifier, ou j'en suis, je peux me demander: qu'est-ce que ce qui m'habite, est-ce de connaitre les

dernières informations ou bien est-ce de garder le recueillement pour cultiver la relation avec le Seigneur et la disponibilité aux frères ? Dans notre monde devenu comme une grande scène de spectacle ou on peut se griser de nouveautés toujours étonnantes, comment nous moines nous démarquons-nous ? Notre quête monastique demande à chacun une attention qui va plus loin que simplement répondre machinalement à la cloche qui nous convoque aux différents exercices. Elle requiert de nous une forme de renoncement à tout savoir, à nous distraire pour

occuper le temps, pour mieux être à l'écoute de la Parole qui résonne dans la liturgie tout au long de la journée, et pour mieux être ouvert aux appels de nos frères.

Voir le commentaire de Père Abbé Luc / Chapitre 66 01-05 Des portiers du monastère. écrit le 09 novembre 2023
Verset(s) :

1. A la porte du monastère on placera un vieillard sage, qui sache recevoir et donner une réponse, et dont la maturité ne le laisse pas courir de tous côtés.

2. Ce portier doit avoir son logement près de la porte, afin que les visiteurs le trouvent toujours présent pour leur répondre.

3. Et aussitôt que quelqu'un frappe ou qu'un pauvre appelle, il répondra Deo gratias ou Benedic ,

4. et avec toute la douceur de la crainte de Dieu, il se hâtera de répondre avec la ferveur de la charité.

5. Si ce portier a besoin d'aide, il recevra un frère plus jeune.

Commentaire :

"A la porte du monastère. on placera un vieillard sage, qui sache recevoir et donner une réponse". Commentant ce chapitre, le P. Adalbert remarque : « Pour le Maitre, la tâche des portiers ne consistait guère qu'à ouvrir et fermer la porte, celle-ci devant toujours rester close. Pour Benoit, la fonction est proprement humaine : répondre a toute personne qui appelle » (Ce que dit St Benoit, p 291). Dans !es cinq versets que nous avons entendus, les mots "réponse ou répondre" reviennent 4 fois. C'est dire l'importance qu'y attache St Benoit. Répondre, oui, mais pas n'importe comment. .. Et nos frères portiers, que je remercie pour leur service. savent d' expérience que la chose n'est pas si facile. St Benoit suggère en fait qu'il s'agit d'un véritable savoir-faire, qui ne peut être indépendant à ses yeux d'un savoir-être. Un savoir-faire car le vieillard sage doit savoir recevoir et donner une réponse. Recevoir une parole d'abord, et répondre ensuite. L' art est difficile car le portier va recevoir toute sorte de paroles, des paroles polies et agréables, d'autres incompréhensibles, d'autres encore à la limite de la correction ou dites sur un ton agressif. Et il ne sait jamais où l'avance comment cela va se passer, que ce soit à la porte ou au téléphone. II n'a pas le recul pour réfléchir et méditer sa réponse. II est acculé à parler, tel qu'il est sur le moment. Dans ce genre de situation, nous sommes toujours plus ou moins dans une forme de mimétisme, si la parole entendue est polie, on sera polie. Si elle est agressive, on risque de répondre sur le même ton. Mais st Benoit nous invite à aller plus loin. Quand il dit : « il répondra avec toute la douceur de la crainte de Dieu », ou un peu plus loin « avec la ferveur de la charité", il invite le portier à sortir du match de « ping-pong » qui voudrait qu' on se situe sur le même terrain que son interlocuteur. Il propose de faire un pas de côté, en puisant dans ses ressources profondes, la douceur de la crainte de Dieu et la charité. Douceur de la crainte de Dieu, en regardant l'autre d'abord dans la foi. De manière avec celui qui arrive, c'est Dieu qui nous visite. Poser ce regard de foi, c'est mettre de la distance avec les affects immédiats qu'on éprouve en positif ou en négatif. La personne qui est là devant moi si agréable ou lourde soit-elle, est plus grande que ce que je vois et perçois. Deuxième ressource : la ferveur de la charité : celui qui arrive au monastère arrive en terrain inconnu, il est en position de faiblesse. Il mérite de notre part une sortie de nous-même, un surcroit de charité. Douceur de la crainte de Dieu et charité. deux mouvements qui viennent du plus profond de notre cœur comme un cadeau. Avec le frère portier, demandons-les. Désirons-les, car telle une source douceur et charité irriguent et fécondent nos relations. Elles peuvent changer bien des choses.

Voir le commentaire de Père Abbé Luc / Chapitre 65 11-22 Du prévot du monastère. écrit le 08 novembre 2023
Verset(s) :

11. Aussi nous semble-t-il opportun, pour la sauvegarde de la paix et de la charité, que l'abbé règle à son gré l'organisation de son monastère.

