Homélies
Liste des Homélies
Année C -SACRE COEUR - 28 Juin 2019
Ez 34,11-16; Rm 5, 5b-11 ; Lc 15, 3-7
Homélie du Père Abbé Luc
Frères et sœurs,
Dans un regard illuminé par la foi, l’Eglise nous invite aujourd’hui à regarder un cœur humain ouvert, blessé par une lance pour y contempler le cœur de Dieu. Passer du regard d’une réalité humaine à la contemplation du mystère de Dieu. Le cœur humain de Jésus mort en croix est certainement le cœur humain qui a parfaitement accompli le commandement de l’amour. « Cœur plus humain que fut jamais le cœur d’un enfant de la terre » aimons-nous chanter. Par le don total de lui¬-même, Jésus a aimé Dieu de tout son cœur, de toute son âme, de tout son esprit et de toute sa force, jusqu’à son dernier souffle. Et il a aimé ses bourreaux jusqu’à leur pardonner. S’il y a un cœur humain qui a aimé vraiment, c’est bien le cœur de Jésus. Voilà ce que nos yeux voient.
Mais le regard ne s’arrête pas là. Dans la lumière de la résurrection de Jésus, nos yeux contemplent sous le signe du cœur transpercé, une autre dimension de l’amour offert. Dans la vulnérabilité de son cœur, Jésus, le Fils de Dieu, nous dévoile l’immensité de l’amour de Dieu. Un amour à cœur ouvert. « Cœur plus ouvert qu’un ciel à l’infini, une mer sans rivage »…
Pour exprimer l’amour de Dieu pour son peuple, l’Ecriture utilise des images. Celle du pasteur en est une. Un pasteur qui ne se résout à perdre aucune de ses brebis et qui se met en quête de celle qui est égarée ou malade. Il n’a qu’un désir : conduire ses brebis dans les meilleurs pâturages. Jésus a repris à son compte cette image pour illustrer sa propre mission.
Sur la croix, il nous donne à voir jusqu’où va l’engagement du berger pour son peuple. Là, le berger se fait agneau immolé, brebis d’abattoir. Sur la croix, il prend la dernière place du condamné. « Il est mort pour les coupables que nous étions ». « Preuve irréfutable que Dieu nous aime », ajoute Paul. La blessure du cœur ouvert est la signature définitive du Dieu Amour pour les hommes perdus que nous étions. « Cœur trop aimant qui ne reçus de nous qu’une croix en réponse ».
Mais la manifestation de l’Amour de notre Dieu ne s’arrête pas là. Il est une autre signature de son Amour, c’est « l’amour de Dieu répandu dans nos cœurs, par l’Esprit Saint qui nous a été donné ». L’eau et le sang jailli du cœur ouvert préfiguraient le don de l’Esprit, Amour de Dieu offert en partage à tous les hommes. L’Amour n’a pas de plus grande joie que de susciter l’Amour. Non seulement Dieu sauve les condamnés que nous étions, mais il veut nous rendre capable d’aimer comme Lui, par son Esprit répandu en nos cœurs. L’Esprit en nos cœurs nous entraine à aimer comme Jésus. Il veut faire de nos vies qui aiment des signatures de l’Amour de Dieu offert aux hommes. « Cœur de Jésus qui fis le cœur nouveau de l’Eglise nouvelle ».
Dans cette célébration, venons avec confiance à la source de cet Amour, jailli du Cœur du Christ. Si nous nous sentons faibles, il veut nous fortifier. Si nous sommes si peu capables d’aimer les plus pauvres et les plus petits, il veut nous apprendre à nous donner. Son Amour toujours offert à chaque eucharistie, veut nous renouveler, et nous attirer à son cœur. Là nous puiserons « la joie aux sources vives du salut ». - 28 juin 2019
Année C - DIMANCHE DE LA FETE DU CORPS ET DU SANG DU CHRIST
1ère lecture : Genèse 14,18-20;
2ème lecture : 1 Corinthiens 11,23-26;
Évangile selon saint Luc 9,11b-17
Homélie du F.Matthieu
Fête du Corps et du Sang du Christ : nous pensons aussitôt à l’institution de l’Eucharistie… et pourtant aujourd’hui, l’Eglise nous donne à lire comme évangile un récit de multiplication des pains : un choix qui peut surprendre !
Quel lien y a-t-il entre l’Eucharistie et la multiplication des pains ? Saint Luc a sans doute, lui-même, voulu un rapport car il décrit les gestes de Jésus sur le pain et les poissons avec les termes mêmes d’une liturgie eucharistique … Mais s’il est bien question de pains, il n’est pas question de vin, mais de poissons !
C’est donc nous indiquer que le texte évangélique, en lien avec les deux autres lectures, est là pour nous faire saisir certains éléments clefs de l’Eucharistie que nous avons peut-être un peu laissés dans l’ombre … au détriment du seul rituel centré sur la présence du Corps et du Sang du Christ et de sa réception individuelle.
Suivons le texte évangélique pas à pas.
« Jésus parlait aux foules du Règne de Dieu et guérissait ceux qui en avaient besoin. » Jésus par sa parole rassemble hommes et femmes dans la perspective d’un monde où Dieu règnera pour la paix et le bonheur, ce que la Bible appelle « le droit et la justice » et qui est l’harmonie de la création et de l’histoire. D’entrée nous sommes tendus vers le Royaume, vers l’avenir du salut. Et Paul dans la seconde lecture nous dit aussi que la mémoire de Jésus dans le repas de la Nouvelle Alliance est là pour « proclamer la mort du Seigneur, jusqu’à ce qu’il vienne. »
L’évangile nous dit ensuite que « Jésus guérit ceux qui en avaient besoin. » Déjà il apporte le salut pour que tous puissent accéder à ce Royaume et son signe le plus clair va être enfin la nourriture partagée, que Dieu donne à satiété.
Bien comprendre de quoi il s’agit vraiment, c’est tout le sens du dialogue avec les disciples sur la subsistance de cette foule…
Les disciples apportent des solutions raisonnables ; première solution ; il faut disperser cette foule, renvoyer tout le monde ; chacun pourra trouver le nécessaire dans les environs... Mais Jésus ne retient pas cette solution de dispersion : c’est que le Règne de Dieu qu’il annonce est un mystère de rassemblement ; il ne s’accommode pas du « chacun pour soi ».
