vendredi 7 novembre 2025 : journée de solitude pour la communauté
(eucharistie vers 6h45, juste après Laudes). 

Homélies

Liste des Homélies

Homélie du 11 août 2019 — 19e dim. ordinaire — Frère Antoine
Cycle : Année C
Info :

Année C - 19ème Dimanche Ordinaire - 11 Août 2019

Sg 18,6-9. Ps 32. He 11.1-2,8-19 Luc 12.32-48

Homélie du F.Antoine

Texte :

Attendre ... Veiller ... Se tenir prêt...Ce sont les maîtres mots de l'Evg d'aujourd'hui.

Ils qualifient ce que nous, désireux de suivre le Christ, avons à être et à devenir ... à savoir,

des serviteurs qui demeurent dans une attenteet veillent.. prêt à servir.

Toute attenteest motivée .. par un désir .. par une tension vers un évènement plus ou

moins proche. Toute attente demande patience, force et persévérance.

Mais dans notre monde, elle est une attitude dévalorisée : ... tout doit vite arriver ... tout doit

être obtenu avec le moindre délai possible Même les moines qui vivent sous la règle de

St benoît peuvent connaître ... l'impatience alors que l'attente évanqélique est justement

patience .. maîtrise de soi .. dépossession d'un temps qui nous si cher ... ce temps qui

m'appartient, ce temps qui est à moi, ce temps que je garde jalousement... mais qui doit

aussi appartenir à Dieu.

Complétant l'attente, la notion de Veille y ajoute une dynamique: celle d'une

orientation volontaire vers ce qui conditionne le déroulement de notre vie .. vers ce qui

peut advenir... Les premiers chrétiens attendaient et veillaient au retour du Christ car ils

le croyaient imminent.

La veille chrétienne d'aujourd'hui est orientée vers l'attention à ce que le Christ nous

demande, à ce qu'il sollicite de nous qui avons été baptisés dans le Père et le Fils et l'Esprit

et dans une dynamique du Don de soi.

Veiller c'est rester réactif à l'enseignement du Christ, entendu tout au long de

l'année, c'est rester prêt, jour après jour, à affronter les évènements qui surgissent dans

notre vie et doivent entrainer une réponse .. nourrie par la Foi,

Car c'est la Foi qui nous permet de devenir .. lentement.. ces serviteurs qui restent en

tenue de service. C'est la Foi qui fait ces veilleurs dont la deuxième lecture nous donne de

magnifiques exemples ... Abraham .. Sarah ... tous ont affirmé que sur la terre ils étaient des

étrangers, des voyageurs ... et c'est appuyés sur une Foi inébranlable en la fidélité de Dieu,

c'est confiants en ses promesses, qu'ils ont vécu ... la réalisation de leurs attentes.

A leur suite, nous sommes appelés à rester en tenue de service, ceinture autour des

reins et lampes allumées, nous dit l'évangile, avec une promesse, et pas la moindre celle la,

la promesse d'être heureux ... ,Qu'on soit dans la pleine nuit ou à trois heures du matin,

c'est-à-dire ... plongés dans l'épreuve où nous ne savons plus où on en est, où nous ne

savons plus ce qu'il faut faire où ne pas faire ... heureux serons nous quand à l'heure où nous

n'y penserons pas, le maître arrivera et nous trouvera .. debout dans la Foi- et- la confiance,

... debout dans la veille- et- dans l'attente.

C'est à trois reprises dans l'Evg d'aujourd'hui que résonne l'enjeu du bonheur

Un bonheur qui est la condition de nos réponses au Seigneur.

Un bonheur qui nous est promis ... nous sera donné ... il nous est même évoqué sous la forme

du Maître qui, ceinture au reins, nous invitera à prendre place ... à sa propre table et c'est en

personne qu'il passera pour nous servir. Oui, heureux sommes-nous, frères et sœurs,

heureux d'être ... tous ... invités à sa table. - 11 aout 2019

Homélie du 06 août 2019 — Transfiguration du Seigneur — Père Abbé Luc
Cycle : Année C
Info :

TRANSFIGURATION - 06 août 2019

(Dn 7, 9-10, 13-14 ; 2P 1,16-19 ; Lc 9, 28b-36)

Homélie du Père Abbé Luc

Texte :

Frères et sœurs,

A travers le récit que nous venons d’entendre, suivons Pierre, Jean et Jacques sur la montagne. Les trois disciples accompagnent Jésus qui va prier. Ce n’est pas la première fois qu’ils se trouvent aux côtés de Jésus qui prie (Lc 9, 18). Mais ils semblent encore rester un peu extérieurs. Le sommeil les accable. Seulement un peu plus tard, ils oseront demander à Jésus, « apprends-nous à prier » (Lc 11, 1). Tirés de leur sommeil, ils se réveillent. Ils voient la gloire de Jésus, et les deux hommes à ses côtés. Quelque chose se passe : un instant de bonheur si dense et saisissant que Pierre veut absolument le retenir, le goûter. Jamais Jésus ne leur est ainsi apparu dans une telle lumière. « Dressons, ici trois tentes ….» lance Pierre qui ne perd pas sa spontanéité et son sens de l’organisation. Mais à peine a-t-il fini de parler qu’une nuée couvre les disciples de son ombre et les saisit de frayeur. En un instant, ils passent du bonheur indicible à la frayeur qui tétanise…. L’art iconographique s’est plu à représenter les 3 amis de Jésus complètement renversés, terrassés. De la nuée, vient une voix, qui fait écho à celle des prophètes (Is 42,1) parlant du serviteur de Dieu : « Celui est mon Fils, celui que j’ai choisi, écoutez-le ». Et aussi soudainement qu’elle est survenue, la voix laisse place au silence. Jésus est là seul, en son aspect habituel. Les disciples ne vont rien dire de cette vision. Car l’heure est à l’écoute de ce maitre qu’ils ne connaissent pas vraiment.

Suivre les disciples en cette scène si unique des récits évangéliques, nous conduit avec eux, à reconnaitre que nous ne connaissons pas bien Jésus. Son mystère vient toujours nous tirer d’un certain sommeil, d’un certain aveuglement. Jésus nous entraine avec lui, à prier pour mieux découvrir son intimité lumineuse avec le Père. Dans la prière, dans la méditation des Ecritures avec Moïse et les prophètes, il nous guide pour contempler le mystère de sa vie donnée, son départ pour Jérusalem, pour mieux le comprendre, et mieux croire que là est notre salut. Jésus nous conduit à entrer dans cet échange d’amour qu’il vit avec son Père, en le reconnaissant comme le Fils choisi, le Bien aimé du Père. Entre bonheur et frayeur, avec les disciples, il nous faut accepter d’avancer avec confiance sur ce chemin de connaissance et d’amitié qui nous surprendra toujours.

