Homélies
Liste des Homélies
année C,- 17ème dimanche du T.O. 28 juillet 2019
Gn 18,20-32 ; Col 2,12-14 ; Lc 11,1-13
Homélie du F.Bernard
L’Évangile que nous venons d’entendre est la suite de celui de dimanche dernier. C’était l’accueil de Jésus, par Marthe et Marie, dans leur maison. Peut-être ce récit est-il déjà comme l’entrée en matière de l’enseignement de Jésus sur la prière que nous donne l’Évangile de ce jour ?
Par ailleurs, comme d’habitude, l’Évangile du dimanche est à entendre en continuité avec la première lecture. Celle-ci rapportait l’intercession d’Abraham en faveur des villes maudites de Sodome et Gomorrhe. Ce récit lui-même continuait le récit de l’hospitalité d’Abraham, entendu dimanche dernier.
Abraham avait magnifiquement accueilli ses trois hôtes, puis les avait accompagnés sur leur route vers Sodome et Gomorrhe. Ils voulaient vérifier si la clameur montée jusqu’à eux correspondait bien à la conduite mauvaise de ces gens. Alors intervient Abraham. Il le fait au titre d’ami de Dieu, ayant reçu sa bénédiction pour lui et sa descendance. Il parle avec audace et insistance pour sauver les villes coupables. Il n’hésite pas à mettre en cause la justice de Dieu, le forçant en quelque sorte à libérer sa miséricorde.
« Pour cinquante justes, pour quarante-cinq, pour quarante, pour trente, pour vingt, pour dix justes, vas-tu détruire la ville ?-- Non, je ne détruirai pas » , dit Dieu. Mais Abraham n’ose aller plus loin, et les villes maudites ne vont pas échapper à leur destin.
La révélation de la miséricorde en Dieu va s’amplifier au cours des siècles. Au temps de Jérémie, le Seigneur dira : « Parcourez les rues de Jérusalem. Si vous découvrez un homme qui pratique le droit et recherche la vérité, je pardonnerai à cette ville. » (Jér 5,1). Mais le constat est clair et définitif : « Il n’est pas de juste, pas un seul, pas un qui cherche Dieu. » (Ps 14 et 53)
Alors l’humanité crée par Dieu est-elle condamnée sans appel ? Non, car Dieu a décidé d’envoyer son propre Fils. La lettre aux Colossiens, entendue à l’instant, le disait : « Dieu nous a donné la vie avec le Christ. Il nous a pardonné tous nos péchés. Il a supprimé le billet de la dette qui nous accablait. Il l’a annulé en le clouant à la croix du Christ.» (Col 2,13-14)
Mais revenons à l’Évangile. Nous connaissons l’enseignement de Jésus sur la prière, dans l’Évangile de Matthieu. C’est la prière du Notre Père, insérée très exactement au centre du Sermon sur la montagne. Nous connaissons un peu moins bien cette même prière, un peu différente dans sa forme, qui nous est rapportée dans l’Évangile de Luc. Le contexte est différent. Jésus est surpris en activité de prière. C’est alors que ses disciples lui demandent de leur enseigner à prier. Alors Jésus livre en quelque sorte sa prière à chaud : « Père, que ton Nom soit sanctifié, que ton règne vienne. »
Puis Jésus associe ses disciples. Sa prière devient commune à lui et à eux. C’est la prière du Christ Total, prière de la Tête et des membres, la Tête le Christ, les membres nous- mêmes. Ce sont toutes les formulations en nous qui suivent : « Donne-nous…Pardonne-nous…Nous pardonnons…Ne nous soumets pas à la tentation… »
Qui est-ce nous ? Nous-mêmes, nos proches, les disciples, la communauté, l’Église. Mais est-ce que tout est dit alors dans cette prière ? Oui sans doute, mais à condition que soit réellement pris en compte l’autre, les autres, tous les autres, le monde entier. Et c’est pourquoi à la prière au Père Jésus ajoute la parabole de l’ami importun. Abraham avait intercédé pour les villes pécheresses, qui lui étaient étrangères. Il l’avait fait à la limite du possible. L’ami importun, dans l’Évangile, réveille son ami en pleine nuit, non pour lui-même ou ses enfants, mais pour un hôte qu’il a dû recevoir à l’improviste.
« Demandez et vous recevrez. Cherchez et vous trouverez. Frappez et il vous sera ouvert. » Remarquons qu’il n’est pas dit que le Seigneur donne ce que nous lui demandons, mais il donne le meilleur, l’Esprit saint, il nous communique sa vie intime, cet amour répandu en nos cœurs par l’Esprit saint qi nous a été donné.
Dieu nous traite en vrais partenaires de son alliance. Il compte sur nous pour sauver le monde. Jésus est le Sauveur, mais la prière des chrétiens est nécessaire pour que le monde soit sauvé. La tâche chrétienne est de frapper avec persévérance, de « prier sans se lasser » (Lc 18,1), afin d’ouvrir le cœur de Dieu, de libérer sa miséricorde.
Tel est l’enseignement que nous devons sans doute retenir de cet Évangile.
DEDICACE DE NOTRE EGLISE - 25 juillet 2019
1R 8, 23-22, 27-30 ; 1P 2, 4-9 ; Mt 16, 13-19
Homélie du Père Abbé Luc
Frères et sœurs,
Lorsque nous avons fini les travaux de rénovation de l’église, au mois de mai, nous avons fait une prière avec les entreprises qui ont travaillé là (les maçons, peintres, électriciens, menuisiers, les poseurs de moquettes, etc…). Je leur disais que pour nous, l’église était notre atelier, le lieu où nous passons le plus de temps ensemble, environ 4 à 5 heures par jour, depuis les vigiles jusqu’aux complies en passant par l’eucharistie. Là, nous vivons notre premier travail, notre première mission, celle de la prière. Parler d’atelier, ou de travail en parlant de l’église ou de la prière, n’est-ce pas un peu réducteur et dévalorisant ? En fait, l’image de l’atelier nous est suggérée dans la règle par Benoit lui-même lorsqu’il parle du cloitre comme de l’atelier pour exercer les instruments de la vie spirituelle, et de la prière des heures comme « l’opus Dei », l’œuvre de Dieu. « Opus », ce mot a une connotation artisanale, voire artistique. Le travail de la prière peut-être ainsi assimilée à une œuvre d’art. « Opus Dei », l’expression peut s’entendre comme l’œuvre faite pour Dieu, nous travaillons pour lui, mais aussi comme l’oeuvre faite par Dieu, c’est lui qui travaille. Cette ambiguïté de l’expression est suggestive. Elle nous rappelle qu’au cœur de la prière se vit une synergie, une collaboration incessante entre Dieu et l’homme. Nous travaillons pour Dieu, et Dieu travaille pour nous. La prière nous demande un vrai effort, un engagement personnel et communautaire, et en même temps, elle est un don reçu de Dieu qui agit dans les cœurs. Nous faisons des choses, nous chantons, nous accomplissons des rites, et au même moment Dieu nous enseigne par sa Parole, Il nous façonne par son Esprit.
