vendredi 3 octobre 2025 : journée de solitude pour la communauté, messe vers 6h45 après Laudes.

Homélies

Liste des Homélies

Homélie du 27 mars 2016 — Dimanche de Pâques — Frère Damase
Cycle : Année C
Info :

Année C - HOMELIE POUR LE JOUR DE PÂQUES - 27 mars 2016

Ac 10, 34a.37-43. Col 3, 1-4. Jn 20, 1-9

Homélie du F.Damase

Texte :

Cette nuit, frères et sœurs, nous avons suivi le regard de Luc nous dévoilant le mystère de la Résurrection

Ce matin, nous suivons le regard de Jean. Trois personnages interviennent : Marie-Madeleine, Pierre et Jean. Marie-Madeleine, d’abord. Seule, elle représente le groupe des femmes qui ont suivi Jésus depuis la Galilée (Mt 27, 55). Madeleine, donc, s’est rendue au tombeau de grand matin. Il fait encore sombre. Elle constate que la pierre a été enlevée, et elle en conclut que le corps du Seigneur a été enlevé. Sans autre vérification, elle court avertir Pierre et Jean. " On a enlevé le Seigneur du tombeau, et nous ne savons pas où on l’a mis ". On a enlevé le Seigneur pour le mettre ailleurs. Qui l’a enlevé ? Où l’a-t-on porté ? Les femmes n’en savent rien. - Il ne vient à l’esprit de personne que Jésus ait pu ressusciter et sortir lui-même du tombeau. Le tombeau vide n’a pas suffi à éveiller chez Madeleine la foi en la résurrection. Son message est purement informatif, une fois délivré à Pierre et à Jean, Madeleine disparaît.

C’est maintenant le tour de Pierre et de Jean d’être confrontés au mystère du tombeau vide. Le récit de l’évangéliste est subtil. Les deux disciples courent, comme courait Madeleine quand elle est venue les trouver. Cette course souligne la hâte qu’ils ont d’apprendre quelque chose d’important. Ils courent, parce qu’ils aiment. L’amour donne des ailes. Mais Jean court plus vite que Pierre : parce que la caractéristique de Jean, c’est la charité. Il est l’évangéliste de l’amour. Il arrive donc le premier, il regarde, voit le linceul demeuré sur place, mais il n’entre pas. La foi n’est pas encore éveillée en lui. Pierre arrive à son tour. Pierre a reçu du Christ la Primauté : il entre le premier. Il voit les linges. Il distingue du linceul le linge qui avait recouvert la tête, et constate que ce linge n’a pas été plié avec le linceul : il est demeuré à sa place. Il n’en tire aucune conséquence.

Jean entre à son tour. Les deux disciples sont donc réunis dans le tombeau, celui qui a la Primauté dans l’Eglise, et celui que Jésus aime, figure du disciple selon son cœur. Jean vit, et il crut. De même qu’il était arrivé le premier, il crut le premier. L’amour est plus rapide que tous les raisonnements. La vocation de Jean est d’avancer dans la connaissance du mystère, puis de se soumettre à l’autorité de Pierre.

– Il en va toujours ainsi dans l’Eglise : les saints et les prophètes reçoivent des lumières du Saint-Esprit pour faire avancer l’Eglise plus vite à la rencontre du Seigneur; mais toutes leurs intuitions seraient vaines si le Successeur de Pierre et les évêques ne venaient les confirmer de leur autorité.

L’évangéliste ne dit pas exactement que Pierre crut aussitôt après Jean. Mais c’est probable, car il ajoute : " Jusque-là, en effet, les disciples n’avaient pas compris que d’après l’Ecriture, il fallait que Jésus ressuscite d’entre les morts ".

– Quant à nous, frères et sœurs, nous accédons à la foi en la Résurrection à travers les signes que nous présente l’Eglise, et en recevant le témoignage des Apôtres qu’elle nous transmet.

Mais chacun de nous suit un itinéraire différent.

Les uns trouvent pour ainsi dire la foi dans leur berceau, d’autres plus tard, après bien des détours et, parfois, des égarements.

Pour les uns, c’est une parole de l’Ecriture, entendue au cours de la liturgie, qui est venue réchauffer leur cœur ; pour les autres, c’est l’exemple d’une vie toute donnée à Dieu qui leur donne envie de suivre Jésus.

Pour tous, c’est la rencontre avec Jésus vivant qui est déterminante.

L’essentiel est que nous parvenions à une foi vive et inébranlable, et que nous soyons, au milieu de nos frères, des témoins fidèles de la Résurrection.

AMEN, ALLELUIA !

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Homélie du 26 mars 2016 — Veillée pascale — Père Abbé Luc
Cycle : Année C
Info :

Année C -VIGILE PASCALE 26.03.2016

Rm 6, 3-11 ; Lc 24,1-12

Homélie du Père Abbé Luc

Texte :

Frères et sœurs,

« Pourquoi cherchez-vous le Vivant parmi les morts ? » demandent les anges aux femmes avec une petite pointe de provocation. Ils ajoutent : « Il est ressuscité, rappelez-vous ce qu’il vous a dit…». On se met volontiers à la place des femmes portant le poids de leur tristesse, et qui restent ébahies, choquées devant le tombeau vide. Elles ne viennent pas chercher un Vivant. Elles se hâtent pour honorer un mort…Aussi quel choc de ne pas le trouver ! Comment dépasser ce constat traumatisant, et arriver à se faire à l’idée que Jésus est ressuscité ? Les anges les entrainent alors à faire mémoire, à se rappeler de tout ce qu’elles ont déjà entendues de la bouche même de Jésus… « Il faut que le Fils de l’homme… ». « Et les femmes se rappelèrent les paroles qu’il avait dites » poursuit le récit.