Homélie du 04 août 2019 — 18e dim. ordinaire — Frère Hubert
Cycle : Année C
Info :

Année C - 18e DIMANCHE TO – 2019 08 04

Ecclesiaste 1,2-2,23; Col 3 1-11; Luc 12 13-21

Homélie du f. Hubert

Texte :

Vanité des vanités, tout est vanité !

Les témoignages de jeunes adultes, qui,

ayant commencé leur vie en pensant que l’argent et la réussite leur apporteraient le bonheur,

se sont aperçus que ce n’était pas le bon choix, ne sont pas rares.

Ils ont constaté aussi que des gens fortunés, avec de belles situations,

ne sont pas nécessairement heureux. Et ils veulent faire autre chose de leur vie.

Le psalmiste du psaume 72 dit avoir été « jaloux des superbes »

« qui ne manquent de rien et amassent des fortunes ».

Non sans peine, voire sans souffrance – il comprend, « dans la demeure de Dieu »,

qu’ils « vont vers la ruine », qu’ils passent « comme un songe »,

et que, lui, il est toujours avec Dieu qui a « saisi sa main droite, le conduit selon ses desseins

et le prendra dans sa gloire ». « Ma part, le roc de mon cœur, c’est Dieu pour toujours ».

Le Psaume 33, particulièrement cher aux disciples de st Benoît, demande :

« Qui donc aime la vie et désire des jours où il verra le bonheur ? »

L’évangile de ce jour peut n’être accueilli que comme une simple parole de sagesse,

à l’instar de la fable de La Fontaine « Le savetier et le financier ».

Un Savetier chantait du matin jusqu'au soir :

C'était merveilles de le voir,

Merveilles de l'ouïr; …

Son voisin au contraire, étant tout cousu d'or,

Chantait peu, dormait moins encor.

C'était un homme de finance.

Mais l’Evangile est plus qu’une parole de sagesse : il est une parole et une promesse d’alliance.

La parole d’un Dieu « en qui brûle sans cesse Un grand désir de partager sa joie de Dieu »,

comme dit une hymne de la liturgie,

le Dieu de vie qui veut communiquer sa vie.

C’est dans la communion des personnes, dans la rencontre des visages qu’est notre bonheur,

des visages qui se reconnaissent frères, qui s’accueillent dans la réciprocité.

Ecoutons le pape François dans La joie de l’Evangile :

Quand la vie intérieure se ferme sur ses propres intérêts, il n’y a plus de place pour les autres,

les pauvres n’entrent plus, on n’écoute plus la voix de Dieu,

on ne jouit plus de la douce joie de son amour, l’enthousiasme de faire le bien ne palpite plus.

La vie augmente quand elle est donnée et elle s’affaiblit dans l’isolement et l’aisance.

La vie s’obtient et se mûrit dans la mesure où elle est livrée pour donner la vie aux autres.

L’homme riche de la parabole se dit :

Repose-toi, mange, bois, jouis de l’existence.

Il n’a hélas amassé que pour lui-même, et sa vie fragile, stérile, s’évanouira sans être parvenue au bonheur.

Nous allons tout à l’heure bénéficier sans doute d’un bon repas, nécessaire à notre vie corporelle,

mais un repas que j’espère partagé, lieu et source du vivre ensemble, de la communion.

Pour l’heure, dans cette église, nous sommes réunis

pour partager une toute petite part de pain, et un peu de vin. Trois fois rien.

Et pourtant, c’est notre héritage le plus précieux.

Par le don mystérieux et absolu de Dieu, nous croyons qu’ils sont le Corps et le Sang mêmes du Christ.

Ce peu de pain et de vin, consacrés par l’amour, sont la richesse incommensurable que Dieu nous offre.

Dieu se donne lui-même à nous, qui que nous soyons,

que nous soyons savetier ou financier, pauvre moine, pape, ou chef d’Etat.

Ce pain et ce vin nous rendent frères et sœurs.

Il n’y a plus le païen et le Juif, le circoncis et l’incirconcis,

il n’y a plus le barbare ou le primitif, l’esclave et l’homme libre ;

mais il y a le Christ : il est tout, et en tous.

Un homme s’est donné de la peine, et sa peine n’a pas été vaine.

Cet homme est celui qui nous a valu la libération du mal,

la vie plénière, la paix et la communion,

c’est le Fils unique livrant sa vie pour nous.

La Parole de Dieu nous est adressée aujourd’hui, le pain et le vin eucharistiques nous sont offerts

pour que nous revêtions de l’Homme nouveau, que le Christ soit tout en nous,

que nous soyons en lui des fils et des frères, des sœurs, tournés les uns vers les autres,

tournés ensemble vers notre Père et recevant de lui la vie, par le Christ.

Tout est vanité pour l’homme centré sur lui-même.

Mais si nous croyons en Jésus Sauveur, si nous croyons dans le Dieu de l’alliance,

si nous croyons en la fidélité de la parole de Dieu,

tout n’est pas vanité,

car Dieu s’est fait homme pour que l’homme soit en Dieu.

La vie s’est manifestée, nous l’avons vue, et nous rendons témoignage, écrit st Jean.

La vie est communiquée pour toujours.

Il n’y a pas de limite au don de Dieu et sa fidélité est sans faille, de toujours à toujours.

Seigneur, rassasie-nous de ton amour au matin,

que nous passions nos jours dans la joie et les chants !

Venez au festin du Dieu pauvre qui se donne pour faire de nous des riches,

riches de sa grâce, riche de son amour, riches dans le partage et l’échange.

Nous n’aurons jamais fini de découvrir notre véritable héritage, qui est Dieu même.

Même dans l’éternité, Dieu sera toujours au-delà de ce que nous connaîtrons de lui.

Nous irons d’émerveillement en émerveillement et d’action de grâces en action de grâces.

« Rendons grâce à Dieu le Père, lui qui nous a donné d'avoir part à l'héritage des saints, dans la lumière.

Nous arrachant à la puissance des ténèbres, il nous a placés dans le Royaume de son Fils bien-aimé, …

faisant la paix par le sang de sa croix, pour tous les êtres sur la terre et dans le ciel. » Col 1

Homélie du 28 juillet 2019 — 17e dim. ordinaire — Frère Bernard
Cycle : Année C
Info :

année C,- 17ème dimanche du T.O. 28 juillet 2019

Gn 18,20-32 ; Col 2,12-14 ; Lc 11,1-13

Homélie du F.Bernard

Texte :

L’Évangile que nous venons d’entendre est la suite de celui de dimanche dernier. C’était l’accueil de Jésus, par Marthe et Marie, dans leur maison. Peut-être ce récit est-il déjà comme l’entrée en matière de l’enseignement de Jésus sur la prière que nous donne l’Évangile de ce jour ?

