vendredi 7 novembre 2025 : journée de solitude pour la communauté
(eucharistie vers 6h45, juste après Laudes). 

Homélies

Liste des Homélies

Homélie du 23 octobre 2005 — 30e dim. ordinaire — Frère Servan
Cycle : Année A
Info :

Année A - 30° Dimanche du Temps Ordinaire - 23 Octobre 2005

Ex 22 20-26 ; 1 Th 1 5-10 ; Mt 22,34-40

Homélie du F.Servan

Texte :

S'il est un jour où - sans fausse modestie - il convient de se déclarer « tout petit »,c'est

bien ce dimanche où l'on entend rappeler le grand (les deux grands) commandement :TU AlMERAS! Ici, nous sommes tous des commençants, des recommençants peut-être, espérons-le des progressants.

D'autre part, si Jésus fait ici « très court » ( son rappel de l'essentiel de la Loi pourrait tenir sur un timbre-poste), on se sent un peu gêné de délayer cela sur une page 21/29,7 ; cela qui n'est pas tant à commenter qu'à pratiquer !

S'il faut faire quelques notations (pour remplir la pape A4), on peut relever par exemple le

double "Tu aimeras ". Dans l'original grec, c'est le verbe « agapao ». Donc I'amour-agapé, mot si fréquent dans la septante et le Nouveau Testament. Même s'il peut entrer en composition avec EROS (l'amour qui désire et saisit ce qui lui apparaît bon et désirable), il s'en distingue puisque Agapé c'est l'amour qui se tourne vers l'autre pour lui faire du bien, lui donner de soi, de ses biens, de son temps, de son attention, et parfois jusqu'à sa vie peut-être aussi qui reçoit avec reconnaissance l'amour de l'autre (mais c'est peut-être alors Agapé plus Philia : l’amour d’amitié !

Quoi qu'il en soit, c'est bien que ce verbe soit au futur: « Tu aimeras » (en Hébreu, le verbe est à l'inaccompli); plutôt que l'impératif catégorique : « tu dois aimer » c'est un programme qui fait appel à notre liberté, créativité, une route royale qui s'ouvre où marcher, avancer, parfois faire des faux pas, repartir, peut-être courir (une action qui dure).

Autre notation: concernant la valorisation du deuxième commandement qui devient « SEMBLABLE » au premier. Vous savez tout ce que Jésus a dit là -dessus : « et qui donc est mon prochain ? » Celui dont tu te fais proche ! Dans le Sermon sur la Montagne il a poussé le bouchon vraiment loin jusqu'à l'adversaire, l'ennemi. A dire vrai, ce faisant il a « accompli », parfait, le meilleur de la tradition de son peuple. Rappelez-vous la première lecture, du livre de l'Exode : et peu de temps avant Jésus, à un païen pressé désireux d'apprendre l'essentiel de la Loi dans le temps qu'il

pouvait rester sur un pied, Rabbi Hillel répondait: « C'est facile, ce que tu ne voudrais pas qu'on te fasse, ne le fais pas à ton prochain. C'est là toute la Loi .Le reste n'est que commentaire. Après Jésus, un de ses disciples écrira: « Si quelqu'un dit : « J'aime Dieu et qu'il hait son frère, c'est un menteur ; en effet, celui qui n'aime pas son frère qu'il voit, ne peut aimer Dieu qu'il ne voit pas » ! (1 Jn 4, 20) l'amour « semblable » devient contrôleur d'authenticité!

Dernière notation! Aujourd'hui, les chrétiens, plus ou moins titillés par le Dr Freud et Cie (mais le bon sens pourrait suffire) soulignent que dans cet évangile, s'il y a deux commandements, il a trois objets d'amour : ils entendent : « tu aimeras ton prochain comme tu t'aimeras toi-même ».

Eh oui ! ce cher Moi-même! « Nul n'a haï son propre corps, au contraire, on en prend soin » dira l'Apôtre à propos de l'amour entre l'homme et la femme. Et cet amour de soi inclut sans doute la réalité du plaisir « Ah! Le bon pain du F.Epiphane: le bon fromage de la Pierre-qui- Vire! »

Ici, l'évangile et l'Esprit saint (et probablement saint Thomas d'Aquin) nous apprennent à distinguer entre le gros « MOI-JE » qu'il convient de mettre à la diète, voire de faire périr (« perdre sa vie ») et un autre Moi-même plus authentique, créé à l'image de Dieu, confiant en lui et en la vie par Lui donnée, un Moi « fils et frère » qu'il faut faire renaître, grandir, encourager (en écartant culpabilité diffuse et dépréciation de soi).

« Tu aimeras! » c'est le programme, comme une tresse à trois brins, non pas tressée mollement et tout facilement, mais de notre enfance à notre mort, tressée avec l'Esprit saint, à travers des choix, des combats, des réajustements, du bonheur et de la peine. « Quand nous serons nourris de ton corps et de ton sang et remplis de l'Esprit Saint, accorde-nous, Seigneur, par cette 'Eucharistie de grandir dans l'Amour » (2005-10-23)

Homélie du 09 octobre 2005 — 28e dim. ordinaire — Frère Servan
Cycle : Année A
Info :

Année A - 28° Dimanche du Temps Ordinaire - 9 octobre 2011

Is 25 6-9; Ph 4 12-14,19-20; Mt 22 1-14

Homélie du F.Servan

Texte :

Nous venons d'entendre un évangile ... qui souffle et le chaud et le froid, manie

et la carotte et le bâton (pour parler un peu familièrement).

Le chaud : « vous êtes tous invités - c'est gratuit! – merci » ! Et invités au plus beau et définitif des repas: le repas messianique si bien évoqué par le prophète Esaïe (dans la première lecture): « ce jour-là le Seigneur de l'univers préparera pour tous les peuple un festin de viandes grasses et de vin capiteux » repas de noces, des noces de Dieu avec l'humanité « heureux celui qui prendra place à table dans le royaume de Dieu » s'écriait un auditeur de Jésus et avec la venue du fils: « voici, tout est prêt » !

