Homélies
Liste des Homélies
Année ABC - Fête de st Joseph - 19 Mars 2003
Sam 7 4-16; Rom 4 13-22; Mt 1 16-24
Homélie du F.Guillaume
Il est d’usage, quand on doit prêcher le jour de la fête de Saint Joseph de ne pas séparer cette grande figure de celle de Marie et de la Sainte Famille, tout comme l’on ne sépare jamais Marie de son Fils Jésus, en bonne théologie mariale. L’évangile retenu par la liturgie aujourd’hui nous y invite d’ailleurs, avec l’épisode de Jésus perdu et retrouvé au Temple de Jérusalem, et nous nous y arrêterons donc, mais auparavant il me semble bon de méditer sur la place de Saint Joseph dans l’histoire du salut, à partir des 2 premières lectures qui soulignent l’inscription de Jésus, fils de Joseph et de Marie, dans l’histoire de tout un peuple, à travers des descendances, des généalogies. Joseph, en effet, avant d’être père, a lui-même été un fils : fils de David, fils d’Abraham, fils d’Adam, fils de Dieu.
Fils de David, Joseph appartient ainsi à une descendance royale. Par la nomination qu’il confère à Jésus, il transmet cette filiation royale. La 1ère lecture nous rapporte la prophétie de Nathan à David, à propos de la promesse de Dieu : l’un de ses descendants sera Roi pour toujours, cette royauté sera stable à jamais. Joseph est le dernier descendant mortel de la généalogie davidique. Mortel, donc encore atteint par l’instabilité et l’impermanence, alors que le Christ-Jésus, le Messie annoncé et accueilli sera reconnu comme Roi pour toujours, régnant sur une Royauté Nouvelle et Eternelle. Cette Royauté sera pleinement manifestée à l’occasion de sa Passion et de sa Résurrection. Joseph, en ce sens, tout comme Jean-Baptiste, est à la jointure entre les 2 Alliances : l’ancienne et la nouvelle. La paternité qu’il exerce envers Jésus est signe d’une paternité autre que le Christ vient révéler aux hommes, en désignant Dieu comme Abba, son Père et Notre Père. C’est déjà tout le sens inscrit en filigrane dans la scène de l’évangile d’aujourd’hui. « ne savez-vous donc pas que je dois être chez mon Père ? »
Fils d’Abraham, Joseph l’est avant tout par sa foi et par sa justice. C’est ce que nous laisse entendre la seconde lecture par la voix de Saint Paul. Joseph, témoin de l’espérance en Dieu, face à l’incroyable et déroutante parole divine. Tout comme son ancêtre dans la foi, espérant contre toute espérance, il a tenu bon et il n’a pas douté. Il a accordé sa confiance à l’ange et à Marie, alors qu’il était prêt à renoncer à sa fiancée par obéissance à la Loi. Merveilleuse liberté de Saint Joseph dans son obéissance à Dieu. Avant Saint Paul, il comprenait que l’accomplissement de la volonté de Dieu pour lui, dépassait la simple observance d’un précepte de la Loi. Comme Abraham, prêt à sacrifier son fils Isaac au Mont Moriya, et avec lui son projet de paternité, Joseph, homme juste et droit, est prêt à sacrifier son projet conjugal avec Marie. Et au moment même où il va accomplir ce sacrifice, il retrouve son épouse dans une promesse infiniment plus riche, plus mystérieuse et plus féconde aussi. Car la descendance d’Abraham et de Sara fut charnelle : Isaac épousera Rebecca et ils auront des enfants et de nombreux petits-enfants. La descendance de Jésus qui ne se maria pas est d’ordre spirituelle et ecclésiale. Saint Paul, nous le savons dans l’épître aux Ephésiens où il expose sa pensée sur le sacrement du mariage, compare avec audace et grande profondeur théologique, l’alliance du mari et de la femme à celle du Christ et de l’Eglise. « Maris, aimez vos femmes comme le Christ a aimé l’Eglise et s’est livré pour elle : il a voulu la rendre Sainte, en la purifiant avec l’eau qui lave et cela par sa Parole. Il a voulu se la présenter à lui-même splendide, sans tâche ni ride, ni aucun défaut : il a voulu son Eglise Sainte et irréprochable. C’est ainsi que le mari doit aimer sa femme… »
Et comment ne pas penser, en écoutant ce texte, à l’amour que Joseph et Marie ont dû éprouver l’un vis-à-vis de l’autre, dans une totale vérité et non moins totale chasteté ?
Joseph, fils d’Adam, fils de Dieu. C’est ainsi que l’évangéliste St Luc achève la remontée généalogique de Jésus, alors que St Matthieu la faisait descendre depuis Abraham. Par cette mention d’Adam (et sous-entendue par celle d’Eve), l’évangile veut souligner l’inscription de Jésus dans l’humanité tout entière, et cette inscription passe par Joseph et Marie. Ensemble, ils ont connu les joies, les soucis, les difficultés de tous les parents, face à la croissance et à l’éducation de leurs enfants. Et nous pouvons retenir particulièrement le détail de l’évangile d’aujourd’hui : l’angoisse partagée par Marie et Joseph, dans leur recherche de Jésus perdu dans la foule à Jérusalem. D’autres passages de l’évangile nous parlent discrètement de cette humanité simple et réelle de la famille de Jésus, « fils du charpentier de Nazareth, frère de Jacques, Joseph, Simon et Jude, et dont les sœurs sont toutes de chez nous … » A chaque fois, c’est pour marquer l’étonnement devant la personne même de Jésus, sa sagesse, sa parole, son comportement souvent incompréhensible. « D’où lui vient cette sagesse ? N’a-t-il pas perdu la tête ? » Ses proches sentent bien un écart, une distance, malgré leur familiarité avec lui. Et c’est bien là la confrontation au mystère de l’Incarnation qui est en jeu, et qui ne cesse de se répéter à chaque génération, jusqu’à nous. Jésus, cet homme si semblable à nous et si différent pourtant, cet ami déroutant, comme le titre du livre de Mgr Deniau, évêque de Nevers. Oui, Jésus a dû être un enfant bien déroutant pour Joseph et pour Marie, et cependant il fut la chance de leur vie réussie, de leur vie de sainteté, dans la grâce et l’obéissance de leur foi.
Réjouissons nous donc, chères sœurs et chers frères, dans la communion des saints, en ce jour béni où nous célébrons les merveilles que le Seigneur a accomplies par l’intermédiaire de son serviteur humble et fidèle Joseph, fils de David, fils d’Abraham, fils d’Adam, fils de Dieu, et ne doutons pas qu’il a dû chanter bien des fois avec son épouse Marie le même cantique d’action de grâces :
Magnificat, magnificat ! (2003-03-19 -Venières)
Mercredi des CENDRES
Jl 2, 12-18 ; 2Co 5,20-6,2 ; Mt 6, 1-6, 16-18
homélie du Père Abbé Luc
Frères et soeurs,
Ce matin, ce n’est pas la trompette qui retentit pour nous comme au temps de Joël, le prophète, pour annoncer un jeûne sacré...Non, c’est la Parole de Dieu qui nous est adressée de façon insistante, comme un appel pressant : “Revenez à moi de tout votre coeur dans le jeûne, les larmes et le deuil! Déchirez vos coeurs!!!” Et Paul poursuit en écho : “Au nom du Christ, nous vous le demandons, laissez-vous réconcilier avec Dieu”. Ainsi plus qu’une trompette, c’est la voix de notre Père que nous sommes invités à entendre...
