Homélies
Liste des Homélies
Année A - 6e dimanche du T.O. -12 Février 2017.
Siracide 15.15–20 — 1•Cor 2.6–10 — Mt 5.17–37
Homélie du F.Sébastien
Frères et sœurs, réjouissons-nous, c’est dimanche, le jour du bonheur qu’il y a à rencontrer le Seigneur, notre Dieu et ses amis.
Les lectures du jour sont exceptionnellement développées, aussi vais-je me limiter à l’admirable première lecture, celle de Ben Sira le sage, un sage juif du 2e siècle avant Jésus-Christ. Je commence un verset avant le découpage officiel de la liturgie, au verset 14, parce qu’il fournit une introduction qui éclaire tout le passage. Dans celui-ci Ben Sira entreprend hardiment de nous conduire au coeur de l’aventure humaine, dès son commencement, avec la question cruciale : comment discerner le bien et le mal, comment choisir pour ne pas se perdre ? On est au cœur de la Bible.?
De quoi s’agit-il ? De la grandeur de l’homme dans sa vocation à la liberté, à la responsabilité, à courir les beaux risques où l’on gagne. Ben Sira focalise notre attention sur le fait que nos vies dépendent constamment de nos choix.
Cela on l’entend dès son premier verset, le verset 14. Je le lis :
Verset 14 – «« Quand, au commencement, le Seigneur a créé l’homme, il l’a remis à sa propre conscience. »
L’homme se trouve alors la dans la solitude de sa conscience, avec pour seul appui la confiance que lui fait son Dieu, « Va, mon garçon ! Je suis là, caché. Mais c’est à toi de grandir par tes actions. »
Ben Sira, l’homme de la Loi de Moïse qui enseigne le bien vivre, ne peut manquer d’enchaîner et de se faire à la fois rassurant et exigeant.
Verset 15 – «Si tu veux, tu peux garder les commandements ; il est en ton pouvoir de rester fidèle. »
Vouloir et pouvoir. On voit la chance et le risque, à en frémir. Mais non, tu as tout ce qu’il te faut. À condition de jouer le jeu de ta vie qui est de faire tes expériences et d’en tirer sagesse quant au bon et au mauvais.
Verset 16 – «Ton Dieu a mis devant toi le feu et l’eau : étends la main vers ce que tu préfères. »
C’est presque de l’humour noir ! mais parfaitement clair. Dans la vie nous faisons constamment des expériences, matérielles, morales, psychologiques… : elles doivent nous apprendre à distinguer le chaud, le froid et leurs effets, sous toutes leurs formes. Ainsi nous voilà remis concrètement aux mains de notre conscience. Et nous arrivons aux enjeux suprêmes ;
Verset 17 – «Vie et mort sont là devant les humains, à chacun sera donné ce qu’il a choisi. »
Choisi. C’est le mot qui clôt la lecture de Ben Sira et ouvre sans le dire sur la valeur suprême qui commande le tout : l’amour, l’amour entre la mort et la vie.
Aimer, c’est choisir et s’enfoncer dans la profondeur de son choix dans la durée. Cette profondeur on l’ignore au moment ou l’on s’engage et on ne peut l’apprendre que par l’expérience, une expérience toujours risquée, d’un risque qui fait sa grandeur, son dynamisme.
Choisi. La conscience d’avoir été choisi est plus importante et plus radicale que celle d’avoir choisi : c’est le socle de l’engagement durable, le fleuron de la confiance, de la foi en l’autre, homme ou Dieu.
Frères et sœurs, je vous laisse à vos choix, pour la joie de Dieu.
(12 février 2017)
Année A -5e dimanche TO (05/02/2017)
(Isaïe 58, 7-10 – Ps 111 – 1 Corinthiens 2,1-5 – Matthieu5, 13-16)
hémlie du F.Jean-Louis
Le vendredi 20 janvier dernier, à l’occasion de l’investiture de Donald Trump comme 45e Président des Etats Unis, le pape François lui écrivait :
«Sous votre direction, puisse la stature de l'Amérique continuer à être mesurée avant tout par son souci pour les pauvres, les exclus et les nécessiteux qui, comme Lazare, se tiennent devant notre porte».
Et il ajoutait : «À une époque où notre famille humaine est assaillie par de graves crises humanitaires exigeant des réponses politiques ambitieuses et unies, je prie pour que vos décisions soient guidées par les riches valeurs spirituelles et éthiques qui ont façonné l'histoire du peuple américain et l'engagement de votre nation à la promotion de la dignité humaine et de la liberté dans le monde entier.
Frères et sœurs, comment ne pas voir la proximité entre cet écrit du pape et la première lecture d’aujourd’hui tirée du livre d’Isaïe :
«Partage ton pain avec celui qui a faim, accueille chez toi les pauvres sans abri, couvre celui que tu verras sans vêtement, ne te dérobe pas à ton semblable».
Tout cela reste bien actuel, malheureusement.
Ne te dérobe pas à ton semblable est peut-être le plus exigeant. Il est parfois plus facile d’aider ceux qui sont loin que ceux qui nous sont tout proches.
Quel est l’enjeu de cette première lecture ? Il s’agit d’être lumière qui se lève dans les ténèbres. Nous rejoignons là l’enseignement du Christ dans l’évangile d’aujourd’hui. Il s’agit également d’être sel de la terre. Non pas bien sûr le sel qui tue le sol, la végétation, mais le sel qui donne du goût, de la saveur aux aliments, à la vie tout simplement.
