Homélies
Liste des Homélies
Année B - 25e dimanche du Temps ordinaire -
Sag 2/1217-20, Jac 3/16-4/3, Mt 9/30-37.
Homélie du F.Cyprien
Quand l’Evangile est lu, nous écoutons debout, signe de respect pour la Parole de Dieu, foi en la parole du Christ pour nous aujourd’hui.
Il arrive que des personnes, après cette lecture, s’assoient très vite, comme si elles venaient d’apprendre une nouvelle bouleversante, comme quand on dit à quelqu’un : « Reste assis, je vais te dire quelque chose d’important ».
Et de fait nous entendons tous les dimanches des choses importantes, des paroles qui nous bousculent…qui devraient nous bouleverser, nous déranger.
Dimanche dernier Jésus interrogeait ses disciples (« Pour les gens, pour vous, qui suis-je ? »). Après la réponse de Pierre, il reprenait ce dernier vertement, Pierre ne pouvant comprendre le destin d’un Messie humilié, persécuté.
Aujourd’hui ce sont les disciples qui n’osent plus interroger Jésus, eux qui, en plus, après avoir discuté, s’être disputés pour savoir qui était le plus grand, n’osent pas répondre à Jésus : « De quoi discutiez-vous en chemin ? »
Le dialogue avec Jésus est-il difficile ? La rencontre avec lui pose-t-elle des problèmes ? Cette difficulté de compréhension entre Jésus et les disciples pourrait rassurer nombre d’entre nous pour leur relation avec Dieu…
Il se trouve que Jésus nous surprend souvent là on ne voudrait pas qu’il nous trouve, ou bien il nous fait un cadeau plutôt imprévu : avec ses paroles nous nous apercevons que nous sommes vraiment à côté de la plaque, …nous qui avions cru bien faire… !
Dans l’Écriture, la Parole de Dieu est comparée à une épée à deux tranchants, une lame qui coupe et pénètre, réalité à laquelle rien n’échappe…
Oui, rien n’échappe à la Parole de Dieu …et quand cette parole nous rejoint, sa signification nous échappe… !
« Les disciples ne comprenaient pas ces paroles et ils avaient peur de l’interroger ».
• Nous n’aurions pas fait mieux que les disciples en entendant l’annonce des souffrances, la passion, la mort de Jésus… « Passe derrière moi, Satan ! Tes pensées ne sont pas celles de Dieu mais celles des hommes. »
• Nous pourrions peut-être faire mieux en ne cherchant pas à savoir qui est le plus grand parmi nous, …persuadés que la dernière place, celle du serviteur est en vérité la place du disciple de Jésus, Jésus qui s’est fait lui-même le serviteur de tous.
Accueillir le plus petit, se faire le dernier, cela conduit à la rencontre avec le Christ, la rencontre avec Dieu notre Père, Dieu, en fait, notre plus proche prochain…
Quand le livre de la Sagesse évoque le juste persécuté et la jalousie des méchants qui ne comprennent pas, il parle de ces derniers comme des gens tordus…tordus par leur jalousie. Ils sont, dans leur pensée, jaloux et inquiets, malveillants et trompés : face à eux le juste, c’est l’homme doux et patient, dont les actes et les paroles témoignent pour lui.
Le mal s’introduit dans les cœurs par les pensées, les désirs, les jalousies. Ce qui parle en faveur du juste c’est sa conduite, ses paroles, ses actes…
Les paroles de Jésus sont à entendre… à méditer : …rester assis et les faire nôtres, …qu’elles pénètrent en nous.
Ce qu’a fait Jésus est au moins autant à méditer : il est allé à la rencontre d’une mort infâme ; il a compté sur Dieu son Père qui interviendrait pour lui. Cette mort de Jésus est unique, son don de soi est indépassable ; mais c’est ainsi que Jésus nous montre le chemin… « pour que nous marchions sur ses traces », comme dit saint Pierre dans son épitre.
Le dialogue avec le Christ se fait difficilement parce que nous sentons que nous ne pourrons jamais, avec nos propres forces, faire ce chemin.
« Quelqu’un interviendra pour lui, Dieu l’assistera, l’arrachera aux mains de ses adversaires »…
Pour nous aussi, il faudrait, il faut croire que quelqu’un interviendra, que Dieu nous assistera, …
• d’abord pour mieux comprendre les paroles de Jésus… paroles dures à entendre en vérité,
• …mais pour comprendre aussi que si nous donnons notre vie comme serviteurs, Lui a déjà commencé le chemin pour nous … il va le continuer avec nous. Nous complétons, nous compléterons dans nos vies ici-bas l’œuvre d’amour du Fils. Lui Jésus, il est le Fils bien-aimé, le Vivant, le Ressuscité, il est avec nous pour toujours.
Maintenant, unis dans l’Esprit, unis dans la foi et l’espérance nous chantons l’œuvre du Christ, à la louange de Dieu notre Père, Il s’est fait proche, lui notre plus proche prochain. (2015-09-20)
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ANNÉE B - 24e DIMANCHE DU TEMPS ORDINAIRE - 13 septembre 2015
> 1ère lecture : Is 50, 5-9a
> Psaume 114, 1-2, 3-4, 5-6, 8-9
> 2e lecture : Jc 2, 14-18
> Évangile : Mc 8, 27-35
Homélie par le F.Matthieu
"Tu es le Christ", dit Pierre. Belle réponse mais franc malentendu.
"Tu es le Messie" : Pierre désigne ainsi, le Roi-Messie attendu, successeur de David sur son trône à la fin des temps, victorieux de tous les ennemis… Mais Jésus prend ses distances, il refuse que l’on parle ainsi de lui… Il redoute trop la pente facile qui conduit là où il sait qu’il ne doit pas aller.
Christ / Messie. Le mot est une allusion à l’onction divine du sacre royal : on versait de l’huile sur la tête du futur roi. Quand la Bible parle du Messie à venir, elle invite à l’attente d’un personnage détenteur d’une royauté qui surclasse toutes les autres, d’une autorité absolue. Comme l’huile, Dieu lui-même l’imprègne tout entier. Sa tâche consistera à restaurer la justice, à établir la vérité dans un monde plein d’erreurs et de mensonges. Mais Jésus le sait déjà, le Messie, selon le vouloir de Dieu, son Père, n’imposera pas la justice et la vérité par la violence et la contrainte mais simplement en se comportant selon cette justice et cette vérité… et en en acceptant les conséquences. Ainsi, la liberté des hommes, cette liberté qui les fait ressembler à Dieu, sera respectée et même instaurée. Le règne du Messie s’effectue par attraction, par appel. Il faudra le suivre pour appartenir à son Royaume.