Se rappeler, faire mémoire pour comprendre l’évènement inouï de la résurrection, c’est ce que nous faisons en cette nuit pascale. Et nous le faisons de différentes manières. Nous avons commencé à faire mémoire avec nos yeux et avec nos pieds. Avec nos yeux, nous avons accueilli le Christ notre Lumière. Lumière et feu qui ne sont plus menaçants comme le feu peut l’être, mais feu disponible sur une colonne de cire pour nous indiquer la route. A la suite du peuple hébreu, nous avons marché dans la pénombre de l’église, derrière la colonne lumineuse qu’est le Christ Ressuscité. Désormais, c’est Lui qui nous montre le chemin. Il ouvre une voie nouvelle à travers les eaux de la mort, comme l’a célébré le chant de l’exultet.

Nous rappeler avec nos oreilles. C’est ce que nous venons de faire en écoutant les lectures, les psaumes et les oraisons. Ainsi nous sommes-nous souvenus non seulement des paroles de Jésus, mais aussi de toute l’histoire entre Dieu et les hommes, depuis la création du monde. Comme les premiers disciples, puis les pères de l’Eglise l’ont fait en leur temps, la liturgie de l’Eglise nous enseigne à mieux comprendre que la résurrection de Jésus n’est pas un évènement bizarre et imprévisible. Au regard de la foi et de l’histoire du peuple juif, la résurrection de Jésus donne sens à la longue relation d’alliance entre Dieu et son peuple. Elle vient illuminer et achever l’œuvre de création, depuis le « Que la lumière soit » jusqu’à nos jours. Et elle nous oriente vers la vie plénière du Christ partagée après notre mort pour l’éternité.

Nous rappeler encore, faire mémoire avec nos mains. Dans quelques instants, nous viendrons tremper nos mains dans l’eau, et faire le signe de la croix sur nous. Ce geste nous rappellera l’eau de notre baptême qui nous a unis à la mort du Christ, pour nous faire resurgir dans la vie avec lui. Désormais, la résurrection n’est plus seulement un évènement extérieur à nous. Elle nous concerne aussi en toute notre existence. Grâce à elle, nous ne sommes plus sous l’emprise fatale de la mort et du péché. La vie et la liberté nous sont offertes comme un chemin à parcourir dès maintenant jusqu’à la vie éternelle. Avec nos mains, il nous revient de renoncer au mal et de travailler à l’œuvre de libération commencée dans nos vies depuis notre baptême, pour nous-mêmes et pour tous ceux qui nous entourent.

Nous rappeler enfin, faire mémoire avec le pain et le vin reçu en nourriture. Comme en un sommet, notre célébration s’achèvera par le mémorial de la vie donnée et livrée de Jésus mort et ressuscité. Toute la vie, et la mort de Jésus prennent sens dans son sacrifice, sacrifice rendu présent sur l’autel en chaque eucharistie. Nourris, nous serons fortifiés par le corps et le sang de Jésus. Ils sont unissent à Lui afin que nous devenions comme Lui donnés à notre Père, et à nos frères et sœurs.

Frères et sœurs, laissons ce soir notre mémoire se dilater et nous rendre plus vivants à la mesure de l’œuvre immense réalisée dans la résurrection du Christ. (2016-03-26)

Homélie du 25 mars 2016 — Vendredi Saint — Père Abbé Luc
Cycle : Année C
Info :

Année C - VENDREDI SAINT 25.03.2016

Is 52, 13 - 53, 12; He 4, 14-16; 5, 7-9; Jn 18, 1 - 19, 42.

Homélie du Père Abbé Luc

Texte :

Frères et sœurs,

Le mal n’a pas de visage, mais il défigure les visages humains. Le visage du serviteur d’Isaïe était si défiguré… qu’il n’avait plus l’apparence d’un fils d’homme. Le visage et le corps de Jésus, soumis aux coups et aux crachats, sont méprisés et traités pour rien. Et comme le suggère le Ps 21, le mal défigure le visage même de ceux qui exercent la violence. Ceux-ci deviennent comme des animaux, le lion, le buffle ou le chien qui rugisse, déchire et aboie.

Jésus accepte de se laisser défigurer, Lui l’image du Père. Il prend sur lui la défiguration que le mal ne cesse d’opérer sur les visages humains, les victimes comme les bourreaux. Aujourd’hui, il connaît la défiguration extrême des personnes victimes des attentats aveugles et absurdes qui leur ôtent tout visage.