Les lectures de ce jour sont très cohérentes et nous ouvrent un chemin ou plutôt des chemins. Mais attention, il ne s’agit pas de s’attirer la gloire sur soi. Il ne s’agit pas de se présenter devant Dieu avec son paquet de bonnes actions et de lui réclamer une récompense qu’Il serait obligé de nous donner. Il ne s’agit pas d’entrer dans un marchandage avec Dieu : « Je donne aux pauvres et tu me récompenses. »
Il s’agit d’être lumière pour que Dieu soit glorifié. Et si nous regardons vers la fin de l’évangile de Matthieu, au chapitre 25, lors du Jugement dernier nous voyons qu’il est dit aux justes : « J’avais faim et vous m’avez donné à manger, j’avais soif et vous m’avez donné à boire, j’étais étranger et vous m’avez accueilli. » Et ces justes répondent : « Seigneur, quand t’avons-nous donné à manger, à boire, etc … ? » Ces justes sont récompensés alors qu’ils n’avaient même pas eu conscience d’avoir fait du bien à Dieu, au Christ. Ils étaient dans la gratuité totale.
Se tourner vers les autres donc, mais gratuitement.
Et pour nous aujourd’hui ?
Je reprendrai une phrase de saint Paul dans la seconde lecture : « Parmi vous, je n’ai rien voulu connaître d’autre que Jésus Christ, ce Messie crucifié. »
Je crois qu’il y a d’abord un acte de foi à faire, et qui n’est pas des plus simples. Reconnaître le Christ dans les plus pauvres, les plus difficiles à supporter, ceux ou celles qu’on préfère avoir loin de soi. Réfléchissons un peu et nous verrons sans doute tous et toutes un visage, un nom, un prénom. Ne nous dérobons pas à notre semblable, à nos copains, nos copines, nos collègues …
Ensuite, quelles sont les situations plus ou moins proches qui nous interpellent, qui nous invitent à réagir ? Et comment agir ? Je pense qu’aujourd’hui, avec les interpellations continues du pape et de divers organismes, nous ne pouvons plus dire : « nous ne savions pas ». Il ne s’agit pas de venir au secours de toutes les détresses du monde mais de savoir faire le choix d’aides efficaces et à notre portée. Sans oublier de se laisser enseigner, enrichir par ceux que nous aidons.
Ne cherchons donc pas à gagner des points pour le Paradis mais à venir en aide, à nous laisser aider aussi, car nous sommes parfois des pauvres. Nous pouvons également agir là d’autres que les chrétiens interviennent car nous n’avons pas le monopole de l’action humanitaire. Travailler avec d’autres que nous, c’est aussi rendre témoignage à l’Evangile, être lumière du monde.
Et surtout, tournons-nous vers l’Esprit Saint et laissons-le nous inspirer les gestes quotidiens qui nous illumineront. Il sait faire ! C’est lui qui nous donnera véritablement d’être lumière, d’être sel de la terre, non pas par nos propres forces mais selon sa volonté.
Frères et sœurs, tout à l’heure, avant de communier, nous nous donnerons mutuellement la paix du Christ. Ce n’est pas d’abord un geste convivial sympa, c’est véritablement la paix qui vient du Christ que nous nous transmettrons. Or, il n’y a pas de paix sans justice. Ce geste nous engage. Mettons en œuvre, de façon concrète ce que les lectures, très actuelles, de ce jour nous invitent à vivre : partageons, accueillons, ne nous dérobons pas, … En étant de plus en plus justes dans nos relations, nous transmettrons un peu plus de paix. Ce n’est pas facile. Mais c’est ainsi que nous pourrons accueillir en nos cœurs la vraie paix, celle qui vient du Christ, et la transmettre autour de nous par nos actes qui nous ferons lumière du monde, sel de la terre.
Je terminerai avec une invitation faite à des jeunes en lien aves les lectures de ce jour :
« Donne du goût et de la lumière autour de toi, pas en discours mais en actes. Le Christ compte sur toi. Partage et accueille … et ta vie sera belle ! »
AMEN. (5 février 2017)
Année A - PRESENTATION DU SEIGNEUR -
02.02.2017
Ml 3, 1-4 ; Lc 2, 22-40
Homélie du Père Abbé Luc
Frères et sœurs,
« Portes, levez vos frontons, qu’il entre le roi de gloire ! » avons-nous chanté avec le psaume 23 qui suivait la lecture du livre de Malachie. « Et qui est ce roi de gloire ? » se demande le psalmiste, « c’est le Seigneur, le vaillant des combats, c’est le Seigneur, Dieu de l’univers ». En cette fête de la Présentation, la liturgie nous offre un collier de lectures tirées des Ecritures qui, rapprochées les unes des autres, font jaillir du sens. La venue soudaine du Seigneur dans son temple, pressentie comme purificatrice et redoutable par le prophète Malachie, nous la reconnaissons dans la venue de cet enfant conduit par ses parents pour accomplir le rite de purification habituelle. Avec le psalmiste, nous confessons que c’est vraiment lui «le roi de gloire, le Seigneur, le vaillant des combats, le Seigneur, Dieu de l’univers ».
Ainsi pouvons-nous approfondir le mystère de Noël en cette liturgie. En cet enfant, nous reconnaissons le Seigneur, le Dieu de l’univers qui est chez lui dans son temple. En cet enfant, nous contemplons le Roi de Gloire, lumière qui se révèle aux nations et donne gloire à son peuple Israël. En cet enfant, enfin, nous célébrons le Seigneur, le vaillant des combats qui sera un signe de contradiction jusqu’à sa mort qui purifiera totalement son peuple de ses péchés. En quelque sorte, nous ne cessons d’approfondir le paradoxe de notre foi qui nous fait reconnaitre à travers l’humanité humble et cachée de Jésus, enfant, notre Dieu qui vient à notre rencontre pour nous sauver d’une manière toujours nouvelle.
