Homélies
Liste des Homélies
15 Décembre 2013
3ème Dimanche de l’Avent (année A)
Is 35, 1-6a.10 ; Jc 5, 7-10 ; Mt 11, 2-11
Homélie du F.Matthieu
Jean, dans sa prison, est déconcerté, il se prend à douter de l’identité de Jésus : « Es-tu celui qui doit venir ou devons-nous en attendre un autre ? »
En effet tout semble mal tourner : lui-même est en prison, surtout la prédication de Jésus et son comportement le déconcertent car rien de tout cela ne coïncide vraiment avec la vision somptueuse de la venue de Dieu, celle d’Isaïe par exemple ; où voit-on le triomphe de la justice, la fin de tous les antagonismes, la « revanche de notre Dieu » ? Jean, à la lumière des thèmes apocalyptiques si répandus dans le monde juif du temps, attendait une intervention de Dieu, une manifestation de puissance, une remise en ordre obtenue par la force : « Prenez courage, ne craignez pas. Voici votre Dieu ; c’est la vengeance qui vient, la revanche de Dieu. Il vient lui-même et va vous sauver » disait Isaïe. Jean a proclamé l’imminence de l’intervention divine, révélatrice de la souveraineté de Dieu et, au-delà, manifestation de ce qu’est Dieu en lui-même. Sans jalousie, il a vu Jésus prendre le relais. Mais il est emprisonné, au mépris de cette puissance de Dieu qu’il a proclamée. Et Jésus, au lieu de mobiliser les foules pour prendre le pouvoir, ne s’occupe que des aveugles, des lépreux, des petits.
Si la liturgie nous fait relire cet épisode, n’est-ce pas parce que nous serions nous-mêmes dans une situation analogue à celle de Jean.
On nous invite à célébrer bientôt la venue de Dieu en notre monde, mais rien, en apparence, n’a changé. Le loup n’habite pas avec l’agneau, la paix n’est pas pour demain, les boiteux continuent à boiter et les aveugles à ne pas voir…
Les vieux rêves, les belles illusions ne sont pas loin lorsque, d’un côté, nous comptons sur « nos chevaux et sur nos chars », … nos hélicoptères et nos drones, pour établir un Royaume de justice… sinon de paix. Et, d’un autre côté, ne rêvons-nous pas du triomphe de notre église, de sa réussite universelle, pour nous, la première étape naturelle de la venue du Règne de Dieu ?
« Es-tu celui qui doit venir ou devons-nous en attendre un autre ? »
Alors ferons-nous partie de ces « bienheureux », dont parle Jésus, que le visage de Dieu révélé en lui, Jésus, ne fera pas tomber ?
Car c’est bien de cela qu’il s’agit : avec Jésus nous sommes invités à changer radicalement notre manière de voir Dieu. Celui que nous appelons « Dieu, le Père tout-puissant » se révèle comme un exclu, crucifié nu parmi les malfaiteurs.
Nous sommes bien devant le choix fondamental : qui est-il ton Dieu ?
Le Dieu de tes rêves, de l’accomplissement de tes ambitions fussent-elles celles du bonheur pour tous, ou le Dieu de Jésus-Christ dont la toute-puissance se révèle dans la faiblesse de la Croix et dans la Révélation aux tout-petits.
Jésus a refusé le messianisme de gloire et de puissance que lui proposait le tentateur. « Si tu es le fils de Dieu », dit celui-ci. Traduisons : si tu es l’image parfaite de celui qui est « Le Très haut ». Mais justement parce qu’il est l’image du vrai Dieu, qu’il connaît, Jésus choisit l’humilité, le renoncement à la toute-puissance, l’amour qui va lui faire donner sa vie pour nous donner la vie.
Serons-nous « bienheureux » pour accepter et reconnaître le Dieu de Jésus ?
Mais, attention, cela va loin… Car nous avons à être image de ce Dieu-là.
Cela implique des manières d’être en contradiction totale avec nos tentations de dominer, de paraître, de posséder. Une autre Sagesse, une autre manière de concevoir et d’aborder la vie. Voilà qui exige de nous un retournement, une « conversion ». Nous sommes toujours en quête de ce chemin-là.
Que la vérité de Dieu, donc de l’homme, soit le dépassement du « moi » pour aller exister dans l’autre et le faire exister. C’est la « revanche » de ce Dieu-là, la revanche de l’amour. Non pas d’un amour abstrait, mais de Quelqu’un qui ne se définit que par l’amour. C’est pourquoi les grands bénéficiaires de la venue de Dieu sont ceux qui manquent de tout, les pauvres… Mais alors, les autres ? et nous-mêmes ?
Nous devrons, nous aussi, nous faire une « âme de pauvre ; nous faire petits, prendre conscience, dans la lucidité, de notre manque, manque de remise de nous-même à Dieu, manque essentiel d’humilité et d’amour.
Mais cette lucidité n’est pas décourageante, car elle se conjugue avec l’espérance que Dieu, lui, ne nous manque jamais. Il est en effet « celui qui vient » à nous, inlassablement. Cette pauvreté nous l’atteindrons parce qu’elle nous est donnée … gratuitement !
(2013-12-15)
1er dimanche de l’Avent - 1er décembre 2013
Isaïe 2,1-5 / Romains 13,11-14 / Matthieu 24,37-44
frère Sébastien
Frères et sœurs, une bonne nouvelle. Aujourd’hui nous commençons une nouvelle année liturgique. De ce fait nous voici tous ensemble tournés vers notre avenir, et c’est cela qui est passionnant. Mieux : nous partons gagnants !
