vendredi 7 novembre 2025 : journée de solitude pour la communauté
(eucharistie vers 6h45, juste après Laudes). 

Homélies

Liste des Homélies

Homélie du 22 juillet 2018 — 16e dim. ordinaire — Frère Guillaume
Cycle : Année B
Info :

Année B - HOMELIE du 16ème dimanche du TO - 22 juillet 2018

(Jér. 23,1-6 ; Eph. 2,13-18 ; Marc 6,30-34)

Homélie du F.Guillaume

Texte :

Frères et sœurs

Dimanche dernier, dans un passage de l’évangile selon St Marc, précédent celui que nous venons d’entendre, Jésus avait inauguré l’envoi en mission de ses disciples, 2 par 2. Il les exhortait à ne rien emporter avec eux, ni pain, ni sac, ni argent. Il leur demandait seulement de proclamer la Bonne Nouvelle, en invitant leurs auditeurs à la conversion, tout en chassant les démons et en guérissant les malades avec des onctions d’huile.

Aujourd’hui, nous assistons au retour de cette première mission. Les apôtres font un rapport à leur Maître de ce qu’ils ont fait et enseigné. Cela apparaît plutôt comme une réussite et une bonne performance. On s’attendrait alors que leur maître les félicite et les encourage à continuer. Mais non. Jésus se préoccupe avant tout de leur état physique, de leur fatigue. Il sait par expérience ce qu’il en coûte d’efforts pour annoncer l’Evangile. Lui-même a connu la faim, la soif, la fatigue des longues marches à travers la Galilée, la Judée et la Samarie. Il connaît le prix du repos, le bienfait de se mettre à l’écart, dans des endroits déserts, loin des foules avant de reprendre la route. Il sait qu’il faut prendre le temps de s’alimenter, alors même qu’il avait demandé de ne pas prendre de provision de pain, et de compter sur la générosité de ceux qui les accueilleraient.

Un apôtre doit donc veiller à son corps, être en bonne santé. Vous le savez sans doute : la langue anglaise dispose de 2 mots pour exprimer le soin à apporter à une personne. « Cure » vise le soin médical, thérapeutique, en vue de la guérison d’un malade, et c’est de ce soin qu’ont fait preuve avec succès Jésus et ses disciples, mais il y a aussi le « Care » qui est le soin attentif et attentionné à la personne, malade ou non, et c’est également de ce soin-là que fait preuve Jésus à l’égard de ses proches. Un soin que chacun est invité à porter à soi-même : « take care of yourself » comme on se le souhaite couramment.

Si la 1ère partie de notre page d’évangile concerne la relation de Jésus à ses apôtres, la 2nde partie, elle, met en avant la foule. Une foule de gens qui cherchent à approcher Jésus pour le voir, pour l’écouter, pour le toucher. Ce sont des gens affamés, fatigués aussi d’une autre manière, dans l’attente de soin et de pain. L’évangéliste Saint Marc nous dit alors que Jésus fut saisi de compassion envers eux. Un terme très fort en grec « splangma », qui serait mieux traduit par « il fut remué jusqu’aux entrailles », comme le sentiment d’une mère devant la souffrance de son enfant malade. C’est le mot de la miséricorde, dans ce qu’elle a de plus profond et de révélateur de l’Amour de Dieu pour nous. On le trouve dans la parabole du Bon Samaritain qui fut, lui aussi, touché de compassion devant la détresse d’un homme à demi-mort, abandonné au bord de la route par des bandits, tandis qu’un prêtre et un lévite étaient passés sans lui prêter attention, sans cure, sans care, sans cœur…

Face à la détresse de cette foule, comparée à un troupeau de brebis sans berger, la réponse de Jésus sera de lui proposer d’abord un enseignement, et même un long enseignement. Ce ne sera qu’ensuite qu’il pourvoira à leur restauration, par la multiplication des pains. Un épisode que nous aurons dimanche prochain, rapporté dans le IV° évangile.

Saint Marc veut nous faire comprendre ainsi qu’il n’y a pas d’évangélisation sans enseignement, et sans une écoute préalable et longue de la Parole de Jésus. Les apôtres à leur retour de mission rapporte à Jésus ce qu’ils ont fait et ce qu’ils ont enseigné. L’ évangile de Marc ne nous rapporte pas le contenu de ces longs discours, comme on en trouve chez les autres évangélistes : Matthieu, Luc et Jean. Le message de Marc se résume en peu de mots : « Le Royaume de Dieu est arrivé. Il est tout proche de vous. Convertissez-vous et croyez à la Bonne Nouvelle »

Frères et sœurs, ce message et cet appel à la conversion, dans un esprit de foi, sont toujours d’actualité et ils nous concernent chacun personnellement et en église. Les moines, en adoptant la Règle de Saint Benoît en font même l’objet d’un vœu qui les engage jour après jour. Mais ne nous faut-il pas aussi entendre les appels de notre Pape François qu’il adresse à tout homme de bonne volonté, pour une « conversion écologique », dans la mesure où notre terre, notre maison commune est en danger et menacée par une grave crise. Il nous est bon et profitable alors de relire et de méditer l’encyclique : « Laudato Si’ », comme nous le faisons en communauté, ces derniers jours, chaque matin, au chapitre. Et c’est une bonne lecture d’été que nous ne saurions que vous conseiller.

Frères et sœurs, à la différence de Jésus, je ne vais pas trop prolonger cette homélie. Certes, nous aurions pu nous pencher aussi sur les 2 premières lectures. Elles sont en consonance avec l’évangile, dans leurs appels et leur espoir d’une conversion et d’une réconciliation dans le droit, la justice et la paix. Et cela, dans une perspective messianique, en Jésus-Christ.

« Voici venir des jours, où je susciterai pour David un germe juste : il règnera en vrai Roi, il agira avec intelligence, il exercera le droit et la justice » annonce le prophète Jérémie : et Saint Paul de renchérir : « dans le Christ, vous qui étiez autrefois loin, vous êtes devenus proche par son Sang. C’est lui, le Christ, qui est notre paix ; il a détruit le mur de la haine. Il nous a réconciliés avec Dieu, les uns et les autres, en un seul Corps, par le moyen de la Croix. »

Nourris ainsi par la Parole de Dieu, accueillie dans les Saintes Ecritures, nous pouvons nous approcher de la Table de l’Eucharistie et partager le Pain de la Vie et la Coupe du Salut, en faisant mémoire de la Passion et de la Résurrection de Notre Seigneur et Sauveur.