Par ailleurs, comme d’habitude, l’Évangile du dimanche est à entendre en continuité avec la première lecture. Celle-ci rapportait l’intercession d’Abraham en faveur des villes maudites de Sodome et Gomorrhe. Ce récit lui-même continuait le récit de l’hospitalité d’Abraham, entendu dimanche dernier.

Abraham avait magnifiquement accueilli ses trois hôtes, puis les avait accompagnés sur leur route vers Sodome et Gomorrhe. Ils voulaient vérifier si la clameur montée jusqu’à eux correspondait bien à la conduite mauvaise de ces gens. Alors intervient Abraham. Il le fait au titre d’ami de Dieu, ayant reçu sa bénédiction pour lui et sa descendance. Il parle avec audace et insistance pour sauver les villes coupables. Il n’hésite pas à mettre en cause la justice de Dieu, le forçant en quelque sorte à libérer sa miséricorde.

« Pour cinquante justes, pour quarante-cinq, pour quarante, pour trente, pour vingt, pour dix justes, vas-tu détruire la ville ?-- Non, je ne détruirai pas » , dit Dieu. Mais Abraham n’ose aller plus loin, et les villes maudites ne vont pas échapper à leur destin.

La révélation de la miséricorde en Dieu va s’amplifier au cours des siècles. Au temps de Jérémie, le Seigneur dira : « Parcourez les rues de Jérusalem. Si vous découvrez un homme qui pratique le droit et recherche la vérité, je pardonnerai à cette ville. » (Jér 5,1). Mais le constat est clair et définitif : « Il n’est pas de juste, pas un seul, pas un qui cherche Dieu. » (Ps 14 et 53)

Alors l’humanité crée par Dieu est-elle condamnée sans appel ? Non, car Dieu a décidé d’envoyer son propre Fils. La lettre aux Colossiens, entendue à l’instant, le disait : « Dieu nous a donné la vie avec le Christ. Il nous a pardonné tous nos péchés. Il a supprimé le billet de la dette qui nous accablait. Il l’a annulé en le clouant à la croix du Christ.» (Col 2,13-14)

Mais revenons à l’Évangile. Nous connaissons l’enseignement de Jésus sur la prière, dans l’Évangile de Matthieu. C’est la prière du Notre Père, insérée très exactement au centre du Sermon sur la montagne. Nous connaissons un peu moins bien cette même prière, un peu différente dans sa forme, qui nous est rapportée dans l’Évangile de Luc. Le contexte est différent. Jésus est surpris en activité de prière. C’est alors que ses disciples lui demandent de leur enseigner à prier. Alors Jésus livre en quelque sorte sa prière à chaud : « Père, que ton Nom soit sanctifié, que ton règne vienne. »

Puis Jésus associe ses disciples. Sa prière devient commune à lui et à eux. C’est la prière du Christ Total, prière de la Tête et des membres, la Tête le Christ, les membres nous- mêmes. Ce sont toutes les formulations en nous qui suivent : « Donne-nous…Pardonne-nous…Nous pardonnons…Ne nous soumets pas à la tentation… »

Qui est-ce nous ? Nous-mêmes, nos proches, les disciples, la communauté, l’Église. Mais est-ce que tout est dit alors dans cette prière ? Oui sans doute, mais à condition que soit réellement pris en compte l’autre, les autres, tous les autres, le monde entier. Et c’est pourquoi à la prière au Père Jésus ajoute la parabole de l’ami importun. Abraham avait intercédé pour les villes pécheresses, qui lui étaient étrangères. Il l’avait fait à la limite du possible. L’ami importun, dans l’Évangile, réveille son ami en pleine nuit, non pour lui-même ou ses enfants, mais pour un hôte qu’il a dû recevoir à l’improviste.

« Demandez et vous recevrez. Cherchez et vous trouverez. Frappez et il vous sera ouvert. » Remarquons qu’il n’est pas dit que le Seigneur donne ce que nous lui demandons, mais il donne le meilleur, l’Esprit saint, il nous communique sa vie intime, cet amour répandu en nos cœurs par l’Esprit saint qi nous a été donné.

Dieu nous traite en vrais partenaires de son alliance. Il compte sur nous pour sauver le monde. Jésus est le Sauveur, mais la prière des chrétiens est nécessaire pour que le monde soit sauvé. La tâche chrétienne est de frapper avec persévérance, de « prier sans se lasser » (Lc 18,1), afin d’ouvrir le cœur de Dieu, de libérer sa miséricorde.

Tel est l’enseignement que nous devons sans doute retenir de cet Évangile.

Homélie du 25 juillet 2019 — Dédicace de notre église — Père Abbé Luc
Cycle : Année C
Info :

DEDICACE DE NOTRE EGLISE - 25 juillet 2019

1R 8, 23-22, 27-30 ; 1P 2, 4-9 ; Mt 16, 13-19

Homélie du Père Abbé Luc

Texte :

Frères et sœurs,

Lorsque nous avons fini les travaux de rénovation de l’église, au mois de mai, nous avons fait une prière avec les entreprises qui ont travaillé là (les maçons, peintres, électriciens, menuisiers, les poseurs de moquettes, etc…). Je leur disais que pour nous, l’église était notre atelier, le lieu où nous passons le plus de temps ensemble, environ 4 à 5 heures par jour, depuis les vigiles jusqu’aux complies en passant par l’eucharistie. Là, nous vivons notre premier travail, notre première mission, celle de la prière. Parler d’atelier, ou de travail en parlant de l’église ou de la prière, n’est-ce pas un peu réducteur et dévalorisant ? En fait, l’image de l’atelier nous est suggérée dans la règle par Benoit lui-même lorsqu’il parle du cloitre comme de l’atelier pour exercer les instruments de la vie spirituelle, et de la prière des heures comme « l’opus Dei », l’œuvre de Dieu. « Opus », ce mot a une connotation artisanale, voire artistique. Le travail de la prière peut-être ainsi assimilée à une œuvre d’art. « Opus Dei », l’expression peut s’entendre comme l’œuvre faite pour Dieu, nous travaillons pour lui, mais aussi comme l’oeuvre faite par Dieu, c’est lui qui travaille. Cette ambiguïté de l’expression est suggestive. Elle nous rappelle qu’au cœur de la prière se vit une synergie, une collaboration incessante entre Dieu et l’homme. Nous travaillons pour Dieu, et Dieu travaille pour nous. La prière nous demande un vrai effort, un engagement personnel et communautaire, et en même temps, elle est un don reçu de Dieu qui agit dans les cœurs. Nous faisons des choses, nous chantons, nous accomplissons des rites, et au même moment Dieu nous enseigne par sa Parole, Il nous façonne par son Esprit.

