vendredi 15 août 2025 : fête de l’Assomption, horaire des dimanches (vigiles la veille à 20h45, messe à 10h) + concert à 16h.

Nota : L’office de None (14h45) sera prié au dolmen de ND de la Pierre-qui-Vire.

Homélies

Liste des Homélies

Homélie du 18 avril 2019 — Jeudi Saint — Père Abbé Luc
Cycle : Année C
Info :

JEUDI SAINT - 18.04.2019

Ex 12, 1-8.11-14 ; 1 Co 11,23-26 ; Jn 13, 1-15

Homélie du P.Abbé Luc

Texte :



Frères et sœurs,

Au début de cette célébration, nous avons prié ainsi avec l’oraison : « ton Fils unique, avant de se livrer lui-même à la mort, a voulu remettre à son Eglise, le sacrifice nouveau de l’Alliance éternelle ». Déjà, dans la première alliance, Moïse avait transmis des instructions précises pour accomplir le rite du repas pascal. Ainsi le peuple célèbrerait le mémorial du passage du Seigneur préservant son peuple de la mort, et le sauvant des eaux. Ce soir, au cours du repas pascal, Jésus laisse désormais à ses disciples, le sacrifice nouveau, le mémorial de son propre sacrifice, en un double geste : d’un côté l’offrande de son corps et de son sang, dans le pain et le vin, et de l’autre le lavement des pieds, signe de son abaissement à notre service. Quand l’Eglise fait mémoire de ce double geste, particulièrement ce soir, elle accueille pour elle-même et pour toute l’humanité « le sacrement de l’amour » de Dieu. Elle devient alors témoin de « l’Alliance éternelle » que Dieu désire nouer avec l’humanité.

Je suis conscient en prononçant ces mots, de dire des réalités chargées de sens. Car la lumière de la foi nous laisse entrevoir, à travers des signes simples, une profondeur insoupçonnée. Elle nous donne de comprendre ainsi combien notre humanité n’est pas laissée à elle-même. Elle n’est pas abandonnée au non-sens de la mort et du mal. Elle est accompagnée. Depuis Moïse, le petit peuple des croyants d’Israël porte cette espérance. Le Dieu d’Abraham, d’Isaac et de Jacob, l’aime et lui ouvre des passages, des chemins de vie. Avec Jésus, le Dieu de Moïse poursuit son œuvre d’alliance. Scellée en un pacte, celui du sang versé de Jésus, « l’alliance nouvelle » nous donne d’oser nous tenir avec confiance, devant notre Dieu, comme devant un Père. Avec Jésus, mort et ressuscité, et en Lui, s’est nouée une relation unique entre le ciel et la terre, entre Dieu et les hommes. En célébrant l’eucharistie, l’Eglise donne à chacun accès à cette relation de vie et d’amour.

En méditant et en célébrant ce mystère d’alliance ce soir, il nous est proposé de tendre simplement nos pieds au Seigneur Jésus pour qu’il les lave. Quelques-uns d’entre nous le ferons tout à l’heure au nom de tous. Etre disciple de Jésus, c’est cela d’abord : lui présenter nos pieds, et tout notre être pour qu’il le purifie. Avant de songer à ce que nous devons faire, il est bon de consentir à reconnaitre notre profonde incapacité à faire le bien par nous-mêmes. Au début de chaque eucharistie, n’est-ce pas ce même mouvement par lequel nous nous disposons à accueillir la vie, en nous reconnaissant pécheur… Nous nous présentons comme ayant besoin d’être sauvés. En ce soir d’avril 2019, avec toute l’Eglise, nous pouvons nous tenir là plus conscients de notre faiblesse. Nous tenir là avec les membres du Corps du Christ, nos frères qui ont gravement blessé, et leurs frères et soeurs plus vulnérables, et le corps ecclésial tout entier, discrédité dans la confiance qu’on lui porte. Avec toute l’Eglise, avec les personnes blessées et ceux qui ont blessé, mettant notre assurance dans la miséricorde du Christ, laissons-nous laver et régénérer… Et entrons ensemble dans une nouvelle attitude faite d’humilité, de vigilance, de respect et de vérité en tous nos rapports humains. Sauvés par le Christ, lavés et purifiés par lui, déjà nous pouvons nous mettre au service de nos frères. « Si moi, le Seigneur et le Maitre, je vous ai lavé les pieds, vous aussi, vous devez vous laver les pieds les uns des autres ». Ce service sera souvent caché. Il n’aime pas la publicité. Appelé à grandir en vérité et générosité, il ne connait pas de limitation. En ce domaine, comme en bien d’autres, à la suite de St Antoine le moine du désert, nous pouvons dire : « aujourd’hui, je commence ». Dans le don de nous-mêmes, pas possible de capitaliser pour se reposer sur ses acquis… Alors, aujourd’hui, comme le Christ et avec lui, je m’incline vers mes frères pour les servir. Avec Lui, je fais alors de ma vie un sacrifice nouveau. Avec Lui et en Lui, je deviens un maillon vivant de l’Alliance éternelle qui se noue entre Dieu et l’humanité.

Homélie du 14 avril 2019 — Dimanche des Rameaux — Père Abbé Luc
Cycle : Année C
Info :

RAMEAUX - 14.04.2019

Is 50, 4-7 ; Ph 2, 6-11 ; Lc 22,14 – 23,56

Homélie du Père Abbé Luc

Texte :