Oui frères et soeurs elle est étonnante cette voix qui nous appelle. Qui est-il notre Dieu pour nous interpeller de la sorte?...Quel est son désir pour nous quand il nous demande de déchirer nos coeurs ? Qui sommes-nous pour entrer dans ce chemin un peu fou aux yeux humains, chemin de prière et de jeûne, chemin de partage avec les pauvres ? A quelle relation avec lui, Dieu notre Père nous appelle-t-il par ses prophètes et par l’apôtre Paul? Pourquoi Dieu nous parle-t-il ainsi ? Pourquoi semble-t-il si pressé de nous voir lui ouvrir nos vies? Autant de questions que posent ces textes et toutes notre liturgie de ce jour pour nous entraîner plus loin dans notre cheminement de foi.
Mystérieusement ces paroles témoignent du grand intérêt que Dieu nous porte, du grand intérêt qu’il a trouvé depuis le début et qu’il trouve encore, à nouer une relation avec nous...Ces paroles nous révèlent le désir profond de notre Père de nous voir partager sa vie...Ainsi depuis des siècles, il n’a cessé de venir à la rencontre d’Israël pour tisser avec Lui une alliance.....jusqu’à la venue de Jésus qui nous a redit ce désir de notre Dieu de marcher avec nous et de nous partager sa vie, sa tendresse jusque dans notre mort....Et depuis l’Eglise n’a cessé de transmettre cet appel insistant : “Revenez-à-moi”....jusqu’aujourd’hui où chacun de nous devient à son tour le dépositaire de ces paroles ...
Revenez à moi...Mais pourquoi revenir? Est ce que nous nous sommes éloignés ? Laissez-vous réconcilier avec Dieu...Mais est ce que nous nous sommes séparés de lui? L’Eglise qui nous propose ces textes chaque année nous invite simplement de nous laisser questionner par notre Dieu....Non pas à la manière d’un Dieu accusateur... Non, car notre Dieu est tendre et miséricordieux, lent à la colère et plein d’amour, renonçant au châtiment” nous a dit Joël, le prophète...Au début de ce carême, nous sommes invités à entendre notre Père nous redire son Amour, et son immense Tendresse...Seul son Amour est vraiment questionnant, seul son Amour peut venir en nous illuminer nos impasses et nous libérer de nos aveuglements, de notre péché...Notre Père n’a pas d’autre langage que cet Amour proclamé avec force par les prophètes, et manifesté sur une croix au Golgotha pour nous invités à faire un bout de chemin avec Lui...Car peut-être pécheurs, nous nous étions un peu arrêtés sur le bord de la route. Si la vie ne cesse de nous propulser en avant, il n’est pas rare que notre coeur, que notre amour de Dieu et des autres reste comme figé dans des schémas passés....Les jours passent qui nous conduisent vers la mort et cependant nous oublions souvent que nous sommes appelés à devenir des vivants, des personnes capables d’une relation toujours nouvelle avec notre Dieu et avec nos frères...Nous sommes appelés à naître ...
Appelés à naître, à renaître avec le Christ, marchons à sa suite durant ces quarante jours pour apprendre de lui, avec lui de quel amour le Père nous aime, et avec quel amour il désire tisser avec nous cette relation unique...Appelés à naître laissons enseigner par le Christ, écoutons sa Parole cette voix qui nous murmure dans le secret de notre chambre : “c’est maintenant le jour du salut”.(2003-03-05)
Année B - Baptême du Christ - 12-01-2003
Isaïe 55,1-11 ; 1 Jean 5,1-9 ; Marc 1, 7-11
Homélie du F.Guillaume
Frères et sœurs,
Ce qui fait le lien entre les 3 lectures que nous venons d’entendre, en cette liturgie de la fête du baptême du Christ, et ce qui a sans doute justifié leur choix, c’est la mention de l’eau dans chacun de ces trois textes. L’eau, le symbole fondamental que l’on retrouve dans les rites de toutes les religions du monde, avec son caractère ambivalent de vie et de mort, de fécondité et de dévastation : l’actualité de ces derniers jours, avec son cortège de catastrophes naturelles : inondations, cyclone, tempête est là pour nous le rappeler et nous inviter à la prière pour toutes les victimes.
Dans la 1ère lecture, l’eau est appelée à étancher la soif des exilés à Babylone, dans une grande exhortation consolante du prophète Isaïe à son peuple abattu. Une eau qui abreuve aussi la terre, la fait germer pour donner la semence au semeur et le pain à celui qui le mange. Une eau qui, pour Isaïe est le symbole même de la Parole de Dieu accomplissant sa mission.
Dans la 2ème lecture, l’eau, pour Saint Jean, rend témoignage, avec le sang et l’Esprit, que Jésus est le Fils de Dieu, et ce témoignage unique des 3 renvoie à celui que Dieu lui-même rend à son Fils, dans l’Esprit, ce qui annonce la scène de l’Evangile, quand Jésus sort de l’eau du Jourdain, après son baptême par Jean, et que la voix du Père se fait entendre et que l’Esprit descend sur lui sous la forme d’une colombe. Scène éminemment trinitaire qui inaugure l’Evangile de Saint Marc et sur laquelle il est bon de s’attarder un peu.
Remarquons qu’à la différence des 3 autres évangiles, Marc ne commence pas le sien par l’évocation des origines du Christ : origines sous la forme de généalogies et du récit de la naissance à Bethléem ou origine dans le sein du Père, du Verbe Eternel qui vient planter sa tente sur la terre des hommes.
Le commencement pour Marc, ce n’est pas l’origine, c’est la proclamation de la Bonne Nouvelle de Jésus-Christ, Fils de Dieu, et c’est la manifestation de l’identité de ce Jésus, Fils de Dieu, venu de Nazareth, une obscure bourgade de Galilée. Cette manifestation a lieu à l’occasion d’un événement très banal et populaire : le baptême dans les eaux du Jourdain, accompli par un homme reconnu comme prophète, que tous les autres évangélistes mentionnent aussi au début de leur écrit : Jean, le cousin de Jésus.
Saint Luc, nous le savons, dans les deux premiers chapitres de son évangile, a composé un parallèle très pensé théologiquement et très soigné littérairement entre Jean et Jésus. Son intention étant de marquer la rupture et la continuité entre deux époques de l’histoire du Salut : une ancienne et une nouvelle.
Saint Marc, lui, est beaucoup plus sobre, mais son intention théologique est bien aussi de souligner une opposition , de marquer une différence de nature entre deux baptêmes, entre deux manières d’être sauvé.
Avant que Jésus ne paraisse, on venait à Jean pour un baptême de conversion, en vue du pardon de leurs péchés. La démarche consistait en une confession de ces péchés, pour en être purifiés par l’eau et par le geste du baptiseur. C’était le rite qui accomplissait le salut, au sens où le baptisé retrouvait la santé et une juste relation avec Dieu qui pardonne et qui donne la vie.
