vendredi 7 novembre 2025 : journée de solitude pour la communauté
(eucharistie vers 6h45, juste après Laudes). 

Homélies

Liste des Homélies

Homélie du 20 mars 2016 — Dimanche des Rameaux — Père Abbé Luc
Cycle : Année C
Info :

Année C - Dimanche des RAMEAUX - 20.03.2016

Is 50, 4-7 ; Ph 2, 6-11 ; Lc 22,14 – 23,56

Homélie du Père Abbé Luc

Texte :

Frères et sœurs,

Comment se fait-il que dans les évangiles, les récits de la Passion de Jésus tiennent une telle place ? Les trois derniers jours sont racontés avec bien plus de détails que les trois ans de son ministère de prédicateur. Et la liturgie de l’Eglise se fait l’écho de cette insistance en nous proposant d’entendre dans une même semaine, deux récits de la Passion, ce dimanche des Rameaux et le Vendredi Saint. Oui, les trois derniers jours de l’existence de Jésus ont une place unique au regard du reste de sa vie. Sa passion librement consentie donne tout son poids et tout son sens à sa vie. Elle nous révèle que le prophète qu’il était ne s’appuyait pas sur ses propres forces, mais sur Dieu. Elle met en lumière ce lien unique que Jésus avait avec Dieu qu’il appelle son Père, dans une familiarité qui n’a pas d’égal. L’évangéliste Luc souligne cela avec force dans les trois invocations que Jésus lance à Dieu : « Père, si tu le veux, éloigne de moi cette coupe ; cependant, que soit faite non pas ma volonté, mais la tienne ». Jésus n’a voulu qu’accomplir la volonté de Dieu son Père, volonté mystérieuse dont la portée apparaitra le matin de Pâques. Seconde invocation : « Père, pardonne-leur : ils ne savent pas ce qu’ils font ». Loin de maudire les hommes qui le font souffrir, Jésus se fait l’intercesseur auprès de Dieu son Père pour qu’il les pardonne. Sa passion devient source de pardon de notre péché. Elle nous libère de l’emprise du mal. 3° invocation : « Père, en tes mains, je remets mon esprit ». Jésus va jusqu’au bout de son don : il s’abandonne totalement à Dieu dans la confiance. Celui-ci le relèvera par la résurrection. Il lui donnera le Nom qui est au-dessus de tout nom.

Frères et sœurs, si l’Eglise nous invite à nous arrêter sur la passion de Jésus, ce n’est pas par goût morbide de la souffrance et de la mort. Elle nous invite à entendre au cœur de la souffrance de Jésus, la force et la flamme de son amour pour Dieu son Père et pour nous les hommes. Dans cet amour, se trouve la source de notre propre vie : Jésus nous libère à jamais de l’emprise du mal. Avec Lui, Jésus nous entraine à traverser nos souffrances et notre mort, dans une même confiance, dans un même abandon au Père. Durant cette semaine sainte, laissons-nous conduire par Jésus, avec lui et en lui, de la mort à la Vie. (2016-03-20)

Homélie du 13 mars 2016 — 5e dim. du Carême — Frère Antoine
Cycle : Année C
Info :

Année C - 5° Dimanche de Carême- 13 Mars 2016

Isaïe 43, 16-21. .. Philippiens 3,8 -14 ... Jean 8,1-11

Homélie du Frère Antoine

Texte :

Frères et Sœurs, cet Evangile commence par une scène empreinte de

paix où Jésus enseigne au temple, mais la paix ne va pas durer! un groupe surgit et présente à Jésus une femme accusée d'adultère et là, tout bascule!

De la paix nous passons à la violence où paroles et silence vont s'affronter.

Paroles coléreuses, Paroles trompeuses, car dit le texte, leur but est de piéger Jésus.

Paroles accusatrices et redoutables leur projet est d'accuser Jésus de ne pas respecter la Loi Mosaïque et leur objet est la mort, .... la mort d'une femme qui selon la loi mérite un tel sort.

Paroles mensongères, desséchée par la sécheresse des lois, et qui dans ce microcosme révèlent toute une face du monde, le monde de toujours .. le monde d'aujourd'hui .. !

En réponse à cette violence se dresse alors un mur .. un mur de silence .. un silence immense ... le silence de Dieu .. le silence de l'amour ..... silence accompagné d'un signe énigmatique, totalement silencieux lui aussi: Même aujourd'hui, nous ne savons pas ce que Jésus a écrit sur le sol, mais ce geste alourdit le silence de Jésus, il est comme un refus de ce Mal dont le masque a pris le visage d'une apparente justice.

«Que celui d'entre vous qui est sans péché, soit le premier à lui jeter une pierre»

Brusquement le silence change alors de camp ... et change de sens ...

«Ils s'en allèrent un par un, en commençant par les plus âgés » ....

Un par un ... ces hommes qui partent lentement, sans un mot, évoquent un défilé, ce long défilé de notre humanité qui, générations après générations, est vaincue par cet ennemi sournois, le péché ... le péché, cette infidélité à l'amour!

« Va, et désormais ne pèche plus! »

Ces paroles achèvent cette rencontre extraordinaire entre Jésus et la femme :

Dès son arrivée, elle est accusée, laissée debout, au centre, tandis que Jésus ... assis, regarde le sol,. Les accusations reprenant, Jésus prend la parole et se baisse à nouveau sans adresser-un- seul- regard à ceux qui lentement partent l'un après l'autre ... Jésus les ignore totalement. ..

