vendredi 15 août 2025 : fête de l’Assomption, horaire des dimanches (vigiles la veille à 20h45, messe à 10h) + concert à 16h.

Nota : L’office de None (14h45) sera prié au dolmen de ND de la Pierre-qui-Vire.

Homélies

Liste des Homélies

Homélie du 12 août 2012 — 19e dim. ordinaire — Frère Guillaume
Cycle : Année B
Info :

Année B - 19° Dimanche du Temps Ordinaire - 12 août 2012

1 Roi 19 4-8; Eph 4 30-5 2; Jn 6 41-51

Homélie du F.Guillaume

Texte :

Frères et sœurs

L’élément qui fait le lien entre la 1ère lecture et l’évangile que nous venons d’entendre, c’est la mention du pain, et c’était déjà le cas les deux derniers dimanches d’été, alors que l’Eglise nous fait méditer sur le grand chapitre 6 de l’évangile selon Saint Jean. Le pain, c’est cette nourriture de base pour l’homme qui lui permet de reprendre de la force physique, mais c’est aussi pour nous chrétiens le pain venu du Ciel, aliment de vie éternelle : Pain de Vie auquel Jésus s’est identifié lui-même en personne.

En fait dans ces deux lectures, plus profondément que de pain, il est question de vie et de mort. Et cette question plus fondamentale nous concerne tous bien évidemment.

Elie est, avec Moïse, l’un des plus grands personnages de l’AT. On les trouve en compagnie de Jésus sur la Montagne de la Transfiguration, avec les 3 grands apôtres Pierre, Jacques et Jean, comme nous le rappelait la liturgie de lundi dernier. Tous deux cependant, si grands soient-ils aux yeux de Dieu et des hommes, ont fait l’expérience de l’échec, du découragement et d’une certaine désillusion sur ce qu’ils pensaient être dans leurs missions de prophète. On peut dire qu’ils ont connu des moments de dépression avec le sentiment d’insuffisance qui la caractérise et la tentation de fuir devant la difficulté. Moïse s’estimait peu doué pour la parole : il aurait préféré que Dieu choisisse un autre que lui pour délivrer son peuple de la servitude d’Egypte. Après le péché du peuple, qui avait sacrifié à un veau d’or dans le désert et qui récriminait sans cesse, rebelle aux commandements, Moïse demande à Dieu de l’effacer du livre qu’il a écrit, s’il n’accorde pas son pardon et s’il n’enlève pas le péché du peuple.

Elie, quant à lui, dans le texte d’aujourd’hui, fuyait l’hostilité de la reine Jézabel, qui lui en voulait à mort, pour avoir exterminé tous les prêtres de Baal, auquel elle vouait un culte. En fait, Elie a peur, pour le dire vulgairement il a la trouille de cette femme qui veut sa perte. Il fuit donc, il marche une journée dans le désert, puis il s’effondre, épuisé et il demande la mort, en s’en prenant à Dieu : «Trop, c’est trop, reprend ma vie. Je me croyais supérieur aux autres, le plus grand parmi les prophètes, mais en réalité, je ne vaux pas mieux que mes pères ». Et il tombe dans le sommeil, près d’un buisson, tout comme le fera aussi le prophète Jonas, à Ninive, dans une expérience parallèle d’échec et de reproche à Dieu pour une mission jugée trop difficile.

Et si je mentionnai tout à l’heure l’épisode de la Transfiguration avec les apôtres Pierre, Jacques et Jean, comment ne pas penser aussi à leur sommeil profond à Gethsémani, à la veille de l’arrestation de leur maître, incapable de veiller et de prier, ne serait-ce qu’une heure ? Eux aussi font une cruelle expérience d’échec et de désillusion, à un moment crucial de leurs existences.

Elie se laisse toucher par un ange qui lui dit de se lever et de manger. Il mange, mais il ne se lève pas et se rendort. Ce que qu’avec un second toucher de l’ange qu’il va manger à nouveau, boire, et se relever pour reprendre la route qui s’annonce longue : 40 jours et 40 nuits, symbolisant les 40 ans de marche du peuple au désert durant l’exode. Avant de parvenir au Mont Horeb, où Elie fera l’expérience d’un Dieu, non pas Tout Puissant et violent, comme il pouvait se le représenter, mais comme un Dieu qui se révèle dans le « bruit d’un fin silence » ou « le vent d’une brise légère ».

Tous ces passages de l’Ecriture s’entrecroisent et peuvent, doivent, nous rejoindre dans nos propres expériences de combat spirituel, ou même de combat humain, face aux échecs, aux découragements, voire même à la perte du goût de vivre. Cela peut nous arriver à un moment ou un autre de nos existences : ce qui est sûr, c’est que cela arrive à des proches autour de nous.

C’est à ces moments-là de l’existence, que l’Evangile du Pain de Vie peut nous apporter Lumière et Force. Sa référence à l’eucharistie est claire : « si quelqu’un mange de ce pain, il vivra éternellement. Le pain que moi je donnerai, c’est ma chair donnée pour que le monde ait la vie ». Ainsi, le petit pain cuit et la cruche d’eau de l’ange d’Elie, la manne et l’eau du rocher au désert durant l’exode n’étaient encore que des signes. Ils apportaient certes la vie, mais une vie temporaire. Le Pain descendu du Ciel, Jésus en personne qui se donne, lui, apporte une vie qui ne finit pas : la vie éternelle. Celui qui en mange ne mourra pas : il aura part à la Résurrection, au Dernier Jour.

Telle est la foi chrétienne que nous proclamons chaque fois que nous nous rassemblons pour célébrer l’eucharistie, comme ce dimanche. Et cette foi chrétienne nous engage ensuite, quand nous reprenons la route pour une nouvelle étape, une nouvelle semaine, jusqu’à la prochaine eucharistie. Cet engagement, Saint Paul nous le rappelle dans la seconde lecture, quand il s’adresse aux chrétiens d’Ephèse :

« Vivez dans l’amour, comme le Christ. Vivez dans Son Esprit, l’Esprit Saint : ne le contristez pas. Cherchez à imiter le Christ : Il nous a aimés et s’est livré pour nous, en offrant à Dieu le sacrifice qui pouvait Lui plaire »

Alors avec Lui, par Lui et en Lui, offrons à Dieu à notre tour le Sacrifice de louange, offrons ensemble, dans la foi, l’eucharistie de ce dimanche. AMEN (2012-08-12)

Homélie du 14 juillet 2012 — 15e dim. ordinaire — Frère Matthieu
Cycle : Année B
Info :

1 - C – 2001 – 15° Dim du TO -15 juillet 2001

Dt 30, 10-14 ; Col 1, 15-20 ; Lc 10, 25-37

Homélie de frère Matthieu

Texte :

Frère Matthieu

« Maître, que dois-je faire pour avoir la vie éternelle ? »

Ce n’est pas une question piège – comme le laisserait entendre la traduction de notre évangile – c’est une question test ; ce nouveau Rabbi, dont on raconte tant de choses, est-il vraiment un bon, un vrai maître, qui entraîne sur les chemins de Dieu ?