Dans cet atelier qu’est l’église, le Christ bâtit son Eglise en la petite cellule que nous constituons. Lui la Pierre choisie et précieuse devant Dieu, nous fait entrer dans la construction dont il est le fondement, la pierre angulaire. Sous la motion de son Esprit, nous devenons pierre vivante, sacerdoce royal pour rendre à Dieu, par toute notre vie, un culte qui lui plaise. Ces mots peuvent paraitre trop forts au regard de notre quotidien souvent bien terne, voire monotone, et où la prière n’est pas toujours facile. Et cependant, quelque chose ne s’accomplit-il pas ? Si nous faisons l’expérience de notre médiocrité, et nos insuffisances, nous pouvons être assurés que le Seigneur, Lui, est toujours à l’œuvre. Il n’a pas d’autre désir que nous puissions être pour lui, chacun et tous ensemble, une « offrande agréable à Dieu », une « offrande pure », comme nous le prierons au moment de l’offertoire et dans la prière eucharistique. Par son Esprit, il n’a de cesse de faire de nous son peuple, un peuple uni dans l’amour et dans l’élan de le servir. Et nous-mêmes, n’en faisons-nous pas l’expérience peu à peu… lorsque une parole nous apporte de la lumière, du réconfort, lorsqu’un verset de psaume nous aide à ne pas entretenir de rancœur contre un frère, lorsque le geste de l’inclination nous remet dans une conscience vive de notre petitesse devant Dieu et plus heureux de le servir, lorsqu’au baiser de paix nous nous réconcilions avec un frère, lorsque j’apprends à supporter avec patience l’imperfection du chant ou les erreurs de mes frères, lorsque j’entre dans une connaissance plus vivante du Christ… N’est-ce pas ainsi qu’au cœur du travail de la prière, nous sommes travaillés par Dieu, taillés comme des pierres, ciselés pour vivre l’attention à Dieu et aux autres avec plus de finesse ? Oui, sous les voûtes de cette église, des choses se passent et des paroles sont entendues, Dieu est à l’œuvre. Il ne nous demande pas des choses extraordinaires, sinon d’être là, fidèles par notre présence aux offices, donnés dans le chant. Lui le toujours présent, toujours avec nous, nous convoque chacun et tous ensemble à être présent à son Amour à l’œuvre instant après instant. Chacun de nos offices, chacune de nos eucharisties, voudrait célébrer ce travail, cette « œuvre de Dieu » au cœur de sa création et des créatures que nous sommes.
En ce jour de consécration de notre église, de notre atelier, rendons grâce d’être ainsi associés à l’« oeuvre de Dieu », d’en être des instruments privilégiés, premiers émerveillés du travail qui se fait là. - 25 juillet 2019
(Année C) - HOMELIE du 16ème dimanche du TO : 21/07/2019
(Genèse 18,1-10 ; Col. 1, 24-28 ; Luc 10,38-42)
Homélie du F.Guillaume
Frères et sœurs
La liturgie de ce dimanche nous fait donc assister à 2 scènes d’hospitalité de Dieu par des hommes et des femmes dans le cadre de leur vie domestique. A travers ces modèles d’accueil, l’Eglise nous invite à penser et à nous interroger sur nos propres manières d’envisager le passage de Dieu dans nos vies ordinaires.
Dans la 1ère lecture, avec Abraham, il nous est possible de repérer 2 moments correspondants à 2 attitudes que l’on retrouvera dans l’Evangile de Marthe et Marie. Un premier moment serait celui de l’action, de l’affairement, voire d’une certaine agitation pour tout ce qu’il y a lieu de faire et de bien faire dans cet accueil. Le second moment est celui de l’écoute d’une Parole, la Parole de Dieu apportée par les visiteurs à Abraham.
Au début du texte, Abraham est assis, au pied du chêne de Mambré, à l’entrée de sa tente. Il aperçoit 3 hommes qui se tiennent debout, à une certaine distance et pourtant près de lui. Aussitôt, il se lève, il court à leur rencontre, il se prosterne devant eux et il déroule toute une check-liste de choses à faire, en la proposant à ses visiteurs arrivés à l’improviste. « Ne passez pas sans vous arrêter, je vais vous apporter de l’eau pour vous laver les pieds, vous allez vous étendre et vous asseoir sous l’arbre. Je vais chercher de quoi manger ; alors, vous allez retrouver des forces et vous pourrez aller plus loin ».
En réponse, la première parole des visiteurs est brève et claire : « fais comme tu l’as dit ». Alors Abraham fait comme notre Marthe de l’Evangile, à la différence près qu’il peut se faire aider de son entourage et le tout prestement. Il se hâte auprès de Sara, restée sous la tente, pour la cuisine, il court au troupeau et donne l’ordre à un serviteur de préparer vite un veau gras et tendre. Il ne s’agit pas de faire attendre les hôtes. Il prend aussi du fromage blanc et du lait, et quand tout est prêt, Abraham dispose le repas et il s’arrête de courir et de stresser. Il se tient debout maintenant, alors que ses hôtes sont étendus ou assis au pied du chêne. Renversement des positions, par rapport à la situation de départ. Abraham se tait. Il écoute. A la manière de Marie aux pieds de Jésus, mais debout, il écoute la Parole que Dieu lui adresse et qui sort de la bouche de l’Ange du Seigneur. Une parole inouïe, une parole de promesse, déjouant tout ce qui est naturellement concevable et raisonnable. Sarah, sa femme, dans son grand âge va donner naissance à un fils. Cela aura lieu dans un an, et les visiteurs reviendront pour l’évènement.
C’est une parole incroyable, invraisemblable : il y a de quoi en rire, et Sara, qui a tout écouté à la porte de la tente, ne s’en prive pas. D’ailleurs, le nom de l’enfant, Isaac, sera celui de ce rire. Abraham, lui, n’a pas ri, il a cru. Il a espéré contre toute espérance et sa foi, son fol espoir lui ont été compté comme justice. Il va devenir, avec la paternité d’Isaac, le père d’une multitude de croyants. Et Jésus se reconnaîtra comme fils d’Abraham, de la même race, fils de la même promesse. Et nous, chrétiens, baptisés en Jésus-Christ et appelés à être ses disciples, nous appartenons nous aussi à cette descendance. Nous nous souvenons de l’amour de Dieu, de la promesse faite à nos pères en faveur d’Abraham et de sa race, à jamais.
