vendredi 15 août 2025 : fête de l’Assomption, horaire des dimanches (vigiles la veille à 20h45, messe à 10h) + concert à 16h.

Nota : L’office de None (14h45) sera prié au dolmen de ND de la Pierre-qui-Vire.

Homélies

Liste des Homélies

Homélie du 09 juin 2019 — Pentecôte — Père Abbé Luc
Cycle : Année C
Info :

PENTECÔTE 09 JUIN 2019

Ac 2,1-11; Rm 8, 8-17 ; Jn 14, 15-16. 23-26

Homélie du P.Abbé Luc

Texte :

Frères et sœurs,

Cette fête de la Pentecôte présente un paradoxe qui est stimulant pour notre foi et pour notre vie chrétienne. Elle nous invite à ouvrir large notre regard sur le monde que Dieu désire rejoindre, et elle nous entraine à soigner l’intimité de notre cœur. Universalité et intimité du don de l’Esprit…Partout présent et très proche.

Depuis le grand vent qui a soufflé sur les habitants de Jérusalem, comme nous l’avons prié au début de la célébration, notre Dieu veut répandre son Esprit sur « l’immensité du monde », pour y opérer son « œuvre d’amour ». Tous les hommes, de toute langue et culture sont désirés par notre Dieu, afin qu’ils prennent tous part, à la joie de son Alliance. A tous, Dieu a donné la vie, le mouvement et l’être, le merveilleux cadeau de l’existence. A tous, il désire donner davantage : la joie de marcher sous son regard en sa présence, sans crainte de la mort, dans la confiance d’être accompagné et guidé vers une vie éternelle. L’expérience d’Alliance dont il a gratifié Israël, le peuple élu, il veut la partager à tous les peuples sans exception. Après avoir manifesté en Jésus, son Fils, mort et ressuscité, sa volonté de sauver tous les hommes, en leur nature renouvelée, il envoie son Esprit… Souffle puissant et souffle ténu qui se fait présence aimante et vivifiante à chacun. Croire en l’universalité du don de l’Esprit est une joie, c’est aussi un appel pour chacun de nous à ne pas ériger les frontières de la peur. Croire à l’œuvre d’amour qui inclue tous les hommes, nous engage à sans cesse laisser une porte ouverte à l’inconnu, au différent, à l’étranger… Nous ne pouvons confesser le don de l’Esprit offert à tous sans exception, et mettre des barrières, choisir nos relations, défendre nos identités comme si les autres la menaçaient. Témoins de cet Amour qui nous fait vivre, nous savons que l’Esprit Saint ne gomme pas les identités, ni les différences. Il les harmonise. Il les ensemence au contraire, pour leur donner leur vrai visage : visage fait pour la communion avec l’autre, et non visage pour se regarder seul dans un miroir. Les témoins du matin de Pentecôte à Jérusalem en ont fait l’expérience : chacun pouvait rester lui-même et être pleinement accueillant à l’autre dans sa langue. Oui, l’universalité du don de l’Esprit, nous pousse à avoir un cœur toujours plus universel, sans crainte.

Universalité, et intimité. Jésus a promis à ces disciples un Défenseur… De quoi, l’Esprit vient-il nous défendre ? Non des autres qui ne peuvent atteindre en nous le meilleur. Il vient nous défendre de tout ce qui peut nous empêcher de garder la parole de Jésus. Il nous défend contre les fausses paroles, les sirènes de toute sorte qui font perdre le goût et la force de la parole de Jésus. Parler de défenseur, nous introduit dans le registre du combat… le combat spirituel qui se livre à l’intime de notre coeur. St Paul l’évoque comme une vigilance pour ne pas vivre sous l’emprise de la chair. Si l’Esprit Saint nous habite, nous ne sommes pas sous l’emprise de la chair. Grâce à ce Défenseur, nous tuons les agissements de l’homme pécheur. Nous n’avons plus de dettes envers la chair, dette de la peur, dette de la recherche de reconnaissance, dette des désirs désordonnés, dette de la volonté de maitrise et de puissance, etc… Notre Défenseur nous apprend à discerner entre les faux et les vrais dettes, les faux et les vrais devoirs. Il nous enseigne la vraie parole qui fait vivre, celle de Jésus, et il nous aide à faire taire en nous les paroles qui ne peuvent que nous conduire à l’impasse. Surtout, Il atteste à notre Esprit que nous sommes des fils aimés de notre Père des Cieux… Heureuse parole que Jésus a entendue à son baptême, et que nous pouvons accueillir au plus intime de nous-mêmes : « Tu es mon fils, ma fille bien aimé-e ». Une parole sûre comme un Roc qui peut fonder toute notre existence. Le Défenseur, l’Esprit Saint, se fait alors maitre intérieur pour nous apprendre à dire plus en vérité : « abba », « Père ». Il nous introduit dans la relation aimante avec notre Père. Laissons-le à l’heure de la prière nous guider, nous faire goûter cette relation. Laissons-le nous enseigner à discerner pour que toute notre vie trouve sa force et sa joie dans la relation avec notre Père, qui que nous soyons selon nos différents états de vie, dans le mariage, le célibat…

En cette eucharistie, renouvelons notre confiance dans le don généreusement offert de l’Esprit, « jailli du Fils ressuscité ».

Homélie du 02 juin 2019 — 7e dim. de Pâques — Frère Hubert
Cycle : Année C
Info :

Année C - 7e DIMANCHE DE PÂQUES 2019 - 2 juin 2019

Act 7 55-60; Ap 22 12-30; Jn 17 20-26;

Homélie du F.Hubert

Texte :

Nous voici au terme du Temps pascal.

La Pâque de Jésus de Nazareth est achevée.

Je suis sorti du Père, et je suis venu dans le monde ;

maintenant, je quitte le monde, et je pars vers le Père.

Le Verbe s’est fait chair, il a habité parmi nous.

Il s’est fait chair pour se donner à nous en nourriture

et nous donner sa propre vie divine.

Il s’est fait chair pour traverser notre mort, porter le mal, le péché,

prendre sur lui le malheur de l’homme séparé de Dieu.

Cloué sur la croix, il a pris la place du pécheur, la place du péché,

pour nous offrir la place du fils, dans le sein du Père.