La liturgie attire notre attention. C’est déjà l’heure du jugement : faut-il craindre ou se réjouir ? Comment le vivre ? Un seul critère d’action, pratique, bien formulé dans le livre du Siracide, chapitre 7 : En toute chose considère ta fin, et jamais tu ne pécheras. , non la fin mais la tienne. C’est que la valeur de tes actions est uniquement dans l’intention : ton devenir, tu l’as constamment entre tes mains. Et l’Évangile d’aujourd’hui de conclure : Restez donc éveillés, soyez vigilants !
La Règle de St Benoît traduit cela en petites maximes pratiques, taillées dans du diamant. Écoutez :
Craindre le jour du jugement, redouter la Géhenne, Voilà de quoi nous réveiller ! Tous, les moines aussi, quand nous sommes tentés de mettre la tête sous l’aile. Dis-moi quel est ton désir, je te dirai qui tu es. Ton grand désir, monnayé au long de tes journées dans une multitude de petits désirs. Dis-toi quels ils sont. – désirer la vie éternelle de toute sa convoitise spirituelle. Cela, c’est le moteur. Avoir chaque jour la mort présente devant ses yeux. Surveiller à toute heure les actions de sa vie. Nous y revoilà ! C’est notre chance, à ne pas manquer.
Ainsi Jésus et saint Benoît ensemble nous placent devant le mystère de la fin des temps, qui est aussi le mystère de la fin de chacune de nos vies, et surtout de leur au-delà.
J’entends le curieux : Oui, mon Père, mais qu’est-ce qu’il y a après la mort ? On peut se dérober : Nul n’en sait rien, rien, non, rien ! C’est là un blasphème qui fait de Dieu un mystificateur. Et pourtant cela peut utilement détourner de curiosités mal placées, et pourtant respectables. Inutile d’imaginer les allées du Paradis, les bancs sous les arbres pour bavarder sans fin dans un ici-bas reconstitué là-haut. – Suit inévitable question : Franchement, mon Père, au ciel est-ce que je retrouverai mon chien que j’aimais tant ?... et ma chère grand-mère, c’est elle qui m’a élevé ?... Est-ce qu’on distribuera des jeux de cartes ? Car l’éternité, toutes pendules arrêtées, ça sera long...
J’entends Dieu protester : L’avant mort et l’après mort, mais j’en parle tout au long de la Bible et dans le témoignage des croyants : ce n’est rien d’autre que la vie éternelle, commencée dès ici-bas, parachevée là-haut ! Jésus le dit : La vie éternelle c’est qu'ils te connaissent, toi, le seul véritable Dieu, et celui que tu as envoyé Jésus-Christ. (Jn 17,3).
C’est cela le Ciel ! – Une connaissance amoureuse mutuelle dans la communion parfaite qui englobe tout l’amour divin et tout l’amour humain. Alors il n’y a plus qu’un seul Amour d’une telle plénitude qu’il envahit tout et éclipse tout le reste. Quand le soleil se lève les étoiles s’effacent.
Le contestataire, est toujours là : D’accord, mon Père, mais avouez que cela reste bien mystérieux ! – Effectivement, et tant mieux ! L’indicible est discret. Comme les spirituels, les mystiques qui le vivent déjà, au quotidien.
Et il y a en chacun de nous un mystique qui s’ignore, qui est peut-être en train de s’éveiller.
J’entends les réticences. Tout cela, mon frère, c’est bien joli, mais concrètement que faire ? – Eh bien ! Accueillir en nos cœurs les fortes lectures d’aujourd’hui.
1ère lecture – Ici Isaïe parle à nos sens spirituels. Voici ce qui arrivera à la fin des temps ...Quoi ? Avant tout un déferlement de bonnes nouvelles ; un seul exemple, pensons au monde d’aujourd’hui ! :
Toutes les nations diront : Venez, montons à la montagne du Seigneur, [...] On ne lèvera plus l’épée, nation contre nation, on n’apprendra plus à faire la guerre. Fini, fini ! etc.
Avec Isaïe on apprend à entrer dans l’aujourd’hui du rêve de Dieu, plus certain que le lever de l’aurore.
Saint Paul dans la deuxième lecture prend le relais, pour actualiser, concrétiser.
Ro 13 •11 Frères : c’est l’heure de nous réveiller. [...] Laissons donc là les œuvres des ténèbres, et revêtons une armure de lumière. Qu’est-ce à dire ? Revêtez-vous du Seigneur Jésus, le Christ, et ne faites pas les mauvaises choses que la chair vous suggère.
Réalisons ! Une armure de lumière, protégé de soi-même et de tout mal : qui ne voudrait devenir des enfants de lumière....
Jésus dans l’Évangile complète et achève.
Il n’hésite pas à nous faire peur, la pire, la plus angoissante, avec le rappel du déluge des origines présenté comme une menace encore actuelle, tant est encore réel le drame de l’universalité du péché qui atteint Dieu en plein cœur, en son cœur de créateur et de Père.
Le péché c’est d’oublier cela et de continuer comme si de rien n’était ; péché continué dans l’inconscience possible, menaçante. Ou s’ouvrir grand à la grâce du temps d’Avent, pour soi, pour les autres, pour notre monde d’aujourd’hui qui en a tant besoin. À chacun de choisir, en responsable !
Partons gagnants ! L’Avent est commencé, joie !
TOUSSAINT 2013
Ap 7,2-4.9-14; 1 Jn 3,1-3; Mt 5, 1-12a
Homélie du Père Abbé Luc
Frères et sœurs,
La foi nous donne de voir des réalités que ceux, qui ne partagent pas notre foi, ne
voient pas. Nous voyons, non avec les yeux de chair par lesquels vous me voyez et que je vous
voie. Nous voyons avec les yeux de la foi, de l'espérance et de la charité. Et ce regard de foi
est tout particulièrement éveillé en ce jour de la Toussaint. Les chants et les textes nous
invitent à nous projeter au-delà de ce qui est à notre portée immédiate, au-delà de la mort, tout
en nous montrant, cependant, combien notre vie présente est déjà pleine de cette vie à venir.
