Homélies
Liste des Homélies
Année C - SAINTE MARIE MERE DE DIEU
01.01.2016
Nb 6, 22-27 ; Ga 4, 4-7 ; Lc 2, 16-21
Homélie du Père Abbé Luc
Frères et soeurs,
L’évangile que nous venons d’entendre nous fait toucher du doigt le mystère de notre vie chrétienne : une vie très banale dans laquelle se réalise le grand projet de Dieu. Cette naissance à Bethléem est banale. Une parmi tant d’autres au même moment. Deux parents accueillent et prennent soin d’un nouveau-né. Et cependant la venue des bergers et les propos qu’ils tiennent surprennent. Ils voient quelque chose d’autre. Ils regardent cette naissance ordinaire sous une autre lumière, à la lumière de ce que les anges leur ont dit : « un sauveur vous né… ». Sous les apparences très banales, se joue quelque chose de très grand : le Messie attendu est là, Dieu visite son peuple…
St Paul dans la seconde lecture nous dit quelque chose de semblable quand il affirme que la venue du Fils de Dieu, né d’une femme et soumis à la Loi, comme tout enfant juif, réalise en fait le grand projet de Dieu : faire de nous des fils adoptifs, des héritiers de la vie divine. Jésus le Fils de Dieu a consenti à l’ordinaire d’une vie juive, en s’y soumettant, pour nous donner part à sa vie à Lui… « Admirable échange » que nous chantons depuis Noël.
Ainsi en va-t-il de notre vie chrétienne depuis notre baptême. En apparence rien ne nous distingue des autres hommes et femmes, et c’est heureux. Mais pourtant nous croyons que dans notre vie personnelle et ecclésiale, le grand projet de Dieu est à l’œuvre, pas seulement pour nous, mais pour toute l’humanité. Sa bénédiction repose sur notre race humaine, afin de la rassembler comme un unique peuple de fils et de frères. Paul nous dit que nous avons une preuve de ce profond travail à l’œuvre, dans l’Esprit qui crie en nos cœurs : « Abba », « Père ». En nous vit l’Esprit qui nous découvre notre propre condition de fils. Il nous entraine à entrer dans une relation confiante avec Dieu notre Père. En nous vit l’Esprit qui vient parfois nous bousculer. Il nous pousse à vivre plus résolument entre nous comme des frères. C’est ici que notre vie quotidienne peut rester simplement banale, ou bien peut devenir une vie selon le grand projet de Dieu. Quand nous acceptons de regarder et de servir l’autre comme un frère, au lieu de l’ignorer ou de le mépriser. Quand nous nous tournons vers notre Père de Cieux pour lui demander son aide et pour le remercier, au lieu de l’ignorer ou de le mépriser.
Frères et sœurs, au début de cette année nouvelle, réjouissons-nous d’être rejoints par la bénédiction de Dieu dans notre quotidien le plus banal. Remercions-le de faire route avec nous. Appelons-le dans nos épreuves, car il désire les traverser avec nous pour nous apprendre à les traverser avec lui. Et accueillons son projet d’amour qui veut changer nos vies très banales en des vies riches d’amour, pleine de cette joie de donner et de recevoir. Nos rencontres, nos gestes quotidiens, notre travail en auront une toute autre saveur et force. Appuyons-nous sur Marie qui a su saisir et méditer dans son quotidien très ordinaire, l’irruption de l’inattendu de Dieu.
(01-01-2016)
Année C - SAINTE FAMILLE 27 DECEMBRE 2015
1 Sam 1 20-28; 1 Jn 3 -24; Lc 2 41-52
Homélie du F.Hubert
Etonnant évangile pour fêter la Sainte Famille !
Mais comment l’Evangile ne serait-il pas étonnant ?
Bonne Nouvelle, il est aussi, si je puis dire, « mauvaise » nouvelle,
car il nous invite à nous déplacer, à quitter tout ce qui n’est pas la vraie Vie,
à quitter nos fausses conceptions de la vie, nos égoïsmes, nos idoles,
à nous convertir, et donc à mourir à nous-mêmes comme centres, pour devenir fils et frères.
L’Evangile, Bonne nouvelle qui nous invite de façon pressante
à renoncer à notre vieil homme pour revêtir l’Homme nouveau.
« Jésus grandissait en sagesse, en taille et en grâce sous le regard de Dieu et des hommes » :
nous pouvons trouver là de quoi conforter l’image spontanée que nous avons d’une « sage » Sainte Famille.
Mais que « Dieu » vive comme un enfant et un homme ordinaires, pendant 30 ans,
dans une modeste bourgade de Galilée, n’a rien de « naturel », de « convenable », de « sage »…
Le pape François nous a tous surpris en décidant, dès le lendemain de son élection, de ne pas habiter dans les appartements pontificaux mais à la résidence Ste Marthe, à revenir à cette résidence, le soir-même de son élection, non dans la limousine préparée pour lui, mais dans le minibus des cardinaux avec lesquels il était arrivé le matin. L’évêque de Rome, homme parmi les hommes.
« Dieu », homme parmi les hommes, c’est bien autre chose encore !
Les parents de Jésus pensaient qu’il était « dans le convoi des pèlerins »…
Le Verbe s’est chair, et il a habité parmi nous, dit st Jean.