Dieu vient à nous d’une manière qui déjoue toutes nos attentes. Il ne s’impose pas, il nous surprend pour mieux déjouer nos habitudes et nos forteresses de toutes sortes, conscientes et inconscientes. Nous le savons avec nos têtes, mais comment accueillir jour après jour cette nouveauté incessante, hors de toute catégorie ? Paradoxalement encore, les témoins de cet accueil sans barrière, ne sont pas des jeunes ou des enfants, mais des vieillards, Symeon et Anne. Ces vieillards sont demeurés jeunes. Ils sont restés ouvert à l’Esprit Saint.
Inflexibles dans leur attente de la consolation d’Israël, fidèles dans la prière et le jeûne, ils ont conservé cette jeunesse de cœur qui les laisse prêts à accueillir l’inattendu. C’est peut-être un autre paradoxe, l’inattendu de Dieu respecte la quête patiente de notre humanité. Il vient à la rencontre de notre attente aimante, en travail de recherche, non de notre insouciance ou de notre résignation. N’est-ce pas là la vertu de l’Espérance ? (2 Février 2017)
Année A - Quatrième Dimanche du temps ordinaire
Sophonie 2,3 et 3,12-13 / 1ère Lettre aux Corinthiens 1,26-31 / Evangile selon saint Matthieu 5,1-12a
Homélie du F.Matthieu
Selon l’évangile de Matthieu, dès qu’il rassemble des foules, Jésus fait en quelque sorte son discours programme. Le Sermon sur la montagne rassemble et récapitule l’essentiel de l’Évangile. Les Béatitudes, que nous venons d’entendre, en sont le prologue :
"Alors, ouvrant la bouche, il les enseignait. Il disait : Heureux..."
Le message du Christ commence par l’annonce du bonheur et c’est à juste titre qu’on l’appelle « Bonne Nouvelle ». Et c’est là le premier mot de l’enseignement de Jésus !
Reste que la suite du texte peut déconcerter à juste titre ; le bonheur semble promis à deux catégories de personnes :
- il est d’abord pour "les pauvres de cœur... les doux... les miséricordieux... les cœurs purs... les artisans de paix... " ! Et vient la question : mais alors est-ce bien pour nous ?
- ce bonheur, il semble réservé aussi à "ceux qui pleurent... ceux qui ont faim et soif de la justice... ceux qui sont persécutés pour la justice... ceux qui sont insultés... ceux qui sont calomniés..." ! Mais ce ne sont pas là des situations très désirables et que nous souhaitons pour nous ! Car le bonheur, ce n’est tout de même pas de pleurer ni d’être persécuté... !
Mais attention, regardons de près le texte évangélique ! Les Béatitudes, entendues de plus près, présentent un programme de bonheur, qui n’est pas si paradoxal qu’on le dit d’habitude.
En fait, il faut les lire ces Béatitudes par l’autre bout : quel bonheur Jésus propose-t-il finalement ?
- d’ "être consolés" / de "recevoir la terre en héritage" / d’ "être rassasiés" / d’ "obtenir miséricorde" "de voir Dieu " / d’ "être appelés fils de Dieu" / d’ "avoir en partage le Royaume des cieux" puisque c’est la promesse principale qui encadre le texte !
Pas si mal, non ?
Et cette promesse de bonheur nous rejoint dans les situations les moins enviables, mais qui sont de fait le lot de notre condition humaine, de notre monde devenu bien inhumain depuis la désobéissance… En effet les pleurs, les persécutions, les malheurs de la vie, … les génocides, les guerres saintes affligent l’humanité et matérialisent durement le non-humain qu’il y a encore en l’homme mais Jésus nous dit qu’elles sont surtout en radicale contradiction avec l’Évangile. Le Christ vient nous révéler que, même si nous sommes les victimes de ces malheurs et de cette violence, nous pouvons recevoir en toute chose, et même en cela, le bonheur. Et c’est la force paradoxale de l’Evangile que d’inscrire en nous et pour nous cette promesse, cette espérance.
Rien, ni la persécution, ni la trahison, ni la maladie, ni la solitude, ne peut nous ravir le bonheur d’être avec Dieu, puisqu’il est venu partout où nous pouvons aller, même à la pire souffrance, même à la mort.
Jésus parle des "vrais gens", qui ont de vrais problèmes. Et il leur propose un bonheur qui dépasse les satisfactions immédiates, un bonheur à la mesure de l’être humain créé à l’image de Dieu, créé pour rencontrer Dieu et vivre avec lui. C’est cela "le Royaume des cieux" : la vie avec Dieu !
Cela nous paraît trop grand, trop difficile ? Certes, et il y a des "conditions" à ce bonheur, Jésus nous le redit, il est pour "les pauvres de cœur...les doux...les miséricordieux...les artisans de paix...les cœurs purs..." !
Alors est-ce possible d’être ou au moins de devenir ces gens-là ?
Non bien sûr : en tout cas pas par nos propres efforts !
Les Béatitudes sont en fait le portrait d’un seul homme : Jésus. Mais en Lui, Jésus, il peut devenir aussi le "nôtre"...!
Paul nous le dit, nous l’avons entendu dans la seconde lecture : "C’est grâce à Dieu, en effet, que vous êtes dans le Christ Jésus, lui qui est devenu pour nous sagesse venant de Dieu, justice, sanctification, rédemption".
Il suffit de commencer par le commencement, par la première Béatitude, qui commande toutes les autres : "Heureux les pauvres de cœur..."
Etre pauvre de cœur, c’est ne pas croire que l’on va arriver à la sainteté par ses propres moyens, mais laisser Dieu agir. Se mettre le cœur "en offrande", en réceptacle creux, et vide, pour que le Seigneur puisse l’emplir de tout ce qu’il veut nous donner, c’est-à-dire en fait lui-même. Ainsi recevrons nous la grâce de devenir "pauvres de cœur... doux... miséricordieux... artisans de paix... et de purifier notre cœur" ; ainsi deviendrons nous en vérité "fils de Dieu" : et c’est cela le bonheur !