Et dès lors, Jésus, pour la première fois, annonce sa Passion, il instaure l’identification du "Messie" à la mystérieuse figure du "Serviteur souffrant" d’Isaïe. Il indique le seul chemin qui le conduira dans le Royaume du Père, le rejet par son peuple, la souffrance, la Croix, la mort, abandonné de tous…
Jésus annonce les souffrances de sa Passion, sans détail. L’oracle d’Isaïe, un des "chants du Serviteur souffrant" que nous avons entendu en première lecture, précise davantage : "J’ai présenté mon dos à ceux qui me frappaient, et mes joues à ceux qui m’arrachaient la barbe. Je n’ai pas protégé mon visage des outrages et des crachats." Outre ces épreuves physiques, les deux textes se rapprochent par l’évocation du rejet, plus détaillé cette fois dans l’Evangile, car il est sans doute le plus douloureux pour Jésus : "qu’il soit rejeté par les anciens, les chefs des prêtres et les scribes..." Dans la 1ère lecture, à la violence des hommes s’oppose le secours venu de Dieu : "Le Seigneur Dieu vient à mon secours...Voici le Seigneur Dieu qui vient prendre ma défense...". Il se sait innocent, et sera vainqueur en cas de procès. Cela peut fournir une clé de lecture pour la discrète mention : "...trois jours après, il ressuscitera.", sous-entendu : "Dieu le ressuscitera", le fera prendre possession de son Royaume.
Plus mystérieusement encore, les deux textes laissent entendre que ces épreuves font partie du plan de Dieu. C’est de Lui, en quelque sorte, que tout part, dans l’oracle d’Isaïe : " Le Seigneur m’a ouvert l’oreille..." Que veut-il bien dire ? "Le Seigneur m’a fait entendre... il m’a fait comprendre..." Quoi ? Des choses assez désagréables pour qu’on puisse être tenté de se "révolter", de se "dérober". Mais il ne l’a pas fait : et il lui arrive ce qui est raconté dans les versets suivants jusqu’à la reconnaissance finale.
C’est ce que Pierre précisément ne peut accepter. Et il devient donc pour Jésus un Adversaire, un "Satan", aux "pensées" trop humaines de triomphe et de victoire. Les "pensées" de Dieu, au contraire, sont l’identification du visage du Messie avec l’humble figure du Crucifié, Visage véritable de Dieu.
Il "fallait" : l’expression désigne dans les Evangiles la nécessité pour Jésus de se conformer au dessein de salut du Père. Nous sommes ici devant le Mystère, celui de la Rédemption ; nous pouvons seulement dire, grâce à ces deux passages entendus, que ce n’est pas Dieu qui veut la souffrance, mais que cette violence, ce péché, sont le fait des hommes, et qu’Il va les transformer, par son "passage", par son obéissance, en puissance de vie et de salut : "Il est proche, celui qui me justifie", qui me rend juste, qui me sauve.
Nous sommes au cœur du Mystère du salut apporté par Jésus !
MAIS y-sommes-nous en vérité ? Avons-nous compris, ouvert l’oreille de notre cœur ? L’exemple de Pierre doit nous rendre circonspect … ce n’est pas si simple à comprendre. Sommes-nous au moins désireux de nous y accorder ?
Comment le savoir ?
Les deux derniers versets de notre Evangile sont là pour nous le dire : suis-je seulement disposé à entendre l’appel du Christ à renoncer à moi-même, à prendre ma croix et perdre ma vie sur le chemin qu’il me propose ? Suis-je disposé à consentir à ce que Dieu voudra au cœur de ma vie quotidienne ?
Terrible programme ? Mais non…
Il s’agit de "sauver sa vie" ; en l’offrant, en la donnant, Jésus nous a montré, nous montre le seul chemin qui mène vers son Père et notre Père ! - 2015-09-13
Année B - 23° dimanche du Temps Ordinaire - 6-09-2015
Isaïe 35, 4-7a Jacques, 2, 1-5 Marc 7, 31-37
Homélie du F.Ghislain
Le prophète Isaïe, que nous avons entendu en première lecture, nous annonce une complète victoire de Dieu, une revanche contre tout le mal du monde, dont la cécité et la surdité pour les hommes, la sécheresse et l’aridité pour la terre, sont des signes permanents. Ce mal du monde, qui affecte notre « maison commune » comme dit le pape François, au point que nous craignons pour son avenir, Dieu pourtant en aura raison, la Parole de Dieu nous en assure.
Nous pourrions demander, comme la Vierge Marie à l’Annonciation : « Comment cela se fera-t-il ? » Une réponse nous est donnée dans l’évangile. Nous y voyons Jésus qui fait des kilomètres : de Tyr à la Décapole en passant par Sidon et le lac de Génésareth, il n’y en a pas loin de 200 par les routes incertaines et les sentiers de montagne. Et ce long périple le conduit non pas aux gens aux vêtements rutilants et aux bagues dorées dont parle la lecture de la lettre de saint Jacques,, mais à une seule personne, dont nous n’avons même pas le nom, un sourd-muet qu’on supplie Jésus de guérir.
Cette guérison, Jésus semble ne pas la faire facilement, ou plutôt, il prend le temps de la faire humainement : ses doigts pénètrent les oreilles du sourd, sa salive touche la langue, ses yeux vont vers le Ciel d’où descend tout don, sa poitrine soupire comme si l’effort était trop grand, une parole enfin achève tout ce travail : « ouvre-toi ». Jésus s’implique corps, âme et esprit dans cette guérison, puis, comme si tout ce qu’il avait fait de chemin et de geste n’était pas important, il impose silence au guéri. Celui-ci voulait entendre et parler, eh ! bien, qu’il le fasse sans attendre : qu’il écoute les autres, qu’il accueille leur parole, qu’il réponde en homme désormais libéré. La victoire de Jésus, la victoire de Dieu par Jésus, c’est l’homme restitué en humanité, capable donc désormais de travailler dans et pour la « maison commune ».