Et c'est alors qu'il lève la tête et pour la première fois, la regarde ... il ne la jamais regardée en position de faiblesse .. de condamnée plantée, muette, au milieu de ses juges. C'est une fois la menace disparue qu'il la regarde .... Il la regarde du bas vers le haut et, dans une attitude de serviteur, il lève les yeux, s'adresse à elle ... elle ... debout .. .immobile, toute pénétrée de la miséricorde totale du Fils de Dieu ... ,. tout accueil du pardon reçu et de la Vie retrouvée.

Aujourd'hui, le Seigneur vient nous dire à chacun:

Va, .. tout pardon accueilli engage à suivre l'Unique Loi, la Loi d'amour.

Va ... tout pardon accueilli est un envoi, un envoi à aimer un peu moins mal.

Homélie du 28 février 2016 — 3e dim. du Carême — Frère Jean-Noël
Cycle : Année C
Info :

Année C – 3° dimanche de Carême – 28 Février 2016 –

Ex 5 1-15 ; 1 Co 10 1-12 ; Lc 13 1-9

Homélie du F.Jean-Noël

Texte :

Un bel évangile pour ce dimanche au cœur du Carême de l’année jubilaire de la miséricorde ! Un figuier dans sa vigne. Le vigneron. Un homme.

Donc un figuier dans la vigne. A l’époque, cela faisait bon ménage, tous deux objets de soins jaloux, tous deux riches de symboles. Mais là, un figuier stérile.

En face, un homme. Un homme sans plus. Mais le regard mauvais : je m’en vais couper ça, vite fait. Il ne donne rien.

Troisième partenaire, le vigneron. Un autre regard. Vigneron de ce figuier là. Son figuier. Bien.

Mais qui est ce figuier ? Le figuier c’est nous, tout comme ailleurs nous sommes vigne ayant besoin d’être taillée pour porter du fruit, ou terre ingrate ne donnant rien. Le figuier c’est nous, ne répondant pas à l’attente du vigneron.

Et ce vigneron, c‘est qui ? C’est celui qui ne vit pas pour sa vigne, son figuier, comme le vrai berger pour ses brebis, sa brebis car chacune est unique, on le sait. Il ne ménage pas sa peine. Ô ma vigne ! Ce figuier peut bien épuiser la terre, mais pas la patience de ce vigneron amoureux. Ô mon figuier ! On l’a deviné, ce vigneron, c’est Dieu.

Et cet homme qui s’en vient dire froidement : « Attends voir ! Je vais te couper ça. Vite fait » C’est qui ? Certainement pas un vigneron. Un vrai vigneron ne ferait jamais chose pareille. Tout comme un vrai berger n’abandonnerait sa brebis. Il n’est pas mercenaire lui. Alors qui est cet homme sans entrailles qui n’a pas pitié de ce figuier ? Un figuier qui n’a pas l’air d’être son figuier. Cela ne peut pas être Dieu. Ô ma vigne.. mon figuier.

Voyons cela. Est-ce que ce ne serait pas le même qui disait « Arrache-moi vite cet ivraie ». Le même encore qui après l’accident de la tour de Siloé (18 morts) ou devant le handicap de ce malheureux aveugle-né, soupirait : » ce devait être de bien gros pécheurs ! » Un homme encore, sans entrailles, comme le frère ainé du prodigue voyant d’un mauvais œil l’accueil incroyable que le père fait à son propre à rien de cadet ? Un homme encore de la famille de ce bon Jonas n’admettant pas que le Seigneur ait souci de ces pauvres gens de Ninive ; Tous ces gens là, c’était clair, ne mériteraient pas de vivre. Vite le feu du ciel ! De la famille encore de. ..une famille finalement très nombreuse, tellement que nous en sommes peut être bien, nous aussi :

Quand impatients et durs, nous jouons les justiciers même pour nous aussi des fois. Quand nous désespérons de nous voir si minables. Quand nous ne tenons pas compte du beau cadeau que Dieu nous fait à tous – au dire de st Benoît – en nous ménageant du temps et encore du temps. Quand nous désespérons de sa miséricorde. La chose à ne jamais faire (encore st Benoît). Quand avec nos gros sabots, nous méconnaissons ce qui brûle au cœur de Dieu. Et qu’est-ce dons qui brûle au cœur de Dieu ? C’est notre première lecture :

« J’ai vu, oui, j’ai vue la misère de mon peuple ; j’ai entendu ses cris sous les coups ; oui je connais ses souffrances ; je suis descendu pour le délivrer ! » Ô ma vigne, Ô mon peuple.

Vous allez m’objecter que dans notre Evangile, c’est tout de même bien le vigneron qui dit : « Attends voir un an que je bêche et mette du fumier. Après toi, tu le couperas ». Dans un an, oui, c’est vrai. Mais lui, le vigneron le sait bien : un an renouvelable. « De toujours à toujours » comme dit un Psaume.

La conclusion, je la reçois du Pape François. Ce pourrait être de l’étonnant n° 153 de « La joie de l’Evangile » - un peu long, mais déjà au n° 3, il dit :

J’insiste : Dieu ne se fatigue jamais de pardonner ; c’est nous qui nous fatiguons de demander sa miséricorde »

Cela ne nous dispense quand même pas de nous laisser bêcher, creuser, retourner, approfondir par la Parole de Dieu. Amender. (28-02-2016)

Homélie du 21 février 2016 — 2e dim. du Carême — Frère Cyprien
Cycle : Année C
Info :

Année C 2e dim Carême

Gen 15/5-12,17-18, Phil 3/17-4-1, Lc 9/28b-36.