Ne rêvons pas cependant : il faut toute une vie pour parvenir à cette "pauvreté de cœur", jusqu’au jour où nous devrons renoncer à notre corps lui-même. C’est à ce moment-là seulement que nous pourrons goûter totalement au bonheur promis. En attendant, nous en avons les arrhes. Notre bonheur actuel se fonde tout entier sur notre ouverture au Christ, jour après jour, lui qui est "avec nous jusqu’à la fin des temps". (29 janvier 2017)
ANNEE A –2e DIMANCHE DU TO –15 janvier 2017
Is 49, 3.5-6 – 1 Co 1, 1-3 – Jn 1, 29-34
Homélie du F.Hubert
« Voici l’Agneau de Dieu, qui enlève le péché du monde. »
« J’ai vu l’Esprit descendre du ciel comme une colombe et demeurer sur lui. »
« J’ai vu, et je rends témoignage : c’est lui le Fils de Dieu. »
Chez saint Matthieu, alors que Marie est enceinte, l’ange du Seigneur apparait en songe à Joseph et lui dit :
« Ne crains pas de prendre chez toi Marie, ton épouse, puisque l’enfant qui est engendré en elle vient de l’Esprit Saint ; elle enfantera un fils, et tu lui donneras le nom de Jésus (c’est-à-dire : Le-Seigneur-sauve), car c’est lui qui sauvera son peuple de ses péchés. »
On lui donnera le nom d’Emmanuel, qui se traduit : « Dieu-avec-nous ».
Après le grand portail de son Prologue, Jean l’évangéliste, dans les versets que nous venons d’entendre,
nous dit la même chose autrement.
« Dieu avec nous » :
Jean, le Baptiste, voit Jésus venir vers lui.
Jésus est homme parmi les hommes.
Il marche, il vient, il va. Il rencontre d’autres hommes : ses frères en humanité.
Il est déjà venu, incognito parmi ceux que Jean baptisait dans le Jourdain, en signe de conversion.
Et Jean, alors, a vu : « J’ai vu l’Esprit descendre du ciel comme une colombe et il demeura sur lui. »
« J’ai vu et je rends témoignage : c’est lui le Fils de Dieu. »
Ce Jésus, qui vient vers lui, c’est « le Fils de Dieu », le Fils unique, plein de grâce et de vérité »,
celui qui, étant « dans le sein du Père, nous le fait connaître. »
C’est le Verbe de Dieu, qui s’est fait chair pour habiter parmi nous.
Incarnation de Dieu.
Dieu venant à nous. Dieu devenant homme pour nous faire connaître Dieu.
Et Jean ne le connaissait pas.
C’est par révélation qu’il a connu le mystère du Fils.
Il a entendu la parole de Dieu, il a vu l’Esprit descendre et demeurer sur Jésus.
Alors il témoigne.
Le serpent avait insinué le mensonge dans le cœur de l’homme :
insinué une fausse connaissance de Dieu.
Jean le Baptiste, au contraire, rend témoignage à la lumière et à la vérité :
il est venu baptiser dans l’eau pour que soit manifesté celui qui baptise dans l’Esprit Saint.
Et si celui qui baptise dans l’Esprit Saint est au milieu de nous, si celui-là nous baptise,
alors nous sommes renouvelés, revêtus de l’intérieur, de Dieu-même.
« Voici l’Agneau de Dieu qui enlève le péché du monde »
« C’est lui qui sauvera son peuple de ses péchés. »
Nous n’avons rien à craindre, nous disait sr Anne en conclusion de la retraite :
l’Agneau de Dieu enlève le péché du monde, tout notre mal-être : le mal accompli et le mal subi.
Il prend sur lui, l’Innocent, l’opprobre, la malédiction, il meurt comme le coupable,
pour que tous nous soyons revêtus de son innocence,
revêtus de sa tunique, unique et sans couture, de Fils bien-aimé.
C’est en acceptant d’être immolé que l’Agneau de Dieu enlève le péché du monde, lui enlève son pouvoir mortifère.
L’Agneau de Dieu endosse nos trahisons et nous revêt de sa fidélité.
Rien ne peut nous séparer de cet amour-là.
Le péché, c’est ce qui abîme l’homme, dans sa relation à Dieu, aux autres, à la création, à lui-même.
La grâce, c’est tout ce qui établit l’homme dans la lumière, dans des relations heureuses et fécondes.
C’est ce qui restaure l’homme quand il est abîmé.
Dieu nous crée, il nous crée et nous veut beaux et gracieux.
Puisque nous nous abîmons nous-mêmes, puisque nous nous abîmons les uns les autres, il nous restaure.
C’est cela ôter le péché.
Il nous promet un ciel nouveau et une terre nouvelle où il n’y aura plus de mal.
La Jérusalem céleste n’est plus que lumière,
et sa lumière, c’est précisément l’Agneau, celui qui ôte le péché en le prenant sur lui.
Nous l’avons maudit et lui, il nous a bénis.
Lui, l’Innocent, nous l’avons condamné et rejeté ;
nous, pécheurs, accusateurs, il nous a justifiés et unis à lui.
Il a voulu être baptisé dans l’eau comme nous, pécheurs,
afin de nous baptiser dans l’Esprit et nous établir fils de Dieu à jamais.
« Voici l’Agneau de Dieu, qui enlève le péché du monde. »
Nous allons entendre cette parole au moment de la communion :
ce n’est pas une parole passe-partout, une formule vide :
elle engage la foi de celui qui la proclame, elle invite à la foi ceux et celles qui l’entendent.
