Homélies
Liste des Homélies
Année B - 22e dimanche du Temps Ordinaire - 1° sept. 2024
Dt 4/1-2, 6-8 Jac1/17-18,21b-22,27 Mc7/1-8c,14-16,21-23
Homélie du F. Cyprien
« Vous n’ajouterez rien à ce que je vous ordonne, et vous n’en retrancherez rien… » « Ecoutez et vous vivrez »…
Plutôt que de parler de textes sacrés, nous venons ici écouter une parole, la PAROLE de Vérité pour nous aujourd’hui, … pour nous et …pour que nous la mettions en pratique ! …Aujourd’hui, …pour nous !
…Trois lectures et une seule Parole, Parole toujours plus facile à comprendre qu’à mettre en pratique, mais c’est elle nous met en face l’exigence de l’Evangile du Christ.
« Heureux les cœurs purs, ils verront Dieu ». Dans le sermon sur la montagne, Jésus n’a pas dit en effet : « Heureux ceux qui se lavent les mains avant d’aller à table »…Jésus a parlé au cœur des hommes de bonne volonté, de ceux qui cherchent le Royaume de Dieu.
…Danger des pratiques extérieures, de tout ce qui dans nos vies aussi s’organise… et parfois plutôt pour nous rassurer.
Nous sacralisons des gestes, des habitudes, et ces habitudes ne sont pas si mauvaises (par ex. se laver les mains avant d’aller manger !)… mais, mais pour certaines choses : « on a bien tout fait ce qu’il fallait et comme il le fallait », et la bonne conscience est là avec une paix dans le coeur… une paix à bon marché !
Guettés par le formalisme et le légalisme nous courons le risque de l’hypocrisie.
« … Ce peuple m’honore en paroles, mais son cœur est loin de moi ».
Nous croyons en effet honorer Dieu par des paroles, des chants, des gestes et toutes sortes de pratiques… et nous pouvons devenir peut-être idolâtres de nos propres idées… idolâtres…vous vous rendez-compte… en croyant être en règle avec Dieu.
Nous savons parfaitement que ce n’est pas ce qui entre dans notre bouche qui va salir notre cœur et notre personne, …nous oublions vite que Dieu parle à notre cœur …et c’est avec notre cœur qu’il nous faut lui répondre… C’est du dedans, du cœur de l’homme que doivent sortir les bonnes pensées, les actions de justice, de miséricorde et de fidélité.
Il s’agit donc de purifier l’intérieur, de travailler au-dedans de nous-mêmes : au lieu de priser plus ce qui parait que ce qui est,
Nous sommes appelés à convertir nos cœurs, sans cesse. Nous souvenir que notre cœur est l’hôte de l’Esprit de Dieu : comment notre demeure pourrait-elle faire cohabiter l’Esprit du Christ et la méchanceté ?
On ne peut penser à Dieu sans éliminer en même temps les pensées et les désirs mauvais, sans ôter ce qui est contraire à l’attention aux autres, à la bienveillance…
Exercice laborieux mais efficace… et nous ne sommes pas assez persuadés que ce qui nous fait du mal, ce qui nous porte à faire mal… « C’est du dedans…C’est du dedans que sortent les pensées perverses, inconduite, vol, meurtre, adultère, cupidité… »
S’exercer à la bienveillance par la pensée, on appelle cela la « garde du cœur », …prévenir les pensées inutiles ou méchantes
.
La pureté que Dieu veut pour nous est belle. Elle est le fruit de l’Esprit du Christ Jésus en nous, elle est bienveillance en pensée, bienveillance en pensée plus rare que la bonté en parole ou en actions … Si notre coeur essaie de fonctionner dans ce registre de la bienveillance et du respect, nous comprendrons mieux les Béatitudes, la manière pure et irréprochable de pratiquer la religion, selon l’expression de saint Jacques. Saint Luc écrit aussi : « L’homme bon tire le bien du trésor de son cœur qui est bon ». Du cœur pur peuvent déborder en abondance la prière et la bienveillance…
Oui, Frères et sœurs, confions-nous à l’Esprit du Christ qui nous conduira vers la bienveillance et la bonté…
Année B - 21° dimanche ord - 25 août 2024
Josué 24, 1…18 / ps 33 - Ephésiens 5, 21-32 - Jean 6, 60-69 -
Homélie du F.Basile -
F et S, si nous avions été à la place des disciples ou à la place de Pierre, qu’aurions-nous dit, qu’aurions-nous fait ? On voit bien dans l’évangile ce qui s’est passé : après les paroles si fortes de Jésus sur le pain de vie, sa propre chair donnée en nourriture, paroles qui semblent intolérables à certains, on voit très bien ce mouvement dans la foule, ceux qui se détachent du groupe, en essayant d’entraîner les autres, avec des petites phrases du genre : « Mais il est fou, ce type-là ! il dit n’importe quoi ! vous n’allez pas continuer à l’écouter ! »
Et Jésus s’en rend parfaitement compte. Il sait, dit l’évangile, quels sont ceux qui adhèrent à ses paroles et ceux qui les refusent, quels sont ceux qui croient et ceux qui ne croient pas. Et il lance sa question comme une flèche au cœur des disciples : « Voulez-vous partir vous aussi ? » J’aime ce « voulez-vous », car Jésus ne force personne à le suivre, et j’aime la réponse de Pierre, en forme de question « Seigneur, vers qui pourrions-nous aller ? » Comme toujours, c’est lui qui répond le premier et il s’engage au nom des Douze.
Quelle va être notre réponse à la question de Jésus ?
Car ces paroles sont pour nous aujourd’hui, pour chacun de nous, pour la communauté que nous formons en ce dimanche. Au cours de nos vacances, avons-nous pris le temps de nous poser les vraies questions, celles qui touchent au sens de notre vie, de notre foi chrétienne, de notre adhésion au Christ ? Peut-être que si nous tenons à venir chaque dimanche nous rassembler autour de la Parole de Dieu et de l’Eucharistie, c’est non seulement pour nous nourrir de la Parole et du Pain de vie, c’est aussi pour redire notre foi d’une manière ou d’une autre, personnellement et en communauté, car on n’est jamais chrétien tout seul.