Homélie du F.Cyprien

Texte :

« Jésus prit avec lui Pierre, Jean et Jacques, et il gravit la montagne pour prier. Pendant qu’il priait, l’aspect de son visage devint autre, et son vêtement devint d’une blancheur éblouissante ».

Dimanche dernier, frère Ghislain, a souligné, à propos de des tentations du Christ comme pour le baptême dans le Jourdain et l’Evangile d’aujourd’hui, que tous les trois mentionnent la prière de Jésus… Cette insistance de saint Luc nous dit quelque chose de l’intimité de Jésus avec Dieu. …Présence de Dieu son Père bien sûr dans la vie et le cœur de Jésus, paroles du Père aussi qui nous révèlent l’identité et la mission du Fils.

Qu’est-ce donc cette transfiguration ? le visage qui change, les vêtements éblouissants…et la présence de Moïse et d’Elie ?

= Saint Luc nous met en face d’une expérience de la catégorie de l’indicible (« les disciples gardèrent le silence et ne rapportèrent rien à personne de ce qu’ils avaient vu » ; quelque chose qui prendra sens plus tard : il y a un peu de la vision du Fils de l’homme du prophète Daniel dans la transfiguration, mais elle annonce surtout le Christ ressuscité et la foi des premiers chrétiens.

= Saint Luc souligne aussi la cohérence de l’événement avec l’histoire du peuple juif. En présence des disciples, autour de Jésus il y a Moïse, c’est la Torah ; avec Elie, ce sont les prophètes.

Au milieu de son Evangile, saint Luc situe l’expérience des trois disciples pour annoncer la suite dans le dessein de Dieu, la mission de Jésus… complément aux trois annonces de sa Passion, alors que Jésus se tourne résolument vers Jérusalem.

« Ils parlaient de son départ qui allait s’accomplir à Jérusalem ».

Le mot « départ » traduit le mot grec « exodos », sortie.

Il s’agit de la mort de Jésus : s’il est question d’Exode, la transfiguration annonce l’Exode définitif où Jésus va délivrer les hommes de la mort, comme avaient été délivrés les Hébreux de la servitude d’Egypte… Exode définitif … à la Cène Jésus accomplit « la nouvelle et éternelle alliance ».

La vision est divinement belle, illumination pour Pierre, Jacques et Jean… Cette vision néanmoins est une promesse; Pierre a voulu la faire durer, il ouvrit la bouche, mais …« il ne savait pas ce qu’il disait » !

Car la voix du Père intervient pour affirmer : « Celui-ci est mon Fils, écoutez-le »… Le message, il est là : Ecoutez-le dans ce qu’il vous dit, écoutez-le dans ce qu’il fait, écoutez-le dans ce qu’il fera… « Ecoutez-le » …marchez à sa suite…

Le départ de Jésus à Jérusalem sera l’Exode, le passage où Dieu intervient pour nous sauver …« à main forte et à bras étendu » : il y mettra le prix, le prix qui est la vie du Fils.

Quand la voix du Père se fit entendre, quand Dieu eut parlé, il n’y eut plus que Jésus seul… Lui allait continuer sa mission, il lui fallait aller vers son exode, vers la vie donnée.

Il n’est pas facile de conformer jusqu’au bout sa vie à l’exemple du Maître. « Beaucoup se conduisent en ennemis de la croix du Christ » disait saint Paul aux Philippiens.

Et le royaume des Cieux, le royaume de Dieu est le royaume des martyrs, eux qui ont lavé leur vêtement dans le sang de l’Agneau, l’agneau pascal, le Christ imité jusqu’au bout.

Cette transfiguration nous concerne parce qu’elle nous montre l’accomplissement des Ecritures, elle nous tourne vers la Gloire, avec l’exigence pour nous de suivre Jésus. Jésus, après Moïse et Elie, nous parle au nom de son Père… Il nous montre le chemin …et « il transformera nos pauvres corps à l’image de son corps glorieux » disait encore saint Paul.

A la suite de Jésus, offrons la vie que nous avons à donner. Le Christ est avec nous ; dans l’intimité avec le Père, nous sommes avec lui, déjà, avant même notre propre exode, le passage vers le Père. (2016-02-21)

***

Homélie du 14 février 2016 — 1er dim. du Carême — Frère Ghislain
Cycle : Année C
Info :

Année C - 1er dimanche de Carême

Deut. 26, 4-10 Rom. 10, 8-13 Luc, 4, 1-13

Homélie du F.Ghislain

Texte :

Nous venons d’entendre le récit des tentations de Jésus au désert. Si nous avons bien écouté, nous nous disons peut-être : « Que faire de ce récit démesuré ? » Quarante jours de tentation dans un désert, sans nourriture, sans eau, dans la chaleur pesante du jour et le froid perçant de la nuit, avec des pensées, nous ne savons lesquelles, qui épuisent l’homme ? Ensuite une vision de tous les royaumes de la terre et de leur gloire. Ceci peut-être ne nous tenterait guère aujourd’hui : quand les journaux nous donnent quotidiennement l’état des lieux dans la planète, cela ne nous donne pas tellement envie de rejoindre ceux qui les gouvernent. En était-il autrement au temps de Jésus, que le diable pense l’allécher par la promesse du pouvoir ? Enfin une proposition étrange : on nous parle du sommet du Temple. Disons : les tours de Notre Dame : se jeter en haut pour que les anges nous rattrapent ? Qu’est-ce que tout cela veut dire ?