C’est à nous, par notre foi, notre amour, de lui donner tout son poids de sens,
de lui laisser porter tout son fruit,
son fruit de paix, la paix qui vient de Dieu, dont parlait la prière d’ouverture et la lecture de saint Paul. (15 janvier 2017)
Année A -EPIPHANIE 08.01.2017
Is 60, 1-6 ; Ep 3,2-3a.5-6 ; Mt 2, 1-12
Homélie du Père Abbé Luc
Frères et soeurs,
Pour ce jour de fête, nos frères Pierre et Gottfried ont ajouté les mages dans la crèche de l’église...Nous aimons retrouver ces personnages hauts en couleur, avec leurs beaux vêtements, leurs présents...Ainsi les a-t-on imaginés à la manière de rois distingués et de races différentes. Ainsi aime-t-on les retrouver chaque année dans les crèches de nos églises...surtout en n’oubliant pas le chameau !
Depuis que Dieu s’est fait chair, les images ont acquis tout leur titre de noblesse pour nous aider à entrer dans le mystère de sa présence si proche et si cachée à la fois...Déjà l’AT ne manquait pas d’essayer d’exprimer l’espérance d’Israël avec des images très concrètes, parfois presqu’exubérantes. Ainsi en ce jour, le prophète Isaïe voit une belle lumière et la gloire du Seigneur qui se lève sur Jérusalem. Il décrit alors Jérusalem qui resplendit à la manière d’une femme radieuse, avec des rois et des nations qui se dirigent vers elle, avec des chameaux, des dromadaires chargés d’or et d’encens. Le prophète veut suggérer par là son espérance du temps qui verra l’unification de tous les peuples autour de Jérusalem pour proclamer les louanges du Seigneur...
Mt dans son évangile reprend ces images bibliques dans le récit que nous venons d’entendre. Il s’insère dans la même espérance du prophète Isaïe. A sa suite, il comprend que la manifestation de Dieu est en train de s’accomplir en ce nouveau-né de la crèche. Ces mages venus d’Orient avec l’or, l’encens et la myrrhe sont les représentants de ces nations annoncées par Isaïe. Dans l’humble naissance de Jésus, Mt le reconnaît le mystère entrevu par Isaïe. Mais le ton est plus sobre. La gloire de Dieu brille d’un éclat caché : seule une étoile fait signe. Et Jérusalem ne semble pas se réjouir complètement à la venue de ses mages. Elle s’inquiète même plutôt qu’un roi soit né, alors qu’on ne l’attendait pas, ou que parmi les personnalités en place on ne l’attendait plus...Mt se fait une autre image de la manifestation de Dieu à toutes les nations. Image plus en nuance qui ne fait pas l’économie de la contradiction et de l’opposition qu’Israël fait au salut de Dieu et que la croix de Jésus mettra en lumière...Il n’est pas encore venu le temps où Jérusalem sera pleinement radieuse et toute entière unifiée pour accueillir les nations et chanter avec elles les louanges du Seigneur...L’espérance est encore en chemin, en attente de son plein accomplissement...Elle devra passer l’épreuve de la croix et de la résurrection du Christ.
Paul à son tour, dira qu’il a eu par révélation la connaissance du mystère du Christ et que ce mystère Dieu l’a manifesté à toutes les nations par l’annonce de l’évangile...Paul se fait une autre image de la révélation du mystère du Christ à toutes les nations : à travers la prédication de l’évangile dont il est un des apôtres fervents, les nations enfin peuvent avoir part à l’héritage d’Israël, et aux promesses de Dieu.
Frères et soeurs, cette fête de la manifestation de Dieu en la crèche nous donne de célébrer la manière avec laquelle Dieu patiemment rejoint les hommes et les fait entrer dans sa vie et dans lumière peu à peu. Et cette oeuvre de salut continue jusqu’à nos jours. Nous continuons d’accueillir le mystère du Christ pour que sa vie triomphe de toutes nos morts, pour que sa lumière vienne illuminer nos faces sombres...pour que sa joie nous habite et habite tous les hommes. Oui, frères et soeurs, cette fête peut-être une belle occasion pour nous demander : quelles sont mes images de Dieu et du déploiement de son salut, de son règne ? Comment j’essaie de reconnaître dans ma vie et dans celle du monde ce mystère à l’oeuvre ? Suis-je accroché à une image tellement élevée que je suis aveugle pour reconnaître Dieu présent déjà à l’oeuvre dans la simplicité des jours, la présence d’un frère ? Les Ecritures nous apprennent à faire dialoguer entre elles nos images de Dieu et de son salut...Laissons-nous enseigner par elles... (8 janvier 2017)
Année A - SAINTE MARIE MERE DE DIEU -
01.01.2017
Nb 6, 22-27 ; Ga 4, 4-7 ; Lc 2, 16-21
Homélie du Père Abbé Luc
Frères et soeurs,
Depuis une semaine, nous célébrons la nativité de Jésus, le Verbe fait chair, la Parole divine venue en notre humanité. Et cette Parole, avant de résonner en des mots humains, va se taire pendant 30 ans…. comme pour mieux prendre toute son épaisseur humaine et charnelle… Et puis pendant 3 ans ce sera le jaillissement prophétique par lequel Jésus va semer largement la Parole… Aujourd’hui, la liturgie de l’Eglise nous propose de regarder Marie sa mère, ou plus exactement de regarder comment Marie a accueilli ce grand mystère… Si Jésus a beaucoup parlé, Lui le Verbe fait chair, en contraste, de Marie, on a conservé très peu de paroles.