Le froid: c'est le sévère avertissement final, avec cet homme qui se fait jeter dehors, pieds et poings liés ( et l'évangéliste de souligner en rouge, avec ces sentences qu'il aime répéter: « pleurs et grincements de dents, beaucoup d'appelés mais peu d'élus ». Avertissement de Matthieu pour la communauté chrétienne de son temps: « Il y a eu refus de la part de la majorité des responsables du peuple de la première alliance, l'invitation s'est alors tournée vers tous les paumés et les païens: « allez donc aux croisées des chemins, tous ceux que vous rencontrerez, invitez-les au repas de noces ! ». Mais, si large, universel et gratuit est désormais l'invitation aux noces, que les chrétiens ne se prennent pas trop vite pour des élus: pas de grâce à bon marché! Que le sel de l'évangile ne s'affadisse pas dans la tiédeur et la médiocrité!

L'avertissement est toujours valable aujourd'hui, mais sans retomber pour autant dans cette pastorale de la peur dont les églises chrétiennes ont trop abusé dans le passé! Plutôt que de parler de jugement comptable et de quelque lieu de « pleurs et de grincement de dents » (c'est une image comme en aiment les sémites). Crainte servile et stérilisante, mieux vaut regarder le Christ, le Fils dont on célèbre les noces qui sans cesse relève et relance le dynamisme de nos vies au long des jours, jusqu'à la rencontre désirée: « se tenir debout devant le fils de

l'homme ».

Et mieux vaut parler du vêtement de noces qu'il importe d'avoir, non pas tissé avec nos petites vertus, mais avec nos vies quotidiennes ouvertes au Christ et à sa parole, de notre être intime revêtant le Christ » (dans la bible la symbolique du vêtement est importante: elle signifie la qualité profonde et l'orientation de l'être). Rappelons le beau répons que l'on aime chanter: « Vous tous qui avez été baptisés dans le Christ, vous avez revêtu le Christ. Alléluia "( Gal 3,27) Pas seulement la belle robe blanche de nos baptêmes, mais ce qui suivra le baptême

tout au long d'une vie où l'on fait certes des faux pas, avec des somnolences, mais où l'on ne se moque pas de Dieu ni des hommes, ni de son Christ et de sa parole.

« Dépouillez-vous du vieil homme qui se corrompt sous l'effet de convoitises trompeuses », nous dit encore saint Paul, et revêtez l'homme nouveau créé selon Dieu dans la justice et la sainteté. Ne contristez pas le saint Esprit » (pour plus de détails sur le programme allez voir le chapitre 4 de la Lettre aux Ephésiens)

Paul nous dirait encore: « ce qui compte ce n'est pas le sans faute, mais la foi au Christ agissant par amour »", au long des jours.

Notre robe de baptême, notre vêtement de noces, de temps à autres nous le lavons en enlevons les tâches, déjà en venant à l'Eucharistie du dimanche, sans négliger pour autant le sacrement de réconciliation:

« Ils ont lavés leurs robes, les ont blanchies dans le sang de l'Agneau » Apoc 7,15

« Vite, apportez la plus belle robe et habillez le » Lc 15

Au soir de ce dimanche, aux Vêpres, les frères de la communauté chanteront de bon cœur ce Cantique de l'Apocalypse

« Alléluia. Elles sont venues les noces de l'Agneau

« et pour lui son épouse a revêtu sa parure. » ( Apoc 19)

Et, aux Complies, dernière prière avant d'aller se coucher, cet autre beau chant:

« Près de Toi se trouve le pardon / toute guérison et toute grâce /

Tu entends ma voix au fond de mes impasses »

« Bienheureux celui qui veillera

Quand tu paraîtras nimbé de gloire

Tu l'inviteras, lui dresseras la table qu'il prenne la plus belle place » (2011-10-09)

Homélie du 25 septembre 2005 — 26e dim. ordinaire — Frère Servan
Cycle : Année A
Info :

Année A – 26° dimanche du Temps Ordinaire - 25 Septembre 2005

Ez 18 25-28 ; Ph 2 1-11 ; Mt 21 28-32

Homélie du F.Servan

Texte :

Voici donc un Evangile assez bref, et je pense, assez clair (qui ne se trouve que dans l'Evangile selon Mathieu). S'il faut y faire écho, pour peut-être mieux le recevoir, relevons simplement telle ou telle expression.

Déjà: « Un homme avait deux fils»

Cela nous fait penser à une autre parabole, plus longue et plus célèbre, celle du

Père prodigue et de ses deux fils (en Luc, chapitre 15). Vous noterez d'ailleurs que cet Homme, ce Père, ici, dit: « Mon enfant... », C'est une invite plus qu'un ordre et une contrainte: une fois de plus, le Dieu de la Bible respecte la liberté de l'homme, la sollicite ... et puis encore prend patience parfois longuement, car le« s'étant repenti, ensuite il y alla », çà peut être au bout d'une heure (comme chez l'enfant boudeur), mais aussi bien au bout de 30, 40, 50 ans et plus encore.

La Règle de St Benoît nous le rappelle:

« Le Seigneur attend de nous que nous répondions chaque jour par nos actes à ses appels» « Vois comment tous les jours de ta vie qui se prolonge, la patience de Dieu et sa compassion te convient! »

Faut-il rappeler ce que recouvre l'expression: « Travailler à la Vigne» !

Disons rapidement que c'est vivre nos vies d'hommes et de femmes, quels que soient nos situations, nos âges, nos engagements, dans la lumière et sous l'autorité, le dynamisme de la Parole de Dieu. (C'est pourquoi dimanche après dimanche, on revient l'entendre, et parfois un peu plus)

«Travailler à la Vigne»: c'est faire la Volonté du Père à la suite du Christ, Serviteur, dans l'entrelacs de la Parole de Dieu et des événements de notre vie. Mais comme dans ce beau sport, nous ne sommes pas toujours des champions ! Nous regardons l'expression : « se repentir» (qui est revenue deux fois dans ce passage d'évangile).

« S'étant repenti, il y alla »

« Mais vous, vous ne vous êtes pas repentis »

Si vous le permettez, nous ferons ici un peu de grec (non pas pour jouer au savant, mais pour honorer le F. Basile qui, lorsque nous étions ensemble sur les bancs de l'école, était toujours le premier en version grecque !). Le terme grec original, c'est donc:« metkelté» avec un préfixe« metk» (après, ensuite) comme on parle de « métaphysique» (ce qui dans la connaissance de l'être. Vient après les sciences physiques) ou encore de métamorphose (une forme qui succède à une autre).