Rendons grâces à Dieu, en ce dimanche où Il nous conduit par un juste chemin pour l’honneur de Son Nom : et que cette grâce et ce bonheur nous accompagnent tous les jours de notre vie.

AMEN - 22 juillet 2018

Homélie du 11 juillet 2018 — Saint Benoît — Père Abbé Luc
Cycle : Année B
Info :

Année B - 11 Juillet 2018 - SAINT BENOIT 2018

Pr 2, 1-9 ; Ps 33 ; Col 3, 12-17 ; Mt 5, 1-12a

Homélie du Père Abbé Luc

Texte :

Frères et sœurs,

Comment connait-on St Benoit, ce « maitre spirituel, pour ceux qui apprennent à servir Dieu » ? Deux textes nous parlent de lui : le premier est tiré des Dialogues de St Grégoire ; il présente sous forme de tableaux, différents épisodes de sa vie. Le second est la Règle que St Benoit a écrite. St Grégoire nous assure que la Règle peut être une bonne manière de connaitre son auteur, tant il n’a pas pu recommander à ses disciples autre chose qu’il n’ait vécu lui-même. Les deux textes contrastent entre eux : le premier fait volontiers appel au genre merveilleux pour souligner des miracles ou des faits étonnants opérés par le Saint. Le second au contraire propose une « toute petite règle pour débutants » espérant offrir des balises pour qui se hâte vers la patrie céleste. La liturgie de cette fête puise à ces deux textes pour proposer à notre méditation et à notre prière les antiennes et les oraisons. Ainsi la belle hymne, « Vivre à Dieu seul », tisse de manière admirable ces deux sources, pour offrir un portrait du saint tout autant qu’un itinéraire pour les disciples…

Spontanément, les moines sont plus à l’aise pour reconnaitre leur maitre à travers la Règle qu’à travers le récit des Dialogues. St Benoit s’y révèle alors de manière cachée. Loin d’attirer les regards sur Lui, il invite chacun à se mettre en marche pour « suivre le seul Maitre dont le joug rende libre », le Christ. Ainsi fêter St Benoit, c’est aussi bien honorer un homme qui s’est laissé travailler par la grâce de Dieu, que revenir à la source du chemin qu’il propose.

Quand St Benoit invite le moine à se mettre volontiers à l’écoute, pour y entendre la voix d’un père qui appelle et qui aime, il nous invite à sa suite, à revenir avec confiance vers le Christ qui nous a aimés, sanctifiés. Nous sommes toujours précédés par l’Amour du Christ.

Quand St Benoit propose au moine de chercher Dieu, sans se laisser effrayer par les difficultés, ni décourager par les humiliations ou les adversités, il nous entraine à la suite de tous les chercheurs de trésors dont les Ecritures portent le témoignage. Il s’agit de creuser avec constance, et de nous laisser creuser avec confiance pour « comprendre la crainte de Dieu et découvrir la connaissance de Dieu ».

Lorsque St Benoit invite se moines à ne rien préférer à l’amour du Christ et à ne rien préférer à l’œuvre de Dieu, il désire nous faire vivre de cette grâce décrite par Paul : « tout ce que vous dites, tout ce que vous faites, que ce soit toujours au nom du Seigneur Jésus, en offrant par lui votre action de grâce à Dieu le Père ». Notre vie trouve son unité et sa joie dans la louange reconnaissante.

Lorsque St Benoit nous entraine sur le chemin de l’humilité, sur cette mystérieuse échelle sur laquelle on monte en descendant, ne veut-il pas nous partager le bonheur des béatitudes qu’il a entrevu lui-même : le bonheur des pauvres de cœurs, des doux, des miséricordieux, de ceux qui pleurent et qui sont persécutés pour la justice. Ici St Benoit nous livre peut-être le secret de son expérience la plus profonde : à travers les contradictions ou les oppositions, par l’humilité et la patience le moine suit Jésus et découvre l’amour qui chasse la crainte.

Enfin inséparable de l’expérience de l’humilité, quand St Benoit exhorte ses moines à vivre l’obéissance mutuelle dans le support des infirmités physiques et morales, sans chercher son propre intérêt, il désire les faire entrer dans la grâce de ceux qui se revêtent « de tendresse et de compassion, de bonté, d’humilité et de douceur et de patience ». La charité fraternelle, manteau reçu du Christ, et dont il nous faut sans cesse nous revêtir, nous éprouve au même moment où elle nous édifie, dans la recherche du bien de tous.

Ce matin, en rendant grâce à Dieu de nous avoir donné St Benoit comme maitre spirituel, nous le prions qu’il garde heureux de chercher et de chercher encore sans nous lasser, à unifier notre vie sous son regard, afin que le Christ nous conduise tous ensemble à la vie éternelle. - 11 Juillet 2018

Homélie du 08 juillet 2018 — 14e dim. ordinaire — Frère Jean-Louis
Cycle : Année B
Info :

Année B - 14e dimanche Ordinaire - (08/07/2018)

(Ézékiel 2, 2-5 – Ps 122 – 2 Corinthiens 12,7-10 – Marc 6, 1-6)

Homélie du F.Jean-Louis

Texte :

Frères et sœurs, les lectures de ce dimanche sont tout sauf une propagande triomphaliste pour Dieu et ses envoyés.

D’Ézékiel au Christ en passant par saint Paul, il ne s’agit pas de super-héros à qui tout réussirait mais de personnes fragiles confrontées à des obstacles, parfois intérieurs, et dont le succès n’est pas éclatant, il faut bien le reconnaître.

Ézékiel n’a pas la tâche facile. Il est envoyé vers un peuple, le peuple d’Israël, le peuple de Dieu. Or même Dieu n’en est pas maître tant il se rebelle. On a même l’impression que Dieu est désabusé « qu’ils écoutent ou qu’ils n’écoutent pas – c’est une engeance de rebelles ». Aucune garantie n’est donnée au malheureux prophète sinon celle-ci : en proclamant « Ainsi parle le Seigneur » Ézékiel se fera connaître comme prophète, envoyé pour parler au nom de Dieu. Reste au peuple la liberté de l’écouter ou non. Fragilité de l’envoyé du Seigneur à qui rien n’est garanti, sinon qu’il est envoyé par le Seigneur, ce qui est l’essentiel.