Abraham, dans son devoir d’hospitalité, pensait d’abord à restaurer les forces de ses visiteurs, afin de leur permettre d’aller plus loin, dit le texte. Mais en fait, par le retournement des positions, c’est bien Abraham qui une nouvelle fois est appelé par Dieu à aller plus loin, sur le chemin de l’Alliance. En découvrant qui il est pour Dieu, sa véritable identité, et en y acquiesçant, il se voit justifié par sa foi plutôt que par ses œuvres ou par tout ce qu’il pourrait faire pour plaire à Dieu.
C’est bien la même leçon que nous devons tirer de l’évangile de Marthe et Marie, dans leur maison de Béthanie. Entre le vouloir faire et bien faire pour son Maître de Marthe, et le désir de Marie de se laisser être disciple, à l’écoute du même Maître, Jésus indique une priorité de l’être sur le faire. Il ne s’agit pas d’opposer les 2 attitudes de façons caricaturale : l’une étant celle de l’activisme et l’autre celle de la nonchalance, mais il faut y discerner les 2 temps qui doivent accompagner toute vraie rencontre, tout véritable accueil et tout échange en vérité.
Trop souvent, dans nos regards et nos appréciations des autres, nous nous arrêtons à ce qu’ils ont fait, ou à ce qu’ils font ou seraient capables de faire. Jésus nous apprend à aimer les autres pour ce qu’ils sont. Il s’intéresse à l’être que je suis. Nos vies ne se réduisent pas à nos actions, bonnes ou mauvaises. Plusieurs visiteurs de prisonniers nous ont dit qu’ils ne demandaient jamais à un détenu la raison pour laquelle il était en prison, ce qu’il avait fait. Ils s’attachent à regarder la personne en face d’eux dans son mystère d’humanité et de fragilité. Ils sont d’abord et avant tout à l’écoute d’un être en souffrance et en attente de liberté intérieure. Alors, comme l’Esprit le voudra, une Parole inouïe peut retentir dans des cœurs souvent très endurcis, entourés de barreaux plus forts que ceux de leur cachot.
Frères et sœurs, que ces 2 très beaux textes de la liturgie d’aujourd’hui nous aident à renouveler notre comportement dans l’accueil de Dieu dans nos vies. Et à reconnaître la présence du Christ dans toute rencontre humaine et personnelle. Comme le dit Saint Paul dans la seconde lecture : Christ est parmi nous, lui, l’espérance de la Gloire de Dieu. Il se fait connaître, dans son mystère à toutes les nations on pourrait dire, à toutes les rencontres.. L’annonce de l’Evangile et la célébration de l’Alliance sont à vivre aujourd’hui, dès cette eucharistie : écoutons ce que dit un autre ange dans le livre de l’Apocalypse :
« voici que je me tiens à la porte et je frappe. Si quelqu’un entend ma voix et ouvre la porte, j’entrerai chez lui et je viendrai prendre le repas avec lui et lui avec moi ».
AMEN
Année C - 15ème dimanche ordinaire - Le 14 juillet 2019
Dt 30, 10-14 ; Col 1, 15-20 ; Lc 10, 25-37 ;
Homélie de F.Damase -
La première lecture que nous avons entendue était tirée du livre du Deutéronome. Et le message que nous avons entendu était une merveilleuse introduction à l'enseignement de l'Évangile. Ce texte nous disait que la Loi de Dieu ne peut pas être réduite à une série de règles, mais est une loi d'amour, écrite sur nos cœurs. Si nous écoutons cette loi d'amour que Dieu a écrite sur nos cœurs, tous les préceptes de l'Évangile ou de l'Église prendront leur vrai sens. Si nous ne le faisons pas, ils deviendront un amoncellement de textes mortifères.
Le récit très vivant, tiré de l'Évangile de Luc, que nous venons d’écouter commençait par une importante question posée à Jésus par un docteur de la Loi. C'était une très bonne question, personnelle et pratique. En effet, il n'a pas dit de façon abstraite : "Quel est le plus grand commandement ?" mais bien : "Que dois-je faire ?" Jésus lui dit : "Tu es un docteur de la Loi ; tu dois savoir cela. Que lis-tu dans ta Loi ?" Et l'homme donne alors la bonne réponse : "Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme, de toute ta force, de tout ton esprit, et ton prochain comme toi-même." Très bien ! dit Jésus ! Fais cela et tu auras la vie éternelle. Le docteur trouve que le dialogue s'est terminé un peu trop brusquement et il pose une autre question : "Mais alors... qui est mon prochain ?"
À cette deuxième question, Jésus va répondre par une parabole. Et il est important de se souvenir que toute la parabole qui va suivre est une réponse à cette question : "qui est mon prochain ?"; car, lorsqu'il aura fini de raconter la parabole Jésus reviendra précisément à cette question : "Qui, d'après toi, a été le prochain de l'homme tombé sous les coups des brigands?" Par cette question Jésus obligera le docteur à s'identifier avec l'homme tombé dans le fossé, sous les coups des brigands. Il ne peut que répondre : "Son prochain a été celui qui lui a manifesté de la compassion". Si nous gardons cela présent à l'esprit nous nous rendrons compte que lorsque Jésus dit : "Va et fait de même", le sens immédiat n'est pas "Va et sois toi aussi un bon samaritain" mais bien plutôt : "Comme l'homme tombé sous les coups des brigands, accepte, toi aussi, que même un Samaritain soit ton prochain".
Jésus nous demande de transcender – par l'amour – toutes les divisions que nous établissons entre nous. Transposée dans le monde d'aujourd'hui, la division entre Samaritains et Juifs serait la division entre les pauvres et les riches, entre les pays sous-développés et les pays développés, entre Noirs et Blancs, entre Etrangers et Européens, entre conservateurs et progressistes, entre résidents illégaux et Citoyens, etc. etc.
Pour nous, celui qui est de l'autre côté est en général celui qui a tort. Jésus nous invite à reconnaître la présence de la compassion dans une telle personne et à accepter d'être aidée par elle.