L’évangile entendu affirme que Marie « retenait tous ces évènements et les retenait en son cœur »… Marie est un témoin silencieux du mystère qui l’a traversée depuis la parole de l’ange. Mystère qui est venu la bousculer jusqu’en sa propre chair, pour faire d’elle la Mère de Dieu. Mystère d’un enfant comme les autres dont on dit pourtant des choses si différentes des autres enfants. Devant le mystère, Marie médite. Elle fait mémoire, essaie de comprendre toutes les paroles entendues. Marie garde le silence, mais un silence qui est accueil, ouverture, recherche de compréhension. Le silence de Marie s’inscrit dans le consentement initial « Que tout se passe pour moi selon ta Parole ». En donnant sa chair pour que prenne visage d’homme, le Fils du Très Haut, en donnant son temps et son attention pour que grandisse ce petit d’homme Fils de Dieu, Marie devient la Mère de Dieu. Maternité unique et maternité pleine et ordinaire à la fois. La maternité de Marie, qui ne s’arrête pas à la mise au monde de son enfant, va connaitre des périodes de crise, comme en témoignent ses incompréhensions face aux agissements étonnants de son fils dont plusieurs récits évangéliques se font l’écho : « Mon enfant pourquoi nous as-tu fait cela » dit-elle à Jésus resté au temple…La mise au monde de cet enfant, la conduit à entrer dans la mise au jour d’un monde nouveau dont Lui Jésus est le Prince. L’évangile de Jean nous suggère combien Marie, en sa maternité, participe à l’émergence de ce monde nouveau qui prend corps dans la vie des disciples. Lorsqu’elle dit aux serviteurs de Cana, et à tous les serviteurs des noces du Royaume : « Faites tout ce qu’il vous dira », par cette parole d’autorité, elle étend sa maternité à tous ceux veulent se mettre au service de ce Fils Unique, nouvel Epoux… Sur la croix, Jésus lui-même consacrera cette maternité de Marie sur tous les disciples : « Voici ta mère »… La mère de Dieu devient la mère des hommes. Ce matin, rendons grâce à Dieu qui a su conduire Marie en sa vocation de mère, pour faire d’elle la Mère de son Fils, et dans le même temps notre Mère, présence maternelle qui nous nous met au monde, qui nous introduit dans ce monde nouveau dont Jésus est le Seigneur. ( 1 janvier 2017)
Année A - NOËL 2016 Messe du Jour
Hébreux 1, 1-6 Jean 1, 1-18
Homélie du F.Ghislain
Fêter Noël malgré tout. Ne serait-il pas plus juste de dire : Fêter Noël à cause de tout.
A cause de la naissance de Jésus comme elle s’est passée, ainsi que l’Evangile nous l’a rappelé cette nuit. L’occupant romain avait décidé de faire un recensement, sans doute pour avoir un état complet des gens qui paieront l’impôt. L’administration avait prévu que chacun irait s’inscrire dans son lieu d’origine, et voici qu’il y a eu des quantités de gens sur les routes. Dans les villages, les arrivants ne trouvent pas tous à se loger et ce sont évidemment les plus pauvres qui sont laissés dehors. Il a même fallu que les femmes, qui en général ne comptent pas selon le droit romain, se déplacent aussi. Joseph et Marie sont pris dans cet exode. Peut-être cela a-t-il hâté l’accouchement, après la fatigue du voyage et l’impossibilité de s’installer quelque part.
Comment cela s’est-il passé ? Très bien, probablement. Je pense à ce que disait le livre de l’Exode sur les femmes juives, qui sont tellement vigoureuses qu’elles n’ont pas besoin de sages-femmes pour accoucher. On voit d’ici Marie, rassurant Joseph préoccupé de ne pas trouver un endroit convenable : « Ne t’inquiète donc pas, c’est moi que cela regarde et je t’assure que cela se passera très bien ». Et, de fait, l’enfant naît, elle le voit pour la première fois, elle le caresse, elle l’embrasse, elle le lange ; quelque chose s’échange entre elle et lui, au travers des yeux peut-être encore fermés du tout petit. Une naissance bien réussie, une relation déjà forte et qui ne cessera pas. La puissance, la beauté, la douceur de la vie. Et cette expérience belle, Marie la vit sur le fond de la prophétie qu’elle a entendue quelques mois auparavant : ce nouveau-né dans la crèche, ce fils formé de son sang et de sa chair, est « Fils du Très-Haut, promis au trône de David, saint, et on l’appellera Fils de Dieu ». Et voici que des bergers du voisinage s’agglutinent à la porte pour voir l’enfant, car eux aussi ont entendu un message inouï : ce nouveau-né est Sauveur, Messie, Seigneur. Sauf Marie et Joseph, personne ne le sait, et pourtant c’est vrai : le salut est au milieu de la tourmente, et les pauvres s’en aperçoivent.
Les textes de la Messe de Jour disent alors la même chose, mais cette fois-ci, en partant de Dieu et non pas des hommes. En Dieu aussi, il y a une naissance, celle-ci éternelle, et le Fils qui est sans cesse engendré est « reflet resplendissant de la gloire du Père, expression parfaite de son être ». Entièrement distinct et tout semblable, engendré et tourné vers Celui qui l’engendre. Un Esprit commun circule entre eux. Et il a plu à Dieu que cette naissance éternelle déborde en quelque sorte vers ce qui n’est pas encore : dans le Fils éternellement engendré sont créés les mondes et les temps, et le Fils vient en ceux-ci afin de les inclure dans sa relation au Père, dans la circulation de l’Esprit. Et il y vient intensément non à la surface ou en les surplombant, mais comme un homme, en homme : « Tu m’as formé un corps » dit Jésus à son père en entrant dans le monde, au témoignage de la lettre aux Hébreux. Et comme un homme qui va souffrir comme tout le monde, plus que tout le monde : il ne sera pas reçu, il ira jusqu’à la mort. Puis il ressuscitera et sera alors, mais alors seulement, proche de tous et sauveur de chacun.