« Jésus grandissait en sagesse, en taille et en grâce sous le regard de Dieu et des hommes »,
C’est bien Jésus que nous devons regarder pour savoir quel style de vie doit être le nôtre
en tant qu’enfants de Dieu, en tant que disciples du Fils de Dieu.
Ce style de vie, évangélique, tant désiré par le pape.
Dieu n’est pas tel que nous l’imaginons.
Et cela nous bouscule, si prenons cela au sérieux.
« Mon enfant, pourquoi nous as-tu fait cela ?
Vois comme ton père et moi, nous avons souffert en te cherchant ! »
« Ton père et moi » Les parents de Jésus. Joseph, Marie.
Luc nous dit, au début de la vie publique de Jésus :
« Quand il commença, Jésus avait environ 30 ans ; il était, à ce que l’on pensait, fils de Joseph. »
et lors de la première prédication de Jésus à Nazareth, les auditeurs disent :
« N’est-ce pas là fils de Joseph ? »
En Joseph, Jésus a eu un vrai père humain qui l’a élevé, fait grandir, l’a entouré de tendresse et d’amour,
en qui il a pu avoir toute confiance pour grandir en humanité, sous le regard de Dieu et des hommes.
Vérité de l’Incarnation.
Rôle irremplaçable de Joseph, pour que le Fils de Dieu soit vraiment homme.
Mais la vérité de Jésus ne s’arrête pas là.
Voici que Jésus, venu avec ses parents pour la fête de la Pâque, reste à Jérusalem à leur insu.
St Luc ne nous parle pas là de la fugue d’un adolescent,
mais de sa filiation plus profonde, cachée, sa filiation divine,
et déjà de sa Pâque, de son chemin pascal.
« Ne saviez-vous pas qu’il me faut être chez mon Père ? »
Premières paroles de Jésus rapportées par st Luc ;
les dernières, après la promesse au bon larron, seront :
« Père, entre tes mains, je remets mon esprit. »
Le Père est sa demeure propre ; toute son œuvre est de nous y introduire avec lui.
Il fallait que Jésus nous le révèle, qu’il le révèle à Marie, sa mère, et à Joseph, son père en humanité.
Lors de l’Annonciation, Marie a dit oui à l’imprévu de Dieu dans sa vie.
Joseph, de son côté, a fait confiance à l’annonce de l’ange :
« Ne crains pas de prendre chez toi Marie, ton épouse,
car l’enfant qui est engendré en elle vient de l’Esprit Saint. »
Quels bouleversements dans leur vie !
L’un et l’autre, ensemble, ont dit oui à l’imprévu, à ce qui humainement était inimaginable.
Mais leur chemin d’intelligence du mystère de leur Fils était loin d’être achevé.
Les bergers à Bethléem, Siméon au Temple ont eu des paroles de lumière et de feu, éclairantes et brûlantes,
Maintenant, c’est Jésus lui-même qui lève un peu le voile sur son propre mystère.
Au moment de passer de l’enfance à l’âge adulte,
ce n’est plus par des tiers qu’il se manifeste, mais par lui-même.
Il nous signifie là que toute sa vie est une Pâque, un exode vers le Père,
et que sa maison, son lieu de vie, c’est le Père lui-même.
« Ne savez-vous pas que c’est chez mon Père que je dois être ? »
Que Marie et Joseph nous apprennent jour après jour, de plus en plus profondément,
qui est Jésus, leur enfant,
quelle est notre propre origine et vers qui nous allons,
quelle est notre demeure, quel est le visage de Celui qui est notre Source et notre But ultime.
« Mes bien-aimés, voyez comme il est grand, l’amour dont le Père nous a comblés :
il a voulu que nous soyons appelés enfants de Dieu – et nous le sommes. » (2015-12-27)
Année C- Noël Messe du Jour - 25 Décembre 2015
Isaïe 52.7-10 ... Hé 1..1-6 Jn 1 1-18
Homélie du Frère Antoine
Au commencement. .. Ce début de l'Evangile de Jean nous met face à un espace-temps qui nous échappe, alors que Jésus est né un jour du temps et que nous avons coutume de conjuguer la venue de l'enfant Dieu au passé, un peu au présent, rarement au futur. Il est vrai que cet avènement est daté, situé, et la mémoire que nous en faisons est la mémoire d' une espérance ....
Si Jésus est né un jour du temps, il est surtout à naître en nous, tout au long de notre vie.
Si le sauveur est venu, il reviendra .. et notre existence est une préparation à son retour. ..
Noël, est la parabole de notre avenir ...
Noël est une anticipation de ce monde nouveau annoncé par l'Ecriture où Dieu et l'homme seront reconnus ... et totalement révélés pour ce qu'ils sont.
Noël nous invite à accueillir« l'aujourd'hui de Dieu» dans cet élan d'enthousiasme que manifeste la liturgie de la nativité dans l'antienne du Magnificat.
Aujourd'hui Christ naît pour moi, n'ayons pas peur de naître.
Aujourd'hui Christ naît pour le monde, n'ayons pas peur de témoigner.