Melete ou (mel-theik) c'est réflexion, exercice de méditation, donc le repentir, c'est un changement d'avis, de point de vue, qui va enclencher un changement de comportement. Cela rejoint la fameuse conversion, la métanoïa de nos Evangiles. Ce qu'il faut bien voir, c'est que le repentir, c'est différent du remords ou du regret, plus expressions de la culpabilité et plus tournés, tristement vers le passé (ce qu'on a vécu, ce qu'on a raté, l'échec).

S'il faut continuer les jeux de mots, on pourrait dire que le repentir, çà fait repartir vers l'avenir, alors que le remords, çà mord et cela a un goût de mort. (Et nous tous, peu ou prou, fragiles et pécheurs, nous donnons parfois du grain à moudre à ce moulin!

Ecoutons le poète!

Pouvons-nous étouffer le vieux, le long remords,

Qui vit, s'agite et se tortille, et se nourrit de nous, comme le ver des morts,

Comme du chêne la chenille?

Pouvons-nous étouffer l’implacable remords?

BAUDELAIRE, bien sûr les Fleurs du Mal, « Spleen et idéal»

Après le poète, et le psychologue

Le remords est la douleur cuisante et comme l'indique le mot, la morsure qui torture le cœur après une action coupable.

Le repentir est une tristesse de l’âme: le remords est une torture et une angoisse.

Le repentir est presque déjà une vertu;

P. Janet. Traité de psychologie p. 655

(Et une sœur moniale me disait récemment ) : Certes dans le repentir, il y a bien aussi une part de tristesse et de combat, mais qui éclairée par la Parole de Dieu et l’Esprit Saint, fait passer - repartir avec courage. Ce Repentir, ce repartir qui nous retourne vers notre Père et nos frères, c'est vraiment notre vie chrétienne.

Nous y aide bien sûr grandement ce regard sur le Christ Serviteur (que nous a si bien rappelé la deuxième lecture) et peut-être aussi l'exercice entraînant de tels de nos frères et sœurs quand on voit des pécheurs, publicains, prostituées ou autres, croire à la Parole et changer de direction.

Frères et sœurs, on parle des Jeux Olympiques, c'est bien! Mais que le Seigneur nous fasse tous prendre part à cette Bonne Course du Repentir- Repartir! (2005-09-25)

Homélie du 21 août 2005 — 21e dim. ordinaire — Frère Sébastien
Cycle : Année A
Info :

Année A - 21e dimanche du T.O - Messe de clôture des JMJ à Cologne 21/08/2005

Is 22,19-23 – Rm 11,33-36 – Mt 16,13-20

Homélie du F.Sébastien

Texte :

Avant de commencer, je dois avouer qu’en préparant cette homélie, j’ai eu pas mal de distractions, et, hélas, cela continue...

Je me disais qu’en préparant son homélie de ce matin, à Cologne, le pape avait dû avoir pas mal de distractions ! Pas seulement du fait de la foule des jeunes et de l’événement…

Mais comment ne penserait-il pas en même temps à Jean-Paul II qui l’écouterait attentivement, de là-haut, entouré de la cour céleste, peut-être côte à côte avec un certain Simon-Pierre, celui de notre évangile. Pierre qui, un jour, s’était entendu dire à un homme de Nazareth, encore mal connu : »Tu es le messie », c’était déjà énorme, mais aussi : « Le messie, le Fils du Dieu vivant » !

Pierre, là-haut, doit encore se demander : « Mais qu’est-ce qui m’a poussé à dire cela ? » Même s’il n’a pas oublié l’inoubliable, l’insondable : « Ce n’est pas la chair et le sang qui t’ont révélé cela, mais mon Père qui est dans les cieux ».

Pierre soudain face à ce « Mon Père », le Père de Jésus, le Dieu vivant. Et nous aussi, avec Pierre.

À l’intérieur du fameux « Pour vous, qui suis-je ? » dit par Jésus à ses disciples, et à nous-mêmes, j’en entends un autre, caché dedans, celui de Dieu lui-même : « Moi, Dieu, pour vous, qui suis-je ? »

Oui, qui donc est-il ce Dieu, ce Dieu vivant dont Jésus est le Fils ? C’était ma question, et je n’en suis pas sorti… Alors j’ai pris mon missel.

La première lecture nous met en présence d’un Dieu qui saisit par la peau du cou le gouverneur Shebna, – Shebna était alors le grand maître du palais du roi d’Israël, Ézéchias, c’était son premier ministre, – Ce Shebna, Dieu le saisit pour, d’autorité, l’enlever de son poste, le déclasser, et mettre à sa place un certain Éliakim, fils de Hilkias, auquel il transmet les pouvoirs du prédécesseur, tout en s’engageant, par une promesse qui enjambe souverainement sur l’avenir : « Éliakim, dit Dieu, je le rendrai stable comme un piquet qu’on enfonce dans un sol ferme – vous voyez l’image – . Il sera comme un trône de gloire pour la maison de son père ». Autre image.

C’est dit, et ce sera ! Foi de Dieu !

Dieu, notre Dieu, qui donc es-tu pour disposer à ta guise, et des hommes et de leur histoire ?

Dans la troisième lecture on retrouve le même Dieu, sept siècles plus tard.

Mais cette fois-ci, c’est Jésus, le Fils du Dieu vivant fait homme, qui parle, et avec la même souveraineté que son Père. Il s’adresse à Simon-Pierre. Il lui annonce que, exactement comme Éliakim, il sera investi de l’autorité suprême, gratuitement, sans mérite de sa part : « Tu es Pierre, et sur cette pierre je bâtirai mon Église. Je te donnerai les clés du Royaume des cieux… ». Tu es Pierre de chair et tu deviendras pierre de pierre, roc, socle inébranlable, un piquet dans le sol ferme. C’est dit, et ce sera !

Dieu, notre Dieu, qui donc es-tu, pour disposer à ta guise et des hommes – jusqu’en ton Fils fait homme – et de l’histoire de tous les hommes, jusqu’à la nôtre, jusqu’à la mienne ?