Car il s’agit bien de la question essentielle : que faire pour vivre selon la Loi de Dieu, selon la volonté de Dieu, que faire pour être un bon juif, que faire pour être un bon chrétien, que faire pour être un homme vivant de la vraie vie ?

Heureux sommes-nous, si cette question est la nôtre comme celle de ce docteur de la Loi, épris de justice, épris de sainteté… et non pas « voulant montrer qu’il était juste » comme est traduit le texte…

C’est un débat sur l’essentiel entre un Maître galiléen dont on dit le plus grand bien et un disciple épris de sainteté… Alors écoutons bien, car le débat pourrait bien nous apporter une réponse pleine de sens et de vie pour nous mettre nous-aussi sur les chemins de Dieu.

Jésus fait preuve de la meilleure pédagogie rabbinique : il répond à une question par une autre question… et il va faire passer ce disciple du « caté-chisme », bien appris et bien récité à la découverte de l’accomplissement de la Loi : regarder et écouter autrui, son prochain, pour regarder et écouter comme Dieu regarde et écoute et dès lors agir comme Dieu, selon le besoin de l’autre tel qu’il se manifeste devant moi, entrer sur le chemin imprévisible de l’amour véritable qui me laisse à la merci de l’autre… comme Dieu s’est mis à la merci de l’homme jusqu’à en mourir !

Mais reprenons le cheminement pas à pas, car il s’agit bien pour nous d’apprendre aussi ce chemin pour passer de « l’appris » du commandement, de la règle, de ce qu’il faut faire, au regard et à l’écoute qui nous mettrons à la merci de la Parole de Dieu, à la merci de l’Amour…

A la question de Jésus, l’homme récite ce qui est le B.A. BA de la foi biblique et juive : le « petit catéchisme »… et Jésus approuve : oui, il n’y a qu’à faire ainsi… il n’y a qu’à vivre dans l’amour de Dieu et du prochain… il n’y a qu’à… mais justement l’homme, qui est un vrai disciple, épris de sainteté, et nous aussi, nous savons bien que c’est une tâche impossible et plus encore que nous ne savons pas par quel bout la prendre…

Alors, il ose une question : concrètement, concrètement qui est mon prochain… que je sache au moins par qui commencer !

Et Jésus raconte une parabole …

Et le disciple écoute de toutes ses oreilles.

Et il reconnaît le lévite « qui voit et passe de l’autre côté » et il reconnaît le prêtre… qui « voit et passe de l’autre côté »… et peut-être se reconnaît-il dans ce lévite et dans ce prêtre, plutôt que de les condamner comme nous sommes si prompts à le faire…

… / …

Et il voit ce samaritain – qu’attendre de bon d’un samaritain… mais il écoute et sait-on jamais ?

Car ce samaritain, « il voit et il est saisi de pitié » et ce disciple des sages sursaute, car ce mot là, les Ecritures ne l’emploie que de Dieu… et ce mot là dit l’émoi des entrailles maternelles et les Ecritures l’applique à Dieu pour dire ce qu’est l’amour de Dieu pour son peuple et pour tout homme…

Alors, il comprend… il s’agit, comme Dieu, de vivre la Loi au niveau de « ses entrailles », au niveau de « son cœur », il s’agit de se laisser toucher… il n’y a plus de Loi, ou plutôt, nous voilà au-delà de la Loi, dans l’accomplissement de la Loi : il s’agit de « faire preuve de bonté envers l’autre » – et la réponse montre qu’il a bien compris, car lui aussi emploie un mot, « bonté », qui ne s’applique qu’à Dieu –, il s’agit de regarder, de voir, d’écouter, d’entendre l’appel de l’autre et pour cela il n’y a plus que l’attitude de l’écoute, de l’obéissance que la longue pratique de la Loi, du commandement, doit nous avoir appris, doit nous apprendre chaque jour…

« Va et toi aussi, fais de même ! »

L’obéissance des commandements, la pratique du « catéchisme », et des dix commandements, et des commandements de Dieu, et des commandements de l’église, l’obéissance à la Loi a dû t’apprendre, doit t’apprendre à écouter l’autre dans l’imprévu de sa vie à lui, pour « le voir, être saisi et te mettre à sa merci »… Mais n’est-ce pas là, tâche impossible ?

Non, car le Seigneur, l’Esprit de Dieu qui est en toi, t’a été donné pour t’apprendre la vraie vie, juive ou chrétienne… qui conduit à la Vie.

Regarde, écoute, et rends-toi disponible à l’inattendu de l’autre…

Et tu auras la Vie.

Frère Matthieu Collin

Homélie du 17 juin 2012 — 11e dim. ordinaire — Frère Servan
Cycle : Année B
Info :

Année B – 11° Dimanche du Temps ordinaire – 17 juin 2012

Ez 17 22-24 ; 2 Co 5 6-10 ; Mc 4 26-34

Homélie du F.Servan

Texte :

Elles sont belles, les lectures de ce dimanche, toutes bruissantes d'arbres, de rameau verdoyant, de chants d'oiseaux, de champs de blé en pleine croissance où le vent joue avec les bleuets, les coquelicots (point trop n'en faut). Images bien accordées à notre saison, alors que le printemps va passer cette semaine le flambeau à l'été (le 21 juin et puis le 24 dimanche prochain avec les lumières de la saint Jean-Baptiste).

Sur les hauteurs de Vaumarin en face du monastère, il y a champs de blé ou d'avoine

en pleine croissance en attente de la moisson à la fin Juillet.

« Je cueillerai un jeune rameau, dit le Seigneur ; je le planterai, il produira des branches, il portera du fruit, il deviendra un si bel arbre, toutes sortes d'oiseaux y feront leur nid, habiteront à l'ombre de ses branches ».