Dans la suite de l’évangile, je voudrais parler de la foi, de cette foi qui est un don du Père : « Personne ne peut venir à moi, nous dit Jésus, si cela ne lui est donné par le Père ». Jésus réveille notre foi quand il nous dit : « Voulez-vous partir, voulez-vous me lâcher ? »
Il arrive que des gens nous disent « Un de mes enfants a perdu la foi » ou même « Tous nos enfants, que nous avions pourtant élevés dans la foi chrétienne, ne croient plus. Que faut-il leur dire ? Faut-il leur en faire reproche ? »
Je réponds « Non. Ne parlez pas d’un échec » car la foi est vraiment un don de Dieu, mais ce doit être aussi une relation vivante qui grandit avec la découverte de l’Evangile et des paroles de Jésus. La foi n’est pas une croyance, c’est une confiance donnée à Quelqu’un, une réponse libre à une parole entendue d’où l’importance de connaître Jésus, Celui qui nous appelle et de le rencontrer dans la prière, de lui dire « Tu », « Tu as les paroles de la vie éternelle »
Ensuite la foi, c’est une alliance : toute la Bible nous raconte cette alliance de Dieu avec l’humanité, Dieu qui s’engage le premier avec un peuple choisi, 1° alliance conclue avec Moïse au Sinaï, et puis cette alliance nouvelle où Dieu s’engage totalement en nous donnant son Fils devenu l’un de nous.
Qui dit alliance, dit engagement de part et d’autre : c’est un choix que l’on fait et il faut s’y tenir. Dans la 1° lecture où nous avions une des premières célébrations de l’Alliance en terre promise, Josué le disait très bien : « Qui voulez-vous servir ? Les idoles, les dieux des Amorites, ou bien le Seigneur, l’Unique, Celui qui vous a libérés de l’esclavage. »
Nous voyons aussi que cette alliance n’est pas seulement personnelle, individuelle ; Dieu fait alliance avec un peuple, entrer dans son Alliance, c’est être relié à une communauté, à un peuple, à l’Eglise. La foi ne se vit jamais seul. Quand on baptise un enfant ou un adulte, c’est toujours au sein d’une communauté chrétienne.
Mais lorsque l’enfant grandit ou lorsqu’il se convertit à l’âge adulte, Dieu attend de lui, Dieu attend de nous une réponse libre et aimante. Ce n’est pas une obligation ou une contrainte. Dieu ne nous force jamais. C’est une histoire d’amour.
Je donne, je redonne ma parole, ma confiance à Celui qui m’a aimé et s’est livré pour moi, mais qui jamais ne me forcera. C’est là le plus beau de la foi, le plus beau de l’amour : c’est un choix libre. La liberté, çà ne veut pas dire que je peux faire n’importe quoi ou tout ce qui me plaît, mais que je choisis librement qui je veux servir, qui je veux aimer.
Il a fallu se battre au Concile de Vatican 2 pour réaffirmer le droit de toute personne à la liberté religieuse. Hélas dans le passé on a parfois forcé des gens à se convertir, mais çà ne veut rien dire : Dieu n’a pas besoin d’esclaves, il veut être aimé et servi par des hommes et des femmes libres.
Dans une ancienne homélie, j’avais déjà cité le roi Saint Louis : c’est sa fête aujourd’hui. C’est un texte de Charles Péguy qui fait parler Dieu sur st Louis dans le Mystère des Saints Innocents :
« Quand on a connu d’être aimé par des hommes libres, dit Dieu, les prosternements d’esclaves ne vous disent plus rien.
Quand on a vu saint Louis à genoux, on n’a plus envie de voir ces esclaves d’Orient couchés par terre…
Etre aimé librement, rien ne pèse ce poids, rien ne pèse ce prix…
Quand on a une fois goûté d’être aimé librement, tout le reste n’est plus que soumissions…
Quand saint Louis m’aime, dit Dieu, je sais qu’il m’aime.
Au moins je sais qu’il m’aime, celui-là…
Et quand il dit qu’il aimerait mieux être lépreux que de tomber en péché mortel, je sais que c’est vrai…
Il ne dit pas çà pour que çà fasse bien…parce qu’il a vu çà dans les livres. Il dit cela parce que çà est. Il m’aime à ce point. Il m’aime ainsi. Librement. » (p 716-717)
C’est vrai que cette liberté n’est pas facile à apprendre aux enfants : pourtant, quand Dieu nous appelle à la foi, il nous laisse toujours libres de la réponse, de la décision de nous engager.
Jésus nous dit « C’est l’Esprit qui fait vivre »,oui c’est l’Esprit Saint qui nous fait découvrir le « maintenant » de cette décision.
Il nous rappelle les paroles de Jésus. Il nous donne la pleine liberté du présent et nous ouvre à l’avenir, à l’espérance d’une fidélité créatrice.
Année B - 20e dimanche ordinaire - (18/08/2024)
(Pr 9, 1-6 ; 2, 23-24 – Ps 33 – Ep 5, 15-20 – Jn 6, 51-58)
Homélie du Frère Jean-Louis
Frères et sœurs,
Au cœur du mois d’août, les lectures de ce dimanche nous parlent de sagesse, de repas, de nourriture. Mais comme souvent, les lectures de la messe nous emmènent sur des chemins qui peuvent être inattendus.
Ainsi, dans la première lecture, la Sagesse de Dieu est personnifiée sous les traits d’une maîtresse de maison qui envoie ses servantes pour inviter à son festin. On y retrouve une image que le Christ prendra volontiers pour parler du Royaume des cieux, il s’agira alors d’un maître de maison qui envoie ses serviteurs.
Si nous regardons le texte de près, nous pouvons être légitimement surpris car les personnes que la Sagesse invite à son festin, sont des étourdis, des gens qui manquent de bon sens, des gens sans intelligence. Etonnant, la Sagesse de Dieu invite des personnes qui sont à l’opposé d’elle-même. Et qui plus est, le festin préparé, et qui est symbolique, vise à quitter le chemin de l’étourderie, à prendre le chemin de l’intelligence. Manger le pain, boire le vin pour devenir sages ! Comme assez souvent dans l’Ancien Testament, la relation de Dieu avec son peuple se scelle par un repas. Souvenons-nous du repas pascal.