Ainsi St Jean, dans l'Apocalypse, nous a partagé sa vision de foi, la vision d'un peuple
immense, réuni dans la lumière de Dieu pour chanter sa louange et sa gloire ... C'est la vision
d'une humanité unie dans sa grande diversité de nations et de culture, et heureuse de chanter
son Créateur et son Sauveur. Cette vision de Jean vient conforter notre foi en l'assurant que
notre vie n'est pas laissée au hasard. Elle est, au contraire, toute orientée vers la rencontre de
Celui de qui tout vient et vers lequel tout retourne. Vision d'espérance donc qui nous révèle
que notre vie terrestre n'est que la petite part visible de l'iceberg. La vie à venir, dans l'au-
delà, sera l'accomplissement de notre vie présente, en lui donnant, et son sens et sa plénitude.
Vision de charité aussi, car notre cœur sera comblé par l'amour échangé et vécu alors dans la
relation avec Dieu notre Père, dans le Christ Jésus, l'Agneau de Dieu.
Dans l'évangile, Jésus nous a partagé, lui aussi sa vision de foi ... une vision de foi très
enracinée dans la vie présente des gens qu'il rencontrait. Si St Jean portait son regard très loin
pour y reconnaitre le monde à venir, Jésus part de la réalité vécue par les gens pour y déceler
déjà la part cachée de l'iceberg ... Il pose sur notre réalité humaine un regard tellement
nouveau et profond qu'il déplace nos façons de voir habituelles. Là où nous nous tournons
spontanément vers les gens bien en vue, lui déclare heureux les pauvres de cœur et les cœurs
purs. Là où nous aimons nous attarder auprès de ceux qui rient, lui proclament heureux ceux
qui pleurent et qui sont affamés de justice. Là nous souhaitons être reconnus et admirés, lui
affirme que nous sommes heureux lorsqu'on nous persécute, qu'on dit toute sorte de mal sur
nous, à cause de lui, Jésus. Etonnant retournement de regard qui nous entraine dans une autre
profondeur. La face visible de notre vie humaine n'est pas le tout. Si nous ne travaillons que
pour elle, nous serons les plus malheureux des hommes, parce que nous allons manquer
l'essentiel. Et cet essentiel qui est fait de justesse intérieure, de douceur, de recherche de
justice, de paix, de vérité et de miséricorde pour autrui, cet essentiel ne passera pas. Il nous
introduit dès ce monde, dans le Royaume des cieux.
En fêtant ce jour, tous les saints, nous avons devant les yeux, tant et tant de visages, qui
ont laissé transparaitre cette recherche de l'essentiel dans leur vie. Ils ont accepté de mettre
leur existence sous la lumière du Christ. Ils se sont laissé guider par Lui de l'intérieur. A côté
des grands saints, nous pouvons ainsi associer tant de membres de nos familles, des amis, des
frères de notre communauté, des éducateurs etc .... Par leur manière de vivre, sans s'en rendre
compte le plus souvent, ils nous ont transmis le flambeau de la foi, de l'espérance et de la
charité. Ils nous ont transmis le flambeau de la sainteté vivante, sans cesse à rechercher,
flambeau précieux qui éclaire nos pas de chaque jour. C'est là notre joie. De cela, nous
voulons dire merci à Dieu. Nous le faisons maintenant en faisant mémoire de la mort et de la
résurrection du Christ de qui nous avons tout reçu et en qui nous sommes appelés à la sainteté. (2013-11-01)
Année C – 31° Dimanche du Temps Ordinaire - 3 nov 2013
LUC 19,1-10
Homélie du F.Servan
La rencontre de Zachée et de Jésus, le Sauveur, le Fils de l'homme, est une des scènes les plus belles et vivantes de l'Evangile selon St Luc !. .. Une scène facile à utiliser, dessiner ou mimer dans la catéchèse des enfants et des plus jeunes.
-( Si vous allez voir notre expo monastique vous trouverez cet évangile illustré et raconté dans un très beau livre placé sur un pupitre et qui s'appelle:" Grains de Bible ". un livre pour les enfants de 5 à 99 ans, que plusieurs familles aiment mettre sur une table dans leur salle de séjour, à la disposition de tout un chacun.)-
Dans ce récit, bref mais si vivant et plein de mouvement - abondent les mots qui font tilt et donnent de la joie ... et des jeux entre ces mots!
Par ex ce contraste : " c'était quelqu'un de riche "-" mais il était de petite taille "
Quelqu'un de riche ... ayant sans doute une belle maison, avec de quoi y mettre et recevoir ... .le chef local des collecteurs d'impôts, percevant de bonnes ristournes sur les taxes et les douanes. ( Après avoir donné la moitié de ses biens, il lui restera encore largement de quoi rendre 4 fois plus à celui qu'il aura extorqué !
Donc quelqu'un de redouté, de puissant et de craint, mais en même temps méprisé: un pécheur! un gros riche, mais" de petite taille"
-:( ... et vous, et moi ? quelle est notre" petite taille? .. ce qui nous humilie, au plan humain et moral, aux yeux des autres et de nous-mêmes !)-
Mais voici la rencontre des regards, des désirs: " Il cherchait à VOIR qui était ce Rabbi Jésus qui traversait Jéricho avec toute une foule ... alors il grimpa ... pour VOIR caché dans le feuillage. Mais voici que Jésus lève les yeux ... et le voit.