Quant au Christ, là aussi, il n’y a aucun triomphalisme, bien au contraire. On peut dire que son ministère échoue dans son lieu d’origine, dans le village où il a grandi. A croire qu’il n’y a pas laissé un souvenir extraordinaire. Au contraire, le souvenir qu’il a laissé est sans doute trop ordinaire pour que ses compatriotes le reconnaissent comme envoyé par Dieu. On peut être quand même étonné, nous qui, parfois, pouvons être si avides de miracles pour conforter notre foi. En effet, les concitoyens du Christ, qui, eux, connaissent ses miracles, sont pourtant choqués, loin de croire en lui. Il est vrai que « nul n’est prophète en son pays » mais quand même … En tout cas, le ministère du Christ tourne court chez lui et c’est dans les alentours qu’il se décide à aller enseigner, car annoncer le Royaume de Dieu le brûle. Aucun reproche du Christ à ses compatriotes. Mais ce refus annonce un autre refus, plus radical, qui conduira le Christ à la croix.

Saint Paul, lui, qui a reçu des révélations extraordinaires, doit constater néanmoins sa faiblesse, sa fragilité qui l’abandonnent totalement au Christ et à sa grâce. Là aussi, il n’est pas question de triompher. Ses révélations ne lui donnent aucune puissance, aucune force particulière. Nous sommes loin des contes de fées ou de la magie.

Frères et sœurs, à une époque où nous pouvons nous sentir parfois bien fragilisés dans notre foi ou dans notre désir d’annoncer le Christ, ces lectures ont sans doute beaucoup à nous dire.

Nous en avons parfois fait l’expérience, il peut être plus difficile de témoigner du Christ et de son message auprès de nos proches, dans nos familles, auprès de ceux qui nous connaissent bien. Cela peut nous troubler comme cela a troublé le Christ. Il n’a pas eu la vie plus facile que nous. Sa parole et même ses miracles n’ont pas été reçus par ceux qui l’avaient vu grandir de leurs yeux.



Le prophète Ezékiel, lui non plus, n’a pas eu la vie facile. Et Dieu lui-même l’a prévenu combien ses auditeurs, pourtant proches de lui, pouvaient être durs d’oreille. Faut-il nous étonner qu’il en soit encore de même aujourd’hui ? Le message évangélique n’a rien d’évident et il prend à rebours bien des sensibilités, bien des dogmes de notre société.

Saint Paul, lui, nous donne peut-être la clé pour nous aider à garder confiance. Lui qui a fait une expérience spirituelle unique, se retrouve presque paralysé par cette écharde dans la chair qui reste mystérieuse car l’essentiel n’est pas de la connaître. L’essentiel, et Paul nous le dit sans hésitation, c’est la grâce du Christ qui seule peut venir en aide à sa faiblesse, à nos faiblesses. Paul ira jusqu’à dire : « lorsque je suis faible, c’est alors que je suis fort » car il accepte cette faiblesse pour le Christ. Avouons que cela ne correspond pas aux mentalités d’aujourd’hui. Avouons que nous peinons à nous confier au Christ à ce point.

Nous sommes certainement tous plein de bonne volonté et nous souhaitons un monde où règne l’évangile. Où tout le monde serait à l’écoute du message du Christ qui nous aide tant à vivre. Peut-être aimerions-nous être mieux entendus, mieux compris. Mais il n’en est pas ainsi comme pour le Christ, et, avant lui, pour le prophète Ezékiel ou saint Paul.

Il ne nous reste que la grâce du Christ, mais c’est sans doute là l’essentiel. Chaque fois que nous tenterons de posséder le message du Christ pour nous en faire le propriétaire et essayer d’être le plus performants possible, nous risquons fort d’échouer car, sans doute inconsciemment, nous essayons de faire mieux que le Christ. L’Eglise a pu croire que, par sa force, sa puissance intellectuelle, culturelle voire politique, elle pourrait amener tout le monde à croire au Christ. Elle a pu croire en la réussite de son projet mais force est de constater aujourd’hui qu’il y a bien du chemin à faire. Peut-être nous faut-il réaliser que c’est Dieu qui est le maître de l’histoire, y compris de l’histoire de l’annonce de l’évangile.

Confions donc au Seigneur le soin de travailler les cœurs, essayons, nous-mêmes, d’être des témoins authentiques. Le pape François nous donne beaucoup d’exemples bien concrets à ce sujet. Rappelons-nous que le Christ a bien peiné. Le serviteur n’est pas plus grand que son Maître. Nous pourrions alors avoir d’heureuses surprises et réaliser combien le Seigneur peut réaliser de belles choses dans le cœur des gens, bien plus que nos stratégies et nos efforts calculés. AMEN - 8 juillet 2018

Homélie du 01 juillet 2018 — 13e dim. ordinaire — Frère Ghislain
Cycle : Année B
Info :

Année B - 13e dimanche du Temps Ordinaire - 1° juillet 2018

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Sag. 1,13-15; 2, 23_24. 2 Cor. 8, 7,9, 13-15.

Marc 5, 21-43

Homélie du F.Ghislain

Texte :

La lecture de l’évangile que nous venons d’entendre peut nous conduire à nous poser deux questions très concrètes et à essayer d’y répondre. Ces questions sont : pourquoi sommes-nous venus à l’Eucharistie ce dimanche ? qu’est-ce que nous ferons dans la semaine qui vient ?

Aussi bien la femme malade que le chef de la synagogue sont venus pour avoir la vie : la santé au lieu d’une maladie inguérissable qui, depuis des années, gâte l’existence ; la santé au lieu d’une maladie infantile contre laquelle on ne peut rien et qui va priver la famille d’un enfant aimé. Voilà ce qu’on désire : la vie plus forte que la mort. La femme malade, qui croit pourtant et espère la guérison, a peur du contact direct, face à face. Elle vient par derrière, elle touche le vêtement du Christ, et ô miracle, çà marche : elle est guérie. Pourtant, les choses ne peuvent en rester là ; la puissance de Jésus n’est pas magique, et le Seigneur provoque un dialogue. Le chef de la synagogue, lui, risque la parole : il parle, il parle, il dit que sa fille en est à sa fin, il dit à Jésus quoi faire : venir chez lui et imposer la main à l’enfant. C’est urgent et voici qu’au milieu de son discours, on lui envoie dire : trop tard, ta fille est morte. C’est l’effondrement. Là, il faut alors une parole de Jésus qui assure de donner plus que l’homme n’aurait osé demander : non pas la guérison d’une fillette encore vivante, mais la résurrection d’une enfant morte.