Ce soir, notre célébration de la Passion, est un cri d’espérance. Elle nous redit avec force que le mal absurde n’a pas le dernier mot. Depuis les premières paroles du chant du serviteur d’Isaïe, « Mon serviteur réussira, il sera exalté » jusqu’à la communion au Corps du Christ Vivant, en passant par la vénération de la Croix, nous proclamons la victoire sur le mal opérée par Jésus. Sur le bois de la Croix, son visage défiguré n’a cessé de se tourner vers son Père, et de porter vers lui un regard d’amour et de pardon en notre faveur. Avec le psalmiste, Jésus a pu dire : « Mes jours sont dans ta main : délivre-moi des mains hostiles qui s’acharnent. Sur ton serviteur, que s’illumine ta face ». Et son Père a fait resplendir sur lui sa face pour lui donner un visage glorifié et transfiguré, prémices de notre propre visage. Là est notre espérance, en Jésus défiguré et transfiguré, nous recouvrons notre vrai visage d’enfant du Père.

(2016-03-26)

Homélie du 24 mars 2016 — Jeudi Saint — Père Abbé Luc
Cycle : Année C
Info :

Année C - JEUDI SAINT - 24.03.2016 -

Ex 12, 1-8.11-14 ; 1 Co 11,23-26 ; Jn 13, 1-15

Homélie du Père Abbé Luc

Texte :

Frères et sœurs,

Un mot revient dans les trois lectures que nous avons entendues, et parfois plusieurs fois, c’est le mot « faire ». Et le « faire » en question est un commandement. Il s’agit de « faire » pour le Seigneur une fête de pèlerinage en faisant mémoire de la Pâque et de la sortie d’Egypte, ou de « faire mémoire » du pain rompu et de la coupe offerte par Jésus, et enfin de « faire comme Jésus a fait » en lavant les pieds de ses disciples. Retenir ce mot est important, il nous oriente vers un réel engagement. Mais ce serait nous tromper de foncer trop vite dans l’action pour obéir au commandement. Nous risquerions alors de manquer le sens profond du mystère que nous célébrons ce soir et le réduire à la dimension morale, pratique ou rituelle. Si Jésus nous demande de « faire », il nous invite d’abord à « nous laisser faire ». Ce soir, nous le regardons faire et nous l’accueillons ainsi. C’est lui qui agit, comme autrefois, le Seigneur a traversé le pays d’Egypte pour frapper les premiers-nés et pour exercer ses jugements. Jésus agit en nourrissant ses disciples et en leur lavant les pieds. Ce faisant, il donne sens à tout son ministère de prophète, exercé jusqu’alors. Il scelle par le pain rompu et la coupe offerte l’alliance renouvelée entre Dieu et son peuple, alliance qui sera consommée dans son corps livré et dans son sang versé. Dans le lavement des pieds, il manifeste combien sa vie n’a été qu’un service de notre humanité impure et blessée.

Comme le suggère bien, l’évangéliste Jean, Jésus est pleinement maitre de son action. Il ne demande qu’une chose à ses disciples : de le laisser faire et de se laisser faire. Se laisser faire. La réaction de Pierre nous montre combien cela nous est parfois difficile. Autant nous sommes capables de « nous la couler douce » et d’être paresseux, autant en certaines occasions, nous « laisser faire » rencontre l’opposition de notre orgueil, plus ou moins avoué et dissimulé sous de bonnes intentions. Une part en nous peine, voire répugne à être passive, à tout recevoir. Effectivement en ce soir, Jésus nous offre tout gratuitement, sans aucune compensation de notre part, ni aucun mérite. Il donne sa vie, en son corps livré, en son sang versé, et en son engagement total dans le lavement des pieds. Il ne nous demande que de consentir et de nous laisser faire. Il sait ce qu’il fait, et comme les disciples, nous peinons à comprendre. Ce qu’il fait est si radical. Il vient renouveler la vie en ses racines, renouvellement qui éclatera au matin de Pâques. Alors le don de sa vie s’éclairera et jaillira en source de vie, de paix et de joie pour tous. Entre-temps, Jésus va devoir lui aussi se laisser faire. Au moment du dernier repas, s’il a pris les choses en main, c’est pour mieux entrer dans le laisser faire. Il se donne jusqu’à se laisser déposséder de tout, et de lui-même. Il se fait serviteur jusqu’à se livrer au bon plaisir des moqueurs et des violents. Les heures de la Passion, nous révèlent qu’en Jésus, « faire et se laisser faire », c’est tout un. Il est pleinement lui-même et libre, pleinement actif, en acceptant d’être conduit jusqu’à être cloué, impuissant sur une croix. Et au matin de Pâques, nous sera révélé le même mystère : Jésus qui s’est laissé faire jusqu’à remettre à son Père son souffle, permet au Père de le ressusciter. Il se laisse faire, il laisse son Père l’engendrer avec son corps à la vie divine et glorieuse. Désormais en son être de fils ressuscité, Jésus reçoit de son Père une nouvelle capacité d’être et de faire. En son humanité glorifiée, il se fait présent à tous.