12. Si faire se peut, c'est par des doyens que l'on organisera, comme nous l'avons établi antérieurement, tous les services du monastère, selon que l'abbé l'établira.

13. Ainsi, plusieurs en étant chargés, un seul ne s'enorgueillira pas.

14. Si le lieu l'exige ou si la communauté le demande raisonnablement avec humilité et que l'abbé le juge opportun,

15. l'abbé choisira qui il voudra avec le conseil des frères qui craignent Dieu, et il se l'ordonnera lui-même comme prévôt.

16. Ce prévôt, cependant, exécutera respectueusement ce que son abbé lui commande, sans rien faire contre la volonté ou les ordres de l'abbé,

17. car plus il est élevé au-dessus des autres, plus il lui faut observer avec soin les prescriptions de la règle.

18. Si ce prévôt se montre vicieux ou que, séduit par l'élèvement, il s'enorgueillisse, ou qu'il soit convaincu de mépris pour la sainte règle, on l'avertira verbalement jusqu'à quatre fois.

19. S'il ne s'amende pas, on lui appliquera la correction des sanctions de règle.

20. Si même alors il ne se corrige pas, on le destituera de son rang de prévôt, et l'on mettra à sa place un autre qui en soit digne.

21. Si même ensuite il n'est pas tranquille et obéissant en communauté, on ira jusqu'à le chasser du monastère.

22. Cependant l'abbé songera qu'il doit rendre compte à Dieu de tous ses jugements, de peur que le feu de l'envie ou de la jalousie ne brûle son âme.

Commentaire :

Je poursuis la réflexion commencée hier, autour du mal qui se fait passer pour l'autre. Comment ne pas être le jouet de cet esprit malin qui nous fait passer pour autre que nous sommes, ou bien qui nous fait imaginer que nous sommes un autre, comme en ce chapitre ? Il peut être bon de repérer pour soi-même ces situations de confusion ou nous consentons à nous faire passer pour un autre. Elles ne seront pas nécessairement les mêmes pour tous. Elles se nichent souvent dans nos lieux de faiblesses, dans ces limites que l'on a du mal à assumer vraiment, et dont on se cache en quelque sorte. Cela pourra être des paroles dites comme des demi-vérités, qui ne sont pas nettes, ou des attitudes trompeuses qui dissimulent nos manques sous des apparences de bien. Nous pouvons parfois aussi être dupe de mauvais penchants. Ceux-ci nous sortent de nous-mêmes et veulent nous entrainer à être un autre que nous ne sommes pas : le désir de briller par nos connaissances ou nos savoirs, ou bien le désir de savoir tout sur tout pour être comme tout le monde, ou l'inverse, le refus de s'ouvrir au nom d'une certaine idée de l'humilité, le retrait dans une solitude idéalisée par peur de la relation... Autant de mouvements qui se caractérisent par un certain excès ou nous ne sommes plus nous-mêmes, mais un autre sans un véritable visage. Il n'est pas rare alors de percevoir, dans cette recherche qui nous tire hors de nous-mêmes, des tensions, une absence de goût, une grande fatigue. Notre corps qui nous relie au réel, le nôtre, est alors souvent un bon indicateur de quelque chose qui ne va pas. L'écouter, sans tomber dans l'autre excès de s'écouter, peut nous alerter. Parler avec quelqu'un, avec le père spirituel ou l'abbé sera précieux pour débusquer ce mouvement qui n'est pas juste, et qui veut nous faire passer pour un autre. C'est humilité, c'est retour à notre humus que d'oser parler, même s'il peut nous en coûter tant nous ne sommes pas toujours fiers d'être arrivés ou nous sommes arrivés. Mais une bonne distance peut enfin se faire entre celui que nous sommes vraiment et cet autre que nous pensions devoir devenir. L'ouverture du cœur est une voie royale de la connaissance de soi. Dans le passage que Benoit nous donne à entendre ce matin, nous trouvons un autre outil précieux, c'est l'observance de la règle. Tout simplement. Comme dans le 8° degré de l'humilité, l'observance de la règle commune, sans recherche d'originalité ni de singularité est un bon garde-fou, contre cet autre illusoire que le mauvais esprit nous presse de devenir. Faire avec les autres frères, faire pour eux et comme eux pour grandir en ce que nous sommes vraiment: des moines en devenir, c'est-à-dire des êtres en quête d'unification et des fils aimés de Dieu notre Père, qui voit le cœur et qui nous aime tel que nous sommes.