Frères et sœurs,

Peut-être ressentez-vous comme moi une sorte d’appréhension au début de chaque semaine sainte, comme un mouvement de recul avant de faire un grand saut… A l’approche de la Passion et de la Résurrection de Jésus, ne sommes-nous pas devant quelque chose de grand et de décapant en même temps ? Le récit de la Passion que nous venons d’entendre met cela sous nos yeux de façon éloquente. En quelques pages, apparaissent et la grandeur du mystère de la personne de Jésus, et la misère de notre humanité dans sa façon de le recevoir. D’un côté une intense présence, de l’autre des êtres perdus ou aveugles. Jésus conduit sa vie comme une offrande « ceci est mon corps donné », et les disciples cherchent qui est le plus grand d’entre eux. Jésus combat contre l’angoisse à l’écoute de la volonté de son Père. Les disciples dorment, accablés de tristesse. Pierre nie connaitre Jésus, celui-ci par un regard le lui pardonne. Les chefs du Peuple cherchent comment faire périr Jésus ; Lui laisse transparaitre son identité de Fils de Dieu qui le condamne. Pilate renonce à ses convictions en livrant lâchement Jésus, lui le Roi des juifs sans armées ni prestige. Jésus invoque le pardon sur ses bourreaux ; les passants et les soldats l’injurient… L’obscurité se fait sur toute la terre ; Jésus, seul, remet son esprit entre les mains de son Père. Dans ce combat entre les ténèbres et la lumière, quelques voix s’élèvent timides comme des éclairs de vérité : les pleurs des femmes, la confiance du bon larron, l’étonnement admiratif du centurion, la compassion du juif Joseph.

Durant cette semaine sainte, laissons la lumière du mystère de Jésus venir éclairer les parts ombreuses de notre humanité qui se dérobent encore à l’œuvre de grâce… - 14avril 2019

Homélie du 07 avril 2019 — 5e dim. du Carême — Frère Antoine
Cycle : Année C
Info :

Année C Sème Dimanche de Carême- 7 Avril 2019

Isaïe 43,16-21 ... Philippiens 3, 8 -14 ... Jean 8, 1-11

Homélie du Frère Antoine

Texte :



Frères et Sœurs, cet Evg commence par une scène empreinte_de

paix où Jésus enseigne au temple, mais la paix ne va pas durer! un groupe surgit et présente

à Jésus une femme accusée d'adultère et là, tout bascule!

De la paix nous passons à la violence où paroles et silence vont s'affronter.

Paroles coléreuses, Paroles trompeuses, car dit le texte, leur but est de piéger Jésus.

Paroles accusatrices et redoutables leur projet est d'accuser Jésus de ne pas respecter

La Loi Mosaïque et leur objet est la mort, .... la mort d'une femme qui selon la loi mérite

un tel sort.

Paroles mensongères, desséchée par la sécheresse des lois, et qui dans ce microcosme

révèlent toute une face du monde, le monde de toujours .. le monde d'aujourd'hui.. !

En réponse à cette violence se dresse alors un mur.. un mur de silence .. un silence

immense ... le silence de Dieu .. le silence de l'amour ..... silence accompagné d'un signe

énigmatique, totalement silencieux lui aussi: Même aujourd'hui, nous ne savons pas ce que

Jésus a écrit sur le sol, mais ce geste alourdit le silence de Jésus, il est comme un refus de ce

Mal dont le masque a pris le visage d'une apparente justice.

« Que celui d'entre vous qui est sans péché, soit le premier à lui jeter une pierre »

Brusquement le silence change alors de camp ... et change de sens ...

«Ils s'en allèrent un par un,en commençant par les plus âgés » ....

Un par un ... ces hommes qui partent lentement, sans un mot, évoquent un défilé, ce

long défilé de notre humanité qui, générations après générations, est vaincue par cet ennemi

sournois, le péché ... le péché, cette infidélité à l'amour!

« Va, et désormais ne pèche plus! »

Ces paroles achèvent cette rencontre extraordinaire entre Jésus et la femme :

Dès son arrivée, elle est accusée, laissée debout, au centre, tandis que Jésus ... assis,

regarde le sol,. Les accusations reprenant, Jésus prend la parole et se baisse à nouveau sans

adresser-un- seul- regard à ceux qui lentement partent l'un après l'autre ... Jésus les ignore

totalement ...

Et c'est alors qu'il lève la tête et pour la première fois, la regarde ... il ne la jamais

regardée en position de faiblesse .. de condamnée plantée, muette, au milieu de ses juges.

C'est une fois la menace disparue qu'il la regarde.... Il la regarde du bas vers le haut et,

dans une attitude de serviteur, il lève les yeux, s'adresse à elle ... elle ... debout ... immobile ,

toute pénétrée de la miséricorde totale du Fils de Dieu ..... tout accueil du pardon reçu et de

la Vie retrouvée.

Aujourd'hui, le Seigneur vient nous dire à chacun:

Va, .. tout pardon accueilli engage à suivre la Loi véritable, la Loi d'amour.

Va ... tout pardon accueilli nous appelle à aimer à aimer un peu moins mal. - 7 avril 2019

Homélie du 31 mars 2019 — 4e dim. du Carême — Frère Hubert
Cycle : Année C
Info :

Année C - 4° dimanche de Carême - 31 mars 2019

JOs 5 10-12; 1 Co 5 17-21; Luc 15 1-32;

Homélie du F.Hubert

Texte :

Quand il commença [sa vie publique], Jésus, nous dit st Luc, était, à ce que l’on pensait,

fils de Joseph, fils d’Adam, fils de Dieu. Jésus, fils de Dieu.

Un homme avait deux fils…

Un père et deux fils.

Un père qui laisse ses fils décider de leur vie.

Deux fils : celui qui est parti et revenu, perdu et retrouvé ;

celui qui est toujours resté là, mais reste dehors, perdu ?

Nos regards s’arrêtent souvent sur le prodigue :

pour une part, nous nous reconnaissons aisément en lui,

et peut-être nous rassurons-nous en nous disant que le Père nous accueillera toujours…

Béni soit Dieu si, faisant vraiment retour sur nous-mêmes,

nous nous levons pour retourner vers lui et faisons l’expérience de son accueil sans mesure,

au-delà de nos jugements sur nous-mêmes et sur nos actes.

Cependant, la parabole vise bien clairement en premier l’attitude du fils aîné :

elle est une réponse aux pharisiens et aux scribes qui récriminaient contre Jésus :

« Cet homme fait bon accueil aux pécheurs, et il mange avec eux ! »

Les trois paraboles, de la brebis perdue, de la pièce d’argent perdue et du fils perdu,

sont racontées par Jésus à l’intention de ces pharisiens, satisfaits d’eux-mêmes,

juges et murmurateurs.