En voyant Jésus venir à lui, Jean comprend que désormais, ce baptême de conversion dans l’eau va changer de nature. Ce qui sera premier, ce ne sera plus la confession des péchés, mais la confession de foi en Celui qui vient après lui et qui est plus puissant que lui. C’est cette confession de foi, dans l’Esprit, qui apportera le salut à celui, à celle qui la profèrera.
En un sens, ce commencement de l’Evangile de Marc est en accord profond avec la théologie paulinienne de la justification par la foi, et non par les œuvres, développée dans l’Epître aux Romains. Le baptême dans l’Esprit Saint apporté par Jésus n’est plus un rite de plongée dans l’eau, mais la plongée même dans le mystère de la vie et de la mort du Christ, une participation active à sa passion et à sa Résurrection.
L’eau du baptême sera peut-être encore nécessaire, pour sa richesse symbolique et évocatrice des grands événements de l’histoire du salut, mais elle ne sera plus suffisante, ni même première. Ce qui va constituer le baptême chrétien, c’est la foi en Jésus, Fils de Dieu, confessée par celui qui le reçoit, ou par ceux qui le présentent dans le cas des petits enfants. Ainsi, pour ces derniers, le baptême ne vient pas d’abord pour les laver d’une faute originelle qu’ils n’ont pas commise mais dont ils seraient solidaires depuis le péché d’Adam. On sait combien cette conception du baptême en lien avec le péché originel a marqué les mentalités et justifié la pratique de ce sacrement des enfants pour leur éviter la damnation éternelle… Le baptême des enfants se justifie bien plutôt dans la confession de foi au Fils de Dieu de ses parents, parrain et marraine et de la communauté chrétienne qui l’accueille. On peut se réjouir du renouveau de cette juste compréhension du baptême, dans l’Eglise après le Concile Vatican II.
Alors peut-être aussi, comprendra-t-on mieux le sens de la fête d’aujourd’hui, et le pourquoi du baptême de Jésus, lui qui n’avait pas de péché à confesser. Jésus s’est prêté à cette démarche par humilité et dans l’obéissance à son Père. Son baptême par Jean manifeste son identité de Fils de Dieu, bien-aimé, en qui le Père a mis tout son Amour. Ce baptême révèle déjà tout l’abandon de sa vie à la Volonté du Père, et inaugure le chemin qui le conduira à la Croix, là où sera à nouveau confessée son identité messianique de Fils de Dieu, mais alors par un païen : un centurion romain.
Que retenir en conclusion, de ce début de l’évangile de Marc, si condensé, si sobre, sinon, qu’à notre tour, en tant que baptisés, nous avons à confesser en 1er lieu la Bonne Nouvelle de Jésus-Christ, Fils de Dieu, avant même toute démarche de confession de nos péchés et de tout désir de conversion. L’une ne supprime pas l’autre, mais il y a antériorité de l’une sur l’autre : et bien sûr, une véritable confession de foi a pour conséquence un changement de nos comportements et de nos représentations.
Quand, le mercredi des Cendres, nous nous entendons dire par le prêtre ou le Père Abbé : « Convertis-toi, et crois à la Bonne Nouvelle ! », nous devrions en nous-mêmes inverser la formule, qui correspondrait mieux au message de saint Marc : « Crois à la Bonne Nouvelle, et convertis-toi ! ». C’est ce que nous aurons l’occasion d’écouter et de méditer tout au long des prochains dimanches de cette Année Liturgique que nous allons passer en compagnie de cet évangile. (2003-01-12)
B 2002 - Ste Famille -Dimanche 29 décembre 2002
La Sainte Famille de Jésus, Marie et Joseph. Année B
Lectures : Gn 15, 1-6 ; 21, 1-3 / He 11,8-11 ; 12, 17-19 / Lc 2, 22-40
Homélie de frère Matthieu
« Ma mère et mes frères, ce sont ceux qui écoutent la Parole de Dieu et qui la mettent en pratique. » (Lc 8-21)
Cette Parole de Jésus, prenant ses distances avec sa famille de Nazareth, peut nous aider à entendre la vraie tonalité évangélique de la fête d’aujourd’hui.
Elle peut nous servir de clef, aussi, pour relire les lectures que nous venons d’entendre.
Avec l’Evangile, nous sommes au Temple de Jérusalem, au cœur de la vie d’Israël, de sa foi et de sa louange. Les parents de Jésus viennent y accomplir les rites prescrits par la Loi : celui du rachat du fils premier-né, celui de la purification de la mère après la naissance d’un enfant… Mais d’entrée, le personnage central est cet homme « appelé Syméon » : en lui s’accomplit le meilleur d’Israël ; il est « juste et religieux », il est le témoin de la foi et de l’attente de son peuple, il est là, à l’entrée du Temple, le parfait relais d’Abraham dont les deux premières lectures nous retraçaient l’itinéraire prophétique :
- Histoire de la naissance de la première famille de Dieu, descendance d’Abraham, aussi nombreuse que les étoiles du ciel. Fécondité extraordinaire de l’homme sans enfant en sa vieillesse, fécondité merveilleuse de celle qui était stérile mais à qui le Seigneur donne un fils, premier-né d’une multitude de croyants…
- Histoire de la pérennité de la descendance d’Abraham, de Sara et de Dieu, dont l’épître aux Hébreux nous dit qu’elle repose tout entière sur la foi, celle d’Abraham, celle de Sara, au-delà de ses interrogations, celle que Dieu suscite à nouveau, enracine mieux encoure, en demandant à Abraham le sacrifice de son fils, le fils de la promesse… Et Isaac lui est rendu, et c’était encore une Prophétie nous dit la lettre aux Hébreux.
Syméon prend l’enfant à sa mère, pour signifier que la vraie filiation de cet enfant Jésus est celle de la promesse, de l’attente de tout Israël, et de son accomplissement ; et Marie, comme dépossédée de son fils, est la véritable israélite, la vraie fille d’Abraham, ne vivant que de la Parole reçue dans la foi.
Et Marie entend la prophétie de Syméon qui lui dit que son itinéraire, que sa vocation, est bien celle d’Abraham jusqu’au sacrifice consenti où le Fils passe à son Père avant de lui être rendu en multitude de fils.
Et Anne, la veuve fidèle, intervient ici comme le sceau de la prophétie, elle proclame la louange de Dieu, elle exalte le Seigneur, Dieu d’Israël, en cet enfant qui accomplira la délivrance de Jérusalem.
Et elle orchestre la prophétie de Syméon en s’en faisant l’écho aux oreilles de tous le peuple : cet enfant est « la Gloire d’Israël », et il est « la lumière des nations païennes ». Et Marie entend, comme les autres, et comprend la vocation de cet enfant qui déjà ne lui appartient plus : elle l’a reçu de Dieu et le rend à Dieu en le donnant au Peuple d’Israël et au monde entier.
Revenu à Nazareth, l’enfant Jésus peut grandir et se fortifier dans la vocation reçue et si bien explicitée, parce que ses parents sont pleinement accordés à la grâce, à la Parole, et laissent s’épanouir sa liberté de Fils.
Alors se poursuit, recommence, l’Histoire sainte, qui est celle de la fécondité de Dieu relayée par la foi des hommes et des femmes qui écoutent la Parole de Dieu et la mettent en pratique.
