Homélies
Liste des Homélies
Année C -6ème dim. du Temps Pascal, 26 mai 2019).
Act 15 1-29; Ap21 10-23; Jn 1423-29
Homélie du F.Bernard
Il y a certainement une grâce liturgique à accueillir durant le temps pascal. Sans doute la percevons -nous plus vivement au jour de Pâques et dans les jours qui suivent, où nous sont remis en mémoire les différents récits des apparitions pascales. Cette grâce nous est à nouveau rendue sensible quand approchent les solennités de l’Ascension et de Pentecôte. Et nous y sommes.
Nous comprenons alors mieux, à la suite des disciples, qu’il était bon que le Seigneur Jésus quitte notre monde pour rejoindre le Père, car l’Ascension est sa victoire. Elle est aussi la nôtre, en effet une humanité, en tout semblable à la nôtre, est désormais dans la gloire de Dieu.
Il était bon encore que le Seigneur Jésus nous quitte, car il ne nous a pas laissés orphelins. Il nous a envoyé l’Esprit, son Esprit, Présence divine à l’intime de nous-mêmes, cet Esprit qui se joint à notre esprit pour crier « Abba Père ». Et en lui la vie trinitaire est déjà commencée. Jésus nous le disait à l’instant : « Si quelqu’un m’aime (et comment l’aimer sinon dans l’Esprit ?), mon Père et moi nous viendrons, et nous ferons chez lui notre demeure » (Jn 14,23).
Jésus vient de nous le dire encore : « Je vous laisse la paix, je vous donne ma paix », ce sont ces mots mêmes que nous redisons en chaque eucharistie. Ces mots résonnent fortement en nous, tant le désir d’atteindre la paix est inscrit en nous. Mais si la paix que donnent les hommes s’avère précaire, sans cesse menacée par les aléas de la vie et les égoïsmes des hommes, la Paix qui vient de Dieu est tout autre. Elle ne peut nous manquer. Elle nous aide très certainement à propager un peu de paix et de concorde autour de nous.
En ce jour d’élection pour le parlement européen, nous prions pour que la paix et la fraternité grandissent entre les nations qui constituent cette Europe, afin d’écarter définitivement ces guerres fratricides qui ont ravagé nos peuples dans un passé encore tout récent.
Que vaut une communauté chrétienne, que vaut une communauté monastique, que vaut l’Église, si elles ne sont pas porteuses de paix ? Quel témoignage donnent-t-elles alors ? Jésus nous l’a prévenu : « C’est à l’amour que vous aurez les uns pour les autres que tous vous reconnaîtront pour mes disciples » (Jn 13,34).
Mais nous le savons, les conflits, les tensions sont inévitables. La première lecture en donnait un bon exemple. Elle faisait état d’un conflit très grave qu’a connu la première communauté chrétienne. Comment faire vivre ensemble, dans la concorde, la communauté des repas et la communion eucharistique, les chrétiens venus du judaïsme et ceux venus des nations païennes ? Fallait-il imposer à ces derniers toutes les pratiques juives, y compris les plus contraignantes, comme la circoncision ? Fallait-il judaïser pour devenir chrétien ?
Le récit des Actes, que la première lecture a malencontreusement abrégé, fait état de longues discutions, d’écoutes mutuelles dans un climat de prière, de renoncements chez les uns et chez les autres, afin d’aboutir à une solution acceptable par tous, ici formulée par les Apôtres en ces termes : « L’Esprit Saint et nous avons décidé ce qui suit… ». Sont alors données quelques règles plutôt modestes qui s’imposeront à tous et permettront de vivre en paix.
On sait que ce grave conflit connaîtra par la suite d’autres rebondissements, dont font état les lettres de Paul. Mais remarquons plutôt ici, qu’à l’origine de ce conflit, existait une crise bien plus grave encore, qui provoquera celle-là une rupture, le premier schisme qu’a connu l’Église : la séparation entre les juifs et les chrétiens, entre la Synagogue et l’Église, le peuple de la première alliance et celui de la nouvelle. Une écharde dans la chair, pour Paul, une blessure profonde pour l’Église primitive, une blessure qui saigne toujours. Grâce à Dieu, aujourd’hui cependant, après la Shoah et Vatican II, l’ignorance et le mépris qui ont marqué dans le passé les relations entre les deux frères ont fait place à l’estime et à l’amitié.
C’est ici que la deuxième lecture entendue, celle de la vision du prophète de Patmos, suscite en nous une immense espérance. Jean contemple la Jérusalem nouvelle, la Cité de la Paix, car tel est son nom. Il la contemple au terme de l’histoire. La Cité a douze portes, où sont inscrits les noms des douze tribus d‘Israël. Elle a aussi douze assises au nom des douze apôtres de l’Agneau. Déjà antérieurement le prophète voyait les vingt-quatre vieillards debout devant le trône de Dieu et de l’Agneau, sans doute les douze patriarches de la première alliance et les douze apôtres de la nouvelle, le peuple de la première alliance et le peuple de la nouvelle rassemblés dans la Jérusalem nouvelle.
Cette vision était déjà celle qu’entrevoyait l’apôtres Paul, écrivant dans la lettre aux Romains : « Si la mise à l’écart des juifs a été une réconciliation pour le monde, que ne sera leur admission, sinon la vie au-delà de la mort » ( Rm 11, 14-15).
