Homélies
Liste des Homélies
Année B - 13e dimanche du Temps Ordinaire - 1° juillet 2018
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Sag. 1,13-15; 2, 23_24. 2 Cor. 8, 7,9, 13-15.
Marc 5, 21-43
Homélie du F.Ghislain
La lecture de l’évangile que nous venons d’entendre peut nous conduire à nous poser deux questions très concrètes et à essayer d’y répondre. Ces questions sont : pourquoi sommes-nous venus à l’Eucharistie ce dimanche ? qu’est-ce que nous ferons dans la semaine qui vient ?
Aussi bien la femme malade que le chef de la synagogue sont venus pour avoir la vie : la santé au lieu d’une maladie inguérissable qui, depuis des années, gâte l’existence ; la santé au lieu d’une maladie infantile contre laquelle on ne peut rien et qui va priver la famille d’un enfant aimé. Voilà ce qu’on désire : la vie plus forte que la mort. La femme malade, qui croit pourtant et espère la guérison, a peur du contact direct, face à face. Elle vient par derrière, elle touche le vêtement du Christ, et ô miracle, çà marche : elle est guérie. Pourtant, les choses ne peuvent en rester là ; la puissance de Jésus n’est pas magique, et le Seigneur provoque un dialogue. Le chef de la synagogue, lui, risque la parole : il parle, il parle, il dit que sa fille en est à sa fin, il dit à Jésus quoi faire : venir chez lui et imposer la main à l’enfant. C’est urgent et voici qu’au milieu de son discours, on lui envoie dire : trop tard, ta fille est morte. C’est l’effondrement. Là, il faut alors une parole de Jésus qui assure de donner plus que l’homme n’aurait osé demander : non pas la guérison d’une fillette encore vivante, mais la résurrection d’une enfant morte.
La femme malade, le père désespéré, - deux figures de l’homme en perte de vie qui vient à celui qui est la voie, la vérité et la vie. Cet homme en perte qui vient à Jésus, qui est-ce aujourd’hui ? la communauté concrète que nous sommes ici et maintenant, chacun avec le lot de ses désirs, de ses impuissances, de ses frustrations : nous les mettons ensemble, nous en dirons quelques-unes au Christ en en mentionnant d’autres à la prière universelle, - je pense que nous pouvons ici penser à Francette Bon-Mardion, fidèle à la rencontre annuelle des Pingouins et aujourd’hui proche d’une opération sérieuse - . Nous comprenons bien que, finalement, nous sommes ici au niveau de tous les hommes. Nous venons demander à Jésus la vie, sous toutes ses formes, nous nous approchons, pas seulement de sa tunique, mais de son corps et de son sang, car il nous a lui-même invités : « qui mange ma chair et boit mon sang aura la vie éternelle ». Et nous croyons à l’immensité des libérations, qui s’opèrent dans le monde en réponse à nos supplications : elles sont certes la inconnues et cachées, mais qui, dans le monde romain du temps de Jésus, a connu les guérisons dont nous parle l’évangile ? Voilà pourquoi nous sommes ici : demander et obtenir la vie : pour tous, pour nous, pour moi, grâce au corps du Christ et quelles que soient les apparences contraires.
Une question pourrait encore venir à notre esprit, qui nous aiderait à recevoir de manière plus personnelle le message de cet évangile: "et après?" Quand la femme a quitté Jésus, où est-elle allée? qu'a-t-elle fait? La petite fille qui a été ressuscitée, qu'est-elle devenue, et ses parents, témoins et bénéficiaires sur leur enfant de la Puissance de Jésus, comment ont-ils continué de vivre, dans leur village et dans leur entourage, avec cette enfant du miracle? Nous savons, du moins, ce qui est advenu aux disciples choisis: à la Transfiguration, ils ont encore été les témoins de la Puissance de Dieu, à l'Agonie, en revanche, ils ont vu sa faiblesse, et ils n'ont pu supporter ni l'une ni l'autre; il aura fallu que l'Esprit descende sur eux pour qu'ils soient transformés, qu'ils comprennent enfin ce qu'ils avaient vécu et qu'ils en témoignent alors, eux aussi, dans la puissance et dans la faiblesse. Sans doute pouvons-nous imaginer qu'il en a été de même des autres protagonistes: si privilégié qu'ait été ce moment particulier de leur existence où ils ont touché Jésus ou été touchés par Lui, ils ont sans doute, chacun à sa manière, accompli le périple de Celui qui les avait sauvés: de la Gloire à l'humiliation et encore à la Gloire.
Il nous faut peut-être alors essayer de ne pas laisser perdre cette grande diversité de personnes, d'attitudes, - pour nous demander, d'une manière très personnelle: où suis-je là-dedans? à qui puis-je m'identifier? à laquelle de ces relations avec le Christ correspond la mienne? où est ma force et où ma faiblesse? Et à quel Christ est-ce que je m'adresse: à l'homme étonné à qui on dérobe en quelque sorte sa Puissance, au Maître qui semble dominer la vie et la mort? Sans doute une telle identification n'est-elle pas possible une fois pour toutes, mais aujourd'hui: qui est mon Seigneur et comment est-ce que je me réfère à lui avec les autres et au nom de tous ? Et qu’est-ce que, avec d’autres proches, mais aussi avec les lointains, je vais pouvoir être et faire pour que la Vie jaillisse et qu’elle jaillisse en abondance ? Que l’Esprit de Jésus nous éclaire et nous pousse dans la semaine qui vient en vertu de la force évangélique reçue aujourd’hui.
1° Juillet 2018
année B - 24 juin 2018 SOLENNITE DE ST JEAN-BAPTISTE
Is 49 1-6; Ac 13 22-26; Luc 1 57-66 80
Homélie du f. Hubert
Depuis les premiers siècles donc, les chrétiens ont célébré la naissance de Jean-Baptiste,
cet homme à la place si particulière dans l’histoire du salut,
à la jointure de l’Ancienne et de la Nouvelle Alliances.
Que sera cet enfant dont la conception et la naissance sont marquées par tant de surprises,
dont le nom nouveau, qui tranche sur la coutume familiale, signifie « Dieu fait grâce » ?
Dieu, en effet, va faire grâce au-delà de toute mesure,
au-delà de tout ce que l’homme pouvait imaginer.