La femme malade, le père désespéré, - deux figures de l’homme en perte de vie qui vient à celui qui est la voie, la vérité et la vie. Cet homme en perte qui vient à Jésus, qui est-ce aujourd’hui ? la communauté concrète que nous sommes ici et maintenant, chacun avec le lot de ses désirs, de ses impuissances, de ses frustrations : nous les mettons ensemble, nous en dirons quelques-unes au Christ en en mentionnant d’autres à la prière universelle, - je pense que nous pouvons ici penser à Francette Bon-Mardion, fidèle à la rencontre annuelle des Pingouins et aujourd’hui proche d’une opération sérieuse - . Nous comprenons bien que, finalement, nous sommes ici au niveau de tous les hommes. Nous venons demander à Jésus la vie, sous toutes ses formes, nous nous approchons, pas seulement de sa tunique, mais de son corps et de son sang, car il nous a lui-même invités : « qui mange ma chair et boit mon sang aura la vie éternelle ». Et nous croyons à l’immensité des libérations, qui s’opèrent dans le monde en réponse à nos supplications : elles sont certes la inconnues et cachées, mais qui, dans le monde romain du temps de Jésus, a connu les guérisons dont nous parle l’évangile ? Voilà pourquoi nous sommes ici : demander et obtenir la vie : pour tous, pour nous, pour moi, grâce au corps du Christ et quelles que soient les apparences contraires.

Une question pourrait encore venir à notre esprit, qui nous aiderait à recevoir de manière plus personnelle le message de cet évangile: "et après?" Quand la femme a quitté Jésus, où est-elle allée? qu'a-t-elle fait? La petite fille qui a été ressuscitée, qu'est-elle devenue, et ses parents, témoins et bénéficiaires sur leur enfant de la Puissance de Jésus, comment ont-ils continué de vivre, dans leur village et dans leur entourage, avec cette enfant du miracle? Nous savons, du moins, ce qui est advenu aux disciples choisis: à la Transfiguration, ils ont encore été les témoins de la Puissance de Dieu, à l'Agonie, en revanche, ils ont vu sa faiblesse, et ils n'ont pu supporter ni l'une ni l'autre; il aura fallu que l'Esprit descende sur eux pour qu'ils soient transformés, qu'ils comprennent enfin ce qu'ils avaient vécu et qu'ils en témoignent alors, eux aussi, dans la puissance et dans la faiblesse. Sans doute pouvons-nous imaginer qu'il en a été de même des autres protagonistes: si privilégié qu'ait été ce moment particulier de leur existence où ils ont touché Jésus ou été touchés par Lui, ils ont sans doute, chacun à sa manière, accompli le périple de Celui qui les avait sauvés: de la Gloire à l'humiliation et encore à la Gloire.

Il nous faut peut-être alors essayer de ne pas laisser perdre cette grande diversité de personnes, d'attitudes, - pour nous demander, d'une manière très personnelle: où suis-je là-dedans? à qui puis-je m'identifier? à laquelle de ces relations avec le Christ correspond la mienne? où est ma force et où ma faiblesse? Et à quel Christ est-ce que je m'adresse: à l'homme étonné à qui on dérobe en quelque sorte sa Puissance, au Maître qui semble dominer la vie et la mort? Sans doute une telle identification n'est-elle pas possible une fois pour toutes, mais aujourd'hui: qui est mon Seigneur et comment est-ce que je me réfère à lui avec les autres et au nom de tous ? Et qu’est-ce que, avec d’autres proches, mais aussi avec les lointains, je vais pouvoir être et faire pour que la Vie jaillisse et qu’elle jaillisse en abondance ? Que l’Esprit de Jésus nous éclaire et nous pousse dans la semaine qui vient en vertu de la force évangélique reçue aujourd’hui.

1° Juillet 2018

Homélie du 24 juin 2018 — Saint Jean-Baptiste — Frère Hubert
Cycle : Année B
Info :

année B - 24 juin 2018 SOLENNITE DE ST JEAN-BAPTISTE

Is 49 1-6; Ac 13 22-26; Luc 1 57-66 80

Homélie du f. Hubert

Texte :

Depuis les premiers siècles donc, les chrétiens ont célébré la naissance de Jean-Baptiste,

cet homme à la place si particulière dans l’histoire du salut,

à la jointure de l’Ancienne et de la Nouvelle Alliances.

Que sera cet enfant dont la conception et la naissance sont marquées par tant de surprises,

dont le nom nouveau, qui tranche sur la coutume familiale, signifie « Dieu fait grâce » ?

Dieu, en effet, va faire grâce au-delà de toute mesure,

au-delà de tout ce que l’homme pouvait imaginer.

Dieu va faire grâce en prenant la condition de ceux qu’il vient sauver,

en prenant sur lui tout le poids du mal qui affecte nos vies,

en faisant de nous des fils dans le Fils devenu homme.

Jean est la voix annonciatrice de Celui qui vient : l’unique Sauveur.

Et pourtant, ce Sauveur va se manifester parfaitement autre que ce que JB attendait.

Qui pouvait s’attendre à ce que Dieu se fasse homme,

à ce que Dieu, non seulement, pardonne au pécheur qui se convertit,

mais « enlève le péché du monde », en prenne sur lui toutes les conséquences ?

Voici l’Agneau de Dieu, qui enlève le péché du monde.

Toute la vie et la mission de Jean-Baptiste sont dans cette parole.

Jean est celui qui désigne le Christ.

Pour cette mission, il sera « rempli d’Esprit Saint dès le sein de sa mère ».

Par révélation, il désigne celui qui est plus grand que lui :

Celui qui m’a envoyé baptiser dans l’eau m’a dit :

“Celui sur qui tu verras l’Esprit descendre et demeurer, celui-là baptise dans l’Esprit Saint.”

Moi, j’ai vu, et je rends témoignage : c’est lui le Fils de Dieu.

Humblement, il témoigne : « Je ne suis pas le Messie. »

Moi, je vous baptise dans l’eau, en vue de la conversion.

Mais celui qui vient derrière moi est plus fort que moi,

et je ne suis pas digne de lui retirer ses sandales.

Lui vous baptisera dans l’Esprit Saint et le feu. »

Avant même de naître, il le reconnaît, caché dans le sein de sa mère,

tressaillant d’allégresse aux paroles de Marie.

Pourtant, dans l’évangile de Jean, il dira : Moi, je ne le connaissais pas.