Il est descendu aux abîmes, il a accepté d’être élevé sur la croix,

pour nous arracher aux profondeurs des ténèbres

et nous élever dans la gloire, la gloire qu’il reçoit de son Père, de toute éternité.

Ceux que tu m’as donnés, je veux que là où je suis, ils soient eux aussi avec moi,

et qu’ils contemplent ma gloire, celle que tu m’as donnée.

[Et toi,] tu les as aimés comme tu m’as aimé.

La pâque de Jésus est achevée ;

la pâque de son corps, notre pâque, ne l’est pas encore :

elle ne le sera qu’au terme de l’ histoire, lors du retour du Christ,

quand Dieu, par le Christ, sera tout en tous.

Notre chemin pascal, personnel, ecclésial, communautaire, est à vivre, génération après génération,

jusqu’à ce que tout, dans le Christ, soit enfin réconcilié.

Nous venons de célébrer l’Ascension en Dieu de celui qui est descendu du ciel.

Ce départ n’est pas un abandon,

mais une ouverture et une espérance, un don et une mission.

Une ouverture et une espérance :

Quand je serai parti vous préparer une place, je reviendrai et je vous emmènerai auprès de moi,

afin que là où je suis, vous soyez, vous aussi.

Quand j’aurai été élevé de terre, j’attirerai à moi tous les hommes.

Par son Verbe, Dieu s’est fait homme.

Par Jésus, vrai homme, élevé à la droite du Père,

l’homme est introduit au cœur de la Trinité.

« C’est là que nous vivons en espérance » disait l’oraison de l’Ascension.

Ceux que tu m’as donnés, je veux que là où je suis, ils soient eux aussi avec moi.

Voilà notre avenir, l’avenir de l’humanité, notre espérance.

L’Ascension de Jésus est aussi un don et une mission :

Si je ne m’en vais pas, le Défenseur ne viendra pas à vous ; mais si je pars, je vous l’enverrai.

Jésus n’est plus à nos côtés mais en nous, par le don de son Esprit,

cet autre Défenseur qui est pour toujours avec nous.

Jésus prie pour que nous soyons un, de l’amour même du Père et du Fils,

pour que le monde croie, pour que le monde ait la vie.

La prière de Jésus, au ch. 17 de st Jean, dont nous venons d’entendre la dernière partie,

fait pendant au Prologue qui ouvre l’évangile.

Le Prologue célébrait le Verbe venant dans le monde.

Maintenant, la prière de Jésus célèbre le Père,

dont l’amour l’a comblé dès avant la création du monde et s’étend à toute créature,

le Père qui veut que tous aient la vie éternelle.

Le Verbe fait chair retourne au Père, mais non pas seul :

il entraîne avec lui ses disciples, et le monde lui-même au sein duquel ils vont être témoins.

L’intimité de Jésus avec son Père nous est offerte en partage.

Là où je suis, je veux qu’ils soient eux aussi avec moi,

C’est par l’inhabitation de l’Amour dans les croyants que se termine la prière de Jésus.

Je leur ai fait connaître ton nom, et je le ferai connaître,

pour que l’amour dont tu m’as aimé soit en eux,

et que moi aussi, je sois en eux.

Comme en témoigne Etienne jusqu’à la mort,

désormais, les cieux sont ouverts aux hommes et l’Esprit leur est donné.

Le Fils s’est fait chair pour que là où il est, nous soyons nous aussi.

Il nous appelle aujourd’hui à être témoins du projet du Père pour l’humanité.

Qu’ils soient un en nous pour que le monde croie que tu m’as envoyé

et que tu les as aimés comme tu m’as aimé.

A sa suite, avec la puissance de l’Esprit, nous sommes appelés à rendre témoignage à la vérité :

le Père aime le Fils, le Fils aime le Père,

et tous deux, ils aiment les hommes sans condition.

Recevons le Corps du Christ, « présent de Dieu offert en partage »,

pour devenir un dans l’Esprit, afin que le monde croie et reçoive la vie.

N’allons pas sans feu ni lieu quand Jésus nous accompagne :

Christ est ressuscité !

Le voici pain sur la table, Présent de Dieu offert en partage.

Christ aujourd’hui ouvre nos yeux.

Dieu nous appelle avec l’Agneau. - 2 juin 2019

Homélie du 30 mai 2019 — Ascension du Seigneur — Père Abbé Luc
Cycle : Année C
Info :

Année C- ASCENSION DU SEIGNEUR - 30 mai 2019

(Ac 1, 1-11; He 9,24-28 - 10,19-23; Lc 24, 46-53)

Homélie du P.Abbé Luc

Texte :

« Seigneur, est-ce maintenant le temps où tu vas rétablir le royaume pour Israël ? » ainsi frères et sœurs, parlent les disciples à Jésus au moment Celui-ci s’apprête à les quitter. « Est-ce maintenant le temps ? »…Les disciples ont retrouvé Jésus ressuscité, après sa passion. Ils perçoivent bien que quelque chose de nouveau vient d’advenir. A travers les apparitions de Jésus, ils ont fait l’expérience d’une nouvelle relation avec Lui, qui est à la fois bien présent en son corps et qui à la fois échappe à leurs perceptions habituelles. Ils auraient bien aimé garder Jésus ressuscité avec eux, et le voir instaurer sur cette terre, ici et maintenant, le règne de justice tant espéré par le peuple d’Israël, le règne messianique. Mais Jésus les invite à entrer dans une autre vision de l’histoire et du temps qui passe. « Il ne vous appartient pas de connaitre les temps et les moments que le Père a fixés de sa propre autorité ». La venue du règne de justice se fera dans les temps que Dieu le Père voudra. Et Jésus annonce à ses disciples qu’ils vont être désormais eux-mêmes pleinement acteurs dans cet avènement. Ils vont recevoir la force du Saint Esprit qui va les propulser jusqu’aux extrémités de la terre pour témoigner de Jésus et de son royaume. Et Jésus s’élève laissant ses disciples être maintenant les artisans de la venue de son Règne.