Dans cet atelier qu’est l’église, le Christ bâtit son Eglise en la petite cellule que nous constituons. Lui la Pierre choisie et précieuse devant Dieu, nous fait entrer dans la construction dont il est le fondement, la pierre angulaire. Sous la motion de son Esprit, nous devenons pierre vivante, sacerdoce royal pour rendre à Dieu, par toute notre vie, un culte qui lui plaise. Ces mots peuvent paraitre trop forts au regard de notre quotidien souvent bien terne, voire monotone, et où la prière n’est pas toujours facile. Et cependant, quelque chose ne s’accomplit-il pas ? Si nous faisons l’expérience de notre médiocrité, et nos insuffisances, nous pouvons être assurés que le Seigneur, Lui, est toujours à l’œuvre. Il n’a pas d’autre désir que nous puissions être pour lui, chacun et tous ensemble, une « offrande agréable à Dieu », une « offrande pure », comme nous le prierons au moment de l’offertoire et dans la prière eucharistique. Par son Esprit, il n’a de cesse de faire de nous son peuple, un peuple uni dans l’amour et dans l’élan de le servir. Et nous-mêmes, n’en faisons-nous pas l’expérience peu à peu… lorsque une parole nous apporte de la lumière, du réconfort, lorsqu’un verset de psaume nous aide à ne pas entretenir de rancœur contre un frère, lorsque le geste de l’inclination nous remet dans une conscience vive de notre petitesse devant Dieu et plus heureux de le servir, lorsqu’au baiser de paix nous nous réconcilions avec un frère, lorsque j’apprends à supporter avec patience l’imperfection du chant ou les erreurs de mes frères, lorsque j’entre dans une connaissance plus vivante du Christ… N’est-ce pas ainsi qu’au cœur du travail de la prière, nous sommes travaillés par Dieu, taillés comme des pierres, ciselés pour vivre l’attention à Dieu et aux autres avec plus de finesse ? Oui, sous les voûtes de cette église, des choses se passent et des paroles sont entendues, Dieu est à l’œuvre. Il ne nous demande pas des choses extraordinaires, sinon d’être là, fidèles par notre présence aux offices, donnés dans le chant. Lui le toujours présent, toujours avec nous, nous convoque chacun et tous ensemble à être présent à son Amour à l’œuvre instant après instant. Chacun de nos offices, chacune de nos eucharisties, voudrait célébrer ce travail, cette « œuvre de Dieu » au cœur de sa création et des créatures que nous sommes.

En ce jour de consécration de notre église, de notre atelier, rendons grâce d’être ainsi associés à l’« oeuvre de Dieu », d’en être des instruments privilégiés, premiers émerveillés du travail qui se fait là. - 25 juillet 2019

Homélie du 21 juillet 2019 — 16e dim. ordinaire — Frère Guillaume
Cycle : Année C
Info :

(Année C) - HOMELIE du 16ème dimanche du TO : 21/07/2019

(Genèse 18,1-10 ; Col. 1, 24-28 ; Luc 10,38-42)

Homélie du F.Guillaume

Texte :

Frères et sœurs

La liturgie de ce dimanche nous fait donc assister à 2 scènes d’hospitalité de Dieu par des hommes et des femmes dans le cadre de leur vie domestique. A travers ces modèles d’accueil, l’Eglise nous invite à penser et à nous interroger sur nos propres manières d’envisager le passage de Dieu dans nos vies ordinaires.

Dans la 1ère lecture, avec Abraham, il nous est possible de repérer 2 moments correspondants à 2 attitudes que l’on retrouvera dans l’Evangile de Marthe et Marie. Un premier moment serait celui de l’action, de l’affairement, voire d’une certaine agitation pour tout ce qu’il y a lieu de faire et de bien faire dans cet accueil. Le second moment est celui de l’écoute d’une Parole, la Parole de Dieu apportée par les visiteurs à Abraham.

Au début du texte, Abraham est assis, au pied du chêne de Mambré, à l’entrée de sa tente. Il aperçoit 3 hommes qui se tiennent debout, à une certaine distance et pourtant près de lui. Aussitôt, il se lève, il court à leur rencontre, il se prosterne devant eux et il déroule toute une check-liste de choses à faire, en la proposant à ses visiteurs arrivés à l’improviste. « Ne passez pas sans vous arrêter, je vais vous apporter de l’eau pour vous laver les pieds, vous allez vous étendre et vous asseoir sous l’arbre. Je vais chercher de quoi manger ; alors, vous allez retrouver des forces et vous pourrez aller plus loin ».

En réponse, la première parole des visiteurs est brève et claire : « fais comme tu l’as dit ». Alors Abraham fait comme notre Marthe de l’Evangile, à la différence près qu’il peut se faire aider de son entourage et le tout prestement. Il se hâte auprès de Sara, restée sous la tente, pour la cuisine, il court au troupeau et donne l’ordre à un serviteur de préparer vite un veau gras et tendre. Il ne s’agit pas de faire attendre les hôtes. Il prend aussi du fromage blanc et du lait, et quand tout est prêt, Abraham dispose le repas et il s’arrête de courir et de stresser. Il se tient debout maintenant, alors que ses hôtes sont étendus ou assis au pied du chêne. Renversement des positions, par rapport à la situation de départ. Abraham se tait. Il écoute. A la manière de Marie aux pieds de Jésus, mais debout, il écoute la Parole que Dieu lui adresse et qui sort de la bouche de l’Ange du Seigneur. Une parole inouïe, une parole de promesse, déjouant tout ce qui est naturellement concevable et raisonnable. Sarah, sa femme, dans son grand âge va donner naissance à un fils. Cela aura lieu dans un an, et les visiteurs reviendront pour l’évènement.

C’est une parole incroyable, invraisemblable : il y a de quoi en rire, et Sara, qui a tout écouté à la porte de la tente, ne s’en prive pas. D’ailleurs, le nom de l’enfant, Isaac, sera celui de ce rire. Abraham, lui, n’a pas ri, il a cru. Il a espéré contre toute espérance et sa foi, son fol espoir lui ont été compté comme justice. Il va devenir, avec la paternité d’Isaac, le père d’une multitude de croyants. Et Jésus se reconnaîtra comme fils d’Abraham, de la même race, fils de la même promesse. Et nous, chrétiens, baptisés en Jésus-Christ et appelés à être ses disciples, nous appartenons nous aussi à cette descendance. Nous nous souvenons de l’amour de Dieu, de la promesse faite à nos pères en faveur d’Abraham et de sa race, à jamais.