Remarquons donc qu’ici, les personnes appelées sont des gens sans mérite, sans sagesse. Ce ne sont pas des gens de qualité mais des gens finalement pas très recommandables selon nos critères. On retrouvera cela aussi chez saint Paul écrivant à la communauté chrétienne de Corinthe : « Frères, vous qui avez été appelés par Dieu, regardez bien parmi vous, il n’y a pas beaucoup de sages aux yeux des hommes, ni de gens puissants ou de haute naissance. Au contraire, ce qu’il y a de fou dans le monde, voilà ce que Dieu a choisi pour couvrir de confusion les sages. »
Le psaume entendu nous rappelle que ce sont les pauvres qui sont en fête et non les riches qui ont tout perdu et ont faim. Et il donne comme condition du bonheur de garder sa langue du mal et ses lèvres des paroles perfides, d’éviter le mal et de poursuivre la paix, de la rechercher. N’est-ce pas là la vraie sagesse ? En tout cas, ce psaume nous rappelle la prédilection de Dieu pour les pauvres. Cela parcourt tout l’Ancien et le Nouveau Testament.
Saint Paul, aujourd’hui, nous parle de notre conduite en y recommandant la sagesse. Tirer parti du temps présent, ne pas être insensé mais comprendre la volonté du Seigneur. Ne pas s’enivrer de vin. Paul est très concret et réaliste. Il s’attache surtout à inviter à la prière par des psaumes, des hymnes des chants inspirés. Nous y retrouvons nos offices liturgiques. Il s’agit, en fait de rendre grâce au Seigneur. Voilà la vraie sagesse.
Quant au Christ, il nous parle d’un repas qui a une toute autre dimension. : manger la chair du Fils de l’homme et boire son Sang. Le saut est tellement immense que ses contemporains ne peuvent le comprendre. Et était-ce compréhensible avant la mort et la résurrection du Christ ? N’est-ce pas sa passion et sa mort, annoncées dans le dernier repas de la Cène (encore un repas), qui ont donné la clé pour comprendre ces paroles obscures et inacceptables pour un juif contemporain de Jésus ?
Mais la sagesse de Dieu est folie pour les hommes et il faudra le mystère pascal de la mort et de la résurrection du Christ pour faire comprendre que la Cène qui accomplit la Pâque juive nous fait passer de l’image de la libération des Hébreux de l’esclavage d’Egypte à notre libération de la souffrance et de la mort par la résurrection du Christ. Certes, mort et souffrance sont toujours présentes dans nos vies, mais elles n’ont plus cet aspect définitif qui ôte tout espoir. Le mal n’aura pas le dernier mot.
La chair du Christ et son sang sont vraie nourriture et vraie boisson en ce sens qu’elles donnent la vraie vie, c’est-à-dire la vie par le Christ.
Frères et sœurs, les lectures de ce jour peuvent nous dire beaucoup sur Dieu, sur le Christ, si nous les accueillons dans la foi et la confiance, ce qui n’est pas toujours facile, surtout si notre vie connaît des périodes de turbulence.
Dieu n’attend pas que nous soyons sages pour nous inviter à la sagesse. Nous l’avons entendu dans la première lecture, la Sagesse de Dieu invite des gens qui sont tout sauf sages pour les faire cheminer vers la sagesse. Nous le savons si nous connaissons un peu les évangiles : le Christ a la réputation de côtoyer les pécheurs, les femmes de mauvaise vie, les collecteurs d’impôts. Et, du temps de saint Paul, la communauté de Corinthe ne sera pas réputée pour la sagesse et la bonne tenue de ses membres. Là nous est dit quelque chose d’essentiel sur Dieu si nous nous percevons comme fragiles, pécheurs, pas à la hauteur des exigences de l’évangile, tout est possible avec Dieu et sa grâce et bien plus, c’est vers nous qu’il se tourne de façon préférentielle. Mais si nous nous estimons parfaits, vertueux, si nous comptons sur nos propres forces, avons-nous encore besoin de Dieu ?
Saint Paul nous signale cependant qu’être invités par Dieu, par le Christ, cela ne signifie pas ne rien avoir à faire, car il nous rappelle fermement la nécessité de comprendre quelle est la volonté du Seigneur. Cela implique de prendre le temps d’un retour sur soi, de descendre en nous-mêmes pour y rencontrer le Christ. A nous de nous libérer dans un emploi du temps parfois si rempli.
Moyennant cela, dans la foi, sachons nous rappeler que la chair du Christ, reçue dans l’eucharistie est vraie nourriture pour avoir la vraie vie, sans oublier que, dans la tradition chrétienne, et notamment dans la tradition monastique, méditer, ruminer la Parole de Dieu est aussi une nourriture pour notre vie spirituelle qui a toute son importance. Laissons-nous une place suffisante dans nos vies à cette nourriture de la Parole de Dieu ? Lui consacrons-nous du temps ? L’eucharistie est le lieu qui unit la Parole et le Pain eucharistique comme nourriture pour notre vie avec le Christ. Sachons rendre grâce pour ce don qui nous est fait, et en faire profiter les autres …
AMEN
Année - ASSOMPTION - 15-08-2024
Ap 11,19a, 12, 1-6a.10ab ; 1 Co 15, 20-27a; Lc 1, 39-56
Homélie du Père Abbé Luc
Frères et soeurs,
Il n’est pas facile de se tenir sous une forte lumière, et nos yeux supportent mal de fixer en face le soleil. Ils sont aveuglés…Le soleil, ce compagnon de nos journées, celui sans lequel il n’y aurait pas de vie, nous devons accepter de ne pas le regarder en face…Nous jouissons de sa lumière, mais devant lui, il nous faut baisser les yeux…
Aujourd’hui, l’Eglise propose à nos regards, de contempler : « une Femme, ayant le soleil pour manteau, la lune sous ses pieds, et sur la tête une couronne de douze étoiles ». Une femme qui brille de l’éclat de tous les astres à la fois. Marie élevée dans la Gloire de son Fils ressuscité, est là qui brille de toute la lumière divine…Elle n’est pas Dieu, mais elle est toute entière prise dans sa lumière, sertie dans la lumière de la Gloire divine, comme une perle rare…Or, nos yeux de la foi ne craignent pas de regarder cette Dame si belle, comme dira Bernadette à Lourdes. Cette femme revêtue de lumière n’aveugle pas. Elle ne repousse pas, ni n’oblige de baisser les yeux devant elle…Non, les croyants que nous sommes, gens de toute condition, pécheurs en chemin, nous aimons nous tourner vers elle avec confiance, sans peur, avec la confiance de l’enfant de Dieu.