Balancé entre la première et la troisième lecture, je me retrouve au centre, au point d’équilibre, dans la deuxième, la finale du chapitre 11 de l’épître aux Romains. La perspective s’est élargie.

Il ne s’agit plus d’individus mais de deux peuples : l’aîné, le peuple d’Israël, le cadet, le peuple chrétien, tous deux frères, cheminant à travers les chassés croisés de leurs histoires respectives, livrés à leur autonomie, à leur liberté, pour former un jour un seul peuple, le peuple que nous sommes, l’unique peuple de Dieu, notre Dieu qui les attend ensemble.

Alors, ce Dieu, qui donc est-il ? Lui qui ne cesse de nous interpeller à travers son Fils : « Pour vous, qui suis-je ? Qui sommes-nous, moi et mon Fils, tous deux en un, ce Fils que je vous ai envoyé, que je vous donne dans cette eucharistie, moins comme une réponse que comme une question, une interrogation éternellement posée aux seuil de notre mystère, le nôtre qui est devenu le vôtre…

Restons-en là. Laissons les paroles de saint Paul entendues tout à l’heure nous entraîner dans la profondeur qu’on ne peut plus qu’adorer : « Quelle profondeur dans la richesse, la sagesse et la science de Dieu ! Ses décisions sont insondables, ses chemins sont impénétrables !… Tout est de lui, et par lui, et pour lui. À lui la gloire, pour l’éternité ! Amen. (2005-08-21)

Homélie du 15 août 2005 — Assomption de la Vierge Marie — Frère Sébastien
Cycle : Année A
Info :

VEILLÉE AVEC LES JEUNES EN PÈLERINAGE VERS VÉZELAY.

– Samedi 18 mai 2007 – 21 h.

Assomption 15 août - Lc 14 39-56

Homélie du F.Sébastien

Texte :

Vous avez choisi de réfléchir sur l’ évangile de LA VISITATION,

et je ne sais pas si c’est pour cela que vous, les plus jeunes, vous avez voulu venir nous visiter, nous les plus âgés, comme Marie a visité Élisabeth…

Oui, ce soir, c’est Visitation, une rencontre.

Il y a beaucoup de rencontres dans vos vies de jeunes, comme aussi dans les nôtres, et il faut les réussir.

L’évangile nous donne pour cela un magnifique modèle.

Mais avez-vous réalisé, qu’en ce moment il y a deux personnes qui nous regardent, vous et nous. Oui, deux, Marie et Élisabeth. Elles sont là, parmi nous, pour continuer à vivre avec nous, ce qu’elles ont commencé il y a 2000 ans, et qui n’est pas fini !

C’est là le miracle de la liturgie, un miracle de présence, d’entraide, de communion. Ce soir, avec elles , nous ajoutons une page à l’évangile.

--------------.Je sais que vous avez déjà réfléchi entre vous sur ce beau texte, très riche. Aussi je me conterai de parler avec vous seulement de trois choses.

1 – Quand Marie arrive chez Élisabeth, c’est pour lui faire le plus beau cadeau du monde.

Elle lui apporte la présence de Jésus qui vient d’être conçu, encore minuscule en elle, dans son ventre et surtout dans son cœur. Si elle le porte en elle-même, c’est parce qu’elle a reçu la visite de l’ange et qu’elle a dit “oui”. C’était de la folie, mais elle était prête.

L’important, c’est de bien voir qu’il n’y a pas de Visitation, s’il n’y a pas d’abord une Annonciation. On n’apporte aux autres que ce que l’on a reçu. Nous aussi, nous devons dire oui à l’ange quand il vient nous visiter. Il faut nous préparer. Comment ? Il faut apprendre à goûter des temps de silence, savoir arrêter périodiquement le tournis des activités, des préoccupations, prendre l’habitude de prier jusqu’à ce que cela devienne un besoin, le meilleur moment de nos journées, lire sa Bible et, comme Marie, avoir de grands désirs, les laisser grandir en soi. Et un jour on est prêt. à entendre, à accueillir le don de Dieu, à se donner.

Pour nous, les moines, c’est pareil. Cela demande un engagement, du temps, mais c’est payant.

2- Vous avez sans doute remarqué l’importance du corps dans cet évangile. Sitôt après l’Annonciation, Marie part en hâte visiter sa cousine âgé. Marie a environ 15 / 16 ans, une jeune femme qui trottine allègrement, elle est en forme, une bonne centaine de km, du sport.

Demain, quand vous marcherez vers Vézelay, pensez à elle qui marche avec vous. Vous pourrez même lui parler. Oui, je suis sérieux. Et vous verrez : quand on lui parle, elle se rend présente, elle sait se faire très proche dans nos joies et dans nos peines. Vous avez certainement des choses à lui demander, à lui confier. Profitez de l’occasion.

Quand Marie arrive chez Élisabeth, tous les corps entrent en action, de façon étonnante. Dieu a besoin de nos corps. Dès qu’Élisabeth entend la salutation de Marie, – entend avec ses oreilles de chair, – Jean aussi entend, et il bondit dans le sein de sa mère. À six mois, le fœtus gigote, et ce jour-là il est tellement heureux qu’il tape du pied de l’intérieur pour faire comprendre qu’il a reconnu l’arrivée de Celui qui est le Messie attendu…. : Ça y est, les temps nouveaux sont commencés ! Joie ! Joie pour le monde entier. Et il l’annonce… en tambourinant !

Mais il y a plus. En entendant, avec ses oreilles de chair, la salutation de Marie, Élisabeth est remplie de l’Esprit Saint… ! Comment est-ce possible ? C’est possible parce que, si nous avons des yeux, des oreilles, des sens matériels – cinq sens – nous avons aussi des sens spirituels. C’est par leur ouïe spirituelle qu’Élisabeth et Jean ont entendu ce que d’autres n’auraient jamais entendu !

Nous aussi nous avons des sens spirituels et nous devons les exercer. Comment ? En écoutant au fond de notre cœur tout ce qui nous vient de Dieu par les autres, par les événements. Il y a des choses à percevoir dans nos rencontres, dans nos lectures, en tout : Dieu se sert de tous nos sens pour se communiquer à nous, pour nous parler et nous remplir de joie.