Et Jésus donne sa solution : « Donnez-leur vous-mêmes à manger » ; facile à dire, mais comment faire ? « Nous n’avons pas plus de cinq pains et deux poissons » ; pour cinq mille hommes, c’est dérisoire... Mais pourtant, si Jésus dit aux disciples de nourrir eux-mêmes la foule, c’est qu’il va leur en donner les moyens : ils ne sont que les serviteurs, les intendants d’un don qui vient de Dieu.
Alors les disciples proposent d’« aller eux-mêmes acheter de la nourriture pour tout ce monde ». Les disciples sont prêts à jouer les intendants, à se mettre au service de cette foule. Mais Jésus poursuit son propre projet ; il leur dit simplement : « Faites-les asseoir par groupes de cinquante environ ». Jésus a choisi la solution du rassemblement ; mais ce rassemblement n’est pas celui d’une foule indistincte, c’est un rassemblement structuré, celui du Peuple de Dieu au désert sous la conduite de Moïse durant l’Exode (Ex 18, 21.25 ; Nb 31,14 ; Dt 1,15 ; 1 M 3,55). C’est au Peuple de Dieu qu’est fait le don de Dieu.
« Jésus prit les cinq pains et les deux poissons, et, levant les yeux au ciel, il prononça la bénédiction sur eux, les rompit et les donna à ses disciples pour qu’ils les distribuent à la foule. Ils mangèrent et ils furent tous rassasiés. »
Cette bénédiction vient de la nuit des temps, la première lecture nous le rappelait ; elle rapporte tout à Dieu dans la louange et apporte la bénédiction divine aux hommes. « Prononcer la bénédiction », c’est reconnaître la nourriture comme don de Dieu et reconnaître Dieu comme seul auteur de la création et du salut. En disant à ses disciples : « Donnez-leur vous-mêmes à manger », Jésus voulait leur faire découvrir qu’il y a des ressources insoupçonnées... mais à condition d’être ensemble et de reconnaître et d’accueilir le don de Dieu.
Si ce texte nous est proposé à nous, aujourd’hui, c’est que Jésus nous dit à nous aussi : « Donnez-leur vous-mêmes à manger ». Et nous aussi, comme les disciples, avons des ressources que nous ignorons. À condition de nous laisser rassembler comme peuple de Dieu, de reconnaître toute chose comme don de Dieu et de nous considérer, comme de simples intendants du Règne à venir.
Alors le lien entre cette multiplication des pains et l’Eucharistie s’éclaire ; l’évangile de Jean nous donne la clé : les trois évangiles synoptiques rapportent l’institution de l’Eucharistie, Jean, lui, raconte le lavement des pieds. Ce qui nous rappelle qu’il y a deux manières indissociablement liées de célébrer le mémorial de Jésus-Christ : non seulement partager l’Eucharistie mais aussi nous mettre au service des autres (service symbolisé par le lavement des pieds), c’est-à-dire, très concrètement, multiplier les richesses du monde données par Dieu pour les partager à tous les hommes, en quête de la venue du Royaume.
année C - Dimanche de la Trinité -16 Juin 2019
Pr 8.22-31; Rm 5,1-5 ; Jn 16.12-15
Homélie du fr. Antoine
La fête de la Trinité est une très grande fête dont St jean en quatre versets nous
donne une vision de l'essentiel, dans laquelle, la connaissance de l'Esprit de Vérité tient la
première place.
L'Esprit de vérité qui nous conduit à cette Vérité première que ... Dieu est
père .... Dieu est fils, Dieu est Esprit, .. Une vérité qui nous dépasse, car Dieu seul peut parler
de Dieu.
La mission de l'Esprit Saint est de conduire l'homme à la Vérité, l'Evg le précise: Ce
que l'Esprit aura entendu ... Ille lui dira ... Tout ce qui va venir ... l'Esprit le lui fera connaître
car ce que l'Esprit reçoit de Jésus, il le reçoit ... pour qu'il soit connu des disciples, et à
travers eux de la communauté humaine afin que soit imprimer en nous tous le sceau de
l'Amour infini. de Dieu.
Et ce qui est très beau dans cette vision de Jean, c'est que l'Être de Dieu ne peut se
concevoir ... sans sa relation à l'homme ... sans une relation spécifique, celle d'une relation à
l'Esprit de Vérité qui est chargé de nous conduire tous, dans la vérité toute entière dit l'Evangile.
Ainsi, ... à travers l'enseignement que Jésus donne à la Cté de ses disciples symbole de
notre humanité ... la fête de la Ste Trinité se révèle également une célébration de la grandeur de l'homme ! ... Car ... pour Jean, le monde des hommes a un sens ... il a une
finalité ... une finalité qui est en rapport avec la personne même de Dieu ... en rapport avec ce
projet de Dieu ... de nous faire entrer dans la connaissance de ce que l'Esprit doit nous faire
connaître de Jésus.
Et Cette connaissance, pour se développer et s'approfondir, s'adresse à notre Foi,
Foi en l'amour de Die,notre Père, qui a envoyé dans le monde. son Fils ... Parole de
Vérité... et son Esprit...source de sainteté ...
Foi en l'amour du Fils unique de Dieu, don suprême du Père aux hommes afin que cette
communion d'amour qui unit les trois personnes divines se diffuse et se concrétise très
simplement, dans notre manière d'être, dans la qualité de l'accueil que nous manifestons
aux autres, dans cette communion humaine qui réalise comme elle le peut, cette parole
lumineuse de Jésus « Aimez vous les uns les autres comme je vous ai aimé»
Frères et Sœurs ... en célébrant la fête de la sainte trinité .
Bénissons Dieu. pour cet amour dont nous sommes issus .
Bénissons Dieu pour cette plénitude d'amour qui nous attend ...