Voilà pourquoi il faut célébrer Noël. Nous ne pouvons pas regarder le monde présent et surtout les hommes réels, les femmes réelles, les enfants réels qui l’habitent, avec ce cortège insupportable de luttes, de souffrances physique et morale, de tragédies qui englobent des populations entières, comme si Jésus, le Fils du Très-Haut, le Fils de Dieu n’y était pas venu, comme s’il ne demeurait plus parmi nous. En fait, nous le voyons bien, il est notre seule espérance. Qu’est-ce qui maintient le monde, sinon les gens qui, croyant que le bien est plus fort que le mal et qu’il y a donc toujours quelque chose à faire là où on est, se mobilisent, dans la prière d’abord qui met et maintient en contact avec Dieu, et dans l’action, quelle qu’elle soit, avec les autres et pour les autres, afin que la vie soit plus forte ? Et nous, chrétiens, nous croyons ce dynamisme plus fort que le mal vient justement de la présence parmi nous de l’Esprit d’amour et de fraternité que Jésus, qui est venu parmi nous, a vécu, est mort et ressuscité ne cesse d’envoyer aux hommes.
Célébrer la naissance de Jésus, c’est faire triompher en nous l’Espérance alors même qu’il n’y a pas beaucoup de signes positifs dans la manière dont vit le monde. Masi c’est aussi discerner ces signes positifs là où ils se trouvent, au milieu des plus grandes misères. C’est enfin s’engager, là où nous sommes, pour construire une société meilleure. Là où nous sommes : les frères dans cette communauté, les familles auxquelles nous appartenons, les entreprises où nous travaillons ou le chômage que nous subissons, les liens que nous cherchons à créer, les associations auxquelles nous participons. Marie et Joseph ont fait face à la situation à Bethléem. Dieu dans le ciel ne cesse de donner son Fils. En célébrant Noël et en vivant Noël là où nous sommes, nous faisons advenir le salut.
Messe de Minuit - NOEL 2016
Is 9, 1-6 ; Tt 2, 11-14 ; Lc 2, 1-14
Homélie du Père Abbé
Frères et sœurs,
Nos frères Pierre et Gottfried ont réalisé cette année une crèche en forme de hutte, à l’image des abris de fortune que recherchent aujourd’hui encore tant d’hommes et de femmes pour fuir la guerre sur les routes d’exil au Moyen Orient, au Congo Démocratique et jusqu’aux portes de nos sociétés. La paix apportée il y a 2000 ans par « le Prince de la Paix, Père à jamais » trouve encore beaucoup de poches de résistance sur notre terre. Fragile comme un enfant, la paix est malmenée au gré des soubresauts de violence aussi aveugles que fous. Fragile mais tenace, elle continue pourtant de s’offrir à nous comme une promesse et déjà comme un réconfort à qui sait l’accueillir. La fête de Noël qui nous réunit cette nuit veut clamer haut et fort cette espérance de paix qui vient du bout des âges et qui ouvre un avenir possible.
Oui, notre monde n’est pas abandonné à la dérive de toutes ses contradictions. Dieu qui l’a créé en prend soin à sa manière, discrète et respectueuse de notre liberté. Il fait se lever des hommes justes tels Abraham ou des prophètes tels Isaïe qui annonce la grande lumière qui se lève sur le pays de l’ombre et qui prophétise la venue d’un enfant qui affermira le droit et la justice, dès maintenant et pour toujours. Ces hommes sont des lumières pour leur époque traversée par les guerres comme la nôtre, mais aussi des lumières pour cette époque plus lointaine… celle de la venue du Messie, le Christ. Car avec la venue du Christ, c’est Dieu qui s’engage lui-même dans notre histoire. Par son Fils venu dans notre chair, Dieu vient sauver notre monde de l’intérieur. En Jésus petit enfant, puis adolescent, et enfin adulte, il vient renouveler l’être humain en tous les âges de son existence, comme le suggère si bien Irénée de Lyon. Par sa vie enfouie, sans parole, Jésus enseigne tout d’abord la beauté de notre existence acceptée avec ses limites. Comme chacun de nous, il a pris le temps des lentes maturations, celui de la patiente croissance. Voilà la Bonne Nouvelle de l’incarnation du Verbe de Dieu en notre humanité : Jésus en notre chair, nous redit que celle-ci est belle, bonne et digne de grand respect. Mais la Bonne Nouvelle ne s’arrête pas là : Jésus a relevé notre humanité de ses contradictions et de son péché. Sur sa croix, il prend le poids de culpabilité qui pèse sur les consciences. Ce joug est bien plus lourd que celui des tyrans, joug qu’il enlève aujourd’hui encore à travers le sacrement de la réconciliation… Et lorsque Jésus ressuscite, il fait don de sa paix à tous ceux qui croient en lui… pour qu’ils deviennent à leur tour, des instruments de paix… « un peuple ardent à faire le bien ».