Il est le premier à nous visiter, en nous donnant l’Esprit Saint, le cadeau des cadeaux, celui qui est offert à la Pentecôte. Joie !

3 – Je termine en vous lisant quelques lignes de la Règle de Saint Benoît.

Saint Benoît voudrait apprendre aux moines comment accueillir leurs hôtes, comment faire de tout accueil une visitation. Écoutez, et voyez si cela vous dit quelque chose pour votre vie.

REGLE Chapitre 53 - De la réception des hôtes

Tous les hôtes qui se présentent doivent être reçus comme le Christ, car il dira : « J'ai été hôte et vous m'avez reçu ». À tous on rendra les honneurs qui leur sont dus, surtout aux frères dans la foi et aux étrangers. Lors donc qu'un hôte sera annoncé, le supérieur et les frères iront à sa rencontre avec toutes les politesses de la charité. On commencera par prier ensemble, et ensuite on échangera la paix.

Etc. Comme Élisabeth accueillant Marie ! Ce serait l’idéal !

Homélie du 14 août 2005 — 20e dim. ordinaire — Frère Guillaume
Cycle : Année A
Info :

Année A - 20° dimanche du temps ordinaire – 14/08/2005

Isaïe 56,1,6-7 ; Rom. 11,13…32 ; Math. 15,21-28

Homélie du F.Guillaume

Texte :

Frères et sœurs,

Les trois lectures que nous venons d’entendre sont clairement placées sous le signe de l’ouverture et de l’universalisme du salut proposé à tous. Elles nous invitent ainsi à élargir notre regard, à faire reculer les frontières de nos horizons souvent trop étroits et à remettre en cause sans doute nos idées spontanées ou nos présupposés à l’égard des étrangers.

La 1ère lecture se situe dans un contexte de restauration, peu de temps après l’exil d’Israël à Babylone et le retour à Jérusalem. Tant de bouleversements ont eu lieu en si peu de temps : la destruction du Temple, la déportation d’une partie du peuple, la fin de la Royauté. Une simple remise en place du passé ne suffit pas ; il faut imaginer de nouveaux modes d’existence et en particulier il faut reconsidérer la relation avec les étrangers devenus nombreux sur la terre et qui souhaitent s’intégrer à Israël. C’est une époque de réelle crise d’identité, conjointe à une grande pauvreté, comme en connaissent bien des pays à certaines heures de leur histoire. Pensons aux années qui ont suivi la fin de la seconde guerre mondiale, qui ont vu naître une nouvelle Europe, avec la réconciliation entre nations qui se haïssaient et qui se combattaient depuis des siècles.

L’auteur de ce début du chapitre 56 du livre d’Isaïe s’inscrit, lui, dans une perspective religieuse. Un jour viendra, et il vient bientôt, où le Seigneur rendra heureux tous ceux qui lui auront été fidèles et qui auront pratiqué la justice et le droit, même si ce sont des étrangers qui selon la Loi, la Torah, ne sont pas admis au culte officiel du Temple. Ce nouveau Temple alors deviendra une maison de prière pour tous les peuples. Dieu fera bon accueil à tous les hommes de bonne volonté. Quelle merveille parole biblique qui garde encore toute son actualité et sa force, en notre temps, pour nos églises, pour nos communautés !

Saint Paul dans la seconde lecture se confronte à la question si mystérieuse et si douloureuse pour lui du refus d’Israël d’accueillir le salut par la foi en Jésus-Christ. Il se situe peu de temps après les événements bouleversants de la Passion et de la Résurrection du Christ, qui ont amené eux aussi à une reconsidération du rapport entre judaïsme et paganisme. Paul, lui-même est un converti : il a fait l’expérience décisive de la miséricorde de Dieu, alors qu’il persécutait les premières communautés chrétienne.

L’épître aux Romains est une longue et profonde méditation sur le péché qui atteint tous les hommes, juifs comme païens depuis les origines, et sur la grâce offerte à tous et en surabondance, du fait de la miséricorde et du désir de Dieu que tous les hommes soient sauvés. C’est un texte théologique difficile, mais nourri d’espérance et de confiance. Ouvert sur l’avenir, il proclame que la vie et la réconciliation dans le Christ auront le dernier mot. Elles triompheront de toutes les fermetures à l’amour et de toutes nos désobéissances à la foi.

Enfin l’Evangile met en scène Jésus face à une païenne, une cananéenne, dans ce récit si touchant et si profond de la guérison d’une fillette, obtenue non sans peine ni astuce par la foi de sa mère.

L’intention théologique de Saint Matthieu est bien, là encore, celle d’une ouverture, d’un éclatement des horizons du salut, qui semble surprendre Jésus lui-même, dans la conception qu’il se fait de sa propre mission : « n’ai-je pas été envoyé qu’aux seules brebis perdues d’Israël ? » Tout montre dans le texte que Jésus est contrarié. Il n’a pas envie au début de s’adresser à la femme qui le supplie de ses cris. Ce sont les disciples qui sont les intermédiaires et qui demandent à leur maître une guérison expéditive pour avoir la paix. Et puis, sur l’insistance de la femme qui ne veut avoir à faire qu’avec Jésus, ce dernier va avoir une parole très dure, qui nous choque : « il n’est pas bien de prendre le pain des enfants pour le donner aux petits chiens ». Cette réplique pourrait nous faire penser à celle que Jésus a eue vis-à-vis de sa mère, la Vierge Marie, à Cana, à l’occasion du premier miracle – ou signe – rapporté par l’évangile de Jean. Jésus avait dit à sa mère avec une certaine brutalité : « femme, que me veux-tu ? Mon heure n’est pas encore venue ». Mais dans l’un et l’autre cas, c’est la foi d’une mère, alliée à une fine psychologie de la situation qui va toucher le cœur de Jésus, et le faire revenir sur ce qui semblait être une première position : ne rien faire, car cela ne convient pas ou ce n’est pas le bon moment d’agir.

La foi de cette cananéenne, tout comme celle de Marie provoquent l’admiration du Seigneur, l’élargissement de son cœur, en libérant du fait même sa puissance de thaumaturge. La fillette est guérie, l’eau est changée en vin.