Bénissons Dieu. au cours de l'eucharistie d'aujourd'hui, pour la Grâce d'avoir été
baptisé au nom du Père, du Fils et du St Esprit et d'être entré ainsi dans la communauté
des disciples de Jésus qui nous appelle sans cesse malgré le poids de nos failles, de nos
faiblesses toujours présentes ... à être Temoins, Prophètes, Serviteurs et à refléter dans notre vie, cette relation exceptionnelle qui unit les trois personnes de la Trinité dont nous
rappelle St Paul dans l'épître aux Romains que leur amour a été répandu .. dans nos coeurs
par l'Esprit Saint qui nous a été donné.
PENTECÔTE 09 JUIN 2019
Ac 2,1-11; Rm 8, 8-17 ; Jn 14, 15-16. 23-26
Homélie du P.Abbé Luc
Frères et sœurs,
Cette fête de la Pentecôte présente un paradoxe qui est stimulant pour notre foi et pour notre vie chrétienne. Elle nous invite à ouvrir large notre regard sur le monde que Dieu désire rejoindre, et elle nous entraine à soigner l’intimité de notre cœur. Universalité et intimité du don de l’Esprit…Partout présent et très proche.
Depuis le grand vent qui a soufflé sur les habitants de Jérusalem, comme nous l’avons prié au début de la célébration, notre Dieu veut répandre son Esprit sur « l’immensité du monde », pour y opérer son « œuvre d’amour ». Tous les hommes, de toute langue et culture sont désirés par notre Dieu, afin qu’ils prennent tous part, à la joie de son Alliance. A tous, Dieu a donné la vie, le mouvement et l’être, le merveilleux cadeau de l’existence. A tous, il désire donner davantage : la joie de marcher sous son regard en sa présence, sans crainte de la mort, dans la confiance d’être accompagné et guidé vers une vie éternelle. L’expérience d’Alliance dont il a gratifié Israël, le peuple élu, il veut la partager à tous les peuples sans exception. Après avoir manifesté en Jésus, son Fils, mort et ressuscité, sa volonté de sauver tous les hommes, en leur nature renouvelée, il envoie son Esprit… Souffle puissant et souffle ténu qui se fait présence aimante et vivifiante à chacun. Croire en l’universalité du don de l’Esprit est une joie, c’est aussi un appel pour chacun de nous à ne pas ériger les frontières de la peur. Croire à l’œuvre d’amour qui inclue tous les hommes, nous engage à sans cesse laisser une porte ouverte à l’inconnu, au différent, à l’étranger… Nous ne pouvons confesser le don de l’Esprit offert à tous sans exception, et mettre des barrières, choisir nos relations, défendre nos identités comme si les autres la menaçaient. Témoins de cet Amour qui nous fait vivre, nous savons que l’Esprit Saint ne gomme pas les identités, ni les différences. Il les harmonise. Il les ensemence au contraire, pour leur donner leur vrai visage : visage fait pour la communion avec l’autre, et non visage pour se regarder seul dans un miroir. Les témoins du matin de Pentecôte à Jérusalem en ont fait l’expérience : chacun pouvait rester lui-même et être pleinement accueillant à l’autre dans sa langue. Oui, l’universalité du don de l’Esprit, nous pousse à avoir un cœur toujours plus universel, sans crainte.
Universalité, et intimité. Jésus a promis à ces disciples un Défenseur… De quoi, l’Esprit vient-il nous défendre ? Non des autres qui ne peuvent atteindre en nous le meilleur. Il vient nous défendre de tout ce qui peut nous empêcher de garder la parole de Jésus. Il nous défend contre les fausses paroles, les sirènes de toute sorte qui font perdre le goût et la force de la parole de Jésus. Parler de défenseur, nous introduit dans le registre du combat… le combat spirituel qui se livre à l’intime de notre coeur. St Paul l’évoque comme une vigilance pour ne pas vivre sous l’emprise de la chair. Si l’Esprit Saint nous habite, nous ne sommes pas sous l’emprise de la chair. Grâce à ce Défenseur, nous tuons les agissements de l’homme pécheur. Nous n’avons plus de dettes envers la chair, dette de la peur, dette de la recherche de reconnaissance, dette des désirs désordonnés, dette de la volonté de maitrise et de puissance, etc… Notre Défenseur nous apprend à discerner entre les faux et les vrais dettes, les faux et les vrais devoirs. Il nous enseigne la vraie parole qui fait vivre, celle de Jésus, et il nous aide à faire taire en nous les paroles qui ne peuvent que nous conduire à l’impasse. Surtout, Il atteste à notre Esprit que nous sommes des fils aimés de notre Père des Cieux… Heureuse parole que Jésus a entendue à son baptême, et que nous pouvons accueillir au plus intime de nous-mêmes : « Tu es mon fils, ma fille bien aimé-e ». Une parole sûre comme un Roc qui peut fonder toute notre existence. Le Défenseur, l’Esprit Saint, se fait alors maitre intérieur pour nous apprendre à dire plus en vérité : « abba », « Père ». Il nous introduit dans la relation aimante avec notre Père. Laissons-le à l’heure de la prière nous guider, nous faire goûter cette relation. Laissons-le nous enseigner à discerner pour que toute notre vie trouve sa force et sa joie dans la relation avec notre Père, qui que nous soyons selon nos différents états de vie, dans le mariage, le célibat…
En cette eucharistie, renouvelons notre confiance dans le don généreusement offert de l’Esprit, « jailli du Fils ressuscité ».
Année C - 7e DIMANCHE DE PÂQUES 2019 - 2 juin 2019
Act 7 55-60; Ap 22 12-30; Jn 17 20-26;
Homélie du F.Hubert
Nous voici au terme du Temps pascal.
La Pâque de Jésus de Nazareth est achevée.
Je suis sorti du Père, et je suis venu dans le monde ;
maintenant, je quitte le monde, et je pars vers le Père.
Le Verbe s’est fait chair, il a habité parmi nous.
Il s’est fait chair pour se donner à nous en nourriture
et nous donner sa propre vie divine.
Il s’est fait chair pour traverser notre mort, porter le mal, le péché,
prendre sur lui le malheur de l’homme séparé de Dieu.
Cloué sur la croix, il a pris la place du pécheur, la place du péché,
pour nous offrir la place du fils, dans le sein du Père.