Pour avoir accès à Jésus, il faut donc nous ranger parmi les pauvres, les sourds qui ne savent pas entendre les appels, les muets qui ne savent pas dire les paroles justes ; il faut donc demander la grâce, la lucidité pour ce faire ce que nous ne savons pas. Laisser résonner en nous ces paroles un peu dures que nous trouvons dans l’Apocalypse de saint Jean : « Tu dis : ‘je suis riche, je me suis enrichi, je n’ai besoin de rien’, et tu ne sais pas que tu es misérable, pitoyable, pauvre, aveugle et nu » (3.17). Et nous tourner alors vers le Christ qui vient de loin pour nous sauver : prendre le temps de laisser ses doigts toucher nos oreilles, de laisser la guérison pénétrer peu à peu en nous, et alors agir, faire nous aussi les gestes que la vie attend de nous : écouter puisque nous avons des oreilles et répondre. Vous me direz peut-être : « mais où est-il, ce Christ qui vient me sauver ? ». Je vous répondrai : soyez attentifs, regardez les personnes qui vous entourent, laissez-vous atteindre et guérir par celles, - et il y en a partout, - qui pensent et vivent parce qu’elles ont compris que l’amour est plus fort. Mais écoutez aussi celles-là mêmes qui apparemment n’ont rien compris, mais qui, sans le savoir, ont sur les lèvres la parole qui nous sauvera si nous savons l’écouter.
Avoir accès à Jésus, c’est aussi nous mettre concrètement à la place du Christ tel qu’il apparaît dans cet évangile : ainsi ne pas reculer devant les kilomètres ne serait-ce que pour une personne ; ne pas vouloir « sauver le monde » mais nous investir, corps, âme et esprit dans ce qu’il nous est possible de faire pour le pauvre concret qui nous sollicite ici et maintenant, pas nécessairement avec des paroles, mais par sa situation même. Le Pape François nous le répète dans ses messages, et particulièrement l’encyclique Laudate sì. Il nous invite - je cite - à « avoir la passion d’aider les autres à vivre, avec plus de dignité et moins de souffrances » Est-ce que ce ne serait pas cette passion qui animait le Christ quand il sortait pour guérir ? N’est-ce pas cette passion que son Esprit nous met au cœur pour que, nous aussi, nous levions les eux vers le ciel, que nous soupirions, et que nous puissions dire à tout homme, sourd et muet : « ouvre-toi » ?
Frères et sœurs, le salut de la « maison commune » perturbée et violente où nous demeurons ne lui viendra pas autrement aujourd’hui qu’il ne lui est venu autrefois en Terre Sainte. C’est ainsi que, contemplant Jésus, il nous est proposé de le recevoir d’abord et de le transmettre ensuite. Ainsi soit-il ! (2015-09-06)
Année B HOMELIE du 22ème dimanche du temps ordinaire - 30/08/2015
(Deut. 4,1-8 ; Jacques 1,17-27 ; Marc 7,1…23)
Homélie du F.Guilaume
Frères et sœurs
Dans cette page d’évangile que nous venons d’entendre, il me semble que l’on peut distinguer 3 registres d’opposition soulignés par Jésus face à ses adversaires, pharisiens : le premier a trait au « pur et à l’impur », le second à « l’extérieur et à l’intérieur », le 3ème à « la Loi de Dieu et à la tradition des hommes ».
Les termes antithétiques de « pur et d’impur » sont sans doute assez peu parlants pour nous chrétiens aujourd’hui, alors qu’ils étaient fondamentaux pour les juifs au temps de Jésus, pour l’interprétation orthodoxe de la Loi de Moïse, pour discerner le juste comportement dans la vie ordinaire (ici il est question de préparations alimentaires et de rite de repas). Mais si ces termes de pur et d’impur sont moins utilisés, il n’en va pas de même pour ceux de « sacré et de profane » qui recouvrent plus ou moins les mêmes réalités. N’entendons nous pas dire autour de nous que tel lieu, tel temps, telle personne sont marqués par un caractère sacré et que c’est une profanation que de les voir détournés de leur propos religieux. Par exemple une église utilisée pour un concert rock ou un spectacle exotique, bien loin d’un service liturgique. Ou bien le travail du dimanche, l’ouverture des commerces, respectent-t-il le repos sacré dûs au Jour du Seigneur. Un prêtre ou une religieuse ne portant aucun signe distinctif peuvent-ils être considérés comme des personnes « con-sacrées » Certains reprochent même à notre pape François d’avoir dé-sacralisé la fonction pontificale ? On pourrait trouver d’autres exemples. Que répond Jésus à de telles critiques ? « Hypocrites êtes-vous, si vous ne faites de la religion qu’une affaire de pratiques extérieures, de rites, de gestes ou de paroles qui ne vous engagent pas en profondeur. Hypocrites êtes-vous si vous réduisez la vie de croyant à cela, car l’essentiel en vérité se joue dans l’intention avec laquelle vous pratiquez votre religion. Et Jésus alors déplace l’opposition du « pur et de l’impur » (ou celle du « sacré et du profane » que je propose) vers l’opposition entre l’extérieur et l’intérieur. Il invite ses adversaires à un examen de conscience, à un examen de ce qu’il y a dans leur cœur, des pensées qui se livrent dans cette partie la plus intime de leur être, selon la conception anthropologique de la Bible : « ce qui sort du cœur, voilà ce qui rend l’homme impur, c’est du dedans, du cœur de l’homme que sortent les pensées perverses »
On peut rapprocher ces paroles d’un autre passage du sermon sur la Montagne où Jésus disait à ses disciples : « là où est ton trésor, là aussi sera ton cœur »
Et comment procéder à cet examen de notre cœur, si nous ne prenons pas le temps de nous arrêter un peu dans nos vies, si remplies, si agitées, si superficielles bien souvent ? C’est là me semble-t-il que la prière joue son meilleur rôle, à condition de lui laisser la place qui lui revient dans notre vie de chrétien. La prière, bien plus que de longs débats ou discussions sur les questions d’actualité, fussent-elles religieuses. La prière, comme étant ce lieu et ce temps de la rencontre intime avec notre Dieu, dans un échange cœur à cœur avec lui, dans la confiance.