Notons aussi dans notre évangile les mentions du pain, que ce soit celui donné aux enfants ou les miettes qui tombent de la table du maître pour les petits chiens. Tout comme le vin de Cana, le pain a une résonance eucharistique. La rencontre de Jésus et de la cananéenne se situe dans l’évangile de Matthieu entre deux récits de multiplication de pain, et à chaque fois l’évangéliste s’intéresse aux restes, qui sont bien plus que des miettes : 12 paniers pleins dans un cas, sept corbeilles pleines dans l’autre. Tous ces détails de récit sont signifiants pour dire la surabondance du salut apporté par Jésus, l’envoyé du Père, pour guérir et donner vie et nourriture à des milliers d’hommes, sans compter les femmes et les enfants…

Que retenir alors de ces textes de la liturgie de ce dimanche pour nous ?

Nous vivons à l’heure de la mondialisation, des échanges tout azimuts, économiques, culturels, religieux. Qu’en est-il donc de la prétention à l’universalisme du message chrétien ? Nous savons qu’elle est contestée par d’autres universalismes : les droits de l’homme, l’Islam, le libéralisme économique, etc.

N’avons-nous pas à être assez modestes dans cette prétention contenue dans l’annonce de la foi ? Acceptons d’être parfois déconcertés, dérangés par l’aujourd’hui de notre monde, qui rejoint l’aujourd’hui de Dieu. Nous n’avons pas réponse à tous les défis qui se présentent. Il nous faut tenir bon dans la foi, dans l’espérance, dans l’amour.

Comme pour les prophètes de l’Ancienne Alliance, comme pour Saint Paul, comme pour la Cananéenne et pour Marie, ce sont ces vertus cardinales qui nous font tenir et discerner ce qui convient de faire ou de ne pas faire, et cela au-delà de tout ce qui nous surprend, nous contrarie ou nous déconcerte. Alors pourrons nous entendre à notre tour : « ma grâce te suffit, ma puissance donne toute sa mesure dans la faiblesse. Car, lorsque je suis faible, c’est alors que je suis fort ».

AMEN (2005-08-14)

Homélie du 17 juillet 2005 — 16e dim. ordinaire — Frère Servan
Cycle : Année A
Info :

Année A - 16° Dimanche du Temps Ordinaire

Sg 12 13,16-19; Rom 8 26-27; Mt 13 44-52

Homélie du F.Servan

Texte :

Après la grande parabole du semeur, dimanche dernier, voici une nouvelle salve de paraboles (en Mt 13).

Quelles sont vos impressions, après audition de cet évangile ?

Etes-vous encouragés (avec un visage souriant tourné vers le haut) ou attristés (regard en accent circonflexe tourné vers le bas) ou bien perplexes ?

.

Encouragés, nous avons pu l'être par la parabole proprement dite (Attention à bien l'intituler: non pas « de l'Ivraie » mais « du bon grain (de blé) et de l'ivraie". Elle invitait à la patience miséricordieuse (en harmonie avec la belle méditation du livre de la Sagesse que nous avons entendue en première lecture: « Dieu de patience toute puissante envers toutes choses, tu nous gouvernes avec beaucoup de ménagement ; nous pénétrant ainsi d'une belle espérance » et notre Parabole s'achevait sur une note positive de bonne et belle moisson (dans la région, cela va être) « Quant au blé, rentrez-le dans mon grenier ! »

Mais nous risquons d'être attristés - renfrognés par l'explication allégorique de la parabole qui a suivi et où l'évangéliste Matthieu en professeur sévère semble prendre plaisir à inscrire au crayon rouge ces notations « fournaise de feu, pleurs et grincements de dents » (il recommencera dimanche prochain avec la parabole du filet et des deux sortes de poissons.

Et nous avons pu être étonnés par cette classification « à la grosse », répartissant les hommes en deux catégories : fils du royaume-fils du mauvais" (les gens compétents nous expliquent qu'il s'agit d'un sémitisme où l’on recherche la force de frappe ; comme dans les Psaumes, nous avons « les justes-les impies ». Sans évacuer totalement l'opposition, on peut au moins la nuancer, par exemple en citant Soljenitsyne (dans l'Archipel du goulag » II p.459) : « Peu à peu j'ai découvert que la ligne de partage entre le bien et le mal ne sépare ni les Etats ni les classes ni les partis mais qu'elle traverse le cœur de chaque homme et de toute l'humanité. Cette ligne est mobile, elle oscille en nous avec les années ».

Pour en revenir à l'explication de la parabole, elle semble se focaliser davantage sur l'ivraie (le mal, la zizanie), lui consacrer plus d'attention (et de lignes) qu'au bon grain - comme par un effet de zoom. Est-ce qu'il ne nous arrive pas d'en faire autant parfois en regardant la vie du monde, de l'Eglise, de notre communauté de vie, de nos proches, et de notre propre vie ? En regardant surtout ce qui ne va pas? Par exemple, on parle ici de « ceux qui font tomber les autres », les scandalisent, sans parler de ceux qui porteurs des Béatitudes aident les autres à vivre et à se relever! On n’insiste plus tant sur la patience miséricordieuse que sur la menace (le jugement) qui pèse sur ce qui ne vaut rien.

Donc nous sommes plutôt attristés. L'équilibre se rétablirait si nous faisions maintenant un zoom plus large sur l'ensemble de l’évangile entendu et en laissant parler un peu les images comme il convient à des paraboles!

Certes, il y a l'image sombre de l'ennemi qui sème l'ivraie de nuit dans le champ de son voisin (le visage caché par un pan de son grand manteau noir avec une musique de fond adapté à la scène -l'apprenti sorcier de Dvorak - sous une demi-lune, pas très catholique.

Mais en contraste il y a le bel arbre aux oiseaux dans la lumière de ce début" d'été, l'arbre de Saint François aux oiseaux et celui de beaux dessins d'enfants (image du monde réconcilié). Et puis, toute l'aventure de la graine dont pourrait vous parler les jardiniers: enfouie, renaissant, grandissant, selon les aléas du temps, et encore, la force du levain dans la pâte, avec laquelle la ménagère palestinienne du temps de Jésus va faire cuire pour sa famille de belles galettes dorées et croustillantes.