Dieu va faire grâce en prenant la condition de ceux qu’il vient sauver,
en prenant sur lui tout le poids du mal qui affecte nos vies,
en faisant de nous des fils dans le Fils devenu homme.
Jean est la voix annonciatrice de Celui qui vient : l’unique Sauveur.
Et pourtant, ce Sauveur va se manifester parfaitement autre que ce que JB attendait.
Qui pouvait s’attendre à ce que Dieu se fasse homme,
à ce que Dieu, non seulement, pardonne au pécheur qui se convertit,
mais « enlève le péché du monde », en prenne sur lui toutes les conséquences ?
Voici l’Agneau de Dieu, qui enlève le péché du monde.
Toute la vie et la mission de Jean-Baptiste sont dans cette parole.
Jean est celui qui désigne le Christ.
Pour cette mission, il sera « rempli d’Esprit Saint dès le sein de sa mère ».
Par révélation, il désigne celui qui est plus grand que lui :
Celui qui m’a envoyé baptiser dans l’eau m’a dit :
“Celui sur qui tu verras l’Esprit descendre et demeurer, celui-là baptise dans l’Esprit Saint.”
Moi, j’ai vu, et je rends témoignage : c’est lui le Fils de Dieu.
Humblement, il témoigne : « Je ne suis pas le Messie. »
Moi, je vous baptise dans l’eau, en vue de la conversion.
Mais celui qui vient derrière moi est plus fort que moi,
et je ne suis pas digne de lui retirer ses sandales.
Lui vous baptisera dans l’Esprit Saint et le feu. »
Avant même de naître, il le reconnaît, caché dans le sein de sa mère,
tressaillant d’allégresse aux paroles de Marie.
Pourtant, dans l’évangile de Jean, il dira : Moi, je ne le connaissais pas.
Le ministère public de Jésus le mettra à l’épreuve ; il enverra lui dire :
« Es-tu celui qui doit venir, ou devons-nous en attendre un autre ? »
Jean est étonné, troublé même.
Jésus en effet n’agit pas comme il l’envisageait, lui qui disait :
« Engeance de vipères ! Qui vous a appris à fuir la colère qui vient ?
Produisez un fruit digne de la conversion. .[…]
Déjà la cognée se trouve à la racine des arbres :
tout arbre qui ne produit pas de bons fruits va être coupé et jeté au feu. »
Vivant au désert, il invitait ses contemporains à se convertir,
à se détourner de ce qui les détournait du Dieu de l’Alliance, du Dieu de leurs pères,
du Dieu vivant.
Mais il ne pouvait envisager que Dieu se tourne vers l’homme jusqu’à se solidariser avec le pécheur.
Quand Jésus vient pour être baptisé par lui,
Jean voulait l’en empêcher et disait :
« C’est moi qui ai besoin d’être baptisé par toi, et c’est toi qui viens à moi ! »
Mais Jésus lui répondit :
« Laisse faire pour le moment, car il convient que nous accomplissions ainsi toute justice. »
Jésus se fait baptiser comme un pécheur.
Jean a sûrement fait là une expérience fondatrice.
Elle lui permettra de dire à ses propres disciples :
Voici l’Agneau de Dieu, qui enlève le péché du monde.
et de les laisser partir à sa suite, librement, avec la joie qui monte au cœur de l’ami de l’époux.
Voici l’Agneau de Dieu, qui enlève le péché du monde ;
Moi, je ne suis pas le Christ, mais j’ai été envoyé devant lui.
J’ai vu l’Esprit descendre du ciel comme une colombe et il demeura sur lui.
Et moi, je ne le connaissais pas, mais celui qui m’a envoyé baptiser dans l’eau m’a dit :
“Celui sur qui tu verras l’Esprit descendre et demeurer, celui-là baptise dans l’Esprit Saint.”
Moi, j’ai vu, et je rends témoignage : c’est lui le Fils de Dieu.
Celui à qui l’épouse appartient, c’est l’époux ;
quant à l’ami de l’époux, il se tient là, il entend la voix de l’époux, et il en est tout joyeux.
Telle est ma joie : elle est parfaite.
Lui, il faut qu’il grandisse ; et moi, que je diminue.
Frères et sœurs, celui qui est plus fort et plus grand que nous, celui que nous connaissons si peu,
celui qui ne cessera pas de nous étonner,
celui qui est la nouveauté absolue, la vie jaillissant de la mort,
la sainteté victorieuse du péché,
se tient au milieu de nous
et se donne à nous en nourriture dans sa parole et dans le pain consacré par le don de sa vie. Puisse-t-il grandir en nous et nous transformer en lui ! Que notre joie, en lui, soit parfaite !
Puissions-nous faire cette expérience fondatrice de la miséricorde de Dieu,
pour pouvoir à notre tour dire en vérité à nos frères :
« Voici l’Agneau de Dieu, qui enlève le péché du monde. » - 24 juin 2018
Année B 11e dim du Temps Ordinaire - 17 juin 2018
Ez 17/22-24, 2Co 5/6-10, Mc 4/26-34.
Homélie du F.Cyprien
Il y eut en 1999 une tempête qui fit beaucoup de dégats en France et aussi autour du monastère. Au fond du parc, près d’un petit ruisseau, sont tombés deux arbres, des ifs ou des thuyas, assez gros, qui ont disparu du paysage et je m’étais dit qu’ils manqueraient… Eh bien, maintenant, 20 ans après, dans cet endroit il y a une vraie petite forêt des rejets de ces arbres qui ont disparu. Est-ce une parabole ? J’y vois en tout cas une image de ce que Dieu peut faire dans nos vies.
« Les cieux proclament la gloire de Dieu… pas de paroles dans ce récit… Sur toute la terre en parait le message ». Dans son silence, la nature nous dit déjà les merveilles que Dieu fait pour nous.
Et Jésus, lui, parlait en paraboles… « Il ne leur disait rien sans parabole, mais il expliquait tout à ses disciples en particulier ».
Je suis allé voir dans un vieux dictionnaire (…au temps où on ne connaissait pas les antennes « paraboliques » !) : Parabole renvoie à Allégorie.
« Allégorie = « discours figuré qui présente, sous un sens littéral, un sens caché ».