« Le juste grandira comme un palmier, il poussera comme un cèdre du Liban, il fructifie, il garde sa sève et sa verdeur » (c'est le Psaume que nous avons chanté) et, dans l'évangile : « La semence germe et grandit d'elle-même, la terre produit l'herbe, puis l'épi, enfin du blé plein l'épi, du blé plein l'épi ! Et Jésus avait dit avant (dan l'évangile de Marc): « des grains sont tombés sur la bonne terre; ils ont produit trente, soixante, cent pour un. Une bien belle récolte et dès que le grain le permet on y met la faucille (ou plus rapide et moins fatiguant, mais moins poétique, la moissonneuse-batteuse), car c'est le temps de la moisson « c’est à dire dans la Bible, le temps du jugement, (le temps d'apparaître à découvert devant le tribunal du Christ, nous a dit saint Paul), mais surtout le temps de la belle récolte, le temps d'engranger dans les greniers de notre Dieu tous ces bons grains et beaux fruits de notre vie sur la terre, tous ces « plaire au Seigneur » de notre vie « qui sème dans les larmes (dans l'effort et la peine) moissonne dans la joie. On

s'en va, on s'en va, on jette la semence; on s'en vient, on s'en vient dans la joie, on

rapporte les gerbes » (Ps 125) et du blé plein l'épi !

Optimisme, Oui, mais retour au réel ! Et le réel résiste et souvent déçoit. L'idéal, les attentes, les projets.

A commencer pour Jésus: si sa parole novatrice rassemble encore la foule dans le beau cadre des bords du lac de Galilée ; s'il y a de la bonne terre pour recevoir la semence de sa parole, il y a aussi des échecs : le grain perdu sur le chemin, la pierraille, les ronces, sans parler de l'ivraie semé dans le champ par l'adversaire.

Monte un doute, une déception parmi ses auditeurs pour qui la venue du Règne de Dieu devrait s'accomplir d'une manière spectaculaire et puissante. (« Est-tu vraiment celui qui doit venir ou devons-nous en attendre un autre? De Jean le baptiste -

Et les pèlerins d'Emmaüs, à la fin de la trajectoire de Jésus : « et nous qui espérions qu'il serait le libérateur d'Israël » !!

D'où cette réponse de Jésus dans ces paraboles (paroles pour ses disciples et pour son Eglise à venir, donc pour nous aussi) : Dieu (et ses envoyés) ne sont pas des magiciens qui opèrent les changements du monde à coup de baguette magique et à travers des actions spectaculaires, mais c’est un jardinier qui fait confiance, en patience, à l'obscur travail de la semence: « qu'il dorme ou se lève (pour le travail) la semence du Royaume de Dieu germe et grandit il ne sait comment ». Ce n'est pas décourager de semer, d'être actif et responsable dans nos communautés et nos églises, mais sans se ronger de soucis et d'activisme.

« Moi j'ai planté, dit Paul, Apollos a arrosé, mais c'est Dieu qui donne croissance »! et le Ps 126, « Si le Seigneur ne bâtit la maison les bâtisseurs travaillent en vain. En vain tu

devances le jour (tu te lèves); Dieu comble son bien-aimé quand il dort » (vous pouvez aussi relire Péguy ou Jn 23)

La leçon, la réponse était valable pour les premières toutes petites communautés chrétiennes

comme celle des Corinthiens : « Nous cheminons dans la foi, nous cheminons sans voir, leur

répète Paul, « mais dans la confiance et la joyeuse espérance, en croyant que le

Seigneur Jésus a été le grain semé en terre, mais ressuscitant et portant beaucoup de

fruit. Sa croix devenue arbre de vie, l'arbre aux oiseaux, l'arbre sec et mort qui reverdit

Elle est bien sûr importante pour nous, notre Eglise et nos communautés aujourd'hui cette

parole-parabole: puisque vous connaissez notre réel aussi bien que moi.

Dans la confiance et l'espérance chaque jour de notre temps ordinaire, nous accueillons la parole vivante du Christ et nous souhaitons belle croissance aux plus jeunes qui achèvent ce dimanche une-année de catéchisme et un merci particulier à ceux et à celles qui se sont dévoués pour semer la Parole parmi eux !! (2012-06-17)

Homélie du 10 juin 2012 — Saint Sacrement - Fête Dieu — Frère Matthieu
Cycle : Année B
Info :

B 1997 - Fête du Corps et du Sang du Christ

Ex 24,3-8 / He 9,11-15 / Mc 14,12-16.22-26

Homélie de frère Matthieu

Texte :

Après la Fête de la Sainte-Trinité, l’Eglise nous donne de célébrer la fête du Corps et du Sang du Christ avant celle du Sacré-Coeur de Jésus. Fêtes théologiques, fêtes d’idées, qui tranchent en quelque façon dans le tissu dynamique de l’année liturgique consacrée à la célébration des mystères du salut, de ce salut que Dieu a réalisé et réalise pour nous au fil de nos vies humaines.

Et pourtant avec cette fête du Saint-Sacrement la liturgie nous offre à travers les textes bibliques qu’elle nous donne à entendre une vision très dynamique de l’Eucharistie que nous célébrons. Elle le fait en se référant à la dynamique des grandes fêtes bibliques: l’évangile de Marc que nous venons d’écouter inscrit le repas du Seigneur - que chaque Eucharistie actualise pour nous - dans la riche symbolique de la Pâque juive; l’épître aux Hébreux replace le sacrifice du Christ - dont chaque Eucharistie est le mémorial - dans la lumière de la Fête des expiations, le « Yom Kippour » de la liturgie juive; la lecture de l’Exode au chapitre 24 nous donne la toile de fond, on pourrait dire aussi l’harmonisation de l’ensemble: l’Alliance, mystère où Dieu conclut le Pacte avec le Peuple; « voici le sang de l’Alliance que, sur la base de toutes ces paroles, le Seigneur a conclue avec vous. »

Reprenons chacun de ces textes offerts à notre méditation pour entrer un peu plus, un peu mieux, dans le Mystère du Corps livré et du Sang versé que nous célébrons en chaque Eucharistie.

La Fête de la Pâque est le mémorial perpétuel de la sortie d’Egypte et chacun en la célébrant devient ce fils d’Israël que Dieu a fait sortir de la maison de servitude pour lui faire passer la Mer rouge où il le débarrasse des ennemis qui en voulaient à sa vie; ce fils d’Israël que Dieu conduit au désert du Sinaï où il lui révèle et son Nom et sa Loi; ce fils d’Israël que Dieu fait entrer dans la terre de la promesse où il doit vivre et rendre grâces.