Les chants de Noël nous disent que notre naissance humaine n'est pas uniquement dernière nous mais qu'elle est ... devant! car notre situation personnelle, collective et même cosmique .. est une situation de gestation, une situation où s'accomplit un véritable travail d'enfantement où ne sont épargnées à l'homme .. ni les souffrances .. ni les échecs .. ni les
larmes mais où la joie de la naissance du sauveur relayée par la joie de Pâques nous donnent, chacune, le courage du lendemain.
« En vérité, je te le dis déclarait Jésus à Nicodème, à moins de naître d'en haut, nul ne peut voir le royaume de Dieu. »
Le Royaume de Dieu .. mais c'est dans l'image de l'enfant Jésus dans la Crèche ... qu'il se manifeste!
... un enfant qui nous projette vers l'avant, qui nous dit le Dieu que nous cherchons à tâtons,
... un enfant dont le visage dans sa pureté, sa vérité, est révélation du visage du Père .
. . . un enfant qui nous renvoie à nos vulnérabilités .. à notre dépendance de l'amour du père car c'est toujours en se découvrant aimé de Dieu, que l'homme naît pleinement à son humanité.
Noël nous révèle que la toute- puissance de Dieu est celle d'un amour qui se bat les mains nues, un amour qui oppose la non-violence à la violence, le pardon à l'offense et que Paix, Justice et Miséricorde dessinent ensemble le portrait de Dieu et nous indiquent de quel côté chercher notre réalisation d'enfant de Dieu ainsi que les responsabilités fraternelles qui en découlent.
Tout se résume dans cette parole du Cardinal Martini, archevêque de Milan:
Le sens ultime de la naissance de Jésus à Bethléem c'est sa naissance dans notre cœur ! (2015-12-25)
Année C - Messe de Minuit -NOEL 2015
Is 9, 1-6 ; Tt 2, 11-14 ; Lc 2, 1-14
Homélie du Père Abbé Luc
Frères et sœurs,
Une religieuse qui faisait visiter la grotte de Bethléem commentait : « ici Dieu s’est fait petit enfant pour que nous n’ayons plus jamais peur de lui ! ». Et nous en avons des peurs, peurs à l’égard de Dieu, peur des autres et peur de nous-mêmes parfois ! Pour changer nos peurs en confiance et en docilité, notre Dieu choisit de se faire enfant, un nouveau-né vulnérable. L’évangile nous dit simplement : « Voici le signe qui vous est donné, vous trouverez un nouveau-né emmailloté et couché dans une mangeoire ». Voici le signe, le signe de la petitesse par lequel notre Dieu a voulu se faire reconnaître. Qui aurait peur d’un enfant ? En Jésus, Dieu le Créateur du monde et des univers se laisse approcher, toucher, caresser, nourrir et soigner. Il est là dans une totale impuissance ayant tout à recevoir des autres. Avec Marie et Joseph, les bergers seront les premiers à venir lui rendre hommage. Sans bien comprendre sûrement, ils sont là émerveillés et adorant. Ce soir, laissons-nous attirer par ce mystère, le mystère de l’incarnation, mystère du Fils de Dieu venu dans la chair. A portée de main, Dieu est là suscitant notre adoration aimante. Mystère de proximité que nous accueillerons pleinement dans quelques instants, lors de la communion, quand nous recevrons dans nos mains le Corps du Christ. De la crèche à l’eucharistie, ce mémorial qui actualise la Passion et la Résurrection du Christ, c’est le même mouvement par lequel Dieu nous rejoint. Il se fait proche pour que nous nous approchions de lui avec confiance et amour. Il nous donne ainsi d’entrer sans peur dans « cet échange merveilleux » où notre « nature humaine reçoit une incomparable noblesse », comme nous le chanterons tout à l’heure.
Quand Dieu se fait petit enfant, notre nature humaine en reçoit une incomparable noblesse. C’est un second aspect que je voudrais souligner ce soir. Oui frères et sœurs, Dieu lui-même nous apprend à ne plus avoir peur de notre petitesse et de notre condition limitée, mais à les accepter et à les aimer au contraire. Notre petitesse et nos limites, choisies par Dieu, se trouvent remplis désormais d’une noblesse nouvelle. Nous n’avons plus à mépriser notre faiblesse et celle des autres, ni à en avoir peur. Nos peurs ne sont-elles d’ailleurs pas souvent que l’envers de nos rêves de démesure ? Dans une conférence, commentant l’encyclique « Laudato Si » du pape François, notre frère Ghislain suggérait que la pensée du pape était sous-tendue par le « principe de petitesse ». Selon ce principe, le moteur de l’histoire n’est pas la puissance mais la pauvreté. C’est par les petits qu’advient le changement. Ainsi en bon nombre de passages de l’encyclique, le pape François se plait à inviter au respect et à l’émerveillement devant la création en ces plus petits éléments. Ensuite, il plaide pour un rééquilibrage de l’activité économique en faveur des petits producteurs ainsi que des petites entreprises. Enfin, il fait l’éloge des petites actions et des petits gestes d’amour par lesquels tous peuvent changer notre monde. Je cite : « Accomplir le devoir de sauvegarder la création par de petites actions quotidiennes est très noble, et il est merveilleux que l’éducation soit capable de les susciter jusqu’à en faire un style de vie » (211)… “La spiritualité chrétienne propose une croissance par la sobriété, et une capacité de jouir avec peu. C’est un retour à la simplicité qui nous permet de nous arrêter pour apprécier ce qui est petit, pour remercier des possibilités que la vie offre, sans nous attacher à ce que nous avons ni nous attrister de ce que nous ne possédons pas” (222). Cette attention à ce qui est petit, les créatures comme les personnes, ne nous vient-elle pas en droite ligne de la crèche quand Dieu choisit de se faire petit enfant ? Sans bruit, notre Dieu signe un renversement des valeurs en donnant la première place aux petits, aux faibles et aux pauvres. Il nous invite à un nouveau style de vie qui donne place à chacun ; un nouveau style de vie où l’on retrouve le goût de la simplicité ainsi que la noblesse de la sobriété.