Abraham, dans son devoir d’hospitalité, pensait d’abord à restaurer les forces de ses visiteurs, afin de leur permettre d’aller plus loin, dit le texte. Mais en fait, par le retournement des positions, c’est bien Abraham qui une nouvelle fois est appelé par Dieu à aller plus loin, sur le chemin de l’Alliance. En découvrant qui il est pour Dieu, sa véritable identité, et en y acquiesçant, il se voit justifié par sa foi plutôt que par ses œuvres ou par tout ce qu’il pourrait faire pour plaire à Dieu.

C’est bien la même leçon que nous devons tirer de l’évangile de Marthe et Marie, dans leur maison de Béthanie. Entre le vouloir faire et bien faire pour son Maître de Marthe, et le désir de Marie de se laisser être disciple, à l’écoute du même Maître, Jésus indique une priorité de l’être sur le faire. Il ne s’agit pas d’opposer les 2 attitudes de façons caricaturale : l’une étant celle de l’activisme et l’autre celle de la nonchalance, mais il faut y discerner les 2 temps qui doivent accompagner toute vraie rencontre, tout véritable accueil et tout échange en vérité.

Trop souvent, dans nos regards et nos appréciations des autres, nous nous arrêtons à ce qu’ils ont fait, ou à ce qu’ils font ou seraient capables de faire. Jésus nous apprend à aimer les autres pour ce qu’ils sont. Il s’intéresse à l’être que je suis. Nos vies ne se réduisent pas à nos actions, bonnes ou mauvaises. Plusieurs visiteurs de prisonniers nous ont dit qu’ils ne demandaient jamais à un détenu la raison pour laquelle il était en prison, ce qu’il avait fait. Ils s’attachent à regarder la personne en face d’eux dans son mystère d’humanité et de fragilité. Ils sont d’abord et avant tout à l’écoute d’un être en souffrance et en attente de liberté intérieure. Alors, comme l’Esprit le voudra, une Parole inouïe peut retentir dans des cœurs souvent très endurcis, entourés de barreaux plus forts que ceux de leur cachot.

Frères et sœurs, que ces 2 très beaux textes de la liturgie d’aujourd’hui nous aident à renouveler notre comportement dans l’accueil de Dieu dans nos vies. Et à reconnaître la présence du Christ dans toute rencontre humaine et personnelle. Comme le dit Saint Paul dans la seconde lecture : Christ est parmi nous, lui, l’espérance de la Gloire de Dieu. Il se fait connaître, dans son mystère à toutes les nations on pourrait dire, à toutes les rencontres.. L’annonce de l’Evangile et la célébration de l’Alliance sont à vivre aujourd’hui, dès cette eucharistie : écoutons ce que dit un autre ange dans le livre de l’Apocalypse :

« voici que je me tiens à la porte et je frappe. Si quelqu’un entend ma voix et ouvre la porte, j’entrerai chez lui et je viendrai prendre le repas avec lui et lui avec moi ».

AMEN

Homélie du 14 juillet 2019 — 15e dim. ordinaire — Frère Damase
Cycle : Année C
Info :

Année C - 15ème dimanche ordinaire - Le 14 juillet 2019

Dt 30, 10-14 ; Col 1, 15-20 ; Lc 10, 25-37 ;

Homélie de F.Damase -

Texte :

La première lecture que nous avons entendue était tirée du livre du Deutéronome. Et le message que nous avons entendu était une merveilleuse introduction à l'enseignement de l'Évangile. Ce texte nous disait que la Loi de Dieu ne peut pas être réduite à une série de règles, mais est une loi d'amour, écrite sur nos cœurs. Si nous écoutons cette loi d'amour que Dieu a écrite sur nos cœurs, tous les préceptes de l'Évangile ou de l'Église prendront leur vrai sens. Si nous ne le faisons pas, ils deviendront un amoncellement de textes mortifères.

Le récit très vivant, tiré de l'Évangile de Luc, que nous venons d’écouter commençait par une importante question posée à Jésus par un docteur de la Loi. C'était une très bonne question, personnelle et pratique. En effet, il n'a pas dit de façon abstraite : "Quel est le plus grand commandement ?" mais bien : "Que dois-je faire ?" Jésus lui dit : "Tu es un docteur de la Loi ; tu dois savoir cela. Que lis-tu dans ta Loi ?" Et l'homme donne alors la bonne réponse : "Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme, de toute ta force, de tout ton esprit, et ton prochain comme toi-même." Très bien ! dit Jésus ! Fais cela et tu auras la vie éternelle. Le docteur trouve que le dialogue s'est terminé un peu trop brusquement et il pose une autre question : "Mais alors... qui est mon prochain ?"

À cette deuxième question, Jésus va répondre par une parabole. Et il est important de se souvenir que toute la parabole qui va suivre est une réponse à cette question : "qui est mon prochain ?"; car, lorsqu'il aura fini de raconter la parabole Jésus reviendra précisément à cette question : "Qui, d'après toi, a été le prochain de l'homme tombé sous les coups des brigands?" Par cette question Jésus obligera le docteur à s'identifier avec l'homme tombé dans le fossé, sous les coups des brigands. Il ne peut que répondre : "Son prochain a été celui qui lui a manifesté de la compassion". Si nous gardons cela présent à l'esprit nous nous rendrons compte que lorsque Jésus dit : "Va et fait de même", le sens immédiat n'est pas "Va et sois toi aussi un bon samaritain" mais bien plutôt : "Comme l'homme tombé sous les coups des brigands, accepte, toi aussi, que même un Samaritain soit ton prochain".

Jésus nous demande de transcender – par l'amour – toutes les divisions que nous établissons entre nous. Transposée dans le monde d'aujourd'hui, la division entre Samaritains et Juifs serait la division entre les pauvres et les riches, entre les pays sous-développés et les pays développés, entre Noirs et Blancs, entre Etrangers et Européens, entre conservateurs et progressistes, entre résidents illégaux et Citoyens, etc. etc.

Pour nous, celui qui est de l'autre côté est en général celui qui a tort. Jésus nous invite à reconnaître la présence de la compassion dans une telle personne et à accepter d'être aidée par elle.

Le prêtre et le lévite, dans cette parabole, sont chez eux, à domicile. Ils ont donc beaucoup à faire. Ils n'ont pas le temps d'aider. Ils ont aussi tout ce qu'il leur faut. Ils se suffisent à eux-mêmes et ne reconnaissent pas leur prochain.