« Discours figuré » : en fait Jésus racontait des histoires plutôt que des discours figurés, il émaillait ses paroles d’images : sous l’histoire, sous l’image il y avait un sens caché bien sûr, car « nous cheminons dans la foi, non dans la claire vision »… Les histoires, on les raconte, et pour certaines on ne se lasse pas de les ré-entendre, comme les enfants qui demandent : « Raconte encore une fois…encore, encore » !
Mais Jésus ne nous raconte pas tout à fait comme à des petits enfants. Dans ses histoires à lui, ses paraboles, il y aura toujours du sens à trouver, toujours du nouveau à en tirer, chacun de nous, aujourd’hui.
Entre parenthèses, saurons-nous jamais comment Jésus, lui, a expliqué les paraboles à ses disciples, l’histoire de l’homme qui a semé et qui laisse la semence pousser jour et nuit ? De même pour la graine de moutarde, la plus petite de toutes les semences ?
« Par de nombreuses paraboles semblables, Jésus leur annonçait la Parole… ». Jésus annonce la Parole … Il est la Parole …en parlant il annonce sa venue, Il vient, Lui la Parole de Dieu : depuis la Pentecôte nous avons à la reprendre, à la ré-entendre et y trouver le sens que l’Esprit nous dévoile.
Peut-être faudrait-il déjà penser, croire que la semence, la toute petite graine qui a été semée, elle est là, elle est en nous… et elle ne demande qu’à grandir, elle est en train de grandir ?
« Il en va du règne de Dieu comme d’un homme qui jette en terre…comme une graine de moutarde qui grandit… ».
Notre monde est plein de ce que Jésus a voulu expliquer à ses disciples et qu’il veut nous dire aujourd’hui : son Esprit est là pour nous guider…à travers sa parole, ses paraboles et toute sa vie.
Nous devrions dire comme les enfants : « Raconte-moi encore l’histoire de Jésus… encore, encore !» comme les enfants de Dieu que nous sommes, ouvrir nos cœurs un peu plus aujourd’hui.
On m’a raconté que, le dimanche avant Pâques, une personne venait pour la bénédiction des Rameaux et qu’elle repartait juste au moment où la messe commençait. Le prêtre avait pu l’interpeller et elle aurait répondu : « Oui, mais ensuite vous racontez toujours la même histoire »…Elle faisait allusion à la lecture de la Passion !
Dommage ! Dommage pour nous si nous ne disons pas « Oui, encore, encore ! » quand nous entendons la Parole de Dieu pour en recueillir les fruits dans notre vie. maintenant…
Bon dimanche, chers frères et sœurs, après cette célébration qui nous remet face à la Parole, cette Parole qui révèle son sens caché en se donnant en nourriture…
- 17 juin 2018
***
Année B - 10ème Dimanche du Temps Ordinaire - 10 Juin 2018
Gn 3,9-15 2 Co 4,13 à 5,1 Mc 3,20-35
Homélie du fr. Antoine
• Frères et Sœurs, cet Evangile nous renvoie à notre société.
Nous sommes dans une civilisation de recherche de plus en plus grande de Liberté.
Mais les paroles de Jésus nous rappellent que la direction première de la vie
chrétienne n'est pas celle de rêver d'une vie dans la paix et dans la liberté mais de
rechercher à faire la volonté de Dieu, une recherche qui nous conduit tôt ou tard à nous
remettre en question.
C'est le refus de cette Remise en question devant l'enseignement de Jésus qui a
conduit' les gens de chez lui' dit le texte, à le traiter de fou, et les scribes à dia baliser cet
encombrant rabbi.
A notre tour nous pouvons nous demander si, pour éviter de regarder notre vie en
vérité, nous ne cherchons pas à nier des évidences, ou à mal interpréter des engagements
chrétiens courageux.
Rappelons-nous les appels répétés du Pape François au sujet des migrants.
Dieu peut pardonner nos erreurs, nos errements, ... Dieu pardonnera tous les péchés,
les blasphèmes mais si quelqu'un blasphème le St- Esprit, il n'aura jamais de pardon.
Ce qui est impardonnable pour Jésus, c'est l'obstination -volontaire-de rester dans le mal.
Dieu ne condamne personne ... c'est l'homme qui se condamne et condamne les autres.
Dieu veut pardonner tous les péchés ... et à tous les pécheurs ... mais Lui -la lumière du
monde- est impuissant devant ceux qui disent que la lumière est ténèbres ... 11 ya quelque
chose en eux de démoniaque quand ils se ferment sur eux-mêmes au point de refuser la
lumière ... la lumière de l'Esprit Saint.
• Oui, Frères et Sœurs, cet Evangile nous renvoie à notre société.
Ainsi quand Jésus fait éclater les frontières familiales, il ouvre un champ étonnant à la
recherche ... de qui ... il est. A ceux qui se disaient de sa famille, il révèle les dimensions
immenses de la Bonne Nouvelle où tout homme, toute femme qui fait Ia volonté de Dieu
.. devient... pour Lui ... précise-t-il, son frère, sa sœur.
Cette réponse de Jésus à la foule qui l'entoure va à l'encontre des traditions les plus anciennes du Moyen-Orient, et pourtant Jésus a osé la faire.
Il veut souligner avec force, que font partie de sa famille ceux qui acceptent de ne
pas jouer le jeu du 'diviseur', du 'Malin', car son combat est d'abord un affrontement avec
le Mal, un Mal si profond en nous, qu'il nous est commandé de demander au Père ...
« Père, Délivre-nous du mal »... afin que l'Esprit du Mal ne remplace pas en nous ... la place
de l'Esprit de Dieu.