« Seigneur, est-ce maintenant le temps où tu vas rétablir le royaume pour Israël ? » A la lumière de cette fête de l’Ascension, nous pourrions dire finalement oui. Oui, c’est maintenant que le Seigneur Jésus établit son règne, et cela de deux façons. En s’élevant, et en siégeant dans la gloire auprès de son Père, le Seigneur Jésus établit son règne en signant sa victoire et la nôtre sur toute les forces du mal et de la mort. Comme nous le priions dans l’oraison d’entrée : « l’Ascension de ton Fils est déjà notre victoire ». Jésus, vrai homme, dans la Gloire de Dieu, a établi sa royauté sur toute l’humanité, et sur l’univers. Notre nature humaine avec sa faiblesse est entrée dans la Gloire, comme nous dirons dans la prière eucharistique. En espérance, nous croyons que les forces de l’injustice et du néant n’ont pas le dernier mot. Avec Jésus, auprès de son Père dans la Gloire, nous pouvons redresser la tête. Lorsque semblent prévaloir dans nos vies les ténèbres ou le non-sens, levons les yeux vers Jésus. En son humanité glorieuse, portant les marques de sa passion, il manifeste la grandeur de notre dignité humaine sauvée et restaurée.

Oui, d’une autre manière, c’est maintenant que le Seigneur Jésus établit son règne…par le témoignage de tous ses disciples à travers le monde. Depuis 20 siècles, se sont succédé des générations de témoins qui ont annoncé le Royaume de Jésus par toute leur vie. Des cohortes de témoins, des plus fameux aux plus obscurs ont témoigné de la force de l’amour qui est plus fort que la mort et toutes les formes d’oppression. Dans l’Esprit de Jésus, sans bruit, ils ont souvent soutenu la vie qui vacille, donner de la joie et porté l’espérance que la vie ne s’arrête pas ici-bas. Nous savons aussi combien dans notre longue histoire est revenue la tentation de confondre l’établissement du règne de Dieu avec celui de royaumes terrestres, tentation dans lesquelles notre Eglise, et les Eglises, ont pu se méprendre. Tentation du pouvoir pour imposer par la force ce qui n’est que grâce et humble transmission de vie reçue comme un cadeau. Dans l’établissement du règne de Jésus, nous sommes nous aussi désormais investis… A notre tour, dans notre histoire présente, nous sommes appelés à témoigner de cet Amour du Christ qui nous précède, et qui nous donne la vie au milieu de toutes les épreuves. Nous sommes appelés à mettre toutes nos forces au service de l’Amour du Christ qui veut rejoindre tous les hommes. Nous ne sommes pas meilleurs que nos pères, et nous sommes capables aussi de faire les mêmes erreurs. C’est pourquoi de dimanche en dimanche, jour après jour, il nous est proposé de grandir dans l’amitié avec le Christ vivant qui se fait proche de nous, comme nous le célébrons en chaque eucharistie. Il est là au milieu de nous et nous donne sa vie, sa parole et son corps, pour que nous devenions instruments de son Amour, de sa Paix, et de sa Joie. - 30 mai 2019

Homélie du 26 mai 2019 — 6e dim. de Pâques — Frère Bernard
Cycle : Année C
Info :

Année C -6ème dim. du Temps Pascal, 26 mai 2019).

Act 15 1-29; Ap21 10-23; Jn 1423-29

Homélie du F.Bernard

Texte :

Il y a certainement une grâce liturgique à accueillir durant le temps pascal. Sans doute la percevons -nous plus vivement au jour de Pâques et dans les jours qui suivent, où nous sont remis en mémoire les différents récits des apparitions pascales. Cette grâce nous est à nouveau rendue sensible quand approchent les solennités de l’Ascension et de Pentecôte. Et nous y sommes.

Nous comprenons alors mieux, à la suite des disciples, qu’il était bon que le Seigneur Jésus quitte notre monde pour rejoindre le Père, car l’Ascension est sa victoire. Elle est aussi la nôtre, en effet une humanité, en tout semblable à la nôtre, est désormais dans la gloire de Dieu.

Il était bon encore que le Seigneur Jésus nous quitte, car il ne nous a pas laissés orphelins. Il nous a envoyé l’Esprit, son Esprit, Présence divine à l’intime de nous-mêmes, cet Esprit qui se joint à notre esprit pour crier « Abba Père ». Et en lui la vie trinitaire est déjà commencée. Jésus nous le disait à l’instant : « Si quelqu’un m’aime (et comment l’aimer sinon dans l’Esprit ?), mon Père et moi nous viendrons, et nous ferons chez lui notre demeure » (Jn 14,23).

Jésus vient de nous le dire encore : « Je vous laisse la paix, je vous donne ma paix », ce sont ces mots mêmes que nous redisons en chaque eucharistie. Ces mots résonnent fortement en nous, tant le désir d’atteindre la paix est inscrit en nous. Mais si la paix que donnent les hommes s’avère précaire, sans cesse menacée par les aléas de la vie et les égoïsmes des hommes, la Paix qui vient de Dieu est tout autre. Elle ne peut nous manquer. Elle nous aide très certainement à propager un peu de paix et de concorde autour de nous.

En ce jour d’élection pour le parlement européen, nous prions pour que la paix et la fraternité grandissent entre les nations qui constituent cette Europe, afin d’écarter définitivement ces guerres fratricides qui ont ravagé nos peuples dans un passé encore tout récent.

Que vaut une communauté chrétienne, que vaut une communauté monastique, que vaut l’Église, si elles ne sont pas porteuses de paix ? Quel témoignage donnent-t-elles alors ? Jésus nous l’a prévenu : « C’est à l’amour que vous aurez les uns pour les autres que tous vous reconnaîtront pour mes disciples » (Jn 13,34).

Mais nous le savons, les conflits, les tensions sont inévitables. La première lecture en donnait un bon exemple. Elle faisait état d’un conflit très grave qu’a connu la première communauté chrétienne. Comment faire vivre ensemble, dans la concorde, la communauté des repas et la communion eucharistique, les chrétiens venus du judaïsme et ceux venus des nations païennes ? Fallait-il imposer à ces derniers toutes les pratiques juives, y compris les plus contraignantes, comme la circoncision ? Fallait-il judaïser pour devenir chrétien ?