Ainsi se constitue au fil du temps, la vraie famille de Jésus, la vraie famille de Dieu.
Y entrer à notre tour, c’est toute notre vocation chrétienne : écouter, mettre en pratique, susciter la vie et la liberté, vocation de chacun, à la mesure du don offert par Dieu : Jésus, premier-né d’une multitude de frères.
Amen.
Frère Matthieu Collin
Année ABC - Messe du Jour de Noël 2001
Is 52 7-10; Heb 1 1-6; Jn 1 1-18
Homélie du F.Matthieu
2001
Hier, lors de l’annonce de Noël au début des vêpres, qui ouvrait notre célébration de Noël, nous avons entendu la longue énumération des évènements de l’histoire de notre monde, depuis sa création et elle s’est achevée sur ces mots, plusieurs fois répétés et comme orchestrés : Le Verbe est né parmi nous !… Comme si toute histoire s’arrêtait là.
Cette nuit, nous avons écouté le récit de la naissance de Jésus dans l’évangile de Luc, tellement familière que même la mise en scène des anges, de tous les chœurs des anges autour des bergers de Bethléem nous apparaissait une fois encore comme évidente, attendue, presque banale.
Aujourd’hui, l’évangile de Jean que nous venons d’entendre nous met devant l’abrupt du Mystère… mais là encore c’est un texte si souvent entendu : « Le Verbe était Dieu… et le Verbe s’est fait chair, il a habité parmi nous… »
Alors arrêtons-nous là, pour un instant, rien qu’un instant de véritable attention, de véritable écoute :
Dieu s’est fait homme au milieu des hommes.
Dieu s’est fait l’un de nous.
Dieu est devenu un homme semblable à nous.
Mystère inouï, impossible à imaginer, à réaliser, mais qu’il nous faut absolument, aujourd’hui, entendre, pour écouter autrement, qu’il nous faut regarder, pour voir autrement, qu’il nous faut méditer, ruminer dans notre cœur pour comprendre autrement.
Ecouter, voir, comprendre autrement la réalité de Dieu, le Seigneur, créateur des mondes, qui est devenu l’un de nous, la réalité de l’homme dont Dieu a pris visage.
Dans les défis de notre temps, dans les cassures de notre monde, dans les guerres, les affrontements, les violences, les incertitudes de notre monde, il n’y a rien d’autre qui soit véritablement la clef de notre chemin d’homme, de notre avenir d’humanité en quête de bonheur…
Dieu s’est fait l’un de nous,
Et Dieu est du côté des anonymes, des humbles, des désarmés, alors que nous cherchons encore le bonheur, le salut dans la Puissance, dans la Violence et la domination…
Et Dieu est du côté des pauvres, des démunis, alors que nous cherchons encore le bonheur, le salut dans l’argent – toujours plus – dans la possession, dans la main mise sur tout…
Alors en ce jour de Noël, puissions-nous un instant, rien qu’un instant, réveiller notre foi chrétienne, écouter, regarder, méditer cette Réalité, unique, décisive, seul Evènement qui vaille vraiment la peine qu’on en parle :
Aujourd’hui, Dieu s’est fait l’un de nous, Dieu désormais est avec nous…
Et cet instant pourra alors être l’ouverture, la nouvelle naissance, de notre cœur, de notre être
pour que Dieu puisse habiter avec nous, parmi nous, en nous, et que s’ouvre pour nous un vrai chemin de bonheur,
pour que notre monde puisse enfin commencer à être en Royaume de Justice et de Paix.
Accordons-nous cet instant d’écoute et de grâce. Amen.
Frère Matthieu Collin
Année ABC - Messe de la nuit de Noël 2002
Is 9 1-6; Tit 2 11-14; Lc 2 1-14
Homélie du Père Abbé Luc
2002
Frères et soeurs,
Cette nuit-là à Bethléem devait être une nuit tout à fait normale...Les bergers gardaient leurs troupeaux et les uns et les autres se calfeutraient dans leur maison pour la nuit. Sauf que ces jours-ci, il y avait peut-être un peu plus d’agitation dans la ville, puisqu’il y avait tous ces compatriotes venus des quatre coins du pays pour se faire recenser... Du coup, il n’y avait pas de place pour tout le monde dans la ville...même pas de quoi offrir un gîte à une femme sur le point d’accoucher...tant pis elle mettra au monde son enfant dans l’étable...
Frères et soeurs, c’est au coeur de cette banalité d’un fait de vie quotidienne, même pas un fait divers, qu’a commencé ce qui allait pourtant bouleverser le cours du monde. Dieu, le Dieu des Juifs, le Créateur de l’Univers est venu se faire l’un des nôtres, devenant l’un de nous sous les traits de cet enfant emmailloté, qui prendra peu à peu sa place ensuite parmi les hommes.
Chaque année, nous sommes ainsi replacés devant cette chose incroyable à notre compréhension humaine : Celui qui est l’origine de la vie et de toute chose, le commencement et la fin, a consenti à suivre avec nous le parcours de la vie humaine. Il n’est plus au-dessus , il n’est plus ailleurs, en Jésus il devient tout proche, avec nous. Il semble tout d’un coup que Dieu se fasse très accessible. “Aujourd’hui vous est né un Sauveur, le Messie, le Seigneur. Et voilà le signe : vous trouverez un nouveau-né emmailloté et couché dans une mangeoire”....Le Seigneur, l’Adonai des Juifs, le Très-Haut, le Tout Puissant, le Dieu Caché, est maintenant dans une mangeoire comme un nouveau-né...
Le grand physicien Einstein disait ceci : “Ce qui est incompréhensible, c’est que le monde soit compréhensible”. Ses recherches scientifiques l’amenaient en effet à constater cet ordre objectif qui rendait le monde compréhensible à travers des axiomes, des théories etc.
Que le monde soit compréhensible était alors pour lui un miracle qui ne faisait que se renforcer au fur et à mesure du progrès des connaissances. Ainsi pensait Einstein, qui ne se disait pas croyant... Ne pourrait-on pas dire en cette nuit, en paraphrasant le grand physicien : “ce qui est incompréhensible, c’est que Dieu se soit fait compréhensible”... En devenant petit enfant, l’un de nous, Dieu en Jésus nous révèle son mystère. Il devient “compréhensible” et cela dans les deux sens du terme : à la fois Dieu se donne à comprendre à notre intelligence, à notre regard et à la fois il se laisse prendre comme un enfant dans les bras, lui le Tout-Puissant... Dieu dévoile son visage en Jésus : “qui me voit voit le Père”, dira ensuite Jésus, et Dieu se laissera prendre par les hommes, il sera livré à leur bon plaisir pour être crucifié...
Et cela, frères et soeurs, c’est un peu incompréhensible à notre logique humaine spontanée...Ou bien ce sont des histoires pour des enfants ou bien nous sommes devant quelque chose de si simple et de si déroutant dans sa limpidité que nous n’osons pas y croire vraiment...Ou bien, Dieu est Dieu Tout Puissant et alors, que les choses de notre monde changent rapidement, que la souffrance cesse sous toutes ses formes...Ou bien Dieu n’existe pas et Jésus n’est qu’un sage, un prophète sans réelle influence sur nos vies, et que chacun se débrouille pour conduire sa barque au mieux. Ainsi va notre logique humaine, elle oscille entre le tout et le rien, entre le Dieu Tout Puissant et le prophète impuissant.