C’est dans la prière que se fera le partage entre nos pensées trop humaines et la Pensée de Dieu pour nous, pour son projet, sa volonté, comme nous le disons dans le « Notre Père ». C’’est aussi dans la prière que nous expérimentons combien nos vies sont le terrain d’un combat spirituel entre la chair et l’esprit. Saint Paul dans son épître aux Galates reprend la liste des péchés entendus dans notre évangile en les qualifiant de « fruits de la chair ». En regard, il dresse la liste de ceux de l’Esprit Saint : « amour, joie, paix, bonté, patience, foi, bienveillance, douceur, maîtrise de soi. Contre de telles choses, il n’y a pas de Loi ».
Celui qui vit dans l’Esprit est protégé de toute tentation de légalisme, de tout formalisme extérieur et de fausse tradition. Il répond pleinement au commandement de Dieu, et ne s’attache pas aveuglément à la tradition des hommes. Ce qui nous amène à la 3ème opposition soulignée par Jésus : « ce peuple m’honore en paroles, mais son cœur est loin de moi. Il est inutile le culte qu’il me rend. Vous laissez de côté le commandement de Dieu pour vous attacher à la tradition des hommes ».
Or quel est le commandement de Dieu ? Nous le savons depuis notre première leçon de catéchisme. «tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme et de tout ton esprit. C’est là le grand, le premier commandement. Et le second lui est semblable : tu aimeras ton prochain comme toi-même. De ces 2 commandements dépendent toute la Loi et les Prophètes » Est-ce à dire que l’amour d’une part et la tradition d’autre part doivent s’opposer durement et simplement. Est-ce qu’au nom de l’amour et de la miséricorde qui va avec, on puisse tout relativiser ou justifier en matière de doctrine ou de morale ? Certes non. Jésus invite ses disciples et nous-mêmes à un juste discernement des situations. Il nous est demandé d’établir la juste distance entre la Parole de Dieu et les traditions humaines qui sont bonnes aussi, à bien évaluer les priorités. Nous entendons dans l’Ecriture ces versets : « Le ciel et la terre passeront, ma Parole ne passera pas ». Traduisons cette affirmation en disant que les institutions, les règles, les formes (de liturgie entre autres) passeront, mais le mystère de Dieu, les sacrements, l’Eglise, le commandement de l’amour de Dieu et du prochain, tout cela ne passera pas.
Et je termine cette homélie en citant un simple verset de psaume qui au lieu de diviser ou d’opposer brutalement, cherche à unifier et à réconcilier. Il est tiré du Psaume 84. « l’amour et la vérité se rencontrent. La Justice et la Paix s’embrassent »
AMEN (2015-08-30)
Année - 21ème dimanche - 23 aout 2015
Jos 24,1-2a.15-17.18b; Ép 5,21-32; Jn 6,60-69
Homélie de F.Vincent
Au cours des quatre derniers dimanches, nous avons lu le long discours sur le pain de vie, qui se trouve dans le chapitre 6 de l'Évangile de Jean. Jésus s’y déclare lui-même le pain vivant donné au monde par son Père, et il appelle à une foi totale en sa personne et en son message. L'épilogue de ce discours, que nous lisons aujourd’hui, fut un tournant d'une grande importance dans le ministère de Jésus et surtout dans sa relation avec la foule des disciples qui le suivaient et en particulier les douze Apôtres.
Il fait partie de la psychologie de tout peuple, surtout s'il est opprimé ou occupé par un autre pouvoir, d'attendre un libérateur. Les Juifs attendaient un messie qui les délivrerait de l'oppression des Romains. Dès que Jésus se met à enseigner, et surtout dès qu'il fait quelques miracles, les foules nombreuses se mettent à sa suite. Il aurait facilement assez de fidèles pour organiser une sédition. D'ailleurs, lorsqu'il nourrit la foule en multipliant les pains, on veut déjà le couronner roi. Le moment est venu pour Jésus de les obliger à choisir entre leurs rêves et qui Il est vraiment.
De fait, lorsque Jésus, par cette phrase mystérieuse : "c'est l'esprit qui vivifie, la chair ne sert de rien", leur indique clairement qu'il n'est pas venu rétablir un royaume matériel et politique, les foules l'abandonnent en masse. Alors Jésus se tourne vers les "Douze", (appellation qui apparaît ici pour la première fois dans l'Évangile de Jean) et leur dit : "Voulez-vous partir, vous aussi?"
Cette question montre à quel point l'obéissance à la mission reçue de son Père est importante pour Jésus. Aucune compromission n'est possible sur ce point. Il est prêt à voir partir non seulement la foule des disciples qui le suivent, mais même les Douze, qu'il a lui-même choisis. D'ailleurs il est conscient que tous ne lui seront pas fidèles jusqu'au bout. Lorsque Pierre s'empressera de répondre au nom des Douze, Jésus répondra avec tristesse: "Ne vous ai-je pas choisi (tous) les Douze?... et pourtant l'un de vous me trahira."
Déjà dans l'Ancien Testament le Peuple de Dieu avait fait face à diverses reprises à des situations où il avait dû prendre position: Ou bien croire au Seigneur et en accepter toutes les conséquences, ou bien faire comme les païens. Nous en avions un exemple dans la première lecture d'aujourd'hui, où Josué oblige les douze tribus d'Israël à prendre position pour ou contre le Seigneur. C'est d'ailleurs dans cet acte de foi collectif que ces tribus si diverses, avec chacune, pourrait-on dire, ses traditions et ses croyances, fut constitué en un véritable peuple.
Ainsi en est-il de nous. Nous rencontrons tous des circonstances dans nos vies – dans nos vies personnelles aussi bien que communautaires – où nous sommes obligés de prendre position. Il s'agit en général de circonstances où, pour être fidèles à la foi que nous professons, nous devons poser certains actes, ou refuser de les poser. Dans de telles circonstances, non seulement notre identité chrétienne se manifeste, mais cette identité nous est même alors donnée ou confortée.