Le prêtre et le lévite, dans cette parabole, sont chez eux, à domicile. Ils ont donc beaucoup à faire. Ils n'ont pas le temps d'aider. Ils ont aussi tout ce qu'il leur faut. Ils se suffisent à eux-mêmes et ne reconnaissent pas leur prochain.
Mais le Samaritain est en voyage. Il est en dehors de son environnement normal. Il est venu sur une terre étrangère cherchant quelque chose. Le chemin de Jérusalem à Jéricho était très dangereux, spécialement pour un Samaritain. C'était une personne connaissant le mépris, le danger, la peur, mais il avait un cœur de pauvre. Il pouvait donc s'ouvrir à la compassion.
Si nous transposons tout cela dans le monde d'aujourd'hui, quelle est la personne tombée dans le fossé, sous le coup des brigands ? C'est celle qui a quitté Jérusalem pour descendre à Jéricho : celle qui a quitté la sécurité de la ville sainte, avec son confort et ses certitudes, pour chercher autre chose, dans la direction de l'inconnu, comme Abraham. C'est, par exemple, la personne qui cherche d'autres modèles de vie sociale, politique, économique ou religieuse. C'est la personne qui a quitté le système ou a été expulsée par le système. Ayant quitté les sentiers battus foulés par les foules, une telle personne est vulnérable, plus exposée qu'une autre à commettre des erreurs, même de graves erreurs. Elle peut facilement se retrouver dans le caniveau – ce qui peut d'ailleurs être son salut. On retrouve de telles personnes partout, spécialement dans les prisons ou dans les bidonvilles. Où qu'elles soient, elles seront facilement ignorées des lévites et des prêtres, sauf pour recevoir d'eux des leçons de bonne conduite. Espérons qu'elles rencontrent un jour un Samaritain.
Le Samaritain du monde d'aujourd'hui est la personne qui a abandonné la sécurité et le confort de son petit monde et qui veut apprendre des autres de nouvelles façons de penser et de vivre. Étant lui-même dans une situation constante d'insécurité – choisie ou en tout cas acceptée – il peut avoir de la compassion pour qui est tombé. Ce n'est que si nous entreprenons un tel cheminement, comme le Christ l'a fait, que nous serons capables d'aider nos frères et nos sœurs, non pas dans le but d'observer une loi, ou pour gagner des mérites dans le ciel ou pour le plaisir qu'on éprouve à être bon et généreux, mais tout simplement parce que nous serons "mus de compassion".
Comme conclusion pratique : il serait trop facile de prendre la résolution d'être de bons samaritains envers les personnes qui nous entourent. Écoutons plutôt la première leçon de la parabole de Jésus. Acceptons l'évidence que tous nous sommes, de façons diverses, tombés dans le fossé. Notre premier défi est d'accepter que notre prochain, celui qui nous aidera, puisse être celui ou celle que nous avons tendance à considérer comme indigne, comme méprisable.
Souvenez-vous du film – Les Intouchables – sur Philippe Pozzo di Borgo . Un homme « à l’aise », un « grand bourgeois » devenu tétraplégique qui accepte l’aide d’un immigré, d’un sans papier. Et cet immigré redonne au « grand bourgeois – tétraplégique » le goût de se battre pour vivre !! Ce « déchet de la société, cet Intouchable » voilà le « bon samaritain » dont Jésus nous demande d’accepter l’entrée dans notre vie pour notre salut !
11 Juillet 2019 - SAINT BENOIT
(Pr 2, 1-9 ; Col 3, 12-17 ; Mt 5, 1-12a)
Homélie du P.Abbé Luc
Frères et sœurs,
« Heureux »…. ce mot vient de résonner 8 x dans nos oreilles. Nous pouvons y entendre le désir de Jésus que nous soyons des hommes et des femmes heureux, heureux d’un bonheur qui ne finira pas, heureux d’un bonheur qui, comme nous l’entendions hier soir, n’a pas sa source sur cette terre…Car il est pur cadeau de Dieu, partage de sa vie et de sa gloire en surabondance. Ce cadeau peut-il être autre chose que le bonheur de Jésus lui-même ? Aussi est-il bon de laisser ce mot, comme une promesse, habiter notre cœur, alors que la tristesse, le découragement, l’angoisse peut-être y rôdent. En nous laissant ce mot, Jésus ne nous fait pas inutilement rêver. Mais il nous entraine sur le chemin de son propre bonheur, chemin qu’il vient tracer au cœur de notre histoire humaine troublée. Lui seul peut dire en vérité « heureux ceux qui pleurent, ceux qui sont persécutés… » lui qui connaitra la douleur de l’échec, de la trahison et la croix. De lui seul, nous pouvons apprendre le bonheur des doux, des miséricordieux, des pauvres de cœur…, lui qui a su se faire si proche de tous, avec empressement et compassion. Avec Jésus, le bonheur du ciel a déjà pris figure humaine. Le regarder vivre, l’écouter, le suivre de près, c’est assurément prendre le chemin du bonheur afin qu’à notre tour il nous transfigure. A la suite de Jésus, nos vies pourront alors laisser entrevoir ce bonheur à venir.
N’est-ce pas ce que St Paul disait aux Colossiens ? « Puisque vous avez été choisis par Dieu, que vous avez été sanctifiés, aimés par lui, revêtez-vous de tendresse et de compassion, de bonté, d’humilité, de douceur et de patience »… Depuis notre baptême, depuis ce cadeau qui nous a été fait d’être choisis, sanctifiés et aimés, un vêtement est à notre disposition. C’est le vêtement du Christ Lui-même, le vêtement de la créature nouvelle… vêtement de tendresse, de compassion, de bonté, d’humilité, de douceur, de patience… Ce vêtement n’a pas été tissé par nos mains, mais par celles du Christ clouées sur la Croix. Comme baptisé, il nous revient de le revêtir en nous unissant toujours davantage au Christ… « Tout ce que vous faites, tout ce que vous dites, que ce soit toujours au nom du Seigneur Jésus ». De lui seul Jésus, nous pouvons apprendre à être à l’aise dans ce vêtement, en pardonnant comme il nous a pardonné, en laissant régner la paix entre nous. Car ce vêtement, le gage sur cette terre du bonheur du ciel, est inséparablement vêtement de chacun et vêtement du corps tout entier de la communauté. C’est ensemble que nous revêtons la tunique du Christ, le Christ lui-même.