Elles proclament les choix du vrai Dieu.

Ces choix sont accomplis par Jésus, son Fils unique.

Or qu’a-t-il fait, ce Fils unique, le Fils aîné par excellence ?

Il est venu au Jourdain se faire baptiser par Jean-Baptiste.

Il a choisi de descendre dans les eaux de la mort, comme et avec les pécheurs, ses frères ;

lui, l’Innocent, le Très Saint, il fait corps avec nous, pécheurs,

pour faire de nous ses frères, et donc des fils.

Son choix est de n’exclure aucun de nous.

Loin de dire : « moi, je suis juste, eux sont pécheurs »,

il endosse notre péché pour nous donner sa justice.

Ayant la condition de Dieu, il ne retint pas jalousement le rang qui l’égalait à Dieu,

mais il s’est anéanti, prenant la condition de serviteur.

Ainsi, il devenu le premier-né d’une multitude de frères (Rm 8, 29),

Et, dans ce choix même, il reçoit la parole du Père :

« Tu es mon Fils bien-aimé ; en toi, je trouve ma joie. »

A l’autre bout de l’évangile, au terme de sa vie, il reçoit le baiser de Judas :

il ne repousse pas son disciple, il lui offre un vrai baiser d’amour et d’espérance,

il l’appelle par son nom.

Et il se fait compagnon de crucifixion de deux malfaiteurs,

dont l’un reconnaîtra son innocence et recevra de lui l’ouverture immédiate du Paradis :

Jésus retournera vers son Père avec ce premier frère arraché au malheur.

A l’inverse de Jésus, l’aîné de la parabole, jugeant indigne son frère cadet,

se met en colère contre son père lui-même, à qui il reproche sa miséricorde.

Ce faisant, il n’a plus ni père ni frère.

Il refuse le festin, le repas de la convivialité, de l’alliance.

Il reste dehors, seul. Il s’exclue lui-même.

Il ne tiendrait qu’à lui de demeurer toujours frère de son cadet, et fils de son père.

Mais précisément, il ne l’appelle pas « Père »…

Les paroles du pharisien, dans une autre parabole que nous entendions hier, vont bien dans sa bouche :

« Je ne suis pas comme les autres hommes, ou encore comme ce publicain »….

« pas comme mon frère cadet… »

Aujourd’hui l’actualité nous jette, en plus, à la figure, que derrière une apparente justice,

peuvent se cacher de graves dépravations…

Son père est pourtant sorti vers lui, comme vers le cadet, pour le presser d’entrer.

Dans son murmure et sa colère, ce fils – qui pourtant demeure toujours fils pour son père –

ne trouve plus le chemin de la maison et la porte d’entrée. Perdu ?

Le récit reste cependant en suspens : peut-être son cœur de pierre se laissera-t-il changer en cœur de chair ?

Cette invitation retentit pour toujours à l’adresse de chacun de nous.

« Il fallait festoyer et se réjouir, car ton frère était perdu et il est retrouvé »…

Toi, n’es-tu pas perdu aussi, en ne reconnaissant pas de quel amour tu es aimé,

en refusant d’entrer ?

Puisse l’eucharistie, qui – sous forme de symbole – n’est rien moins que le festin du Royaume,

être reçue par nous, comme une communion d’amour avec tous les membres du Corps du Christ,

nos frères et sœurs, proches et lointains, tous pécheurs rachetés et aimés, comme nous !

Nous ne pouvons être en communion avec Jésus, sans accueillir tous les membres de son Corps.

Entrons dans la maison, faisons corps, n’excluons personne.

En ces temps douloureux de l’Eglise, c’est peut-être particulièrement difficile

et d’autant plus nécessaire.

Qu’amour et vérité, justice et miséricorde, se rencontrent et nous guérissent !

Que notre célébration eucharistique nous donne de créer, garder, développer, du lien,

de vivre dans l’Alliance, et non à notre profit, seuls contre tous.

Pharisien irréprochable, Paul a fait l’expérience, du don incommensurable de Dieu

et de sa gratuité absolue.

Irréprochable, il a compris qu’il était le premier à qui Dieu faisait miséricorde.

Alors, avec insistance, il invite ses frères à se laisser réconcilier par Dieu :

« au nom du Christ, laissez-vous réconcilier avec Dieu.

Celui qui n’a pas connu le péché, Dieu l’a pour nous identifié au péché

afin qu’en lui nous devenions justes de la justice même de Dieu. »

Frères et sœurs, fixons notre regard sur Jésus,

pour apprendre comment vivre en fils et en frères,

pour recevoir de lui son Esprit :

son Corps et son Sang nous sont offerts pour cela.

Lui, le Fils unique, il a accepté de devenir avec nous le fils perdu.

Au terme de sa Pâque, en sa résurrection, il a entendu la voix de son Père :

« Mon fils que voilà était mort et il est revenu à la vie. Il était perdu et il est retrouvé » !

Mais il n’est pas revenu seul : il est revenu avec la multitude de ses frères. - 31 mars 2019

Homélie du 24 mars 2019 — 3e dim. du Carême — Frère Bernard
Cycle : Année C
Info :

Année C -3ème dimanche de Carême, 24 mars2019

Ex 3 1-15; 1 Co 10 1-12; Luc 13 1-9;

Homélie du F.Bernard

Texte :

Deux drames, comme l’actualité nous en fournit presque tous les jours des exemples à travers le monde, dans les médias. Mais ceux-ci se sont passés dans la Ville Sainte, au Temple, ou à proximité immédiate des remparts, dans la vallée du Cédron. On comprend l’émotion qu’ils ont pu susciter chez les habitants de Jérusalem.

D’abord une bavure policière ou politique. Pilate n’en était pas à une près. Il réprimait férocement les attroupements de Juifs qu’il jugeait vite séditieux. Ici des Galiléens accomplissant leurs devoirs religieux au Temple. Parmi eux il y aurait pu y avoir la famille de Jésus qui se rendait en pèlerinage à Jérusalem trois fois par an. Pilate avait mêlé le sang des victimes à celui des sacrifices.