En chacune de ces circonstances Dieu nous met devant notre liberté humaine et nous dit : "veux-tu me quitter toi aussi?". Demandons-lui d'avoir toujours le courage de dire avec Pierre et comme lui, quel que soit le prix que nous ayons à payer : "Seigneur, à qui irions-nous, tu as les paroles de la vie éternelle " ? - 2015-08-23
(sources diverses)
Année B - ASSOMPTION 2015
Ap 11,19a, 12, 1-6a.10ab; 1 Co 15,20-26; Le 1,39-56
Homélie du Père Abbé Luc
Frères et sœurs,
Quel contraste entre les textes que nous venons d'entendre! Les deux premiers textes nous présentent deux visions grandioses: celle d'une femme sur le point d'enfanter et menacée par un dragon, puis la vision du Christ ressuscité et celle de notre propre résurrection lorsque le Christ viendra après avoir mis tous ses ennemis sous ses pieds. En contraste, le troisième texte, l'évangile nous relate la scène familière de la rencontre entre deux cousines, heureuses de se retrouver et de se reconnaître dans l'Esprit Saint. Quel rapport entre ces deux visions grandioses de la destinée humaine renouvelée dans le Christ et cette rencontre familiale? Ces textes nous suggèrent qu'en Marie, le très grand se mêle au très simple, et le triomphal au très humble.
Le très grand, c'est le fait que Dieu a choisi de naitre de cette femme. Dès lors, sans que celle-ci s'en rende compte, elle se trouve au centre d'une lutte grandiose: la lutte entre le bien et le mal, la lutte entre le Dieu vivant et les forces du mal. Elle est la femme en train d'enfanter dont le dragon veut dévorer le fils. Ce Fils, le Christ ressuscité, sera finalement vainqueur du mal et de la mort, en mettant ses ennemis sous ses pieds. Et Marie sera la première bénéficiaire de cette victoire, en son Assomption.
Le très humble et le très simple éclate dans la petitesse de Marie qui demeure ce qu'elle est, tout en devenant la Mère de Dieu. Elle reste une simple femme qui honore ses liens familiaux. Qu'elle offre à Dieu, c'est sa petitesse, sa totale disponibilité. Et Dieu a besoin de cette petitesse pour sauver l'histoire humaine. Marie reconnaît cet inouï: « Le Puissant fit pour moi des merveilles ... Il s'est penché sur son humble servante ... » Marie sera la servante toute entière docile et donnée à la volonté de Dieu sur elle.
Oui en Marie, le très grand se mêle au très humble. Et Marie aujourd'hui est grande, toute baignée dans la lumière divine parce qu'elle a été très humble.
Que retenir pour nous aujourd'hui de ces textes? Par notre baptême, ne faisons-nous pas, nous aussi, l'expérience que le très grand se mêle au très humble? Nous croyons en effet que nous sommes unis au Christ qui nous donne part à son Esprit? La vie divine irrigue déjà nos existences humaines limitées et fragiles. De même à notre mesure, ne percevons-nous pas aussi que nos vies chrétiennes nous placent de facon singulière au cœur d'un combat qui nous dépasse, la lutte entre le bien et le mal, entre la vie et la mort? Nous portons aujourd'hui davantage dans notre prière les chrétiens d'Orient. Ceux-ci sont affrontés à une très grande épreuve. Leur fidélité au Christ leur vaut d'être chassés de leur pays, voire d'être maltraités ou tués. Ils connaissent l'exil et voient leurs maisons détruites. Ils sont au cœur du mystère dont nous parlent aujourd'hui les textes. Ils sont là au creuset de l'épreuve ayant pour seule force l'espérance de la victoire du Christ sur le mal et la solidarité de leur frère dans la foi, c'est-à- dire de nous tous. Ces frères persécutés nous aident à prendre au sérieux les paroles du Christ qui n'avait pas caché à ses disciples que la persécution faisait partie du chemin à sa suite. Dans nos pays occidentaux, nous ne connaissons pas aujourd'hui cette franche hostilité déclarée à l'évangile du Christ. Le mal ne montre pas un visage ouvertement découvert. Mais nous avons à l'affronter sous des formes plus ou moins sournoises qui mettent aussi à l'épreuve notre fidélité au Christ: tout ce qui nous entrai ne à la lâcheté, aux demi-mesures, au mensonge, aux infidélités, à la paresse, à l'oubli de Dieu et des autres, à la dureté, au mépris, à l'égoïsme ... La situation de nos frères persécutés peut réveiller notre désir de suivre le Christ, de nous donner vraiment à Lui, et de nous donner comme Lui à sa manière, dans nos choix et dans nos engagements.
La fête de ce jour nous invite à l'espérance, celle de «parvenir avec Marie à la gloire de la résurrection », comme nous le prierons. Dans cette lutte présente contre toutes les formes du mal, déclarées ou plus sournoises, Marie reste un phare. Sa vie effacée, humble et cachée se révèle aujourd'hui dans toute sa fécondité. Elle resplendit en son corps de la gloire qu'elle a portée cachée, avec constance et ferme empressement. Sans un mot, Marie nous montre par sa vie le chemin, et surtout la manière de marcher à la suite du Christ. Une manière toute de vérité et d'humilité. Sans faux semblant, ni fard, en grande fidélité à la parole reçue et donnée.
Frères et sœurs, en rendant grâce ce matin au Seigneur qui a préservé Marie de la dégradation du tombeau, nous accueillons déjà dans cette eucharistie, les prémices de la vie éternelle. Que cette vie divine offerte dans la parole, dans le corps et le sang du Christ soit pour nous et pour nos frères chrétiens d'orient persécutés notre force et notre joie. (2015-08-15)
Année B - 18e dimanche TO - 2 Aout 2015
*Ex 16, 2-4.12-15 ; Ep 4, 17.2-24 ; Jn 6, 24-35
Homélie du F.HUbert
« Donne-moi à boire » demandait Jésus à la Samaritaine, venue elle-même
puiser de l’eau.
A partir de leur soif à tous deux, Jésus a fait cheminer cette femme
vers la perception de son mystère et du don qu’il vient révéler et offrir :
« Si tu savais le don de Dieu » - « Je suis le Messie, moi qui te parle ».
La femme n’a pas puisé d’eau. - Ni Jésus ni elle n’ont bu.
Mais laissant là sa cruche, elle est partie à la rencontre ses
compatriotes :
« Ne serait-il pas le Christ ? »
Et les Samaritains ont proclamé : « Nous-mêmes, nous l’avons entendu, et
nous savons que c’est vraiment lui *le Sauveur du monde*. »
L’eau du puits n’a pas été tirée,
mais la *source de vie éternelle* a été offerte et reconnue, accueillie.