Le récit des Actes, que la première lecture a malencontreusement abrégé, fait état de longues discutions, d’écoutes mutuelles dans un climat de prière, de renoncements chez les uns et chez les autres, afin d’aboutir à une solution acceptable par tous, ici formulée par les Apôtres en ces termes : « L’Esprit Saint et nous avons décidé ce qui suit… ». Sont alors données quelques règles plutôt modestes qui s’imposeront à tous et permettront de vivre en paix.

On sait que ce grave conflit connaîtra par la suite d’autres rebondissements, dont font état les lettres de Paul. Mais remarquons plutôt ici, qu’à l’origine de ce conflit, existait une crise bien plus grave encore, qui provoquera celle-là une rupture, le premier schisme qu’a connu l’Église : la séparation entre les juifs et les chrétiens, entre la Synagogue et l’Église, le peuple de la première alliance et celui de la nouvelle. Une écharde dans la chair, pour Paul, une blessure profonde pour l’Église primitive, une blessure qui saigne toujours. Grâce à Dieu, aujourd’hui cependant, après la Shoah et Vatican II, l’ignorance et le mépris qui ont marqué dans le passé les relations entre les deux frères ont fait place à l’estime et à l’amitié.

C’est ici que la deuxième lecture entendue, celle de la vision du prophète de Patmos, suscite en nous une immense espérance. Jean contemple la Jérusalem nouvelle, la Cité de la Paix, car tel est son nom. Il la contemple au terme de l’histoire. La Cité a douze portes, où sont inscrits les noms des douze tribus d‘Israël. Elle a aussi douze assises au nom des douze apôtres de l’Agneau. Déjà antérieurement le prophète voyait les vingt-quatre vieillards debout devant le trône de Dieu et de l’Agneau, sans doute les douze patriarches de la première alliance et les douze apôtres de la nouvelle, le peuple de la première alliance et le peuple de la nouvelle rassemblés dans la Jérusalem nouvelle.

Cette vision était déjà celle qu’entrevoyait l’apôtres Paul, écrivant dans la lettre aux Romains : « Si la mise à l’écart des juifs a été une réconciliation pour le monde, que ne sera leur admission, sinon la vie au-delà de la mort » ( Rm 11, 14-15).

La réconciliation entre juifs et chrétiens, au plan de la foi, ne se réalisera peut-être qu’au terme de l’histoire, et en marquera la fin. Il reste que dans le temps qui est le nôtre nous devons œuvrer den ce sens par le dialogue et dans la charité. Si une unité dans la foi n’est pas à mesure humaine, une unité dans la charité est toujours possible entre les deux frères, l’ainé resté dans la maison d’Israël, et le cadet venu de loin et ramené à la maison du Père à la suite du Christ.

Faisant ainsi, nous concourrons certainement à la Paix de Dieu, à la construction de la Cité de la paix. - 26 mai 2019

Homélie du 12 mai 2019 — 4e dim. de Pâques — Frère Damase
Cycle : Année C
Info :

Année C – 4° dimanche de Pâques – 12 mai 2019

Act 13 14-52 ; Ap 7 9-17 ; Jn 10 27-30

Homélie par F.Damase

Texte :



Dans l’Évangile, Jésus se présente comme le « bon berger ». « Mes brebis écoutent ma voix, je les connais et elles me suivent ; je leur donne la vie éternelle ; elles ne périront jamais et nul ne les arrachera de ma main ». Nous ne pouvons pas nous proclamer disciples de Jésus si nous n’écoutons pas sa voix. D’une écoute du cœur. Une écoute qui nous engage à suivre le Christ, à lui faire confiance et à mettre en pratique ce qu’il nous dit.

Dans le bruit de la vie courante, trépidante, cela n’est pas facile. Nous sommes affrontés à des difficultés, des doutes, des souffrances. Il y a tellement de changements dans notre société, dans notre monde et même dans notre Église. Certains disent même, qu’ils n’ont pas besoin de maître. Alors on s’interroge : à qui pouvons-nous donner notre confiance ?

L’Évangile nous montre le rapport étroit que Jésus veut établir avec chacun de nous : il est vraiment notre guide, notre Maître, notre ami, notre modèle ; il est surtout notre Sauveur : « Je leur donne la Vie Éternelle et personne ne les arrachera de ma main ». Ces paroles du Christ nous donnent un sentiment de sécurité absolue ; notre vie est pleinement à l’abri entre les mains de Jésus et du Père ; il est celui qui ne cesse de nous manifester sa miséricorde. C’est son regard d’amour qui touche chacun de nous au plus profond de lui-même.

Pour comprendre cela, tournons-nous vers la croix du Christ ! Le pape François nous dit que pour sauver les brebis égarées, « le berger s’est fait agneau », il s’est laissé sacrifier, il a pris sur lui tous nos péchés pour nous en libérer. Il a donné sa vie en abondance pour nous et pour le monde entier. Rien ni personne ne pourra nous arracher à la main de Jésus parce que rien ni personne ne peut vaincre son amour. L’amour de Jésus est invincible.

Nous sommes tous invités à répondre à cet amour qui ne cesse de faire le premier pas vers nous. Il est venu pour tous car il ne veut pas qu’un seul se perde. Cela signifie qu’il ne pense pas seulement aux croyants fidèles.

La première lecture nous montre Paul et Barnabé annoncer l’Evangile aux païens. Christ est la « Lumière des nations » et le « Sauveur de tous les peuples ». Cette mission connaîtra un succès extraordinaire. Beaucoup témoigneront de leur foi jusqu’au martyre. Aujourd’hui, des chrétiens sont assassinés à cause de leur foi en Jésus. Rien ne peut ébranler leur espérance. Personne ne peut les arracher de la main du Berger.

La seconde lecture est extraite de l’Apocalypse : elle nous montre la victoire obtenue par les martyrs de toutes races et de toutes nations. Après les persécutions, les souffrances, la faim et les pleurs, ils connaissent la joie d’être avec Dieu.

En ce dimanche des vocations, nous nous unissons à la prière de l’Église universelle. La bonne nouvelle de l’Évangile est pour toutes les nations. Elle doit être annoncée à temps et à contretemps. Cette journée nous rappelle que le Christ veut nous associer tous à sa mission de « Berger de toute humanité ».