En cette nuit de Noël, réjouissons-nous et rendons grâce d’être rejoint par Dieu en notre petitesse. Avec Jésus, nous la lui offrons en sacrifice de louange. (2015-12-25)
Année C - 4° Dimanche de l'Avent - 20 décembre 2015
Michée 5 1-4; Héb 10 5-10; Lc 1 39-45
Homélie du F.Denis
Voici Noël tout proche. Sur la longue façade de la mairie de Saint Léger Vauban, un ruban de lumière annonce les mots toujours attendus, Joyeuses fêtes. Je vous propose, en suivant les trois lectures, de redire les dons que Dieu nous fait pour notre joie chrétienne. Les soucis contemporains ne sont pas loin. Trois mots vont nous guider, Terre, Fraternité, Dieu.
La Terre.
Aux origines Dieu nous a donné la terre y vivre. A Noël, dans la plus grande discrétion, et quand cette vie n'était plus très claire, la terre se renouvelle : on peut, on doit habiter sur la terre comme au ciel, dit Jésus, le Royaume de Dieu est proche. Après beaucoup d'obstacles, c'est le retour possible à une terre habitable, promettait Michée. Avec le Christ venu habiter cette terre, la promesse est tenue et nous devons aimer la terre, la respecter, l'anoblir en beauté, en fécondité, en accueil pour tous. Difficile travail qui fait appel à notre libre activité. Il faut avoir le courage d'aller jusqu'au bout de son humanité », heureuse formule du théologien Theobald. Elle ne conduit pas au stoïcisme païen:- au pur volontarisme, mais a la coopération avec Dieu. Ne compter que ses seules forces personnelles provoque, on le sait, l'obsession personnelle et la tyrannie politique. Travailler avec Dieu donne, au contraire, une vraie liberté. Pourquoi Dieu, qu'on dit si bon, accepte-t-il tant de malheurs sur la terre des vivants ? Parce que ces malheurs, que Dieu n'a pas voulus, demandent pour être vaincus l'effort conjugué de tous, une conquête pacifique mais soutenue, conquête mot qui veut dire quérir ensemble, une conquête qui permet de vivre dans la Paix de Dieu sur la terre comme au ciel. Nous la désirons, Dieu la veut.
Fraternité.
Il y avait deux femmes, deux cousines qui se visitent. Et je vous dis que ce sont deux sœurs ? Ce sont deux sœurs. Sauf l'âge, elles ont en commun, le même désir de Dieu. C'est bien plus qu'un instinct de deux femmes, l'une et l'autre enceintes, soucieuses de s'aider. Elles savent que l'heure vient, non seulement de l'enfantement, mais du salut du monde. Nous sommes bien sur terre, mais, à cette heure, le plus terrestre qu'est un enfantement devient le plus divin. Regardons ce mot sublime de frère. Certains autres noms utilisés pour dire les relations humaines sont, eux aussi, pleins d'humanité, mais Frères dit beaucoup plus. Ce ne sont pas des camarades, partageant la même chambrée et le même combat, soit armé, soit politique et social. Frères et pas seulement des convives ou des copains, ceux qui ont le même pain, les compagnons. Frères et pas seulement des confrères comme sont les médecins, les notaires. Frère, c'est le vrai nom du moine après sa profession. C'est exactement ce que tout homme devient quand il est baptisé dans sa foi au Christ et quand il 'vient communier au corps eucharistique du Christ. Tous frères? Comment cela est-il possible et que faire? Dans vos diocèses, vous avez des guides qui vous orienteront, ce que les moines n'ont pas mission de faire. Mais moines ou pas, nous sommes tous des frères grâce à Dieu, l'Unique.
L'Unique.
L'Unique dans la Bible et sans cesse dans l'Ancien Testament, c'est le nom réservé à Dieu. A Noël, c'est le nom de Jésus. La Lettre aux Hébreux, des juifs devenus chrétiens, insiste en prenant le point central de notre foi, Jésus en donnant son corps en sacrifice a mis fin à tous les sacrifices pour les péchés. Alors que les Grands Prêtres, chaque année donnaient le pardon des péchés de cette année, Jésus, unique grand Prêtre irremplaçable a tout fait et pour toujours en une seule fois. Jésus est l'Unique sauveur de tous les humains devenus en lui des frères.