Oui, la gloire de Marie que nous célébrons aujourd’hui, comme le fruit d’une grâce particulière n’écrase pas. Au contraire, elle rassure, elle réconforte, elle encourage sur la route. Mais quel est donc le secret de la gloire de Marie ?
Nous venons de l’entendre dans l’évangile dans le beau chant que Marie entonne en réponse à la salutation d’Elisabeth, quand elle affirme : « Il élève les humbles ». La Gloire de Marie n’est pas à comprendre à la manière d’une gloire humaine. Elle n’est pas résultat d’une puissance affirmée ou le fruit d’exploits réalisés. Non, c’est la Gloire d’une femme humble. Une humble servante sur laquelle les yeux de Dieu se sont penchés. Une femme qui n’a rien à faire valoir sinon sa disponibilité étonnée et sa foi fidèle à la parole entendue de la part de l’ange Gabriel…Humblement, elle s’est laissée conduire et traverser en tout son être de chair, par cette mission unique d’être la mère du Messie, le fils du Dieu Vivant. Et c’est cette humilité-là, que Dieu s’est plu à couronner. Il a voulu élever son humble servante et lui donner de ne pas connaître la corruption de la mort, pour qu’elle partage sa lumière bienheureuse dès maintenant…
La gloire de Marie que nous célébrons aujourd’hui nous montre ce qui a vraiment du poids aux yeux de Dieu. En hébreu, le mot gloire se traduit littéralement « poids ». La gloire c’est ce qui a du poids. Et qu’est ce qui a du poids aux yeux de Dieu, ce qu’il regarde : c’est l’humilité, l’offrande de soi, l’écoute et l’obéissance. Voilà la Gloire de Marie : elle a été toute disponible, toute à l’écoute durant sa vie, toute abandonnée au dessein du Père et au service de son Fils, Jésus…Cette gloire-là ne fait pas de l’ombre à la Gloire de Dieu. Non elle nous donne au contraire d’en approcher le mystère. Elle nous redit que la Gloire de Dieu est bien loin de nos gloires humaines enveloppées dans leurs richesses et leurs honneurs de toute sorte…Elle nous aide à convertir nos regards. Elle nous aide à laisser de côté nos peurs pour grandir dans la confiance en ce qui surgit petitement, imprévu.
Que Marie dans la Gloire du Ciel, comme nous le prions dans l’oraison initiale, une Gloire qui n’est pas de notre terre, mais qui n’est pas loin de notre terre, et de nos chemins humains, nous aide à ajuster nos lunettes, et nos cœurs…Faisons mémoire en cette eucharistie, de ce mystère de Gloire dans lequel le Christ mort et ressuscité nous introduit. En Lui, nous rendons grâce d’en avoir déjà un avant-goût.
Année B - 19 ème dim. Temps ordinaire - 11 aout 2024
1 Roi 19 4-8 ; Eph 4.30-5.2 ; Jn 6 41-51 ;
Homélie du F. Vincent
Les textes bibliques de ce dimanche nous parlent de la nourriture que Dieu nous donne. La première lecture nous rapporte le témoignage du prophète Élie. Son grand souci était de ramener le peuple d’Israël à la fidélité au vrai Dieu. Il n’a jamais cessé de dénoncer ceux qui se vautraient dans le péché. Se sentant menacé, il a dû s’enfuir dans le désert. Il pensait en finir avec cette vie. Mais Dieu ne l’a pas abandonné. Il lui a envoyé le pain qui lui donnera les forces nécessaires pour continuer sa longue marche.
Nous aussi, nous connaissons parfois des périodes difficiles. Mais notre Dieu ne nous abandonne pas. Il nous donne le pain dont nous avons be-soin pour continuer notre route. Chacun de nous peut penser à une parole d’encouragement, une rencontre qui nous a fait du bien, un geste d’amitié. Mais le seul vrai pain, nous le trouvons dans l’assemblée du dimanche. C’est Jésus lui-même qui se donne. Il est le vrai pain de la route par sa Parole et par son Eucharistie. Nous chrétiens, nous avons tous besoin de cette nourriture que Dieu nous donne pour continuer notre marche.
C’est ce message que nous trouvons dans l’Évangile de ce jour. Saint Jean a longuement médité sur les paroles de Jésus. Ce qui le fait souffrir c’est la désaffection des communautés chrétiennes vis-à-vis de l’Eucharistie. Et aujourd’hui, il voudrait nous ramener à l’essentiel. Le Christ se présente à tous comme “le Pain descendu du ciel”. Il est le plus beau cadeau que Dieu ait pu faire à l’humanité. C’est Jésus qui se donne à nous pour que nous puissions vivre éternellement. C’est un cadeau imprévu et inattendu. Nous n’avons rien fait pour le mériter. Il s’agit d’un don gratuit de Dieu. Mais pour l’accueillir en vérité, un acte de foi est absolument nécessaire.
C’est ainsi que Jésus nous révèle qui il est, en vérité. Et cette révélation va provoquer une crise. Il y a ceux qui croient et ceux qui refusent de croire. Et dans notre monde d’aujourd’hui, ça n’a guère changé. Beaucoup se sont installés dans l’indifférence ou le refus. Ils ne voient en Jésus que le côté humain. Ils refusent de reconnaître sa divinité. Cet Évangile vient remettre en question ce que nous croyons savoir sur Jésus. Il n’est pas seule-ment l’homme de Nazareth ; il est le “pain du ciel”, la nourriture pour la route. Il nous dit qu’il faut le “manger”. Venir à lui, c’est croire en sa Parole, c’est s’en nourrir, c’est l’accueillir comme un don de Dieu.
Tout cela n’est possible qu’avec la foi. La tentation est grande de nous en tenir aux évidences. Aujourd’hui, le Christ vient nous appeler à une dé-marche de confiance. C’est une question de vie ou de mort. Nous sommes invités à choisir la vie qui vient de Dieu. Ses paroles viennent nous bousculer mais elles sont celles de la Vie éternelle. Chaque dimanche, le Seigneur vient nous nourrir de cette Parole et de son Eucharistie. C’est un don extraordinaire dont nous ne mesurons peut-être pas l’importance. Nous n’aurons jamais fini d’en découvrir la grandeur, à savoir que le Christ vient nous donner sa vie en se donnant Lui-même. Que Le Christ a livré son Corps et versé son sang pour nous et pour la multitude. La messe c’est Dieu qui vient à notre rencontre et qui nous attend. C’est un rendez-vous d’amour qui nous est offert à tous.