En célébrant l’Eucharistie, nous accomplissons après Jésus la fête de Pâque; nous avons à devenir, nous devenons - par don gratuit - ce vrai fils d’Israël que Dieu fait sortir de sa servitude en le plongeant dans le bain du baptême - où son Ennemi, le Diable, perd tout pouvoir -, ce vrai fils d’Israël à qui Dieu donne et redonne la Loi nouvelle, l’Esprit Saint, qui fait de nous des fils capables de marcher sous son regard; ce vrai fils d’Israël à qui Dieu donne d’offrir, jour après jour, dans le Christ, un sacrifice spirituel qui soit pour sa gloire.

Avec l’Epître aux Hébreux, c’est la fête de Kippour, fête des expiations, qui nous est proposée comme clef de compréhension du mystère que Dieu réalise pour nous en chaque Eucharistie.

... / ...

Au jour de Kippour, le Grand-Prêtre entrait dans le Saint des Saints du Temple pour se trouver face au Dieu trois fois saint et offrir le sang des sacrifices pour son péché d’abord et pour celui de tout le Peuple. Et le Seigneur renouvelait son pardon; et plus encore le Seigneur donnait à chaque israélite cette part de repentance authentique - cette « teshouvah » -, ce retournement intérieur, qui le ramenait face à son Dieu dans l’attitude du fils prodigue, dans l’attitude du publicain de l’Evangile.

En célébrant l’Eucharistie, nous célébrons ce Jour de Kippour définitif où le Christ, « Grand-Prêtre du bonheur qui vient », entre dans le Temple, Sanctuaire du ciel, pour offrir, une fois pour toutes, son propre sang; et « il a obtenu ainsi une libération définitive ». En s’offrant lui-même à son Père comme une victime sans tâche, Jésus par son sang « purifie notre conscience des actes qui mènent à la mort pour que nous puissions célébrer le culte du Dieu vivant » et finalement « recevoir l’héritage éternel promis. »

Avec le chapitre 24 du livre de l’Exode nous avons peut-être la clef de toute compréhension de l’Eucharistie: un mystère d’Alliance.

Moïse descend du Sinaï où il vient de recevoir la Loi de Dieu; il la com-munique au peuple d’Israël et tous s’engagent à les mettre en pratique. Et Moïse fait offrir des holocaustes en sacrifice de communion et le sang sert de signe concret de la communion que le Seigneur lui-même établit avec son peuple.

En célébrant l’Eucharistie, Jésus nous fait entendre sa Parole et nous demande notre adhésion de coeur; Il s’offre lui-même en sacrifice et le pain et le vin que nous avons offerts en signe de notre participation nous est rendu, redonné, Corps et Sang de Jésus; et en le prenant nous entrons en communion avec Dieu, notre Père, par le don de l’Esprit. Nous entrons à nouveau dans l’Alliance que Dieu offre toujours nouvelle; nous devenons un peu plus ce Peuple saint que Dieu rassemble des extrémités de la terre pour en faire son peuple choisi, nous sommes ses fils, introduits dans sa communion et ressaisis par la grâce qui fait de nous des fils véritables...

Puissions-nous aujourd’hui, célébrer avec plus d’intelligence, l’esprit et le coeur plus éveillé, cette Eucharistie qui est le plus merveilleux don que Dieu nous fait pour notre salut et celui du monde entier.

Frère Matthieu Collin

Homélie du 03 juin 2012 — Sainte Trinité — Frère Sébastien
Cycle : Année B
Info :

Année B- Dimanche après la Pentecôte

Dt 4 32-34 ; Rm 8 14-17 ; Mt 28 16-20

Homélie du F.Sébastien

Texte :

Fêter la Sainte Trinité !...

Si c’était possible, ce serait passionnant, de partager entre nous sur la place que la sainte Trinité tient concrètement dans chacune de nos vies.

Ce qui est sûr, c’est que la Sainte Trinité en son mystère est le cœur de notre foi chrétienne. Ce devrait être, la source de toute joie, pour les humains que nous sommes, plus encore pour les Trois personnes divines que nous fêtons aujourd’hui. Les fêter, c’est s’occuper personnellement de chacune d’entre elles, avec des attentions propres, elles sont si différentes, et toutes ensemble, elles sont inséparables, elles ne font qu’un.

Dès ce matin l’Esprit Saint s’est glissé dans nos cœurs pour nous habiller en fils et filles semblables au Fils unique. Jésus et son Esprit nous conduisent ensemble au Père qui attend impatiemment ses enfants pour la fête de famille. Inouï !

Effectivement, et la première lecture nous l’a dit magnifiquement, aucun peuple n’a jamais eu un Dieu pareil !

Notre Dieu est vraiment unique : un bon coup de balai qui élimine tous les faux dieux ; bon débarras ! Unique et unifiant, c’est le miracle de l’amour ! et il n’est qu’amour. En lui nous avons toutes nos sécurités, notre origine d’avant les siècles, comme aussi notre avenir éternel. Il est notre Dieu avec nous, à chaque instant, dès maintenant, et pour toujours.

Un Dieu si proche, si attentif envers ses enfants, qu’il est évidemment curieux de ce que nous avons bien pu imaginer pour sa fête... Il est parfaitement conscient que le mystère de ses relations personnelles, au sein de sa Trinité divine, dépasse infiniment nos intelligences humaines !

Ce qui ne l’empêche pas de nous demander de témoigner de ce que nous vivons en famille avec lui, avec chacune des trois personnes divines. De témoigner par la parole, bien sûr, mais aussi par la musique et le chant, par les créations de l’art et le reste... Dans la célèbre Trinité de Roublev, chacune des trois personnes est toute dans sa relation à chacune des deux autres et nous entraîne dans leur cercle.

Il y a aussi les Trinités naïves de notre art occidental.