Puis un drame technique : l’écroulement d’une tour. Dix-huit personnes écrasées. Faute de construction, défaut de maintenance, ou tout simplement l’usure du temps ? Aujourd’hui on ouvrirait un procès pour déterminer les responsabilités. Mais quand ces drames arrivent, les mêmes questions reviennent : elles sont de tous les temps. Pourquoi ces malheurs ? Pourquoi atteignent-ils ces personnes précisément ? Comment Dieu peut-il permettre cela ?

La réponse de Jésus, formulée à deux reprises, est surprenante : « Si vous ne vous convertissez pas, vous périrez tous également ». Sommes-nous alors destinés à connaître une fin aussi tragique ? Vraiment je ne le souhaite pas. Mais ce n’est pas de cela dont il s’agit. De quoi donc ? Jésus nous dit plutôt que toute mort est absurde, qu’elle soit le fait de la violence des hommes, d’une défaillance technique, d’une catastrophe naturelle, ou tout simplement si nous mourons dans notre lit au terme de nos jours.

La mort est absurde. Car nous pressentons bien que nous ne sommes pas faits pour elle, plutôt pour une vie qui dure, comme si elle ne devait s’arrêter. Mais la mort est notre lot, depuis que l’homme n’a plus accès à l’arbre de vie, placé dans le jardin d’Éden. La mort met inexorablement fin à nos possessions, à nos projets, à nos affections. « Tu es poussière et tu retourneras à la poussière », dit Dieu ; et le psaume le redit à sa manière, brutalement : « L’homme comblé ne dure pas. Il ressemble au bétail qu’on abat » (Ps. 48).

« Si vous ne vous convertissez pas, vous périrez tous également ». Mais qu’est-ce se convertir ? Radicalement, c’est croire que Dieu est le Vivant, qu’il a un dessin d’amour et de salut pour nous, qu’il a fait à son image, comme sa ressemblance. Alors, s’il en est ainsi, il convient de méditer très attentivement la première lecture que nous avons entendue. Elle était tirée du livre de l’Éxode (ch. 3). Elle fait mémoire du moment fondateur de notre foi, de l’évènement qui inaugure l’histoire, qui donne sens en Dieu au temps que nous vivons, qu’il soit sublime ou banal. Tout peut dès lors être vu en Dieu, pour Dieu. Même la mort a perdu son côté tragique. Elle n’est plus anéantissement, mais passage, exode, transitus.

Dieu en effet s’est manifesté. Certes il l’avait déjà fait aux ancêtres, Abraham, Isaac et Jacob, mais c’était comme à titre individuel. En Moïse, Dieu se manifeste à un peuple, plutôt un rassemblement d’individus, plus ou moins apparentés, des immigrés, les Hébreux. Il en fait un peuple, Israël, son peuple particulier dont il sera son Dieu. Et par le moyen de cette élection unique, Dieu rejoint tous les peuples de la terre, déjà bénis dans la bénédiction de l’ancêtre Abraham (Gn 12).

Dieu fait plus : il révèle son Nom, ce Nom ineffable, que nous ne pouvons plus prononcer. Mais nous savons qu’il signifie : Je Suis, Je Suis qui je Suis, je Suis qui je Serai, ce Nom qui trouve son accomplissement jour après jour dans l’alliance conclue pour toujours entre Israël et son Dieu.

Mais revenons à l’Évangile de ce jour. Car si Dieu s’est révélé à Moïse, s’il n’a cessé pendant quarante ans d’instruire son peuple au désert, de le corriger, c’est pour notre instruction, à nous qui sommes dans les derniers temps. Le Seigneur attend maintenant notre réponse à son appel. « Si vous ne vous convertissez pas, vous périrez tous également »

La cognée est à la racine de l’arbre, prête à abattre le figuier, s’il continue à ne pas porter de fruit. Mais la miséricorde de Dieu vient en complément de sa justice. Le propriétaire, c’est Dieu. Le vigneron, c’est Dieu aussi. Notre conversion, c’est aussi l’œuvre de Dieu en nous. « Donne ce que tu commandes, disons-nous, et commande ce que tu veux ».

En ce temps de Carême, ce temps favorable, nous pouvons reprendre pleinement à notre compte ce que dit l’oraison de ce jour : « Toi, la source de toute bonté et de toute miséricorde, tu nous a dit comment guérir du péché, par le jeûne, la prière et le partage. Tu connais notre faiblesse. Nous avons péché, mais patiemment relève-nous avec amour. » Amen - 24 mars 2019

Homélie du 17 mars 2019 — 2e dim. du Carême — Frère Guillaume
Cycle : Année C
Info :

Année C - HOMELIE du 2ème dimanche Carême – 17/03/2019

(Genèse 15,5-18 ; Philippiens 3,17-4,1 ; Luc 9,28-36

)

Homélie du F.Guillaume

Texte :



Frères et sœurs,

Chaque année, au second dimanche du Carême, la liturgie de l’Eglise nous donne à entendre le récit de la Transfiguration de Jésus sur la Montagne, dans l’un ou l’autre des évangiles synoptiques. Aujourd’hui, en année C, Saint Luc nous entraîne dans cette contemplation, qui est une anticipation du mystère pascal de la Passion et de la Résurrection du Christ. Arrêtons-nous un instant, si vous le voulez bien sur quelques détails propres à cette version lucanienne, pour en tirer éventuellement quelque profit spirituel sur notre route vers Pâques.

« Jésus prit avec lui, Pierre, Jean et Jacques et il gravit la montagne pour prier ».

Luc est le seul à mentionner cette prière de Jésus. A de nombreuses reprises dans son évangile il nous montre Jésus priant, surtout à l’occasion d’évènements importants : lors du baptême dans le Jourdain, avant le choix des 12 apôtres, avant de leur apprendre le Notre Père, et surtout au moment de Sa Passion à Gethsémani et sur la Croix. En quoi consiste cette prière de Jésus dans ce récit de la Transfiguration ?