N’est-ce pas là à cet endroit que se situe l’épreuve de la foi que l’on ressent fortement aujourd’hui dans notre monde en quête de sagesse et de sens. Epreuve au coeur de notre foi chrétienne de croire qu’en Jésus, cet homme vulnérable, ami des pauvres et des petits, maltraité par les hommes et ressuscité après trois jours nous trouvons le salut qui vient de Dieu, c’est-à dire la vie véritable pour aujourd’hui et pour l’éternité... C’est l’épreuve de la foi car c’est presque trop simple, hors de nos cadres habituels de pensée sur Dieu ou sur la vie spirituelle. Un jeune disait un jour à un frère au sortir d’une célébration de la Cène le Jeudi Saint: “c’est trop humain votre affaire, c’est pas assez spirituel”. En effet, Jésus a pris du pain, du vin, il a lavé les pieds de ses disciples pour signifier son offrande et rendre la nôtre possible.
Depuis la discrétion de la crèche jusqu’à la croix, Jésus, le Fils de Dieu n’a pas fait grand chose d’extraordinaire ...si ce n’est qu’il a parlé, qu’il a regardé, qu’il a aimé peut-être comme aucun autre homme avant lui...comme en ont témoigné ses contemporains attirés par cet homme à la vie vraiment humaine. Ainsi, en Jésus, le Fils de Dieu tout semble très compréhensible, et c’est cela qui est incompréhensible : que Dieu se soit fait si proche, si accessible n’est-ce-pas trop beau mais alors pourquoi cela n’a-t-il pas changé le cours tragique de l’histoire du monde ?
Qui est ce Dieu si proche si vulnérable?... Il est bon de nous arrêter en cette nuit pour méditer ce mystère de notre foi, de ne pas chercher trop vite à donner une réponse. D’accueillir l’inouï de la proximité de Dieu, en notre monde, proximité faite de grand respect pour notre humanité, ce respect qui est la signature de sa tendresse. Laissons-nous étonner par une si grande simplicité qui ouvre nos façons de voir à d’autres horizons.
Offrons à Dieu notre compréhension et notre incompréhension, offrons lui notre étonnement et notre émerveillement, peut-être en regardant simplement la crèche, en relisant la page d’évangile entendue, en priant avec Marie pour entrer avec elle dans ce mystère joyeux... en entrant avec confiance dans cette célébration qui nous fait partager la vie de Dieu déjà.
Compréhensible ou incompréhensible notre Dieu ? Laissons le nous surprendre encore...!
(2002-12-25)[
Année ABC - Messe de la Toussaint - 1 Novembre 2002
Ap 7 2-4, 9-14; 1 Jn 3 1-3; Mt 5 1-12a
Homélie Père Abbé Luc
2002
Frères et soeurs,
La liturgie de ce jour nous invite à l’émerveillement et à l’espérance, comme veulent en témoigner et les luminaires et la grande peinture sur la grille qui représente la foule des saints auprès de Dieu. Aujourd’hui, cette fête est sous le signe de la joie et de la lumière, car nous célébrons le mystère de l’Eglise déjà présente auprès de Dieu, de cette Eglise qui nous devance dans la lumière... Le peuple des saints...
Emerveillement, oui nous pouvons nous émerveiller de ce que tant d’hommes et de femmes partagent déjà la vie de Dieu, dans l’attente de la résurrection finale quand toutes choses seront définitivement récapitulées par le Christ. “J’ai vu une foule immense que nul ne pouvait dénombrer” nous dit St Jean dans l’Apocalypse.
Emerveillement devant le nombre incalculable de ces personnes qui depuis des siècles ont accompli leur pèlerinage sur terre, pour trouver en Dieu le repos éternel.
Mais émerveillement aussi, car cette profusion d’être vivants devant Dieu notre Père n’est pas un ramassis de personnes anonymes. Chacun devant Dieu reste unique et objet de son unique Amour. C’est encore le cri émerveillé de St Jean : “voyez comme il est grand, l’amour dont Dieu nous a comblés, il a voulu que nous soyons appelés enfants de Dieu - et nous le sommes !!!”
Chacun reste appelé par son nom unique et personnel d’enfant de Dieu...C’est pourquoi, nous aimons en ce jour nous rappeler des visages qui nous ont précédés, les plus connus comme le peuple des humbles gens qui ont modestement suivi leur chemin humain dans la recherche de plus de vérité et d’amour...
Cette nuit, nous avons fait mémoire de ces figures illuminées par la rencontre de Dieu depuis Adam, Eve, Abel le Juste, Abraham, Moïse et les Prophètes jusqu’à ceux qui ont croisé le regard miséricordieux du Christ. Et nous avons poursuivi cette fresque de visages avec tous les disciples du Christ qui, depuis la Galilée jusqu’aux limites de notre terre, ont témoigné de l’évangile.
Faire mémoire du nom de ces saints c’est nous rappeler que la sainteté a toujours un visage. Dans ces visages d’hommes et de femmes, c’est la sainteté de Dieu qui se donne à voir et à reconnaître.
Ainsi l’Eglise nous offre-t-elle en exemple ces figures, comme des témoins de la sainteté de Dieu. Mais en ce jour, nous voulons aussi nous souvenir de tous nos proches, connus de nous seulement, pas des grandes figures, mais de vrais témoins qui ont vécu à nos côtés et qui ont été comme des lampes sur nos routes. Peut-être pas des grands saints, mais des saints aussi, parce qu’enfants de Dieu. Par leur réponse à l’appel de Dieu, ils nous ont découvert quelque chose de l’Amour de notre Père pour chacun.
S’émerveiller devant ces visages humains traversés par un éclat de la sainteté de Dieu, c’est aussi nous familiariser avec la Sainteté de Dieu qui déjà nous façonne. Mais avouons-le, nous ne savons pas bien ce que nous disons quand nous affirmons que Dieu est Saint, trois fois Saint... Nous sommes devant un mystère qui se montre et qui nous échappe à la fois. Mystère de la vraie Vie, celle qui a un poids d’éternité, mystère du véritable Amour qui ne déçoit jamais, mystère de Beauté.
Mais ce que nous savons c’est que ce mystère ne nous est pas refusé , que nous sommes conviés à y entrer : “Soyez saint car moi je suis saint” disait Dieu à son peuple dans l’ancien testament, en lui rappelant les exigences de la justice, de la miséricorde et de l’accueil de l’autre.
Il est bon en ce jour de réentendre le désir de notre Dieu de voir briller l’éclat de sa sainteté sur chacun de nous.
Et Jésus dans l’Evangile ne nous dit-il pas la même chose quand il nous révèle qu’ils sont heureux les pauvres de coeurs, les doux, les coeurs purs, les artisans de paix et de justice car ils ont trouvé le chemin d’éternité.
Déjà sur cette terre, ils portent en eux un éclat de la sainteté de Dieu, qui ne peut connaître de fin jusqu’à la vie éternelle.