Je pense ici à une modeste reproduction presque effacée : c’est une croix de la Trinité. Le schéma est classique. Derrière la croix, les bras étendus du Père s’allongent jusqu’à se confondre avec ceux de son Fils sur la croix. Ce Fils est vivant ; son beau corps au repos culmine dans le mouvement de la tête qui se lève, à la renverse, vers la tête de son Père penché sur lui. Les deux visages sont proches. On devine déjà leur baiser d’amour fou au moment où, ensemble, ils sont en train de sauver le monde. Leur baiser est illustré par la Colombe que l’on aperçoit, tout en haut du tableau, piquant du ciel vers la terre : c’est la figure de l’Esprit Saint qui est leur d’amour, leur amour livré pour être répandu en nos cœurs, comme saint Paul vient de nous le redire, en une des phrases les plus grisantes de toute la Bible : « L’amour de Dieu a été répandu dans nos cœurs par l’Esprit Saint qui nous a été donné ».

C’est aujourd’hui ! En ce jour de sa fête, toute la sainte Trinité vient vivre en nous pour que nous vivions en elle.

Les yeux se ferment sur la croix glorieuse, pour mieux se laisser saisir, purifier, diviniser.

Du haut de la croix cachée, l’eau coule doucement sur chacun de nous.

Dès lors nous pouvons recevoir, avec des oreilles de baptisés, les paroles de Jésus : « Allez, de toutes les nations faites des disciples, baptisez-les au nom du Père et du Fils et du Saint Esprit ».

Tous les Trois nous sommes avec vous tous les jours, jusqu’à la fin du monde.(2012-06-03)

Homélie du 05 avril 2012 — Jeudi Saint — Frère Sébastien
Cycle : Année B
Info :

L'eucharistie

Homélie du F.Sébastien

Texte :

L'eucharistie est un merveilleux condensé du mystère de Dieu, de l’amour et de ce que peut faire l’amour

Paradoxalement, c’est un long chemin d’abaissement devant l’autre, pour l’autre, la kénose dont parle saint Paul.(Philippiens 2,1-11)

L’institution de l’eucharistie en est l’accomplissement,

le lavement des pieds la merveilleuse parabole en acte.

Cela vient de très loin, du temps où les trois personnes divines, conscientes de leur bonheur, rêvaient de partager leur amour mutuel avec d’autres, de se donner des vis-à-vis, d’élargir leur propre communion à d’autres partenaires, et pour cela d’en créer.

Et voilà le Dieu de l'Ancien Testament qui se fait de la glaise, et avec cette glaise, un homme et une femme.

Impatient de tout partager avec eux, après des siècles de préparation, le temps venu, il se fait lui-même, homme, l'homme du Nouveau-Testament,en Jésus : le Verbe fait chair, en la glaise.

Le Verbe divin se retrouve blotti, tout entier, dans le ventre d'une jeune fille de Palestine. Il y tient à l'aise, il y est bien. Dieu tout entier, car le bébé est Dieu.

Devenu adulte, il se fait Berger, et il le dit clairement.

Dans la société et la culture de son temps, le berger c'est l'homme qui sent mauvais, a-social, sans loi, rustre, méprisé : mais il prend soin de son troupeau. Et cela suffit à Jésus, c'est tellement lui.

Berger, c'est encore trop.

Alors il se fait petit agneau, le dernier du troupeau.

Celui qu'on immole pour la Pâque, qu'on mange à la hâte.

On lui prend son sang, pour oindre les montants de la porte.

Agneau, c'est encore trop. C'est encore être quelque chose. Alors l'Amour incarné se fait porte de la bergerie. « Je suis la porte des brebis».

Simple trou dans l'espace, passage pascal, comme le trou de l’aiguille ou la porte du tombeau... Mais c'est encore trop.

L'Amour rêve de n'être que pour l'autre, plus rien pour soi.

C'est alors qu'il imagine de s’offrir dans un peu de pain : croûte et mie, à disposition sur la table, pour qui veut,

moins encore, de se faire miettes sous la table, pour les petits chiens...

Dieu se fait nourriture, un peu de vin. l’Amour incarné a trouvé le moyen de donner à ceux qu’il aime sa propre vie divine. C’est ainsi que Jésus nous prend en son corps, en son sang, nous donne part à la vie même des trois personnes de la sainte Trinité : il s’est effacé pour que nous devenions tout cela. Après le repas d’Emmaüs ; il s’est même effacé jusqu’à se rendre invisible, invisible devant les yeux parce qu’il est passé à l’intérieur, en nous : invisible, pour un autre mode de présence, plus présent que jamais.

C’est pour les petits chiens qu’il s’était levé de table, avait déposé ses vêtements, mis de l’eau dans un bassin, avant de s’agenouiller devant chacun de ses amis, pour leur laver les pieds, comme un esclave. Dans ses gestes amoureux se lisait sa mort prochaine, son don ultime. Il touchait au but. C’était le point bas de son abaissement. Avant la remontée.

Il s’était relevé, lentement : « Maintenant le Fils de l'homme a été glorifié et Dieu a été glorifié en lui ! » « Petits enfants, c’est un exemple que je vous ai donné, afin que, vous aussi vous fassiez de même ! Heureux êtes-vous, si vous le faites ! »

Quand je communie, je pense souvent à la pécheresse chez Simon le Pharisien. Elle arrive avec son corps encore imprégné de tout ce qu’elle a fait avec... Jésus pourrait avoir un mouvement de recul, la repousser... Au contraire, il la laisse faire ce qui est une manière de s’offrir à elle, exactement comme nous lorsque nous venons communier et que le prêtre nous tend l’hostie : « Prenez, ceci est mon corps, mon corps pour vous... » La femme s’empare littéralement de Jésus, elle le dévore de baisers, mais cette fois-ci ses baisers sont purifiés par un amour très pur, un parfum. Le plus heureux des deux, ce n’est pas elle, c’est Jésus qui l’attendait, elle qui nous représente tous. C’est l’heure de son bonheur de sauveur.

Homélie du 25 mars 2012 — 5e dim. du Carême — Frère Guillaume
Cycle : Année B
Info :

Année B - Carême 5° Dimanche - 25/03/2012

Jér 31,31-34 ; Hébr 5,7-9 ; Jean 12,20-33

Homélie du F.Guillaume

Texte :

Frères et sœurs

Le IV° évangile, à la différence des 3 premiers, ne comporte pas de récits de la Transfiguration de Jésus sur une montagne. Mais le passage que nous venons d’entendre présente bien des rapprochements avec cet épisode important de la vie du Christ. Ici et là il est question de « voir Jésus », soit à Jérusalem sur le Mont Sion, soit en Galilée sur le Mont Thabor, et il est aussi question de manifestation de sa Gloire. Une Gloire indissociablement liée à sa Passion. Dans les différents cas, il est fait mention d’une voix venue du Ciel, la voix du Père qui se fait entendre à des témoins effrayés qui ne comprennent pas le sens des paroles : « la foule disait que c’était un coup de tonnerre, d’autres que c’était un ange qui parlait ». Jésus, lui, affirme que sa mort est prochaine et que son heure est venue, où son Père sera glorifié avec lui. Heure du salut, salut universel : « Père, Glorifie ton Nom ; quand j’aurai été élevé de terre, j’attirerai à moi tous les hommes ».