Nous pensons aux prêtres, religieux et religieuses, aux catéchistes, aux animateurs des divers groupes pastoraux mais aussi à tous les baptisés. Nous ne sommes pas chrétiens pour nous-mêmes, pour « sauver notre âme » mais pour travailler avec le Christ qui veut sauver le monde. Personne ne doit rester sur la touche. Le Seigneur attend de nous que nous donnions le meilleur de nous-mêmes là où nous sommes.

En célébrant cette eucharistie, nous nous tournons vers celui qui a échangé sa vie contre notre salut. Nous lui rendons grâce pour cette espérance et cette joie qui est en nous. Qu’il nous donne d’en être les porteurs et les messagers tout au long de notre vie.

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Homélie du 05 mai 2019 — 3e dim. de Pâques — Frère Ghislain
Cycle : Année C
Info :

Année C - 3e dimanche après Pâques - 5 mai 2019

Actes, 5, 27….41 -Apoc. 5, 11-14 -Jean 21, 1-19

Homélie du F.Ghislain

Texte :

A l’Eucharistie du jour de Pâques, nous avons entendu le premier récit de la résurrection selon saint Jean : à l’aube, Marie-Madeleine découvre la tombe vide et elle court prévenir deux disciples de Jésus : Pierre et cet anonyme désigné comme « celui que Jésus aimait ». Ce dernier court plus vite que Pierre, mais il n’entre pas, il laisse son ancien arriver, constater le vide et apercevoir les linges qui avaient enveloppé le corps. Puis il entre à son tour, voit les mêmes objets que Pierre et, dit le texte, « il crut ».

Ce vide et ces linceuls sont pour lui les signes de la Résurrection ; pour Pierre, ils demeurent une énigme, et tous deux rentrent chez eux. Que va-t-il se passer ensuite ?

Dans l’évangile de ce jour, nous retrouvons ces deux hommes, ensemble avec des compagnons. Ils ont pris part les deux fois à l’événement impressionnant de l’apparition du Christ. Mais que faire ensuite, sinon continuer la vie telle qu’elle était ? Ils vont donc pêcher. Comme ils n’ont rien pris à bâbord, ils suivent l’indication d’un homme qui leur crie de la plage : jetez le filet à droite. Peut-être un pêcheur comme eux qui connaît les eaux et les fréquentations du poisson… Et survient la récolte, incroyable. Le disciple que Jésus aimait réagit comme quelques jours plus tôt au tombeau : il voit les poissons et il croit : l’homme qui les a invités à jeter le filet, c’est Jésus vivant. Et cette fois, il le dit à Pierre. Aussitôt celui-ci se jette à l‘eau et il nage. Le voici arrivé sur la plage, il n’est pas loin de Jésus qui attend près d’un feu. Il ne s’est pas approché, sans doute qu’il n’ose pas : ils ne se sont pas parlé depuis le jardin des oliviers. Pierre y était prêt à se battre pour défendre Jésus contre l’arrestation imminente : il blesse un comparse et aurait accepté d’être blessé lui aussi, à mort peut-être. Mais Jésus refuse le combat, guérit le comparse et se laisse arrêter. Pierre est comme perdu : devant Jésus désarmé volontaire, il perd ses repères et, quand on se met à lui poser des questions, il prend ses distances : il ne peut pas, il ne veut pas entrer dans la Passion. Le disciple que Jésus aimait l’avait pu, l’avait voulu, il était allé au pied de la Croix de sorte que, d’emblée, sur des signes très concrets, des linges pliés, du poisson en abondance, il avait perçu la Résurrection.

Voici maintenant Pierre tout proche de Jésus. Il ne dit rien ; quand Jésus invite le groupe à apporter du poisson, c’est lui qui va en chercher. Avec tout le groupe, il mange comme il l’avait fait mainte fois durant les mois de compagnonnage. En regardant Pierre, nous pouvons comprendre un peu son attitude intérieure, son désir, son attente, son humilité aussi car il n’oublie pas le reniement. Et voici que Jésus prend l’initiative : il lui parle et lui pose la seule question qui importe, la seule peut-être que Pierre avait envie que Jésus lui pose : « M’aimes-tu ? ». Sur la base en effet de tout ce qu’il avait vécu depuis le premier appel de Galilée jusqu’à ce moment sur la rive du lac, il avait pu en effet comprendre, au-delà des mots, que le lien entre Jésus et lui était définitivement l’amour. Et il répond : « oui Seigneur, je t’aime ». Jésus peut alors le former à son image et à sa ressemblance. Comme Jésus, toujours selon saint Jean, était le Bon Pasteur, ainsi Pierre le sera-t-il. Comme Jésus a accompli sa mission de Bon Pasteur en donnant sa vie pour ses brebis, ainsi fera Pierre, le moment venu. Nous en avons un exemple dans la première lecture : Pierre annonce le message de la Résurrection et il assume tous les risques liées à l’obéissance au Père, comme l’avait fait Jésus. Mais cela n’était pas possible avant que Pierre n’aime en Esprit et en Vérité, et cet amour n’était pas possible avant qu’un itinéraire complexe n’ait été parcouru.

Pierre, le disciple que Jésus aimait : deux icônes de la suite du Christ. Nous pouvons nous réjouir de ce que, aujourd’hui, dans l’Eglise et peut-être aussi dans la foule de ceux qui ne connaissent pas explicitement l’Evangile, il y ait des hommes et des femmes qui vivent selon ces modèles. Les uns, plus intérieurs, plus profonds, qui, par l’Esprit de Dieu, comprennent tout de suite les signes de la présence de Dieu aux hommes. Les autres plus spontanés, mais plus à la surface, que la vie, peu à peu, enseigne sur les signes des temps. Entre les deux, il y a une multitude de figures, qui empruntent plus ou moins à celle du disciple que Jésus aimait et à celle de Pierre qui aimait Jésus. Nous pourrions peut-être nous demander : et moi, où suis-je là-dedans, où sont ceux avec qui je vis quotidiennement ? Comment vivons-nous la Résurrection, comment nous est-elle annoncée, comment l’annonçons-nous ?