Voir le commentaire de Père Abbé Luc / Chapitre 65 01-10 Du prévot du monastère. écrit le 07 novembre 2023
Verset(s) :

1. Trop souvent il est arrivé que l'ordination d'un prévôt engendre de graves conflits dans les monastères.

2. Il en est en effet qui s'enflent d'un méchant esprit d'orgueil et qui, estimant être de seconds abbés, usurpent le pouvoir, entretiennent des conflits et mettent la dissension dans les communautés,

3. surtout dans les lieux où le prévôt reçoit l'ordination du même évêque et des mêmes abbés qui ordonnent l'abbé.

4. Combien cela est absurde, il est facile de s'en rendre compte : dès le début, dès son ordination, on lui donne matière à s'enorgueillir,

5. ses pensées lui suggérant qu'il est soustrait à l'autorité de son abbé,

6. puisque « toi aussi, tu as été ordonné par les mêmes qui ont ordonné l'abbé. ;»

7. Il en résulte envies, disputes, médisances, rivalités, dissensions, destitutions,

8. et ainsi, abbé et prévôt étant de sentiments opposés, il est inévitable que leurs âmes soient en danger, tant que durent ces dissensions,

9. et leurs subordonnés courent à leur perte, du fait qu'ils flattent leurs partisans.

10. La responsabilité de ce dangereux fléau pèse au premier chef sur ceux qui se sont faits les auteurs d'un tel désordre.

Commentaire :

A quelques jours de sa fête, ce chapitre ne concerne en rien notre frère Hubert, Dieu Merci I C'est l'occasion pour moi de lui redire en notre nom à tous, notre gratitude, et plus personnellement merci pour sa présence active à mes cotés pour questionner parfois ce que je peux faire ou dire, pour proposer aussi des choses pour le bien de la communauté.

Si la situation de conflit entre l'abbé et le prieur n'est à souhaiter pour aucune communauté monastique, il reste cependant que ce chapitre a sa place dans notre règle. Il joue le rôle de garde-fou pour prévenir de possibles dangers. II y a peu, je lisais un article du philosophe E. Falque, sur le roman de Bernanos, « Sous le soleil de Satan » paru en 1926. Il réfléchissait sur le mal, et parlait du mal en tant "qu'il se fait passer pour l'autre". Je vous cite sa réflexion plus globale qui aidera à comprendre : « Non pas que le mal ne soit que simple « privation du bien » (Thomas d'Aquin), ou encore « enfoui dans l 'abime qu'est Dieu même » (Schelling), mais en cela qu'il est toujours celui qui "se fait passer pour l'autre" : Dieu quand il est diable, lumière quand il est ténèbres, bonté quand il est malice. La confusion est son meilleur mode de manifestation" (E. Falque, « Le baiser de Satan - Colloque Bernanos, ICP, 20 octobre 2023). J'ai !'impression que cette approche du mal correspond bien à ce qui se joue dans cette contradiction entre le prieur et l'abbé. Le prieur consciemment ou non est habité par un mouvement qui veut le faire se passer pour l'abbé. II n'est pas l'abbé, mais il se pense digne de l'être et veut interagir dans des domaines qui ne sont pas de sa compétence. Intérieurement, il s'est laissé gagner par l'illusion d'être l'abbé. Le mal a eu raison de sa raison, en lui faisant adopter une position folle et génératrice de zizanie. Et certainement, le faisait-il dans le désir de bien faire.

Cette approche du mal est intéressante à considérer dans notre vie quotidienne. Le mauvais esprit se fait souvent passer pour un autre en nous suggérant des pensées, ou en nous entrainant dans des attitudes bonnes en apparence, mais qui se révèlent être mauvaises pour nous. Elles peuvent devenir soient source de conflits ou encore nous mener à des impasses. Sous des apparences de bien, de lumière ou de bonté, se cachent en fait : d'autres intentions moins avouables. Le proverbe populaire le résume de manière lapidaire : "Qui fait l'ange fait la bête". II nous revient à chacun d'être vigilant jusque dans les plus petites choses. C'est l'art du discernement auquel nous sommes conviés pour faire de notre vie, une vie de plus en plus docile au souffle de l'Esprit. Je poursuivrai demain cette réflexion.

Voir le commentaire de Père Abbé Luc / Chapitre 64 16-22 De l'ordination de l'abbé écrit le 31 octobre 2023
Verset(s) :

16. Il ne sera pas agité et inquiet, il ne sera pas excessif et obstiné, il ne sera pas jaloux et soupçonneux à l'excès, car il ne serait jamais en repos.

17. Dans les ordres qu'il donne, il sera prévoyant et réfléchi, et que l'œuvre qu'il commande soit selon Dieu ou selon le siècle, il usera de discrétion et de mesure,

18. en songeant à la discrétion de saint Jacob, qui disait : « Si je fais peiner davantage mes troupeaux à marcher, ils mourront tous en un jour. »

19. Prenant garde à ce texte et aux autres sur la discrétion, mère des vertus, il mettra de la mesure en tout, en sorte que les forts aient à désirer et que les faibles n'aient pas à prendre la fuite.