Revenons sur ces différents aspects de notre évangile

« Voir Jésus ». C’est le désir de ces païens, grecs, qui montent à Jérusalem pour adorer Dieu, à l’occasion de la fête de Pâques. Ils s’adressent à Philippe, un des disciples qui parle le grec, lequel va le dire à André, l’un des 3 apôtres témoins de la Transfiguration. Voir Jésus : mais pour l’évangéliste Saint Jean, voir implique davantage que simplement apercevoir. En réalité, ces païens désirent rencontrer Jésus, s’entretenir avec lui. Le voir sous-entend et indique déjà la réalité d’une certaine foi en lui. Le type parfait du croyant pour le IV° évangile, c’est le disciple préféré qui entre au matin de Pâques dans le tombeau vide à la suite de Pierre. Il vit et il crut. De même, dans les derniers entretiens de Jésus avec ses disciples avant la Passion, le même Philippe interroge son maître : « Montre nous le Père et cela nous suffit » et Jésus de répondre « comment me poses-tu encore cette question, Philippe, depuis le temps que je suis avec toi. N’as-tu pas compris : qui m’a vu, a vu le Père ? » Nous pourrions rapprocher ces païens grecs, pèlerins de Jérusalem, de la Reine de Saba venant écouter la Sagesse de Salomon, dans le livre des Rois, ou de cet eunuque d’Ethiopie dans les Actes des Apôtres qui se laisse évangéliser et baptiser par Philippe, après Pâques. Ou encore de ces mages d’Orient venant à Bethléem adorer le Roi des juifs. Tous, ils symbolisent l’ouverture du salut universel. Dieu ne réserve pas son Amour et sa Grâce au seul peuple d’Israël, ou aux seuls disciples du Christ. Jésus lui-même le dit bien à la fin de notre passage : « quand j’aurai été élevé de terre, j’attirerai à moi tous les hommes ».

Cette page d’évangile précède immédiatement les récits de la Passion et de la Résurrection. Elle présente les conditions d’entrée dans le salut universel. Pour cela, Jésus emprunte une parabole simple : celle du grain jeté en terre, qui doit mourir, afin de porter un fruit abondant. Image saisissante du chemin tout paradoxal que doit suivre le disciple, à l’exemple de son Maître. L’accès à la Gloire de Dieu, à la Vie Eternelle, au Ciel, doit passer par l’humiliation de la Croix, par l’endurance de la souffrance et de la mort, sur terre.

Saint Irénée a eu cette formule célèbre, reprise par toute la Tradition chrétienne : « la Gloire de Dieu, c’est l’homme vivant, et la vraie vie de l’homme, c’est la contemplation de Dieu ». En méditant cet évangile on pourrait dire aussi : « la Gloire de Dieu, c’est le Fils de l’Homme mourant par amour pour nous sur la Croix. Et la vraie vie du Christ, c’est d’attirer tout homme à la contemplation du Père, à la Vie Eternelle ».

La Gloire et la Croix sont donc intimement liées dans l’annonce du salut, dans l’amour du Christ pour tout homme. Elles doivent l’être aussi pour chacun de nous, dans nos existences personnelles. C’est l’amour reçu, et c’est l’amour donné qui en sont les clés. « Il n’y a pas de plus grand amour que l’amour de celui qui donne sa vie pour ceux qu’il aime ».

Dimanche prochain, nous entrerons avec la fête des Rameaux dans la Grande Semaine Sainte. Aujourd’hui, en ce 5ème dimanche de Carême, dimanche de la Passion, Jésus annonce que son Heure est arrivée : l’Heure de passer de ce monde à son Père. L’heure est venue pour le Fils de l’Homme d’être glorifié et de glorifier : Père, glorifie ton Nom !

La parabole du grain de blé jeté en terre, qui doit mourir pour reprendre vie et porter du fruit devient alors un étonnant symbole de la vie pascale de tout chrétien qui doit choisir entre une vie stérile, ou une vie féconde. Et ce n’est jamais sans douleurs. Que de petites morts à soi-même pour aimer vraiment l’Autre, les autres ! « Celui qui aime sa vie la perd : celui qui s’en détache en ce monde la garde pour la vie éternelle ».

Mais quelle joie intérieure dont témoignent tous les saints et les vrais amis de Dieu, car ils font l’expérience d’une secrète complicité avec le Christ. C’est lorsque l’on se donne vraiment avec amour que l’on ressemble le plus à Lui.

A la suite de cet évangile, entrons alors maintenant dans la grande prière eucharistique de Jésus à son Père, que l’Eglise fait sienne d’âge en âge, dans sa liturgie et qui proclame Sa Gloire : « Père Très Saint, vraiment il est bon de te rendre grâce, il est juste et bon de te glorifier. Car tu es le seul Dieu, le Dieu vivant et vrai : tu étais avant tous les siècles, tu demeures éternellement lumière au-delà de toute lumière »

AMEN (2012-03-25)

Homélie du 18 mars 2012 — 4e dim. du Carême — Frère Servan
Cycle : Année B
Info :

Année B – Carême 4° Dimanche - 18 mars 2012 –

2 Ch 36 14-23 ; Ep 2 4-10 ; Jn 3 14-21

Homélie du F.Servan

Texte :

Faut-il rappeler que ce 4e dim du carême (à la mi-temps) s'appelait ( et s'appelle encore) le Dimanche LAETARE .. .Laetare Jerusalem ... Réjouis-toi Jérusalem. Et réjouissez-vous tous qui montez vers Jérusalem, en vous hâtant avec amour vers les fêtes pascales qui approchent, et, à travers elles, vers la Jérusalem à venir, cité de paix « où tout ensemble fait corps » : élan, allégresse de notre foi et espérance chrétiennes.