Ces visages d’hommes et de femmes humbles, doux, pacifiques, assoiffés et affamés de justice nous rendent plus proche cette sainteté que nous pourrions penser très loin de nous, inaccessible et finalement peu désirable... “Heureux sont-ils” nous dit Jésus car leur vie a ce goût d’éternité que nul ne pourra leur ravir...
Ainsi en ce jour de fête, nous sommes invités à entrer dans la pédagogie de notre Dieu qui veut nous familiariser avec ce qu’il est le Dieu Saint pour nous partager sa vie éternelle.
Là où la sainteté pourrait nous faire peur, là où elle peut nous paraître réservée à une élite, tous ces visages dont nous faisons mémoire aujourd’hui nous font pressentir que devenir des saints c’est entrer dans ce chemin qui nous donnera notre vrai visage humain. Etre des saints n’enlève rien à notre humanité, au contraire cela lui donne sa pleine mesure, toute sa beauté en nous faisant partager la joie de Dieu.
Devenir des saints, c’est l’appel profond que nous avons reçu lors de notre baptême quand nous avons revêtu le Christ, quand nous avons reçu cette assurance d’être des enfants aimés de Dieu notre Père.
Et si devenir des saints, c’était apprendre à nous laisser aimer par Dieu, apprendre à nous laisser apprivoiser par son Esprit-Saint et apprendre à vivre en amitié avec le Christ ?
2002-11-01
Année A - 19° Dimanche du Temps Ordinaire
1 R 19 9-13; Rom 9 1-5; Mt 14 22-33
Homélie du F.Guillaume
Frères et sœurs,
Les trois lectures de ce dimanche nous rapportent 3 expériences de Dieu, faites par des hommes très différents, dans des situations ou des contextes très différents aussi.
Dans la 1èrelecture, c’est la rencontre de Dieu avec le prophète Elie, au sortir d’une caverne après la nuit : Dieu qui se cache et qui se révèle tout à la fois de manière surprenante, dans le murmure d’une brise légère, ou « dans le bruit d’un fin silence », comme l’on traduit aussi, après les fracas de l’ouragan, du tremblement de terre et du feu.
Avec le second texte, c’est la rencontre de Dieu avec l’apôtre Paul dans une expérience d’incompréhension et de tristesse : un Dieu qui se cache et qui se révèle tout à la fois dans le mystère de l’histoire du salut d’Israël, le peuple de l’Alliance et des Promesses, qui avait tout pour reconnaître le Christ, comme Messie, et qui pourtant l’a rejeté et le rejette encore.
Enfin l’Evangile nous présente la rencontre de Dieu avec les disciples dans une barque, vers la fin de la nuit. Un Dieu qui se cache et qui se révèle tout à la fois dans ce fantôme qui marche sur les eaux et qui n’est autre que Jésus lui-même, confessé comme Fils de Dieu, en finale.
Revenons si vous le voulez bien sur ces trois expériences, ces trois manifestations si déconcertantes pour l’homme, quand Dieu vient le rejoindre, là et au moment où il ne l’attend pas. Dieu qui déjoue toutes les prévisions, toutes les mainmises, toutes les violences aussi.
L’épisode d’Elie à l’Horeb, dans le 1er livre des Rois, fait suite à celui des sacrifices du Mont Carmel. Elie vient de faire massacrer, sur l’ordre express de Dieu, pas moins de 450 prêtres de Baal, en réponse aux massacres non moins violents du roi Achaz et de la reine Jézabel. Ecœuré par tant de violence, découragé, voire déprimé, Elie cherche à fuir au désert en sécurité, et il prend la route de l’Horeb, ce haut lieu symbolique de la Bible, où Moïse avait reçu les tables de la Loi. Elie s’attend à de nouvelles révélations de Dieu dans des manifestations de puissance, comme ce fut le cas au temps de l’Exode : ouragan, tremblement de terre, feu. Hé bien non, Dieu, cette fois-ci n’est pas dans ce déploiement de violence des forces naturelles : il fait reconnaître sa présence dans un souffle de paix, dans ce murmure de brise légère, qui n’est pas sans rappeler sa promenade dans le jardin d’Eden, au soir du 6ème jour de la Création, dans le récit de la Genèse. Ce soir-là, Adam et Eve l’avait reconnu à son pas.
La leçon à retirer de cette 1ère lecture est claire : elle vise à déconstruire une certaine représentation de Dieu, comme Tout Puissant, violent et terrifiant. Au contraire, Dieu sait se faire pauvre dans le secret de sa création, pour venir au devant de sa créature.
Dans la seconde lecture, nous assistons aux plaintes et à la souffrance de Saint Paul qui a du mal à admettre que Dieu ne puisse pas se révéler à ses frères de race, les juifs, de la même manière qu’il a procédé avec lui, sur le chemin de Damas. Cette expérience de conversion de Paul avait fait suite à une série de violences aussi : le futur apôtre, Saul à l’époque, faisait massacrer les chrétiens avec zèle, sans scrupules. Il avait assisté au martyre d’Etienne, en approuvant ce meurtre. Et voilà que Jésus lui était apparu et s’était fait reconnaître dans la faiblesse de la Croix et aussi dans la charité de la communauté des frères de Damas. Paul a compris alors. Tous ses projets ont été renversés : un seul lui reste désormais à cœur : annoncer l’Evangile, amener les hommes à la conversion au Christ. Et là il ne comprend pas, car le mystère du salut en Jésus-Christ de ses frères juifs lui résiste, et c’est la cause pour lui d’une immense douleur, un vrai déchirement du cœur.
La leçon de ce texte demeure actuelle pour nous. Sommes-nous, comme Paul, préoccupés du salut de tous nos frères, les hommes ? Comment abordons-nous en ce XXI° siècle la rencontre des autres religions, des autres cultures, de tous ceux qui ne partagent pas nos convictions ? Nous savons bien qu’il y a là un immense défi et que nul d’entre nous n’en connaît la réponse. Il nous faut faire confiance à l’Esprit Saint, qui est le maître de l’histoire et de la vie ; il nous faut respecter la souveraine liberté de Dieu et des hommes, nos frères.
Enfin la 3ème lecture : l’évangile de St Matthieu des marches de Jésus et de Pierre sur les eaux : un récit où les notes de violence ne sont pas absentes non plus : un vent contraire, une barque battue par les flots, la peur des disciples qui leur fait pousser des cris. Dieu va se manifester à eux dans une scène éminemment pascale, qui évoque les récits de la Résurrection de Jésus après sa Passion. Pensons aux 11 apôtres, au soir de Pâques, apeurés et enfermés dans une maison aux portes verrouillées : Jésus vient à leur devant, et les rassure : « la paix soit avec vous ». Jésus, ressuscité, marchant au bord du lac, alors que les disciples, dans leur barque, ont passé toute la nuit à pécher sans rien prendre. Le disciple bien-aimé reconnaît son Maître ; « c’est le Seigneur », et aussitôt, Pierre se jette à l’eau et vient rejoindre Jésus à la nage cette fois-ci, et non pas en marchant sur les eaux. Et l’on pourrait relire les apparitions de Jésus Ressuscité à Marie Madeleine, à Thomas… toujours de façon étonnante, surprenante, invitant au dépassement de la peur, du doute et de la tristesse. Dans tous ces récits, c’est la confiance dans la personne de Jésus, qui est mise à l’épreuve ; si le disciple, c’est-à-dire chacun de nous, prête attention à sa parole, à son regard, à sa tendresse, alors il n’a rien à craindre. Son cœur devient brûlant et il est envahi d’une joie et d’une paix profonde, que rien ni personne, ni aucune tempête ne peuvent enlever. C’est bien là la leçon que nous livre cet évangile d’aujourd’hui, où la barque symbolise l’Eglise et où nous nous reconnaissons dans la générosité et la faiblesse de Pierre.