Croisée des regards! Il y a 2 jours, frères et sœurs, c'était la Toussaint, et hier la mémoire des défunts ... tant d'hommes et de femmes qui durant leur vie terrestre ont croisé leur regard avec celui de Jésus, par ex en regardant la Croix ( comme celle de cette église) et en y lisant :" le Fils de l'Homme est venu chercher et sauver ce qui était perdu "
Croisée des regards, croisée des recherches :" il cherchait à voir Jésus"- " le Fils de l'Homme est venu chercher "
.... et-c'est Jésus qui a l'initiative et qui s'invite :" descends vite: aujourd'hui il faut (dans ce "il faut'" se lit le dessein de Dieu, comme souvent dans l'Evangile) que j'aille demeurer chez toi" A cet homme fort et petit, Jésus offre de partager son repas et son toit sans souci de la pureté rituelle. - ( " Tu ne me chercherais pas ... si moi d'abord je ne t'avais cherché! ")
Il faut .. .la nécessité à laquelle ici obéit Jésus est de manifester un Dieu de grâce qui n'exige pas la repentance préalable du pécheur pour s'approcher de lui.
La conversion éthique, morale, ne viendra qu'ensuite :" Voilà, Seigneur, je fais ... "
"Aujourd'hui il faut que j'aille demeurer chez toi"
"Aujourd'hui, le salut est arrivé pour cette maison"
Alors, frères et sœurs, n'hésitons pas à notre tour à entrer dans cet " aujourd'hui" en prenant place à la table des pécheurs avec Zachée et en disant :" Seigneur je ne suis pas digne de te recevoir dans ma maison », mis viens afin que quelque chose de la joie de Dieu entre dans nos maisons ! Amen (2013-11-03)
COMMEMORATION DES FIDELES DEFUNTS 2013
Rm 14, 7-9,10b-12 ; Ps 114-115 ; Jo 6,37-40
Homélie du Père Abbé Luc
Frères et sœurs,
En ce jour, il nous est bon de réentendre le désir profond de Dieu notre Père, exprimé
par Jésus, lui-même, venu faire sa volonté. « La volonté de Celui qui m'a envoyé, c'est que je
ne perde aucun de ceux qu'il m'a donnés, mais que je les ressuscite tous au dernier jour ».
Jésus nous révèle que nous sommes comme remis entre ses mains, donnés, pour qu'il nous
fasse participer pleinement à la vie divine, par la résurrection. Toute la mission de Jésus a
consisté en cela: rassembler tous les hommes pour les conduire à cette intimité des fils de
Dieu avec leur Père des Cieux, cette intimité que lui-même vit pleinement. Par sa mort et sa
résurrection, Jésus a ouvert définitivement cette possibilité d'entrer dès maintenant dans une
intimité d'amour avec Dieu ... Paul peut dire en écho: «Si nous vivons, nous vivons pour le
Seigneur, si nous mourrons, nous mourrons pour le Seigneur. Dans notre vie comme dans
notre mort, nous appartenons au Seigneur. Car si le Christ a connu la mort, puis la vie, c'est
pour devenir le Seigneur des morts et des vivants ». Oui, le Christ a pris avec lui, en lui toute
l'humanité pour la présenter au Père et la conduire vers la vie pleine au-delà de la mort. C'est
là notre espérance et notre joie qui motivent notre prière confiante pour tous nos défunts.
Le Christ nous prend avec lui, et en même temps il vient susciter notre liberté. Il ne
veut pas nous emmener sans notre consentement, sans notre confiance et notre foi en lui.
Chacun de nous durant son pèlerinage terrestre est appelé à entrer dans cette relation plus
vivante avec le Christ, tourné vers le Père dans l'Esprit Saint. Mystère de nos libertés plus ou
moins éveillées, plus ou moins engagées pour aller à la rencontre de notre Dieu. Mystère de
nos libertés toujours appelées à grandir dans la confiance et l'ouverture à l'Amour toujours
offert de notre Père des Cieux. Et ici, nous connaissons bien notre propre difficulté à entrer
dans ce mouvement d'amour. Nous sommes capables de résister à l'Amour de notre Père des
Cieux. C'est ici le second motif de notre prière pour nos défunts. Dans la conscience de notre
commune condition de pécheur, nous prions avec eux et pour eux, pour que toute trace de
résistance soit effacée dans l'accueil de la lumière de Dieu.
Dans le mémorial de la mort et de la résurrection du Christ que nous célébrons,
rendons grâce pour le salut offert et confions à l'Amour rédempteur du Christ, tous les
défunts. (2013-11-02)
ST LUC 2013
(2 Tm 4, 9-17a; Le 10, 1-9)
Homélie du Père Abbé Luc
Frères et sœurs,
« Dites d'abord: 'paix à cette maison' » Les premiers mots des disciples envoyés par Jésus sont des mots de paix ... Comme les premiers mots des anges révélant aux bergers la naissance du Messie: « gloire à Dieu au plus haut des cieux et paix sur la terre aux hommes qu'il aime » ... Jésus souhaite que ces disciples soient avant tout des messagers de paix, parce que lorsque Dieu vient à notre rencontre, c'est pour nous donner sa paix. On peut remarquer qu'au début de chaque eucharistie quand un évêque, un successeur des apôtres, ouvre la célébration, il s'adresse aux fidèles en leur disant: «la Paix soit avec vous » ... et l'une des formules usuelles pour tous prêtres que j'ai utilisée en commençant s'exprime de même: « Que Dieu notre Père et Jésus Christ notre Seigneur vous donnent la grâce et la paix ... »
La paix, manifestation de la présence de Dieu; la paix expression du Royaume à l'œuvre ... Mais alors qui sont les disciples de Jésus pour la transmettre, pour la faire vivre entre les hommes? Ils ne sont que des hommes, pas meilleurs que les autres. Ils transmettent et voudraient transmettre ce don, comme un cadeau dont ils sont les heureux bénéficiaires eux- mêmes. Et ce qu'ils transmettent, ce ne sont pas seulement des mots ... Si le cœur n'est pas pacifié, la paix ne se donne pas. Si le regard n'est pas pacifié, la paix ne se construit pas ... Seul le disciple pacifié transmet la paix ... Ainsi faisons-nous l'expérience de notre faiblesse. Nous ne sommes pas à la hauteur de ce don. Nous sommes souvent comme ce récipient percé qui laisse perdre son eau ... parce qu'il y a les fêlures provoquées par les pensées de discordes ou de rancune, parce qu'il y a les trous de nos absences d'attention et de présence à Dieu et aux autres ... La paix nous glisse entre les doigts. Nous peinons à la retenir, à la garder comme un bien vivant et toujours offert ... St Benoit nous invite avec le psalmiste: «cherche la paix, poursuis-la 1». Sans cesse, le moine voudrait se mettre en quête de cette paix, paix de ses pensées, paix de son regard, paix de son cœur, paix de ses relations ... Cette paix-là n'a pas beaucoup à voir avec la tranquillité insouciante. Elle est un travail dans le même temps qu'elle procure le repos ...