Dans un premier temps, il s’agit d’une conversation, d’un entretien avec Moïse et Elie, à propos d’un départ, d’un « exode » (selon le terme en grec) que Jésus doit accomplir à Jérusalem. Les 3 disciples assistent à cette conversation, mais ils sont surtout impressionnés par l’effet de la prière sur le visage de leur Maître et sur ses vêtements. La Gloire de Dieu rayonne d’un éclat éblouissant sur les 3 personnages. Dans ce premier temps, le texte ne dit pas que les apôtres sont saisis de crainte, mais qu’ils sont plutôt accablés de sommeil, comme ils le seront à nouveau à Gethsémani, à l’heure de la Passion et de la prière d’agonie de Jésus.

Eveillés cependant, ils voient, ils contemplent. Pierre essaie bien de parler, de balbutier, mais il ne sait pas trop ce qu’il dit. Ils se sentent pourtant plutôt bien, et Pierre voudrait prolonger la situation en installant des tentes.

C’est alors que le texte entre dans un second temps de la prière de Jésus. Une nuée recouvre la montagne, tous les personnages y pénètrent et une grande crainte, cette fois-ci, saisit les apôtres. Au cœur de la prière, une voix venue du Ciel se fait entendre et lance les mêmes paroles (ou des paroles très voisines) que celles qui avaient été prononcées au jour du baptême dans le Jourdain : « Celui-ci est mon Fils, Celui que j’ai choisi. Ecoutez-le ! » Après la conversation entre Jésus, Moïse et Elie, après les balbutiements de Pierre, après cette Voix venue du Ciel, la prière se fait alors silence. Les disciples vont garder au fond de leur cœur ce qu’ils ont vu, dit le texte, et aussi ce qu’ils ont entendus, et ils vont méditer cet évènement sans le comprendre, tout comme Marie gardait en son cœur les évènements entourant la naissance et la croissance de son enfant, à Bethléem et à Nazareth.

Un autre trait caractéristique de Saint Luc dans ce récit de la Transfiguration c’est la référence délibérée à l’Ancien Testament et au livre de l’Exode, qui estdavantage soulignée qu’en Matthieu et Marc. En effet le départ que Jésus doit accomplir à Jérusalem est présenté par l’évangéliste, comme le nouvel Exode, la nouvelle Pâque, de la Mort et de la Résurrection du Christ. La mention des tentes par Pierre, la présence de la nuée qui recouvre la montagne, la Gloire de Dieu qui repose sur les personnages, l’aspect du visage rayonnant de Jésus, rappelant celui de Moïse descendant du Sinaï, après le don de la Loi. Tous ces détails veulent souligner l’inscription de la mission du Christ dans l’histoire du salut. Les temps sont accomplis : Jésus est le Fils bien-aimé, qu’il faut désormais écouter, regarder et suivre. Il est le nouveau Moïse, le Messie, le sauveur annoncé par les prophètes et les saints de l’Ancienne Alliance.

Alors, frères et sœurs, que retenir de ce récit pour nous aujourd’hui, sur notre chemin de Carême ? Il nous faut l’accueillir comme un texte d’espérance, de consolation pour notre foi, si jamais comme l’exprime l’épitre aux Hébreux : « la foi est le moyen de posséder déjà ce que l’on espère, et un moyen de connaître ce que l’on ne voit pas ». La Gloire que possède Jésus, dès avant sa Résurrection est une Gloire qu’il partage avec tous ceux qui sont admis au monde à venir. Saint Paul le dit aux corinthiens, en évoquant le voile dont se protégeait Moïse pour se couvrir le visage qui rayonnait d’une gloire passagère. Avec le Christ, le voile qui recouvrait la lecture des Ecritures de l’Ancien Testament, tombe. « Et nous tous qui, le visage découvert, reflétons la Gloire du Seigneur, nous sommes transfigurés en cette même image, avec une gloire toujours plus grande, par le Seigneur qui est Esprit. »

Il nous est arrivé peut-être dans nos vies de rencontrer des personnes rayonnantes d’amour et modèles de prière. La tradition orientale met en avant bien des exemples de staretz, ces « pères spirituels », aux visages déjà transfigurés de la gloire de Dieu. Avons-nous assez de foi pour croire que nous, chrétiens, sommes appelés à être ces témoins de la Résurrection du Christ, de la Gloire de Dieu, pour notre monde et dans notre entourage ? Sommes- nous convaincus que la Voix venue du Ciel s’adresse aussi à chacun de nous : « Tu es mon fils, mon bien-aimé. Je suis ton Père, et en toi, j’ai confiance. Reste à l’écoute de Jésus et va vers tes frères leur annoncer la Bonne Nouvelle de l’Evangile » AMEN - 17 mars 2019

Homélie du 10 mars 2019 — 1er dim. du Carême — Frère Damase
Cycle : Année C
Info :

Année C – 1° dimanche de Carême – 10 mars 2019

Deut 26 4-10 ; Rom 10 8-13 ; Luc 4 1-13 ;

Homélie du F.Damase

Texte :

1° dimanche de carême – le but du Carême est de nous conduire à Pâques, de participer à la joie de la Résurrection du Christ – on peut dire aussi qu’il s’agit pour nous de progresser sur un chemin de liberté ! C’est ce que les lectures de ce dimanche nous proposent.

Le livre du Deutéronome nous parle du peuple hébreu qui a été esclave en Égypte. Dieu a entendu sa voix et l’a conduit vers une terre de liberté. Nous pouvons penser à ces nombreux réfugiés qui fuient leur pays en guerre et qui prennent des risques pour trouver ailleurs une vie meilleure. Le carême est pour nous cette longue route vers la liberté.