Qui donc est Jésus? Noël nous pose la question et nous ne cessons pas de chercher à mieux le connaître. Bonne fête pour le cœur de chacun, bonne fête pour le monde. (2015-12-20)
Année C - 3° dimanche de l’Avent – 13 déc 2015
Soph 3 14-18 ; Phil 4 4-7 ; Lc 3 10-18
Homélie du F.Jean Noël
« On ne parle pas de corde dans la maison d’un pendu », la Sagesse populaire le perçoit : ce serait inconvenant. Alors aujourd’hui, juste un mois, jour pour jour, après le vendredi noir, ce vendredi 13, laisser la liturgie de ce dimanche nous inviter à la joie ? De l’inconscience ? Ou quoi ?
Vous me direz : nos lectures ont été programmées bien avant les évènements ! C’est vrai. Et encore ?
1) Un avertissement solennel de Jésus. C’était à Nazareth, dans la synagogue. Sa première prise de parole publique. Il ouvre le livre, fait la lecture et commente : « La parole, c’est aujourd’hui.. » et l’on sait combien les gens ont été remués ? La Parole, c’et pour nous aujourd’hui. Pour notre « aujourd’hui », comme il est.
2) Sophonie. Ses mots lumineux : la joie de Dieu à cause de nous. La Nôtre à cause de lui. Comment ? dans son aujourd’hui. On le sait plus noir que noir ?
3) Et quand Paul nous dit : Ne vous inquiétez de rien. La joie, toujours. Rendre grâce, toujours !
Ce n’était pas bien au chaud, chez lui, à coté d’une tasse de thé fumant ? Tout simplement il était en prison. Pour combien de temps ? Le savait-il seulement ? La joie quand même !!
4) Et Jean-Baptiste ? Quel discours incongru, dans ce monde impitoyable où la joie, c’était d’être le plus fort, le plus dur, le plus grand, le plus… Là, tout le contraire : pas de violence, pas d’injustice, fuir les intrigues, se contenter de ce que l’on a, partager ses biens, sa nourriture. Le monde à l’envers !
Alors la Joie comment ?
Je reprends la formule de Jésus à propos de la paix.(Paix et joie sont cousines).
La Joie comment ? « La joie pas comme »
La joie, pas comme le monde la donne : joie par exemple de quinzaine commerciale avant Noël : joie paillettes et chocolats. Non pas ça ! La joie de Dieu ne peut venir que de Dieu. «Dieu centre lumineux de fête et de joie » comme dit le pape François dans sa belle lettre sur, justement, « la joie de l’Evangile ». Dès le n° 4, il cite d’ailleurs notre texte de Sophonie « Dieu qui met en nous son allégresse… » ajoutant aussitôt en confidence : « Relire ce texte me remplit de vie ». Oui, « François au milieu des loups » comme titre un livre récent… eh ! Bien la joie quand même !! Mais une fois encore, la joie comment ?
Ces temps-ci, on nous invite beaucoup à veiller. Veiller ! C’est cela. Arrêter de courir toujours, à toujours plus. Se contenter du suffisant. S’arrêter, tendre l’oreille.
Apprendre, par exemple, du pauvre homme du Ps 141 à dépasser sa plainte « Personne qui me connaisse, Personne qui pense à moi, Je suis pauvre et malheureux » Moi, Moi
Apprendre de celui du Ps 39, lui aussi « pauvre et malheureux » à refaire surface d’un vigoureux « Mais Seigneur, pense à moi ».
Nous le savons par les Evangiles, c’était là le secret de Jésus. Souvent il s’arrêtait, tendait l’oreille, priait son Père dans le secret, reprenant pieds fermement sur le roc de la Parole, jamais oubliée : « Tu es mon Fils, bien-aimé », réactivant son bonheur de se savoir ainsi aimé, s’y plombant pour vivre tout ce qui venait, son aujourd’hui, comme il venait.
Aimé divinement, comme il l’était, que pouvait-il craindre ?
Et nous ? Si jamais on ne s’arrête ? Si jamais on ne tend l’oreille ? Bien sûr, c’est plus facile à dire qu’à faire. Je le sais. Mais c’est bien ce à quoi le Pape François ne cesse de nous inviter dans la « joie de l’Evangile ».
On se ferait certainement du bien à le lire, à le relire, un vrai GPS, pour nous diriger, comme le demande la prière d’ouverture : « Pour nous diriger vers la joie d’un si grand mystère ». Essayons voir !! (2015-12-13)
Année C - 8 Décembre 2015 Immaculée Conception
Ouverture de l’année de la miséricorde
Gen 3 9-20;Eph 1 3-12; Lc 1 26-38
Homélie du F.Ghislain
Nous venons d’entendre l’Annonce faite à Marie. Dans son évangile, saint Luc la fait précéder de l’annonce faite à Zacharie, le prêtre de Jérusalem et, par ricochet, à sa femme Elisabeth, et voilà comment il les décrit : « Tous deux étaient justes devant Dieu, et ils suivaient les observances du Seigneur d’une manière irréprochable » (1, 6). Or ces deux personnes qui ont mené une vie de fidélité, qui ont fini par accepter la stérilité de leur foyer, lorsqu’un ange vient leur annoncer que leurs prières ont été exaucées, qu’ils vont enfin avoir un fils et que celui-ci aura un rôle décisif dans l’accomplissement tant attendu des promesses de Dieu à Israël, c’est tellement fort qu’ils ne peuvent pas y croire. Zacharie et Elisabeth sont parfaits dans la Loi, ils se trouvent dépourvus devant la Prophétie !