Alors l’Evangile deviendra pour nous lumière, force et sérénité, et nous contribuerons au salut des hommes. - 5 mai 2019

Homélie du 28 avril 2019 — Dimanche de la Miséricorde — Frère Jean-Louis
Cycle : Année C
Info :

Année C -2e dimanche PÂQUES -(28/04/2019)

(Ac 5, 12-16 – Ps 117 – Ap 1, 9-11a.12-13.17-19 – Jn 20, 19–31

Homélie du F.Jean Louis

Texte :

Frères et sœurs,

en ce second dimanche de Pâques, l’Eglise nous offre des lectures qui ne manquent pas de richesses.

Entre la première communauté chrétienne, présentée comme modèle, dont tout le monde fait l’éloge, qui rencontre un succès certain, et l’apparition du Christ aux disciples apeurés ainsi que l’épisode fameux de Thomas, présenté comme sceptique mais qui finit quand même par professer la véritable identité du Christ « mon Seigneur et mon Dieu » en passant par la vision de Jean qui voit le Christ, comme un Fils d’homme, qui était mort et qui est vivant pour les siècles, nous ne manquons pas de sujets de réflexion, de méditation.

Le risque de la première lecture, si nous l’isolons de son contexte, est d’idéaliser la première communauté chrétienne. Croire que la proximité historique du Christ lui évite toute erreur et penser alors que, depuis cet idéal primitif, nous avons été de décadence en décadence… jusqu’à aujourd’hui où nous ne constatons que trop, les maladies de notre Eglise. C’est peu dynamisant, il faut l’avouer.

Pourtant, le passage qui précède immédiatement la première lecture de ce jour, nous montre que, dans la communauté qui avait prôné le partage intégral des biens, il y avait déjà des membres - Ananie et Saphyre - qui avaient essayé de s’approprier des biens à leur profit. Mal leur en a pris mais cela nous montre que, dès le début, l’idéal n’était pas suivi par tous. Ensuite, dans cette communauté présentée comme modèle de fraternité, il y aura conflit entre les disciples de langue grecque et ceux de langue hébraïque, les premiers se considérant défavorisés par rapport aux seconds. Les épîtres de Paul montrent aussi que les difficultés dans l’Eglise sont constantes. Et la vie de communautés comme celles de Corinthe ne manquera pas d’être assez mouvementée (problèmes de mœurs, problèmes d’autorité, de pouvoir,…).

La seconde lecture, quant à elle, plaçée dans le contexte du livre de l’Apocalypse, montre que cette vision assez grandiose du Fils d’Homme identifié au Christ mort et ressuscité précède des messages de ce dernier aux différentes communautés citées : Ephèse, Smyrne, Pergame etc…, messages dont le contenu est loin d’être une louange unanime. Au contraire, il s’agit, dans certains cas d’Eglises menacées de mort, pire, de tiédeur, avec des problèmes de doctrine, etc…

Quant à l’évangile de ce jour, s’il se termine bien, il faut quand même reconnaître que Thomas, dans un premier temps ne parvient pas à accueillir le témoignage des autres apôtres. Et si nous regardons le récit des apparitions du Christ dans l’évangile selon saint Marc, c’est encore pire. Les disciples refusent de croire Marie-Madeleine, ils refusent de croire le témoignage des deux disciples partis à la campagne, et il faudra une apparition du Christ aux Onze eux-mêmes et bien des reproches, pour les sortir de leur incroyance.

Bref, le contexte des lectures de ce jour nous montre des Eglises qui, si elles ne manquent pas de courage et de vie, sont aussi parfois éloignées de l’idéal évangélique. Les textes du Nouveau Testament ne sont pas des textes de propagande idéalisant le vécu des communautés chrétiennes. C’est peut-être nous qui faisons parfois une sélection qui nous arrange. Mais les textes nous révèlent, eux, une foi pas toujours évidente à mettre en oeuvre.

Sans doute que ces lectures peuvent nous réveiller en cette période difficile pour l’Eglise catholique. Rêver d’un monde où tout se passerait sans problème, sans souci, penser qu’une vie de proximité avec le Christ ôte tout ennui, toute fragilité, toute chute, cela peut nous sembler idéal mais n’est peut-être qu’illusion voire idole. L’histoire du monde, de l’Eglise nous rappelle que le mal demeure, que les conflits demeurent… y compris dans l’Eglise du Christ, mais que c’est à travers tout cela que le Salut de Dieu advient et que seul Dieu peut tirer le bien du mal.

Mais alors, où est la bonne nouvelle ? Comment parler de ce 2e dimanche de pâques comme dimanche de la Miséricorde ?

Eh bien, peut-être que la réponse réside dans l’attitude du Christ. S’il fait des reproches, il pardonne et même plus, il met en route les disciples, les Eglises, les communautés quelle que soient leurs fragilités, telles qu’elles sont. Il est impressionnant de voir combien le Christ ne rejette pas Thomas mais il l’invite à grandir.

Les fragilités des communautés chrétiennes primitives, les conflits, n’empêcheront pas ces dernières, soutenues par l’Esprit Saint de proclamer le Ressuscité à travers le monde connu.

Quant aux disciples, que ce soit Thomas dans l’évangile d’aujourd’hui ou les Onze dans l’évangile de saint Marc, leurs hésitations ou leur refus de croire n’auront pas comme conséquence d’être rejetés par le Christ qui, au contraire, gardant confiance en ceux qu’il a choisi, les envoie sur les routes du monde. N’est-ce pas là une merveilleuse illustration de la Miséricorde de Dieu qui espère en nous malgré nos faiblesses ?

Frères et sœurs, l’Église catholique vit actuellement une douloureuse épreuve de Vérité mais n’est-il pas préférable que la Vérité se fasse plutôt que de rester dans les ténèbres du mal ? La Vérité peut faire mal mais elle peut permettre un nouvel élan. Elle peut aider à la guérison de ceux et celles qui ont été blessés. Il importe que nous sachions nous engager à faire vivre notre Eglise. Le temps est sans doute fini de se laisser porter sans trop se sentir responsable de nos communautés chrétiennes, de penser que d’autres le feront à notre place. Le pape a invité les catholiques, tous les catholiques, à prendre en mains la destinée de leur Eglise. Comment ne pas y voir un appel du Christ à être davantage responsable ?