Mais le Samaritain est en voyage. Il est en dehors de son environnement normal. Il est venu sur une terre étrangère cherchant quelque chose. Le chemin de Jérusalem à Jéricho était très dangereux, spécialement pour un Samaritain. C'était une personne connaissant le mépris, le danger, la peur, mais il avait un cœur de pauvre. Il pouvait donc s'ouvrir à la compassion.

Si nous transposons tout cela dans le monde d'aujourd'hui, quelle est la personne tombée dans le fossé, sous le coup des brigands ? C'est celle qui a quitté Jérusalem pour descendre à Jéricho : celle qui a quitté la sécurité de la ville sainte, avec son confort et ses certitudes, pour chercher autre chose, dans la direction de l'inconnu, comme Abraham. C'est, par exemple, la personne qui cherche d'autres modèles de vie sociale, politique, économique ou religieuse. C'est la personne qui a quitté le système ou a été expulsée par le système. Ayant quitté les sentiers battus foulés par les foules, une telle personne est vulnérable, plus exposée qu'une autre à commettre des erreurs, même de graves erreurs. Elle peut facilement se retrouver dans le caniveau – ce qui peut d'ailleurs être son salut. On retrouve de telles personnes partout, spécialement dans les prisons ou dans les bidonvilles. Où qu'elles soient, elles seront facilement ignorées des lévites et des prêtres, sauf pour recevoir d'eux des leçons de bonne conduite. Espérons qu'elles rencontrent un jour un Samaritain.

Le Samaritain du monde d'aujourd'hui est la personne qui a abandonné la sécurité et le confort de son petit monde et qui veut apprendre des autres de nouvelles façons de penser et de vivre. Étant lui-même dans une situation constante d'insécurité – choisie ou en tout cas acceptée – il peut avoir de la compassion pour qui est tombé. Ce n'est que si nous entreprenons un tel cheminement, comme le Christ l'a fait, que nous serons capables d'aider nos frères et nos sœurs, non pas dans le but d'observer une loi, ou pour gagner des mérites dans le ciel ou pour le plaisir qu'on éprouve à être bon et généreux, mais tout simplement parce que nous serons "mus de compassion".

Comme conclusion pratique : il serait trop facile de prendre la résolution d'être de bons samaritains envers les personnes qui nous entourent. Écoutons plutôt la première leçon de la parabole de Jésus. Acceptons l'évidence que tous nous sommes, de façons diverses, tombés dans le fossé. Notre premier défi est d'accepter que notre prochain, celui qui nous aidera, puisse être celui ou celle que nous avons tendance à considérer comme indigne, comme méprisable.

Souvenez-vous du film – Les Intouchables – sur Philippe Pozzo di Borgo . Un homme « à l’aise », un « grand bourgeois » devenu tétraplégique qui accepte l’aide d’un immigré, d’un sans papier. Et cet immigré redonne au « grand bourgeois – tétraplégique » le goût de se battre pour vivre !! Ce « déchet de la société, cet Intouchable » voilà le « bon samaritain » dont Jésus nous demande d’accepter l’entrée dans notre vie pour notre salut !

Homélie du 11 juillet 2019 — Saint Benoît — Père Abbé Luc
Cycle : Année C
Info :

11 Juillet 2019 - SAINT BENOIT

(Pr 2, 1-9 ; Col 3, 12-17 ; Mt 5, 1-12a)

Homélie du P.Abbé Luc

Texte :

Frères et sœurs,

« Heureux »…. ce mot vient de résonner 8 x dans nos oreilles. Nous pouvons y entendre le désir de Jésus que nous soyons des hommes et des femmes heureux, heureux d’un bonheur qui ne finira pas, heureux d’un bonheur qui, comme nous l’entendions hier soir, n’a pas sa source sur cette terre…Car il est pur cadeau de Dieu, partage de sa vie et de sa gloire en surabondance. Ce cadeau peut-il être autre chose que le bonheur de Jésus lui-même ? Aussi est-il bon de laisser ce mot, comme une promesse, habiter notre cœur, alors que la tristesse, le découragement, l’angoisse peut-être y rôdent. En nous laissant ce mot, Jésus ne nous fait pas inutilement rêver. Mais il nous entraine sur le chemin de son propre bonheur, chemin qu’il vient tracer au cœur de notre histoire humaine troublée. Lui seul peut dire en vérité « heureux ceux qui pleurent, ceux qui sont persécutés… » lui qui connaitra la douleur de l’échec, de la trahison et la croix. De lui seul, nous pouvons apprendre le bonheur des doux, des miséricordieux, des pauvres de cœur…, lui qui a su se faire si proche de tous, avec empressement et compassion. Avec Jésus, le bonheur du ciel a déjà pris figure humaine. Le regarder vivre, l’écouter, le suivre de près, c’est assurément prendre le chemin du bonheur afin qu’à notre tour il nous transfigure. A la suite de Jésus, nos vies pourront alors laisser entrevoir ce bonheur à venir.

N’est-ce pas ce que St Paul disait aux Colossiens ? « Puisque vous avez été choisis par Dieu, que vous avez été sanctifiés, aimés par lui, revêtez-vous de tendresse et de compassion, de bonté, d’humilité, de douceur et de patience »… Depuis notre baptême, depuis ce cadeau qui nous a été fait d’être choisis, sanctifiés et aimés, un vêtement est à notre disposition. C’est le vêtement du Christ Lui-même, le vêtement de la créature nouvelle… vêtement de tendresse, de compassion, de bonté, d’humilité, de douceur, de patience… Ce vêtement n’a pas été tissé par nos mains, mais par celles du Christ clouées sur la Croix. Comme baptisé, il nous revient de le revêtir en nous unissant toujours davantage au Christ… « Tout ce que vous faites, tout ce que vous dites, que ce soit toujours au nom du Seigneur Jésus ». De lui seul Jésus, nous pouvons apprendre à être à l’aise dans ce vêtement, en pardonnant comme il nous a pardonné, en laissant régner la paix entre nous. Car ce vêtement, le gage sur cette terre du bonheur du ciel, est inséparablement vêtement de chacun et vêtement du corps tout entier de la communauté. C’est ensemble que nous revêtons la tunique du Christ, le Christ lui-même.