Réalité du bon grain – réalité de l’ivraie

Réalité de la belle espérance – réalité de la nécessaire conversion.

Je pense, ici, frères et sœurs, à la brève mais admirable deuxième lecture deux ou trois petites phrases du fameux ch 8 de la lettre de Paul aux Romains : « L'Esprit Saint qui habite en chacun de nous vient au secours de notre faiblesse, crie et combat avec nous, nous console et nous convertit, nous fait discerner, parle en nous mais aussi par nos frères et sœurs qui peuvent nous faire des remarques utiles mais aussi nous encouragent. L’Esprit Saint parle à notre esprit par notre vie, plus encore que par des paroles. Il nous faut nous écrier : « NOUS RENDONS GRACES A DIEU » !!

(2008-07-20)

Homélie du 11 juillet 2005 — Saint Benoît — Frère Sébastien
Cycle : Année A
Info :

Fête de St Benoît - 11 juillet 2005

Homélie du F.Sébastien

Texte :

Nous voici en pleine liturgie. La liturgie, c’est quoi ?

C’est prendre une conscience plus vive qu’« en tout lieu, Dieu nous voit » :

le ciel est ouvert au-dessus de nos têtes,

un bon regard est posé sur chacune, sur chacun, sur nous tous ensemble.

Le regard de notre Père du ciel et de son Fils Bien-aimé,

tous deux unis par leur amour mutuel,

par leur Esprit répandu dans nos cœurs.

Et, à côté du Père, à l’honneur, quelqu’un…qui ?...

bien sûr, celui qui est fêté aujourd’hui, au ciel comme sur la terre,

un certain Benoît de Nursie,

oui, Benoît, tout ému de ce qui lui arrive, et pourtant il s’y attendait, bien sûr, comme autrefois au monastère.

Dans la liturgie, il faut parfois fermer les yeux pour mieux écouter,

pour entendre le concert céleste qui bat son plein…

Vous entendez ?... les anges musiciens, les chœurs des bienheureux,

tous ceux qui chantaient faux ici-bas

et qui s’émerveillent là-haut de chanter juste.

Une harmonie parfaite ! Cette harmonie est la nôtre, nous en sommes :

sur la terre, c’est comme au ciel. C’est cela la liturgie.

Aujourd’hui, jour de fête, chacune, chacun a le droit d’aller poser son oreille sur la poitrine de Benoît notre Père,

comme le Disciple Bien-aimé sur la poitrine de Jésus, et d’écouter.

Le cœur de Benoît est plein de sa lectio divina de ce matin. Oui, au ciel il a gardé ses habitudes du monastère.

Les paroles de la bible sont inépuisables et l’Esprit Saint met sa joie à les rendre neuves chaque matin.« Mon fils, si tu creuses comme un chercheur de trésor, alors tu découvriras la connaissance de Dieu », elle est sans fond.

Benoît, inlassablement, continue, au ciel, de chercher Dieu, comme il le cherchait sur la terre ; il continue de s’enfoncer dans la profondeur de son mystère. Il le cherche pour lui-même et il aide les moines et les moniales à chercher avec lui : il connaît leur soif, c’est encore la sienne. C’est aussi la soif de tous ceux, de toutes celles qui l’entourent en ce moment, depuis la Vierge Marie jusqu’au dernier des bienheureux, celui qui vient tout juste d’arriver au Paradis, et qui entre sur la pointe des pieds, émerveillé de ce qu’il voit et de ce qu’il entend.

Il entend Benoît qui médite à mi-voix au souffle de l’Esprit.

« Tout homme, toute femme qui aura quitté, à cause de mon nom, des frères, des sœurs, un père, une mère – même sa nourrice ! – recevra beaucoup plus et il aura en héritage la vie éternelle ». Choc en son cœur… « C’est vrai, la vie éternelle, je l’ai, j’y suis. Je peux en témoigner,

et je veux passer mon ciel à le crier sur la terre »,

comme la petite carmélite qui aurait mérité d’être bénédictine.

Benoît fait parfois lectio avec Scolastique. Ce 11 juillet au matin, ils ont médité ensemble les oraisons de la messe : « Seigneur, regarde avec bienveillance les offrandes que nous te présentons, en la fête de saint Benoît… » et d’ici je vois le patriarche qui baisse modestement les yeux, tandis que Scolastique l’encourage à bien tenir son rôle, d’autant plus qu’elle se sent aussi concernée, le frère et la sœur, inséparables ! Ensemble, ils continuent : « Seigneur, fais qu’à son exemple.. » mais une petite voix s’écrie tout haut « de Scolastique aussi », « en ne cherchant que toi, nous trouvions en te servant des grâces d’unité et de paix. » De paix.

Les grâces dont chaque monastère, chaque pays, l’Europe, le monde entier, ont tant besoin.

L’avenir est à la prière, la liturgie en est le cœur.

Homélie du 10 juillet 2005 — 15e dim. ordinaire — Frère Sébastien
Cycle : Année A
Info :

Année A – 15° dimanche du Temps Ordinaire - 10 Juillet 2005

Is 55 1-10 ; Rm 8 18-23 ; Mt 13 1-23 ;

Homélie du F.Sébastien

Texte :

S’il fallait tout dire en deux images, je dirais : la fleur de pissenlit et l’arrosoir…

Mais peut-être faut-il quand même un brin d’explication…

« Ce jour-là, Jésus était sorti de la maison… »

Jésus n’arrête pas de sortir, de quitter un lieu trop restreint pour lui, un auditoire restreint. Il a besoin d’espace, il a besoin des foules, de tous, de vous, comme de moi.

C’est pourquoi il va s’asseoir, face au vaste horizon du lac de Tibériade, au bord de l’eau.

En cette heure matinale, la plage est déserte. Grand silence… À peine un clapotis.

Il est seul. Avant de parler, il prend toujours un bon temps de prière.

Peut-être lui vient-il alors le souvenir du jour où il a appelé pour la première fois de sa vie, en ce même endroit, au bord de ce lac.

Quatre pécheurs lui tournaient le dos. Sa parole les a touchés en plein cœur. Il les a vus tout quitter, venir à lui et se mettre à le suivre.