Retenons d’abord ceci : le récit de la tentation suit immédiatement celui du Baptême de Jésus, où celui-ci, nous dit saint Luc, étant en prière, vit les cieux s’ouvrir et l’Esprit descendre sur Lui, tandis qu’il entendait la voix du Père : Toi, tu es mon Fils bien aimé. Et notre texte continue en disant : Jésus, rempli d’Esprit-Saint…dans l’Esprit fut conduit au désert. Et là, dans le dénuement, il rencontra le diable, le satan, l’Esprit mauvais. Comme si, en la personne de Jésus, se ramassait le combat essentiel : entre l’Esprit de Dieu et l’esprit du mal. - Dimanche prochain, nous entendrons le récit de la Transfiguration : de nouveau, dit le texte, Jésus était en prière et alors, il fut transfiguré, comme devenu totalement lumière, et la même voix qu’au Baptême se fit entendre, adressée cette fois-ci aux disciples : « Celui-ci est mon Fils, celui que j’ai choisi ». Ainsi, le sombre récit de la tentation se situe-t-il entre deux récits de lumière, de filiation et d’Esprit-Saint, comme s’il fallait, comme le dit plus loin saint Luc encore, « que le Christ souffrît et entrât ainsi dans sa gloire ».

Mais pourquoi ? De nouveau, l’évangile nous le dit : quand Jésus a faim après son long jeûne, le diable lui propose : si tu es Fils de Dieu, et Jésus répond : l’homme ne vit pas seulement de pain. Fils de Dieu, homme. Jésus refuse de faire appel à autre chose que sa condition d’homme. Quand on lui offre des royaumes qui le feraient rentrer dans l’idolâtrie, il les refuse car seul Dieu est adorable. Quand on lui suggère de s’appuyer sur sa dignité encore de Fils de Dieu pour présumer des desseins de Dieu à son égard, il refuse. Jésus, un homme dans l’adoration du Père. Dans l’épître aux Philippiens, saint Paul décrit bien son attitude : « Le Christ Jésus, ayant la condition de Dieu, ne retint pas jalousement le rang qui l’égalait à Dieu. Mais il s’est anéantit, prenant la condition de serviteur, devenant semblable aux hommes… », et la suite, que vous connaissez.

Maintenant alors, il me semble que nous pouvons rentrer en scène. Les tentations en question sont les nôtres, à notre mesure, et elles connaissent parfois des paroxysmes : privés de pain, symbole ici de tout le bien-être terrestre que nous pouvons désirer et qui, soudain, nous manque ; attirés par la grandeur, par tout ce qui, dans notre sphère limitée, est pouvoir, autorité, reconnaissance, nous en sommes dépourvus ; ayant fait des projets, pris des risques, en les mesurant trop peut-être à l’aune de nos désirs, nous sommes déçus, parfois presque détruits. – Je pense que, si chacun de nous regarde sa vie, il saura mettre des mots concrets sur ces épreuves, ces tentations, qui rendent la vie dure, parfois à la limite du supportable.

L’évangile nous dit que Jésus, pour affronter ses tentations, avait reçu une plénitude d’Esprit-Saint et que, dans ces tentations, il est demeuré inébranlable dans l’invocation du Père, sans faire appel à aucun privilège que lui aurait donné sa condition de Fils de Dieu. Or, à nous aussi, l’Esprit saint a été donné : au Baptême, et confirmé à ce qu’on appelle précisément la confirmation ; l’invocation de Dieu peut toujours venir sur nos lèvres. Aussi longtemps que la tentation dure ou revienne, l’Esprit souffle et les lèvres du cœur peuvent s’entrouvrir. N’avons-nous pas fait aussi parfois, fugitivement peut-être, cette expérience du souffle et de l’invocation quand nous ne pouvions plus rien d’autre ? C’est peut-être à ce moment-là que nous devenons chrétiens.

Nous entendons tant de choses aujourd’hui sur le mal du monde et la déroute des hommes. Les migrants, qui ont dû tout abandonner, prendre la route, essayer d’entrer dans un pays étrangers ; les populations victimes des combats de chefs qui veulent le pouvoir et l’argent : comme on dit en Afrique : « quand deux éléphants luttent, c’est l’herbe de la terre qui est foulée et écrasée », et tant d’autres lieux et circonstances de tentation, chez nous aussi. Il nous faut prier, beaucoup, souvent, pour que les hommes, les femmes, les enfants tentés semble-t-il au-delà de leurs forces, reçoivent dans le secret de leur cœur, et dans les échanges qu’ils peuvent avoir entre eux, l’Esprit qui est partout dans le monde et peut aller jusqu’au cœur des hommes. Qu’il leur soit donné une assurance intérieure et une invocation silencieuse, celles dont les journaux ne peuvent rendre compte, mais grâce auxquelles ils puissent finalement entendre du Père, la parole qui est à l’intime de ces épreuves et que l’Evangile nous atteste : « Tu es mon Fils ». (2016-02-14)

Homélie du 10 février 2016 — Mercredi des Cendres — Père Abbé Luc
Cycle : Année C
Info :