Il est descendu aux abîmes, il a accepté d’être élevé sur la croix,
pour nous arracher aux profondeurs des ténèbres
et nous élever dans la gloire, la gloire qu’il reçoit de son Père, de toute éternité.
Ceux que tu m’as donnés, je veux que là où je suis, ils soient eux aussi avec moi,
et qu’ils contemplent ma gloire, celle que tu m’as donnée.
[Et toi,] tu les as aimés comme tu m’as aimé.
La pâque de Jésus est achevée ;
la pâque de son corps, notre pâque, ne l’est pas encore :
elle ne le sera qu’au terme de l’ histoire, lors du retour du Christ,
quand Dieu, par le Christ, sera tout en tous.
Notre chemin pascal, personnel, ecclésial, communautaire, est à vivre, génération après génération,
jusqu’à ce que tout, dans le Christ, soit enfin réconcilié.
Nous venons de célébrer l’Ascension en Dieu de celui qui est descendu du ciel.
Ce départ n’est pas un abandon,
mais une ouverture et une espérance, un don et une mission.
Une ouverture et une espérance :
Quand je serai parti vous préparer une place, je reviendrai et je vous emmènerai auprès de moi,
afin que là où je suis, vous soyez, vous aussi.
Quand j’aurai été élevé de terre, j’attirerai à moi tous les hommes.
Par son Verbe, Dieu s’est fait homme.
Par Jésus, vrai homme, élevé à la droite du Père,
l’homme est introduit au cœur de la Trinité.
« C’est là que nous vivons en espérance » disait l’oraison de l’Ascension.
Ceux que tu m’as donnés, je veux que là où je suis, ils soient eux aussi avec moi.
Voilà notre avenir, l’avenir de l’humanité, notre espérance.
L’Ascension de Jésus est aussi un don et une mission :
Si je ne m’en vais pas, le Défenseur ne viendra pas à vous ; mais si je pars, je vous l’enverrai.
Jésus n’est plus à nos côtés mais en nous, par le don de son Esprit,
cet autre Défenseur qui est pour toujours avec nous.
Jésus prie pour que nous soyons un, de l’amour même du Père et du Fils,
pour que le monde croie, pour que le monde ait la vie.
La prière de Jésus, au ch. 17 de st Jean, dont nous venons d’entendre la dernière partie,
fait pendant au Prologue qui ouvre l’évangile.
Le Prologue célébrait le Verbe venant dans le monde.
Maintenant, la prière de Jésus célèbre le Père,
dont l’amour l’a comblé dès avant la création du monde et s’étend à toute créature,
le Père qui veut que tous aient la vie éternelle.
Le Verbe fait chair retourne au Père, mais non pas seul :
il entraîne avec lui ses disciples, et le monde lui-même au sein duquel ils vont être témoins.
L’intimité de Jésus avec son Père nous est offerte en partage.
Là où je suis, je veux qu’ils soient eux aussi avec moi,
C’est par l’inhabitation de l’Amour dans les croyants que se termine la prière de Jésus.
Je leur ai fait connaître ton nom, et je le ferai connaître,
pour que l’amour dont tu m’as aimé soit en eux,
et que moi aussi, je sois en eux.
Comme en témoigne Etienne jusqu’à la mort,
désormais, les cieux sont ouverts aux hommes et l’Esprit leur est donné.
Le Fils s’est fait chair pour que là où il est, nous soyons nous aussi.
Il nous appelle aujourd’hui à être témoins du projet du Père pour l’humanité.
Qu’ils soient un en nous pour que le monde croie que tu m’as envoyé
et que tu les as aimés comme tu m’as aimé.
A sa suite, avec la puissance de l’Esprit, nous sommes appelés à rendre témoignage à la vérité :
le Père aime le Fils, le Fils aime le Père,
et tous deux, ils aiment les hommes sans condition.
Recevons le Corps du Christ, « présent de Dieu offert en partage »,
pour devenir un dans l’Esprit, afin que le monde croie et reçoive la vie.
N’allons pas sans feu ni lieu quand Jésus nous accompagne :
Christ est ressuscité !
Le voici pain sur la table, Présent de Dieu offert en partage.
Christ aujourd’hui ouvre nos yeux.
Dieu nous appelle avec l’Agneau. - 2 juin 2019
Année C- ASCENSION DU SEIGNEUR - 30 mai 2019
(Ac 1, 1-11; He 9,24-28 - 10,19-23; Lc 24, 46-53)
Homélie du P.Abbé Luc
« Seigneur, est-ce maintenant le temps où tu vas rétablir le royaume pour Israël ? » ainsi frères et sœurs, parlent les disciples à Jésus au moment Celui-ci s’apprête à les quitter. « Est-ce maintenant le temps ? »…Les disciples ont retrouvé Jésus ressuscité, après sa passion. Ils perçoivent bien que quelque chose de nouveau vient d’advenir. A travers les apparitions de Jésus, ils ont fait l’expérience d’une nouvelle relation avec Lui, qui est à la fois bien présent en son corps et qui à la fois échappe à leurs perceptions habituelles. Ils auraient bien aimé garder Jésus ressuscité avec eux, et le voir instaurer sur cette terre, ici et maintenant, le règne de justice tant espéré par le peuple d’Israël, le règne messianique. Mais Jésus les invite à entrer dans une autre vision de l’histoire et du temps qui passe. « Il ne vous appartient pas de connaitre les temps et les moments que le Père a fixés de sa propre autorité ». La venue du règne de justice se fera dans les temps que Dieu le Père voudra. Et Jésus annonce à ses disciples qu’ils vont être désormais eux-mêmes pleinement acteurs dans cet avènement. Ils vont recevoir la force du Saint Esprit qui va les propulser jusqu’aux extrémités de la terre pour témoigner de Jésus et de son royaume. Et Jésus s’élève laissant ses disciples être maintenant les artisans de la venue de son Règne.
