Homélies
Liste des Homélies
St Joseph - Jeudi 19 mars 2020 –
2S 7,4 -16 ; Ps88 ; Rm 4, 13 .. 22 ; Mt 1, 16 .. 24a
Homélie du F.Damase
Il y a des saints dont la vocation admirable est inimitable. D'autres ont tracé un chemin de sainteté accessible à tous. Saint Joseph tient des deux.
Il a veillé sur la vie cachée du Rédempteur. Il a pleinement mérité d'être appelé « père de Jésus » et « époux de Marie ». Il a eu un rôle unique à jouer dans l'accomplissement du mystère de l'Incarnation.
Mais sa vie nous transmet un message de sanctification par les « vertus communes », qui s'adresse à chacun, quel le que soit sa vocation.
A côté du chemin de Marie résumé en une parole, « fiat »,
celui de Joseph tient en deux mots silencieux : « il fit ».
En Joseph, l'Église trouve l'attitude fondamentale que Dieu attend d'elle :
l'écoute continuelle de sa Parole,
et la disponibilité sans partage au service de l'économie du salut.
Contempler Joseph,
c'est emprunter nous aussi son chemin d'homme « devenir un juste » selon le cœur de Dieu.
Année A - 3ème dimanche Carême – 15/03/2020
(Exode 17,3-7 ; Romains 5,1-8 ; Jean 4,1-42)
homélie du F.Guillaume
Frères et sœurs,
Au cours de ces 3 dimanches de Carême qui viennent, nous entendons dans l’Evangile selon St Jean, le récit de 3 rencontres décisives entre Jésus et des hommes et des femmes ordinaires, qui auraient pu être nous. Rencontres merveilleuses et déroutantes tout à la fois. Déroutantes, parce qu’elles font changer de route celle ou celui qui en a été le bénéficiaire, mais déroutante aussi, par le fait que tout ne s’est pas passé comme on aurait pu le prévoir. Je pense ici au titre d’un livre de votre ancien évêque, chers amis de l’hospitalité de Nevers : le Père Francis Deniau : « Jésus, un ami déroutant ».
Les lieux de ces rencontres sont importants. Au bord d’un puits pour la samaritaine, d’une piscine pour l’aveugle-né, ou d’un tombeau pour Lazare et ses sœurs Marthe et Marie. 3 lieux hautement symboliques dans la Bible, car ils sont des symboles de vie, de guérison ou de mort.
Aujourd’hui nous voyons Jésus près du puits de Jacob. Il est fatigué, après une longue marche, accablé par le soleil de midi. Il a soif, un besoin très naturel, très incarné et il en fait part à une femme : « donne moi à boire, toi qui peux me venir en aide avec ta cruche et ton savoir-faire de puiser l’eau. S’en suit alors une longue conversation entre les deux. La femme a une 1ère réaction d’étonnement : « toi, un juif, tu me demandes de l’eau, à moi, une samaritaine ». Elle cherche ensuite à maîtriser l’échange un peu par séduction un peu par provocation : « tu n’as rien pour puiser et le puits est profond. Serais-tu plus grand que notre père Jacob qui nous a donné ce puits et qui en a fait boire l’eau à ses fils et à ses bêtes ? »
Très vite pourtant, nous assistons à un retournement de situation. La soif change de côté. Au cœur de l’échange, la samaritaine va découvrir en elle une soif qu’elle n’avait jamais connue auparavant. Prisonnière de ses besoins tant affectifs et corporels (besoin d’aimer et d’être aimée, en passant d’un homme à un autre par 5 fois, voire 6), que besoins religieux et spirituels d’adorer Dieu, mais sur quelle montagne : celle de Samarie qui est là, ou celle de Judée à Jérusalem ? Jésus va la libérer de ses besoins insatisfaits, en la faisant accéder à un désir plus profond, plus intérieur. Son cœur en effet est en attente et en capacité de recevoir une eau vive dont la source est l’Esprit Saint, Esprit d’amour et de vérité.
Comme nous le chanterons dans la Préface de ce jour : « en demandant à la samaritaine de lui donner à boire, Jésus faisait à cette femme le don de la foi. Il avait un si grand désir d’éveiller la foi dans son cœur qu’il fit naître en elle l’amour même de Dieu ».
Ces mots de la Préface à la prière eucharistique consonnent pleinement avec ceux que Saint Paul adressait aux chrétiens de Rome dans la seconde lecture que nous avons entendue : « l’espérance ne déçoit pas, puisque l’amour de Dieu a été répandu dans nos cœurs par l’Esprit Saint qui nous a été donné ».