Les lectures de ce jour nous rappellent que la foi n’est pas toujours évidente, ni la confiance. Mais l’Esprit Saint a été et continue à nous être donné sans compter. Laissons-nous travailler par lui et retroussons nos manches. Le Christ ne nous demande pas d’être parfaits, d’avoir une foi sans faille, pour nous mettre à son service.

La conversion, se tourner toujours plus vers le Christ et se réformer, fait partie de l’ADN de l’Eglise. Peut-être l’avions-nous un peu oublié. Que le choc du réel nous conduise à nous laisser encourager par le Christ pour aller de l’avant, sans nostalgie d’un passé qui n’était pas si idéal que ça.

AMEN - 28 avril 2019

Homélie du 21 avril 2019 — Dimanche de Pâques — Frère Matthieu
Cycle : Année C
Info :

Année C - Dimanche 21 avril 2019 / Dimanche de la Résurrection

1ère lecture : Actes des Apôtres 10,34 a + 37-43

2ème lecture : Colossiens 3,1-4

Evangile selon saint Jean 20,1-9

Homéliedu F.Matthieu

Texte :

« Il vit et il crut. » Voilà ce que, la plupart du temps, on retient de cet évangile et la foi du disciple bien-aimé est objet de notre admiration, et nous est donnée en exemple de ce que devrait être notre propre foi… Et nous voilà bien loin, peut-être, de la foi, bien réelle qui est la nôtre en ce matin de Pâques !

Qu’en est-il en effet de notre propre foi, à chacun, chacune d’entre nous, au delà – ou en deçà – des alleluias et des professions de foi qui remplissent nos liturgies et nos célébrations…Oui, qu’en est-il de ma foi en la résurrection du Christ ? N’est-ce pas le jour où jamais de se poser la question ?

Et l’Evangile de Jean, si nous l’avons écouté en son entier est sans doute bien fait pour nous aider dans ce questionnement personnel.

Car, il n’est pas seulement question ici de la réaction de foi du disciple bien-aimé, mais aussi de celle des deux autres acteurs que Jean met en scène : Marie de Magdala et Pierre… et il ne s’agit pas de n’importe qui… Marie Madeleine était au pied de la Croix, elle est celle qui deviendra pour toute l’Eglise, l’apôtre des Apôtres, et Pierre n’est-il pas le chef du collège apostolique, le fondement de l’Eglise ?

Que nous dit l’Evangile ?

Marie vient au tombeau de grand matin, elle voit, mais seulement la pierre enlevée et elle s’enfuit, ou plutôt elle va trouver l’appui de deux de ses frères, les disciples de Jésus… et elle leur dit tout simplement son affolement devant ce qu’elle comprend comme la disparition du corps de Jésus, le vol sans doute de son cadavre… elle est loin de la foi en la résurrection de son Seigneur !

Et Pierre ? Il part en courant, il arrive au tombeau, il entre dans le sépulcre… vide… il voit le linceul resté là, il regarde le linceul et le linge qui avait recouvert la tête… il voit, mais de son constat minutieux de l’état des lieux, il ne semble rien tirer qui ait à voir avec la foi !

Et le verset qui clôt le récit… - mais que l’on n’a pas lu ! - nous dit simplement que les disciples retournèrent chez eux… et le disciple bien aimé aussi !

Nous voilà sans doute plus à l’aise pour avouer nos interrogations, nos perplexités face au mystère de la résurrection de Jésus.

Mais l’Evangile n’en reste pas là … n’en restons pas là, nous non plus…

Jean nous fait remarquer que ces interrogations des disciples ne restent pas dans le secret de leur cœur, ils les partagent : Marie va le dire aux disciples, et ils vont ensemble au tombeau… et ils regardent ensemble et il s cherchent ensemble… et la suite de l’Evangile nous dira que leur recherche se poursuit, que Marie reste au tombeau et se penche pour regarder… il continuent de chercher, ils sont en marche, ils sont en route… ils sont en quête de leur Seigneur et c’est bien là ce qui nous est aussi demandé : être à l’écoute, en recherche, en quête de Dieu.

Et l’Evangile nous indique aussi et surtout le lieu essentiel de leur recherche et de la nôtre : les Ecritures… c’est là qu’il s’agit de voir – l’Evangile reprend le mot –, de voir qu’« il fallait que Jésus ressuscite d’entre les morts » ! Oui, voilà bien l’essentiel : nous savons désormais où chercher, que lire, relire et méditer : les textes de notre Bible ; il est grand temps de la ressortir, de la mettre sur notre table de chevet, de lui donner le pas sur toute autre lecture… si toutefois nous voulons être sérieux avec nos questions, nos doutes, notre recherche !

Ainsi donc, oui, dans notre quête de Dieu, la communauté des croyants est le lieu primordial du partage, peut-être pas d’abord de notre foi, mais de nos questions, de la recherche de Jésus… c’est de cette communauté vivante qu’il faut partir : il faut courir ensemble, regarder ensemble, chercher ensemble…

Oui aussi, dans notre quête du Ressuscité, les Ecritures sont le lieu essentiel, indispensable où il faut chercher… et pourquoi pas ensemble aussi, en Eglise en tout cas, à la suite de tous les croyants qui nous précèdent dans notre quête et nous transmettent ce qu’ils ont eux-mêmes reçu.

Oui, alors, mais alors seulement, nous pourrons demeurer en chemin et faire, au jour que Dieu voudra, l’expérience personnelle de la venue de Jésus, le Ressuscité, à notre rencontre… au cœur de nos vies ! Et en cela aussi, il faut suivre Marie de Magdala, qui va reconnaître son Maître bien-aimé dans celui qu’elle croit d’abord être le jardinier !

Et en cela aussi, il faut suivre Pierre, qui fera lui aussi l’expérience de la rencontre du Ressuscité, celui qu’il a renié et qui le remettra dans l’assurance et de son pardon et de son secours, toujours offerts.