N’est-ce pas cela aussi que nous enseigne St Benoit ? Au terme, de sa règle, il nous dit « ils ne préfèreront absolument rien au Christ. Qu’il nous fasse parvenir tous ensemble à la vie éternelle » (RB 72, 11-12). Petite cellule du corps de l’Eglise, notre communauté monastique apprend jour après jour à revêtir le vêtement du Christ…vêtement si délicat qu’il requiert de notre part à tous et à chacun, une délicatesse et un soin sans cesse à reprendre. Car nous sommes chacun et tous ensemble comme ces personnes qui ont un bras cassé et une jambe handicapée, et qui doivent enfiler une chemise et un pantalon…. Là où le bras voudrait aller trop vite pour s’habiller, il doit se souvenir que sa jambe a mal aussi. Cela prend du temps, cela demande de la patience, de l’humour, de l’ingéniosité…. Dans nos derniers échanges, nous nous demandions comme mieux vivre la correction et l’entraide fraternelle ? Un vrai défi tant nous sommes différents, marqués par nos tempéraments et par nos histoires. « Instruisez-vous, reprenez-vous les uns les autres nous dit Paul ; « obéissez-vous à l’envie, ne cherchez pas votre intérêt » nous dit St Benoit… C’est un travail permanent d’attention et de vigilance. Travail éprouvant certains jours, travail aussi qui trouve sa force et sa lumière dans le regard commun tourné vers le Seigneur. Tous ensembles, nous le chantons et le louons comme notre Père et notre Seigneur. Tous ensembles nous recevons déjà les prémices de ce bonheur qu’il nous promet… comme le vivons maintenant en cette eucharistie.
11 juillet 2019
année C - 14e dimanche, 7 Juillet 2019
Isaïe 66, 10-14 - Gal. 6,14-18 - Luc 10, 1-20
Homélie du F.Ghislain
Les lectures que nous avons faites nous annoncent la paix et l'avènement du Règne de Dieu. Puisqu’elles nous sont faites aujourd’hui, c’est qu’elles nous concernent. Comment cela ? Que pouvons-nous donc faire de telles annonces aujourd'hui? Il semble bien que, au lieu de la paix, nous avons la violence.
Tout, en réalité, nous parle de violence. La violence des guerres, dont l'une ne cesse que pour laisser la place à une autre, avec tout ce que cela entraîne de morts d'hommes et de déplacements de populations. La violence économique, qui engendre le chômage, l'exclusion, l'insécurité des banlieues, l'effritement des classes moyennes au profit de grandes richesses et d'extrêmes pauvretés, les migrations. Il y a la violence qu'on pourrait dire interpersonnelle, que nous rencontrons autour de nous, voire dans nos familles, où, pour des questions d'argent, d'intérêt, d'opinion, les gens ne s'entendent pas, se font des mauvais coups ou, au mieux, ne se parlent plus. Et je ne parle pas de la corruption, violence à la fois financière et morale...
Au delà même de telle ou telle violence particulière, c'est plus profondément le climat de violence est comme notre environnement mental, l'image de la violence qui nous habite. Nous ne sommes pas dans le monde de paix, de consolation et de réconciliation dont nous parle le prophète dans la première lecture.
Nous ne sommes plus non plus dans le climat d'hospitalité du monde d'autrefois dont nous parle l’évangile, où n'importe qui pouvait entrer dans une maison, sachant qu'il y serait reçu, qu'on lui donnerait le vivre, le couvert et le lit sans lui poser de questions, car il est normal que l'homme reçoive l'homme. Nous-mêmes avons peur du routard, du clochard, du voyou, et si l'inconnu qui frappe à notre porte est un homme bien mis, cela ne nous rassure pas davantage. Nous n'aimons pas prendre les gens en auto-stop; pourtant, à réfléchir honnêtement, c'est tout de même curieux: j'ai une place vide dans ma voiture, il est sur le bord de la route et nous allons dans la même direction; cependant, je le laisse, parce que c'est gênant de s'arrêter, mais surtout parce que j'ai peur de l'étranger qui fait signe; et, s'il y avait un accident, est-ce que l'assurance paierait?
Où donc trouver la paix et le Royaume de Dieu? Que signifie cette annonce qui en est faite périodiquement dans la liturgie, depuis deux mille ans que le Christ l'a faite?
Je n'ai pas tellement de réponse à cette question que je pose. Cependant il y a une phrase de l'évangile que nous venons d'entendre qui est bien révélatrice: "Allez. Je vous envoie comme des agneaux au milieu des loups". Nous avons bien réalisé: "des agneaux" et "au milieu des loups". Et Jésus de préciser concrètement sa pensée: il faut partir sans ces défenses élémentaires que sont l'argent, les bagages, les protections. Il n'est pas dit que la violence disparaîtra dès maintenant, il ne nous est pas proposé de nous en défendre, de nous situer à leur niveau. Mais il nous est demandé de vivre autrement, - ce que saint François avait bien compris dans son cantique: là où il y a la guerre, que nous mettions la paix. Et comment le pouvons-nous? De nouveau, un mot de l’évangile peut nous éclairer : quand le missionnaire de l’évangile entre dans une maison, il doit souhaiter la paix, shalom, et, dit le texte, « s’il y a un ami de la paix, votre paix reposera sur lui ». Ami de la paix ? Le texte original est plus fort, il parle de « fils de la paix ». Quelqu’un qui est pour ainsi dire « engendré par la paix ».
A ce point, j’aimerais vous faire une suggestion : le matin, au lever, avant de faire autre chose, faisons un exercice de paix. Laissons-nous engendrer par la paix, ce qui peut vouloir dire trois choses : intériorité, vigilance, pardon. Intériorité : nous emportons la protection de Dieu, sa direction, et nous marchons accompagnés par le Christ, l'Agneau de Dieu. La sécurité, on la reçoit de Dieu dans son coeur. Ailleurs saint Luc dit que le Royaume de Dieu est au dedans de nous. Et saint Jean, en commentaire de la lecture d'Isaïe, rapporte la parole de Jésus: "Je ne vous donne la paix, pas comme le monde la donne". Rejoindre dès le matin la paix de Dieu. Puis, vigilance : nous n'avons pas à condamner les gens car, en définitive, nous ne sommes pas meilleurs qu'eux et nous luttons, plus ou moins victorieusement contre les petites violences et les petites corruptions qui sont à notre portée, puisque les circonstances ne nous ont pas donné l'occasion d'en avoir de grandes. Il faut donc porter la lutte dans notre secteur et ne pas reproduire en petit ce que d’autres font en grand. Enfin et surtout peut-être, pardon. Ce qui peut se traduire ainsi : laisser les gens être ce qu’ils sont, car ils ont eux aussi leur fardeau à porter. A ce prix, nous trouverons à l'intérieur de nous-mêmes des semences de paix, qui nous mettent personnellement dans la tranquillité et la liberté et nous feront, sans que nous le sachions peut-être, être des instruments de paix par qui le Royaume arrive.