« Seigneur, est-ce maintenant le temps où tu vas rétablir le royaume pour Israël ? » A la lumière de cette fête de l’Ascension, nous pourrions dire finalement oui. Oui, c’est maintenant que le Seigneur Jésus établit son règne, et cela de deux façons. En s’élevant, et en siégeant dans la gloire auprès de son Père, le Seigneur Jésus établit son règne en signant sa victoire et la nôtre sur toute les forces du mal et de la mort. Comme nous le priions dans l’oraison d’entrée : « l’Ascension de ton Fils est déjà notre victoire ». Jésus, vrai homme, dans la Gloire de Dieu, a établi sa royauté sur toute l’humanité, et sur l’univers. Notre nature humaine avec sa faiblesse est entrée dans la Gloire, comme nous dirons dans la prière eucharistique. En espérance, nous croyons que les forces de l’injustice et du néant n’ont pas le dernier mot. Avec Jésus, auprès de son Père dans la Gloire, nous pouvons redresser la tête. Lorsque semblent prévaloir dans nos vies les ténèbres ou le non-sens, levons les yeux vers Jésus. En son humanité glorieuse, portant les marques de sa passion, il manifeste la grandeur de notre dignité humaine sauvée et restaurée.
Oui, d’une autre manière, c’est maintenant que le Seigneur Jésus établit son règne…par le témoignage de tous ses disciples à travers le monde. Depuis 20 siècles, se sont succédé des générations de témoins qui ont annoncé le Royaume de Jésus par toute leur vie. Des cohortes de témoins, des plus fameux aux plus obscurs ont témoigné de la force de l’amour qui est plus fort que la mort et toutes les formes d’oppression. Dans l’Esprit de Jésus, sans bruit, ils ont souvent soutenu la vie qui vacille, donner de la joie et porté l’espérance que la vie ne s’arrête pas ici-bas. Nous savons aussi combien dans notre longue histoire est revenue la tentation de confondre l’établissement du règne de Dieu avec celui de royaumes terrestres, tentation dans lesquelles notre Eglise, et les Eglises, ont pu se méprendre. Tentation du pouvoir pour imposer par la force ce qui n’est que grâce et humble transmission de vie reçue comme un cadeau. Dans l’établissement du règne de Jésus, nous sommes nous aussi désormais investis… A notre tour, dans notre histoire présente, nous sommes appelés à témoigner de cet Amour du Christ qui nous précède, et qui nous donne la vie au milieu de toutes les épreuves. Nous sommes appelés à mettre toutes nos forces au service de l’Amour du Christ qui veut rejoindre tous les hommes. Nous ne sommes pas meilleurs que nos pères, et nous sommes capables aussi de faire les mêmes erreurs. C’est pourquoi de dimanche en dimanche, jour après jour, il nous est proposé de grandir dans l’amitié avec le Christ vivant qui se fait proche de nous, comme nous le célébrons en chaque eucharistie. Il est là au milieu de nous et nous donne sa vie, sa parole et son corps, pour que nous devenions instruments de son Amour, de sa Paix, et de sa Joie. - 30 mai 2019
Année C -6ème dim. du Temps Pascal, 26 mai 2019).
Act 15 1-29; Ap21 10-23; Jn 1423-29
Homélie du F.Bernard
Il y a certainement une grâce liturgique à accueillir durant le temps pascal. Sans doute la percevons -nous plus vivement au jour de Pâques et dans les jours qui suivent, où nous sont remis en mémoire les différents récits des apparitions pascales. Cette grâce nous est à nouveau rendue sensible quand approchent les solennités de l’Ascension et de Pentecôte. Et nous y sommes.
Nous comprenons alors mieux, à la suite des disciples, qu’il était bon que le Seigneur Jésus quitte notre monde pour rejoindre le Père, car l’Ascension est sa victoire. Elle est aussi la nôtre, en effet une humanité, en tout semblable à la nôtre, est désormais dans la gloire de Dieu.
Il était bon encore que le Seigneur Jésus nous quitte, car il ne nous a pas laissés orphelins. Il nous a envoyé l’Esprit, son Esprit, Présence divine à l’intime de nous-mêmes, cet Esprit qui se joint à notre esprit pour crier « Abba Père ». Et en lui la vie trinitaire est déjà commencée. Jésus nous le disait à l’instant : « Si quelqu’un m’aime (et comment l’aimer sinon dans l’Esprit ?), mon Père et moi nous viendrons, et nous ferons chez lui notre demeure » (Jn 14,23).
Jésus vient de nous le dire encore : « Je vous laisse la paix, je vous donne ma paix », ce sont ces mots mêmes que nous redisons en chaque eucharistie. Ces mots résonnent fortement en nous, tant le désir d’atteindre la paix est inscrit en nous. Mais si la paix que donnent les hommes s’avère précaire, sans cesse menacée par les aléas de la vie et les égoïsmes des hommes, la Paix qui vient de Dieu est tout autre. Elle ne peut nous manquer. Elle nous aide très certainement à propager un peu de paix et de concorde autour de nous.
En ce jour d’élection pour le parlement européen, nous prions pour que la paix et la fraternité grandissent entre les nations qui constituent cette Europe, afin d’écarter définitivement ces guerres fratricides qui ont ravagé nos peuples dans un passé encore tout récent.
Que vaut une communauté chrétienne, que vaut une communauté monastique, que vaut l’Église, si elles ne sont pas porteuses de paix ? Quel témoignage donnent-t-elles alors ? Jésus nous l’a prévenu : « C’est à l’amour que vous aurez les uns pour les autres que tous vous reconnaîtront pour mes disciples » (Jn 13,34).
Mais nous le savons, les conflits, les tensions sont inévitables. La première lecture en donnait un bon exemple. Elle faisait état d’un conflit très grave qu’a connu la première communauté chrétienne. Comment faire vivre ensemble, dans la concorde, la communauté des repas et la communion eucharistique, les chrétiens venus du judaïsme et ceux venus des nations païennes ? Fallait-il imposer à ces derniers toutes les pratiques juives, y compris les plus contraignantes, comme la circoncision ? Fallait-il judaïser pour devenir chrétien ?
Le récit des Actes, que la première lecture a malencontreusement abrégé, fait état de longues discutions, d’écoutes mutuelles dans un climat de prière, de renoncements chez les uns et chez les autres, afin d’aboutir à une solution acceptable par tous, ici formulée par les Apôtres en ces termes : « L’Esprit Saint et nous avons décidé ce qui suit… ». Sont alors données quelques règles plutôt modestes qui s’imposeront à tous et permettront de vivre en paix.