Frères et sœurs, réjouissons-nous d’être conviés, en cette célébration de la dernière Cène, ainsi qu’en ces jours saints, à nous laisser faire par Jésus. Laissons-le-nous restaurer aujourd’hui, en notre humanité et en notre dignité de fils. Laissons-le-nous purifier et nous libérer aujourd’hui de nos fardeaux, de tant de peurs, de préjugés, et d’entraves de toute sorte. Nos frères et nos sœurs, à qui les pieds seront lavés, nous représenterons tous dans notre désir d’être plus disponibles et davantage dociles à l’œuvre du Seigneur dans nos vies. Nos mains tendues avec respect, pour recevoir le corps et le sang du Christ, exprimeront la soif de notre terre desséchée ainsi que l’espérance de la vraie vie qui habite notre cœur. Et nous laissant faire vraiment par Jésus, nous apprendrons à faire comme lui, avec lui pour Dieu et pour nos frères…Aimer comme Lui, être miséricordieux comme Lui, servir comme Lui. Laissons-nous faire par Lui pour mieux faire comme Lui. (2016-03-24)

Homélie du 20 mars 2016 — Dimanche des Rameaux — Père Abbé Luc
Cycle : Année C
Info :

Année C - Dimanche des RAMEAUX - 20.03.2016

Is 50, 4-7 ; Ph 2, 6-11 ; Lc 22,14 – 23,56

Homélie du Père Abbé Luc

Texte :

Frères et sœurs,

Comment se fait-il que dans les évangiles, les récits de la Passion de Jésus tiennent une telle place ? Les trois derniers jours sont racontés avec bien plus de détails que les trois ans de son ministère de prédicateur. Et la liturgie de l’Eglise se fait l’écho de cette insistance en nous proposant d’entendre dans une même semaine, deux récits de la Passion, ce dimanche des Rameaux et le Vendredi Saint. Oui, les trois derniers jours de l’existence de Jésus ont une place unique au regard du reste de sa vie. Sa passion librement consentie donne tout son poids et tout son sens à sa vie. Elle nous révèle que le prophète qu’il était ne s’appuyait pas sur ses propres forces, mais sur Dieu. Elle met en lumière ce lien unique que Jésus avait avec Dieu qu’il appelle son Père, dans une familiarité qui n’a pas d’égal. L’évangéliste Luc souligne cela avec force dans les trois invocations que Jésus lance à Dieu : « Père, si tu le veux, éloigne de moi cette coupe ; cependant, que soit faite non pas ma volonté, mais la tienne ». Jésus n’a voulu qu’accomplir la volonté de Dieu son Père, volonté mystérieuse dont la portée apparaitra le matin de Pâques. Seconde invocation : « Père, pardonne-leur : ils ne savent pas ce qu’ils font ». Loin de maudire les hommes qui le font souffrir, Jésus se fait l’intercesseur auprès de Dieu son Père pour qu’il les pardonne. Sa passion devient source de pardon de notre péché. Elle nous libère de l’emprise du mal. 3° invocation : « Père, en tes mains, je remets mon esprit ». Jésus va jusqu’au bout de son don : il s’abandonne totalement à Dieu dans la confiance. Celui-ci le relèvera par la résurrection. Il lui donnera le Nom qui est au-dessus de tout nom.

Frères et sœurs, si l’Eglise nous invite à nous arrêter sur la passion de Jésus, ce n’est pas par goût morbide de la souffrance et de la mort. Elle nous invite à entendre au cœur de la souffrance de Jésus, la force et la flamme de son amour pour Dieu son Père et pour nous les hommes. Dans cet amour, se trouve la source de notre propre vie : Jésus nous libère à jamais de l’emprise du mal. Avec Lui, Jésus nous entraine à traverser nos souffrances et notre mort, dans une même confiance, dans un même abandon au Père. Durant cette semaine sainte, laissons-nous conduire par Jésus, avec lui et en lui, de la mort à la Vie. (2016-03-20)

Homélie du 13 mars 2016 — 5e dim. du Carême — Frère Antoine
Cycle : Année C
Info :

Année C - 5° Dimanche de Carême- 13 Mars 2016

Isaïe 43, 16-21. .. Philippiens 3,8 -14 ... Jean 8,1-11

Homélie du Frère Antoine

Texte :

Frères et Sœurs, cet Evangile commence par une scène empreinte de

paix où Jésus enseigne au temple, mais la paix ne va pas durer! un groupe surgit et présente à Jésus une femme accusée d'adultère et là, tout bascule!

De la paix nous passons à la violence où paroles et silence vont s'affronter.

Paroles coléreuses, Paroles trompeuses, car dit le texte, leur but est de piéger Jésus.

Paroles accusatrices et redoutables leur projet est d'accuser Jésus de ne pas respecter la Loi Mosaïque et leur objet est la mort, .... la mort d'une femme qui selon la loi mérite un tel sort.

Paroles mensongères, desséchée par la sécheresse des lois, et qui dans ce microcosme révèlent toute une face du monde, le monde de toujours .. le monde d'aujourd'hui .. !

En réponse à cette violence se dresse alors un mur .. un mur de silence .. un silence immense ... le silence de Dieu .. le silence de l'amour ..... silence accompagné d'un signe énigmatique, totalement silencieux lui aussi: Même aujourd'hui, nous ne savons pas ce que Jésus a écrit sur le sol, mais ce geste alourdit le silence de Jésus, il est comme un refus de ce Mal dont le masque a pris le visage d'une apparente justice.

«Que celui d'entre vous qui est sans péché, soit le premier à lui jeter une pierre»

Brusquement le silence change alors de camp ... et change de sens ...