« Tous ceux d'entre vous qui font partie de son peuple, que le Seigneur leur Dieu soit avec eux, et qu'ils montent à Jérusalem ». (C'était notre première lecture) et en finale du Psaume 136 (de l'exil) : nos chants nous les réservons pour Jérusalem : « Jérusalem à l'intime de mon cœur – Jérusalem au sommet de ma joie »! Et en écho, nous avons ces beaux Ps des montées (des pèlerins de Jérusalem) que les frères moines aiment chanter à leur prière de midi: « Quelle joie quand on m'a dit: Allons à la maison du Seigneur » ! (Ps 121). « Jérusalem ... c'est là que montent les tribus, les tribus du Seigneur ».

« Tous ceux qui font partie de son peuple ». Nous le savons, notre vie chrétienne, ce n'est pas du chacun pour soi, mais, « grand angle » « avec tout un peuple » d'hier, d'aujourd’hui et de demain qui monte vers Jérusalem. Notre petite vie est partie prenante de cette grande histoire sainte (de

libération et d'alliance) qui se déploie à l'intérieur même de l'histoire terrestre et politique, avec ses événements marquants, comme ici avec l'avènement-événement favorable de Cyrus, le fondateur de l'empire Perse.

Vous aurez peut-être remarqué que cette année les premières lectures de nos dimanches de Carême sont comme autant de jalons de cette Histoire sainte (de libération et d’alliance).

Ont été ainsi évoqués: Noé (sauvé des eaux mortifères et recevant une Alliance cosmique) - Abraham et Isaac (libérés d'une situation de mort et renouvelant l'Alliance) - Moïse (recevant la Loi de l'Alliance, le décalogue après avoir été libéré de l'esclavage en Egypte) ... c'était dimanche dernier.

Aujourd'hui, libération de l'exil et montée à Jérusalem. Dimanche prochain, annonce d'une

Alliance nouvelle, (les lectures de la Vigile pascale reprendront de semblables jalons de cette histoire sainte qui culmine (mais ne s'achève pas, ça continue!) dans la Pâque du Christ et s'étend alors à toute l'humanité: dans l'évangile de ce dimanche l'expression « tout homme » revient trois fois : « tout homme qui croit en lui ne périra pas » car en lui « Dieu a tant aimé le monde ».

Histoire sainte qui monte vers la joie de Jérusalem : Oui, mais ce n’est pas un long fleuve tranquille. Puisque ponctuée par les refus (possibles mais aussi bien réels) de la liberté

humaine: « les chefs des prêtres et le peuple tournaient en dérision les envoyés de Dieu,

méprisaient ses paroles et se moquaient de ses prophètes » - « tout homme qui fait le mal

déteste la lumière et ne vient pas à elle »- « nous qui étions des morts par suite de nos

fautes (deuxième lecture) ». Sans oublier les murmures et révoltes du peuple lors de l'Exode dans le désert, qui amenèrent sur lui une invasion de serpents à la morsure brûlante. D'où cette histoire du serpent de bronze élevé sur un poteau comme un contrepoison (Le caducée des médecins), à regarder pour avoir la vie sauve (Nb 21,4-9).

L'évangéliste a vu là une figure et une annonce du Fils de l'Homme, du Fils unique élevé sur la croix (mais aussi élevé dans la gloire-ressuscité) et qu'il faut regarder pour avoir la vie. L'évangile de Jean reviendra plusieurs fois sur cette image : « Lorsque vous aurez élevé le Fils de l'h, vous connaîtrez que Je suis (8.28) » - « Quand j'aurai été élevé de terre, j'attirerai à moi tous les hommes (12.32) » - « Ils regarderont celui qu'ils ont transpercé » (19,37) ...

Frères et sœurs, en ce temps du Carême préparatoire à la Pâques, avec beaucoup de par le monde, nous regardons la Croix du Christ, où par-delà une image de violence envers un corps d'homme, notre foi reconnaît une source de salut et de vie et plus encore la révélation du dessein d'amour de Dieu «riche en miséricorde » « qui a tant aimé le monde qu'il a donné son Fils unique ". (La lettre aux Ephésiens dont nous avons entendu un passage est une célébration très fervente de cela !).

Fortifiés par ce regard sur la Croix nous continuons avec élan et vraie joie chrétienne notre montée vers Jérusalem « avec tout un peuple » en évacuant la culpabilité, cette paralysie du cœur (Lytta Basset) et ce repli dépité sur soi à distinguer de la contrition d'un cœur qui se sait aimé et désire aimer en retour. Laetare Jerusalem !

(2012-03018)

Homélie du 11 mars 2012 — 3e dim. du Carême — Frère Sébastien
Cycle : Année B
Info :

Année B - 3e dimanche de carême 11 mars 2012

Ex 20,1-17 ; 1 Co 1,22-25 ; Jn 2,13-25.

Homélie du F.Sébastien

Texte :

Frères et sœurs. Nous avons beaucoup de chance,

oui, une chance qui pourrait illuminer cette belle journée,

la chance inouïe d’avoir un Dieu qui nous parle.

D’abord en la parole qui ouvre les lectures de ce dimanche :

« JE SUIS le Seigneur, ton Dieu.» JE SUIS...

une plénitude d’existence, celle qui te permet d’exister vraiment.

Ton Dieu, pour toi, avec toi, qui t’aime envers et contre tout.

Je suis et toi tu es, nous sommes l’un pour l’autre. Et tout est changé !

Une parole pleine de force, mais tout autant de faiblesse.

La parole de quelqu’un qui, dans notre monde d’aujourd’hui, a un besoin vital de redire qu’il existe vraiment,

solidaire de tant d’hommes et de femmes méprisés, froidement rayés des listes, et qui protestent: « Mais j’existe, je suis quelqu’un, je ne suis pas rien ! »

Durant ce carême, pouvons-nous ignorer toutes les formes de négation de l’autre, fût-il Dieu en personne ?

Tel cet ami qui me dit avec sa gentillesse tranquille: « Dieu, mais pourquoi faire ? »

Il y a plus, mais n’ayons pas peur, au contraire, nous voulons la vérité qui rend libre.

« Tu n’auras pas d’autres dieux que moi. Tu ne te feras aucune idole ». Notre Dieu si fort est-il donc si faible qu’il ait besoin de se défendre de ses concurrents ?

« Je suis un Dieu jaloux ». C’est là le cri d’un amoureux, menacé du pire qui puisse arriver à un amoureux ! La jalousie est faiblesse, car passion d’amour rend vulnérable. Notre Dieu est trop passionné pour y échapper, d’ailleurs il ne le voudrait pas. Ce qu’il veut, c’est être comme nous, avec nous, surtout avec les plus menacés.