On sait que ce grave conflit connaîtra par la suite d’autres rebondissements, dont font état les lettres de Paul. Mais remarquons plutôt ici, qu’à l’origine de ce conflit, existait une crise bien plus grave encore, qui provoquera celle-là une rupture, le premier schisme qu’a connu l’Église : la séparation entre les juifs et les chrétiens, entre la Synagogue et l’Église, le peuple de la première alliance et celui de la nouvelle. Une écharde dans la chair, pour Paul, une blessure profonde pour l’Église primitive, une blessure qui saigne toujours. Grâce à Dieu, aujourd’hui cependant, après la Shoah et Vatican II, l’ignorance et le mépris qui ont marqué dans le passé les relations entre les deux frères ont fait place à l’estime et à l’amitié.
C’est ici que la deuxième lecture entendue, celle de la vision du prophète de Patmos, suscite en nous une immense espérance. Jean contemple la Jérusalem nouvelle, la Cité de la Paix, car tel est son nom. Il la contemple au terme de l’histoire. La Cité a douze portes, où sont inscrits les noms des douze tribus d‘Israël. Elle a aussi douze assises au nom des douze apôtres de l’Agneau. Déjà antérieurement le prophète voyait les vingt-quatre vieillards debout devant le trône de Dieu et de l’Agneau, sans doute les douze patriarches de la première alliance et les douze apôtres de la nouvelle, le peuple de la première alliance et le peuple de la nouvelle rassemblés dans la Jérusalem nouvelle.
Cette vision était déjà celle qu’entrevoyait l’apôtres Paul, écrivant dans la lettre aux Romains : « Si la mise à l’écart des juifs a été une réconciliation pour le monde, que ne sera leur admission, sinon la vie au-delà de la mort » ( Rm 11, 14-15).
La réconciliation entre juifs et chrétiens, au plan de la foi, ne se réalisera peut-être qu’au terme de l’histoire, et en marquera la fin. Il reste que dans le temps qui est le nôtre nous devons œuvrer den ce sens par le dialogue et dans la charité. Si une unité dans la foi n’est pas à mesure humaine, une unité dans la charité est toujours possible entre les deux frères, l’ainé resté dans la maison d’Israël, et le cadet venu de loin et ramené à la maison du Père à la suite du Christ.
Faisant ainsi, nous concourrons certainement à la Paix de Dieu, à la construction de la Cité de la paix. - 26 mai 2019
Année C – 4° dimanche de Pâques – 12 mai 2019
Act 13 14-52 ; Ap 7 9-17 ; Jn 10 27-30
Homélie par F.Damase
Dans l’Évangile, Jésus se présente comme le « bon berger ». « Mes brebis écoutent ma voix, je les connais et elles me suivent ; je leur donne la vie éternelle ; elles ne périront jamais et nul ne les arrachera de ma main ». Nous ne pouvons pas nous proclamer disciples de Jésus si nous n’écoutons pas sa voix. D’une écoute du cœur. Une écoute qui nous engage à suivre le Christ, à lui faire confiance et à mettre en pratique ce qu’il nous dit.
Dans le bruit de la vie courante, trépidante, cela n’est pas facile. Nous sommes affrontés à des difficultés, des doutes, des souffrances. Il y a tellement de changements dans notre société, dans notre monde et même dans notre Église. Certains disent même, qu’ils n’ont pas besoin de maître. Alors on s’interroge : à qui pouvons-nous donner notre confiance ?
L’Évangile nous montre le rapport étroit que Jésus veut établir avec chacun de nous : il est vraiment notre guide, notre Maître, notre ami, notre modèle ; il est surtout notre Sauveur : « Je leur donne la Vie Éternelle et personne ne les arrachera de ma main ». Ces paroles du Christ nous donnent un sentiment de sécurité absolue ; notre vie est pleinement à l’abri entre les mains de Jésus et du Père ; il est celui qui ne cesse de nous manifester sa miséricorde. C’est son regard d’amour qui touche chacun de nous au plus profond de lui-même.
Pour comprendre cela, tournons-nous vers la croix du Christ ! Le pape François nous dit que pour sauver les brebis égarées, « le berger s’est fait agneau », il s’est laissé sacrifier, il a pris sur lui tous nos péchés pour nous en libérer. Il a donné sa vie en abondance pour nous et pour le monde entier. Rien ni personne ne pourra nous arracher à la main de Jésus parce que rien ni personne ne peut vaincre son amour. L’amour de Jésus est invincible.
Nous sommes tous invités à répondre à cet amour qui ne cesse de faire le premier pas vers nous. Il est venu pour tous car il ne veut pas qu’un seul se perde. Cela signifie qu’il ne pense pas seulement aux croyants fidèles.
La première lecture nous montre Paul et Barnabé annoncer l’Evangile aux païens. Christ est la « Lumière des nations » et le « Sauveur de tous les peuples ». Cette mission connaîtra un succès extraordinaire. Beaucoup témoigneront de leur foi jusqu’au martyre. Aujourd’hui, des chrétiens sont assassinés à cause de leur foi en Jésus. Rien ne peut ébranler leur espérance. Personne ne peut les arracher de la main du Berger.
La seconde lecture est extraite de l’Apocalypse : elle nous montre la victoire obtenue par les martyrs de toutes races et de toutes nations. Après les persécutions, les souffrances, la faim et les pleurs, ils connaissent la joie d’être avec Dieu.
En ce dimanche des vocations, nous nous unissons à la prière de l’Église universelle. La bonne nouvelle de l’Évangile est pour toutes les nations. Elle doit être annoncée à temps et à contretemps. Cette journée nous rappelle que le Christ veut nous associer tous à sa mission de « Berger de toute humanité ».
Nous pensons aux prêtres, religieux et religieuses, aux catéchistes, aux animateurs des divers groupes pastoraux mais aussi à tous les baptisés. Nous ne sommes pas chrétiens pour nous-mêmes, pour « sauver notre âme » mais pour travailler avec le Christ qui veut sauver le monde. Personne ne doit rester sur la touche. Le Seigneur attend de nous que nous donnions le meilleur de nous-mêmes là où nous sommes.