«Ils s'en allèrent un par un, en commençant par les plus âgés » ....

Un par un ... ces hommes qui partent lentement, sans un mot, évoquent un défilé, ce long défilé de notre humanité qui, générations après générations, est vaincue par cet ennemi sournois, le péché ... le péché, cette infidélité à l'amour!

« Va, et désormais ne pèche plus! »

Ces paroles achèvent cette rencontre extraordinaire entre Jésus et la femme :

Dès son arrivée, elle est accusée, laissée debout, au centre, tandis que Jésus ... assis, regarde le sol,. Les accusations reprenant, Jésus prend la parole et se baisse à nouveau sans adresser-un- seul- regard à ceux qui lentement partent l'un après l'autre ... Jésus les ignore totalement. ..

Et c'est alors qu'il lève la tête et pour la première fois, la regarde ... il ne la jamais regardée en position de faiblesse .. de condamnée plantée, muette, au milieu de ses juges. C'est une fois la menace disparue qu'il la regarde .... Il la regarde du bas vers le haut et, dans une attitude de serviteur, il lève les yeux, s'adresse à elle ... elle ... debout .. .immobile, toute pénétrée de la miséricorde totale du Fils de Dieu ... ,. tout accueil du pardon reçu et de la Vie retrouvée.

Aujourd'hui, le Seigneur vient nous dire à chacun:

Va, .. tout pardon accueilli engage à suivre l'Unique Loi, la Loi d'amour.

Va ... tout pardon accueilli est un envoi, un envoi à aimer un peu moins mal.

Homélie du 28 février 2016 — 3e dim. du Carême — Frère Jean-Noël
Cycle : Année C
Info :

Année C – 3° dimanche de Carême – 28 Février 2016 –

Ex 5 1-15 ; 1 Co 10 1-12 ; Lc 13 1-9

Homélie du F.Jean-Noël

Texte :

Un bel évangile pour ce dimanche au cœur du Carême de l’année jubilaire de la miséricorde ! Un figuier dans sa vigne. Le vigneron. Un homme.

Donc un figuier dans la vigne. A l’époque, cela faisait bon ménage, tous deux objets de soins jaloux, tous deux riches de symboles. Mais là, un figuier stérile.

En face, un homme. Un homme sans plus. Mais le regard mauvais : je m’en vais couper ça, vite fait. Il ne donne rien.

Troisième partenaire, le vigneron. Un autre regard. Vigneron de ce figuier là. Son figuier. Bien.

Mais qui est ce figuier ? Le figuier c’est nous, tout comme ailleurs nous sommes vigne ayant besoin d’être taillée pour porter du fruit, ou terre ingrate ne donnant rien. Le figuier c’est nous, ne répondant pas à l’attente du vigneron.

Et ce vigneron, c‘est qui ? C’est celui qui ne vit pas pour sa vigne, son figuier, comme le vrai berger pour ses brebis, sa brebis car chacune est unique, on le sait. Il ne ménage pas sa peine. Ô ma vigne ! Ce figuier peut bien épuiser la terre, mais pas la patience de ce vigneron amoureux. Ô mon figuier ! On l’a deviné, ce vigneron, c’est Dieu.

Et cet homme qui s’en vient dire froidement : « Attends voir ! Je vais te couper ça. Vite fait » C’est qui ? Certainement pas un vigneron. Un vrai vigneron ne ferait jamais chose pareille. Tout comme un vrai berger n’abandonnerait sa brebis. Il n’est pas mercenaire lui. Alors qui est cet homme sans entrailles qui n’a pas pitié de ce figuier ? Un figuier qui n’a pas l’air d’être son figuier. Cela ne peut pas être Dieu. Ô ma vigne.. mon figuier.

Voyons cela. Est-ce que ce ne serait pas le même qui disait « Arrache-moi vite cet ivraie ». Le même encore qui après l’accident de la tour de Siloé (18 morts) ou devant le handicap de ce malheureux aveugle-né, soupirait : » ce devait être de bien gros pécheurs ! » Un homme encore, sans entrailles, comme le frère ainé du prodigue voyant d’un mauvais œil l’accueil incroyable que le père fait à son propre à rien de cadet ? Un homme encore de la famille de ce bon Jonas n’admettant pas que le Seigneur ait souci de ces pauvres gens de Ninive ; Tous ces gens là, c’était clair, ne mériteraient pas de vivre. Vite le feu du ciel ! De la famille encore de. ..une famille finalement très nombreuse, tellement que nous en sommes peut être bien, nous aussi :

Quand impatients et durs, nous jouons les justiciers même pour nous aussi des fois. Quand nous désespérons de nous voir si minables. Quand nous ne tenons pas compte du beau cadeau que Dieu nous fait à tous – au dire de st Benoît – en nous ménageant du temps et encore du temps. Quand nous désespérons de sa miséricorde. La chose à ne jamais faire (encore st Benoît). Quand avec nos gros sabots, nous méconnaissons ce qui brûle au cœur de Dieu. Et qu’est-ce dons qui brûle au cœur de Dieu ? C’est notre première lecture :

« J’ai vu, oui, j’ai vue la misère de mon peuple ; j’ai entendu ses cris sous les coups ; oui je connais ses souffrances ; je suis descendu pour le délivrer ! » Ô ma vigne, Ô mon peuple.