20. Et surtout, qu'il garde en tous ses points la présente règle,

21. afin qu'après avoir bien servi, il entende le Seigneur lui dire, comme au bon serviteur qui distribua en son temps le froment à ses compagnons de service :

22. « En vérité, je vous le dis, il l'établira sur tous ses biens. »

Commentaire :



« Que l’œuvre qu'il commande soit selon Dieu ou selon le siècle, il usera de discrétion et de mesure ». Dans le passage entendu, par trois fois revient le mot « discrétion» et par deux fois le mot « mesure ». Discretio, le mot latin signifie « séparation, triage, distinction », en lien avec le verbe « discerner ». Mesure, ce mot traduit ici le verbe latin temperare qui signifie « combiner, allier, modérer, équilibrer, tempérer». Discrétion et mesure, « discemement et eguilibre » pourrions-nous aussi traduire aujourd'hui, pour rester au plus proche du sens voulu par st Benoit. En effet, le mot «discrétion» a pris aujourd'hui de plus en plus le sens de « retenue », « effacement». Comme Jacob, l'abbé est invite a faire preuve de discernement et d'équilibre. Jacob rentre au pays après la dispute avec son frère Esaü à qui il a usurpé la bénédiction de leur père Isaac. Il craint beaucoup !'ire de son frère. Il fait preuve de discernement en s'avançant avec prudence, et même stratégie, a la rencontre de son frère. En signe d'apaisement, il a fait précéder l'ensemble de sa famille, de plusieurs lots de troupeaux de chèvres, de boucs, de brebis, de chameaux comme autant de présents. Et lorsqu'il va a la rencontre de son frère, il passe devant ses femmes et ses enfants, et il se prosterne devant son frère. A celui-ci qui s'étonne de tant de présents et de déférence, il lui répond humblement :

« .J'ai pu paraitre devant ta face comme on parait devant la face de Dieu, et tu t 'es montre bienveillant envers moi » (Gn 33, I 0). L'humilité a aidé Jacob à discerner la juste attitude a avoir vis-a-vis de son frère. Puis Jacob fait preuve d'équilibre lorsqu'il contient le désir d'Esaü qui veut se mettre en marche rapidement. «Monseigneur sait que !es enfants sont fragiles, et j 'ai à ma charge des brebis et des vaches qui allaitent. Si on presse l'allure un seul jour, tout le petit bétail meurt » (Gn 33, 13). Discernement et équilibre, deux qualités que Benoit recommande a l’abbé : discernement, pour savoir repérer !es situations ainsi que les différences entre les frères, de telle sorte que chacun puisse aller au meilleur de lui-même, et apporter sa pierre à !'édifice communautaire. Equilibre pour que tous puissent marcher ensemble sans que le rythme commun n'écrase l'un ou ne rende impatient un autre. Discernement et équilibre, deux réalités qui ne peuvent qu'être reçues par l'abbé comme par chacun de nous, comme un don de l'Esprit. L'Esprit nous partage ainsi ce qui fait sa vie: donner a chacun des dons pour le service de tous, et faire qu'ensemble nous marchions en frère. Viens Esprit Saint réaliser ton oeuvre de discernement et d'unité au sein de notre communauté.

Voir le commentaire de Père Abbé Luc / Chapitre 64 07-15 De l'ordination de l'abbé écrit le 28 octobre 2023
Verset(s) :

7. Quant à l'abbé qui a été ordonné, il songera toujours à la charge qu'il a reçue et à celui auquel il devra « ;rendre compte de sa gestion ;».

8. Il saura qu'il doit plutôt « servir que régir ».

9. Il doit donc être « savant » dans la loi divine, pour savoir et avoir d'où « tirer le neuf et l'ancien », chaste, sobre, miséricordieux.

10. Et que « la miséricorde l'emporte toujours sur le jugement », afin qu'il obtienne pour lui le même traitement.

11. « Qu'il haïsse les vices et qu'il aime les frères. »

12. Dans ses réprimandes même, qu'il agisse prudemment et « ;sans rien de trop », de peur qu'en voulant trop gratter la rouille, il ne brise le vase.

13. Il ne perdra jamais de vue sa propre fragilité, et se souviendra « ;qu'il ne faut pas écraser le roseau cassé. »

14. Nous ne voulons pas dire par là qu'il permettra aux vices de se développer, mais qu'il les retranchera prudemment et avec charité, suivant qu'il lui semblera opportun pour chaque individu, comme nous l'avons déjà dit.