• Je voudrais maintenant attirer votre attention sur la dernière phrase de l' Evangile :
« Parcourant du regard ... ceux qui étaient assis autour de lui il dit' voici ma mère, mes
frères» Le regard de Jésus, ce regard si porteur de vérité ..... qui se pose sur ses disciples,
sur les malades, sur Pierre à la Passion, et qui est le même qui se pose' sur nous, assemblés
aujourd'hui dans cette église ... autour de l'autel ... un regard ... qui nous invite à prendre
. conscience, discrètement ... dans l'intime de notre Foi ... de ceux qui près de nous, autour de
nous actuellement.. sont, aussi ... nos frères ... nos sœurs ... en Christ et à prier pour eux. - 10 juin 2018
Année B - SACRE CŒUR - 08 juin 2018
Os 11, 1, 3-4, 8c-9 ; Ep 3, 8-12, 14-19 ; Jn 19, 31-37
Homélie du Père Abbé Luc
Frères et Sœurs,
Devant le tombeau vide, Jean a vu les linges et le linceul bien disposés à leur place et il a cru en la résurrection de Jésus. De même, face au cadavre de Jésus, Jean rapporte le coup de lance qui laisse jaillir le sang et l’eau, afin que ses lecteurs croient à leur tour qu’un don éminent leur est fait à cet instant. A travers ces signes très anodins, Jean voit bien davantage. Il nous entraine à entrer dans un autre regard sur Jésus. A sa suite, l’Eglise n’a cessé de scruter ce mystère du cœur percé de Jésus dans la lumière de sa mort et de sa résurrection. Elle nous apprend à vénérer ce cœur pour y reconnaitre les merveilles de l’amour de Dieu pour nous, comme le priions en début de célébration…
Un verset de la lecture d’Osée a retenu mon attention ce matin… « Ils ont refusé de revenir à moi : vais-je les livrer au châtiment ? Non ! Mon cœur se retourne contre moi ; en même temps, mes entrailles frémissent. Je n’agirai plus selon l’ardeur de ma colère »… « Mon cœur se retourne contre moi… » La note de la bible de Jérusalem dit que ce verbe « se retourne » est « un mot très fort », le même qui est employé pour dire la destruction de Sodome et Gomorrhe et qui sera traduit par « dévaster, renverser »… Et la note poursuit : « Osée laisse entendre que le châtiment envisagé est comme vécu d’avance dans le cœur de Dieu »… Ce texte est riche car il nous fait entrer dans la vision du prophète Osée qui relit la belle histoire d’alliance entre Dieu et son peuple, une histoire où se révèle le cœur de Dieu. Le cœur de Dieu qui nous est montré ici, n’est plus le cœur de l’époux comme au début du livre d’Osée. Mais c’est le cœur d’un Dieu Père, voire Mère, qui apprend à son peuple à marcher, qui l’attire comme un nourrisson tout contre sa joue. « Je me penchais vers lui pour le faire manger »… Mais cette prévenance de Dieu pour son peuple ne rencontre que résistance et refus. Le peuple n’entend pas l’amour de Dieu pour lui. Il reste attaché aux idoles et aux Baals. Le prophète Osée nous laisse entrevoir combien cette situation est douloureuse pour Dieu lui-même. Il suggère un conflit intérieur, exprimé avec nos images et nos mots humains. L’image très spontanée du châtiment vient à l’esprit pour sortir du conflit et venger l’affront subi et l’amour blessé. Mais Dieu est Dieu et non pas homme. Si le cœur d’un homme se répand en colère contre un autre homme, le cœur de Dieu se retourne contre lui. Il prend sur lui la douleur de l’amour méprisé et rejeté. « Au milieu de vous, je suis le Dieu saint et je ne viens pas pour exterminer ».
Frères et sœurs, l’intelligence que le prophète Osée nous livre du cœur de Dieu blessé, dévasté par l’infidélité de son peuple qu’il prend sur lui, apporte un singulier éclairage sur le cœur transpercé de Jésus en croix. En ce moment unique se vit la tension extrême entre un amour offert et un mépris, une méprise totale de cet amour par les hommes aveuglés. Le cœur de Jésus est dévasté par l’infamie des hommes, mais il se donne encore dans le sang et l’eau offerts. Mystère de l’Amour de Dieu révélé en ce cœur. Mystère de l’Amour de Dieu qui n’a d’autre vengeance que celle de son propre don jusqu’au bout. Mystère de l’Amour de Dieu qui n’a d’autre victoire que de partager sa vie à tous les hommes, à travers celle du Ressuscité. Mystère du cœur de Jésus, cœur plus humain et cœur plus grand qu’aucun des cœurs des fils de la terre. Comme l’Eglise nous y invite, à la suite de Jean, vénérons-le et contemplons-le dans la prière. Laissons-le toucher notre propre cœur, comme le P. Muard en a eu l’intuition et le privilège en 1839 à Avallon, afin qu’il se laisse toucher et émouvoir pour aimer à notre tour. Déjà en cette eucharistie, approchons-nous du cœur de Dieu.- 8 juin 2018
Année B -Fête du Corps et du Sang du Christ 3 juin 2018
Exode, 24, 3-8 Héb. 9, 11-15 Marc, 14, 12-16 et 22-26
Homélie du F.Ghislain
Nous fêtons aujourd’hui le Saint Sacrement du Corps et du Sang du Christ. Nous le fêtons en renouvelant ce que nous célébrons chaque dimanche, parfois plus souvent, parfois moins…Une des manières, peut-être, de donner toute sa force à cette fête, pourrait être de nous demander : mais qu’est-ce que je viens faire ici ? Pourquoi donc vais-je à la Messe ? La vie urbaine nous offre tant de possibilités : dormir plus longtemps, aller à la piscine avec les enfants, faire un long jogging ou une randonnée avec des amis, mettre de l’ordre dans la maison, classer enfin ses papiers, lire un livre, écouter de la musique, regarder en différé le match de foot que nous n’avons pas pu voir la veille au soir…
Nous venons à la Messe peut-être d’abord pour être avec les autres chrétiens et, avec eux, nous occuper de Dieu. Nous retrouver les uns les autres, qui avons en commun la grâce de Jésus-Christ, l’amour de Dieu et la communion du Saint-Esprit. Etre ensemble, nous qui sommes le Corps du Christ, et avant même de faire quoi que ce soit, échanger silencieusement mais fortement nos joies, porter mutuellement nos fardeaux.
Ensuite, nous sommes là, en communion concrète, pour rendre gloire à Dieu. Dès que nous nous sommes salués à travers de l’invitation du célébrant, nous avons chanté ensemble « Gloire à Dieu et paix sur la terre ». Et tout à l’heure, quand nos offrandes auront été disposées sur l’autel, le prêtre nous invitera : « Rendons grâce au Seigneur notre Dieu ». Enfin, lorsque l’action liturgique se terminera, nous ferons encore nôtres les ultimes paroles d’action de grâces : A toi, Dieu tout puissant…tout honneur et toute gloire pour les siècles des siècles », et nous confirmerons cette doxologie en mangeant et buvant le don de Dieu : le Corps et le Sang du Christ.