Maintenant, deux chapitres plus loin, Jean nous montre
Jésus prenant l’initiative de donner à manger à une foule nombreuse :
5000 hommes rassasiés ! Ils ont mangé ! Largement ! « autant qu’ils en
voulaient. »
Tous ont mangé à leur faim, mais, ont-ils trouvé *la nourriture de vie
éternelle* ?
*la nourriture de vie éternelle a-t-elle été reconnue, accueillie ?*
Au puits de Jacob, Jésus avait soif dans sa chair fatiguée,
mais il avait soif, bien plus encore, de révéler la source d’eau vive
qui coule en lui,
qui coule du cœur de Dieu.
Ici, sur la montagne, face à la foule, Jésus n’a pas d’autre souci :
*révéler le don de Dieu, et Dieu lui-même, et celui qu’il a envoyé.*
L’eau du puits, le pain périssable, sont nécessaires,
mais Jésus est venu pour plus que cela.
Affamés dans le désert, les fils d’Israël regrettaient le pays d’Egypte,
où ils étaient assis près des marmites de viande et mangeaient du pain à
satiété.
Manger.
Sur la montagne, la foule est prête à accaparer Jésus, à en faire son roi,
trop heureuse d’avoir pour elle un tel thaumaturge…
Manger. A bon compte.
Alors Jésus essaye de les mener ailleurs :
« Vous me cherchez, parce que vous avez été rassasiés.
et non parce que vous avez vu des signes,
Travaillez non pas pour la nourriture qui se perd,
mais pour *la nourriture qui demeure jusque dans la vie éternelle,*
celle que vous donnera *le Fils de l’homme*, lui que Dieu, *le Père*, a
marqué de *son sceau*. »
Le Père, le Fils de l’homme, le sceau de l’alliance, de la communion :
l’Esprit d’amour et de vie.
La vie de Dieu communiquée aux hommes.
Comme avec la Samaritaine, il va essayer de révéler un ailleurs,
un autre pain, un mystère de relations vivantes.
Un ailleurs par rapport aux pains et aux poissons, multipliés la veille,
un ailleurs aussi, une nouveauté,
par rapport à Moïse et au don de Dieu dans la manne et dans la Loi :
« Ce n’est pas Moïse qui vous a donné le pain venu du ciel ;
c’est _mon Père_ qui vous donne le vrai pain venu du ciel.
Car le pain de Dieu, c’est celui qui descend du ciel et qui donne la vie
au monde.
*Moi, je suis le pain de la vie. »*
Accueillir le vrai pain qui donne la vie,
Croire en celui que le Père a envoyé : le Fils de l’homme.
Passer du don au donateur,
passer des pains périssables au pain véritable,
et de ce vrai pain à celui qui le donne : le Fils de l’homme.
Croire en sa personne d’Envoyé,
et finalement, dans le Père, qui est le donateur ultime.
L’œuvre de Dieu, celle qu’il faut réaliser pour lui plaire,
comme celle que Dieu accomplit dans le croyant, est de croire en l’Envoyé.
C’est cet Envoyé qui est là et qui leur parle. Comme à la Samaritaine.
Entre le « tu » de « Quel signe vas-tu accomplir ? »
et le « il » qui a procuré aux pères le pain venu du ciel,
il y a toute la question de l’écart entre Jésus qui est là et qui parle
et ce qu’il prétend être.
« Es-tu plus grand que notre père Jacob ? », demandait la Samaritaine ;
Jésus est-il plus grand que Moïse par lequel a été donnée la manne ?
par lequel a été donnée la Loi ?
Car, dans la tradition juive, la manne venue du ciel
désignait par métaphore la Loi donnée par Dieu pour la vie du peuple.
Et le peuple se nourrissait de la Loi.
Qui est Jésus ?
« Quelle œuvre vas-tu faire ? » lui demandent les Galiléens.
Ce qu’il va faire, c’est donner sa chair pour que le monde ait la vie.
Devenir pain pour que tous vivent de lui.
Ce don, qui est le don de Dieu, est tellement surprenant, que beaucoup
vont faire demi-tour, s’en aller.
Quelques-uns seulement vont demeurer à la suite de Jésus, à son écoute,
à l’exemple de Pierre : « Seigneur, à qui donc irions-nous ? Tu as les
paroles de la vie éternelle ! »
« Seigneur, donne-nous toujours de ce pain-là. » :
Oui, mais encore faut-il croire en ce don et en celui qui se donne,
au-delà de toute sagesse.
Nous qui écoutons la parole de Jésus proclamée aujourd’hui,
qui allons recevoir le pain de sa chair et le vin de son sang,
demandons la grâce d’approfondir notre foi en lui, le Fils de l’homme,
l’Envoyé du Père,
pour recevoir la vie, la vie éternelle, celle de Dieu même.
Et aussi devenir pain de vie pour nos frères.(2 aout 2015)
Année B - DEDICACE DE NOTRE EGLISE - 25 juillet 2015
1R 8, 23-22, 27-30 ; 1P 2, 4-9 ; Mt 16, 13-19
Homélie du Père Abbé Luc
« Vous serez le sacerdoce saint, présentant des offrandes spirituelles ». Frères et sœurs, dans la première alliance, le sacerdoce était réservé à la lignée d’Aaron et l’ensemble du service du temple à la tribu de Lévi. Ces fonctions se transmettaient de génération en génération. On était prêtre de père en fils, voué au service du temple pour y offrir des sacrifices d’animaux ou des offrandes végétales à Dieu, au nom de tout le peuple. Quand les premières communautés chrétiennes relisent la mort et la résurrection de Jésus, elles reconnaissent en lui le Grand Prêtre par excellence. Alors qu’il n’appartenait pas à une famille sacerdotale, Jésus accomplit toute la réalité sacerdotale de l’AT et lui donne une nouvelle expression. Il est prêtre en étant lui-même, et la victime offerte et celui qui offre et l’autel lieu de l’offrande. Quand Pierre dit à la communauté chrétienne : « vous serez le sacerdoce saint, présentant des offrandes spirituelles que Dieu pourra accepter à cause de Jésus », il élargit à tous les fidèles ce que Jésus a vécu. A cause de Jésus, comme lui, et en lui, chaque chrétien est consacré « prêtre » pour le service de Dieu. En vertu de son baptême il est invité à présenter à Dieu des offrandes spirituelles. C’est ce que le Concile Vatican II a remis en valeur en parlant du « sacerdoce commun des fidèles ». Et parmi les baptisés, ceux, qui sont ordonnés prêtres pour la célébration des sacrements, sont au service du sacerdoce commun des fidèles pour les aider à faire de toute leur vie une offrande spirituelle.