Le Seigneur nous voit engagés sur des chemins de perdition. Il veut nous en libérer. Il veut nous conduire sur le chemin de la vraie vie. Aujourd’hui, Moïse invite son peuple à se souvenir de tout ce qu’il a reçus de Dieu : une Terre, une véritable libération. Ce « ramassis d’esclaves et de fugitifs » a retrouvé sa dignité humaine. Il est entré dans un monde nouveau avec une mentalité nouvelle. Telle est notre démarche pendant ce temps du carême : Accueillir le Dieu libérateur

Dans la seconde lecture, saint Paul nous invite à recevoir la parole de Dieu et à nous laisser guider par elle. Le Dieu libérateur veut le salut de tous les hommes, quelle que soit leur religion. Tous doivent pouvoir entendre « les paroles de la vie éternelle ». Cette parole est en nous, dans notre bouche et notre cœur ; mais elle a parfois de la peine à sortir de nos lèvres. Et pourtant, le Seigneur compte sur nous. Il veut que cette parole soit proclamée dans le monde entier. Mais comment les hommes l’invoqueront ils, si nous ne leur annonçons pas que Dieu est liberté pour tous ?

Dans l’Évangile, Luc raconte le récit des tentations de Jésus au désert. En l’écoutant, nous pensons à notre société de consommation qui refuse les renoncements. Tant de publicités viennent nous tenter, pour nous dire qu’on peut tout avoir : « achetez aujourd’hui, vous paierez dans trois mois ». Ou encore « mangez ce que vous aimez, tout en perdant du poids ».

Or voilà que dans l’Évangile, le démon pousse cette illusion à son comble : en plein désert, il propose à Jésus de trouver la nourriture, les richesses, le pouvoir et une sécurité absolue. Cette tentation a été celle du peuple hébreu au cours de sa traversée du désert. C’est aussi la nôtre aujourd’hui : nous voulons vivre à l’aise, nous cherchons à dominer. Notre cœur n’est à l’abri d’aucune convoitise.

Mais Jésus ne se laisse pas dominer. Il choisit de rester fidèle à Dieu. Le carême est précisément cette période de 40 jours pour renouveler ce choix. Nous sommes conduits au désert pour nous mettre/ face à face avec notre propre vie/ et face à face avec Dieu notre Père. Être fils de Dieu, c’est se laisser conduire par lui, c’est lui faire totalement confiance, c’est faire de sa volonté notre nourriture de chaque jour.

C’est faire l’expérience d’une résurrection : il ne s’agit plus de changer des pierres en pain ; ce sont désormais des cœurs de pierre qui deviennent des cœurs de chair. En nous ouvrant à Dieu et aux autres, le carême nous invite à épuiser Satan et ses tentations d’autosuffisance. Avec tous ceux qui entendent le cri des souffrants, laissons le Christ guérir nos cœurs pour qu’ils soient ouverts aux cris de souffrance, aux appels à la liberté.

En ce temps de carême, disons ensemble avec Dieu :

« Quand l’homme appelle, moi, je lui réponds, - je veux le libérer. »- 10 mars 2019

Homélie du 03 mars 2019 — 8e dim. ordinaire — Frère Matthieu
Cycle : Année C
Info :

Année C - Dimanche 3 mars 2019 - 8e dimanche du Temps Odinaire

1ere lecture : Si 22,4-7

2eme lecture : 1 Co 15,54-58

Evangile selon saint Luc 6,39-45

Homélie du F.Matthieu

Texte :



Les textes bibliques de ce dimanche nous invitent au discernement et à l’humilité, à un regard juste sur les autres et sur nous-mêmes.

Dans l’Évangile, le Christ insiste sur l’attitude que nous devons avoir avec nos frères et nos soeurs. Nous voyons plus facilement leurs défauts que leurs qualités. Nous voudrions aider notre frère à se corriger. Mais nous oublions que nous sommes mal placés pour le faire. Nous sommes comme cet homme qui voudrait enlever la paille qui est dans l’œil de son frère, mais ne remarque pas qu’il y a une poutre dans le sien.

Cet Évangile nous invite à changer notre regard sur les autres … mais aussi sur nous-mêmes.

D’abord sur les autres : leurs défauts sont bien plus visibles que leurs qualités, évidemment. Ce qu’ils font de bien, c’est bien la moindre des choses. Mais leurs défauts, il faut vivre avec, et ce n’est pas drôle !

Mais, voilà, n’est-ce pas pareil avec nous-même ? Un peu de lucidité et de recul nous en convainc facilement.

C’est même vrai par rapport à Dieu : pourquoi tant de gens ont-ils du mal à croire en un Dieu bon ? Parce qu’ils voient d’abord – et on les comprend bien – tout ce qui ne va pas dans le monde, plutôt que ce qui va bien !

Eh bien, c’est cette façon de voir le mal en premier, plutôt que ce qui est bon, qui fait de nous des " aveugles ". C’est cela avoir "une poutre dans l’œil".

Comprenons bien cette affaire de la paille et de la poutre. Cela ne veut pas dire que chacun devrait se juger pire que les autres, ce n’est pas de cela qu’il s’agit ici. Car des défauts, qui n’en a pas ? Alors faut-il peser le plus ou le moins ?

Non. Ce qui est grave, ce qui rend vraiment la vie difficile, voire impossible, c’est quand on ne voit plus que le mal, chez les autres, en soi-même, dans le monde. Avoir une poutre dans l’œil, ce n’est pas avoir un défaut plus gros que les autres, c’est ne voir que les défauts. C’est avoir ce regard amer, désabusé, cette façon de toujours critiquer, de ne jamais être content. C’est cela être aveugle et entraîner l’autre avec soi dans le trou du découragement, du désespoir.

Qu’il y ait du mal dans les autres, en nous, dans le monde, c’est l’évidence. Mais c’est précisément à cause de cela, qu’il nous faut savoir discerner en chacun le bien, les possibilités de bien. Car la lucidité sans la bienveillance, c’est une lumière crue, cruelle, blessante, c’est une fausse lucidité… celle du diable !

La vraie lucidité, c’est celle qui voit au-delà des apparences. Parce que moi, vous, nous avons non seulement des défauts mais plus encore une tendance au mal en nous, alors nous avons absolument besoin, vous, moi, d’être encouragés par un regard de bienveillance, de confiance … ce regard, c’est celui de Dieu ! Et il faut reprendre à notre compte ce regard de miséricorde et de soutien !

C’est à ce retournement, à cette conversion que nous appelle l’Evangile !