Le ministère public de Jésus le mettra à l’épreuve ; il enverra lui dire :

« Es-tu celui qui doit venir, ou devons-nous en attendre un autre ? »

Jean est étonné, troublé même.

Jésus en effet n’agit pas comme il l’envisageait, lui qui disait :

« Engeance de vipères ! Qui vous a appris à fuir la colère qui vient ?

Produisez un fruit digne de la conversion. .[…]

Déjà la cognée se trouve à la racine des arbres :

tout arbre qui ne produit pas de bons fruits va être coupé et jeté au feu. »

Vivant au désert, il invitait ses contemporains à se convertir,

à se détourner de ce qui les détournait du Dieu de l’Alliance, du Dieu de leurs pères,

du Dieu vivant.

Mais il ne pouvait envisager que Dieu se tourne vers l’homme jusqu’à se solidariser avec le pécheur.

Quand Jésus vient pour être baptisé par lui,

Jean voulait l’en empêcher et disait :

« C’est moi qui ai besoin d’être baptisé par toi, et c’est toi qui viens à moi ! »

Mais Jésus lui répondit :

« Laisse faire pour le moment, car il convient que nous accomplissions ainsi toute justice. »

Jésus se fait baptiser comme un pécheur.

Jean a sûrement fait là une expérience fondatrice.

Elle lui permettra de dire à ses propres disciples :

Voici l’Agneau de Dieu, qui enlève le péché du monde.

et de les laisser partir à sa suite, librement, avec la joie qui monte au cœur de l’ami de l’époux.

Voici l’Agneau de Dieu, qui enlève le péché du monde ;

Moi, je ne suis pas le Christ, mais j’ai été envoyé devant lui.

J’ai vu l’Esprit descendre du ciel comme une colombe et il demeura sur lui.

Et moi, je ne le connaissais pas, mais celui qui m’a envoyé baptiser dans l’eau m’a dit :

“Celui sur qui tu verras l’Esprit descendre et demeurer, celui-là baptise dans l’Esprit Saint.”

Moi, j’ai vu, et je rends témoignage : c’est lui le Fils de Dieu.

Celui à qui l’épouse appartient, c’est l’époux ;

quant à l’ami de l’époux, il se tient là, il entend la voix de l’époux, et il en est tout joyeux.

Telle est ma joie : elle est parfaite.

Lui, il faut qu’il grandisse ; et moi, que je diminue.

Frères et sœurs, celui qui est plus fort et plus grand que nous, celui que nous connaissons si peu,

celui qui ne cessera pas de nous étonner,

celui qui est la nouveauté absolue, la vie jaillissant de la mort,

la sainteté victorieuse du péché,

se tient au milieu de nous

et se donne à nous en nourriture dans sa parole et dans le pain consacré par le don de sa vie. Puisse-t-il grandir en nous et nous transformer en lui ! Que notre joie, en lui, soit parfaite !

Puissions-nous faire cette expérience fondatrice de la miséricorde de Dieu,

pour pouvoir à notre tour dire en vérité à nos frères :

« Voici l’Agneau de Dieu, qui enlève le péché du monde. » - 24 juin 2018

Homélie du 17 juin 2018 — 11e dim. ordinaire — Frère Cyprien
Cycle : Année B
Info :

Année B 11e dim du Temps Ordinaire - 17 juin 2018

Ez 17/22-24, 2Co 5/6-10, Mc 4/26-34.

Homélie du F.Cyprien

Texte :

Il y eut en 1999 une tempête qui fit beaucoup de dégats en France et aussi autour du monastère. Au fond du parc, près d’un petit ruisseau, sont tombés deux arbres, des ifs ou des thuyas, assez gros, qui ont disparu du paysage et je m’étais dit qu’ils manqueraient… Eh bien, maintenant, 20 ans après, dans cet endroit il y a une vraie petite forêt des rejets de ces arbres qui ont disparu. Est-ce une parabole ? J’y vois en tout cas une image de ce que Dieu peut faire dans nos vies.

« Les cieux proclament la gloire de Dieu… pas de paroles dans ce récit… Sur toute la terre en parait le message ». Dans son silence, la nature nous dit déjà les merveilles que Dieu fait pour nous.

Et Jésus, lui, parlait en paraboles… « Il ne leur disait rien sans parabole, mais il expliquait tout à ses disciples en particulier ».

Je suis allé voir dans un vieux dictionnaire (…au temps où on ne connaissait pas les antennes « paraboliques » !) : Parabole renvoie à Allégorie.

« Allégorie = « discours figuré qui présente, sous un sens littéral, un sens caché ».

« Discours figuré » : en fait Jésus racontait des histoires plutôt que des discours figurés, il émaillait ses paroles d’images : sous l’histoire, sous l’image il y avait un sens caché bien sûr, car « nous cheminons dans la foi, non dans la claire vision »… Les histoires, on les raconte, et pour certaines on ne se lasse pas de les ré-entendre, comme les enfants qui demandent : « Raconte encore une fois…encore, encore » !

Mais Jésus ne nous raconte pas tout à fait comme à des petits enfants. Dans ses histoires à lui, ses paraboles, il y aura toujours du sens à trouver, toujours du nouveau à en tirer, chacun de nous, aujourd’hui.

Entre parenthèses, saurons-nous jamais comment Jésus, lui, a expliqué les paraboles à ses disciples, l’histoire de l’homme qui a semé et qui laisse la semence pousser jour et nuit ? De même pour la graine de moutarde, la plus petite de toutes les semences ?

« Par de nombreuses paraboles semblables, Jésus leur annonçait la Parole… ». Jésus annonce la Parole … Il est la Parole …en parlant il annonce sa venue, Il vient, Lui la Parole de Dieu : depuis la Pentecôte nous avons à la reprendre, à la ré-entendre et y trouver le sens que l’Esprit nous dévoile.

Peut-être faudrait-il déjà penser, croire que la semence, la toute petite graine qui a été semée, elle est là, elle est en nous… et elle ne demande qu’à grandir, elle est en train de grandir ?

« Il en va du règne de Dieu comme d’un homme qui jette en terre…comme une graine de moutarde qui grandit… ».

Notre monde est plein de ce que Jésus a voulu expliquer à ses disciples et qu’il veut nous dire aujourd’hui : son Esprit est là pour nous guider…à travers sa parole, ses paraboles et toute sa vie.

Nous devrions dire comme les enfants : « Raconte-moi encore l’histoire de Jésus… encore, encore !» comme les enfants de Dieu que nous sommes, ouvrir nos cœurs un peu plus aujourd’hui.