Année C - 13e dimanche TEMPS ORDINAIRE - (30/06/2019)
(1R 19, 16b.1+9-21 – Ps 15 – Ga 5 , 1.13-18 – Lc 9, 51–62)
Homélie du F.Jean-Louis
Frères et sœurs,
vous n’avez sans doute pas eu de mal à mettre en relation la première lecture de ce dimanche et l’évangile.
L’appel d’Elisée par Elie pour lui succéder comme prophète, l’hésitation d’Elisée qui demande à aller embrasser ses parents avant de suivre Elie sont bien en écho avec les appels du Christ à le suivre et les hésitations qu’il rencontre.
L’appel de Dieu n’est pas si simple à accueillir. Il intervient dans une vie, nos vies, déjà bien occupées à des choses d’ailleurs pas mauvaises en soi.
Si Elisée voulait nourrir les siens, il était nécessaire qu’il laboure et honorer ses parents, y compris lorsqu’ils sont défunts est un des commandements essentiels de la Loi d’Israël.
Mais voilà, l’appel de Dieu par l’intermédiaire d’un prophète dans la première lecture, celui du Christ dans l’évangile, ont une vraie radicalité et cela peut nous effrayer.
Nous pourrions, nous rassurer en nous disant, si on est laïc : « Ce n’est pas pour moi, c’est pour les prêtres, les religieux et les religieuses. » Ce sont eux qui sont appelés à être prophètes, eux et elles qui ont été appelés par le Christ à tout donner pour le suivre sans regarder en arrière.
Et si on est religieux, moines, prêtres, on peut se dire qu’on a déjà répondu et qu’il n’y a pas à aller plus loin. On est censé avoir déjà tout donné.
Et du coup, il n’y a plus qu’à passer à l’Eucharistie, les lectures n’ont plus grand-chose à nous dire. Ah si, il y a encore l’épître de saint Paul aux Galates. Elle parle de liberté, d’aimer son prochain comme soi-même, de tendances de la chair qui s’opposent à l’esprit et réciproquement et cet affrontement nous empêche de faire tout ce que nous voudrions. Mais alors, nous ne sommes pas libres ?
Qu’est-ce que ces lectures peuvent nous dire aujourd’hui, dans nos vies ?
Il me semble que, pour tirer profit de ces lectures, il faut revenir aux fondements de l’appel de Dieu. Comme l’a dit le Concile Vatican II : l’appel universel à la sainteté. Appel et appel universel, pas que les chrétiens, pas que les religieux, mais tous et toutes, êtres humains, nous sommes appelés à la sainteté. Suivre le Christ, c’est cela.
Et les lectures nous mettent devant les exigences de cet appel. Elisée souhaite, à bon droit, saluer ses parents avant de suivre Elie et ce dernier le renvoie. Du coup, Elisée comprend et sacrifie son outil de travail, si j’ose dire, pour partir sans retour en arrière. Il a tout donné.
Suivre le Christ, c’est accepter aussi de ne plus regarder en arrière, c’est accepter de proclamer le règne de Dieu et nous savons combien cette proclamation brûlait le cœur du Christ. C’est aussi accepter de ne pas savoir de quoi l’avenir sera fait, ne pas savoir où reposer la tête.
Tout cela peut sembler inconfortable et c’est vrai. Suivre le Christ vers le Royaume, vers la sainteté, c’est aujourd’hui que cela commence et, quel que soit notre état de vie, nous ne savons pas où cela va nous mener.
Cet appel à la sainteté, saint Paul l’équivaut à l’appel à la liberté, mais à une liberté qui ne consiste pas à faire ce qu’on a envie, ce qui risque de tourner à l’égoïsme, mais à nous mettre au service les uns des autres, à aimer notre prochain comme nous-mêmes. Ce n’est sans doute pas la conception de la liberté qui prévaut aujourd’hui.
Ce n’est pas simple. Ce n’est pas un beau discours. Si nous acceptions de nous donner un peu de temps pour relire ce que nous vivons chaque jour, nous aurions vite fait de voir qu’il y a du travail, qu’on n’a jamais fini.
Mais concrètement, comment faire ?
Peut-être que le psaume chanté tout à l’heure, qu’on écoute parfois trop distraitement peut nous aider.
« J’ai fait de toi mon refuge » dit l’auteur du psaume à Dieu.
« De toi dépend mon sort ».
« Je bénis le Seigneur qui me conseille, même la nuit mon cœur m’avertit . »
« Je garde le Seigneur devant moi sans relâche »
« Je n’ai pas d’autre bonheur que toi »
« Tu m’apprends le chemin de la vie ».
Sans doute que la plupart d’entre nous se reconnaît comme disciple du Christ mais ce psaume nous invite à mettre en œuvre ce que nous proclamons. Etre disciple du Christ, c’est entrer dans une relation d’amitié qui, comme toute les relations d’amitié authentiques, se rappelle ou devrait se rappeler constamment à nous. Cela peut paraître inatteignable, mais avons-nous vraiment essayé de donner du temps à cette relation pour garder le Seigneur devant nous sans relâche ? Savons-nous renoncer à l’une ou l’autre distraction pour nous mettre devant le Seigneur ? A l’écoute de sa Parole ? C’est en lisant l’Ecriture Sainte que nous pourrons l’entendre.
A nous de mettre nos priorités en œuvre. Il ne s’agit bien sûr pas de délaisser nos proches ou notre vie professionnelle. Mais acceptons-nous de nos poser de temps à autres ? C’est sans doute exigeant mais c’est cela qui peut nous sortir de cette impression usante à la longue de dépenser toutes nos énergies en vain, pour ce qui ne nous satisfait pas pleinement.
Ne pas regarder en arrière, faire de Dieu son refuge, se tourner vers les autres, garder le Seigneur devant soi sans relâche, se mettre à l’écoute de la Parole de Dieu, du Christ…
Tout cela est-il vraiment hors de portée ? La liberté offerte par le Christ n’est peut-être pas si difficile à accueillir…
Frères et sœurs, je n’ai rien dit d’extraordinaire dans cette homélie. Tout y est assez évident. Ce qui est moins évident, c’est de le mettre en œuvre, c’est vrai pour moi comme pour chacun de nous, je pense.