La réconciliation entre juifs et chrétiens, au plan de la foi, ne se réalisera peut-être qu’au terme de l’histoire, et en marquera la fin. Il reste que dans le temps qui est le nôtre nous devons œuvrer den ce sens par le dialogue et dans la charité. Si une unité dans la foi n’est pas à mesure humaine, une unité dans la charité est toujours possible entre les deux frères, l’ainé resté dans la maison d’Israël, et le cadet venu de loin et ramené à la maison du Père à la suite du Christ.
Faisant ainsi, nous concourrons certainement à la Paix de Dieu, à la construction de la Cité de la paix. - 26 mai 2019
Année C – 4° dimanche de Pâques – 12 mai 2019
Act 13 14-52 ; Ap 7 9-17 ; Jn 10 27-30
Homélie par F.Damase
Dans l’Évangile, Jésus se présente comme le « bon berger ». « Mes brebis écoutent ma voix, je les connais et elles me suivent ; je leur donne la vie éternelle ; elles ne périront jamais et nul ne les arrachera de ma main ». Nous ne pouvons pas nous proclamer disciples de Jésus si nous n’écoutons pas sa voix. D’une écoute du cœur. Une écoute qui nous engage à suivre le Christ, à lui faire confiance et à mettre en pratique ce qu’il nous dit.
Dans le bruit de la vie courante, trépidante, cela n’est pas facile. Nous sommes affrontés à des difficultés, des doutes, des souffrances. Il y a tellement de changements dans notre société, dans notre monde et même dans notre Église. Certains disent même, qu’ils n’ont pas besoin de maître. Alors on s’interroge : à qui pouvons-nous donner notre confiance ?
L’Évangile nous montre le rapport étroit que Jésus veut établir avec chacun de nous : il est vraiment notre guide, notre Maître, notre ami, notre modèle ; il est surtout notre Sauveur : « Je leur donne la Vie Éternelle et personne ne les arrachera de ma main ». Ces paroles du Christ nous donnent un sentiment de sécurité absolue ; notre vie est pleinement à l’abri entre les mains de Jésus et du Père ; il est celui qui ne cesse de nous manifester sa miséricorde. C’est son regard d’amour qui touche chacun de nous au plus profond de lui-même.
Pour comprendre cela, tournons-nous vers la croix du Christ ! Le pape François nous dit que pour sauver les brebis égarées, « le berger s’est fait agneau », il s’est laissé sacrifier, il a pris sur lui tous nos péchés pour nous en libérer. Il a donné sa vie en abondance pour nous et pour le monde entier. Rien ni personne ne pourra nous arracher à la main de Jésus parce que rien ni personne ne peut vaincre son amour. L’amour de Jésus est invincible.
Nous sommes tous invités à répondre à cet amour qui ne cesse de faire le premier pas vers nous. Il est venu pour tous car il ne veut pas qu’un seul se perde. Cela signifie qu’il ne pense pas seulement aux croyants fidèles.
La première lecture nous montre Paul et Barnabé annoncer l’Evangile aux païens. Christ est la « Lumière des nations » et le « Sauveur de tous les peuples ». Cette mission connaîtra un succès extraordinaire. Beaucoup témoigneront de leur foi jusqu’au martyre. Aujourd’hui, des chrétiens sont assassinés à cause de leur foi en Jésus. Rien ne peut ébranler leur espérance. Personne ne peut les arracher de la main du Berger.
La seconde lecture est extraite de l’Apocalypse : elle nous montre la victoire obtenue par les martyrs de toutes races et de toutes nations. Après les persécutions, les souffrances, la faim et les pleurs, ils connaissent la joie d’être avec Dieu.
En ce dimanche des vocations, nous nous unissons à la prière de l’Église universelle. La bonne nouvelle de l’Évangile est pour toutes les nations. Elle doit être annoncée à temps et à contretemps. Cette journée nous rappelle que le Christ veut nous associer tous à sa mission de « Berger de toute humanité ».
Nous pensons aux prêtres, religieux et religieuses, aux catéchistes, aux animateurs des divers groupes pastoraux mais aussi à tous les baptisés. Nous ne sommes pas chrétiens pour nous-mêmes, pour « sauver notre âme » mais pour travailler avec le Christ qui veut sauver le monde. Personne ne doit rester sur la touche. Le Seigneur attend de nous que nous donnions le meilleur de nous-mêmes là où nous sommes.
En célébrant cette eucharistie, nous nous tournons vers celui qui a échangé sa vie contre notre salut. Nous lui rendons grâce pour cette espérance et cette joie qui est en nous. Qu’il nous donne d’en être les porteurs et les messagers tout au long de notre vie.
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Année C - 3e dimanche après Pâques - 5 mai 2019
Actes, 5, 27….41 -Apoc. 5, 11-14 -Jean 21, 1-19
Homélie du F.Ghislain
A l’Eucharistie du jour de Pâques, nous avons entendu le premier récit de la résurrection selon saint Jean : à l’aube, Marie-Madeleine découvre la tombe vide et elle court prévenir deux disciples de Jésus : Pierre et cet anonyme désigné comme « celui que Jésus aimait ». Ce dernier court plus vite que Pierre, mais il n’entre pas, il laisse son ancien arriver, constater le vide et apercevoir les linges qui avaient enveloppé le corps. Puis il entre à son tour, voit les mêmes objets que Pierre et, dit le texte, « il crut ».
Ce vide et ces linceuls sont pour lui les signes de la Résurrection ; pour Pierre, ils demeurent une énigme, et tous deux rentrent chez eux. Que va-t-il se passer ensuite ?