N’est-ce pas cela aussi que nous enseigne St Benoit ? Au terme, de sa règle, il nous dit « ils ne préfèreront absolument rien au Christ. Qu’il nous fasse parvenir tous ensemble à la vie éternelle » (RB 72, 11-12). Petite cellule du corps de l’Eglise, notre communauté monastique apprend jour après jour à revêtir le vêtement du Christ…vêtement si délicat qu’il requiert de notre part à tous et à chacun, une délicatesse et un soin sans cesse à reprendre. Car nous sommes chacun et tous ensemble comme ces personnes qui ont un bras cassé et une jambe handicapée, et qui doivent enfiler une chemise et un pantalon…. Là où le bras voudrait aller trop vite pour s’habiller, il doit se souvenir que sa jambe a mal aussi. Cela prend du temps, cela demande de la patience, de l’humour, de l’ingéniosité…. Dans nos derniers échanges, nous nous demandions comme mieux vivre la correction et l’entraide fraternelle ? Un vrai défi tant nous sommes différents, marqués par nos tempéraments et par nos histoires. « Instruisez-vous, reprenez-vous les uns les autres nous dit Paul ; « obéissez-vous à l’envie, ne cherchez pas votre intérêt » nous dit St Benoit… C’est un travail permanent d’attention et de vigilance. Travail éprouvant certains jours, travail aussi qui trouve sa force et sa lumière dans le regard commun tourné vers le Seigneur. Tous ensembles, nous le chantons et le louons comme notre Père et notre Seigneur. Tous ensembles nous recevons déjà les prémices de ce bonheur qu’il nous promet… comme le vivons maintenant en cette eucharistie.

11 juillet 2019

Homélie du 07 juillet 2019 — 14e dim. ordinaire — Frère Ghislain
Cycle : Année C
Info :

année C - 14e dimanche, 7 Juillet 2019

Isaïe 66, 10-14 - Gal. 6,14-18 - Luc 10, 1-20

Homélie du F.Ghislain

Texte :

Les lectures que nous avons faites nous annoncent la paix et l'avènement du Règne de Dieu. Puisqu’elles nous sont faites aujourd’hui, c’est qu’elles nous concernent. Comment cela ? Que pouvons-nous donc faire de telles annonces aujourd'hui? Il semble bien que, au lieu de la paix, nous avons la violence.

Tout, en réalité, nous parle de violence. La violence des guerres, dont l'une ne cesse que pour laisser la place à une autre, avec tout ce que cela entraîne de morts d'hommes et de déplacements de populations. La violence économique, qui engendre le chômage, l'exclusion, l'insécurité des banlieues, l'effritement des classes moyennes au profit de grandes richesses et d'extrêmes pauvretés, les migrations. Il y a la violence qu'on pourrait dire interpersonnelle, que nous rencontrons autour de nous, voire dans nos familles, où, pour des questions d'argent, d'intérêt, d'opinion, les gens ne s'entendent pas, se font des mauvais coups ou, au mieux, ne se parlent plus. Et je ne parle pas de la corruption, violence à la fois financière et morale...

Au delà même de telle ou telle violence particulière, c'est plus profondément le climat de violence est comme notre environnement mental, l'image de la violence qui nous habite. Nous ne sommes pas dans le monde de paix, de consolation et de réconciliation dont nous parle le prophète dans la première lecture.

Nous ne sommes plus non plus dans le climat d'hospitalité du monde d'autrefois dont nous parle l’évangile, où n'importe qui pouvait entrer dans une maison, sachant qu'il y serait reçu, qu'on lui donnerait le vivre, le couvert et le lit sans lui poser de questions, car il est normal que l'homme reçoive l'homme. Nous-mêmes avons peur du routard, du clochard, du voyou, et si l'inconnu qui frappe à notre porte est un homme bien mis, cela ne nous rassure pas davantage. Nous n'aimons pas prendre les gens en auto-stop; pourtant, à réfléchir honnêtement, c'est tout de même curieux: j'ai une place vide dans ma voiture, il est sur le bord de la route et nous allons dans la même direction; cependant, je le laisse, parce que c'est gênant de s'arrêter, mais surtout parce que j'ai peur de l'étranger qui fait signe; et, s'il y avait un accident, est-ce que l'assurance paierait?

Où donc trouver la paix et le Royaume de Dieu? Que signifie cette annonce qui en est faite périodiquement dans la liturgie, depuis deux mille ans que le Christ l'a faite?

Je n'ai pas tellement de réponse à cette question que je pose. Cependant il y a une phrase de l'évangile que nous venons d'entendre qui est bien révélatrice: "Allez. Je vous envoie comme des agneaux au milieu des loups". Nous avons bien réalisé: "des agneaux" et "au milieu des loups". Et Jésus de préciser concrètement sa pensée: il faut partir sans ces défenses élémentaires que sont l'argent, les bagages, les protections. Il n'est pas dit que la violence disparaîtra dès maintenant, il ne nous est pas proposé de nous en défendre, de nous situer à leur niveau. Mais il nous est demandé de vivre autrement, - ce que saint François avait bien compris dans son cantique: là où il y a la guerre, que nous mettions la paix. Et comment le pouvons-nous? De nouveau, un mot de l’évangile peut nous éclairer : quand le missionnaire de l’évangile entre dans une maison, il doit souhaiter la paix, shalom, et, dit le texte, « s’il y a un ami de la paix, votre paix reposera sur lui ». Ami de la paix ? Le texte original est plus fort, il parle de « fils de la paix ». Quelqu’un qui est pour ainsi dire « engendré par la paix ».

A ce point, j’aimerais vous faire une suggestion : le matin, au lever, avant de faire autre chose, faisons un exercice de paix. Laissons-nous engendrer par la paix, ce qui peut vouloir dire trois choses : intériorité, vigilance, pardon. Intériorité : nous emportons la protection de Dieu, sa direction, et nous marchons accompagnés par le Christ, l'Agneau de Dieu. La sécurité, on la reçoit de Dieu dans son coeur. Ailleurs saint Luc dit que le Royaume de Dieu est au dedans de nous. Et saint Jean, en commentaire de la lecture d'Isaïe, rapporte la parole de Jésus: "Je ne vous donne la paix, pas comme le monde la donne". Rejoindre dès le matin la paix de Dieu. Puis, vigilance : nous n'avons pas à condamner les gens car, en définitive, nous ne sommes pas meilleurs qu'eux et nous luttons, plus ou moins victorieusement contre les petites violences et les petites corruptions qui sont à notre portée, puisque les circonstances ne nous ont pas donné l'occasion d'en avoir de grandes. Il faut donc porter la lutte dans notre secteur et ne pas reproduire en petit ce que d’autres font en grand. Enfin et surtout peut-être, pardon. Ce qui peut se traduire ainsi : laisser les gens être ce qu’ils sont, car ils ont eux aussi leur fardeau à porter. A ce prix, nous trouverons à l'intérieur de nous-mêmes des semences de paix, qui nous mettent personnellement dans la tranquillité et la liberté et nous feront, sans que nous le sachions peut-être, être des instruments de paix par qui le Royaume arrive.