On m’a raconté que, le dimanche avant Pâques, une personne venait pour la bénédiction des Rameaux et qu’elle repartait juste au moment où la messe commençait. Le prêtre avait pu l’interpeller et elle aurait répondu : « Oui, mais ensuite vous racontez toujours la même histoire »…Elle faisait allusion à la lecture de la Passion !

Dommage ! Dommage pour nous si nous ne disons pas « Oui, encore, encore ! » quand nous entendons la Parole de Dieu pour en recueillir les fruits dans notre vie. maintenant…

Bon dimanche, chers frères et sœurs, après cette célébration qui nous remet face à la Parole, cette Parole qui révèle son sens caché en se donnant en nourriture…

- 17 juin 2018

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Homélie du 10 juin 2018 — 10e dim. ordinaire — Frère Antoine
Cycle : Année B
Info :

Année B - 10ème Dimanche du Temps Ordinaire - 10 Juin 2018

Gn 3,9-15 2 Co 4,13 à 5,1 Mc 3,20-35

Homélie du fr. Antoine

Texte :

• Frères et Sœurs, cet Evangile nous renvoie à notre société.

Nous sommes dans une civilisation de recherche de plus en plus grande de Liberté.

Mais les paroles de Jésus nous rappellent que la direction première de la vie

chrétienne n'est pas celle de rêver d'une vie dans la paix et dans la liberté mais de

rechercher à faire la volonté de Dieu, une recherche qui nous conduit tôt ou tard à nous

remettre en question.

C'est le refus de cette Remise en question devant l'enseignement de Jésus qui a

conduit' les gens de chez lui' dit le texte, à le traiter de fou, et les scribes à dia baliser cet

encombrant rabbi.

A notre tour nous pouvons nous demander si, pour éviter de regarder notre vie en

vérité, nous ne cherchons pas à nier des évidences, ou à mal interpréter des engagements

chrétiens courageux.

Rappelons-nous les appels répétés du Pape François au sujet des migrants.

Dieu peut pardonner nos erreurs, nos errements, ... Dieu pardonnera tous les péchés,

les blasphèmes mais si quelqu'un blasphème le St- Esprit, il n'aura jamais de pardon.

Ce qui est impardonnable pour Jésus, c'est l'obstination -volontaire-de rester dans le mal.

Dieu ne condamne personne ... c'est l'homme qui se condamne et condamne les autres.

Dieu veut pardonner tous les péchés ... et à tous les pécheurs ... mais Lui -la lumière du

monde- est impuissant devant ceux qui disent que la lumière est ténèbres ... 11 ya quelque

chose en eux de démoniaque quand ils se ferment sur eux-mêmes au point de refuser la

lumière ... la lumière de l'Esprit Saint.

• Oui, Frères et Sœurs, cet Evangile nous renvoie à notre société.

Ainsi quand Jésus fait éclater les frontières familiales, il ouvre un champ étonnant à la

recherche ... de qui ... il est. A ceux qui se disaient de sa famille, il révèle les dimensions

immenses de la Bonne Nouvelle où tout homme, toute femme qui fait Ia volonté de Dieu

.. devient... pour Lui ... précise-t-il, son frère, sa sœur.

Cette réponse de Jésus à la foule qui l'entoure va à l'encontre des traditions les plus anciennes du Moyen-Orient, et pourtant Jésus a osé la faire.

Il veut souligner avec force, que font partie de sa famille ceux qui acceptent de ne

pas jouer le jeu du 'diviseur', du 'Malin', car son combat est d'abord un affrontement avec

le Mal, un Mal si profond en nous, qu'il nous est commandé de demander au Père ...

« Père, Délivre-nous du mal »... afin que l'Esprit du Mal ne remplace pas en nous ... la place

de l'Esprit de Dieu.

• Je voudrais maintenant attirer votre attention sur la dernière phrase de l' Evangile :

« Parcourant du regard ... ceux qui étaient assis autour de lui il dit' voici ma mère, mes

frères» Le regard de Jésus, ce regard si porteur de vérité ..... qui se pose sur ses disciples,

sur les malades, sur Pierre à la Passion, et qui est le même qui se pose' sur nous, assemblés

aujourd'hui dans cette église ... autour de l'autel ... un regard ... qui nous invite à prendre

. conscience, discrètement ... dans l'intime de notre Foi ... de ceux qui près de nous, autour de

nous actuellement.. sont, aussi ... nos frères ... nos sœurs ... en Christ et à prier pour eux. - 10 juin 2018

Homélie du 08 juin 2018 — Sacré Cœur — Père Abbé Luc
Cycle : Année B
Info :

Année B - SACRE CŒUR - 08 juin 2018

Os 11, 1, 3-4, 8c-9 ; Ep 3, 8-12, 14-19 ; Jn 19, 31-37

Homélie du Père Abbé Luc

Texte :

Frères et Sœurs,

Devant le tombeau vide, Jean a vu les linges et le linceul bien disposés à leur place et il a cru en la résurrection de Jésus. De même, face au cadavre de Jésus, Jean rapporte le coup de lance qui laisse jaillir le sang et l’eau, afin que ses lecteurs croient à leur tour qu’un don éminent leur est fait à cet instant. A travers ces signes très anodins, Jean voit bien davantage. Il nous entraine à entrer dans un autre regard sur Jésus. A sa suite, l’Eglise n’a cessé de scruter ce mystère du cœur percé de Jésus dans la lumière de sa mort et de sa résurrection. Elle nous apprend à vénérer ce cœur pour y reconnaitre les merveilles de l’amour de Dieu pour nous, comme le priions en début de célébration…