Le pape François insiste beaucoup sur le fait que nous sommes en chemin. La sainteté est un chemin non pas réservé à une élite mais, comme l’a dit aussi le pape François, c’est la sainteté des gens ordinaires. Ne sommes-nous pas, la plupart d’entre nous, des gens ordinaires ? Mettons-nous en route. Nous avons reçu l’Esprit Saint ; si nous l’écoutons, il nous offrira les intuitions nécessaires. A nous de faire silence en nous-mêmes pour les entendre.
AMEN
Année C -SACRE COEUR - 28 Juin 2019
Ez 34,11-16; Rm 5, 5b-11 ; Lc 15, 3-7
Homélie du Père Abbé Luc
Frères et sœurs,
Dans un regard illuminé par la foi, l’Eglise nous invite aujourd’hui à regarder un cœur humain ouvert, blessé par une lance pour y contempler le cœur de Dieu. Passer du regard d’une réalité humaine à la contemplation du mystère de Dieu. Le cœur humain de Jésus mort en croix est certainement le cœur humain qui a parfaitement accompli le commandement de l’amour. « Cœur plus humain que fut jamais le cœur d’un enfant de la terre » aimons-nous chanter. Par le don total de lui¬-même, Jésus a aimé Dieu de tout son cœur, de toute son âme, de tout son esprit et de toute sa force, jusqu’à son dernier souffle. Et il a aimé ses bourreaux jusqu’à leur pardonner. S’il y a un cœur humain qui a aimé vraiment, c’est bien le cœur de Jésus. Voilà ce que nos yeux voient.
Mais le regard ne s’arrête pas là. Dans la lumière de la résurrection de Jésus, nos yeux contemplent sous le signe du cœur transpercé, une autre dimension de l’amour offert. Dans la vulnérabilité de son cœur, Jésus, le Fils de Dieu, nous dévoile l’immensité de l’amour de Dieu. Un amour à cœur ouvert. « Cœur plus ouvert qu’un ciel à l’infini, une mer sans rivage »…
Pour exprimer l’amour de Dieu pour son peuple, l’Ecriture utilise des images. Celle du pasteur en est une. Un pasteur qui ne se résout à perdre aucune de ses brebis et qui se met en quête de celle qui est égarée ou malade. Il n’a qu’un désir : conduire ses brebis dans les meilleurs pâturages. Jésus a repris à son compte cette image pour illustrer sa propre mission.
Sur la croix, il nous donne à voir jusqu’où va l’engagement du berger pour son peuple. Là, le berger se fait agneau immolé, brebis d’abattoir. Sur la croix, il prend la dernière place du condamné. « Il est mort pour les coupables que nous étions ». « Preuve irréfutable que Dieu nous aime », ajoute Paul. La blessure du cœur ouvert est la signature définitive du Dieu Amour pour les hommes perdus que nous étions. « Cœur trop aimant qui ne reçus de nous qu’une croix en réponse ».
Mais la manifestation de l’Amour de notre Dieu ne s’arrête pas là. Il est une autre signature de son Amour, c’est « l’amour de Dieu répandu dans nos cœurs, par l’Esprit Saint qui nous a été donné ». L’eau et le sang jailli du cœur ouvert préfiguraient le don de l’Esprit, Amour de Dieu offert en partage à tous les hommes. L’Amour n’a pas de plus grande joie que de susciter l’Amour. Non seulement Dieu sauve les condamnés que nous étions, mais il veut nous rendre capable d’aimer comme Lui, par son Esprit répandu en nos cœurs. L’Esprit en nos cœurs nous entraine à aimer comme Jésus. Il veut faire de nos vies qui aiment des signatures de l’Amour de Dieu offert aux hommes. « Cœur de Jésus qui fis le cœur nouveau de l’Eglise nouvelle ».
Dans cette célébration, venons avec confiance à la source de cet Amour, jailli du Cœur du Christ. Si nous nous sentons faibles, il veut nous fortifier. Si nous sommes si peu capables d’aimer les plus pauvres et les plus petits, il veut nous apprendre à nous donner. Son Amour toujours offert à chaque eucharistie, veut nous renouveler, et nous attirer à son cœur. Là nous puiserons « la joie aux sources vives du salut ». - 28 juin 2019
Année C - DIMANCHE DE LA FETE DU CORPS ET DU SANG DU CHRIST
1ère lecture : Genèse 14,18-20;
2ème lecture : 1 Corinthiens 11,23-26;
Évangile selon saint Luc 9,11b-17
Homélie du F.Matthieu
Fête du Corps et du Sang du Christ : nous pensons aussitôt à l’institution de l’Eucharistie… et pourtant aujourd’hui, l’Eglise nous donne à lire comme évangile un récit de multiplication des pains : un choix qui peut surprendre !
Quel lien y a-t-il entre l’Eucharistie et la multiplication des pains ? Saint Luc a sans doute, lui-même, voulu un rapport car il décrit les gestes de Jésus sur le pain et les poissons avec les termes mêmes d’une liturgie eucharistique … Mais s’il est bien question de pains, il n’est pas question de vin, mais de poissons !
C’est donc nous indiquer que le texte évangélique, en lien avec les deux autres lectures, est là pour nous faire saisir certains éléments clefs de l’Eucharistie que nous avons peut-être un peu laissés dans l’ombre … au détriment du seul rituel centré sur la présence du Corps et du Sang du Christ et de sa réception individuelle.
Suivons le texte évangélique pas à pas.
« Jésus parlait aux foules du Règne de Dieu et guérissait ceux qui en avaient besoin. » Jésus par sa parole rassemble hommes et femmes dans la perspective d’un monde où Dieu règnera pour la paix et le bonheur, ce que la Bible appelle « le droit et la justice » et qui est l’harmonie de la création et de l’histoire. D’entrée nous sommes tendus vers le Royaume, vers l’avenir du salut. Et Paul dans la seconde lecture nous dit aussi que la mémoire de Jésus dans le repas de la Nouvelle Alliance est là pour « proclamer la mort du Seigneur, jusqu’à ce qu’il vienne. »
L’évangile nous dit ensuite que « Jésus guérit ceux qui en avaient besoin. » Déjà il apporte le salut pour que tous puissent accéder à ce Royaume et son signe le plus clair va être enfin la nourriture partagée, que Dieu donne à satiété.
Bien comprendre de quoi il s’agit vraiment, c’est tout le sens du dialogue avec les disciples sur la subsistance de cette foule…
Les disciples apportent des solutions raisonnables ; première solution ; il faut disperser cette foule, renvoyer tout le monde ; chacun pourra trouver le nécessaire dans les environs... Mais Jésus ne retient pas cette solution de dispersion : c’est que le Règne de Dieu qu’il annonce est un mystère de rassemblement ; il ne s’accommode pas du « chacun pour soi ».