Homélie du 30 juin 2019 — 13e dim. ordinaire — Frère Jean-Louis
Cycle : Année C
Info :

Année C - 13e dimanche TEMPS ORDINAIRE - (30/06/2019)

(1R 19, 16b.1+9-21 – Ps 15 – Ga 5 , 1.13-18 – Lc 9, 51–62)

Homélie du F.Jean-Louis

Texte :

Frères et sœurs,

vous n’avez sans doute pas eu de mal à mettre en relation la première lecture de ce dimanche et l’évangile.

L’appel d’Elisée par Elie pour lui succéder comme prophète, l’hésitation d’Elisée qui demande à aller embrasser ses parents avant de suivre Elie sont bien en écho avec les appels du Christ à le suivre et les hésitations qu’il rencontre.

L’appel de Dieu n’est pas si simple à accueillir. Il intervient dans une vie, nos vies, déjà bien occupées à des choses d’ailleurs pas mauvaises en soi.

Si Elisée voulait nourrir les siens, il était nécessaire qu’il laboure et honorer ses parents, y compris lorsqu’ils sont défunts est un des commandements essentiels de la Loi d’Israël.

Mais voilà, l’appel de Dieu par l’intermédiaire d’un prophète dans la première lecture, celui du Christ dans l’évangile, ont une vraie radicalité et cela peut nous effrayer.

Nous pourrions, nous rassurer en nous disant, si on est laïc : « Ce n’est pas pour moi, c’est pour les prêtres, les religieux et les religieuses. » Ce sont eux qui sont appelés à être prophètes, eux et elles qui ont été appelés par le Christ à tout donner pour le suivre sans regarder en arrière.

Et si on est religieux, moines, prêtres, on peut se dire qu’on a déjà répondu et qu’il n’y a pas à aller plus loin. On est censé avoir déjà tout donné.

Et du coup, il n’y a plus qu’à passer à l’Eucharistie, les lectures n’ont plus grand-chose à nous dire. Ah si, il y a encore l’épître de saint Paul aux Galates. Elle parle de liberté, d’aimer son prochain comme soi-même, de tendances de la chair qui s’opposent à l’esprit et réciproquement et cet affrontement nous empêche de faire tout ce que nous voudrions. Mais alors, nous ne sommes pas libres ?

Qu’est-ce que ces lectures peuvent nous dire aujourd’hui, dans nos vies ?

Il me semble que, pour tirer profit de ces lectures, il faut revenir aux fondements de l’appel de Dieu. Comme l’a dit le Concile Vatican II : l’appel universel à la sainteté. Appel et appel universel, pas que les chrétiens, pas que les religieux, mais tous et toutes, êtres humains, nous sommes appelés à la sainteté. Suivre le Christ, c’est cela.

Et les lectures nous mettent devant les exigences de cet appel. Elisée souhaite, à bon droit, saluer ses parents avant de suivre Elie et ce dernier le renvoie. Du coup, Elisée comprend et sacrifie son outil de travail, si j’ose dire, pour partir sans retour en arrière. Il a tout donné.

Suivre le Christ, c’est accepter aussi de ne plus regarder en arrière, c’est accepter de proclamer le règne de Dieu et nous savons combien cette proclamation brûlait le cœur du Christ. C’est aussi accepter de ne pas savoir de quoi l’avenir sera fait, ne pas savoir où reposer la tête.

Tout cela peut sembler inconfortable et c’est vrai. Suivre le Christ vers le Royaume, vers la sainteté, c’est aujourd’hui que cela commence et, quel que soit notre état de vie, nous ne savons pas où cela va nous mener.

Cet appel à la sainteté, saint Paul l’équivaut à l’appel à la liberté, mais à une liberté qui ne consiste pas à faire ce qu’on a envie, ce qui risque de tourner à l’égoïsme, mais à nous mettre au service les uns des autres, à aimer notre prochain comme nous-mêmes. Ce n’est sans doute pas la conception de la liberté qui prévaut aujourd’hui.

Ce n’est pas simple. Ce n’est pas un beau discours. Si nous acceptions de nous donner un peu de temps pour relire ce que nous vivons chaque jour, nous aurions vite fait de voir qu’il y a du travail, qu’on n’a jamais fini.

Mais concrètement, comment faire ?

Peut-être que le psaume chanté tout à l’heure, qu’on écoute parfois trop distraitement peut nous aider.

« J’ai fait de toi mon refuge » dit l’auteur du psaume à Dieu.

« De toi dépend mon sort ».

« Je bénis le Seigneur qui me conseille, même la nuit mon cœur m’avertit . »

« Je garde le Seigneur devant moi sans relâche »

« Je n’ai pas d’autre bonheur que toi »

« Tu m’apprends le chemin de la vie ».

Sans doute que la plupart d’entre nous se reconnaît comme disciple du Christ mais ce psaume nous invite à mettre en œuvre ce que nous proclamons. Etre disciple du Christ, c’est entrer dans une relation d’amitié qui, comme toute les relations d’amitié authentiques, se rappelle ou devrait se rappeler constamment à nous. Cela peut paraître inatteignable, mais avons-nous vraiment essayé de donner du temps à cette relation pour garder le Seigneur devant nous sans relâche ? Savons-nous renoncer à l’une ou l’autre distraction pour nous mettre devant le Seigneur ? A l’écoute de sa Parole ? C’est en lisant l’Ecriture Sainte que nous pourrons l’entendre.

A nous de mettre nos priorités en œuvre. Il ne s’agit bien sûr pas de délaisser nos proches ou notre vie professionnelle. Mais acceptons-nous de nos poser de temps à autres ? C’est sans doute exigeant mais c’est cela qui peut nous sortir de cette impression usante à la longue de dépenser toutes nos énergies en vain, pour ce qui ne nous satisfait pas pleinement.

Ne pas regarder en arrière, faire de Dieu son refuge, se tourner vers les autres, garder le Seigneur devant soi sans relâche, se mettre à l’écoute de la Parole de Dieu, du Christ…

Tout cela est-il vraiment hors de portée ? La liberté offerte par le Christ n’est peut-être pas si difficile à accueillir…

Frères et sœurs, je n’ai rien dit d’extraordinaire dans cette homélie. Tout y est assez évident. Ce qui est moins évident, c’est de le mettre en œuvre, c’est vrai pour moi comme pour chacun de nous, je pense.

Le pape François insiste beaucoup sur le fait que nous sommes en chemin. La sainteté est un chemin non pas réservé à une élite mais, comme l’a dit aussi le pape François, c’est la sainteté des gens ordinaires. Ne sommes-nous pas, la plupart d’entre nous, des gens ordinaires ? Mettons-nous en route. Nous avons reçu l’Esprit Saint ; si nous l’écoutons, il nous offrira les intuitions nécessaires. A nous de faire silence en nous-mêmes pour les entendre.

AMEN