Vous allez m’objecter que dans notre Evangile, c’est tout de même bien le vigneron qui dit : « Attends voir un an que je bêche et mette du fumier. Après toi, tu le couperas ». Dans un an, oui, c’est vrai. Mais lui, le vigneron le sait bien : un an renouvelable. « De toujours à toujours » comme dit un Psaume.

La conclusion, je la reçois du Pape François. Ce pourrait être de l’étonnant n° 153 de « La joie de l’Evangile » - un peu long, mais déjà au n° 3, il dit :

J’insiste : Dieu ne se fatigue jamais de pardonner ; c’est nous qui nous fatiguons de demander sa miséricorde »

Cela ne nous dispense quand même pas de nous laisser bêcher, creuser, retourner, approfondir par la Parole de Dieu. Amender. (28-02-2016)

Homélie du 21 février 2016 — 2e dim. du Carême — Frère Cyprien
Cycle : Année C
Info :

Année C 2e dim Carême

Gen 15/5-12,17-18, Phil 3/17-4-1, Lc 9/28b-36.

Homélie du F.Cyprien

Texte :

« Jésus prit avec lui Pierre, Jean et Jacques, et il gravit la montagne pour prier. Pendant qu’il priait, l’aspect de son visage devint autre, et son vêtement devint d’une blancheur éblouissante ».

Dimanche dernier, frère Ghislain, a souligné, à propos de des tentations du Christ comme pour le baptême dans le Jourdain et l’Evangile d’aujourd’hui, que tous les trois mentionnent la prière de Jésus… Cette insistance de saint Luc nous dit quelque chose de l’intimité de Jésus avec Dieu. …Présence de Dieu son Père bien sûr dans la vie et le cœur de Jésus, paroles du Père aussi qui nous révèlent l’identité et la mission du Fils.

Qu’est-ce donc cette transfiguration ? le visage qui change, les vêtements éblouissants…et la présence de Moïse et d’Elie ?

= Saint Luc nous met en face d’une expérience de la catégorie de l’indicible (« les disciples gardèrent le silence et ne rapportèrent rien à personne de ce qu’ils avaient vu » ; quelque chose qui prendra sens plus tard : il y a un peu de la vision du Fils de l’homme du prophète Daniel dans la transfiguration, mais elle annonce surtout le Christ ressuscité et la foi des premiers chrétiens.

= Saint Luc souligne aussi la cohérence de l’événement avec l’histoire du peuple juif. En présence des disciples, autour de Jésus il y a Moïse, c’est la Torah ; avec Elie, ce sont les prophètes.

Au milieu de son Evangile, saint Luc situe l’expérience des trois disciples pour annoncer la suite dans le dessein de Dieu, la mission de Jésus… complément aux trois annonces de sa Passion, alors que Jésus se tourne résolument vers Jérusalem.

« Ils parlaient de son départ qui allait s’accomplir à Jérusalem ».

Le mot « départ » traduit le mot grec « exodos », sortie.

Il s’agit de la mort de Jésus : s’il est question d’Exode, la transfiguration annonce l’Exode définitif où Jésus va délivrer les hommes de la mort, comme avaient été délivrés les Hébreux de la servitude d’Egypte… Exode définitif … à la Cène Jésus accomplit « la nouvelle et éternelle alliance ».

La vision est divinement belle, illumination pour Pierre, Jacques et Jean… Cette vision néanmoins est une promesse; Pierre a voulu la faire durer, il ouvrit la bouche, mais …« il ne savait pas ce qu’il disait » !

Car la voix du Père intervient pour affirmer : « Celui-ci est mon Fils, écoutez-le »… Le message, il est là : Ecoutez-le dans ce qu’il vous dit, écoutez-le dans ce qu’il fait, écoutez-le dans ce qu’il fera… « Ecoutez-le » …marchez à sa suite…

Le départ de Jésus à Jérusalem sera l’Exode, le passage où Dieu intervient pour nous sauver …« à main forte et à bras étendu » : il y mettra le prix, le prix qui est la vie du Fils.

Quand la voix du Père se fit entendre, quand Dieu eut parlé, il n’y eut plus que Jésus seul… Lui allait continuer sa mission, il lui fallait aller vers son exode, vers la vie donnée.

Il n’est pas facile de conformer jusqu’au bout sa vie à l’exemple du Maître. « Beaucoup se conduisent en ennemis de la croix du Christ » disait saint Paul aux Philippiens.

Et le royaume des Cieux, le royaume de Dieu est le royaume des martyrs, eux qui ont lavé leur vêtement dans le sang de l’Agneau, l’agneau pascal, le Christ imité jusqu’au bout.

Cette transfiguration nous concerne parce qu’elle nous montre l’accomplissement des Ecritures, elle nous tourne vers la Gloire, avec l’exigence pour nous de suivre Jésus. Jésus, après Moïse et Elie, nous parle au nom de son Père… Il nous montre le chemin …et « il transformera nos pauvres corps à l’image de son corps glorieux » disait encore saint Paul.