Dans sa lettre aux Éphésiens, saint Paul nous rappelle les dispositions à adopter pour accueillir ce don de Dieu. Il nous invite à vivre dans l’amour et l’unité. C’est une condition indispensable pour vivre l’Eucharistie en vérité. Nous ne pourrons vraiment témoigner de l’amour de Dieu que si nous en vivons. Notre référence c’est Dieu ; c’est Lui que nous devons imiter. C’est en lui seul que nous trouvons la joie et le bonheur, même dans les moments les plus difficiles.
En ce dimanche, nous sommes venus à Jésus. C’est lui qui nous accueille. Comme l’a écrit le pape François, il est “le visage de la miséricorde”. Alors oui, nous te prions : , Dieu notre Père, ouvre le cœur de tes enfants à celui que tu leur as donné comme “Pain vivant descendu du ciel”. Que grandisse en nous le désir de nous laisser attirer par toi. AMEN.
(Sources diverses)
Année B - 18e dimanche TO, dimanche 4 août 2024
– Ex 16, 2-4.12-15 ; Ep 4, 17.20-24 ; Jn 6, 24-35
Homélie du F. Charles Andreu
La satiété et la faim. Les lectures de ce dimanche, à travers l’image du pain, entendent évidemment susciter un discernement : quelle nourriture me fera vivre vraiment ? Mais plus radicalement encore, elles interrogent notre expérience de la satiété et de la faim.
La question est d’ordinaire vite résolue : la faim est mise du côté de la souffrance et de la peine, de ce manque que doit combler la satiété : être heureux, c’est être rassasié. Dieu n’est-il pas celui qui « comble de biens les affamés » ? Jésus ne promet-il pas : « Celui qui vient à moi n’aura plus jamais faim, celui qui croit en moi n’aura plus jamais soif » ?
Pourtant, la Sagesse divine, au livre de Sirac, promettait exactement le contraire : « Ceux qui me mangent auront encore faim, ceux qui me boivent auront encore soif. » (Si 24,21) Ou encore, dans la première lecture, la satiété est le propre de l’esclavage d’Égypte, et c’est la faim que Dieu fait d’abord connaître au peuple qu’il a libéré.
Sommes-nous faits pour la satiété, ou pour la faim ?
L’expérience de la satiété est évidemment fondamentale. Elle porte bien au-delà du fait d’avoir le ventre plein. Car dès le premier instant de notre vie, la satiété est liée à la relation. Le nourrisson, incapable de se nourrir lui-même, fait l’expérience d’être nourri, d’être objet d’attention et de soin, et dès lors il apprend la confiance, il trouve la sécurité intérieure qui lui sera nécessaire toute la vie.
Nous l’oublions facilement ensuite, mais la satiété repose toujours sur un don, sur la grâce d’une altérité. Même à cuisiner les légumes de mon propre jardin, je n’ai pas fait tomber la pluie, ni inventé l’eau chaude : tout cela je l’ai reçu des autres, d’une culture, d’une société, de Dieu. L’auto-suffisance, l’auto-satisfaction sont toujours une illusion, un mensonge dont il faut se détromper pour entrer enfin dans l’action de grâce : la vie est un don.
Pourtant cette vie est encore traversée par la faim. Et la faim aussi est une bénédiction. Entendons-nous : il y a aujourd’hui encore des hommes et des femmes qui meurent de faim, de toutes sortes de faim, et c’est un scandale. Mais ce n’est pas la faim qui tue, c’est l’absence de nourriture, c’est l’égoïsme qui refuse de partager les biens, l’attention, l’affection. Au contraire, si j’ai de quoi me nourrir, c’est une très bonne chose d’avoir faim. Car aujourd’hui, on meurt aussi de ne plus avoir faim, de perdre cette ouverture, ce désir, cette espérance indispensables pour accueillir le don de la vie, le don de l’autre qui me fait vivre.
L’autre n’est d’ailleurs pas seulement celui qui me nourrit ou que je nourris, il est celui dont j’ai faim. Dès lors que je l’aime, il est mon « manque », ce que je ne peux ni posséder, ni me donner à moi-même. L’illusion la plus courante et la plus tenace sur l’amour, c’est de croire que je vais finir par rencontrer celui ou celle qui me comblera enfin ; illusion spirituelle, encore, de croire que Dieu va me combler, va rassasier en moi toute faim. Au contraire : l’amour est une satiété qui creuse la faim, car elle déploie le désir.
Aussi la tentation est-elle grande de fuir l’amour véritable dans ses succédanés, de se ruer sur les piteux mate-faim de jouissances grossières, ou sur les coupe-faim du moralisme et de l’idéologie. Tentation encore de s’amputer de tout amour irréductible aux seuls devoirs de la charité, ou de le refouler. Certains détachements, loin d’être l’expression d’une liberté, ne sont qu’une défense contre le risque de la relation et de la faim. C’est tellement facile d’aimer son détachement ; c’est tellement plus difficile d’aimer quelqu’un. Accepter le lien, et donc aussi accepter le manque, est la seule vraie liberté, si du moins j’accepte encore que ce lien soit toujours retravaillé, élaboré, si j’accepte que la faim me travaille et me change.
La satiété et la faim. L’eucharistie est ce pain qui rassasie notre foi en éveillant notre faim, faim de voir face à face celui que nous rencontrons sous le signe du sacrement. Que le Seigneur comble notre attente ; qu’il creuse notre faim.
Année B -28 Juillet 2024 - 17e dim Ordinaire
2R 4/42-44, Eph 4/1-6, Jn 6/1-15.
Homélie du F. Cyprien
« Vingt pains… d’orge et de blé nouveau… Cinq pains d’orge… et deux petits poissons », Cent personnes pour Elisée, une grande foule avec Jésus et ses disciples
Il y a un parallèle évident entre les deux lectures, entre le miracle accompli par le prophète Elisée et celui de Jésus pour la foule qui le suivait…
… « Comment pourrais-je en distribuer à cent personnes ?... » « Qu’est-ce que cela pour tant de gens ? »
…Une insistance = la disproportion entre le nombre de gens et les provisions apportées, le pain disponible…
Et pourtant, comme il est écrit dans le livre des Rois, et le Seigneur l’avait dit : « On mangea et il y eut des restes » … Jésus le demanda aussi, on ramassa les restes quand tous furent rassasiés : « Ils remplirent douze paniers avec les morceaux des cinq pains d’orge qui étaient restés ».