Année C - Mercredi des CENDRES - 10.02.2016

Jl 2, 12-18 ; 2 Co 5, 20-6, 2 ; Mt 6,1-6, 16-18

Homélie du Père Abbé Luc

Texte :

Frères et Sœurs,

Des lectures entendues, je voudrais retenir une expression : « devenir juste ». Jésus disait à ses disciples : « Ce que vous faites pour devenir des justes, éviter de l’accomplir devant les hommes » ; et Paul affirmait : « Celui qui n’a pas connu le péché, Dieu l’a pour nous identifié au péché, afin qu’en lui nous devenions justes de la justice même de Dieu ». Devenir juste, nous faisons des choses pour cela, et pourtant un seul a fait ce qu’il fallait pour que nous le devenions vraiment : Jésus identifié au péché sur la croix. Oui désormais, en Jésus, nous sommes des justes, et nous ne cessons de le devenir. Depuis notre baptême, nous sommes assurés d’être sauvés, et dans le même temps, cheminant dans l’histoire, nous sommes responsables de ce don qui nous a été fait afin qu’il porte tout son fruit dans notre existence. Nous sommes déjà devenus des justes, et nous ne cessons de le devenir encore.

« Notre entrainement au combat spirituel », vécu durant ce Carême s’inscrit dans ce « déjà » et cet « encore » à venir. A l’invitation de Paul, nous pouvons vivre ce temps comme un temps de grâce. Temps favorable pour reprendre conscience de cette grâce immense qui nous a été faite en Jésus, mort et ressuscité pour nous. C’est la grâce d’un amour immérité totalement gratuit. Entrer en Carême, c’est d’abord ouvrir son cœur. Le prophète Joël parle de le déchirer. Oui, nous tenir devant notre Dieu le cœur ouvert et les mains vides, avec notre seul désir d’être davantage à l’écoute, d’être moins ingrat ou indifférent devant sa bonté dispensée à profusion. Une attitude d’ouverture, d’écoute des Ecritures pour contempler, laisser résonner en nous la beauté et la profondeur de la Miséricorde à nous offerte. Tel est le premier aspect de notre entrainement spirituel : nous tenir ouvert, disponible intérieurement, à l’écoute…du don premier qui nous rend juste.

Laisser Dieu par sa grâce nous justifier aujourd’hui encore. Un second aspect de notre entrainement au combat spirituel, sera d’accueillir ce que l’Esprit nous suggère de mettre en œuvre pour devenir juste. Notre expérience quotidienne nous fait rencontrer le mal en nous-mêmes et autour de nous. La justice de Dieu n’est pas encore pleinement accomplie en nos existences et dans la vie de l’humanité. Ce temps de Carême peut nous apprendre à dire plus en vérité : « Pitié Seigneur, car nous avons péché ». Non pour nous morfondre dans la culpabilité, mais pour ouvrir davantage notre cœur, à la puissance du pardon qui renouvelle en vérité celui qui s’humilie. Ce temps de Carême peut être aussi l’occasion de remettre de l’ordre dans nos vies. Remettre de l’ordre : cela veut dire remettre des priorités dans notre quotidien. Est-ce que la priorité, c’est me servir ou de servir les autres ? Est-ce de me distraire ou bien de me recentrer sur l’essentiel ? Pour nous moine, nous pouvons entendre à la suite de Benoit : est-ce je ne préfère vraiment rien au Christ ? Préférence qui se décline dans le primat de l’office et de la prière, mais aussi dans l’urgence du service du frère, proche ou lointain…

Chacun de nous connaît ces points de fragilité. C’est le moment favorable de les considérer en vérité. Tel un malade qui va vers son médecin, présentons-nous à l’œuvre de grâce de notre Dieu avec confiance. Prenons avec courage les remèdes qu’Il nous indique, le jeûne, la prière plus assidue, le partage plus concret, le service plus désintéressé….

En cette eucharistie, le Christ nous assure de sa grâce déjà offerte, et nous faisons joyeusement un pas vers lui pour l’accueillir et nous mettre en route vers Pâques. (2016-02-10)

Homélie du 07 février 2016 — 5e dim. ordinaire — Père Abbé Luc
Cycle : Année C
Info :

Année C - 5° Dimanche du Temps Ordinaire - 7 février 2016

Is 6 1-8; 1 Co 15 1-11; Lc 5 1-11

Homélie du Père Abbé Luc

Texte :

Frères et sœurs,

Les trois lectures entendues nous disent la force d’une expérience de Dieu : le prophète Isaïe dans le temple qui est saisi par la gloire de Dieu, les disciples dans la barque qui sont sidérés par la pêche abondante réalisée sur la seule parole de Jésus, et Paul qui rappelle l’apparition du Christ ressuscité faisant de lui un ardent apôtre, de persécuteur de l’Eglise qu’il était. Trois expériences à travers lesquelles Dieu se manifeste et bouleverse la vie de ceux qui la font. Trois expériences qui peuvent nous enseigner sur notre propre rencontre de Dieu et nous donner cœur pour nous mettre en route. Je retiendrai trois mots : sidération, parole, et envoi.