Rendre gloire, rendre grâces. Qu’est-ce que cela veut dire, concrètement ? Trois choses, peut-être : écouter, recevoir, donner. Ouvrir nos oreilles et notre cœur à Dieu qui nous parle. Les lectures que nous entendons chaque dimanche ne sont pas d’abord un contenu, si saint soit-il, mais une parole de Dieu. Certains d’entre vous se rappellent peut-être l’épisode que Mme de Sévigné raconte dans une de ses lettres : elle était à la cour de Versailles ou de Saint-Cyr, et le roi Louis XIV s’est approché d’elle aimablement et lui a dit une phrase de cinq mots « Racine a bien de l’esprit ». Mais voilà, c’est le roi qui le lui avait dit et la phrase s’amplifiait à l’infini. A la Messe, c’est Dieu qui nous parle et ce qu’il nous dit est à la mesure de ce qu’il est. Nous rendons gloire à Dieu par la qualité de notre écoute, par notre présence d’esprit ; nous recevons par l’Esprit le son de sa voix, par l’intelligence du cœur le contenu de sa parole. Et ce contenu, dans la diversité, il est unique : ce contenu est Jésus, révélation de Dieu dans sa vie, sa mort, sa résurrection, l’envoi de l’Esprit Saint.
Rendre gloire, c’est rendre ; rendre, c’est donner en retour. Il était une fois un prêtre, paisiblement fidèle à sa vocation : il priait, célébrait les sacrements, se rendait proche des gens, essayait de faire passer l’évangile, en somme par sa vie, à sa petite mesure, rendre gloire à Dieu et faire la paix parmi les hommes. Et un beau jour, un jour comme les autres, il a dû donner sa vie et il est mort : il s’appelait Jacques Hamel. Une autre fois, il y a eu un officier de gendarmerie : tout pareil, par toute sa vie en chemin vers Dieu et par son métier artisan de paix autant que possible. Et un jour, il a donné sa vie, il est mort. Il s’appelait Arnaud Beltrame. Gloire à Dieu et paix sur terre. Il était une fois un homme, un artisan de Palestine : celui-là a entendu la Parole de Dieu, dans les profondeurs des nuits qu’il passait en prière, il a perçu comme personne ne l’avait jamais fait, la mission qui lui était confiée : de faire connaître l’amour de Dieu et préparer les hommes à la rencontre. Il l’a fait jour après jour et finalement lui aussi, il en est mort.
Rendre gloire, c’est donner sa vie. Mais celui-là, Jésus de Nazareth, Dieu l’a ressuscité et lui a donné le nom au dessus de tout nom. Sa réponse à Dieu n’était pas seulement une réponse parmi d’autres, comme celle des prophètes, des martyrs et des saints, elle était la réponse de l’Homme, de l’Humanité, la Gloire parfaite rendue à Dieu par celui qui avait reçu de Dieu la mission de salut.
Nous sommes là, à l’Eucharistie, pour faire mémoire, pour nous souvenir, pour rendre présent ce que Jésus a fait. Nous le faisons avec les gestes et les paroles, avec les mots et les actes qu’il nous a laissés, avec le pain et le vin qui sont le corps et le sang livrés à Dieu au nom de tous les hommes. Mais nous le faisons aussi dans la suite de notre vie de tous les jours : ses paroles, ses gestes, ses symboles. Nous sommes sans cesse, si nous y prenons garde, appelés par Dieu, doués par lui de notre être de nature et de grâce, bénéficiaires dès notre naissance et notre baptême, de la révélation de l’Evangile et du don de l’Esprit. Désireux par conséquent, à notre mesure et non sans bien des faiblesses, d’entrer moyennant une fidélité quotidienne et en communion avec les autres, dans ce que Jésus appelle le Royaume de Dieu. De sorte que, à la fois, nous recevons le don de Dieu en Jésus-Christ, c’est-à-dire la Vie, et nous rendons en ce même Jésus-Christ ce que nous pouvons.
Je ne sais pas comment il sera donné, à chacun de nous, de rendre à Dieu dans la mort ce qu’il nous a donné en Jésus-Christ. Mais en attendant, nous venons à l’Eucharistie, afin que, comme le dit une prière eucharistique, notre vie ne soit plus à nous-mêmes mais à Lui qui est mort et ressuscité pour nous et à nos frères de ce monde parmi lesquels il nous est donné de vivre. Gloire à Dieu au plus haut des cieux et paix sur la terre aux hommes que Dieu aime. - 3 juin 2018
Année B - 27 mai 2018 – Solennité de la Trinité
Dt 4, 32...40; Rm 8, 14-17; Mt 28, 16-20
Homélie du F.Damase
Le ministère public de Jésus commence avec son baptême dans le Jourdain.
Première manifestation – dans toute la Révélation – du Dieu Père, Fils et Esprit.
Lorsque Jésus descendit dans le fleuve, l'Esprit descendit sur lui sous la forme d'une colombe, et il entendit la voix du Père disant : "Tu es mon fils bien-aimé, en qui j'ai mis tout mon amour."
Et, lors de sa dernière apparition, après sa Résurrection - l’évangile d’aujourd’hui, Jésus commande aux disciples d'aller enseigner toutes les nations, et de les baptiser "au nom du Père, et du Fils, et du Saint-Esprit".
À travers tout son enseignement Jésus témoigne du fait que Dieu est son Père et que tout son être se trouve exprimé dans cette relation de Fils à Père. Le Père se dit tout entier dans son Verbe ; et lorsque le Verbe incarné dit : "Abba, Père", il exprime dans ce simple mot tout son être de Fils. Il n'est rien d'autre. Jésus nous enseigne aussi tout au long de l'Évangile que son Père et Lui sont un, unis par l'Esprit d'amour qui leur est commun. Et, finalement, il nous révèle que nous aussi nous sommes appelés à vivre la même relation. Cet appel devient une réalité à travers le baptême que nous avons reçu.
Il y a donc une relation essentielle entre le mystère de la Trinité, que nous célébrons aujourd'hui et le baptême. Par le baptême nous devenons fils/filles du Père, dans le Fils, par l'Esprit d'amour qui nous est donné. L'Esprit descend alors sur nous et la voix du Père nous dit à nous aussi : "Tu es mon fils/ma fille bien-aimé(e) en qui j'ai mis tout mon amour ".