A la suite de Jésus, offrons la vie que nous avons à donner. Le Christ est avec nous ; dans l’intimité avec le Père, nous sommes avec lui, déjà, avant même notre propre exode, le passage vers le Père. (2016-02-21)

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Homélie du 14 février 2016 — 1er dim. du Carême — Frère Ghislain
Cycle : Année C
Info :

Année C - 1er dimanche de Carême

Deut. 26, 4-10 Rom. 10, 8-13 Luc, 4, 1-13

Homélie du F.Ghislain

Texte :

Nous venons d’entendre le récit des tentations de Jésus au désert. Si nous avons bien écouté, nous nous disons peut-être : « Que faire de ce récit démesuré ? » Quarante jours de tentation dans un désert, sans nourriture, sans eau, dans la chaleur pesante du jour et le froid perçant de la nuit, avec des pensées, nous ne savons lesquelles, qui épuisent l’homme ? Ensuite une vision de tous les royaumes de la terre et de leur gloire. Ceci peut-être ne nous tenterait guère aujourd’hui : quand les journaux nous donnent quotidiennement l’état des lieux dans la planète, cela ne nous donne pas tellement envie de rejoindre ceux qui les gouvernent. En était-il autrement au temps de Jésus, que le diable pense l’allécher par la promesse du pouvoir ? Enfin une proposition étrange : on nous parle du sommet du Temple. Disons : les tours de Notre Dame : se jeter en haut pour que les anges nous rattrapent ? Qu’est-ce que tout cela veut dire ?

Retenons d’abord ceci : le récit de la tentation suit immédiatement celui du Baptême de Jésus, où celui-ci, nous dit saint Luc, étant en prière, vit les cieux s’ouvrir et l’Esprit descendre sur Lui, tandis qu’il entendait la voix du Père : Toi, tu es mon Fils bien aimé. Et notre texte continue en disant : Jésus, rempli d’Esprit-Saint…dans l’Esprit fut conduit au désert. Et là, dans le dénuement, il rencontra le diable, le satan, l’Esprit mauvais. Comme si, en la personne de Jésus, se ramassait le combat essentiel : entre l’Esprit de Dieu et l’esprit du mal. - Dimanche prochain, nous entendrons le récit de la Transfiguration : de nouveau, dit le texte, Jésus était en prière et alors, il fut transfiguré, comme devenu totalement lumière, et la même voix qu’au Baptême se fit entendre, adressée cette fois-ci aux disciples : « Celui-ci est mon Fils, celui que j’ai choisi ». Ainsi, le sombre récit de la tentation se situe-t-il entre deux récits de lumière, de filiation et d’Esprit-Saint, comme s’il fallait, comme le dit plus loin saint Luc encore, « que le Christ souffrît et entrât ainsi dans sa gloire ».

Mais pourquoi ? De nouveau, l’évangile nous le dit : quand Jésus a faim après son long jeûne, le diable lui propose : si tu es Fils de Dieu, et Jésus répond : l’homme ne vit pas seulement de pain. Fils de Dieu, homme. Jésus refuse de faire appel à autre chose que sa condition d’homme. Quand on lui offre des royaumes qui le feraient rentrer dans l’idolâtrie, il les refuse car seul Dieu est adorable. Quand on lui suggère de s’appuyer sur sa dignité encore de Fils de Dieu pour présumer des desseins de Dieu à son égard, il refuse. Jésus, un homme dans l’adoration du Père. Dans l’épître aux Philippiens, saint Paul décrit bien son attitude : « Le Christ Jésus, ayant la condition de Dieu, ne retint pas jalousement le rang qui l’égalait à Dieu. Mais il s’est anéantit, prenant la condition de serviteur, devenant semblable aux hommes… », et la suite, que vous connaissez.

Maintenant alors, il me semble que nous pouvons rentrer en scène. Les tentations en question sont les nôtres, à notre mesure, et elles connaissent parfois des paroxysmes : privés de pain, symbole ici de tout le bien-être terrestre que nous pouvons désirer et qui, soudain, nous manque ; attirés par la grandeur, par tout ce qui, dans notre sphère limitée, est pouvoir, autorité, reconnaissance, nous en sommes dépourvus ; ayant fait des projets, pris des risques, en les mesurant trop peut-être à l’aune de nos désirs, nous sommes déçus, parfois presque détruits. – Je pense que, si chacun de nous regarde sa vie, il saura mettre des mots concrets sur ces épreuves, ces tentations, qui rendent la vie dure, parfois à la limite du supportable.

L’évangile nous dit que Jésus, pour affronter ses tentations, avait reçu une plénitude d’Esprit-Saint et que, dans ces tentations, il est demeuré inébranlable dans l’invocation du Père, sans faire appel à aucun privilège que lui aurait donné sa condition de Fils de Dieu. Or, à nous aussi, l’Esprit saint a été donné : au Baptême, et confirmé à ce qu’on appelle précisément la confirmation ; l’invocation de Dieu peut toujours venir sur nos lèvres. Aussi longtemps que la tentation dure ou revienne, l’Esprit souffle et les lèvres du cœur peuvent s’entrouvrir. N’avons-nous pas fait aussi parfois, fugitivement peut-être, cette expérience du souffle et de l’invocation quand nous ne pouvions plus rien d’autre ? C’est peut-être à ce moment-là que nous devenons chrétiens.