15. Et il s'efforcera « d'être plus aimé que redouté ».

Commentaire :



"Plutôt servir que régir", La charge de l'abbé comme un service. Cela est une constante dans la Règle et notamment dans ce chapitre. Benoit y insiste fortement dans la ligne de

l'Evangile. Il est intéressant de voir que dans ce chapitre il se réfère à deux paraboles : la première évoquée ce matin par la mention « il devra rendre compte de sa gestion", renvoie à

celle de l'intendant infidèle qui fut dénoncé pour avoir dilapidé les biens de son maitre (Lc 16.1-8) La deuxième qui conclue ce chapitre renvoie à la parabole du serviteur que le maitre a son retour trouve fidèle à son service de donner la nourriture en temps voulu aux gens de sa maison (Mt 24,45-51) Deux figures de serviteur: la première laisse entendre que le serviteur

peut dilapider les biens de son maitre, et la seconde montre que sa fidélité sera récompensée par le maitre. Appliquée à l'abbé, ces figures viennent sans concession remettre devant ses yeux

!'importance de la charge a lui confiée. L'abbé a la charge des gens et des biens de la maison du maitre. Il doit administrer de telle façon que le maitre a son retour ne soit pas lésé, ni fâché de mauvais traitements que l'abbé aurait infligés a ses frères. Ce contexte évangélique pour considérer la fonction de l'abbé est heureux. Il invite l'abbé et ses frères à porter leurs regards

sans cesse vers le Christ. C'est lui que nous désirons servir, chacun a notre poste. L'abbé qui administre la vie du monastère n'est rien sans la collaboration des frères. Car ensemble, nous cherchons à demeurer en état de veille pour le jour ou il viendra.... Veille dans la prière, veille dans la charité, veille dans le partage, veille dans la simplicité de vie pour qu 'apparaisse toujours plus significative notre attente du Christ... et que brille notre Espérance dans un monde qui en manque cruellement. Ainsi chacun à notre place, nous sommes des éveilleurs, des témoins de l'Espérance, pour l'oeuvre que Dieu veut mener a son accomplissement. Laissons cette Espérance éclairer notre quotidien qui n·a pas sa fin en lui-même.

Voir le commentaire de Père Abbé Luc / Chapitre 63 10-19 De l'ordre de la communauté écrit le 14 octobre 2023
Verset(s) :

10. Les jeunes honoreront leurs anciens, les anciens aimeront leurs inférieurs.

11. En ce qui concerne les noms dont on s'appellera, il ne sera permis à personne d'en appeler un autre par son nom tout court,

12. mais les anciens appelleront les jeunes du nom de frères, tandis que les jeunes donneront à leurs anciens le titre de nonni, qui signifie « ;Révérend Père ;».

13. Quant à l'abbé, puisqu'il apparaît comme le représentant du Christ, on lui donnera les titres de seigneur et d'abbé, non qu'il se les arroge de lui-même, mais pour l'honneur et l'amour du Christ.

14. Mais de son côté, il devra y songer et se conduire de façon à être digne d'un tel honneur.

15. Chaque fois que les frères se rencontrent, le plus jeune demandera la bénédiction de l'ancien.

16. Au passage d'un supérieur, l'inférieur se lèvera et lui offrira le siège où il était assis. Et le plus jeune ne se permettra pas de se rasseoir avant que son ancien ne le lui commande,

17. pour faire ce qui est écrit : « Prévenez-vous d'honneurs mutuels. ;»

18. Les petits enfants et les adolescents, à l'oratoire et aux tables, garderont leur rang en bon ordre.

19. Mais au dehors et partout, ils seront surveillés et maintenus dans l'ordre, jusqu'à ce qu'ils arrivent à l'âge où l'on comprend.

Commentaire :



Sur le chemin qui nous fait passer de la fraternité rivalité a la fraternité solidarité, il y a surement pleins de moyens offerts a chacun de nous. St Benoit en propose plusieurs ici dans cette fin de chapitre. Honorer, aimer, respecter. Si nous ne sommes plus une communauté organisée selon l'ordre de l'entrée, nous pouvons faire nôtres ses recommandations. Honorer l'autre, se prévenir d'honneurs mutuels, en n'hésitant pas à laisser sa place, ou en montrant de !'attention a tenir une porte par ex, en s'intéressant a ses joies, ses recherches et mille autres choses. Transformer la rivalité qui pourrait parfois nous habiter le coeur en rivalisant d'honneur vis-a-vis des autres. Sans tomber dans quelque chose de superficiel, laissons grandir cet élan ou nous essayons de mettre l'autre a l'honneur, cela va transformer notre coeur en le décentrant du souci de soi envahissant. Aimer, st Benoit invite les anciens à aimer les jeunes et a les appeler frères. Là où le rang d'ancien pourrait !es tenir en distance, voire en surplomb vis-a-vis des plus jeunes, !es anciens sont invites a se situer a égalité en les tenant pour « frère »... en se situant comme des frères. Lorsque dans l'évangile, les disciples rivalisaient entre pour savoir qui était le plus grand, Jésus leur a rappelé que le plus petit était le plus grand et que le serviteur était le premier. St Benoit invite ceux qui sont en position haute de par leur rang a se situer comme des frères au milieu de leur frères. Le mouvement de l'amour dans une communauté va jusque-là: que chacun de nous en ce qu'il peut être en position haute, de par sa responsabilité, de par sa fonction, de par ses talents ou compétences, veille a ne pas faire sentir aux autres une quelconque supériorité. Mais qu'il sache rejoindre chacun de ses frères, comme un frère. Cette attitude fraternelle aplanira la route de bien des complications ou de conflits de susceptibilité. Respecter. St Benoit met en avant le respect qui sera témoigné par les jeunes aux anciens, quand ils demandent la bénédiction ou cèdent leur place. Le respect est cette attitude que nous