Alors pour conclure, que ces trois textes médités nous invitent à l’écoute du Seigneur qui ne cesse de venir à notre rencontre. Comme nous l’avons chanté dans le Psaume : « J’écoute, que dira le Seigneur Dieu : ce qu’il dit, c’est la paix, pour son peuple et ses fidèles ».
Refusant toute violence, dominant nos tristesses et nos peurs avec la grâce de Dieu, accueillons alors dans cette eucharistie, le Christ qui vient nous proposer sa paix, son salut, son Amour. Oui, « amour et vérité se rencontrent, justice et paix s’embrassent. Le Seigneur nous donnera ses bienfaits, et notre terre donnera son fruit. »
AMEN (2002-08-11)
A 2002 TO 18° Dimanche 4 août 2002
Lectures : Is 55, 1-3 / Ro 8, 35-39 / Mt 14, 13-21
Homélie de frère Matthieu
Jésus se retire au désert...
Dans l'épisode qui précède selon l'évangéliste Mathieu, Jésus vient de recevoir l'annonce de la mort de Jean-Baptiste ; Jésus sait que Jean et lui ont destin lié depuis son Baptême dont a été dit " qu'il accomplissait toute justice " ; il sait que Jean était le nouvel Elie venu préparer les chemins du Seigneur ; Jean, mort, il sait donc aussi qu'il se trouve désormais en première ligne, qu'il doit prendre définitivement le relais, un rôle qu'Hérode lui-même lui a reconnu puisqu'il l'a désigné comme " Jean le Baptiste, ressuscité des morts "... Et cela mérite méditation et prière...
Mais les foules en décident autrement : elles aussi ont appris la mort de Jean et elle savent qu'elles n'ont désormais plus que Jésus à suivre... et elles n'hésitent pas... Et ce sont ces foules qui le précèdent dans le désert et qui vont lui donner, selon Matthieu, qui vont nous donner, les réponses que la mort de Jean appelait.
A la vue des foules, Jésus est " saisi de pitié ", et ce n'est pas un hasard si l'évangéliste emploie ici un terme que la Bible ne réserve qu'à Dieu, à un Dieu maternel, dont les entrailles sont remuées au plus profond de lui...
Et Jésus guérit tous ceux qui sont là " sans pouvoir ", les " démunis ", les " pauvres ", selon une expression qui ne se trouvent qu'ici dans l'évangile.
Puis, comme le soir vient, et que les disciples suggèrent de renvoyer cette foule affamée et trop nombreuse, Jésus prend l'initiative de les nourrir, et c'est la multiplication des pains qui est au cœur de notre évangile.
En faisant ces gestes, Jésus semble renouveler les miracles que la Bible attribuait au prophète Elisée dans le second Livre des Rois, au chapitre 4 : guérisons, résurrection même, et multiplication des pains... Jésus est ainsi présenté comme le nouvel Elisée, et comme tel, il est confirmé dans sa mission de poursuivre l'œuvre de Dieu qu'avait inauguré Jean Le Baptiste.
Mais en réalisant cette multiplication des pains, Jésus se révèle bien plus que cela : il " ordonne ", il fait " s'attabler " les foules et c'est " sur l'herbe "... en ce lieu désertique ! C'est qu'il s'agit de bien autre chose, Jésus, comme Dieu au Psaume 22, conduit son peuple aux " prés d'herbe fraîche " où il vaut leur donner le véritable repos... Les disciples lui apporte alors " cinq pains et deux poissons " : là encore le signe est à déchiffrer ; il s'agit selon la Bible et toute la Tradition, de la nourriture du festin messianique des derniers temps, celui qu'annonçait le livre d'Isaïe dans la première lecture, et l'abondance de nourriture - il va rester douze paniers, de quoi nourrir encore toutes les tribus d'Israël ! - et la satisfaction de tous dont la faim est apaisé, disent bien qu'il s'agit déjà du repas du Royaume, de ce Royaume que Jésus, selon l'évangile de Matthieu, nous a présenté dans toutes ses annonces au long du chapitre 13 comme nous l'avons entendu dans l'évangile de dimanche dernier.
Ainsi donc Jésus nous est présenté comme le Messie-Roi qui invite au festin du Royaume de Dieu ; il pose même les gestes de Dieu, lui qui préside à ce festin...
Mais l'évangéliste veut nous dire plus encore, et en un sens, mieux encore...
Ce festin messianique, il n'est qu'anticipé et nous n'y avons part encore qu'en espérance... Mais, insensiblement, le récit oublie peu à peu, les poissons, pour ne garder que le pain... et les gestes, et les paroles de Jésus, reprennent exactement ceux et celles qui furent les siens au soir de la Cène lorsqu'il institua son Dernier Repas, nous le transmettant à travers les disciples, qui, comme dans notre évangile, jouent un rôle primordial : ils apportent la nourriture, " fruit de la terre et du travail des hommes ", et il sont les serviteurs qui distribuent cette nourriture au temps voulu... Il suffit de relire le chapitre 26 de l'évangile de Matthieu pour avoir la confirmation de ce " passage " à l'Eucharistie.
Ainsi, c'est bien à nous que cette page d'évangile s'adresse, c'est bien à nous qu'est rappelé que l'Eucharistie, à laquelle Dieu nous invite, dimanche après dimanche, est le repas, déjà messianique - car la nourriture que nous y recevons est déjà vie éternelle - mais encore de ce monde-ci, pour nous qui sommes toujours en marche à la suite du Christ et en quête de sa miséricorde.
Et le pain, celui de la Parole, comme celui de la Table eucharistique, nous est toujours offert et avec lui, à travers lui, l'inlassable miséricorde qui émeut notre Seigneur jusqu'aux entrailles et qui guérit tous ceux qui viennent à lui comme des pauvres, " dénués de toute volonté de puissance, de toute prétention à s'en tirer par eux-mêmes, pauvres parmi les pauvres, pauvres comme ces " petits " de l'Evangile dont Matthieu se plaît à nous répéter qu'ils sont les seuls à hériter du Royaume, à pouvoir accueillir pleinement l'Evangile de Jésus qui accomplit toute Justice et qui donne la Vie.
Allons à la rencontre de cette Miséricorde du Seigneur qui nous est offerte encore une fois aujourd'hui en cette célébration ! Amen.