Dans l’évangile de ce jour, nous retrouvons ces deux hommes, ensemble avec des compagnons. Ils ont pris part les deux fois à l’événement impressionnant de l’apparition du Christ. Mais que faire ensuite, sinon continuer la vie telle qu’elle était ? Ils vont donc pêcher. Comme ils n’ont rien pris à bâbord, ils suivent l’indication d’un homme qui leur crie de la plage : jetez le filet à droite. Peut-être un pêcheur comme eux qui connaît les eaux et les fréquentations du poisson… Et survient la récolte, incroyable. Le disciple que Jésus aimait réagit comme quelques jours plus tôt au tombeau : il voit les poissons et il croit : l’homme qui les a invités à jeter le filet, c’est Jésus vivant. Et cette fois, il le dit à Pierre. Aussitôt celui-ci se jette à l‘eau et il nage. Le voici arrivé sur la plage, il n’est pas loin de Jésus qui attend près d’un feu. Il ne s’est pas approché, sans doute qu’il n’ose pas : ils ne se sont pas parlé depuis le jardin des oliviers. Pierre y était prêt à se battre pour défendre Jésus contre l’arrestation imminente : il blesse un comparse et aurait accepté d’être blessé lui aussi, à mort peut-être. Mais Jésus refuse le combat, guérit le comparse et se laisse arrêter. Pierre est comme perdu : devant Jésus désarmé volontaire, il perd ses repères et, quand on se met à lui poser des questions, il prend ses distances : il ne peut pas, il ne veut pas entrer dans la Passion. Le disciple que Jésus aimait l’avait pu, l’avait voulu, il était allé au pied de la Croix de sorte que, d’emblée, sur des signes très concrets, des linges pliés, du poisson en abondance, il avait perçu la Résurrection.
Voici maintenant Pierre tout proche de Jésus. Il ne dit rien ; quand Jésus invite le groupe à apporter du poisson, c’est lui qui va en chercher. Avec tout le groupe, il mange comme il l’avait fait mainte fois durant les mois de compagnonnage. En regardant Pierre, nous pouvons comprendre un peu son attitude intérieure, son désir, son attente, son humilité aussi car il n’oublie pas le reniement. Et voici que Jésus prend l’initiative : il lui parle et lui pose la seule question qui importe, la seule peut-être que Pierre avait envie que Jésus lui pose : « M’aimes-tu ? ». Sur la base en effet de tout ce qu’il avait vécu depuis le premier appel de Galilée jusqu’à ce moment sur la rive du lac, il avait pu en effet comprendre, au-delà des mots, que le lien entre Jésus et lui était définitivement l’amour. Et il répond : « oui Seigneur, je t’aime ». Jésus peut alors le former à son image et à sa ressemblance. Comme Jésus, toujours selon saint Jean, était le Bon Pasteur, ainsi Pierre le sera-t-il. Comme Jésus a accompli sa mission de Bon Pasteur en donnant sa vie pour ses brebis, ainsi fera Pierre, le moment venu. Nous en avons un exemple dans la première lecture : Pierre annonce le message de la Résurrection et il assume tous les risques liées à l’obéissance au Père, comme l’avait fait Jésus. Mais cela n’était pas possible avant que Pierre n’aime en Esprit et en Vérité, et cet amour n’était pas possible avant qu’un itinéraire complexe n’ait été parcouru.
Pierre, le disciple que Jésus aimait : deux icônes de la suite du Christ. Nous pouvons nous réjouir de ce que, aujourd’hui, dans l’Eglise et peut-être aussi dans la foule de ceux qui ne connaissent pas explicitement l’Evangile, il y ait des hommes et des femmes qui vivent selon ces modèles. Les uns, plus intérieurs, plus profonds, qui, par l’Esprit de Dieu, comprennent tout de suite les signes de la présence de Dieu aux hommes. Les autres plus spontanés, mais plus à la surface, que la vie, peu à peu, enseigne sur les signes des temps. Entre les deux, il y a une multitude de figures, qui empruntent plus ou moins à celle du disciple que Jésus aimait et à celle de Pierre qui aimait Jésus. Nous pourrions peut-être nous demander : et moi, où suis-je là-dedans, où sont ceux avec qui je vis quotidiennement ? Comment vivons-nous la Résurrection, comment nous est-elle annoncée, comment l’annonçons-nous ?
Alors l’Evangile deviendra pour nous lumière, force et sérénité, et nous contribuerons au salut des hommes. - 5 mai 2019
Année C -2e dimanche PÂQUES -(28/04/2019)
(Ac 5, 12-16 – Ps 117 – Ap 1, 9-11a.12-13.17-19 – Jn 20, 19–31
Homélie du F.Jean Louis
Frères et sœurs,
en ce second dimanche de Pâques, l’Eglise nous offre des lectures qui ne manquent pas de richesses.
Entre la première communauté chrétienne, présentée comme modèle, dont tout le monde fait l’éloge, qui rencontre un succès certain, et l’apparition du Christ aux disciples apeurés ainsi que l’épisode fameux de Thomas, présenté comme sceptique mais qui finit quand même par professer la véritable identité du Christ « mon Seigneur et mon Dieu » en passant par la vision de Jean qui voit le Christ, comme un Fils d’homme, qui était mort et qui est vivant pour les siècles, nous ne manquons pas de sujets de réflexion, de méditation.