pouvons tous cultiver en donnant tous son espace à l'autre. Vis-a-vis d'un ancien en patientant alors qu'il marche plus lentement, en le servant s'il ne le peut plus, en consentant a faire attention a son rythme. Vis-a-vis d'un frère en responsabilité, le respect sera de ne pas marcher sur ses plates­ bandes, si on a des suggestions, de les lui faire avec délicatesse sans prétendre tout savoir. .. le

respect vis-a-vis de tout frère sera de se mettre à l'écoute de ce qu'il est, non par peur, mais par désir de le rejoindre, de mieux l'accueillir. Vivre ainsi selon l'ordre de la charité, comme nous y invite le coutumier, nous aidera a faire toutes !es rivalités toujours promptes à renaitre. Le Seigneur désire bien mieux pour nous. Qu'il nous vienne en aide.

Voir le commentaire de Père Abbé Luc / Chapitre 62 01-11 Des prêtres du monastère écrit le 12 octobre 2023
Verset(s) :

1. Si un abbé demande qu'on lui ordonne un prêtre ou un diacre, il choisira parmi les siens quelqu'un qui soit digne d'exercer le sacerdoce.

2. Quant à celui qui sera ordonné, il se gardera de l'élèvement ou de la superbe,

3. et il ne se permettra rien en dehors de ce que l'abbé lui commande, sachant qu'il sera soumis bien plus encore aux sanctions de la règle.

4. Et sous prétexte de sacerdoce, il n'oubliera pas l'obéissance et la discipline de la règle, mais de plus en plus il progressera vers Dieu.

5. Il regardera toujours comme sienne la place qu'il avait de par son entrée au monastère,

6. sauf pour le service de l'autel et si le choix de la communauté et la volonté de l'abbé voulaient le promouvoir en raison du mérite de sa vie.

7. Toutefois il saura garder pour lui-même la règle établie pour les doyens et prévôts.

8. S'il se permet d'agir autrement, on ne le jugera pas comme prêtre, mais comme rebelle.

9. Et si, après de nombreux avertissements, il ne se corrige pas, on fera même intervenir l'évêque comme témoin.

10. Si même alors il ne s'amende pas, ses fautes devenant notoires, on le mettra à la porte du monastère,

11. si toutefois son obstination est telle qu'il ne veuille pas se soumettre ou obéir à la règle.

Commentaire :



II est impressionnant de voir que dans ce chapitre, qui n'a pas son équivalent dans la RM. Benoit n'envisage la question du prêtre que sur le mode disciplinaire. Pas de développement sur son rôle, sur sa mission, mais uniquement une attention sur sa manière de vivre en conformité ou non avec la RB. Ces lignes mettent ainsi en relief un double regard sur le prêtre au monastère, à la fois quelqu'un qui est investi d'une haute dignité et à la fois quelqu’un qui est comme tout le monde. Sa dignité est en fait rapidement suggérée lorsque Benoit dit qu'on choisira « quelqu'un qui soit digne d'exercer le sacerdoce". Mais c'est surtout la condition commune à tous les moines qui est rappelée. Son sacerdoce ne lui donne en rien une capacité à mieux vivre la vie monastique et encore moins à des privilèges. Il l'oblige plutôt à une plus grande vigilance et humilité pour se soumettre comme les autres frères aux exigences de la RB. Le primat est donné à sa conversion monastique.