L'usage du baptême était un élément important de la culture religieuse dans le Judaïsme, au temps de Jésus. Dans la ligne de l'Incarnation, Jésus a transformé cette coutume dans le sacrement du baptême, tout comme il a assumé le rite du repas pascal pour le transformer dans le sacrement de l'Eucharistie.
Le baptême n'était pas un rituel isolé. La personne qui baptisait avait toujours un enseignement à transmettre ; et celle qui recevait le baptême acceptait de vivre en conformité avec cet enseignement. Elle acceptait de vivre une conversion. Jésus a conservé cette dimension du baptême. C'est pourquoi, lorsqu'il commande à ses disciples de baptiser les nations, il leur commande aussi de leur apprendre "à garder tous les commandements" qu'il leur a donnés.
Si nous gardons bien cette parole d'amour qui nous a été donnée, alors la promesse de Jésus à ses disciples se réalisera en nous : «Et moi, je suis avec vous tous les jours".
Pénétrons donc toujours plus à fond dans ce baptême qu'est notre vie chrétienne, afin de faire l'expérience de la présence du Père, du Fils et de l'Esprit. Notre vie deviendra alors une prière continuelle, car, comme le dit Paul dans la seconde lecture (tirée de la lettre aux Romains), l'Esprit de Dieu s'unira à notre esprit pour dire "Abba", ce mot affectueux en qui s'exprime toute la nature du Fils. C'est là la prière dont parle Paul dans ce même chapitre 8 aux Romains: "Nous ne savons pas prier; mais l'Esprit lui-même intercède pour nous en des gémissements inexprimables." (Rm 8 26) - 27 mai 2018
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Année B - PENTECÔTE
20 MAI 2018 -
Ac 2, 1-11; Ga 5, 16-25 ; Jn 15, 26...16,15
Homélie du Père Abbé Luc
« Quand il viendra, lui, l’Esprit de vérité, il vous conduira dans la vérité tout entière ». Telle la promesse que Jésus fait à ses disciples, et à nous aussi frères et sœurs : nous conduire dans la vérité toute entière. A ses disciples, durant sa vie terrestre, Jésus avait dit : « suivez-moi, venez à ma suite ». Mais au moment où Jésus quitte cette terre pour aller vers le Père, comment suivre Jésus qu’on ne verra plus, comment écoutez sa parole ? « L’Esprit de Vérité rendra témoignage en ma faveur, il vous conduira dans la vérité toute entière », nous assure Jésus. Dans un autre passage, Jésus annonce que l’Esprit Saint nous fera souvenir de tout ce qu’il a dit (Jn 14, 26). Oui, désormais, à la suite de Jésus ressuscité, l’Esprit Saint est notre guide, notre maitre intérieur pour nous rappeler les paroles de Jésus, pour nous les faire comprendre, et nous conduire dans la vérité toute entière. En cette fête de Pentecôte, réjouissons-nous de ce don de l’Esprit qui nous est fait, et en Eglise et personnellement.
Si on regarde en arrière, nous pouvons mesurer combien depuis 2000 ans, l’Esprit Saint n’a cessé de conduire l’Eglise vers la vérité toute entière. Peu à peu, à travers la réflexion des théologiens, assumée par les conciles, l’Eglise a mieux compris le mystère de Dieu, en sa vie trinitaire qui unit le Père au Fils dans l’Esprit. Peu à peu, l’Eglise est entrée dans une intelligence plus profonde du mystère du Dieu Amour, plein de miséricorde pour les hommes que nous sommes. L’Esprit l’a conduit au gré des tâtonnements et des impasses humaines, sans jamais l’abandonner dans les ornières où elle pouvait être tombée. Peu à peu, l’Eglise s’ouvre à une autre façon de comprendre son rôle dans l’histoire et dans le monde, comme une Eglise servante et pauvre, tournée vers tous. A l’écoute des aspirations des hommes, le concile Vatican II a tracé de nouvelles perspectives d’ouverture, de dialogue pour aller à la rencontre des autres religions. Certains ont pu craindre qu’on ait changé l’évangile. Mais comme le disait St Jean XXIII, « ce n’est pas l’évangile qui a changé, c’est nous qui commençons à mieux le comprendre ». Oui, l’Esprit Saint conduit l’Eglise et l’humanité vers la vérité toute entière. Une vérité qui dépasse toujours nos vues limitées. Comme la première lecture le suggère en forme de prophétie, l’Esprit conduit son Eglise pour qu’elle aille à la rencontre de tous les peuples, de toutes les cultures, afin de rendre témoignage de la Bonne Nouvelle de la mort et de la résurrection de Jésus. Dans la rencontre des cultures, l’Eglise grandit dans la compréhension de la vérité dont elle est porteuse, vérité qui la dépasse et qu’elle cherche toujours elle-même à mieux accueillir. Immense travail, et immense confiance de l’Esprit pour les pauvres instruments que nous sommes.
Chacun aussi personnellement, l’Esprit Saint nous conduit vers la vérité toute entière, la vérité que nous sommes et que nous portons en creux. Une des quêtes profondes de tout homme pourrait se résumer dans l’adage de la Grèce antique, qui a inspiré les philosophes : « connais-toi toi-même »… Nous restons un mystère pour nous-mêmes et nous cherchons à mieux nous connaitre. Sur ce chemin, l’Esprit Saint s’offre comme un guide sûr. Paul nous invite à nous mettre sous sa conduite. Si en nous, se vit parfois un affrontement entre les forces obscures et les forces de lumière, Paul nous révèle que l’Esprit Saint est à l’œuvre pour produire en nous « amour, joie, paix, patience, bonté, bienveillance, fidélité, douceur et maitrise de soi »… Notre vérité profonde n’est pas du côté des forces obscures qui nous abaissent, nous divisent intérieurement et collectivement, ou encore du côté des forces qui nous avilissent. Notre vérité profonde est à chercher et à accueillir du côté de tout ce qui nous établit dans la paix, dans la joie, du côté de tout ce qui nous relit aux autres pour tisser la communion dans la reconnaissance des dons de chacun. Notre vérité profonde est moins du côté de l’affirmation de soi que du côté de l’humble présence aux autres pour apporter sa pierre à l’édifice. La lutte est parfois difficile, car les choses sont souvent mélangées. Il nous faut discerner. Travail incessant à reprendre chaque jour. Pour entrer dans cette vérité, tournons nos regards vers Jésus. Sa vie a été toute entière sous la conduite de l’Esprit Saint. Elle a produit « amour, joie, paix, patience, bonté, bienveillance, fidélité, douceur et maitrise de soi ». Regardons tant de témoins de l’évangile qui ont laissé transparaitre dans leur vie la douce et forte présence de l’Esprit. Demandons encore à l’Esprit Saint d’être notre guide. Il nous est offert en cette eucharistie. - 20 mai 2018
Année B - HOMELIE du 7ème dimanche de Pâques - 13 mai 2018
(Actes 1, 15-26 ; 1 Jean 4, 11-16 ; Jean 17, 11-19)
En cette dernière semaine du Temps Pascal et ces 10 jours qui encadrent les fêtes de l’Ascension et de Pentecôte, la liturgie de l’Eglise nous invite de manière plus insistante et fervente à prier pour la venue de l’esprit, en chacun de nous, sur nos communautés et sur le monde entier.