De Marie, on ne nous dit rien à l’avance, sinon qu’il s’agit d’une jeune fille accordée en mariage à un homme nommé Joseph. Puis, on nous détaille le message de l’ange. D’abord que l’enfant qu’on lui annonce sera le nouveau David, promis dans les Ecritures et jusque là si attendu. Ensuite, en réponse à une question, déconcertante sur les lèvres d’une femme déjà accordée à un homme, l’Ange dit que l’enfant sera conçu du saint Esprit et qu’il sera appelé Fils de Dieu. Et Marie acquiesce, simplement. Peut-être fallait-il l’Immaculée Conception pour que Marie pût donner un consentement si simple à une invitation si immense, démesurée, inattendue. Une situation de pureté intérieure, de familiarité totale et simple avec Dieu, de naïveté sans calcul et de courage d’autant plus fort devant le futur imprévu et imprévisible que cette naissance va amener avec elle,
Aujourd’hui s’ouvre une année de la miséricorde. Dans un monde de violence, d’insécurité, de terrorisme, de crise financière, de replis identitaires… Pour accueillir cette année, il nous faut sans doute doucement, sans discussion inutile, en confiance filiale, retrouver en nous, au-delà même de nos fidélités à la Loi divine, ce petit espace immaculé qui existe, qui existe vraiment, que Dieu n’a pas laissé polluer, dans nos personnes et dans nos communautés. Et dire alors, en communion les uns avec les autres que, devant ce message assez inattendu que Dieu nous adresse par le Pape François, « nous sommes des serviteurs et des servantes ». Chanter le Magnificat. Attendre des merveilles. (2015-12-08)
Année C - 2e dimanche de l'Avent - 6 décembre 2015
Ba 5/1-9, Phil 4-6,8-11, Lc 3/1-6.
Homélie du F.Cyprien
Baruch : Parole de consolation : « Jérusalem, tes enfants rassemblés se réjouissent parce que Dieu se souvient ».
Saint Paul aux Philippiens : satisfaction de l’apôtre qui constate des progrès chez les fidèles ; il les encourage : « Celui qui a commencé en vous un si beau travail continuera jusqu’à son achèvement au jour où viendra le Christ Jésus… ainsi serez-vous saints et irréprochables pour le jour du Christ ».
Avec l’Evangile : Jean-Baptiste, celui qui « court devant ». Sa prédication : se préparer au Jour où tout le monde va devoir rendre des comptes…
« La parole de Dieu fut adressé dans le désert à Jean, fils de Zacharie : « Préparez le chemin du Seigneur ».
Jean-Baptiste annonçait la venue de Jésus, « Emmanuel », Dieu-avec-nous : et nous, nous croyons que Jésus reviendra dans sa gloire de Ressuscité, … apportant le salut définitif, en rassemblant, en récapitulant toute l’histoire… Jésus ressuscité jugeant les vivants et les morts…
Dieu se souvient, dit le prophète Baruch, il se souvient et… Il vient ! Le temps est donné à chaque homme pour préparer sa venue…
Mais combien attendent vraiment, combien préparent vraiment cette venue ?
Si Dieu vient, s’il s’approche, il convient de nous préparer… Ce n’est pas n’importe quelle rencontre, celle qui donnera sens à tout ce qui fait notre existence sur cette terre!
Les premières générations chrétiennes ont pensé que le Messie se faisait attendre....
Mais depuis qu’il est venu … se fait-il attendre ?
S’il tarde, ne serait-ce pas parce que nous ne sommes pas prêts à le recevoir ? Le père Teilhard de Chardin écrit : « le Seigneur Jésus ne viendra vite que si nous l’attendons beaucoup.... »
Faudrait-il avouer alors que nous n’attendons plus rien ? Beaucoup de gens attendent une amélioration de leur vie, ils comptent sur un avenir meilleur.
Face à cela ne trouvez-vous pas qu’il y a assez de catastrophes… depuis Jean-Baptiste et Jésus, pour ne pas admettre que Dieu donne sans cesse les avertissements qu’il donnait déjà avant sa Passion ? « Si vous ne vous convertissez pas, vous périrez tous de même », … à propos de malheureux massacrés par Pilate et d’autres écrasés sous une tour écroulée.
Il faudrait hâter nous-mêmes cette venue par notre ferveur, par notre sainteté, par notre vigilance… « en veillant dans le foi »…
Nous-mêmes, ne pas remettre à la fin des temps cette venue, nous appuyer sur la promesse de Dieu pour vivre.
Notre Seigneur, notre Dieu est Celui qui est, qui était et qui vient : il vient, il vient maintenant.
« Préparez le chemin du Seigneur » : ceci s’adresse à tous et pour toujours… Oui, ce ne sont pas deux millénaires qui feraient que Dieu oublie de venir. Dieu se souvient et il ne peut se laisser enfermer dans notre compréhension des choses et des événements ; Dieu ne se laisse pas enfermer… il vient !
Parce que Lui n’est plus soumis au temps, nous devons penser que ce retour, cette venue du Fils de l’Homme, c’est de tout temps.