Cette insistance de Benoit me fait penser au fort accent mis sur la formation humaine, par le dernier document sur la formation des futurs prêtres, « le don de la vocation presbytérale », promulgué par le pape François, en 2016. Dans cette nouvelle Ratio de formation des prêtres, le pape François invite les candidats et les formateurs à honorer la prise en compte de toute la personne. Je cite : « L'appel divin interpelle et implique l'être humain 'concret ' (... ) Une spiritualité juste et harmonieuse exige une humanité bien structurée. En effet, comme le rappelle St Thomas d'Aquin, « la grâce présuppose la nature », elle ne la remplace pas mais la perfectionne. il est donc nécessaire de cultiver l'humilité, le courage, le sens pratique, la magnanimité de coeur, la droiture du jugement et le discernement, la tolérance et la transparence, l'amour de la vérité et l'honnêteté » (n° 93). Ces lignes qui invitent à l’unification de l' être pour les futurs prêtres diocésains, me semblent tout aussi valable pour un prêtre dans un monastère. Ce dernier est appelé à unifier sa vie humaine et spirituelle, sa vie de consacré et sa vie de ministre de la Parole et des sacrements. C'est dans cette unification que le ministère presbytéral a le plus de chance d'être fécond, pour le frère prêtre lui-même comme pour la communauté qu'il sert. S'agit-il d'une exigence supplémentaire pour le moine prêtre ? En quelque sorte oui, pour un service plus heureux des frères et des hôtes. Mais cette unification de la personne n'est-elle le but recherché par tout moine ? Dans le désir d'être un peu plus lui­ même en vérité, chacun n'est-il pas entrainé à œuvrer et à s'offrir à la grâce qui veut nous unifier avec nos dons, mais aussi nos faiblesses ? « Unifie mon coeur, unifie ma vie », pouvons-nous demander avec le psalmiste.

Voir le commentaire de Père Abbé Luc / Chapitre 61 05-14 Des moines etrangers, comment Jes recevoir écrit le 11 octobre 2023
Verset(s) :

5. Si par la suite il veut se fixer définitivement, on ne s'opposera pas à cette volonté, surtout que l'on a pu apprécier sa vie au temps où il recevait l'hospitalité.

6. S'il s'est montré exigeant ou vicieux au temps où il recevait l'hospitalité, non seulement il ne faut pas l'agréger au corps du monastère,

7. mais encore on lui dira poliment de s'en aller, de peur que sa misère ne vicie encore les autres.

8. S'il ne mérite pas d'être mis dehors, non seulement, s'il le demande, on le recevra et on l'agrégera à la communauté,

9. mais encore on le persuadera de rester, pour que son exemple instruise les autres,

10. et parce qu'en tout lieu on sert le même Seigneur, on est au service du même roi.

11. Si même l'abbé voit qu'il en est digne, il pourra le mettre à une place un peu plus élevée.

12. D'ailleurs ce n'est pas seulement le moine, mais aussi ceux de l'ordre des prêtres et de celui des clercs dont il a déjà été question, que l'abbé peut établir à une place supérieure à celle de leur entrée, s'il voit que leur vie en est digne.

13. Mais l'abbé se gardera de jamais recevoir à demeure un moine d'un autre monastère connu, sans le consentement de son abbé ou sans lettre de recommandation,

14. car il est écrit : « Ce que tu ne veux pas que l'on te fasse, ne le fais pas à autrui. ;»

Commentaire :

La facilite avec laquelle Benoit s'ouvre a l'idée d'agréger un moine d'un autre monastère peut nous déconcerter a priori. « On le persuadera de rester » nous semble délicat à manier aujourd'hui. Paradoxalement, Benoit qui a mis en évidence le voeu de stabilité n'est pas gênée par l'idée de faciliter le changement de communauté d'un frère dont on aurait perçu les qualités. Est-ce qu'avec le temps, nous avons acquis un sens plus aigu de la stabilité, entendu plus comme le lien étroit avec une communauté que le fait de demeurer dans un même lieu?

S'il est vrai que « l'on sert partout le même Seigneur", nous mesurons le prix des liens qui se tissent entre nous et qui nous font frères les uns des autres. Ce lien a de quoi nous étonner toujours il me semble. II n'a pas la spontanéité d'un lien d'amitié qui réunit deux personnes sans qu'elles sachent toujours bien pourquoi. Du coup, il n'en a pas non plus l'aisance ou la fraicheur, avec la note de joie naturelle qui habite deux amis quand ils se retrouvent. Non le lien de la fraternité a quelque chose de moins colorée, de plus rude peut-être. En quelque sorte, il est assez banal. Nous sommes frères parce nous partageons habituellement le même toit et la même table. Ensemble, nous portons le même projet de mener la vie monastique en ce lieu pour témoigner de la grâce du Christ, offerte pour le louer et apprendre a nous aimer. Là où la fraternité biologique, celle du sang, est toujours derrière nous, la fraternité monastique, liée à notre profession commune de servir ici un même Seigneur, est toujours devant nous. En quelque sorte, elle est toujours en construction, jamais acquise une fois pour toute. De ce fait elle est fragile. Mais elle est belle aussi, d'une beauté austère, car elle vient nous chercher chacun pour nous révéler des capacités à aimer insoupçonnées. II s'agit d'apprendre à nous ouvrir sans cesse à l'autre, alors que rien, sinon le Christ, nous engage à le vivre. Sortir de nous-même pour faire attention, pour poser un geste, pour dire une parole, faire un billet d'absence. En soi, rien ne nous y oblige. Mais l'appel est là qui nous invite a nous décentrer de nous-même pour aller vers