Sidération. Isaïe, Pierre et Paul vivent une expérience qui les sidère. Isaïe s’estime perdu, Pierre est effrayé et se met à genoux. Le récit des Actes nous rapporte que Paul tombera à terre. Devant quelque chose qui est tellement extraordinaire, nos trois témoins sont comme cloués au sol. Leur vie est bousculée par cet évènement qui sort de l’ordinaire. Une présence s’impose à eux, et ils ne peuvent rien lui opposer. Présence forte de Dieu qui manifeste par contraste leur petitesse : « Malheur à moi, je suis un homme aux lèvres impures »… « Eloigne-toi de moi, Seigneur, car je suis un homme pécheur »… Dans nos vies, dans notre histoire avec Dieu, peut-être pouvons-nous tous repérer, un de ces moments privilégiés où les choses et de Dieu et de l’homme nous sont apparues dans une lumière forte. Une lumière si claire que dans cet instant nous avons saisi, ou nous avons été saisi par le mystère et de Dieu et de notre propre petitesse devant lui. Sûrement pour la plupart d’entre nous, cette expérience ou ces expériences n’ont rien eu d’extraordinaire ni de merveilleux. Mais quelque chose en nous a été touché, peut-être sidéré, si intimement que nous ne pouvons l’oublier. Frères et sœurs, gardons mémoire de ces moments privilégiés, souvent fondateurs. Non pour essayer de retenir quelque chose de Dieu, mais pour conserver l’élan de vie et de grâce de tel moment.

Parole. La Parole est presque toujours liée à ces évènements forts, à ces expériences. Isaïe entend la voix de Dieu. Pierre obéit à la Parole de Jésus puis est rassuré par sa parole : « soit sans crainte ». Et Paul entend une parole, qu’il reçoit comme une grâce. Dieu dont le mystère est si grand, vient à nous, en nous parlant, en s’adressant à nous. Sa Parole nous introduit dans une relation vivante avec lui. Si la frayeur a pu terrasser, la Parole rassure et relève. Elle remet debout. Notre Dieu n’est pas le Dieu de la sidération, Il est un Dieu de relation. Il désire tisser avec nous une amitié qui respecte chacun de nous, avec sa personnalité et son rythme. Par sa Parole, Dieu propose d’entrer dans une Alliance, un chemin sur lequel nous allons peu à peu découvrir son visage, mieux le connaitre, mieux l’aimer.

Envoi. Il est frappant de voir que la rencontre fulgurante avec Dieu conduit à un envoi. Celui qui a fait cette expérience devient messager de Dieu. Ce qu’il a vécu n’est pas pour lui seul. Isaïe le comprend : « Me voici, envoie-moi ». Pierre l’entends : « Désormais ce sont des hommes que tu prendras ». Et il suit Jésus en laissant tout. Paul fait l’expérience que la grâce reçue n’a pas été stérile dans sa vie d’envoyé aux nations. Oui, cette expérience de Dieu se révèle être appel, appel à aller vers les autres, en partageant la Bonne Nouvelle de la rencontre vécue, la Bonne Nouvelle d’un Dieu qui vient à la rencontre de l’homme et qui l’invite à vivre avec lui une relation vivante.

Frères et Sœurs en cette eucharistie, nous faisons mémoire de la Bonne Nouvelle de la mort et de la résurrection de Jésus, Bonne Nouvelle d’un évènement d’hier que nous accueillons pleinement aujourd’hui dans la Vie qui nous est offerte. (2016-02-07)

Homélie du 02 février 2016 — Présentation du Seigneur — Père Abbé Luc
Cycle : Année C
Info :

Année C - PRESENTATION DU SEIGNEUR - 02.02.2016

He 2,14-18 ; Lc 2, 22-40

Homélie du Père Abbé Luc

Texte :

Frères et sœurs,

« Il lui fallait se rendre en tout semblable à ses frères » nous dit l’épitre aux Hébreux à propos de Jésus. Ce chemin de ressemblance commencé dès sa conception, Jésus le poursuit dans l’accomplissement des rites de la Loi de son peuple, dont nous faisons mémoire aujourd’hui. Comme tout petit juif, lui le premier-né est présenté et pour lui on offre deux petites colombes. Ce geste rituel qui commémore la sortie d’Egypte permet de ne pas oublier que c’est le Seigneur qui sauve et que ce salut a eu un prix, la mort des premiers-nés de l’Egypte. Rien n’est dû, tout est donné par le Seigneur.

Ainsi Jésus a-t-il pu devenir « un grand prêtre miséricordieux et digne de foi pour les relations avec Dieu afin d’enlever les péchés du peuple ». Jésus, le Fils de Dieu, n’avait pas besoin d’offrir ce couple de colombes. Il n’avait pas besoin d’être racheté, sauvé. En assumant avec notre humanité, ces rites de la Loi, il s’offre lui-même, prélude de son offrande sur la croix. Ainsi depuis sa conception jusqu’à la croix, Jésus vit un unique sacerdoce : celui de faire de toute sa vie une totale offrande. Se faisant il rétablit la relation entre Dieu et l’homme. La relation avait été brisée par le péché. Elle est rétablie par cette offrande totale et continue de Jésus à son Père. En notre humanité, il est tout tourné vers son Père, aimant, cherchant, travaillant, souffrant sans se détourner de son Père.

Telle est la lumière qui commence à poindre en ce jour de la Présentation et qui sera plénière lors de la résurrection. Mystère de la vie de Jésus qui est mystère du dévoilement progressif de cette lumière, en passant par l’épreuve de l’obscurcissement de la croix.