Dans cette quête qui nous affronte souvent à notre impuissance, nous apprenons à tourner nos regards vers Celui qui en est la source: Jésus-Christ. Sur la croix, il a scellé la paix par le sang de son offrande. En regardant Jésus, nous mesurons le prix extrême de la paix qu'il nous offre. Elle est le don de sa vie, rien moins. En nous donnant sa paix, Jésus nous fait participer à sa Vie, à son Esprit. Il nous fait entrer dans l'intimité d'amour qui l'unit à son Père. En cette eucharistie, nous revenons à la source de la paix, dans le mémorial de la mort et la résurrection de Jésus. Laissons-le nous pacifier. Laissons-nous conduire nos pas au chemin. (2013-10-18)
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Année C - 28e Dimanche ordinaire
13 Octobre 2013
I Rois 5, 14-17 2e Timothée 2, 8-13 Luc17, 11-19
Homélie du F.Ghislain
Les deux histoires qui nous été lues sont bien claires : dans les deux cas, un homme est guéri de la lèpre, cette maladie terrible qu’on ne savait pas soigner, qui non seulement dévorait l’homme, mais le mettait de manière permanente à l’écart des autres, à cause de la contagion. Dans les deux cas, la guérison est obtenue à la parole d’un homme de Dieu, le prophète Elisée pour le général syrien, le prophète Jésus pour les dix lépreux du village. Dans les deux cas enfin, l’homme guéri revient pour rendre grâces, non pas tellement au thaumaturge qu’à Dieu. Car cette action de grâces est une reconnaissance du vrai Dieu, de la part des gens qui sont guéris et qui n’étaient pas auparavant des fidèles du Dieu d’Israël : l’officier emporte de la terre d’Israël dans son pays pour créer un espace où adorer Dieu, le samaritain, en revenant vers Jésus, confesse par là-même le Dieu qui s’est révélé à Israël et dont Jésus annonce le Royaume qui vient.
Nous pourrions en rester là et tirer de ces textes une exhortation au devoir de gratitude, une invitation aussi à nous rendre attentifs à ceux qui, ne partageant pas peut-être notre foi religieuse, vivent cependant dans une attitude d’action de grâces. Une difficulté pourtant survient qui, peut-être, nous rend difficile une telle attitude : non seulement nous n’avons pas été guéris personnellement de la lèpre, mais nous vivons dans un monde où règne la maladie, physique ou morale. Nous connaissons tous, parmi nos proches, des personnes atteintes d’un cancer qui finira sans doute par avoir raison d’eux. Si ce n’est pas le cancer, ce sera le sida, la trisomie, un accident qui laisse handicapé… Le catalogue des maladies non guéries est sans fin. Et que pouvons-nous dire des maladies de l’âme, comme les dépressions, ou celles de la relation, les séparations, les divorces, les hostilités, les injustices ? Nous vivons dans un monde bien malade, nous avons tous part très concrètement, à cette maladie qui parfois nous ravage. La plainte, l’inquiétude, la peur nous semblent nous être plus naturelles que la joie.
C’est vrai, et pourtant…Permettez-moi de partager avec vous une expérience récente. Il y a quelques mois, je rentrais d’un séjour assez long dans un pays très pauvre, peu développé, mal gouverné… En allant de l’aéroport à la maison des amis qui allaient me recevoir et me mettre dans le train pour la Pierre qui Vire, j’étais étonné des lumières qui éclairaient la ville, des routes entretenues, des signalisations efficaces, des commerces qui s’ouvraient ; je savais les hôpitaux où les malades s’éveillaient et où, dès le matin, on prendrait soin d’eux… Rien de tout cela, certes, ne fonctionnait parfaitement, mais cela fonctionnait tout de même. Or là derrière, n’y avait-il pas la générosité, la conscience professionnelle, la fidélité quotidienne de tant de gens, qui, à des niveaux d’intervention très différents, faisaient leur métier, souvent difficile et pas nécessairement gratifiant, et permettaient ainsi à la ville de vivre. Et je sentais en moi une espèce de gratitude bien réelle pour tous ces inconnus, qui m’avaient permis d’atterrir, de prendre une voiture dans un parking et, un peu plus tard, de rouler dans le train vers la maison.