Et Jésus donne sa solution : « Donnez-leur vous-mêmes à manger » ; facile à dire, mais comment faire ? « Nous n’avons pas plus de cinq pains et deux poissons » ; pour cinq mille hommes, c’est dérisoire... Mais pourtant, si Jésus dit aux disciples de nourrir eux-mêmes la foule, c’est qu’il va leur en donner les moyens : ils ne sont que les serviteurs, les intendants d’un don qui vient de Dieu.
Alors les disciples proposent d’« aller eux-mêmes acheter de la nourriture pour tout ce monde ». Les disciples sont prêts à jouer les intendants, à se mettre au service de cette foule. Mais Jésus poursuit son propre projet ; il leur dit simplement : « Faites-les asseoir par groupes de cinquante environ ». Jésus a choisi la solution du rassemblement ; mais ce rassemblement n’est pas celui d’une foule indistincte, c’est un rassemblement structuré, celui du Peuple de Dieu au désert sous la conduite de Moïse durant l’Exode (Ex 18, 21.25 ; Nb 31,14 ; Dt 1,15 ; 1 M 3,55). C’est au Peuple de Dieu qu’est fait le don de Dieu.
« Jésus prit les cinq pains et les deux poissons, et, levant les yeux au ciel, il prononça la bénédiction sur eux, les rompit et les donna à ses disciples pour qu’ils les distribuent à la foule. Ils mangèrent et ils furent tous rassasiés. »
Cette bénédiction vient de la nuit des temps, la première lecture nous le rappelait ; elle rapporte tout à Dieu dans la louange et apporte la bénédiction divine aux hommes. « Prononcer la bénédiction », c’est reconnaître la nourriture comme don de Dieu et reconnaître Dieu comme seul auteur de la création et du salut. En disant à ses disciples : « Donnez-leur vous-mêmes à manger », Jésus voulait leur faire découvrir qu’il y a des ressources insoupçonnées... mais à condition d’être ensemble et de reconnaître et d’accueilir le don de Dieu.
Si ce texte nous est proposé à nous, aujourd’hui, c’est que Jésus nous dit à nous aussi : « Donnez-leur vous-mêmes à manger ». Et nous aussi, comme les disciples, avons des ressources que nous ignorons. À condition de nous laisser rassembler comme peuple de Dieu, de reconnaître toute chose comme don de Dieu et de nous considérer, comme de simples intendants du Règne à venir.
Alors le lien entre cette multiplication des pains et l’Eucharistie s’éclaire ; l’évangile de Jean nous donne la clé : les trois évangiles synoptiques rapportent l’institution de l’Eucharistie, Jean, lui, raconte le lavement des pieds. Ce qui nous rappelle qu’il y a deux manières indissociablement liées de célébrer le mémorial de Jésus-Christ : non seulement partager l’Eucharistie mais aussi nous mettre au service des autres (service symbolisé par le lavement des pieds), c’est-à-dire, très concrètement, multiplier les richesses du monde données par Dieu pour les partager à tous les hommes, en quête de la venue du Royaume.
année C - Dimanche de la Trinité -16 Juin 2019
Pr 8.22-31; Rm 5,1-5 ; Jn 16.12-15
Homélie du fr. Antoine
La fête de la Trinité est une très grande fête dont St jean en quatre versets nous
donne une vision de l'essentiel, dans laquelle, la connaissance de l'Esprit de Vérité tient la
première place.
L'Esprit de vérité qui nous conduit à cette Vérité première que ... Dieu est
père .... Dieu est fils, Dieu est Esprit, .. Une vérité qui nous dépasse, car Dieu seul peut parler
de Dieu.
La mission de l'Esprit Saint est de conduire l'homme à la Vérité, l'Evg le précise: Ce
que l'Esprit aura entendu ... Ille lui dira ... Tout ce qui va venir ... l'Esprit le lui fera connaître
car ce que l'Esprit reçoit de Jésus, il le reçoit ... pour qu'il soit connu des disciples, et à
travers eux de la communauté humaine afin que soit imprimer en nous tous le sceau de
l'Amour infini. de Dieu.
Et ce qui est très beau dans cette vision de Jean, c'est que l'Être de Dieu ne peut se
concevoir ... sans sa relation à l'homme ... sans une relation spécifique, celle d'une relation à
l'Esprit de Vérité qui est chargé de nous conduire tous, dans la vérité toute entière dit l'Evangile.
Ainsi, ... à travers l'enseignement que Jésus donne à la Cté de ses disciples symbole de
notre humanité ... la fête de la Ste Trinité se révèle également une célébration de la grandeur de l'homme ! ... Car ... pour Jean, le monde des hommes a un sens ... il a une
finalité ... une finalité qui est en rapport avec la personne même de Dieu ... en rapport avec ce
projet de Dieu ... de nous faire entrer dans la connaissance de ce que l'Esprit doit nous faire
connaître de Jésus.
Et Cette connaissance, pour se développer et s'approfondir, s'adresse à notre Foi,
Foi en l'amour de Die,notre Père, qui a envoyé dans le monde. son Fils ... Parole de
Vérité... et son Esprit...source de sainteté ...
Foi en l'amour du Fils unique de Dieu, don suprême du Père aux hommes afin que cette
communion d'amour qui unit les trois personnes divines se diffuse et se concrétise très
simplement, dans notre manière d'être, dans la qualité de l'accueil que nous manifestons
aux autres, dans cette communion humaine qui réalise comme elle le peut, cette parole
lumineuse de Jésus « Aimez vous les uns les autres comme je vous ai aimé»
Frères et Sœurs ... en célébrant la fête de la sainte trinité .
Bénissons Dieu. pour cet amour dont nous sommes issus .
Bénissons Dieu pour cette plénitude d'amour qui nous attend ...
Bénissons Dieu. au cours de l'eucharistie d'aujourd'hui, pour la Grâce d'avoir été
baptisé au nom du Père, du Fils et du St Esprit et d'être entré ainsi dans la communauté
des disciples de Jésus qui nous appelle sans cesse malgré le poids de nos failles, de nos
faiblesses toujours présentes ... à être Temoins, Prophètes, Serviteurs et à refléter dans notre vie, cette relation exceptionnelle qui unit les trois personnes de la Trinité dont nous
rappelle St Paul dans l'épître aux Romains que leur amour a été répandu .. dans nos coeurs
par l'Esprit Saint qui nous a été donné.