Au départ, à la vue de la situation, c’est l’impossible qui se présente …impossible de subvenir aux besoins d’une foule… et pourtant, Elisée commande de distribuer les vingt pains d’orge et Jésus met à l’épreuve le disciple qui pense devoir aller acheter du pain.
Est-ce que cette situation ne se reproduit pas souvent dans nos vies, dans le quotidien du monde ? Est-ce que le fait d’être désarmé devant les impasses arrive seulement aux autres et jamais à nous-mêmes ?
Nous connaissons cela : avouons que souvent nous ne nous souvenons plus de la manière dont nous nous sommes sortis des impasses.
Alors Dieu ne ferait-il pas parfois des miracles, non pas pour s’imposer, mais peut-être pour nous faciliter la vie, pour que nous avancions avec un peu plus de confiance et de sérénité ?
En fait Dieu ne va pas nous faciliter la vie simplement pour nous faire plaisir : il y a des domaines où nous savons fort bien que notre responsabilité est en jeu…
Comment ne pas lutter contre la faim dans le monde, contre le commerce des armes, contre toute forme de violence. Il ya des scandales dont nous sommes tous effectivement un peu ou vraiment responsables…
Les miracles sont, comme les paraboles, l’expression d’une volonté divine : cette volonté divine c’est de nous donner une part dans le gouvernement du monde et des choses.
Comme si Dieu nous disait : je veux bien vous aider, mais aidez-moi aussi. Souvenez-vous : après la guérison d’un homme paralysé : « Voyant cela, les foules furent saisies de crainte et rendirent gloire à Dieu qui a donné une telle autorité aux hommes. »
C’est saint Matthieu qui rapporte cela : il met à égalité Jésus et ses disciples à qui Il a dit ailleurs : « Si vous aviez la foi, vous diriez à cette montagne, change de place et elle vous obéirait».
J’ai le souvenir d’une catastrophe à Paris : une rame de métro ou train de banlieue, rame mal aiguillée, rame folle qui n’avait pu éviter le choc dans la station finale et les voitures s’étaient écrasées dans la gare les unes contre les autres : une journée après, les centres de transfusion du sang appelaient à ne plus venir ; ils avaient été débordés par les dons de sang spontanés suite à la nouvelle de l’accident. « Aide-toi, le Ciel t’aidera ».
La vie des saints ou plutôt l’histoire sainte que nous tissons tous avec la grâce de Dieu est pleine d’événements que nous ne pouvons pas expliquer et qui montrent que nous ne sommes jamais vraiment les maitres : cela est bon de nous le rappeler. « Aide-toi, le Ciel t’aidera » est un acte de foi autant qu’un proverbe de sagesse populaire.
Chers f. et soeurs, vivons en étant sûrs que Dieu et sa grâce nous accompagne : Jésus est venu nous le dire Lui-même : La vie est plus que la nourriture, le corps est plus que le vêtement »,… Ne vous souciez pas de ce que vous ne pouvez pas changer… le temps qui passe par exemple… et beaucoup d’autres choses, mais changez ce que vous pouvez changez, changez votre cœur, changez vos manques de foi en confiance, changez votre dureté de cœur en tendresse les plus nécessiteux. Comme au début du Carême entendons sans cesse cet appel : « Convertissez-vous et croyez à l’Evangile ». Dieu est capablr de nous convertir… Il est capable de faire avec nous et pour nous des miracles. Bon dimanche, fr. et srs…
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DEDICACE DE NOTRE EGLISE ; 25 juillet 2024
1 R 8, 23-22, 27-30 ; 1 P 2, 4-9 ; Mt 16, 13-19
Homélie du Père Abbé
Depuis que cette église a été consacrée en 1871, elle a bien changé dans son aménagement intérieur. Les croix de consécration qui sont sur les piliers et que des couronnes de feuillage honorent aujourd’hui en témoignent. Celles qui sont dans la nef sont anormalement basses. Elles signalent ainsi que le plancher a été relevé d’un mètre environ ; et disposé avec des petites marches pour faciliter la vue. A la différence de la disposition ancienne où le chœur des moines était surélevé, la disposition actuelle a permis aux fidèles d’être sur le même niveau afin d’être mieux associés à l’action liturgique. Ainsi a été mieux signifiée combien notre assemblée de prière est une et appelée à le devenir toujours plus. Entre l’église de 1871 et la nôtre, les aménagements faits nous rappellent que le bâtiment église est au service de la communauté qui s’y rassemble, à l’écoute de la compréhension qu’elle a d’elle-même. Après la vision très hiérarchique et pyramidale de l’Eglise qui était celle du 19°s, nous avons redécouvert avec le concile Vatican II, la nature de l’Eglise avant tout comme peuple de Dieu, formé de tous les baptisés, qui sont, pour reprendre les mots de l’apôtre Pierre, « une descendance choisie, un sacerdoce royal, une nation sainte ». Souligner ainsi l’évolution de notre église nous fait entrevoir combien le bâtiment église joue son rôle pour contribuer à l’édification progressive de l’assemblée des fidèles qui s’y rassemble.