Ceci est peut-être une parabole : les malheurs, auxquels j’ai fait allusion et qui sont réels, s’inscrivent dans un bien-être général qui résulte d’une décision de chacun, pas nécessairement parfaite et désintéressée mais réelle tout de même, d’entrer dans le mouvement du bien commun. Et je comprenais mieux aussi que les dysfonctionnements, les paralysies, mais aussi les drames personnels, les maladies, à un niveau mondial les guerres et les terrorismes, ont pour cause profonde les refus d’entrer dans le jeu de la relation et de l’amour. Il y a donc vraiment lieu à remerciement, à action, de grâces, à bienveillance pour tous et chacun des hommes et des femmes qui contribuent à nous donner la vie, à la soigner, à l’améliorer, à la réparer, à maintenir ou à construire la paix…
Derrière tout cela, n’y a –t-il pas Dieu dont l’évangile nous rappelle qu’il fait luire le soleil pour les bons et les méchants, qui ne se lasse pas d’inspirer aux hommes le souci vrai des autres et d’eux-mêmes, qui ne permet pas que nous soyons tentés ou éprouvés au-dessus de nos forces. Dieu, certes, ne fait pas souvent de miracles comme ceux que nous racontent les lectures de ce jour. Mais il ne cesse d’inspirer les hommes, il a le pouvoir sur les reins et les cœurs, il peut les atteindre et il les atteint en fait à des niveaux qui sont essentiels et sur lesquels lui seul peut agir et agit, même si cela ne se manifeste pas par des choses extraordinaires. Le mot qu’il faut saisir est que l’ordinaire est l’essentiel de l’homme et des hommes : Dieu suit, autant qu’il le peut, par des impulsions qui nous dépassent et sont souvent accueillies, la route des hommes, - celle qui, finalement, doit les mettre en paix les uns avec les autres et les conduire tous au Royaume.
Ainsi, au cœur de notre vie personnelle et familiale, professionnelle et municipale, nationale et mondiale où nous voyons tant de souffrances réelles et douloureuses, il est pourtant juste de préserver un espace d’action de grâces, de remerciement, de gratitude, une reconnaissance par conséquent du Dieu caché mais agissant. Pour cela, il importe d’ouvrir nos yeux sur tout le bien qui existe, mais aussi de participer nous-mêmes, à tous nos niveaux, au triomphe de ce bien. Une telle attitude donnera peut-être à notre cœur une vraie ouverture, une appréciation moins négative, une espérance plus grande, une action plus déterminée.
« Soyez dans l’action de grâces », dit plusieurs fois saint Paul dans ses lettres. « Je bénirai le Seigneur en tout temps, sa louange sans cesse à mes lèvres » dit le Psaume. Qu’il en soit ainsi pour nous, et nous ferons mieux face au quotidien difficile, tout en ouvrant le chemin vers un mieux toujours désirable.
(2013-10-13)
Année C - 23° Dimanche du Temps Ordinaire - 8 septembre 2013
Lc 14 25-33
Homélie du F.Antoine
Frères et Sœurs, cet Evangile peut nous paraître dur!
Comment Le Christ peut-il nous appeler à de tels renoncements ? ..
L'Eglise qui prolonge l'enseignement de Jésus, nous rappelle régulièrement le rôle du
mariage le rôle de la fidélité dans la durée, la mission évangélique de la famille, première
cellule d'Eglise, première étape de l'annonce de Dieu à l'enfant ...
Peut-être qu'une clef pourrait nous aider à entrer dans les paroles du Christ:
Une clef qui est à chercher dans le fait que .. J'homme est un être de relation!
Une relation qui façonne notre humanité dans ce qu'elle a de plus profond.
C'est à cette profondeur humaine que le Christ nous fait appel aujourd'hui quand il
s'adresse à 2 relations qui nous sont essentielles :
Celle qui nous a construits: la relation au Père et à la Mère.
Celle qui marque notre liberté: la relation au conjoint et aux enfants
Pour Jésus, ces deux relations fondamentales doivent être compatibles avec une troisième,
qui, elle, revêt un caractère prioritaire: la relation à Dieu.
Relation qui est une relation de personne à personne ... car elle nous fait disciple de
quelqu'un ... elle nous fait disciple de Jésus-Christ, Fils de l'homme, Fils de Dieu.
Pour le Christ, être disciple c'est venir à Lui en Lui donnant la préférence à toute autre
personne: « si quelqu'un vient à moi sans me préférer à son Père, à sa Mère il ne peut être
mon disciple» le texte original ne dit pas préférer, il dit « Haïr»« haïr son Père, haïr sa
mère» Or le verbe grec haïr a comme racine l'idée de ... couper à la base ... couper net.
Être disciple ... c'est couper net ... tout ce qui fait obstacle à cette relation unique au Maître
Divin qui est Jésus-Christ. .. c'est enlever ces barrières-réelles ou imaginaires- que nous
entretenons entre Lui et nous, barrières crées par notre vie plus souvent modelée par notre
Société que par l'Évangile ... Mais alors
Tout renoncement ne risque-t-il pas d'être ressenti comme une frustration?
Tout attachement à un Maître, quel qu'il soit ne risque-t-il pas devenir une aliénation grave
de ma personne?
« Celui qui parmi vous ne renonce pas à tout ce qui lui appartient, ne peut être mon disciple»
Cette finale de notre texte nous donne une deuxième clef: celle de la liberté intérieure.
En effet, notre évangile d'aujourd'hui n'est qu'un cri, un appel à la vraie liberté :.
Cette liberté intérieure qui ne rejette pas nos liens les plus chers mais qui demeure la seule
pouvant nous permettre de mettre en place l'importance de nos priorités.
Elle seule peut nous conduire à accueillir dans la Foi, les limites, les renoncements nécessaires
à une mise ordre de nos désirs, de nos projets et nous permettre de progresser dans une vraie
relation au Christ, et donner sens à la Croix que, chacun, nous sommes appelés à porter.
Soyez libres, nous redit aujourd'hui l'Evangile ...
ne vous laissez aliéner par aucun lien, par aucune possession.
Soyez comme celui réfléchit avant de construire une tour.
ce roi qui analyse la situation avant d'engager le combat,
ce disciple, qui se libère en marchant à la suite du Christ vers le Royaume du Père.
Soyez libre en Jésus-Christ, car Dieu croit en l'homme que nous sommes! (2013-09-08)
Année B - Pâques 4° Dimanche – 07/05/2006
Actes, 4:8-12 ; 1 Jean, 3:1-2 ; Jean 10, 11-18
Homélie du F.Guillaume
Frères et sœurs,
Les liturgies des dimanches du Temps Pascal sont par tradition des moments où les chrétiens sont invités à approfondir leur connaissance du Christ, à la lumière de l’évènement de la Résurrection, et avec le don du Saint Esprit.