Inoubliable expérience de la puissance de sa parole !

Mais le soleil est déjà levé, des éclats de voix approchent. On l’a repéré, il est signalé : « Jésus, le grand guérisseur, le prophète, est au bord du lac ! » Des gens se rassemblent, l’encerclent, l’emprisonnent : ils ont soif de recueillir les graines de vie qui bouleversent les existences.

Pour pouvoir parler à tous, Jésus se dégage, monte dans une barque, s’assied, seul en face de la foule restée sur le rivage.

Et là, si j’ose dire, se déploie la fleur de pissenlit : une boule, ronde à la perfection, d’une blancheur céleste, gonflée de minuscules graines aériennes, chacune avec son parapente.

Et voilà que le VENT se met à souffler, ce vent qui souffle où il veut… et tu ne sais ni d’où il vient, ni où il va… ni ce qu’il peut t’apporter !

Jésus en fleur ne travaille jamais qu’avec l’Esprit.

Une partie des graines tombent dans le lac, perdues. D’autres s’envolent, montent dans l’air chaud, pour un voyage qui pourra les conduire aux extrémités de la terre. D’autres atterrissent au bord des chemins pierreux, les oiseaux les picorent, perdues. Sans compter les ronciers, mille autres périls. Dieu le sait, c’est prévu. Mais la peine qu’on se donne n’est jamais perdue ! Il y a aussi la bonne terre, celle des cœurs comme chacun des vôtres… avec parfois des rendements de 100 pour un !

Le Créateur n’arrête pas de prodiguer ses graines et le vent de les emporter. Dieu est un grand optimiste. Il a l’espérance chevillée au corps, au corps de son Fils. Jésus part toujours gagnant, même si la croix se profile au bout du chemin.

Il sait d’expérience millénaire que

« la pluie et la neige qui descendent des cieux n’y retournent pas sans avoir abreuvé la terre,

sans l’avoir fécondée et l’avoir fait germer ».

Sourire d’en bas, vers le Père qui est au ciel et, de là-haut, verse largement…

Jésus, de sa barque, parle aux hommes, mais il n’en continue pas moins sa prière à son Père, c’est pour lui une nécessité vitale. Le Père agit toujours, telle est la source de son bonheur de Fils, de son émerveillement, de sa louange :

« Père, Tu visites la terre et tu l’abreuves,

tu la combles de richesses. Béni sois-tu !

Tu couronnes toute une année de bienfaits. Béni sois-tu !

Comble de tes bienfaits tous ceux qui m’écoutent

et arrose-les, sans compter ».

Un plein arrosoir pour chacun, pour chacune ! (2005-07-10)

Homélie du 03 juin 2005 — Sacré Cœur — Frère Servan
Cycle : Année A
Info :

Année C - Fête du Sacré-Coeur - 6 mai 1986

Ez 34 11-16; Rom 5 5-11; Lc 15 3-7

Homélie du F.Servan

Texte :

Le Cœur du Christ Jésus, Vrai Dieu et vrai homme, c'est le carrefour de l'Amour qui est l'enjeu de toute l'histoire Sainte (et de toute l'histoire humaine profonde).

C'est le carrefour, le croisement, la rencontre.

De l’amour de Dieu pour l’homme, de cet amour maternel du Père (« matriciant » dit Chouraqui) qu'évoquait si bien le texte d'Isaïe 54. lu hier aux premières Vêpres de la fête et que désigne l'Oraison de la fête :

Seigneur notre Père, en vénérant la Cœur de ton Fils bien-aimé, nous disons les merveilles de ton amour pour nous !

Et de la réponse d’amour qui monte de l’homme vers Dieu, ce que désigne cette fois la prière sur les Offrandes :

« Regarde., nous t’en prions, Seigneur, l'amour: inexprimable du Cœur de ton Fils, pour que nos offrandes te soient agréables ».

(Le Christ est cette fois du côté de l'homme, avec ses frères et leurs offrandes) !

Les « merveilles de ton amour », ces mirabilia, c'est déjà le grand jaillissement premier et toujours actuel de la Création : le don gratuit et surabondant de la vie.

Et c'est très vite, la quête de la brebis perdue : « La brebis perdue, je la chercherai, l'égarée, je la ramènerai ».

(Thème des lectures pour l'année C. Ezéchiel 34 et Luc 15)

Dieu en quête de: l'homme ! Quête commencée dès le; jardin de la Genèse et s'exprimant dans cet appel : « Adam ! où es-tu ? » et Saint Ambroise de commenter de façon belle cette parole :

« Le Seigneur appela l'homme et lui dit : Où es-tu? - Le juste qui voit le Seigneur et qui vit en sa compagnie ne doit ni se cacher de sa présence ni être appelé par lui, car il est toujours' avec lui (cf les 99 brebis non perdues de l'évangile). Mais le pécheur qui se dérobe à sa voix et qui se cache dans le bosquet du paradis, celui-là Dieu l'appelle : Adam, où es-tu? Car s'il se cache, c’est qu'il a honte. Mais du fait que Dieu l'appelle, c’est déjà un indice :.qu’il pourra guérir de son péché, car Dieu

appelle ceux dont il a pitié.

Dieu appelle Adam, mais celui-ci ne. Répond pas et se cache ! Alors, Dieu appelle Abraham et celui-ci répond : « Me voici », et 'il part, jusqu'aux extrêmes limites de la foi et de la liberté. Et la réponse plénière et définitive, Dieu la trouve enfin dans la Pâque de; Jésus, l'homme:: véritable, enfin réussi: « Voici l'Homme » ! En lui, voici tous les hommes.

Jésus Christ, à la croisée: de; deux amours : Dieu en quête de l' homme: - l'homme répondant à l'appel.

En terminant, relevons. Encore comment tous ceux et celles qui ont contemplé le cœur du Christ, non seulement sont entrés personnellement dans cette histoire d’amour mais se sont mis, à leur tour, avec le Christ, à la recherche de l'homme, se sont prêtés jusqu'à user leur vie à la quête de Dieu cherchant l'homme : « La brebis perdue, je la chercherai, l'égarée je, la ramènerai ». (1986-05-06)