Dans la seconde lecture, nous avons entendu Saint Jean nous dire : « voici comment nous reconnaissons que nous demeurons en Dieu, et Dieu en nous. Il nous a donné part à son Esprit ». Avoir part à l’Esprit de Dieu qu’est-ce à dire ? Comment caractériser cette participation à la vie divine ? Le passage du 4ème évangile, reprenant la grande prière de Jésus à l’heure de sa Passion peut nous guider et nous éclairer dans notre recherche. Je relèverai 3 aspects que cette prière solennelle souligne à propos de l’esprit : l’Esprit de Dieu est un esprit de Sainteté, c’est un esprit d’Unité et enfin un esprit de Vérité.
En commençant sa prière Jésus s’adresse à son Père en le nommant : « Père Saint », et c’est ainsi qu’il a appris à ses disciples à prier Dieu, comme lui : Abba Père, que ton Nom soit Saint, sanctifié. La prière eucharistique que nous allons offrir dans un instant commence elle aussi, après les chants de la Préface et du Sanctus (Dieu 3 fois saint) par les invocations : « Toi qui est vraiment Saint, toi qui es la source de toute sainteté » ou bien « Tu es vraiment Saint, Dieu de l’Univers, c’est toi qui sanctifie toute chose par ton Fils, Jésus-Christ, Notre Seigneur, avec la puissance de l’Esprit Saint ».
La Sainteté, c’est donc le propre de Dieu, et Il veut que nous soyons saints, comme lui-même est Saint . A une époque ancienne, la sainteté était assimilée au sacré : elle séparait les lieux (pensons au sanctuaire, au Saint des Saints du Temple de Jérusalem) et les personnes (les prêtres, le Grand Prêtre, les lèvites qui étaient séparés du Peuple). Avec la venue de Jésus, le Saint de Dieu par excellence, la sainteté est répandue sur chacun des baptisés qui reçoit l’Esprit en rémission de ses péchés et le fait accéder à la vie nouvelle en Christ Ressuscité. Désormais, les disciples peuvent se nommer entre eux, saint, et tous les croyants sont appelés par vocation à la sainteté, ainsi que l’a vigoureusement souligné un chapitre de la Constitution du Concile Vatican II sur l’Eglise. Eglise peuple de Dieu, peuple de saints : c’est aussi ce que vient de nous rappeler le pape François dans une récente exhortation apostolique : « Jubilate et exultate ».
Esprit de Sainteté, mais aussi Esprit d’Unité. « Père Saint, garde mes disciples unis dans ton nom, le Nom que tu m’as donné, pour qu’ils soient Un, comme nous-mêmes, nous sommes Un, Toi en moi et Moi en Toi » Nous touchons là au grand mystère de la Trinité, ou de la Tri-unité, comme le désignait un théologien du siècle dernier, le Père Congar. Un mystère qui dépasse notre intelligence et notre sagesse humaine, mais qui est le cœur de notre foi chrétienne. Avoir part à l’Esprit de Dieu, c’est entrer dans une communion de personnes divines, communion d’amour entre le Père et le Fils, communion personnifiée elle-même dans l’œuvre de l’Esprit.
Jésus ne prie pas son Père pour lui-même, alors que son existence terrestre va s’achever dans la détresse, dans peu de temps, sur la Croix. A l’heure de sa Passion, il prie pour ses disciples, pour ceux que Dieu lui a confiés, eux qui vont rester dans le monde et qui sont soumis à l’esprit du monde, opposé à la sainteté et à l’unité : « je ne prie pas pour que Tu les retires du monde, mais pour que tu les gardes du Mauvais. Ils n’appartiennent pas au monde, de même que moi, je n’appartiens pas au monde ».
L’esprit de sainteté, d’unité ne peut s’entendre avec la mondanité, la division et la dispersion. C’est l’enjeu d’un combat qui reste toujours d’actualité et qui touche au dernier aspect relevé par Jésus dans sa prière : celui de la vérité. « Père Saint, sanctifie-les dans la Vérité. Ta Parole est Vérité. Pour eux, je me sanctifie moi-même afin qu’ils soient, eux aussi, sanctifiés dans la Vérité ». Trop souvent la mondanité, la dispersion dans les soucis de la vie voisinent avec le mensonge. Jésus prie pour que ses disciples ne se laissent pas entrer en tentation, qu’ils soient délivre du Malin, du Mauvais, du Menteur. A la question que lui posait Thomas un peu auparavant : Seigneur montre nous le chemin qu’il faut prendre pour te suivre, Jésus avait répondu : « Moi, Je Suis le Chemin, la Vérité, la Vie ».
Ainsi, avoir part à l’Esprit de Dieu, c’est marcher sur ce chemin de Vérité et de Vie à la suite du Christ. C’est lui qui nous conduit à son Père et Notre Père, afin de demeurer dans l’Amour, puisque Dieu est Amour.
Sainteté, Unité, Vérité. Il y aurait bien d’autres aspects pour qualifier l’action de l’Esprit de Dieu à l’œuvre en nous et autour de nous. L’Ancien Testament, dans le livre d’Isaïe, mentionne 7 dons accordés au Serviteur de Dieu qui apporte la consolation. Saint Paul, dans son épitre aux Galates énumère 9 formes de fruit de l’Esprit dans son combat contre la chair.