Les 3 textes choisis par l’Eglise pour ce 4ème dimanche de Pâques insistent sur tel ou tel aspect du Christ Ressuscité : prenons-les l’un après l’autre en les méditant ensemble, si vous le voulez bien.
Dans la 1ère lecture tirée du livre des Actes des Apôtres, St Pierre dans un grand discours aux chefs du peuple et aux anciens leur dit : « Ce Jésus de Nazareth, crucifié par vous, ressuscité par Dieu, Il est la pierre que vous avez rejetée, vous les bâtisseurs. Il est devenu la pierre d’angle. En dehors de lui, il n’y a pas de salut. »
Jésus est ainsi comparé à une pierre : mieux même, il est « la » pierre angulaire d’un nouvel édifice, l’Eglise, et cette pierre apporte le salut. Comme tout symbole biblique, par nature ambivalent, celui de la pierre présente une face positive et une face négative. La face négative, c’est la dureté, l’imperméabilité, le contraire de la douceur, une certaine absence de vie et d’amour. Les cailloux du désert ne sont-ils pas l’objet de la tentation de Satan, quand Jésus après 40 jours au désert a faim et qu’il s’entend dire : « Si tu es le Fils de Dieu, ordonne que ces pierres deviennent des pains ». Mais qui d’entre vous, si son fils lui demande du pain, lui donnera-t-il une pierre ? Les prophètes exhortent eux le peuple d’Israël à convertir son cœur de pierre en un cœur de chair.
Mais la pierre, c’est aussi le Roc, le rocher, symbole de solidité. C’est le rocher, frappé par Moïse au désert, d’où peut jaillir l’eau vive qui étanche la soif. Saint Paul verra dans ce rocher qui accompagne la marche du peuple au désert la figure même du Christ.
Dans notre texte d’aujourd’hui, Jésus, la pierre d’angle, est la pierre de fondation, à partir de laquelle désormais toutes les autres pierres que nous sommes vont pouvoir s’ajuster pour édifier un nouveau Temple. Et ce n’est pas sans signification que Jésus ait confié à son disciple Simon le soin de cette Eglise : « Tu es Pierre, et sur cette pierre, je bâtirai mon église ».
Alors gardons en mémoire de ce premier texte cet aspect fondamental de la figure de Jésus Ressuscité : Il est la pierre d’angle, en dehors de lui, en dehors d’elle, il n’y a pas de salut.
Dans la seconde lecture, l’apôtre Jean nous présente Jésus comme Fils de Dieu. A ce titre, il nous donne d’entrer dans le désir du Père que nous soyons appelés enfants de Dieu, et nous le sommes. Jésus, le Fils Unique est en même temps, ce qui est paradoxal pour une famille humaine, le frère aîné de la multitude de frères et de sœurs que nous sommes par lui, avec lui et en lui. Saint Jean insiste tout au long de son épître sur cet aspect de communion, de relations intimes qui unissent non seulement le Père et le Fils dans l’Esprit Saint, mais aussi tous ceux et celles qui se réclament du nom de chrétien.
Il s’agit là d’un grand mystère, celui de la Trinité des personnes en Dieu, auquel nous sommes associés par grâce. L’Eglise est la famille des enfants de Dieu ayant un même Père : gardons à nouveau en mémoire cet aspect de relations interpersonnelles que le Christ Ressuscité est venu nous révéler.
Dans l’Evangile, enfin, ce n’est plus un apôtre, Pierre ou Jean, qui parle de Jésus. C’est Jésus lui-même qui se présente aux juifs, comme étant le vrai berger, le bon pasteur, ou plus exactement si l’on traduit l’original grec : le beau pasteur (kalos poïemen).
Quelle est la caractéristique essentielle de cette beauté, ou bonté ou vérité ? Jésus souligne 3 traits :
- le Pasteur véritable donne sa vie pour ses brebis, à la différence du mercenaire,
- le Bon Pasteur connaît chacune de ses brebis personnellement, et réciproquement, chaque brebis le connaît
- le Beau Pasteur a le souci d’autres brebis que celles de son propre troupeau. Il en appelle à un troupeau universel, rassemblé par un seul berger.
Les images du berger et des brebis sont familières et omniprésentes dans l’univers biblique. Adam et Eve eurent deux fils : l’un, Caïn, cultivait le sol, l’autre, Abel faisait paître des moutons. Et on sait que le Seigneur fit davantage de cas du sacrifice d’Abel que de celui de Caïn. Tous les patriarches ensuite, d’Abraham jusqu’à Moïse furent des pasteurs de troupeaux. Et quand il s’agit de choisir un Roi pour Israël, le Seigneur appela Saül, puis David qui conduisaient l’un des ânesses, l’autre des moutons. Certains prophètes, tel Amos étaient bergers et le Psalmiste chante Dieu lui-même comme Berger de son Peuple. On pourrait multiplier les références : il n’est donc pas surprenant que Jésus, qui récapitule en lui toutes les Ecritures parle de lui comme d’un berger. Mais le plus étonnant, c’est que ce berger en donnant sa vie pour ses brebis devient lui-même comme un agneau de sacrifice : agneau de Dieu qui enlève le péché du monde. De même que le véritable Maître est celui qui s’abaisse au rang du serviteur par amour de ses disciples, de même le bon berger s’abaisse au rang de ses brebis pour mieux les servir et les connaître, d’égal à égal.