Et en cela aussi, il faut retrouver le disciple bien-aimé, et apprendre avec lui, à voir et à laisser la foi envahir notre cœur, car elle est un don gratuit de Dieu ! -Amen.- 21 avril 2019

Homélie du 20 avril 2019 — Veillée pascale — Père Abbé Luc
Cycle : Année C
Info :

VIGILE PASCALE 20.04.2019

Rm 6, 3-11 ; Lc 24,1-12[br

Homélie du Père abbé Luc

Texte :

Frères et sœurs,

« Ces propos leur semblèrent délirants»…Telle est la conclusion tirée par les apôtres à l’écoute du premier récit de la résurrection fait par les femmes. Des propos délirants… Cette réaction en dit long sur le côté ahurissant de la nouvelle. Pierre va quand même voir au tombeau d’où il revient tout étonné. A ces hommes encore blessés, et par ce qu’on a infligé à leur maitre, et par leur propre désertion, il ne s’agit pas de leur en raconter. Surtout pas de nouvelles illusions. A cette heure, il leur est impossible de croire.

Cette réaction des disciples nous replace devant l’énormité de la foi que nous confessons. La foi est un mystère, c’est-à-dire qu’elle nous enveloppe et nous fait vivre sans que l’on sache toujours bien dire comment. Pourquoi je crois ? Nous ne savons pas toujours bien en rendre compte. Dans une même famille, pourquoi je crois et pas mes frères et sœurs ? En qui, en quoi je crois ? Nous ne cessons de l’approfondir et de le chercher. Car la foi ne se réduit pas à un contenu doctrinal. Ce même mystère de la foi peut me faire poser encore d’autres questions : pourquoi aussi parfois je doute ? Parce que je me sens seul de mon espèce face à l’indifférence généralisée ? De quoi, de qui je doute ? De la cohérence du message de la foi ? Du Christ, de Dieu ou de moi-même ?

Ce récit de l’annonce de la résurrection au matin de Pâques, nous permet de revenir à la source de notre foi, sans crainte, sans honte non plus pour nos pas chancelants ou pour nos propos bredouillants… Sur le chemin de la foi, il y a place aussi pour cela. Car la foi nous demande d’affronter le manque, le vide du tombeau. Et ce n’est pas facile. Au début du récit, nous voyons les femmes désemparées, car elles ne trouvent plus le corps de Jésus qu’elles venaient honorer. La foi nous entraine à aller au-delà de ce que nous aimerions maitriser, au-delà de ce que nous connaissons déjà. Le Christ ressuscité se présente à nous, aujourd’hui encore, toujours plus grand, que nous ne pouvons l’imaginer et souvent ailleurs, en Galilée, aujourd’hui on dirait « aux périphéries ».

Et en même temps comment rendre compte de l’inouï de cet évènement de la résurrection ? L’ange qui apparait aux femmes se fait pédagogue. Il rapporte les propres paroles de Jésus qui avait annoncé sa passion et sa résurrection. « Rappelez-vous » leur dit-il… Et les femmes se rappelèrent. En faisant ainsi mémoire, elles peuvent accueillir l’inouï dans son surgissement éblouissant. N’est-ce pas ce que nous avons fait jusqu’à maintenant en cette vigile ? Nous avons fait mémoire de la longue histoire de Dieu avec son peuple. Une histoire de vie tellement accompagnée par le Dieu fidèle qu’elle ne peut se résoudre à buter sur la mort. La résurrection de Jésus, le Messie attendu, était déjà en germe, et en figure dans toutes les interventions divines depuis la création, en passant par Abraham, Moïse et tous les prophètes. Le Dieu des Vivants préparait la révélation du Vivant. Faire mémoire des actions de Dieu va nourrir et éclairer notre foi. Cela nous invite à saisir toutes les occasions qui nous sont offertes pour cultiver l’intelligence de la foi.

En venant cette nuit, nous désaltérer aux sources de la foi, nous avons demandé dans une oraison que le Seigneur ravive en nous l’esprit filial, celui reçu à notre baptême. En renouvelant dans quelques instants nos promesses baptismales, nous nous rappellerons que notre foi est engagement. Même dans le clair-obscur du croire, nous pouvons découvrir qu’une force nous est donnée dans l’engagement. Elle nous est même toujours promise au fur et à mesure que nous prenons au sérieux notre relation filiale avec Dieu le Père et son Fils Jésus. La foi qui s’engage fait grandir la foi.

Oui, frères et sœurs, en cette nuit, laissons-nous fortifier dans la foi. Laissons le Christ Ressuscité, accueilli en sa Parole et en son Corps et son Sang, faire naitre quelque chose de nouveau dans notre vie.

Homélie du 19 avril 2019 — Vendredi Saint — Père Abbé Luc
Cycle : Année C
Info :

VENDREDI SAINT 19.04.2019

Is 52, 13 - 53, 12; He 4, 14-16; 5, 7-9; Jn 18, 1 - 19, 42

Homélie du Père Abbé Luc

Texte :

Frères et sœurs,

Comme pour vous, je le pense, les images du sinistre à Notre Dame de Paris restent bien présentes. L’une d’elle a souvent été reproduite : c’est l’image de la croix du chœur, un bois nu, clair presque lumineux qui est resté suspendu au milieu des décombres sous la voûte effondrée. Je retiens aujourd’hui cette image qui peut éclairer le sens de la célébration que nous vivons. Nous faisons mémoire de la passion de Jésus, un effondrement pour Jésus et pour ces disciples. Effondrement que l’évangéliste Matthieu met davantage en image quand il relève qu’à la mort de Jésus, le rideau du temple se déchire, que la terre tremble et les rochers se fendent (Mt 27, ). Pour Mt, un monde ancien s’en va, un autre apparait… Oui, en la mort de Jésus, se concentrent tous nos effondrements humains et historiques, l’apparente victoire de la mort et du mal sur la vie et le bien, sur les efforts humains pour construire un monde plus juste et fraternel… Mais pour nous chrétiens, au milieu de ces décombres, la croix, dans la lumière de la résurrection, demeure le signe d’une victoire. Sur elle, Jésus a tué le mal à sa racine. Il détruit l’empire de la mort qui n’aura jamais le dernier mot. Oui, au milieu de nos décombres personnels, ecclésiaux, de nos décombres de sociétés ou de civilisations qui passent… la croix se dresse comme un signe d’espérance, humble et fort. En la vénérant cet après-midi, nous disons au Christ notre reconnaissance et nous adorons la toute-puissance de son amour, amour plus fort que nos péchés, nos trahisons, nos échecs, nos désespérances.