Le risque de la première lecture, si nous l’isolons de son contexte, est d’idéaliser la première communauté chrétienne. Croire que la proximité historique du Christ lui évite toute erreur et penser alors que, depuis cet idéal primitif, nous avons été de décadence en décadence… jusqu’à aujourd’hui où nous ne constatons que trop, les maladies de notre Eglise. C’est peu dynamisant, il faut l’avouer.
Pourtant, le passage qui précède immédiatement la première lecture de ce jour, nous montre que, dans la communauté qui avait prôné le partage intégral des biens, il y avait déjà des membres - Ananie et Saphyre - qui avaient essayé de s’approprier des biens à leur profit. Mal leur en a pris mais cela nous montre que, dès le début, l’idéal n’était pas suivi par tous. Ensuite, dans cette communauté présentée comme modèle de fraternité, il y aura conflit entre les disciples de langue grecque et ceux de langue hébraïque, les premiers se considérant défavorisés par rapport aux seconds. Les épîtres de Paul montrent aussi que les difficultés dans l’Eglise sont constantes. Et la vie de communautés comme celles de Corinthe ne manquera pas d’être assez mouvementée (problèmes de mœurs, problèmes d’autorité, de pouvoir,…).
La seconde lecture, quant à elle, plaçée dans le contexte du livre de l’Apocalypse, montre que cette vision assez grandiose du Fils d’Homme identifié au Christ mort et ressuscité précède des messages de ce dernier aux différentes communautés citées : Ephèse, Smyrne, Pergame etc…, messages dont le contenu est loin d’être une louange unanime. Au contraire, il s’agit, dans certains cas d’Eglises menacées de mort, pire, de tiédeur, avec des problèmes de doctrine, etc…
Quant à l’évangile de ce jour, s’il se termine bien, il faut quand même reconnaître que Thomas, dans un premier temps ne parvient pas à accueillir le témoignage des autres apôtres. Et si nous regardons le récit des apparitions du Christ dans l’évangile selon saint Marc, c’est encore pire. Les disciples refusent de croire Marie-Madeleine, ils refusent de croire le témoignage des deux disciples partis à la campagne, et il faudra une apparition du Christ aux Onze eux-mêmes et bien des reproches, pour les sortir de leur incroyance.
Bref, le contexte des lectures de ce jour nous montre des Eglises qui, si elles ne manquent pas de courage et de vie, sont aussi parfois éloignées de l’idéal évangélique. Les textes du Nouveau Testament ne sont pas des textes de propagande idéalisant le vécu des communautés chrétiennes. C’est peut-être nous qui faisons parfois une sélection qui nous arrange. Mais les textes nous révèlent, eux, une foi pas toujours évidente à mettre en oeuvre.
Sans doute que ces lectures peuvent nous réveiller en cette période difficile pour l’Eglise catholique. Rêver d’un monde où tout se passerait sans problème, sans souci, penser qu’une vie de proximité avec le Christ ôte tout ennui, toute fragilité, toute chute, cela peut nous sembler idéal mais n’est peut-être qu’illusion voire idole. L’histoire du monde, de l’Eglise nous rappelle que le mal demeure, que les conflits demeurent… y compris dans l’Eglise du Christ, mais que c’est à travers tout cela que le Salut de Dieu advient et que seul Dieu peut tirer le bien du mal.
Mais alors, où est la bonne nouvelle ? Comment parler de ce 2e dimanche de pâques comme dimanche de la Miséricorde ?
Eh bien, peut-être que la réponse réside dans l’attitude du Christ. S’il fait des reproches, il pardonne et même plus, il met en route les disciples, les Eglises, les communautés quelle que soient leurs fragilités, telles qu’elles sont. Il est impressionnant de voir combien le Christ ne rejette pas Thomas mais il l’invite à grandir.
Les fragilités des communautés chrétiennes primitives, les conflits, n’empêcheront pas ces dernières, soutenues par l’Esprit Saint de proclamer le Ressuscité à travers le monde connu.
Quant aux disciples, que ce soit Thomas dans l’évangile d’aujourd’hui ou les Onze dans l’évangile de saint Marc, leurs hésitations ou leur refus de croire n’auront pas comme conséquence d’être rejetés par le Christ qui, au contraire, gardant confiance en ceux qu’il a choisi, les envoie sur les routes du monde. N’est-ce pas là une merveilleuse illustration de la Miséricorde de Dieu qui espère en nous malgré nos faiblesses ?
Frères et sœurs, l’Église catholique vit actuellement une douloureuse épreuve de Vérité mais n’est-il pas préférable que la Vérité se fasse plutôt que de rester dans les ténèbres du mal ? La Vérité peut faire mal mais elle peut permettre un nouvel élan. Elle peut aider à la guérison de ceux et celles qui ont été blessés. Il importe que nous sachions nous engager à faire vivre notre Eglise. Le temps est sans doute fini de se laisser porter sans trop se sentir responsable de nos communautés chrétiennes, de penser que d’autres le feront à notre place. Le pape a invité les catholiques, tous les catholiques, à prendre en mains la destinée de leur Eglise. Comment ne pas y voir un appel du Christ à être davantage responsable ?
Les lectures de ce jour nous rappellent que la foi n’est pas toujours évidente, ni la confiance. Mais l’Esprit Saint a été et continue à nous être donné sans compter. Laissons-nous travailler par lui et retroussons nos manches. Le Christ ne nous demande pas d’être parfaits, d’avoir une foi sans faille, pour nous mettre à son service.