Le temps de l’Avent, de « l’Avènement », c’est aujourd’hui, l’aujourd’hui d’une venue et d’une présence qui nous surprend et qui nous surprendra sans cesse.
Dans la foi au Christ ressuscité, ce qui nous permet de vivre tout ça, cela s’appelle l’espérance.
…Trois façons de vivre de la grâce et du pardon de Dieu :
La foi : notre foi se fonde sur le passé où Dieu, bienveillant, s’est révélé.
La charité : la charité donne vie à nos actions dans le présent de l’Amour divin … à la suite de Jésus « qui est passé ici-bas en faisant le bien ».
C’est l’espérance qui nous fait avancer dans la confiance et la persévérance :
= dans la paix que Dieu donne ;
= Bien plus…dans le pardon et la grâce qui viennent de Lui, nous acceptons le chaos de l’histoire humaine ; Dieu nous donne la force de porter cette histoire … nous confions notre avenir dans ses mains de Père. Cet avenir s’identifie peu à peu à celui de Jésus mort et ressuscité. Par de là l’épreuve et la mort, la vie de Dieu/la vie en Dieu nous est promise.
Année jubilaire de la Miséricorde et du pardon : année de foi et de charité, année au moins autant d’espérance, de vie vers Jésus le Christ, car, oui, il vient … Il nous aime et veut nous sauver. (2015-12-06)
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Année B -34e Dimanche ordinaire Fête du Christ Roi - 22 novembre 2015
Daniel 7, 13-14 Apoc. 1, 5-8 Jean 18, 33b-37
Homélie du F.Ghislain
Le 13 novembre dernier, à l’annonce de l’attentat terroriste à Paris, à la description du massacre, des victimes, dans la crainte pour les nôtres, dans la colère, peut-être nous sommes-nous souvenu de l’épisode tragique, insoutenable que raconte Elie Wiesel dans son récit intitulé « La Nuit ». Vous le connaissez sans doute : il s’agit du moment où deux hommes et un enfant sont pendus par les nazis dans le camp de Buchenwald. L’enfant, contrairement aux adultes, n’en finit pas de mourir et Wiesel entend quelqu’un derrière lui demander : « Où est le Bon Dieu, où est-il ? » et une seconde fois : « Où donc est Dieu ? ». Et l’auteur ajoute : « Où Il est ? Le voici – il est pendu ici, à cette potence… »
Où était Dieu le 13 novembre à Paris ? Où était-il la veille à Beyrouth ? Où était-il avant-hier à Bamako ?. Ce ne sont pas des questions académiques, c’est la révolte de nos cœurs. Si Dieu existe, s’il est amour, que fait-il devant nos drames ? Dans les psaumes, nous trouvons plusieurs fois cette injonction : « Dieu, sors de ton silence ! »
Aujourd’hui, fête du Christ-Roi, l’Eglise nous fait regarder Jésus devant Pilate. Il arrive après une nuit sans sommeil, des interrogatoires avec voies de fait par des juges décidés à le perdre. Il arrive, ayant échoué dans sa mission de préparer le peuple et la terre d’Israël à être les prémices et les auteurs du Royaume de Dieu son Père. Il a subi l’hostilité des chefs de ce peuple qui auraient dû être les premiers à l’accueillir et à le seconder. Il a vécu l’instabilité des foules, désireuses de guérison miraculeuse et de victoire sans combat contre leurs oppresseurs. Jusqu’au dernier moment, il avait compté sur le soutien des disciples qui l’avaient suivi, qu’il avait formés, auxquels il avait ouvert son coeur mais qui au dernier moment se sont enfuis, après que l’un d’entre eux ait manigancé son arrestation. Le voici devant Pilate, absolument seul, sachant que rien ne le sauvera du massacre préparé, désiré, obtenu d’ennemis vraiment aveuglés par la haine. Et du coté de Dieu son Père, qu’il avait supplié avec des larmes de sang, rien. Regardons-Le. Ne détournons pas les yeux.« O vous qui passez par le chemin, voyez s’il est douleur semblable à ma douleur »
Pilate cependant dialogue. Dans tous les récits de la Passion, les païens sont subjugués par Jésus. Sa dignité que rien n’altère, son silence, la justesse de ses propos. Encore à ce moment Il continue sa mission, et de sa personne émane la grandeur de celui qui n’est habité que par la vérité. A la fin de son procès, le magistrat romain confessera : « Celui-ci est le roi des Juifs ». Et qui est le roi des juifs, dans la Bible, sinon Dieu : « Dieu règne » disent les psaumes. Après sa mort, le centurion romain confessera : « Celui-ci est le Fils de Dieu ».
Où est Dieu, demandait Elie Wiesel ? Le Fils de Dieu est pendu à nos potences. Il est parmi les morts de Saint Denis et du Bataclan, semblable à eux. Il est présent par son Esprit à tous et chacun des massacrés de la terre, mourant avec ceux qui meurent, souffrant avec ceux qui souffrent, pleurant avec ceux qui pleurent, éveillant les uns et les autres à l’Espérance qui finalement ne déçoit pas. Voilà le Christ-Roi !