En effet, comme le suggère l’apôtre Pierre, à chaque fois que nous entrons dans une église pour y prier et pour y célébrer avec d’autres, nous sommes invités à « entrer dans la construction de la demeure spirituelle ». C’est cette oeuvre qu’il importe désormais de réussir : la construction de la demeure spirituelle. Comment comprendre cette expression ? L’apôtre Pierre précise qu’il s’agit de devenir « le sacerdoce saint et de présenter des sacrifices spirituels, agréables à Dieu par Jésus-Christ ». Tous les fidèles sont ici concernés, pas seulement les prêtres. Tous participent à ce sacerdoce saint qui est d’offrir des sacrifices spirituels. Concrètement nous offrons des sacrifices spirituels par toute notre manière intérieure et extérieure d’être sous le regard de Dieu qui est là, et en étant attentifs à nos frères qui sont là. Depuis le premier signe de la croix, lorsque nous nous signons avec l’eau bénite, ou lorsque s’ouvre toute célébration liturgique, jusqu’à la dernière bénédiction qui conclue en général nos prières, nous offrons des sacrifices spirituels. Par nos paroles prononcées, par les élans intérieurs, par nos inclinations, par nos positions debout ou à genoux, par tous ces gestes qui nous associent à l’action qui se déroule qu’elle soit la prière de l’office ou la messe, par notre manière de recevoir la communion, nous exerçons chacun à notre place de fidèles ou de ministres notre vocation sacerdotale. Souvent nous vivons peut-être trop ces rites de manière machinale sans trop y penser. La fête de ce jour est là comme pour nous en refaire prendre conscience. Ce bâtiment église nous convoque à une œuvre spirituelle en chacun de nos gestes et en chacune de nos paroles. Rien d’extraordinaire en tout cela, mais une forme d’engagement à être présent en tout ce que nous faisons et disons. Certes nous savons tous d’expérience que parfois nous sommes bien attentifs et parfois très peu voire pas du tout. Le Seigneur n’attend pas notre parfaite disponibilité pour faire son œuvre. Il nous devance toujours pour nous offrir comme une grâce, sa parole, sa vie et son alliance scellée dans la mort et la résurrection de Jésus. Car une des manières de vivre notre sacerdoce baptismal, et non des moindres, n’est pas tant de faire beaucoup de choses, que d’accueillir ce que l’Eglise nous propose, d’entrer dans ce don de vie que le Seigneur veut nous faire….de nous laisser faire par Lui. Pour reprendre un autre mot de l’apôtre Pierre, il s’agit de nous « approcher du Seigneur Jésus »… Nous approcher, nous rendre proche de Lui qui est au milieu de nous dès lors que deux ou trois sont réunis en son nom…
En cette eucharistie, c’est ce qu’il nous est donné de faire.
Réjouissons d’être associés à si grand mystère. Entrons dans la construction de la demeure spirituelle que le Seigneur ne cesse d’édifier, au cœur de notre communauté monastique, mais aussi toujours inséparablement au cœur de son Eglise que nous formons tous.
Année B - HOMELIE du 16ème dimanche du TO - 21 juillet 2024
(Jér. 23,1-6 ; Eph. 2,13-18 ; Marc 6,30-34)
Homélie du F.Guillaume
Frères et sœurs Dimanche dernier, dans un passage de l’évangile selon St Marc, précédent celui que nous venons d’entendre, Jésus avait inauguré l’envoi en mission de ses disciples, 2 par 2. Il les exhortait à ne rien emporter avec eux, ni pain, ni sac, ni argent. Il leur demandait seulement de proclamer la Bonne Nouvelle, en invitant leurs auditeurs à la conversion, tout en chassant les démons et en guérissant les malades avec des onctions d’huile.
Aujourd’hui, nous assistons au retour de cette première mission. Les apôtres font un rapport à leur Maître de ce qu’ils ont fait et enseigné. Cela apparaît plutôt comme une réussite et une bonne performance. On s’attendrait alors que leur maître les félicite et les encourage à continuer. Mais non. Jésus se préoccupe avant tout de leur état physique, de leur fatigue. Il sait par expérience ce qu’il en coûte d’efforts pour annoncer l’Evangile. Lui-même a connu la faim, la soif, la fatigue des longues marches à travers la Galilée, la Judée et la Samarie. Il connaît le prix du repos, le bienfait de se mettre à l’écart, dans des endroits déserts, loin des foules avant de reprendre la route. Il sait qu’il faut prendre le temps de s’alimenter, alors même qu’il avait demandé de ne pas prendre de provision de pain, et de compter sur la générosité de ceux qui les accueilleraient.
Un apôtre doit donc veiller à son corps, être en bonne santé. Vous le savez sans doute : la langue anglaise dispose de 2 mots pour exprimer le soin à apporter à une personne. « Cure » vise le soin médical, thérapeutique, en vue de la guérison d’un malade, et c’est de ce soin qu’ont fait preuve avec succès Jésus et ses disciples, mais il y a aussi le « Care » qui est le soin attentif et attentionné à la personne, malade ou non, et c’est également de ce soin-là que fait preuve Jésus à l’égard de ses proches. Un soin que chacun est invité à porter à soi-même : « take care of yourself » comme on se le souhaite couramment.
Si la 1ère partie de notre page d’évangile concerne la relation de Jésus à ses apôtres, la 2nde partie, elle, met en avant la foule. Une foule de gens qui cherchent à approcher Jésus pour le voir, pour l’écouter, pour le toucher. Ce sont des gens affamés, fatigués aussi d’une autre manière, dans l’attente de soin et de pain. L’évangéliste Saint Marc nous dit alors que Jésus fut saisi de compassion envers eux. Un terme très fort en grec « splangma », qui serait mieux traduit par « il fut remué jusqu’aux entrailles », comme le sentiment d’une mère devant la souffrance de son enfant malade. C’est le mot de la miséricorde, dans ce qu’elle a de plus profond et de révélateur de l’Amour de Dieu pour nous. On le trouve dans la parabole du Bon Samaritain qui fut, lui aussi, touché de compassion devant la détresse d’un homme à demi-mort, abandonné au bord de la route par des bandits, tandis qu’un prêtre et un lévite étaient passés sans lui prêter attention, sans cure, sans care, sans cœur…
Face à la détresse de cette foule, comparée à un troupeau de brebis sans berger, la réponse de Jésus sera de lui proposer d’abord un enseignement, et même un long enseignement. Ce ne sera qu’ensuite qu’il pourvoira à leur restauration, par la multiplication des pains. Un épisode que nous aurons dimanche prochain, rapporté dans le IV° évangile.
Saint Marc veut nous faire comprendre ainsi qu’il n’y a pas d’évangélisation sans enseignement, et sans une écoute préalable et longue de la Parole de Jésus. Les apôtres à leur retour de mission rapporte à Jésus ce qu’ils ont fait et ce qu’ils ont enseigné. L’ évangile de Marc ne nous rapporte pas le contenu de ces longs discours, comme on en trouve chez les autres évangélistes : Matthieu, Luc et Jean. Le message de Marc se résume en peu de mots : « Le Royaume de Dieu est arrivé. Il est tout proche de vous. Convertissez-vous et croyez à la Bonne Nouvelle »
Frères et sœurs, ce message et cet appel à la conversion, dans un esprit de foi, sont toujours d’actualité et ils nous concernent chacun personnellement et en église. Les moines, en adoptant la Règle de Saint Benoît en font même l’objet d’un vœu qui les engage jour après jour. Mais ne nous faut-il pas aussi entendre les appels de notre Pape François qu’il adresse à tout homme de bonne volonté, pour une « conversion écologique », dans la mesure où notre terre, notre maison commune est en danger et menacée par une grave crise. Il nous est bon et profitable alors de relire et de méditer l’encyclique : « Laudato Si’ », comme nous le faisons en communauté, ces derniers jours, chaque matin, au chapitre. Et c’est une bonne lecture d’été que nous ne saurions que vous conseiller.