En célébrant cette eucharistie, nous nous tournons vers celui qui a échangé sa vie contre notre salut. Nous lui rendons grâce pour cette espérance et cette joie qui est en nous. Qu’il nous donne d’en être les porteurs et les messagers tout au long de notre vie.
654
Année C - 3e dimanche après Pâques - 5 mai 2019
Actes, 5, 27….41 -Apoc. 5, 11-14 -Jean 21, 1-19
Homélie du F.Ghislain
A l’Eucharistie du jour de Pâques, nous avons entendu le premier récit de la résurrection selon saint Jean : à l’aube, Marie-Madeleine découvre la tombe vide et elle court prévenir deux disciples de Jésus : Pierre et cet anonyme désigné comme « celui que Jésus aimait ». Ce dernier court plus vite que Pierre, mais il n’entre pas, il laisse son ancien arriver, constater le vide et apercevoir les linges qui avaient enveloppé le corps. Puis il entre à son tour, voit les mêmes objets que Pierre et, dit le texte, « il crut ».
Ce vide et ces linceuls sont pour lui les signes de la Résurrection ; pour Pierre, ils demeurent une énigme, et tous deux rentrent chez eux. Que va-t-il se passer ensuite ?
Dans l’évangile de ce jour, nous retrouvons ces deux hommes, ensemble avec des compagnons. Ils ont pris part les deux fois à l’événement impressionnant de l’apparition du Christ. Mais que faire ensuite, sinon continuer la vie telle qu’elle était ? Ils vont donc pêcher. Comme ils n’ont rien pris à bâbord, ils suivent l’indication d’un homme qui leur crie de la plage : jetez le filet à droite. Peut-être un pêcheur comme eux qui connaît les eaux et les fréquentations du poisson… Et survient la récolte, incroyable. Le disciple que Jésus aimait réagit comme quelques jours plus tôt au tombeau : il voit les poissons et il croit : l’homme qui les a invités à jeter le filet, c’est Jésus vivant. Et cette fois, il le dit à Pierre. Aussitôt celui-ci se jette à l‘eau et il nage. Le voici arrivé sur la plage, il n’est pas loin de Jésus qui attend près d’un feu. Il ne s’est pas approché, sans doute qu’il n’ose pas : ils ne se sont pas parlé depuis le jardin des oliviers. Pierre y était prêt à se battre pour défendre Jésus contre l’arrestation imminente : il blesse un comparse et aurait accepté d’être blessé lui aussi, à mort peut-être. Mais Jésus refuse le combat, guérit le comparse et se laisse arrêter. Pierre est comme perdu : devant Jésus désarmé volontaire, il perd ses repères et, quand on se met à lui poser des questions, il prend ses distances : il ne peut pas, il ne veut pas entrer dans la Passion. Le disciple que Jésus aimait l’avait pu, l’avait voulu, il était allé au pied de la Croix de sorte que, d’emblée, sur des signes très concrets, des linges pliés, du poisson en abondance, il avait perçu la Résurrection.
Voici maintenant Pierre tout proche de Jésus. Il ne dit rien ; quand Jésus invite le groupe à apporter du poisson, c’est lui qui va en chercher. Avec tout le groupe, il mange comme il l’avait fait mainte fois durant les mois de compagnonnage. En regardant Pierre, nous pouvons comprendre un peu son attitude intérieure, son désir, son attente, son humilité aussi car il n’oublie pas le reniement. Et voici que Jésus prend l’initiative : il lui parle et lui pose la seule question qui importe, la seule peut-être que Pierre avait envie que Jésus lui pose : « M’aimes-tu ? ». Sur la base en effet de tout ce qu’il avait vécu depuis le premier appel de Galilée jusqu’à ce moment sur la rive du lac, il avait pu en effet comprendre, au-delà des mots, que le lien entre Jésus et lui était définitivement l’amour. Et il répond : « oui Seigneur, je t’aime ». Jésus peut alors le former à son image et à sa ressemblance. Comme Jésus, toujours selon saint Jean, était le Bon Pasteur, ainsi Pierre le sera-t-il. Comme Jésus a accompli sa mission de Bon Pasteur en donnant sa vie pour ses brebis, ainsi fera Pierre, le moment venu. Nous en avons un exemple dans la première lecture : Pierre annonce le message de la Résurrection et il assume tous les risques liées à l’obéissance au Père, comme l’avait fait Jésus. Mais cela n’était pas possible avant que Pierre n’aime en Esprit et en Vérité, et cet amour n’était pas possible avant qu’un itinéraire complexe n’ait été parcouru.
Pierre, le disciple que Jésus aimait : deux icônes de la suite du Christ. Nous pouvons nous réjouir de ce que, aujourd’hui, dans l’Eglise et peut-être aussi dans la foule de ceux qui ne connaissent pas explicitement l’Evangile, il y ait des hommes et des femmes qui vivent selon ces modèles. Les uns, plus intérieurs, plus profonds, qui, par l’Esprit de Dieu, comprennent tout de suite les signes de la présence de Dieu aux hommes. Les autres plus spontanés, mais plus à la surface, que la vie, peu à peu, enseigne sur les signes des temps. Entre les deux, il y a une multitude de figures, qui empruntent plus ou moins à celle du disciple que Jésus aimait et à celle de Pierre qui aimait Jésus. Nous pourrions peut-être nous demander : et moi, où suis-je là-dedans, où sont ceux avec qui je vis quotidiennement ? Comment vivons-nous la Résurrection, comment nous est-elle annoncée, comment l’annonçons-nous ?
Alors l’Evangile deviendra pour nous lumière, force et sérénité, et nous contribuerons au salut des hommes. - 5 mai 2019
Année C -2e dimanche PÂQUES -(28/04/2019)
(Ac 5, 12-16 – Ps 117 – Ap 1, 9-11a.12-13.17-19 – Jn 20, 19–31
Homélie du F.Jean Louis
Frères et sœurs,
en ce second dimanche de Pâques, l’Eglise nous offre des lectures qui ne manquent pas de richesses.