La conversion, se tourner toujours plus vers le Christ et se réformer, fait partie de l’ADN de l’Eglise. Peut-être l’avions-nous un peu oublié. Que le choc du réel nous conduise à nous laisser encourager par le Christ pour aller de l’avant, sans nostalgie d’un passé qui n’était pas si idéal que ça.
AMEN - 28 avril 2019
Année C - Dimanche 21 avril 2019 / Dimanche de la Résurrection
1ère lecture : Actes des Apôtres 10,34 a + 37-43
2ème lecture : Colossiens 3,1-4
Evangile selon saint Jean 20,1-9
Homéliedu F.Matthieu
« Il vit et il crut. » Voilà ce que, la plupart du temps, on retient de cet évangile et la foi du disciple bien-aimé est objet de notre admiration, et nous est donnée en exemple de ce que devrait être notre propre foi… Et nous voilà bien loin, peut-être, de la foi, bien réelle qui est la nôtre en ce matin de Pâques !
Qu’en est-il en effet de notre propre foi, à chacun, chacune d’entre nous, au delà – ou en deçà – des alleluias et des professions de foi qui remplissent nos liturgies et nos célébrations…Oui, qu’en est-il de ma foi en la résurrection du Christ ? N’est-ce pas le jour où jamais de se poser la question ?
Et l’Evangile de Jean, si nous l’avons écouté en son entier est sans doute bien fait pour nous aider dans ce questionnement personnel.
Car, il n’est pas seulement question ici de la réaction de foi du disciple bien-aimé, mais aussi de celle des deux autres acteurs que Jean met en scène : Marie de Magdala et Pierre… et il ne s’agit pas de n’importe qui… Marie Madeleine était au pied de la Croix, elle est celle qui deviendra pour toute l’Eglise, l’apôtre des Apôtres, et Pierre n’est-il pas le chef du collège apostolique, le fondement de l’Eglise ?
Que nous dit l’Evangile ?
Marie vient au tombeau de grand matin, elle voit, mais seulement la pierre enlevée et elle s’enfuit, ou plutôt elle va trouver l’appui de deux de ses frères, les disciples de Jésus… et elle leur dit tout simplement son affolement devant ce qu’elle comprend comme la disparition du corps de Jésus, le vol sans doute de son cadavre… elle est loin de la foi en la résurrection de son Seigneur !
Et Pierre ? Il part en courant, il arrive au tombeau, il entre dans le sépulcre… vide… il voit le linceul resté là, il regarde le linceul et le linge qui avait recouvert la tête… il voit, mais de son constat minutieux de l’état des lieux, il ne semble rien tirer qui ait à voir avec la foi !
Et le verset qui clôt le récit… - mais que l’on n’a pas lu ! - nous dit simplement que les disciples retournèrent chez eux… et le disciple bien aimé aussi !
Nous voilà sans doute plus à l’aise pour avouer nos interrogations, nos perplexités face au mystère de la résurrection de Jésus.
Mais l’Evangile n’en reste pas là … n’en restons pas là, nous non plus…
Jean nous fait remarquer que ces interrogations des disciples ne restent pas dans le secret de leur cœur, ils les partagent : Marie va le dire aux disciples, et ils vont ensemble au tombeau… et ils regardent ensemble et il s cherchent ensemble… et la suite de l’Evangile nous dira que leur recherche se poursuit, que Marie reste au tombeau et se penche pour regarder… il continuent de chercher, ils sont en marche, ils sont en route… ils sont en quête de leur Seigneur et c’est bien là ce qui nous est aussi demandé : être à l’écoute, en recherche, en quête de Dieu.
Et l’Evangile nous indique aussi et surtout le lieu essentiel de leur recherche et de la nôtre : les Ecritures… c’est là qu’il s’agit de voir – l’Evangile reprend le mot –, de voir qu’« il fallait que Jésus ressuscite d’entre les morts » ! Oui, voilà bien l’essentiel : nous savons désormais où chercher, que lire, relire et méditer : les textes de notre Bible ; il est grand temps de la ressortir, de la mettre sur notre table de chevet, de lui donner le pas sur toute autre lecture… si toutefois nous voulons être sérieux avec nos questions, nos doutes, notre recherche !
Ainsi donc, oui, dans notre quête de Dieu, la communauté des croyants est le lieu primordial du partage, peut-être pas d’abord de notre foi, mais de nos questions, de la recherche de Jésus… c’est de cette communauté vivante qu’il faut partir : il faut courir ensemble, regarder ensemble, chercher ensemble…
Oui aussi, dans notre quête du Ressuscité, les Ecritures sont le lieu essentiel, indispensable où il faut chercher… et pourquoi pas ensemble aussi, en Eglise en tout cas, à la suite de tous les croyants qui nous précèdent dans notre quête et nous transmettent ce qu’ils ont eux-mêmes reçu.
Oui, alors, mais alors seulement, nous pourrons demeurer en chemin et faire, au jour que Dieu voudra, l’expérience personnelle de la venue de Jésus, le Ressuscité, à notre rencontre… au cœur de nos vies ! Et en cela aussi, il faut suivre Marie de Magdala, qui va reconnaître son Maître bien-aimé dans celui qu’elle croit d’abord être le jardinier !
Et en cela aussi, il faut suivre Pierre, qui fera lui aussi l’expérience de la rencontre du Ressuscité, celui qu’il a renié et qui le remettra dans l’assurance et de son pardon et de son secours, toujours offerts.