Et que veut-dire faire de sa vie une offrande spirituelle ou un sacrifice spirituel ? La question mérite qu’on s’y arrête. En effet, il y a le risque de penser que parce que c’est spirituel ce n’est pas vraiment réel, ou que ce n’est pas vraiment concret. Pour le comprendre, et pour mieux l’apprendre jour après jour, il nous faut regarder Jésus, le Grand Prêtre. Avec Lui, nous apprenons à vivre tourné vers le Père et tourné vers les autres, et non pas vers nous-mêmes. Tourné vers le Père dans la prière pour le louer et le remercier…On parlera de sacrifice de louange en signe de reconnaissance pour tout ce que nous recevons de lui. Tourné vers le Père au long du jour, pour prendre appui sur Lui. Devant une difficulté, allons-nous râler, nous rebeller, ou bien allons-nous redire à Dieu notre confiance et notre espérance en Lui…Ce sera alors vraiment un sacrifice spirituel que de nous abandonner à Lui avec foi… Avec le Christ Grand Prêtre, nous nous tournons aussi vers les autres. Quand une demande nous est faite, un service, ou simplement le désir d’être écouté, allons-nous continuer notre chemin, nos activités comme si de rien n’était, ou bien allons-nous ouvrir un espace à l’autre ? Cela voudra dire changer ce qu’on avait prévu, donner de son temps précieux…Si ce temps, nous le donnons à notre frère, nous présentons ainsi à Dieu un sacrifice spirituel celui de notre amour et de notre temps. Tourné vers les autres, nous le sommes encore lorsque réunis en assemblée de prière, nous apprenons à faire Eglise. Ensemble, dans l’écoute et l’attention fraternelle mutuelle nous apprenons à faire place à l’autre dans sa singularité et dans sa différence de sensibilité. Nous nous accueillons et nous tissons alors des liens de communion. Cela aussi est un sacrifice spirituel qui plait à Dieu et qui est l’œuvre de sa grâce comme nous le dirons dans quelques instants : « Tu ne cesses de rassembler ton peuple, afin qu’il te présente partout dans le monde une offrande pure ». Et un jour viendra pour chacun de nous, où le sacrifice spirituel par excellence sera celui du consentement à notre mort, consentement et lâcher prise dans la confiance en Celui qui veut nous partager sa Vie éternelle… « En tes mains, je remets mon esprit ». Ultime offrande en germe déjà dans toutes les offrandes de nous-mêmes...Ultime offrande qu’il nous faut demander comme une grâce…
En ce jour, où nous fêtons la dédicace de cette église, nous rendons grâce au Seigneur de nous donner de pouvoir célébrer en ce lieu l’unique sacrifice spirituel qui lui plait, le mémorial de la mort et de la résurrection de Jésus son Fils. En ce sacrifice du Christ se trouve la source de tous nos sacrifices, de toutes les offrandes de nous-mêmes, comme nous le demanderons : « nous te prions de nous transformer nous-mêmes en offrande qui te soient agréables »…(2015-07-25)
Année B - 16e dimanche du temps ordinaire - 19 juillet 2015
Jér 23 1-6; Eph 2 13-18; Mc 6 30-34
Homélie du F.Denis
Nous le savons, cette première partie de la messe est consacrée à
l'annonce de la Bonne Nouvelle: nous y entendons ce que nous avons
déjà entendu, afin de mieux le pénétrer. Nous savons aussi que le
choix des trois lectures se fait selon un principe simple: la 1 ère ,
habituellement tirée de l'A.T. et la 3e tirée de l'Evangile se
correspondent, afin qu'il soit clair que l'évangile, c'est non pas une
idée mais une personne, celle de Jésus, conçu de l'Esprit saint, né de
la Vierge Marie, qui a souffert sous Ponce Pilate, est mort, est
ressuscité est monté au ciel d'où il reviendra pour juger les vivants et
les morts. Telle est la foi de l'Eglise du Christ.
En ce dimanche, les lectures nous montrent plus spécialement
Jésus pasteur.
Marcher ensemble. Et nous connaissons cette marche, si fébrile, dans
les villes, calme en vacances, mais toujours orientée. Où voulons-
nous aller? Qui nous guide et pouvons-nous nous confier à lui ?
Jérémie, première lecture, le constate avec horreur, il y a des pasteurs,
des guides détestables, voici le troupeau égaré, sans unité, sans beauté.
Jésus, au contraire, troisième lecture, est le pasteur excellent : Pasteur
d'un troupeau. Un pasteur qui marche avec son troupeau, le guide, le
maintient uni. Il marche, fait marcher et au temps de Jésus, la marche
était la plus habituelle manière de se déplacer, avec les chariots pour
les riches ou les infirmes, et le bateau pour aller d'une rive à l'autre.
Jésus est donc le pasteur compétent, sachant le but et le meilleur
chemin qu'il faut prendre. il est vraiment là, il est présent, il
rassemble, et même si la route est longue, monotone, voire indécise
(marche de nuit !) ? on est sûr de parvenir.
Le chrétien, un être humain qui apprend à marcher, qui sait
accepter de perdre l'équilibre pour le retrouver immédiatement en
progressant. Il marche avec les autres et tous sont heureux du guide
qu'ils ont choisi, le Christ qui s'est dit lui-même le vrai chemin plein
de vie. Ceci est vrai à la lettre tant que Jésus et ceux qui l'entendaient
était physiquement ensemble sur les routes de Galilée. Mais depuis?
mais avant lui? Comment cette présence de Jésus comme guide
parfait est-elle possible?