Méditer, contempler ce mystère du Christ, Lumière des nations, peut être source de réconfort pour nous. Cette lumière n’a rien d’éblouissant ni de clinquant. Elle est plutôt bienfaisante et réconfortante, si petite parait-elle être à nos yeux, comme l’était la flamme fragile du cierge que nous avons porté au début de cette célébration. Lumière qui accompagne nos pas humains avec leurs hésitations, leurs trébuchements aussi. Lumière qui donne force et direction à nos tâtonnements pour que notre vie soit vraiment humaine, depuis sa conception jusqu’à la mort. Lumière qui est là parce que rien ne notre humanité n’en est indigne. Lumière qui vient remplir de vie et de joie nos quotidiens très simples de moines quand ils consentent à se mettre humblement sous son halo. Oui, laissons-la-nous illuminer, nous fortifier, et faire de nous, une offrande pure et des témoins joyeux de la Bonne Nouvelle. (2016-02-02)

Homélie du 31 janvier 2016 — 4e dim. ordinaire — Père Abbé Luc
Cycle : Année C
Info :

Année C - 4° dimanche du Tems Ordinaire 2016

Jr, 1, 4-5, 17-19 ; Ps 70 ; 1 Co 12, 31-13, 13 ; Lc 4, 21-30

Homélie du Père Abbé Luc

Texte :

Frères et sœurs,

Le récit que l’on vient d’entendre peut faire surgir en nous cette question : qui est Jésus pour susciter une telle opposition dès le début de son ministère ? Pourquoi le prophète dérange-t-il autant ? Parce qu’il n’a pas d’autres intérêts que l’amour. Amour de Dieu son Père et amour des hommes. Les habitants de Nazareth voudraient retenir Jésus à leur profit afin d’exploiter ses talents de guérisseur. Mais, pour reprendre les mots de St Paul, l’amour ne cherche pas son intérêt ». Ils voudraient bénéficier de l’aura de Jésus dont la renommée grandit. Mais l’amour ne se gonfle pas d’orgueil.

Les habitants de Nazareth n’ont pas compris que Jésus est la voix et le visage de l’amour, et qu’on ne peut pas mettre la main sur lui. Sans compromission aucune, il est la voix de l’amour qui annonce aux pauvres la Bonne Nouvelle. Il est le visage de l’amour qui va son chemin et endure tout dans la patience. Jésus est la voix de l’amour qui ne cesse de dire la vérité qui libère. Et face à l’hostilité, il est le visage de l’amour qui ne s’emporte pas et s’efface, faisant confiance en tout à son Père.

A la suite de Jérémie, d’Elie et d’Elisée, prophètes de l’Ancien Testament, Jésus est vraiment le « grand prophète » attendu. Voix et visage de l’amour au milieu des hommes, il ne recherche pas la reconnaissance humaine. Et il n’aura de cesse jusqu’à la croix que l’amour ait le dernier mot en toute chose.

Frères et sœurs, par notre baptême nous a été donné de devenir des prophètes en Jésus. Avec Lui, par Lui, il nous revient aujourd’hui d’être au milieu de nos contemporains, la voix et le visage de l’amour. Amour fraternel dans nos communautés chrétiennes. Mais aussi amour sans frontière pour tout homme et toute femme rencontrés. « Là où il y a des chrétiens, quiconque doit pouvoir trouver une oasis de miséricorde » nous encourage le pape François, en cette année jubilaire. Prophètes, il nous revient de faire signe de l’amour infini de Dieu pour tous. Chacun est prophète quand il fait un geste d’accueil au lieu d’un mouvement d’énervement spontané ; lorsqu’il ne mesure pas jalousement son temps ; lorsqu’il rend un service en sachant qu’il n’y aura pas de réciproque ; lorsqu’il donne une parole de vérité qui coûte ; lorsqu’il pose à contrecourant un geste de justice… Oui, soyons heureux d’être envoyés comme des prophètes de l’amour là où nous sommes, dans un monastère, dans la famille ou le travail, sur un lit d’hôpital ou dans la prison. Et si nous mesurons spontanément notre faiblesse, regardons Jésus et demandons-lui son aide. Regardons le en reprenant les mots de St Paul : « L’amour prend patience, l’amour rend service…l’amour ne passera pas ». Je vous propose d’apprendre par cœur ces quelques versets (4 à 8), ou de les écrire, et de les répéter en regardant Jésus, la voix et le visage de l’amour. Une autre façon de nous stimuler sur ce chemin exigent est de regarder les amis de Jésus, les saints. Essayons de mieux connaître notre saint patron, ou bien le saint du jour. Ainsi aujourd’hui regardons don Bosco qui a su si bien aimer les jeunes déshérités et leur faire confiance. Avec les saints, laissons l’Esprit nous apprendre à aimer sans mesure. Frères et sœurs, en cette eucharistie, nous faisons mémoire de la mort et de la résurrection de Jésus. Là se trouve la source de son amour pour nous. Accueillons-le. (2016-01-31)

Homélie du 24 janvier 2016 — 3e dim. ordinaire — Frère Matthieu
Cycle : Année C
Info :

Année C - 3e DIMANCHE ORDINAIRE - 24 Janvier 2016

1ere lecture : Néhémie 8,1-4a, 5-6, 8-10

2eme lecture : 1 Corinthiens 12,13-30

Évangile : Luc 1,1-4 et 4,14-21

Homélie du F.Matthieu

Texte :

La première lecture tirée du Vieux Testament consonne tout à fait avec le passage de l’évangile de Luc que nous venons d’entendre et cela peut être certainement source d’enseignement pour nous aujourd’hui.