Nous avons une grande responsabilité les uns à l’égard des autres. Il s’agit d’être, les uns pour les autres, les témoins de Dieu – rien moins que cela – les témoins de ce regard que Dieu, lui, pose sur nous. Ce regard que Jésus posait et pose sur nous, pauvres et pécheurs. Un regard qui va au plus profond de nous, qui y retrouve la trace de son image et qui y recrée la bonté et la beauté.

Devant les défauts des autres, devant les difficultés à vivre ensemble, Dieu nous demande non pas d’être des redresseurs de torts, mais d’aider les autres à vivre. Les chrétiens – et l’Église – apparaissent trop souvent comme voulant toujours corriger les autres de leurs défauts … et sans se regarder eux-mêmes.

Non, nous n’avons pas la charge, au nom de Dieu, de faire la morale, ni aux autres, ni à nous-mêmes. Mais nous sommes invités à croire et à transmettre cette foi : croire en la bonté de Dieu, en cette miséricorde qui est à l’œuvre, en nous, chez l’autre, et dans chaque être humain, et qui y crée de la bonté. Et nous avons à en témoigner par notre propre regard les uns sur les autres.

Un des maîtres mots de l’évangile d’aujourd’hui, c’est le mot "frère". Si tu es mon frère, ma sœur, je ne suis ni ton père, ni ton maître, ni ton juge, simplement et en toute occasion ton frère !

Oui, au sein d’une humanité blessée, souffrante, il est urgent de témoigner de notre foi en la bonté des autres et de Dieu, en la communion fraternelle que Dieu crée et recrée.

Envers et contre tout, envers et contre tout mal, nous avons besoin, aujourd’hui, d’un vrai regard de foi, d’espérance, sur les autres, sur nous-mêmes et sur Dieu ! - 3mars 2019

Homélie du 24 février 2019 — 7e dim. ordinaire — Frère Ghislain
Cycle : Année C
Info :

Année C - 7e Dimanche ordinaire, - 24 février 2019

2 Sam. 26, I Cor. 15, 45-49 Luc 6, 27-38

Homélie du F.Ghislain

Texte :

Nous venons d’écouter et d’entendre un évangile au cours de la liturgie. Cela veut dire que le Christ est présent aujourd’hui, maintenant : lui-même nous dit ces choses-là, à nous qui sommes ici. Comme les disciples ou simplement les gens qui l’écoutaient, nous avons tous des contentieux avec certaines personnes : il y en a qui ne nous aiment pas, éventuellement qui parlent mal de nous ; peut-être sommes-nous en butte à la calomnie et, en tous cas, à la médisance ; plus rarement (mais rien n’est impossible) nous avons été agressés physiquement ; enfin nous pouvons avoir été victimes d’indélicatesses, voire davantage, en ce qui concerne nos biens : ce que nous avons et qu’on nous prend injustement, ce qu’on ne nous donne pas alors que nous y avons droit. Jésus nous invite, dans tous ces cas, à ne pas résister, à perdre, et même, un peu plus, à aimer les personnes qui nous font ces torts.

Afin que les choses soient claires, Jésus les reprend du côté non de ce nous subissons mais de ce que nous faisons. Ici encore, il faut donner à perte, sans espoir de retour, de compensation, de reconnaissance. Des dons sans réciprocité attendue. Comment est-ce possible ?

La raison enfin que Jésus donne est-elle convaincante ? Il nous faut imiter Dieu qui, dit-il, est « bon pour les ingrats et les méchants ». Mais cela même a quelque chose de choquant : s’il y a quelque chose, en effet, qui met en question notre foi et empêche beaucoup de gens de croire, c’est justement l’inaction de Dieu devant le mal. Comment Dieu n’empêche-t-il pas tout cela ? Pourquoi laisse-t-il faire ? Comment est-il continuellement en situation de non-assistance en personne en danger ?

Mes frères, ces choses-là sont vraiment dures à écouter et à vivre. Nous pouvons être tentés de ne pas les entendre et de sortir de cette chapelle comme si nos oreilles avaient été bouchées. Sinon, comment faire ? Je vous offre quatre suggestions.

Il faudrait peut-être entendre Jésus nous parler lui-même ? Le ton de sa voix, la ferme douceur de son visage, la profondeur de son regard… Jésus sait de quoi il parle, lui-même est en butte à ces hostilités. Dans le recueillement, écoutons-le, afin de faire naître un peu en nous l’envie d’aller dans la direction qu’il indique. On ne fait pas le bien sans désir : reçue de Jésus, une parole même dure peut provoquer le désir.

Il faudrait aussi nous rendre attentifs à l’Esprit de Jésus qui nous a été donné et par lequel la Parole devient un souffle qui anime. Saint Paul dit de la Loi juive : « La lettre tue, mais l’Esprit vivifie ». Saint Augustin, repris par saint Thomas d’Aquin, dit que même la parole évangélique peut tuer, si elle n’est pas reçue dans l’Esprit. Il ne s’agit pas d’appliquer littéralement ce qui est écrit en général et pour tous. Il faut demander à l’Esprit de mettre en nous une sensibilité évangélique, qui nous fera comprendre, dans la forêt de nos contentieux, comment réagir chrétiennement et nous donnera le discernement et la force de le faire. Dans cette sensibilité évangélique, il y a ce que notre texte appelle le pardon, qui avant tout geste ou toute démarche concrète, crée en nous l’attitude intérieure juste.

Puis, dans certains cas plus difficiles, plus urgents, il est bon d’en parler discrètement afin d’être éclairé par la vision qui vient d’autrui : entre époux, entre deux frères d’une communauté, avec un ami fidèle.

Enfin, nous ne devons pas oublier que nous sommes aussi parfois, volontairement ou non, du côté des méchants. La dureté de jugement, la médisance, la calomnie, l’indélicatesse, - tout cela a parfois fait partie de nos sentiments, de nos attitudes, de nos comportements. Il ne s’agit pas de s’auto-flageller, mais de garder le sens de nos limites.