Frère Matthieu Collin
Année A - Carême 2° Dimanche - 17 février 2002
Genèse 12,1-4 ; 2 Tim. 1,8-10 ; Matth. 17,1-9
Homélie du F.Guillaume
Frères et sœurs,
Le Carême, pour nous chrétiens spontanément, c’est d’abord un temps : 40 jours entre le mercredi des Cendres et le dimanche de Pâques, en référence aux 40 jours et aux 40 nuits que Jésus a passés au désert, ou les 40 années du peuple hébreu entre sa sortie d’Egypte et son entrée en Terre Promise. Un temps, tout comme le Ramadan pour les musulmans qui dure un mois lunaire pour le jeûne, la prière et le partage, ou bien encore la Grande Retraite de Méditation et de purification pour les bouddhistes tibétains : 3 ans, 3 mois, 3 jours.
Mais le Carême, ce sont aussi des lieux, des espaces, des mouvements, des déplacements. Dimanche dernier, la liturgie nous invitait à partir au désert avec Jésus. Le désert, lieu symbolique par excellence de la rencontre de Dieu, mais aussi de celle des Démons. Dimanche prochain, nous irons en Samarie, à Sycar, près du puits de Jacob, et les dimanches suivants à Jérusalem, du côté de la piscine de Siloé avec l’aveugle-né, à Béthanie dans la maison de Lazare et de ses sœurs et à Jérusalem encore pour les Rameaux et la Semaine Sainte.
Aujourd’hui, nous méditons avec la 1ère lecture, le départ d’Abraham depuis son pays d’origine en Chaldée, pour un pays que le Seigneur lui promet de lui indiquer. Et Abraham part, sans savoir où il va, comme le dira l’épitre aux Hébreux, mais il part, confiant dans la Parole de Dieu et obéissant dans la foi. C’est l’itinéraire de toute vie spirituelle, chrétienne ou non, religieuse ou laïque, nous le savons bien : lâcher-prise, abandon et confiance, mais en retour bénédiction et fécondité imprévisibles, non-programmables.
Et l’Evangile, lui, nous fait monter, à l’écart, sur une haute montagne, avec Pierre, Jacques et Jean, qui accompagnent Jésus : c’est l’épisode de la Transfiguration. Chaque année, la liturgie nous demande de nous y arrêter dans notre marche vers Pâques ; et nous écoutons ce récit dans chacune de ses versions évangéliques : Matthieu, Marc et Luc. Cette année Matthieu. Nous pouvons le diviser en deux parties distinctes :
- une première où domine l’expérience visuelle. Jésus est transformé aux yeux des disciples éblouis. Transformé, littéralement « métamorphosé », en grec. Et en même temps, c’est l’apparition de Moïse et d’Elie. Le pauvre Pierre ne sait plus très bien comment se situer face ou à côté d’eux : il bafouille, il fait une proposition concrète qui n’est pas retenue : personne ne semble l’écouter ou faire attention à lui. St Luc ira jusqu’à dire qu’il ne savait pas ce qu’il disait.
- et puis il y a une seconde scène qui se superpose à la 1ère, où dominent la voix et l’audition d’une parole sortie de la nuée lumineuse. Parole mystérieuse du Père des Cieux, en écho et presque identique à celle du Baptême de Jésus dans les eaux du Jourdain : « celui-ci est mon Fils bien aimé, en qui j’ai mis tous mon amour ». Avec l’ajout propre à la Transfiguration : « écoutez-le ! ». Au baptême, la parole s’adressait à Jésus lui-même, comme l’envoyé, ici elle s’adresse aux disciples et plus largement à toute la communauté chrétienne, désignant Jésus comme le Prophète qu’il faut écouter.
Après cette vision et cette audition extraordinaires, qui ont plongé les disciples dans la frayeur et la prosternation à terre, c’est le retour à l’ordinaire, la voix familière de Jésus, son contact et sa proximité. Ils peuvent lever les yeux à nouveau : Jésus est là, tel qu’ils le connaissaient et il est seul. Ils sont rassurés : ouf ! Mais que s’est-il donc passé ? Silence, ordonne Jésus : pas un mot avant que le Fils de l’Homme ne soit ressuscité d’entre les morts.
Ce texte est riche à bien des égards : on peut en faire une longue lectio divina, avec tous les renvois à l’Ancien Testament qu’il autorise : on peut en faire une contemplation des relations de Jésus avec son Père et avec l’humanité, une méditation du rôle et des réactions de chacun des personnages. Mais en quoi peut-il nous rejoindre, nous aussi et nous modifier, dans ce temps de conversion qu’est le Carême.
Je crois qu’il vise à nous déloger de certaines de nos représentations sur la personne même de Jésus. Représentations trop immédiates ou figées, trop utilitaires peut-être aussi, si nous attendons quelque chose de lui, mais quoi.
Même si nous savons bien que les Evangiles sont de tardives compositions littéraires mises par écrit après l’événement pascal de la mort et de la Résurrection de Jésus, nous pouvons penser et croire que cet épisode a réellement eu lieu durant sa vie terrestre et qu’il se situe à un moment-clé des évangiles. Après la confession de foi de Pierre à Césarée, après la 1ère annonce de la Passion, après les paroles sur la condition des disciples et l’annonce du retour prochain du Seigneur. Pour bien faire, mais cela serait trop long, la liturgie devrait nous faire entendre l’ensemble de ces passages. On ne peut isoler la Transfiguration de la réalité de la Passion et de la Résurrection du Christ, ni de son retour dans la Gloire. La Transfiguration nous révèle le sens même du mystère pascal, comme anticipation de ce que nous célèbrerons durant les Jours de la Semaine Sainte. Méditée en ce 2ème dimanche de Carême elle vient stimuler notre élan, relancer notre foi et notre espérance, si jamais nous étions guettés par le découragement ou le doute.
Jésus n’est pas seulement le maître qui parle bien et enseigne les foules, il n’est pas seulement le compagnon de route qui fait le bien en guérissant les malades : il est le Témoin de la Gloire de Dieu sur terre, une Gloire qui resplendira sur la Croix, se manifestera à la Résurrection et se révèlera définitivement à son Retour. En fait, on peut comprendre le désir de Pierre de vouloir fixer ce moment merveilleux à l’aide de tentes, car cet échange partagé avec Jésus en Gloire, avec Moïse et Elie, c’est ce qui nous est permis d’espérer de vivre aux derniers temps. Mais les derniers temps ne sont pas encore arrivés : nous nous tenons dans l’entre-deux du déjà-là et du pas-encore. Pourtant Pâques a levé l’interdiction du silence faite aux disciples. Nous avons, à leur suite et à notre tour, à proclamer à temps et à contretemps que Jésus est le Seigneur, qu’il est le Fils Bien-Aimé du Père, en qui tous les croyants sont fils et frères. Nous avons à dire à tous ceux qui sont prosternés dans leurs peurs de vivre ou leurs fatigues d’être eux-mêmes : « relevez-vous et n’ayez pas peur ! ». C’est cela, je crois, le profond message de la Transfiguration, et pour terminer je laisserai la parole à un poète :
« Voyez, les temps sont accomplis,
Sur quels chemins d’incandescence
Et Dieu vous convoque à l’oubli
Entendrez-vous le Bien-Aimé
De ce qui fut vos servitudes.
Vous parlant depuis la Nuée ?
Qu’il vous prépare à ses souffrances !
Suivez Jésus Transfiguré.
Demain, il sera crucifié
En signature d’alliance
(2002-02-17)