Frères et sœurs, à la différence de Jésus, je ne vais pas trop prolonger cette homélie. Certes, nous aurions pu nous pencher aussi sur les 2 premières lectures. Elles sont en consonance avec l’évangile, dans leurs appels et leur espoir d’une conversion et d’une réconciliation dans le droit, la justice et la paix. Et cela, dans une perspective messianique, en Jésus-Christ.
« Voici venir des jours, où je susciterai pour David un germe juste : il règnera en vrai Roi, il agira avec intelligence, il exercera le droit et la justice » annonce le prophète Jérémie : et Saint Paul de renchérir : « dans le Christ, vous qui étiez autrefois loin, vous êtes devenus proche par son Sang. C’est lui, le Christ, qui est notre paix ; il a détruit le mur de la haine. Il nous a réconciliés avec Dieu, les uns et les autres, en un seul Corps, par le moyen de la Croix. »
Nourris ainsi par la Parole de Dieu, accueillie dans les Saintes Ecritures, nous pouvons nous approcher de la Table de l’Eucharistie et partager le Pain de la Vie et la Coupe du Salut, en faisant mémoire de la Passion et de la Résurrection de Notre Seigneur et Sauveur.
Rendons grâces à Dieu, en ce dimanche où Il nous conduit par un juste chemin pour l’honneur de Son Nom : et que cette grâce et ce bonheur nous accompagnent tous les jours de notre vie. AMEN -
Année B - HOMÉLIE 15e DIMANCHE du Tps Ord. 14 JUILLET 2024
Amos 7, 12-15 ; Eph 1, 3-14 ; Mc 6, 7-13
Homélie de F. Hubert
Ton appel les a lancés par les routes et les chemins ;
porteurs de ta parole, sans autre appui que ton amour.
Envoyés en mission, à la suite des Douze,
sans rien prendre pour la route,
nous sommes envoyés comme des pauvres, démunis,
mais avec l’appui de l’amour du Seigneur.
Nous n’avons aucun « avoir » à offrir.
Ce que nous avons à offrir, c’est le don de Dieu.
Ce don, il faut d’abord le recevoir nous-mêmes.
L’accueillir, et ensuite le partager.
En le partageant, il s’enrichit, il s’approfondit, il se multiplie.
Quel est-il ?
C’est que nous sommes bénis et comblés des bénédictions de l’Esprit, dans le Christ,
que nous sommes choisis pour être saints et immaculés dans l’amour, grâce à son amour.
Jésus nous envoie sans moyens humains, sans moyens de puissance,
car son amour s’offre, il ne s’impose pas.
En Jésus, le Père nous offre la dignité des fils de Dieu, égaux en dignité,
il nous offre la fraternité de ceux qu’il engendre à sa vie,
et la liberté de ceux qui sont libérés du mal et vivifiés par l’Esprit.
A l’infirme de la Belle Porte du Temple, Pierre déclare :
De l’argent et de l’or, je n’en ai pas ; mais ce que j’ai, je te le donne :
au nom de Jésus Christ le Nazaréen, lève-toi et marche.
Le trésor que nous portons, dit Paul, nous le portons comme dans des vases d’argile ;
ainsi, on voit bien que cette puissance extraordinaire appartient à Dieu et ne vient pas de nous.
Pourtant, ce don gratuit de Dieu, il se reçoit et s’annonce par le don de nous-mêmes.
C’est en vivant à l’image du Christ que nous annonçons le Christ et son Père.
Tout notre être est engagé dans la mission que nous recevons.
Jésus nous envoie chasser les démons et guérir les malades.
Nous voudrions bien engendrer un monde où le mal n’ait plus droit de cité.
Dieu nous le promet dans le monde nouveau, à venir :
Il ne se fera plus aucun mal sur ma montagne sainte.
Mais aujourd’hui, le mal est présent,
et c’est dans le combat contre le mal que le bien se manifeste,
dans le pardon, la réconciliation, le don de la vie, le don de soi.
Il se manifeste dans la vie du Fils unique, donnée au monde dans l’Incarnation,
dans son affrontement du mal jusqu’à la croix,
dans la victoire de l’amour fidèle éclatant dans la Résurrection.
Vivre de ce bien unique et l’annoncer est la mission des disciples-missionnaires.
Chasser les esprits impurs, c’est d’abord travailler son cœur,
se laisser libérer du mal qui est présent en nous.
Car le grand danger, c’est de croire que le mal est en dehors de nous, chez les autres.
Chasser les démons, c’est offrir aux autres des chemins de libération, de vie,
de justice et de bonheur,
dans des actes simples de la vie quotidienne.
Entrer en relation, créer de la communion, de la fraternité,
c'est chasser les esprits qui rendent sourd, muet, qui divisent et isolent.
Tant de gens souffrent dans notre monde, d’isolement, d’indifférence, de rejet.
N’est-ce pas expulser les démons que de mettre le respect là où il y a le mépris,
la bienveillance là où il y a le dénigrement, la confiance là où il y a défiance,
des ouvertures là où il y a des murs, la bénédiction là où il y a rejet ?
En cette fête nationale française, la tâche est immense,
tant à l’intérieur du pays qu’à l’’extérieur.
Frères et sœurs, nous allons recevoir le Corps du Christ :
Nés de l’Esprit, recevons de Dieu notre dignité et notre liberté ;
membres du même Corps, mettons en œuvre notre fraternité,
Nous n’allons pas repartir de cette célébration avec sac et argent, tuniques et moyens humains,
mais avec l’appui du Christ ressuscité,
l’appui de l’Esprit de celui qui a ressuscité Jésus d’entre les morts,
avec l’amour même de Dieu.
Porteurs de la parole, sans autre appui que cet amour, annonçons la joie au monde entier.
Béni soit Dieu qui nous a bénis pour que le monde soit béni !