Il me semble que, si nous essayons humblement de réagir de la manière que je viens de vous esquisser, nous arriverons à la paix du cœur, Je veux dire à quelque chose comme : « dans cette conjoncture difficile, je crois humblement que je ne peux pas faire mieux », donc je continue et je laisse à Dieu de diriger les choses. « Les âmes des justes sont dans la main de Dieu, dit l’Ecriture, qui dit aussi que le Seigneur fait briller son soleil aussi sur les injustes ». Alors nous pouvons demeurer en paix. - 24février 2019

Homélie du 10 février 2019 — 5e dim. ordinaire — Frère Hubert
Cycle : Année C
Info :

Année C - 5° dimanche du TO - 10 févier 2019

Is 6 1-6 ; 1 Co 151-11; Luc5 1-11

Homélie du F.Hubert

Texte :

« Quiconque écoute mes paroles et les met en pratique,

ressemble à celui qui construit une maison en posant les fondations sur le roc. » Lc 6, 47

« Heureux ceux qui écoutent la parole de Dieu, et qui la gardent ! » 11, 28

Nous savons combien saint Luc insiste sur l’écoute de la Parole de Dieu et sa mise en pratique :

Il met un bel exemple sous nos yeux dans la page que nous venons d’entendre.

« La foule se pressait autour de Jésus pour écouter la parole de Dieu »,

« Sur ta parole, je vais jeter les filets. »

Pierre prend le relais de ceux qui l’ont précédé dans le récit de Luc.

A Zacharie incrédule, l’ange Gabriel avait répondu :

« Tu seras réduit au silence, parce que tu n’as pas cru à mes paroles. »

A l’inverse, Marie s’était toute entière livrée en disant : « Que tout m’advienne selon ta parole. »

Pierre maintenant répond à Jésus :

« Maître, nous avons peiné toute la nuit sans rien prendre ;

mais, sur ta parole, je vais jeter les filets. »

Le pêcheur, qui n’a rien pris au cours de la nuit, alors qu’il connaît son métier,

donne foi à la parole du charpentier de Nazareth, parfaitement incompétent quant à la pêche.

Il accueille la parole de celui qui parle avec autorité, qui chasse les esprits impurs, guérit les malades, annonce la bonne nouvelle aux pauvres, et est, lui-même, la Parole de Dieu.

« Ta parole est vérité » dit le psalmiste.

Pierre, fort de ce qu’il a déjà entendu et vu de Jésus, s’engage avec confiance :

« Nous avons peiné sans rien prendre ; mais, sur ta parole, je vais jeter les filets. »

Et voici que la parole de celui qui enseigne avec autorité, accomplit ce qu’elle dit.

« A Dieu, rien n’est impossible », disait Gabriel à Marie.

Rien de ce qui est selon son être, selon sa vie, son amour.

« Ma parole, qui sort de ma bouche, ne me reviendra pas sans résultat,

sans avoir fait ce qui me plaît, sans avoir accompli sa mission. » dit Dieu par le prophète Isaïe.

« Mes paroles s’accompliront en leur temps », avait conclu Gabriel avant de quitter Zacharie.

Voici qu’en pleine journée, contre toute attente et toute logique,

les filets se remplissent jusqu’à se déchirer, et les deux barques jusqu’à s’enfoncer.

Pierre fait alors l’expérience d’un évènement et d’une présence qui le dépassent totalement,

l’expérience du mystère de l’abondance de la vie donnée par Dieu,

l’expérience de la sainteté.

Dans le contexte familier de sa vie quotidienne, dans cette pêche inimaginable,

il rejoint l’expérience d’Isaïe,

contemplant, dans une vision grandiose, le Seigneur, le Dieu d’Israël,

dont la gloire emplit la terre entière :

« Éloigne-toi de moi, Seigneur, car je suis un homme pécheur. »

« Malheur à moi ! je suis perdu », s’était écrié Isaïe.

Dans la proximité de Jésus, Parole faite chair, qui se révèle être la parole même de Dieu,

Pierre fait l’expérience et de la proximité et de l’altérité absolue du Dieu très saint.

Alors cette parole décisive de Jésus lui advient :

« Sois sans crainte,

désormais ce sont des hommes que tu prendras. »

La Parole, qui ne revient pas à Dieu sans avoir accompli sa mission,

passera par lui et par chacun des disciples.

Désormais, ils proclameront – et Jésus leur adjoindra saint Paul – que le Christ est mort pour nos péchés, qu’il est ressuscité, conformément aux Ecritures, et qu’en lui, nous sommes sauvés.

Leur chemin sera de faire confiance en la Parole, d’oser aller au large,

persévérer dans le lancement des filets, malgré les longs temps apparents d’inefficacité,

tout remettre à Dieu qui peut faire bien au-delà de ce que nous pouvons imaginer ou concevoir.

A nous, aujourd’hui, dans les frêles barques de nos vies, de l’Eglise, si cabossées qu’elles soient,

de persévérer à rassembler les hommes par la parole vivante et vivifiante qu’est le Christ,

pour qu’ils soient son Corps, débordant de sa vie ;

à jeter les filets pas seulement dans les petites criques qu’on croit poissonneuses,

mais aux périphéries, qui peuvent être aussi en nous-mêmes ;

nous laisser prendre et rassembler, nous aussi,

car nous sommes tout à la fois et Pierre et les poissons.

Il nous faut, nous aussi, et jeter les filets et nous laisser prendre,

quitter les eaux mortifères, pour suivre le Christ vivant.

Cela se fait bien souvent sans que nous le sachions.

Ce qui apparaît à nos yeux, comme succès ou comme échecs, est bien souvent trompeur.

« Ce sont des hommes que tu prendras » : cette parole m’a touché quand j’étais enfant.

Comment s’accomplit-elle en moi ? Je ne sais pas.

Le Christ m’a conduit dans la vie monastique : j’espère qu’à travers la vie qu’il me donne,

il donne la vie à d’autres, et je sais bien que, moi, je suis pêché par d’autres, connus, ou la plupart du temps inconnus de moi. C’et la communion des saints, le partage dans le Corps du Christ.

Que la grâce de Dieu, venant en nous, ne soit pas stérile ! - 10 févier 2019