Un verset de la lecture d’Osée a retenu mon attention ce matin… « Ils ont refusé de revenir à moi : vais-je les livrer au châtiment ? Non ! Mon cœur se retourne contre moi ; en même temps, mes entrailles frémissent. Je n’agirai plus selon l’ardeur de ma colère »… « Mon cœur se retourne contre moi… » La note de la bible de Jérusalem dit que ce verbe « se retourne » est « un mot très fort », le même qui est employé pour dire la destruction de Sodome et Gomorrhe et qui sera traduit par « dévaster, renverser »… Et la note poursuit : « Osée laisse entendre que le châtiment envisagé est comme vécu d’avance dans le cœur de Dieu »… Ce texte est riche car il nous fait entrer dans la vision du prophète Osée qui relit la belle histoire d’alliance entre Dieu et son peuple, une histoire où se révèle le cœur de Dieu. Le cœur de Dieu qui nous est montré ici, n’est plus le cœur de l’époux comme au début du livre d’Osée. Mais c’est le cœur d’un Dieu Père, voire Mère, qui apprend à son peuple à marcher, qui l’attire comme un nourrisson tout contre sa joue. « Je me penchais vers lui pour le faire manger »… Mais cette prévenance de Dieu pour son peuple ne rencontre que résistance et refus. Le peuple n’entend pas l’amour de Dieu pour lui. Il reste attaché aux idoles et aux Baals. Le prophète Osée nous laisse entrevoir combien cette situation est douloureuse pour Dieu lui-même. Il suggère un conflit intérieur, exprimé avec nos images et nos mots humains. L’image très spontanée du châtiment vient à l’esprit pour sortir du conflit et venger l’affront subi et l’amour blessé. Mais Dieu est Dieu et non pas homme. Si le cœur d’un homme se répand en colère contre un autre homme, le cœur de Dieu se retourne contre lui. Il prend sur lui la douleur de l’amour méprisé et rejeté. « Au milieu de vous, je suis le Dieu saint et je ne viens pas pour exterminer ».

Frères et sœurs, l’intelligence que le prophète Osée nous livre du cœur de Dieu blessé, dévasté par l’infidélité de son peuple qu’il prend sur lui, apporte un singulier éclairage sur le cœur transpercé de Jésus en croix. En ce moment unique se vit la tension extrême entre un amour offert et un mépris, une méprise totale de cet amour par les hommes aveuglés. Le cœur de Jésus est dévasté par l’infamie des hommes, mais il se donne encore dans le sang et l’eau offerts. Mystère de l’Amour de Dieu révélé en ce cœur. Mystère de l’Amour de Dieu qui n’a d’autre vengeance que celle de son propre don jusqu’au bout. Mystère de l’Amour de Dieu qui n’a d’autre victoire que de partager sa vie à tous les hommes, à travers celle du Ressuscité. Mystère du cœur de Jésus, cœur plus humain et cœur plus grand qu’aucun des cœurs des fils de la terre. Comme l’Eglise nous y invite, à la suite de Jean, vénérons-le et contemplons-le dans la prière. Laissons-le toucher notre propre cœur, comme le P. Muard en a eu l’intuition et le privilège en 1839 à Avallon, afin qu’il se laisse toucher et émouvoir pour aimer à notre tour. Déjà en cette eucharistie, approchons-nous du cœur de Dieu.- 8 juin 2018

Homélie du 03 juin 2018 — Saint Sacrement - Fête Dieu — Frère Ghislain
Cycle : Année B
Info :

Année B -Fête du Corps et du Sang du Christ 3 juin 2018

Exode, 24, 3-8 Héb. 9, 11-15 Marc, 14, 12-16 et 22-26

Homélie du F.Ghislain

Texte :

Nous fêtons aujourd’hui le Saint Sacrement du Corps et du Sang du Christ. Nous le fêtons en renouvelant ce que nous célébrons chaque dimanche, parfois plus souvent, parfois moins…Une des manières, peut-être, de donner toute sa force à cette fête, pourrait être de nous demander : mais qu’est-ce que je viens faire ici ? Pourquoi donc vais-je à la Messe ? La vie urbaine nous offre tant de possibilités : dormir plus longtemps, aller à la piscine avec les enfants, faire un long jogging ou une randonnée avec des amis, mettre de l’ordre dans la maison, classer enfin ses papiers, lire un livre, écouter de la musique, regarder en différé le match de foot que nous n’avons pas pu voir la veille au soir…

Nous venons à la Messe peut-être d’abord pour être avec les autres chrétiens et, avec eux, nous occuper de Dieu. Nous retrouver les uns les autres, qui avons en commun la grâce de Jésus-Christ, l’amour de Dieu et la communion du Saint-Esprit. Etre ensemble, nous qui sommes le Corps du Christ, et avant même de faire quoi que ce soit, échanger silencieusement mais fortement nos joies, porter mutuellement nos fardeaux.

Ensuite, nous sommes là, en communion concrète, pour rendre gloire à Dieu. Dès que nous nous sommes salués à travers de l’invitation du célébrant, nous avons chanté ensemble « Gloire à Dieu et paix sur la terre ». Et tout à l’heure, quand nos offrandes auront été disposées sur l’autel, le prêtre nous invitera : « Rendons grâce au Seigneur notre Dieu ». Enfin, lorsque l’action liturgique se terminera, nous ferons encore nôtres les ultimes paroles d’action de grâces : A toi, Dieu tout puissant…tout honneur et toute gloire pour les siècles des siècles », et nous confirmerons cette doxologie en mangeant et buvant le don de Dieu : le Corps et le Sang du Christ.

Rendre gloire, rendre grâces. Qu’est-ce que cela veut dire, concrètement ? Trois choses, peut-être : écouter, recevoir, donner. Ouvrir nos oreilles et notre cœur à Dieu qui nous parle. Les lectures que nous entendons chaque dimanche ne sont pas d’abord un contenu, si saint soit-il, mais une parole de Dieu. Certains d’entre vous se rappellent peut-être l’épisode que Mme de Sévigné raconte dans une de ses lettres : elle était à la cour de Versailles ou de Saint-Cyr, et le roi Louis XIV s’est approché d’elle aimablement et lui a dit une phrase de cinq mots « Racine a bien de l’esprit ». Mais voilà, c’est le roi qui le lui avait dit et la phrase s’amplifiait à l’infini. A la Messe, c’est Dieu qui nous parle et ce qu’il nous dit est à la mesure de ce qu’il est. Nous rendons gloire à Dieu par la qualité de notre écoute, par notre présence d’esprit ; nous recevons par l’Esprit le son de sa voix, par l’intelligence du cœur le contenu de sa parole. Et ce contenu, dans la diversité, il est unique : ce contenu est Jésus, révélation de Dieu dans sa vie, sa mort, sa résurrection, l’envoi de l’Esprit Saint.