Nous entendons tant de choses aujourd’hui sur le mal du monde et la déroute des hommes. Les migrants, qui ont dû tout abandonner, prendre la route, essayer d’entrer dans un pays étrangers ; les populations victimes des combats de chefs qui veulent le pouvoir et l’argent : comme on dit en Afrique : « quand deux éléphants luttent, c’est l’herbe de la terre qui est foulée et écrasée », et tant d’autres lieux et circonstances de tentation, chez nous aussi. Il nous faut prier, beaucoup, souvent, pour que les hommes, les femmes, les enfants tentés semble-t-il au-delà de leurs forces, reçoivent dans le secret de leur cœur, et dans les échanges qu’ils peuvent avoir entre eux, l’Esprit qui est partout dans le monde et peut aller jusqu’au cœur des hommes. Qu’il leur soit donné une assurance intérieure et une invocation silencieuse, celles dont les journaux ne peuvent rendre compte, mais grâce auxquelles ils puissent finalement entendre du Père, la parole qui est à l’intime de ces épreuves et que l’Evangile nous atteste : « Tu es mon Fils ». (2016-02-14)

Homélie du 10 février 2016 — Mercredi des Cendres — Père Abbé Luc
Cycle : Année C
Info :

Année C - Mercredi des CENDRES - 10.02.2016

Jl 2, 12-18 ; 2 Co 5, 20-6, 2 ; Mt 6,1-6, 16-18

Homélie du Père Abbé Luc

Texte :

Frères et Sœurs,

Des lectures entendues, je voudrais retenir une expression : « devenir juste ». Jésus disait à ses disciples : « Ce que vous faites pour devenir des justes, éviter de l’accomplir devant les hommes » ; et Paul affirmait : « Celui qui n’a pas connu le péché, Dieu l’a pour nous identifié au péché, afin qu’en lui nous devenions justes de la justice même de Dieu ». Devenir juste, nous faisons des choses pour cela, et pourtant un seul a fait ce qu’il fallait pour que nous le devenions vraiment : Jésus identifié au péché sur la croix. Oui désormais, en Jésus, nous sommes des justes, et nous ne cessons de le devenir. Depuis notre baptême, nous sommes assurés d’être sauvés, et dans le même temps, cheminant dans l’histoire, nous sommes responsables de ce don qui nous a été fait afin qu’il porte tout son fruit dans notre existence. Nous sommes déjà devenus des justes, et nous ne cessons de le devenir encore.

« Notre entrainement au combat spirituel », vécu durant ce Carême s’inscrit dans ce « déjà » et cet « encore » à venir. A l’invitation de Paul, nous pouvons vivre ce temps comme un temps de grâce. Temps favorable pour reprendre conscience de cette grâce immense qui nous a été faite en Jésus, mort et ressuscité pour nous. C’est la grâce d’un amour immérité totalement gratuit. Entrer en Carême, c’est d’abord ouvrir son cœur. Le prophète Joël parle de le déchirer. Oui, nous tenir devant notre Dieu le cœur ouvert et les mains vides, avec notre seul désir d’être davantage à l’écoute, d’être moins ingrat ou indifférent devant sa bonté dispensée à profusion. Une attitude d’ouverture, d’écoute des Ecritures pour contempler, laisser résonner en nous la beauté et la profondeur de la Miséricorde à nous offerte. Tel est le premier aspect de notre entrainement spirituel : nous tenir ouvert, disponible intérieurement, à l’écoute…du don premier qui nous rend juste.

Laisser Dieu par sa grâce nous justifier aujourd’hui encore. Un second aspect de notre entrainement au combat spirituel, sera d’accueillir ce que l’Esprit nous suggère de mettre en œuvre pour devenir juste. Notre expérience quotidienne nous fait rencontrer le mal en nous-mêmes et autour de nous. La justice de Dieu n’est pas encore pleinement accomplie en nos existences et dans la vie de l’humanité. Ce temps de Carême peut nous apprendre à dire plus en vérité : « Pitié Seigneur, car nous avons péché ». Non pour nous morfondre dans la culpabilité, mais pour ouvrir davantage notre cœur, à la puissance du pardon qui renouvelle en vérité celui qui s’humilie. Ce temps de Carême peut être aussi l’occasion de remettre de l’ordre dans nos vies. Remettre de l’ordre : cela veut dire remettre des priorités dans notre quotidien. Est-ce que la priorité, c’est me servir ou de servir les autres ? Est-ce de me distraire ou bien de me recentrer sur l’essentiel ? Pour nous moine, nous pouvons entendre à la suite de Benoit : est-ce je ne préfère vraiment rien au Christ ? Préférence qui se décline dans le primat de l’office et de la prière, mais aussi dans l’urgence du service du frère, proche ou lointain…

Chacun de nous connaît ces points de fragilité. C’est le moment favorable de les considérer en vérité. Tel un malade qui va vers son médecin, présentons-nous à l’œuvre de grâce de notre Dieu avec confiance. Prenons avec courage les remèdes qu’Il nous indique, le jeûne, la prière plus assidue, le partage plus concret, le service plus désintéressé….

En cette eucharistie, le Christ nous assure de sa grâce déjà offerte, et nous faisons joyeusement un pas vers lui pour l’accueillir et nous mettre en route vers Pâques. (2016-02-10)