Et en cela aussi, il faut retrouver le disciple bien-aimé, et apprendre avec lui, à voir et à laisser la foi envahir notre cœur, car elle est un don gratuit de Dieu ! -Amen.- 21 avril 2019
VIGILE PASCALE 20.04.2019
Rm 6, 3-11 ; Lc 24,1-12[br
Homélie du Père abbé Luc
Frères et sœurs,
« Ces propos leur semblèrent délirants»…Telle est la conclusion tirée par les apôtres à l’écoute du premier récit de la résurrection fait par les femmes. Des propos délirants… Cette réaction en dit long sur le côté ahurissant de la nouvelle. Pierre va quand même voir au tombeau d’où il revient tout étonné. A ces hommes encore blessés, et par ce qu’on a infligé à leur maitre, et par leur propre désertion, il ne s’agit pas de leur en raconter. Surtout pas de nouvelles illusions. A cette heure, il leur est impossible de croire.
Cette réaction des disciples nous replace devant l’énormité de la foi que nous confessons. La foi est un mystère, c’est-à-dire qu’elle nous enveloppe et nous fait vivre sans que l’on sache toujours bien dire comment. Pourquoi je crois ? Nous ne savons pas toujours bien en rendre compte. Dans une même famille, pourquoi je crois et pas mes frères et sœurs ? En qui, en quoi je crois ? Nous ne cessons de l’approfondir et de le chercher. Car la foi ne se réduit pas à un contenu doctrinal. Ce même mystère de la foi peut me faire poser encore d’autres questions : pourquoi aussi parfois je doute ? Parce que je me sens seul de mon espèce face à l’indifférence généralisée ? De quoi, de qui je doute ? De la cohérence du message de la foi ? Du Christ, de Dieu ou de moi-même ?
Ce récit de l’annonce de la résurrection au matin de Pâques, nous permet de revenir à la source de notre foi, sans crainte, sans honte non plus pour nos pas chancelants ou pour nos propos bredouillants… Sur le chemin de la foi, il y a place aussi pour cela. Car la foi nous demande d’affronter le manque, le vide du tombeau. Et ce n’est pas facile. Au début du récit, nous voyons les femmes désemparées, car elles ne trouvent plus le corps de Jésus qu’elles venaient honorer. La foi nous entraine à aller au-delà de ce que nous aimerions maitriser, au-delà de ce que nous connaissons déjà. Le Christ ressuscité se présente à nous, aujourd’hui encore, toujours plus grand, que nous ne pouvons l’imaginer et souvent ailleurs, en Galilée, aujourd’hui on dirait « aux périphéries ».
Et en même temps comment rendre compte de l’inouï de cet évènement de la résurrection ? L’ange qui apparait aux femmes se fait pédagogue. Il rapporte les propres paroles de Jésus qui avait annoncé sa passion et sa résurrection. « Rappelez-vous » leur dit-il… Et les femmes se rappelèrent. En faisant ainsi mémoire, elles peuvent accueillir l’inouï dans son surgissement éblouissant. N’est-ce pas ce que nous avons fait jusqu’à maintenant en cette vigile ? Nous avons fait mémoire de la longue histoire de Dieu avec son peuple. Une histoire de vie tellement accompagnée par le Dieu fidèle qu’elle ne peut se résoudre à buter sur la mort. La résurrection de Jésus, le Messie attendu, était déjà en germe, et en figure dans toutes les interventions divines depuis la création, en passant par Abraham, Moïse et tous les prophètes. Le Dieu des Vivants préparait la révélation du Vivant. Faire mémoire des actions de Dieu va nourrir et éclairer notre foi. Cela nous invite à saisir toutes les occasions qui nous sont offertes pour cultiver l’intelligence de la foi.
En venant cette nuit, nous désaltérer aux sources de la foi, nous avons demandé dans une oraison que le Seigneur ravive en nous l’esprit filial, celui reçu à notre baptême. En renouvelant dans quelques instants nos promesses baptismales, nous nous rappellerons que notre foi est engagement. Même dans le clair-obscur du croire, nous pouvons découvrir qu’une force nous est donnée dans l’engagement. Elle nous est même toujours promise au fur et à mesure que nous prenons au sérieux notre relation filiale avec Dieu le Père et son Fils Jésus. La foi qui s’engage fait grandir la foi.
Oui, frères et sœurs, en cette nuit, laissons-nous fortifier dans la foi. Laissons le Christ Ressuscité, accueilli en sa Parole et en son Corps et son Sang, faire naitre quelque chose de nouveau dans notre vie.