Voilà frères et sœurs, la manière avec laquelle Dieu s’y prend pour sauver notre monde de ses errances… Cette manière cachée ouvre au cœur de ceux qui l’accueillent un chemin de profond bonheur, en même temps qu’une grande responsabilité à l’égard de tous. En effet, si nous avons compris combien belle et grande est la paix annoncée par les anges aux bergers de Noël, nous ne pouvons que retrousser les manches pour la communiquer à d’autres. Cette paix source de joie se perdra si elle n’est pas partagée à travers l’accueil du frère et de la soeur, les proches d’abord, les étrangers à l’occasion, les plus pauvres et les différents sûrement. Dieu nous fait cette grande confiance d’être les ambassadeurs de sa paix. Dans quelques instants, avant la communion, cette demande sera exprimée par le prêtre : « Seigneur, Jésus Christ, tu as dit à tes apôtres : ‘Je vous laisse la paix, je vous donne ma paix’. Ne regarde pas nos péchés, mais la foi de ton Eglise ; pour que ta volonté s’accomplisse, donne-lui toujours cette paix…». Au terme de l’eucharistie, l’Eglise consciente de sa faiblesse, demande d’être affermie dans la Paix du Christ. Quand nous ferons le geste de paix, prenons conscience que nous sommes porteurs de paix, la paix du Christ qui ne demande qu’à se répandre sur le monde. Et lors de l’envoi final, recevons avec joie et confiance l’adresse qui nous sera faite : « allez dans la paix du Christ »…sous entendu, allez vers les autres porter la paix du Christ. Dieu compte sur nous. (25 décembre 2016)
Année A - 4ème dimanche de l’Avent, année A, 18 déc. 2016
Is 7 10-16; Rom 1 1-7; Mat 1 18-24
Homélie du F.Bernard
La liturgie de l’Avent opère comme un zoum, au sens photographique du terme. Elle concentre peu-à-peu son objectif sur le mystère de l’incarnation de notre Dieu, que nous allons célébrer à Noël.
Au premier dimanche de l’Avent, elle nous fait considérer le grand prophète de l’Avent, le prophète du VIIIème siècle avant Jésus-Christ, qui est aussi le prophète de l’Exil et du retour de l’Exil, Isaïe. Puis aux 2ème et 3ème dimanches, elle oriente notre regard sur le dernier des prophètes, le Précurseur, Jean le Baptiste. Enfin, en ce 4ème dimanche, elle s’arrête sur le couple directement concerné par l’évènement de Noël, Joseph et Marie.
Un homme et une femme, accordés en mariage, l’un à l’autre. Ils s’aiment certainement d’un amour profond, pour la vie. Ce sont des justes : cela est dit explicitement de Joseph. Ils sont fils et fille d‘ Abraham, le juste, et pleinement soucieux de se conformer à la volonté du Seigneur. Ce sont aussi des pauvres, au sens que les psaumes donnent à ce mot, des pauvres engagés dans le chemin d’humilité que le Seigneur trace pour son peuple.
Mais il y a plus. La liturgie de ce jour nous fait entrer plus avant dans l’intimité même de ce couple : ce qu’il y a de plus secret entre cet homme et cette femme, un secret qu’ils ne peuvent échanger entre eux par des mots. Entre eux, c’est le silence, un silence douloureux aussi, mais un silence qui parle…
Alors l’ange apparait. Entre Joseph et Marie, il y a l’ange. Il s’est adressé d’abord à Marie. L’annonce faite à Marie fait partie de notre mémoire évangélique la plus immédiate. L’annonce faite à Joseph, par contre, nous est peut-être moins familière. Nous venons de l’entendre : Joseph, fils de David, ne crains pas de prendre chez toi Marie, ton épouse : l’enfant engendré en elle vient de l’Esprit Saint. Aux yeux des hommes, tu seras le père de cet enfant, qui par toi sera fils de David. En ta qualité de père, tu lui donneras son nom : Jésus, ce qui veut dire ‘Le Seigneur sauve’, car c’est lui qui sauvera son peuple de ses péchés.
Et l’évangéliste d’ajouter : tout cela pour que s’accomplisse la parole du prophète ‘ Voici que la Vierge concevra et enfantera un fils, auquel on donnera le nom d’Emmanuel, ce qui se traduit Dieu –avec- nous’.
La Vierge concevra et enfantera un fils. Nous avons déjà entendu cette prophétie, dans la première lecture, de la bouche même d’Isaïe. A l’époque du prophète, huit siècles avant Jésus-Christ, de quoi, de qui s’agit-il ? La almah du texte hébreu, ce mot que l’on traduisait anciennement par jeune femme, et que le lectionnaire actuel préfère rendre aujourd’hui par vierge, pourrait être, peut être, à un premier niveau, l’épouse ou la future épouse du roi Achaz auquel s’adresse le prophète. Celui-ci lui annoncerait alors de la part de Dieu, comme signe de sa protection sur son peuple, la naissance d’un enfant royal qui assurera la permanence de la dynastie royale, en un temps de grande détresse pour le royaume de Juda, bien prêt de succomber sous les coups de ses envahisseurs. Ce sera le futur Ezéchias.
Mais une prophétie de la Bible ne s’arrête jamais à son aboutissement immédiat. A mesure que l’histoire progresse, elle se charge de sens messianique, elle annonce le Messie qui doit venir, car il est question de Jésus- Christ dans toutes les Ecritures, la loi de Moïse, les prophètes et les psaumes.
Alors ceux qui ont traduit les Ecritures en grec, au IIIème siècle avant Jésus-Christ, les auteurs de la Septante, ont continué à faire œuvre prophétique, en traduisant très clairement la almah du texte d’Isaïe par le mot grec parthénos, qui signifie Vierge, et c’est cette traduction que reprend l’évangéliste Matthieu.
Pour sa part, saint Paul nous l’a dit aussi dans la 2ème lecture. La Bonne Nouvelle annoncée par les prophètes, ici par Isaïe, concerne le Fils de Dieu, de la race de David selon la chair, établi Fils de Dieu par sa résurrection d’entre les morts, pour le salut de tous. Il est le Oui des promesses de Dieu.
Celui que nous allons accueillir dans quelques jours, celui que Joseph et Marie présentement attendent, c’est le fils de Marie, engendré en elle par l’Esprit Saint. Disposons nos cœurs à l’accueillir, dans la joie, la joie de la cour céleste et de tous les humbles qui viendront se recueillir à la crèche. C’est L’Emmanuel, Dieu-avec-nous, Dieu-en-nous.