Où est Dieu ? Le Fils de Dieu est sur le visage de ceux qui viennent au secours des victimes, se dépensent pour aider, il est sur ceux qui souffrent avec dignité, ceux qui affirment la vie, ceux qui, au fur et à mesure que le drame s’éloigne, continuent à s’occuper de ceux qui ont tant perdu.
Où donc est Dieu ? est-il en ceux qui massacrent, car on les a fanatisés au point qu’ils meurent, eux aussi, en même temps que ceux qu’ils tuent, car on les a persuadés, tels les Croisés d’autrefois, qu’ils plaisent à Dieu en exterminant les impies ? Le Christ n’est pas en eux quand ils massacrent mais, quand on le massacrait, Lui, il disait : ‘Père pardonnez-leur, ils ne savent pas ce qu’ils font ». Le Fils de Dieu est avec ceux qui pardonnent et avec ceux qui sont pardonnés.
Où donc est Dieu ? En nous aussi qui, en ces jours difficiles, essayons de persévérer sur un chemin d’Evangile dans cet hôpital de campagne qui s’appelle l’Eglise. Jésus est notre Roi. ! (2015-11-22)
Année B - 33° Dimanche du Temps Ordinaire - 15 Novembre 2015
Dan 12 1-3; Heb 10 11-18; Mc 13 24-32;
Homélie du F.Denis
Nous allons vers la fin de l'année liturgique, dimanche prochain nous célébrons le Christ Roi et dans quinze jours, c'est le 1 er dimanche de l'Avent. Avent, à venir, ce qui vient: le Royaume de Dieu selon son plan. Sans m'arrêter sur les trois lectures de cette messe, je vous propose de réfléchir sur ce que signifie la messe, toute messe dans cette venue espérée du Royaume. Pourquoi allons-nous à la messe? Vous savez la réponse : nous allons à la messe pour louer Dieu avec le Christ.
Mais, au moment de l'élévation, le prêtre nous fait regarder le Christ, avec les signes de sa mort: dans un grand silence, il montre d'abord l'hostie, puis le calice, d'abord le corps du Christ, puis, le sang du Christ. Le Christ est là présent tel qu'il était quand il meurt. La messe serait-elle un moment de mémoire pour nous souvenir de Jésus mort pour le monde? Bien mieux, elle est un vrai sacrifice agréable à Dieu, mais pas un nouveau sacrifice, elle est le sacrifice unique et définitif de Jésus rendu présent sous nos yeux, pour le salut du monde. Et, à partir de son don total à son Père, total dans sa mort, il nous fait vivre. La messe est un grand moment de vie.
. Expliquons-nous. Et je choisis pour cela un mot qui peut étonner, la messe nous déplace, nous fait marcher, elle donne à notre humanité d'aller loin dans ses possibilités : nous allons regarder, écouter, répondre à une invitation entendue, prendre et donner, échanger la paix avant de manger, oui manger. La messe est un repas qui permet de marcher, d'aller plus loin. On y vient, on en sort plus fort, plein d'allant, capable de nous déplacer encore. Disons que la messe qui est un acte bref nous fait expérimenter trois déplacements majeurs, trois marches :
D'abord, première marche, celle de l'offertoire, vraie procession de quelques-uns d'entre nous et qui nous représentent tous. Ils s'approchent paisiblement de l'autel où le prêtre attend et, incliné, reçoit silencieusement les dons offerts, puis les offre. Nos yeux les suivent, là est notre vie offerte.
Le prêtre lève alors les bras pour chanter Dieu. Ce geste, reprenant les gestes des juifs au Temple, était devenu celui du Christ, du Christ en croix particulièrement. Le prêtre, donc les bras levés, commence alors la grande louange de Dieu, l'Unique et définitif sacrifice de louange qui puisse plaire à Dieu puisque que là est dit l'amour du Père et du Fils.
Seconde marche vers l'autel. Cette fois, c'est pour manger et boire. Oui, manger Pour manger le Corps du Christ. L'acte de la bouche, de la manducation, est la façon la plus naturelle d'assurer une vie durable indispensable et permettant à la vie chrétienne d'être ce que Dieu nous offre : partager sa vie dès la terre. Moment capital, jadis ignoré dans nos paroisses où la communion était donnée et reçue après la messe, sous prétexte de libérer l'autel pour la messe suivante. Non, se déplacer vers l'autel pour communier, dans une fraternité de baptisés, nulle part aussi naturelle et vraie.
Troisième marche. Et c'est pourquoi on dit de la Messe qu'elle est un Mystère. Quel mystère? Ce Pain, le Corps du Christ, ce peu de vin que nous recevons, mais c'est vraiment le sang du Christ, nous font grandir divinement, aux horizons de Dieu.
Le Christ immolé à en mourir a été ressuscité par son Père, et ce que Dieu projette et qu'il nous a dit, par Jésus, dans la prière dominicale, le Notre Père, devient possible: que sur terre comme au ciel son Nom, son règne, sa volonté soient le réel de notre vie quotidienne. Allez, dit donc le prêtre à l'assemblée, demeurez en présence de Dieu et annoncez, par votre vie, vos travaux, votre silence même, que le Royaume de Dieu est proche.
Présence de Dieu dans la messe, force dans nos vies, et dans toute l'humanité, amour fraternel à l'image de l'amour éternel du Père, du Fils de l'Esprit (2015-11-15)