VENDREDI SAINT 19.04.2019
Is 52, 13 - 53, 12; He 4, 14-16; 5, 7-9; Jn 18, 1 - 19, 42
Homélie du Père Abbé Luc
Frères et sœurs,
Comme pour vous, je le pense, les images du sinistre à Notre Dame de Paris restent bien présentes. L’une d’elle a souvent été reproduite : c’est l’image de la croix du chœur, un bois nu, clair presque lumineux qui est resté suspendu au milieu des décombres sous la voûte effondrée. Je retiens aujourd’hui cette image qui peut éclairer le sens de la célébration que nous vivons. Nous faisons mémoire de la passion de Jésus, un effondrement pour Jésus et pour ces disciples. Effondrement que l’évangéliste Matthieu met davantage en image quand il relève qu’à la mort de Jésus, le rideau du temple se déchire, que la terre tremble et les rochers se fendent (Mt 27, ). Pour Mt, un monde ancien s’en va, un autre apparait… Oui, en la mort de Jésus, se concentrent tous nos effondrements humains et historiques, l’apparente victoire de la mort et du mal sur la vie et le bien, sur les efforts humains pour construire un monde plus juste et fraternel… Mais pour nous chrétiens, au milieu de ces décombres, la croix, dans la lumière de la résurrection, demeure le signe d’une victoire. Sur elle, Jésus a tué le mal à sa racine. Il détruit l’empire de la mort qui n’aura jamais le dernier mot. Oui, au milieu de nos décombres personnels, ecclésiaux, de nos décombres de sociétés ou de civilisations qui passent… la croix se dresse comme un signe d’espérance, humble et fort. En la vénérant cet après-midi, nous disons au Christ notre reconnaissance et nous adorons la toute-puissance de son amour, amour plus fort que nos péchés, nos trahisons, nos échecs, nos désespérances.
JEUDI SAINT - 18.04.2019
Ex 12, 1-8.11-14 ; 1 Co 11,23-26 ; Jn 13, 1-15
Homélie du P.Abbé Luc
Frères et sœurs,
Au début de cette célébration, nous avons prié ainsi avec l’oraison : « ton Fils unique, avant de se livrer lui-même à la mort, a voulu remettre à son Eglise, le sacrifice nouveau de l’Alliance éternelle ». Déjà, dans la première alliance, Moïse avait transmis des instructions précises pour accomplir le rite du repas pascal. Ainsi le peuple célèbrerait le mémorial du passage du Seigneur préservant son peuple de la mort, et le sauvant des eaux. Ce soir, au cours du repas pascal, Jésus laisse désormais à ses disciples, le sacrifice nouveau, le mémorial de son propre sacrifice, en un double geste : d’un côté l’offrande de son corps et de son sang, dans le pain et le vin, et de l’autre le lavement des pieds, signe de son abaissement à notre service. Quand l’Eglise fait mémoire de ce double geste, particulièrement ce soir, elle accueille pour elle-même et pour toute l’humanité « le sacrement de l’amour » de Dieu. Elle devient alors témoin de « l’Alliance éternelle » que Dieu désire nouer avec l’humanité.
Je suis conscient en prononçant ces mots, de dire des réalités chargées de sens. Car la lumière de la foi nous laisse entrevoir, à travers des signes simples, une profondeur insoupçonnée. Elle nous donne de comprendre ainsi combien notre humanité n’est pas laissée à elle-même. Elle n’est pas abandonnée au non-sens de la mort et du mal. Elle est accompagnée. Depuis Moïse, le petit peuple des croyants d’Israël porte cette espérance. Le Dieu d’Abraham, d’Isaac et de Jacob, l’aime et lui ouvre des passages, des chemins de vie. Avec Jésus, le Dieu de Moïse poursuit son œuvre d’alliance. Scellée en un pacte, celui du sang versé de Jésus, « l’alliance nouvelle » nous donne d’oser nous tenir avec confiance, devant notre Dieu, comme devant un Père. Avec Jésus, mort et ressuscité, et en Lui, s’est nouée une relation unique entre le ciel et la terre, entre Dieu et les hommes. En célébrant l’eucharistie, l’Eglise donne à chacun accès à cette relation de vie et d’amour.
En méditant et en célébrant ce mystère d’alliance ce soir, il nous est proposé de tendre simplement nos pieds au Seigneur Jésus pour qu’il les lave. Quelques-uns d’entre nous le ferons tout à l’heure au nom de tous. Etre disciple de Jésus, c’est cela d’abord : lui présenter nos pieds, et tout notre être pour qu’il le purifie. Avant de songer à ce que nous devons faire, il est bon de consentir à reconnaitre notre profonde incapacité à faire le bien par nous-mêmes. Au début de chaque eucharistie, n’est-ce pas ce même mouvement par lequel nous nous disposons à accueillir la vie, en nous reconnaissant pécheur… Nous nous présentons comme ayant besoin d’être sauvés. En ce soir d’avril 2019, avec toute l’Eglise, nous pouvons nous tenir là plus conscients de notre faiblesse. Nous tenir là avec les membres du Corps du Christ, nos frères qui ont gravement blessé, et leurs frères et soeurs plus vulnérables, et le corps ecclésial tout entier, discrédité dans la confiance qu’on lui porte. Avec toute l’Eglise, avec les personnes blessées et ceux qui ont blessé, mettant notre assurance dans la miséricorde du Christ, laissons-nous laver et régénérer… Et entrons ensemble dans une nouvelle attitude faite d’humilité, de vigilance, de respect et de vérité en tous nos rapports humains. Sauvés par le Christ, lavés et purifiés par lui, déjà nous pouvons nous mettre au service de nos frères. « Si moi, le Seigneur et le Maitre, je vous ai lavé les pieds, vous aussi, vous devez vous laver les pieds les uns des autres ». Ce service sera souvent caché. Il n’aime pas la publicité. Appelé à grandir en vérité et générosité, il ne connait pas de limitation. En ce domaine, comme en bien d’autres, à la suite de St Antoine le moine du désert, nous pouvons dire : « aujourd’hui, je commence ». Dans le don de nous-mêmes, pas possible de capitaliser pour se reposer sur ses acquis… Alors, aujourd’hui, comme le Christ et avec lui, je m’incline vers mes frères pour les servir. Avec Lui, je fais alors de ma vie un sacrifice nouveau. Avec Lui et en Lui, je deviens un maillon vivant de l’Alliance éternelle qui se noue entre Dieu et l’humanité.