Et pour nourrir notre prière à l’Esprit Saint en cette semaine, l’Eglise nous offre aussi dans son répertoire des hymnes très riches tant pour les textes que pour les mélodies. Je pense en particulier aux Veni Creator Spiritus, ou la Séquence de la Pentecôte : Veni Sancte Spiritus, pour les plus anciennes, mais aussi aux compositions plus récentes dues à des compositeurs poètes comme Patrice de la Tour du Pin ou Didier Rimaud. Nous les trouvons facilement dans nos « Prions en Eglise » ou « Magnificat ».
Pour terminer, revenons au cœur de la prière de Jésus de l’évangile de ce dimanche, cette prière toute entière soulevée dans la mouvance de l’Esprit Saint et tournée vers le Père : « maintenant que je viens à toi, je parle ainsi dans le monde, afin qu’ils aient en eux ma joie, et qu’ils soient comblés de cette joie ».
La JOIE, comme fruit et signe par excellence de notre participation à la vie de l’Esprit. Joie imprenable et plus profonde que tous les plaisirs artificiels du monde.
Joie de l’Evangile qui rayonne de la parole et du visage de notre Pape François et qui émane de tous les textes du magistère qu’il offre à l’Eglise : « Gaudium Evangelii » en premier lieu, mais ensuite, « Amoris Laeticia », « Laudato Si ‘ », « Gaudete et Jubilate» (à propos de l’appel à la sainteté), jusqu’à ses dernières recommandations à propos des études dans les Universités Catholiques : « Gaudete in veritate »
Cette joie est la note finale de la séquence de la Pentecôte : «Viens Esprit de Sainteté, Donne nous la joie pérenne, la joie éternelle - Da perenne gaudium » - 13 mai 2018
AMEN
Année B - Ascension du Seigneur - 10 mai 2018
Ac 1 1-11; Eph 4 1-13; Mc 16 15-20
Homélie du F.Bernard
L’Ascension du Christ est déjà notre victoire. Nous l’entendions à l’instant dans l’oraison de ce jour. L’Ascension est déjà notre victoire, car une humanité, celle de Jésus-Christ, en tout semblable à la nôtre, hormis le péché, est désormais dans la Gloire de Dieu, à la droite du Père. Et cette humanité n’est pas seulement un modèle que nous aurions à imiter, elle est la Tête dont nous sommes le Corps indissociablement uni à elle.
Et si la Tête est présentement dans le Gloire, le Corps tout entier est destiné à la suivre. Dès maintenant nous avons, selon les mots de l’épitre aux Hébreux, « une ancre aussi solide que ferme à laquelle nous sommes définitivement arrimés » (He 6,19). D’ailleurs Jésus, lui-même, nous l’avait dit : « Dans la maison de mon Père, il y a de nombreuses demeures. Je m’en vais vous préparer une place, afin que là où je suis vous soyez vous aussi » (Jn14,1-3).
L’Ascension du Christ est déjà notre victoire. Désormais nous savons pleinement ce que le Seigneur attend de nous. Il l’a dit aux disciples avant de les quitter : « Soyez mes témoins à Jérusalem, dans toute la Judée et la Samarie, et jusqu’aux extrémités de la terre. » (Ac 1,8). Il l’avait dit équivalemment aux apôtres après sa Résurrection : « Allez dans le monde entier. Proclamez la Bonne Nouvelle à toute la création. » (Mc 16,15)
Jusqu’aux extrémités de la terre…Nous pourrions dire avec le pape François, jusqu’aux périphéries du monde, partout où il y a des hommes à rejoindre dans leur détresse, dans leur désespérance, dans leurs nuits. Les périphéries de la pauvreté et de l’isolement, les périphéries des souffrances du corps et de l’âme, les périphéries du monde enfermé dans le péché et l’incroyance. Immense programme missionnaire confié en ce jour au Corps tout entier, à chacun de ses membres.
Proclamez la Bonne Nouvelle à toute la création. Pas seulement toute l’humanité, mais toute la création, tout le cosmos, toute notre Terre. Sans doute ne s’agit-il pas d’aller prêcher aux oiseaux, comme saint François, même si cette belle histoire est pleine de sens. Il s’agit en tout cas de prendre conscience de notre responsabilité vis-à-vis de la Terre qui nous a été confiée par le Créateur. La gérer, la cultiver pour qu’elle aille au bout de sa destinée au service de l’humanité et pour la gloire de Dieu. « Cette Terre, nous dit saint Paul, gémit présentement, en travail d‘enfantement. Elle aussi aspire à être délivrée de la corruption pour entrer dans la liberté des enfants de Dieu. » (Rm 8, 19sq)
L’Ascension est déjà notre victoire. A cette mission d’annoncer la Bonne Nouvelle du Christ, au bout du monde, à toute la création, s’en ajoute inséparablement une autre. Et là je renvoie à la deuxième lecture de ce jour, cette lettre aux phésiens si pleine d’enseignements. Il s’agit de faire grandir le Corps, pour qu’il atteigne à la plénitude de la stature du Christ, à l’état de l’Homme parfait.
Faire grandir le Corps, mais comment ? En progressant dans la voie de l’unité. Un seul Corps, un seul Esprit. Un seul Seigneur, une seule foi, un seul baptême. Un seul Dieu et Père de tous, qui règne au- dessus de tous, par tous et en tous. Faut-il promouvoir une uniformité ? Non, mais reconnaître la diversité des dons spirituels distribués par le Christ à chacun d’entre nous. Comment y arriver ? Si non dans l’Esprit qui nous garde dans l’unité par le lien de la paix, et fait grandir le Corps dans l’Amour.
Ainsi le Corps se construit dans l’Amour. C’est la dernière phrase de ce passage de la lettre aux Éphésiens. L’Amour, c’est un autre nom de l’Esprit- Saint. La fête de ce jour nous prépare à la Pentecôte, où nous sera donné celui que le Seigneur avait promis à ses disciples, « L’Esprit de vérité qui les conduira à la vérité tout entière » qui les fera grandir dans la vérité de l’amour jusqu’à atteindre la plénitude de la taille du Christ.
Aujourd’hui c’est déjà notre victoire. 10 mai 2018