Avant lui, il le fallait et nous voyons et Jérémie, première
lecture, y fait allusion, il y a eu une longue préparation. Avant Jésus,
il y a eu Abraham, le grand marcheur par vocation, puis il a eu David,
modeste berger devenu, malgré ses péchés d'homme mais il a
demandé pardon, oui devenu le saint roi David. Il a eu un autre berger,
d'une sagesse fabuleuse, Salomon, mais sans devenir un bon berger
car il a perdu la tête en cédant à ses passions. Après David, voici
venir, annoncé par les prophètes, par Jean baptiste, le vrai et unique
berger qui, pour répandre cette heureuse nouvelle, s'entoure des
disciples éternels marcheurs, et de nombreux, les baptisés de tout
pays, race et temps, vous et chacun de nous ici présents.
Nous sommes en marche et suivons le Christ. Mais qui donc est-
il ? et que veut-il de nous? Voici la réponse de la troisième lecture,
celle du Paul : Dieu, en son Christ et en nous, fait de nous tous un
homme nouveau, disons une humanité nouvelle.
Une humanité sans haine. Et Paul précise que ce rêve est devenu
une réalité en un moment précis, le moment où Jésus cloué sur la croix
est mort d'ans l'amour parfait pour Dieu son Père et pour nous tous, si
différents, si opposés. Mais pour lui, le Christ, nous étions des frères
également aimés, des frères qui en lui ont le même Père que Lui, Jésus
Dessein éternel de Dieu, programme de vie pour chacun de nous
aujourd'hui: homme, tu es mon frère.
Inutile, car tout le monde le sait, le pape François cherche à
élargir notre regard, c'est toute créature qu'il faut respecter, c'est-à-
dire regarder avec cette petite distance qui exige et marque toujours
l'amour le plus intime : L'amour chrétien est un amour partagé: je
t'aime, mais je ne te prends pas, je ne te détruis pas, je t'accueille, je
t'offre. (2015-07-19)
Année B - 15e Dim Temps Ord.
Am 7/12-15, Eph 1/3-14, Mc 6/7-13.
Homélie du F.Cyprien
Je reviens sur l’Evangile de dimanche dernier : Jésus à Nazareth, Jésus en butte à l’incompréhension de ses compatriotes. Jésus trop connu par eux ?... Jésus qui s’étonne de leur manque de foi…
La mission du Fils de Dieu n’est peut-être pas si aisée…son message ne sera pas reçu partout comme la bonne Nouvelle qu’elle devrait être.
Je note que l’épisode d’aujourd’hui intervient juste avant le récit du martyre de Jean-Baptiste : ce n’est pas un hasard…. Jean-Baptiste, c’est le prophète qui a dénoncé les fautes des riches et des puissants, qui est mort par eux. Par sa vie et sa mort il annonçait la venue de l’Envoyé par excellence…
On lit bien dans le livre des Proverbes : « Lorsqu’il n’y a plus de prophète, un peuple vit dans le désordre». Nous avons besoin d’être enseignés et Celui de qui tout dépend envoie des prophètes.
A Béthel, le sanctuaire du roi d’Israël, les notables disent à Amos : « Va-t-en d’ici avec tes visions, arrête de prophétiser! » et Amos se justifie : « J’étais un simple berger, mais le Seigneur m’a saisi, il m’a envoyé… il m’a dit : « Va, tu seras prophète pour mon peuple Israël »
Un étranger à Béthel…! « Arrête de prophétiser, arrête de parler au nom de Dieu ».
Comme si on pouvait arrêter Dieu qui vient toujours bousculer nos certitudes, nos évidences, nos préjugés bien ancrés.
Il nous faut un sens aigüe de la vie dans l’Esprit pour entendre ce que veut nous dire le Seigneur, lui le Maitre, lui qui veut notre bonheur plus que nous le voulons nous-mêmes…
Alors Jésus… qui s’est heurté à l’incompréhension dans sa propre patrie… « Jésus appelle les Douze et pour la 1e fois il les envoie deux par deux » …pour une mission qui va précéder la sienne : il les envoie dans les autres villages que Nazareth.
Ceci est étonnant et rassurant : Jésus envoie ses disciples deux par deux : ils seront plus forts devant l’incompréhension, les refus, les résistances… Leur dénuement et leur désintéressement vont parler pour la bonne cause, c’est presque acquis d’avance…
Oui, mais l’Evangile, encore une fois, est une nouvelle qui bouscule et demande, un changement, un engagement, une conversion.
D’ailleurs Jésus a dit aussi : « Je vous envoie comme des brebis au milieu des loups…Méfiez-vous des hommes »…
Alors, …ce sont les Pères de l’Eglise qui l’ont souligné les premiers…, ces groupes qui vont deux par deux manifestent que c’est la Charité divine qui est annoncée : cet Amour vient au devant des auditeurs, il est signifié par la fraternité vécue, deux par deux. Le signe donné par les deux disciples ensemble est essentiel : « Quand deux ou trois sont rassemblés en mon nom je suis au milieu d’eux »… » Et la conséquence est toute simple ; dans les contradictions, les persécutions : « Ne vous tourmentez pas de ce que vous aurez à dire…C’est l’Esprit de votre Père qui parlera en vous ». Vous annoncerez ce que vous vivez…
Bien sûr, tout disciple fervent, actif, qui prêche la bonne nouvelle n’est jamais seul ; il est habité par l’Esprit du Christ. Mais la prédication chrétienne est en elle-même une réalisation du Royaume qui vient, elle dit la présence de Celui par qui nous vient la merveille du don gratuit… « Je vous envoie deux par deux »…« Quand deux ou trois sont réunis en mon nom… »
On entend parfois des gens désemparés devant les mésententes, les divisions, devant même des ministres, des prêtres qui ne s’entendent pas entre eux. Quel dommage ! Seule la charité vécue apporte l’Evangile en vérité ; seule elle peut toucher et séduire les cœurs. L’onction d’huile aux malades dit bien que Jésus vient guérir nos maladies, il vient guérir nos maladies par la douceur de la Charité : an fond de nous, nous sommes tous des malades en attente d’un remède…Et ce remède c’est Lui, le Dieu de tendresse et de pitié, le Père de Jésus, notre Père.
Est-ce que nous n’avons pas à réentendre sans cesse l’Ecriture, les paroles de Jésus… pour que peu à peu notre pratique s’y conforme ?
Ce matin, f. et s. , nous venons d’ouvrir nos oreilles à la Parole, ouvrons aussi nos cœurs à ce que nous dit Jésus, ouvrons-les à ce qu’il vient nous donner aujourd’hui : son amour, sa propre vie.(2015-07-12)
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