Rendre gloire, c’est rendre ; rendre, c’est donner en retour. Il était une fois un prêtre, paisiblement fidèle à sa vocation : il priait, célébrait les sacrements, se rendait proche des gens, essayait de faire passer l’évangile, en somme par sa vie, à sa petite mesure, rendre gloire à Dieu et faire la paix parmi les hommes. Et un beau jour, un jour comme les autres, il a dû donner sa vie et il est mort : il s’appelait Jacques Hamel. Une autre fois, il y a eu un officier de gendarmerie : tout pareil, par toute sa vie en chemin vers Dieu et par son métier artisan de paix autant que possible. Et un jour, il a donné sa vie, il est mort. Il s’appelait Arnaud Beltrame. Gloire à Dieu et paix sur terre. Il était une fois un homme, un artisan de Palestine : celui-là a entendu la Parole de Dieu, dans les profondeurs des nuits qu’il passait en prière, il a perçu comme personne ne l’avait jamais fait, la mission qui lui était confiée : de faire connaître l’amour de Dieu et préparer les hommes à la rencontre. Il l’a fait jour après jour et finalement lui aussi, il en est mort.

Rendre gloire, c’est donner sa vie. Mais celui-là, Jésus de Nazareth, Dieu l’a ressuscité et lui a donné le nom au dessus de tout nom. Sa réponse à Dieu n’était pas seulement une réponse parmi d’autres, comme celle des prophètes, des martyrs et des saints, elle était la réponse de l’Homme, de l’Humanité, la Gloire parfaite rendue à Dieu par celui qui avait reçu de Dieu la mission de salut.

Nous sommes là, à l’Eucharistie, pour faire mémoire, pour nous souvenir, pour rendre présent ce que Jésus a fait. Nous le faisons avec les gestes et les paroles, avec les mots et les actes qu’il nous a laissés, avec le pain et le vin qui sont le corps et le sang livrés à Dieu au nom de tous les hommes. Mais nous le faisons aussi dans la suite de notre vie de tous les jours : ses paroles, ses gestes, ses symboles. Nous sommes sans cesse, si nous y prenons garde, appelés par Dieu, doués par lui de notre être de nature et de grâce, bénéficiaires dès notre naissance et notre baptême, de la révélation de l’Evangile et du don de l’Esprit. Désireux par conséquent, à notre mesure et non sans bien des faiblesses, d’entrer moyennant une fidélité quotidienne et en communion avec les autres, dans ce que Jésus appelle le Royaume de Dieu. De sorte que, à la fois, nous recevons le don de Dieu en Jésus-Christ, c’est-à-dire la Vie, et nous rendons en ce même Jésus-Christ ce que nous pouvons.

Je ne sais pas comment il sera donné, à chacun de nous, de rendre à Dieu dans la mort ce qu’il nous a donné en Jésus-Christ. Mais en attendant, nous venons à l’Eucharistie, afin que, comme le dit une prière eucharistique, notre vie ne soit plus à nous-mêmes mais à Lui qui est mort et ressuscité pour nous et à nos frères de ce monde parmi lesquels il nous est donné de vivre. Gloire à Dieu au plus haut des cieux et paix sur la terre aux hommes que Dieu aime. - 3 juin 2018

Homélie du 27 mai 2018 — Sainte Trinité — Frère Damase
Cycle : Année B
Info :

Année B - 27 mai 2018 – Solennité de la Trinité

Dt 4, 32...40; Rm 8, 14-17; Mt 28, 16-20

Homélie du F.Damase

Texte :

Le ministère public de Jésus commence avec son baptême dans le Jourdain.

Première manifestation – dans toute la Révélation – du Dieu Père, Fils et Esprit.

Lorsque Jésus descendit dans le fleuve, l'Esprit descendit sur lui sous la forme d'une colombe, et il entendit la voix du Père disant : "Tu es mon fils bien-aimé, en qui j'ai mis tout mon amour."

Et, lors de sa dernière apparition, après sa Résurrection - l’évangile d’aujourd’hui, Jésus commande aux disciples d'aller enseigner toutes les nations, et de les baptiser "au nom du Père, et du Fils, et du Saint-Esprit".

À travers tout son enseignement Jésus témoigne du fait que Dieu est son Père et que tout son être se trouve exprimé dans cette relation de Fils à Père. Le Père se dit tout entier dans son Verbe ; et lorsque le Verbe incarné dit : "Abba, Père", il exprime dans ce simple mot tout son être de Fils. Il n'est rien d'autre. Jésus nous enseigne aussi tout au long de l'Évangile que son Père et Lui sont un, unis par l'Esprit d'amour qui leur est commun. Et, finalement, il nous révèle que nous aussi nous sommes appelés à vivre la même relation. Cet appel devient une réalité à travers le baptême que nous avons reçu.

Il y a donc une relation essentielle entre le mystère de la Trinité, que nous célébrons aujourd'hui et le baptême. Par le baptême nous devenons fils/filles du Père, dans le Fils, par l'Esprit d'amour qui nous est donné. L'Esprit descend alors sur nous et la voix du Père nous dit à nous aussi : "Tu es mon fils/ma fille bien-aimé(e) en qui j'ai mis tout mon amour ".

L'usage du baptême était un élément important de la culture religieuse dans le Judaïsme, au temps de Jésus. Dans la ligne de l'Incarnation, Jésus a transformé cette coutume dans le sacrement du baptême, tout comme il a assumé le rite du repas pascal pour le transformer dans le sacrement de l'Eucharistie.



Le baptême n'était pas un rituel isolé. La personne qui baptisait avait toujours un enseignement à transmettre ; et celle qui recevait le baptême acceptait de vivre en conformité avec cet enseignement. Elle acceptait de vivre une conversion. Jésus a conservé cette dimension du baptême. C'est pourquoi, lorsqu'il commande à ses disciples de baptiser les nations, il leur commande aussi de leur apprendre "à garder tous les commandements" qu'il leur a donnés.

Si nous gardons bien cette parole d'amour qui nous a été donnée, alors la promesse de Jésus à ses disciples se réalisera en nous : «Et moi, je suis avec vous tous les jours".

Pénétrons donc toujours plus à fond dans ce baptême qu'est notre vie chrétienne, afin de faire l'expérience de la présence du Père, du Fils et de l'Esprit. Notre vie deviendra alors une prière continuelle, car, comme le dit Paul dans la seconde lecture (tirée de la lettre aux Romains), l'Esprit de Dieu s'unira à notre esprit pour dire "Abba", ce mot affectueux en qui s'exprime toute la nature du Fils. C'est là la prière dont parle Paul dans ce même chapitre 8 aux Romains: "Nous ne savons pas prier; mais l'Esprit lui-même intercède pour nous en des gémissements inexprimables." (Rm 8 26) - 27 mai 2018

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