Entre la première communauté chrétienne, présentée comme modèle, dont tout le monde fait l’éloge, qui rencontre un succès certain, et l’apparition du Christ aux disciples apeurés ainsi que l’épisode fameux de Thomas, présenté comme sceptique mais qui finit quand même par professer la véritable identité du Christ « mon Seigneur et mon Dieu » en passant par la vision de Jean qui voit le Christ, comme un Fils d’homme, qui était mort et qui est vivant pour les siècles, nous ne manquons pas de sujets de réflexion, de méditation.
Le risque de la première lecture, si nous l’isolons de son contexte, est d’idéaliser la première communauté chrétienne. Croire que la proximité historique du Christ lui évite toute erreur et penser alors que, depuis cet idéal primitif, nous avons été de décadence en décadence… jusqu’à aujourd’hui où nous ne constatons que trop, les maladies de notre Eglise. C’est peu dynamisant, il faut l’avouer.
Pourtant, le passage qui précède immédiatement la première lecture de ce jour, nous montre que, dans la communauté qui avait prôné le partage intégral des biens, il y avait déjà des membres - Ananie et Saphyre - qui avaient essayé de s’approprier des biens à leur profit. Mal leur en a pris mais cela nous montre que, dès le début, l’idéal n’était pas suivi par tous. Ensuite, dans cette communauté présentée comme modèle de fraternité, il y aura conflit entre les disciples de langue grecque et ceux de langue hébraïque, les premiers se considérant défavorisés par rapport aux seconds. Les épîtres de Paul montrent aussi que les difficultés dans l’Eglise sont constantes. Et la vie de communautés comme celles de Corinthe ne manquera pas d’être assez mouvementée (problèmes de mœurs, problèmes d’autorité, de pouvoir,…).
La seconde lecture, quant à elle, plaçée dans le contexte du livre de l’Apocalypse, montre que cette vision assez grandiose du Fils d’Homme identifié au Christ mort et ressuscité précède des messages de ce dernier aux différentes communautés citées : Ephèse, Smyrne, Pergame etc…, messages dont le contenu est loin d’être une louange unanime. Au contraire, il s’agit, dans certains cas d’Eglises menacées de mort, pire, de tiédeur, avec des problèmes de doctrine, etc…
Quant à l’évangile de ce jour, s’il se termine bien, il faut quand même reconnaître que Thomas, dans un premier temps ne parvient pas à accueillir le témoignage des autres apôtres. Et si nous regardons le récit des apparitions du Christ dans l’évangile selon saint Marc, c’est encore pire. Les disciples refusent de croire Marie-Madeleine, ils refusent de croire le témoignage des deux disciples partis à la campagne, et il faudra une apparition du Christ aux Onze eux-mêmes et bien des reproches, pour les sortir de leur incroyance.
Bref, le contexte des lectures de ce jour nous montre des Eglises qui, si elles ne manquent pas de courage et de vie, sont aussi parfois éloignées de l’idéal évangélique. Les textes du Nouveau Testament ne sont pas des textes de propagande idéalisant le vécu des communautés chrétiennes. C’est peut-être nous qui faisons parfois une sélection qui nous arrange. Mais les textes nous révèlent, eux, une foi pas toujours évidente à mettre en oeuvre.
Sans doute que ces lectures peuvent nous réveiller en cette période difficile pour l’Eglise catholique. Rêver d’un monde où tout se passerait sans problème, sans souci, penser qu’une vie de proximité avec le Christ ôte tout ennui, toute fragilité, toute chute, cela peut nous sembler idéal mais n’est peut-être qu’illusion voire idole. L’histoire du monde, de l’Eglise nous rappelle que le mal demeure, que les conflits demeurent… y compris dans l’Eglise du Christ, mais que c’est à travers tout cela que le Salut de Dieu advient et que seul Dieu peut tirer le bien du mal.
Mais alors, où est la bonne nouvelle ? Comment parler de ce 2e dimanche de pâques comme dimanche de la Miséricorde ?
Eh bien, peut-être que la réponse réside dans l’attitude du Christ. S’il fait des reproches, il pardonne et même plus, il met en route les disciples, les Eglises, les communautés quelle que soient leurs fragilités, telles qu’elles sont. Il est impressionnant de voir combien le Christ ne rejette pas Thomas mais il l’invite à grandir.
Les fragilités des communautés chrétiennes primitives, les conflits, n’empêcheront pas ces dernières, soutenues par l’Esprit Saint de proclamer le Ressuscité à travers le monde connu.
Quant aux disciples, que ce soit Thomas dans l’évangile d’aujourd’hui ou les Onze dans l’évangile de saint Marc, leurs hésitations ou leur refus de croire n’auront pas comme conséquence d’être rejetés par le Christ qui, au contraire, gardant confiance en ceux qu’il a choisi, les envoie sur les routes du monde. N’est-ce pas là une merveilleuse illustration de la Miséricorde de Dieu qui espère en nous malgré nos faiblesses ?
Frères et sœurs, l’Église catholique vit actuellement une douloureuse épreuve de Vérité mais n’est-il pas préférable que la Vérité se fasse plutôt que de rester dans les ténèbres du mal ? La Vérité peut faire mal mais elle peut permettre un nouvel élan. Elle peut aider à la guérison de ceux et celles qui ont été blessés. Il importe que nous sachions nous engager à faire vivre notre Eglise. Le temps est sans doute fini de se laisser porter sans trop se sentir responsable de nos communautés chrétiennes, de penser que d’autres le feront à notre place. Le pape a invité les catholiques, tous les catholiques, à prendre en mains la destinée de leur Eglise. Comment ne pas y voir un appel du Christ à être davantage responsable ?
Les lectures de ce jour nous rappellent que la foi n’est pas toujours évidente, ni la confiance. Mais l’Esprit Saint a été et continue à nous être donné sans compter. Laissons-nous travailler par lui et retroussons nos manches. Le Christ ne nous demande pas d’être parfaits, d’avoir une foi sans faille, pour nous mettre à son service.
La conversion, se tourner toujours plus vers le Christ et se réformer, fait partie de l’ADN de l’Eglise. Peut-être l’avions-nous un peu oublié. Que le choc du réel nous conduise à nous laisser encourager par le Christ pour aller de l’avant, sans nostalgie d’un passé qui n’était pas si idéal que ça.
AMEN - 28 avril 2019