le frère, sans autre prétention que de lui faire du bien, et sans autre attente que de servir la vie qui circule entre nous. Car c'est le mystère de la fraternité qui nous réunit : si on ne la soigne pas, elle peut s'étioler très vite et la vie commune devenir insipide, voire intenable. Mais si chacun laisse toujours ouverte une fenêtre sur les autres, il l'écoute de leurs besoins, de leurs attentes, simplement pour être avec, alors quelque chose de profond se déploie entre nous. Mystérieuse alchimie de cette vie partagée entre hommes qui se découvrent de plus en plus frères, sous le regard d'un même Père des Cieux. N'ayons pas peur d'une certaine austérité de vie fraternelle, n'est-ce pas le prix de son authenticité et de sa profondeur?

Voir le commentaire de Père Abbé Luc / Chapitre 61 01-04 Des moines etrangers, comment les recevoir écrit le 10 octobre 2023
Verset(s) :

1. Si un moine étranger arrive de provinces lointaines, s'il veut habiter au monastère en qualité d'hôte

2. et se contente de la coutume locale telle qu'il la trouve, sans troubler le monastère par ses vaines exigences,

3. mais en se contentant simplement de ce qu'il trouve, on le recevra aussi longtemps qu'il le désire.

4. S'il fait quelque critique ou remarque raisonnable, avec une humble charité, l'abbé examinera prudemment si le Seigneur ne l'aurait pas envoyé précisément pour cela.

Commentaire :

« S'il fait quelque critique ou remarque raisonnable, avec une humble charité, l'abbé examinera prudemment si le Seigneur ne l'aurait pas envoyé précisément pour cela. » Cette notation de Benoit est précieuse a deux titres : elle donne des indications sur la façon de faire des remarques et elle incite a discerner ce que le Seigneur peut nous dire de bien des manières.

La façon de faire des remarques : celles-ci doivent être « raisonnables », et exprimées avec une « humble charité "· Une remarque raisonnable rejoint la réalité. Elle n'est pas faussée par la charge émotionnelle qu'on y met. Celle-ci manifestera plus la colère ou l'impatience qu'un souci de nommer une difficulté à résoudre. En faisant une remarque, le risque est que prédomine mon interprétation des faits plutôt que la réalité des faits eux-mêmes. « Oui, tu as fait cela, parce que tu voulais cela ». Ici, il vaut mieux interroger: « il s'est passé cela, mais pourquoi, ou à cause de quoi ? » Et souvent, si !'on prend simplement le temps d'interroger et d'écouter, on se rend compte que la raison d'une faute était souvent bien différente de ce que j'avais imaginé. Oui, gardons-nous de projeter trop vite sur l'autre notre interprétation des choses. Avec « une humble charité ». telle est la deuxième caractéristique d'une remarque juste. Non seulement elle n'est pas dite sous le coup de l'émotion, mais elle est dite avec le recul de celui qui apprend humblement à s'examiner d'abord lui-même. Qui suis-je pour dire cela a mon frère? Ensuite, la charité. C'est-a-dire que si je dis quelque chose, c'est vraiment parce que j'aime mon frère. Je ne veux pas lui faire la leçon, encore moins régler mes comptes avec lui. Mais je désire pour lui le meilleur. ainsi que le plus juste pour la communauté.

Demeurer vigilant pour examiner si le Seigneur ne viendrait pas nous parler a travers une remarque. L' abbé, mais aussi tous les frères, nous devons cultiver cette attention, et communautaire et personnelle. Si on m'a dit cela, si on a repéré tel défaut au sujet de la communauté : est-ce que je vais me cabrer pour me défendre ou bien est-ce que je vais simplement écouter. Écouter pour tenter de discerner. La question qui nous est peut-être posée en filigrane serait : est-ce que je suis désireux de progresser en saisissant toutes les occasions, même les moins agréables, ou bien est-ce que je suis en recherche plus ou moins consciente d'un confort qu'il ne faut surtout pas déranger. Notre manière de réagir à une remarque est à cet égard un bon indicateur de notre disposition intérieure. Oui, n'ayons pas peur des remarques raisonnables, faites avec humilité. Sachons v discerner une parole pour nous.