Les lectures de ce dimanche nous conduisent à ce Dieu-là, le seul vrai, à la fois fort et faible, et du même coup au refus des idoles que saint Paul démasque, sous deux formes :

d’une part le pseudo miraculeux, et, d’autre part, selon la belle expression de François Mauriac, « la fausse sagesse du monde », celle qui, pour croire, exige des preuves, surtout scientifiques.

Je pense à cette universitaire, brillante, qui répète avec satisfaction: « Aujourd’hui, pour croire en Dieu, il faut être débile, ou de mauvaise foi ». Et je la crois de bonne foi, sincère au milieu de ses évidences.

Et je me demande : notre Dieu, qu’en pense-t-il ?

Eh bien ! Ce qui est sûr, c’est qu’il pense à elle, avec une certaine prédilection, et à tant d’autres semblables, parfois de ceux qui nous sont les plus chers.

Tous nous sommes les enfants bien aimés de notre Dieu, tous enveloppés de sa tendre jalousie relayée par l’Église,

une Église qui nous invite à vider nos petits temples de leurs idoles pour faire de la place...

Je termine avec une anecdote. New York, la nuit. Un étudiant erre dans les rues et finit par échouer chez son curé. « Mon Père, je ne crois plus à aucun des articles du credo, à l’exception du premier. Je crois encore en Dieu ».

Le prêtre : « Mon ami, je sais ce que c’est,

mais souviens-toi toujours que l’Église croit pour toi. »

L’Église croit pour moi. Pour tous.

Oui, L’Église est une mère. La foi est une mystérieuse solidarité qui ne se vit qu’en grappe, tous nourris de la même sève divine. Ce qu’on vit ici est aussi pour toi là-bas, l’inconnu, notre frère, on partage.

Alors, bon dimanche à tous,

en grappe, sous le regard chaleureux de notre Dieu et Père. (2012-03-11)

Homélie du 04 mars 2012 — 2e dim. du Carême — Frère Matthieu
Cycle : Année B
Info :

Dimanche 4 mars 2012 / 2ème Dimanche de carême (B)

Gn 22, 1-2.9a.10-13.15-18 ; Rm 8, 31b-34 ; Mc 9,2-10.

Homélie de frère Matthieu

Texte :

« Tu l’offriras en sacrifice sur la montagne … »

« Jésus les emmène, eux seuls, à l’écart sur une haute montagne… »

Tout se tient, tout se répond dans les Ecritures, mais aujourd’hui, nous pouvons légitimement nous demander comment le sacrifice d’Isaac, notre première lecture, peut bien entrer en résonance avec la Transfiguration de Jésus telle que nous l’a fait entendre l’évangile de Marc…

Je l’ai souligné par les citations faites en commençant : les deux évènements se passent sur « la » montagne et ce n’est peut-être déjà pas un hasard si elle est nommée au livre de la Genèse et pas dans l’évangile de Marc. Dieu désigne à Abraham comme lieu du sacrifice à venir, le mont Morriyah, que la tradition biblique identifiera au mont du Temple à Jérusalem (2 Ch 3,1), lieu des sacrifices offerts jour après jour au Seigneur. Et n’oublions pas que Jésus sera crucifié sur « la montagne » du Golgotha et qu’il attendra ses disciples après sa résurrection sur « une montagne » de Galilée.

Enfin la présence de Moïse et d’Elie au côté de Jésus sur cette montagne de la transfiguration fait immédiatement penser au mont Sinaï, lieu du don de la Loi, qui est aussi le mont Horeb, lieu de la révélation du nom de miséricorde du Seigneur à son prophète, nous dit le second livre des Rois.

Ainsi tout nous parle ici du Don de Dieu, de la Révélation de son amour, du sacrifice de Jésus sur la Croix et de sa Résurrection d’entre les morts comme accomplissement de la Révélation de l’amour du Père…

Mais revenons à notre comparaison de nos deux textes…

On peut donc noter encore, qu’il est question dans les deux cas « du » fils unique, du « fils bien aimé » et Isaac reçoit ces qualificatifs de la bouche même du Seigneur, comme Jésus lors de la théophanie dans la nuée.

Et il faut évidemment noter encore cette présence du Seigneur dans les deux récits, présence transcendante manifestée, par des paroles impératives et qui doivent être écoutées !

Dans le récit de la Genèse, Abraham se révèle comme le parfait « écoutant » et Isaac par son silence même se montre le parfait disciple. Dans l’évangile de Marc, ce sont les disciples qui sont invités à l’écoute et à l’obéissance.

Ainsi peut-on voir dans ces deux récits les deux faces d’un même mystère, celui de la mort et de la résurrection de Jésus ; mort préfigurée dans le sacrifice d’Isaac, résurrection anticipée par la transfiguration, où la présence de Moïse et d’Elie nous place déjà dans le monde à venir.

Deux faces d’un même mystère dont l’essentiel est le plan de Dieu, qui mène le jeu ici et là, en révélant toujours son amour et sa miséricorde inlassables au service du salut du monde et de tous les hommes.

Car pour que le monde échappe au mal, pour que nous échappions au mal qui nous domine et nous tient encore, il faut que le « Fils unique » ouvre à nouveau le chemin de l’obéissance parfaite, le chemin de cet acte de foi absolu en l’amour inconditionnel du Seigneur, quelque soient les apparences.

Le Diable trompeur avait suggéré à Eve et à Adam que Dieu n’agissait pas par amour mais par intérêt propre… et la relation en avait été radicalement blessée : le mal était entré dans l’homme, la crainte et la défiance avant la suffisance et le désir de s’en sortir tout seul… Tout ce qui fait notre malheur !

Il fallait rouvrir le chemin de la Foi, inconditionnelle, absolue. Jésus, le Fils bien-aimé, devenu homme avec notre chair de péché, a pu, lui seul, accomplir en plénitude ce qu’Abraham et Isaac et tous les grands obéissants de la Loi du Seigneur avaient seulement esquissé.

Sa mort n’est que le signe accompli de cette foi retrouvée, totale reconnaissance que Dieu n’offre que son amour, même dans la Croix, et qu’il n’y a qu’à l’accueillir pour devenir des « vivants », créatures animées de l’Esprit vivifiant que seul Dieu peut donner par son Fils à ceux qui essaie de croire en son amour et en sa miséricorde qui sont de toujours.

FRERE MATTHIEU COLLIN