Le livre de l’Apocalypse, dernier de la Bible, décrit dans une vision grandiose, le triomphe de cet Agneau, immolé au milieu d’une foule de gens vêtus de robes blanches. Nous lisons : « l’Agneau qui se tient au milieu du trône sera leur berger, et il les conduira vers des sources d’eaux vives. Ils n’auront plus faim, ils n’auront plus soif, Dieu essuiera toute larme de leurs yeux » (Ap. 7,17)
Cet agneau – berger ou ce berger – agneau, qui étanche la soif, nous renvoie ainsi à Moïse - berger qui frappe le rocher du désert pour y faire jaillir l’eau vive.
Ainsi, frères et sœurs, ces 3 lectures que nous venons d’entendre enrichissent notre connaissance du Christ Ressuscité : pierre d’angle, fils de Dieu, bon berger. C’est à une certaine forme de lectio divina que je vous ai conviés dans cette homélie. Chacun de vous est invité à poursuivre cette lectio, à travers les prochains textes de la liturgie du Temps Pascal (du dimanche ou des jours de semaine). Il y a là un trésor que les chrétiens en prière et en église n’auront jamais fini d’exploiter.
La Parole de Dieu, nous le savons, est nourriture et boisson pour notre vie spirituelle, personnelle et communautaire.
Offrons maintenant dans la joie l’eucharistie, où le Christ Ressuscité se donne à nous et nous fait entrer dans la communion avec le Père et l’Esprit Saint, et accueillons sa Paix, son Amour qui nous sauve.
AMEN (2006-05-07)
Année C - 21° Dimanche du Temps Ordinaire - 25 aout 2013
Homélie du F.Hubert
Jésus passait par villes et villages, enseignant et faisant route vers Jérusalem,
la ville où, comme il l’a déjà annoncé, il va être livré aux mains des hommes,
être rejeté, souffrir et être mis à mort.
Il va être livré, mais c’est délibérément qu’il a pris ce chemin,
et il va se livrer lui-même pour accomplir l’œuvre de salut qui est sa mission propre.
C’est lui la force de salut annoncée par Zacharie,
le Sauveur né à Bethléem, annoncé aux bergers par les anges, attendu par le vieillard Syméon.
C’est lui qui, dans le récit de St Luc, a déjà sauvé l’esclave du centurion, la pécheresse chez Simon, l’hémorroïsse, la fille de Jaïre, et sauvera plus loin l’aveugle de Jéricho et Zachée, le collecteur d’impôts.
Alors, tout le monde est-il sauvé ? Ou n’y aura-t-il que peu de gens à être sauvés ?
Jésus répond : « Efforcez-vous d’entrer par la porte étroite. »
Quelle est-elle, cette porte étroite ?
C’est Jésus lui-même, lui qui va être livré, souffrir, être mis à mort,
lui qui refusera de se sauver lui-même,
mais se confiera à son Père : « Père, entre tes mains je remets mon
esprit. » ; cela, après nous avoir confié à la miséricorde de ce Père :
« Père, pardonne-leur : ils ne savent pas ce qu’ils font. »
Oui, pour être sauvé, il faut accueillir le Sauveur. L’accueillir vraiment.
Et pour cela nous décentrer de nous-mêmes, l’accueillir comme un don totalement gratuit.
Nous décentrer de nous-mêmes :
non compter sur notre propre justice, comme le pharisien monté au temple pour prier,
mais compter sur lui.
Nous décentrer de nous-mêmes, nous dépouiller de tout ce qui nous encombre, de tout ce qui nous referme sur nous-mêmes,
écouter sa parole, son enseignement, et les mettre en pratique.
Accueillir le Royaume comme un don gratuit,
comme un enfant qui reçoit des autres tout ce dont il a besoin pour vivre :
18, 17 : « Qui n’accueille pas le Royaume comme un enfant, n’y entrera pas. »
Jésus dit que la porte est étroite, mais en plus, que la porte va être fermée.
Il y a urgence !
Ceux qui sont dehors ne pourront plus rentrer.
Ils sont caractérisés par ces mots, tirés du Ps 6 : « vous qui faites le mal », qui êtes artisans du mal.
Or nous tous, nous sommes artisans du mal.
L’urgence est donc d’accueillir celui qui nous sauve de ce mal.
Il est venu pour cela : 6, 9 : « Est-il permis, le jour du sabbat de sauver une vie ou de la perdre ? »
Il est le seul sauveur : 11, 29-32 : Il y a parmi vous plus que Jonas ou Salomon. Convertissez-vous, écoutez sa parole et mettez-la en pratique !
9, 24 : « Qui veut sauver sa vie la perdra ; mais qui perd sa vie à cause de moi, la sauvera. »
Il ne suffit pas de se réclamer d’avoir eu des liens superficiels avec Jésus Sauveur,
et croire qu’on a des droits, sans s’être laissés bouleversés et émerveillés par son amour sauveur.
Notre salut ne vient pas de notre propre justice, mais du don de Dieu.
Ce sera toute la découverte et le refrain incessant de saint Paul.
« Non ma justice à moi, mais la justice qui vient de Dieu. »
« Le Christ m’a aimé et s’est livré pour moi. »
En contrepoint de ces gens qui buteront sur la porte fermée, en disant :
« Nous avons mangé et bu devant toi. »,
il y a le malfaiteur crucifié avec Jésus :
non seulement il a été son compagnon de supplice, mais il a reconnu Jésus comme sauveur :
« Jésus, souviens-toi de moi quand tu viendras dans ton Royaume. »
Et Jésus de lui répondre : « En vérité, aujourd’hui, tu seras avec moi dans le paradis. »
Nul ne peut être sauvé par lui-même, mais ce qui est impossible aux hommes et possible à Dieu.
« le Fils de l’homme est venu chercher et sauver ce qui était perdu. »
Notre espérance, c’est que tous, à commencer par nous-mêmes, se laissent rejoindre par l’amour sauveur de Dieu manifesté en Jésus, et que « du levant au couchant, du nord et du midi, l’humanité viendra prendre place au festin dans le Royaume de Dieu. »
(2013-08-25)