Dans le passage de Néhémie, il s'agit du peuple d’Israël rassemblé pour célébrer la fête des Tentes, au retour de l'Exil à Babylone. Le prêtre Esdras y fait la lecture publique du Livre de la Loi, la Torah de Moïse, dont la lecture sinon tout-à-fait la pratique avaient été sans doute bien délaissées durant les longues années d’exil dans le monde des nations.

Dans le passage de l’évangile, il s'agit de l’assemblée de la synagogue, un jour de shabbat. Ce jour-là, comme chaque shabbat, quelqu'un a lu un passage de la Torah, puis Jésus, un habitué mais qui a déjà acquis une belle renommée dans tout le pays, a été invité à faire l’homélie ; il a choisi alors le passage du Prophète Isaïe dont il veut donner l’interprétation.

Dans les deux cas, nous assistons à une proclamation publique et liturgique des Ecritures, Parole de Dieu actualisée pour que tous comprennent ce qui est en jeu au plus profond du dessein de Dieu pour son peuple et finalement pour tous les hommes, au long des événements, heureux ou tragiques, de leur histoire.

Lecture de la Torah, récit depuis les origines du monde, la création, le péché jusqu’au déluge, puis un nouveau départ, une nouvelle alliance déjà, et l’appel d’Abraham, le croyant, l’histoire des Pères, le séjour en Egypte et la sortie merveilleuse, la libération de l’esclavage, le don de la Loi au Sinaï et le don de la terre sainte… premier achèvement.

Le peuple croit avoir perdu tout cela dans son péché, dans son exil, si long, si lointain, mais Esdras et Néhémie et les lévites sont là pour annoncer la "Bonne Nouvelle" : Dieu renouvelle ses merveilles et le retour sur la terre va être un nouveau départ, le renouvellement de l’Alliance, la reprise du service de Dieu à l’écoute de sa Parole toujours source de vie, de libération et de salut !

Et le peuple est invité à la fête, mais à une fête qui est toute de joie parce qu’elle est l’occasion du partage pour que les pauvres eux aussi, eux d’abord, soient en fête selon le désir de Dieu !

Et Jésus s’inscrit tout naturellement dans cette histoire du salut, Luc est là pour en témoigner dans tout son évangile.

Plongé avec tout le peuple dans les eaux du Baptême de Jean, il a reçu l’onction de l’Esprit et le premier acte de son ministère messianique s’inscrit dans la tradition liturgique de l’assemblée synagogale d’un shabbat, où sont lues les Ecritures – Torah de Moïse, Prophètes et Psaumes – pour que se poursuivent le chemin de l’Alliance, pour que se poursuivent le dessein de salut de Dieu pour son peuple et pour tous les hommes. Mais aujourd’hui dans son évangile, Luc témoigne de la dernière étape de cette histoire du salut : en Jésus, le messie les Ecritures sont accomplies.

Il a reçu l’onction de l’Esprit pour proclamer la "Bonne Nouvelle" aux pauvres, comme annoncé dans le passage d'Isaïe, choisi par Jésus ; c'est ce qu’Il va accomplir, en proclamant le Royaume sur les routes de Galilée, de Judée et jusqu’à Jérusalem, par sa Parole bien sûr, mais aussi par toute sa vie jusqu’au sacrifice suprême, se faisant Péché avec nous et pour nous, pour qu’advienne la libération définitive, le salut enfin accompli, l’alliance nouvelle et éternelle… C'est ce que raconte tout au long l'évangile de Luc comme les trois autres évangiles d’ailleurs.

Que pouvons-nous alors comprendre, pour nous, dans notre aujourd’hui ?

Que la "Bonne Nouvelle", celle de la Torah, celle d'Isaïe comme celle de Luc, c'est Jésus lui-même : sa vie, ses paroles, et toute sa Personne.

Que la "Bonne Nouvelle" c’est que Dieu lui-même est venu vivre en homme parmi les hommes, pour apporter à toute notre humanité le pardon, la libération, le salut.

Et c’est "Bonne Nouvelle" pour nous, aujourd’hui encore !

Dans le texte de Néhémie, Esdras et les lévites disent à tout le peuple : Ce jour est consacré au Seigneur votre Dieu et ils lui prescrivent d'être dans la joie, de faire la fête. Pourquoi ? Parce que Dieu a donné à son peuple, et lui donne à nouveau, aujourd’hui, la libération, le salut et la vie en plénitude.

Et Jésus en lisant Isaïe, ne dit pas autre chose : "Il m'a envoyé porter la Bonne Nouvelle aux pauvres, annoncer aux prisonniers qu'ils sont libres, et aux aveugles qu'ils verront la lumière, apporter aux opprimés la libération..."

Mais, aujourd’hui, et depuis ce Jour, tout est accompli !

Le Seigneur veut le bien des hommes, et Jésus, Dieu incarné, est en lui-même l’accomplissement de cette volonté de salut, donné d’abord aux pauvres et aux opprimés, à ceux qui "n'ont rien de prêt", ni matériellement, ni peut-être même spirituellement, rien pour entrer dans cette fête et qui y sont pourtant les premiers accueillis.

Alors, saurons-nous être simplement de ceux-là ? Nous reconnaissant Pécheurs, et plus radicalement que nous ne le pensons peut-être, mais accueillant humblement le pardon… offert gratuitement… le don du salut et de la joie !

C’est la "Bonne Nouvelle" pour nous, aujourd’hui ! (2016-01-24)