RAMEAUX - 14.04.2019
Is 50, 4-7 ; Ph 2, 6-11 ; Lc 22,14 – 23,56
Homélie du Père Abbé Luc
Frères et sœurs,
Peut-être ressentez-vous comme moi une sorte d’appréhension au début de chaque semaine sainte, comme un mouvement de recul avant de faire un grand saut… A l’approche de la Passion et de la Résurrection de Jésus, ne sommes-nous pas devant quelque chose de grand et de décapant en même temps ? Le récit de la Passion que nous venons d’entendre met cela sous nos yeux de façon éloquente. En quelques pages, apparaissent et la grandeur du mystère de la personne de Jésus, et la misère de notre humanité dans sa façon de le recevoir. D’un côté une intense présence, de l’autre des êtres perdus ou aveugles. Jésus conduit sa vie comme une offrande « ceci est mon corps donné », et les disciples cherchent qui est le plus grand d’entre eux. Jésus combat contre l’angoisse à l’écoute de la volonté de son Père. Les disciples dorment, accablés de tristesse. Pierre nie connaitre Jésus, celui-ci par un regard le lui pardonne. Les chefs du Peuple cherchent comment faire périr Jésus ; Lui laisse transparaitre son identité de Fils de Dieu qui le condamne. Pilate renonce à ses convictions en livrant lâchement Jésus, lui le Roi des juifs sans armées ni prestige. Jésus invoque le pardon sur ses bourreaux ; les passants et les soldats l’injurient… L’obscurité se fait sur toute la terre ; Jésus, seul, remet son esprit entre les mains de son Père. Dans ce combat entre les ténèbres et la lumière, quelques voix s’élèvent timides comme des éclairs de vérité : les pleurs des femmes, la confiance du bon larron, l’étonnement admiratif du centurion, la compassion du juif Joseph.
Durant cette semaine sainte, laissons la lumière du mystère de Jésus venir éclairer les parts ombreuses de notre humanité qui se dérobent encore à l’œuvre de grâce… - 14avril 2019
Année C Sème Dimanche de Carême- 7 Avril 2019
Isaïe 43,16-21 ... Philippiens 3, 8 -14 ... Jean 8, 1-11
Homélie du Frère Antoine
Frères et Sœurs, cet Evg commence par une scène empreinte_de
paix où Jésus enseigne au temple, mais la paix ne va pas durer! un groupe surgit et présente
à Jésus une femme accusée d'adultère et là, tout bascule!
De la paix nous passons à la violence où paroles et silence vont s'affronter.
Paroles coléreuses, Paroles trompeuses, car dit le texte, leur but est de piéger Jésus.
Paroles accusatrices et redoutables leur projet est d'accuser Jésus de ne pas respecter
La Loi Mosaïque et leur objet est la mort, .... la mort d'une femme qui selon la loi mérite
un tel sort.
Paroles mensongères, desséchée par la sécheresse des lois, et qui dans ce microcosme
révèlent toute une face du monde, le monde de toujours .. le monde d'aujourd'hui.. !
En réponse à cette violence se dresse alors un mur.. un mur de silence .. un silence
immense ... le silence de Dieu .. le silence de l'amour ..... silence accompagné d'un signe
énigmatique, totalement silencieux lui aussi: Même aujourd'hui, nous ne savons pas ce que
Jésus a écrit sur le sol, mais ce geste alourdit le silence de Jésus, il est comme un refus de ce
Mal dont le masque a pris le visage d'une apparente justice.
« Que celui d'entre vous qui est sans péché, soit le premier à lui jeter une pierre »
Brusquement le silence change alors de camp ... et change de sens ...
«Ils s'en allèrent un par un,en commençant par les plus âgés » ....
Un par un ... ces hommes qui partent lentement, sans un mot, évoquent un défilé, ce
long défilé de notre humanité qui, générations après générations, est vaincue par cet ennemi
sournois, le péché ... le péché, cette infidélité à l'amour!
« Va, et désormais ne pèche plus! »
Ces paroles achèvent cette rencontre extraordinaire entre Jésus et la femme :
Dès son arrivée, elle est accusée, laissée debout, au centre, tandis que Jésus ... assis,
regarde le sol,. Les accusations reprenant, Jésus prend la parole et se baisse à nouveau sans
adresser-un- seul- regard à ceux qui lentement partent l'un après l'autre ... Jésus les ignore
totalement ...
Et c'est alors qu'il lève la tête et pour la première fois, la regarde ... il ne la jamais
regardée en position de faiblesse .. de condamnée plantée, muette, au milieu de ses juges.
C'est une fois la menace disparue qu'il la regarde.... Il la regarde du bas vers le haut et,
dans une attitude de serviteur, il lève les yeux, s'adresse à elle ... elle ... debout ... immobile ,
toute pénétrée de la miséricorde totale du Fils de Dieu ..... tout accueil du pardon reçu et de
la Vie retrouvée.
Aujourd'hui, le Seigneur vient nous dire à chacun:
Va, .. tout pardon accueilli engage à suivre la Loi véritable, la Loi d'amour.
Va ... tout pardon accueilli nous appelle à aimer à aimer un peu moins mal. - 7 avril 2019