Frères et sœurs, cette femme de Samarie est la figure de notre humanité livrée à elle-même, trop souvent victime de son désordre qui la conduit à ces impasses que sont les faillites conjugales et affectives ou à ces errances spirituelles qui sont autant de détresses religieuses. Une humanité en état de soir inextinguible, empêchée d’atteindre la plénitude de l’amour pour laquelle elle a été créée et dont la nostalgie la fait mourir de soif.
C’est là que Jésus nous attend pour confesser notre soif d’amour et de vérité. L’eau vive qu’il promet à la samaritaine et qu’il nous promet à chacune, chacun d’entre nous aujourd’hui, c’est l’Esprit Saint qui s’écoulera de son côté transpercé sur la Croix, quand Il criera une nouvelle fois avant de mourir : « j’ai soif ». Au début et au terme de son évangile, le disciple bien-aimé rappelle cette soif, ce grand désir de Jésus de communiquer son amour divin pour tous les hommes.
Alors, avec nos frères et sœurs en démarche de catéchuménat, lors de ce premier scrutin, faisons-monter vers le Seigneur les paroles du Psalmiste :
« Scrute-moi, mon Dieu, tu sauras ma pensée, éprouve-moi, tu connaitras mon cœur. Conduis-moi sur les chemins d’éternité. Comme un cerf altéré qui cherche l’eau vive, mon âme a soif de Dieu, du Dieu vivant ».
Et j’aimerais aussi pour terminer vous citer quelques vers d’un grand poème composé par une mystique allemande du Moyen Age : Gertrude de Helfta :
« En Toi, Cœur de Jésus, en Toi mon Cœur se réfugie
,
- Notre monde se meurt, notre monde Te perd,
- Notre monde pourtant Te cherche tant il a soif de Toi.
En Toi, Cœur de Jésus, en Toi, j’apaise ma soif,
- Le monde se dessèche car il est sans amour.
- Le monde a soif d’amour, mais il ne le sait pas.
Alors, je viens à Toi, Jésus, dans ton Cœur je me réfugie.
- Ton Cœur si plein d’Amour et de Miséricorde.
Alors, je viens vers Toi, la Source de l’Amour.
- La Source de la paix,
- Et tes fleuves d’eau vive, en apaisant ma soif.
- Me comblent de ta Vie ».
Année A - 2° Deuxième dimanche de Carême, 8 mars 2020
Gen 12 1-4 ; 2 Tim 18-10 ; Mt 17 1-9 ;
Homélie du F.Bernard
Nous débutons chaque année les dimanches de Carême par deux Évangiles certainement pleins de sens, mais aussi bien mystérieux. Nous ne sommes jamais sûrs d’avoir commencé à les comprendre vraiment. D’abord le récit de la tentation du Seigneur dans le désert, le 1er dimanche : il nous a parlé de la profondeur du mal, bien présent en nous et dans le monde. Puis le récit de la transfiguration de Jésus sur la montagne, ce 2ème dimanche : il ravive en nous l’espérance d’avoir part un jour à la gloire de Dieu.
Six jours après, ainsi commence ce récit. Mais ces premiers mots n’ont pas été retenus par la version liturgique que nous venons d’entendre. Six jours après quoi ?... Après ce moment d’exception où Pierre pour la première fois, au nom des Douze, à Césarée a confessé Jésus, Christ, Fils du Dieu vivant. Puis à la suite, comme en réponse, Jésus a annoncé, aussi pour la première fois, qu’il allait monter à Jérusalem, être rejeté par les autorités religieuses de son peuple, souffrir sa Passion et le troisième jour ressusciter. Mais cela, Pierre l’a refusé net : Non, Seigneur, cela ne t’arrivera pas.
Six jours après donc, Jésus monte sur une haute montagne et emmène avec lui trois disciples, trois seulement, Pierre, Jacques et Jean, ceux qu’il a voulu associer plus étroitement à sa destinée d’épreuve et de gloire. Ils seront aussi avec lui lors de sa prière à Gethsémani, juste avant sa Passion.
Sur la montagne, le visage de Jésus resplendit de gloire, et la présence à ses côtés de Moïse et d’Élie manifeste qu’il est bien le Oui des promesses de Dieu, l’accomplissement de la Loi et des prophètes, le Messie qu’attendait Israël.
Ainsi la transfiguration vient-elle confirmer de la part de Dieu la confession de foi que Pierre avait faite à Césarée. Moment de plénitude donc que Pierre bien sûr voudrait faire durer. Il propose de construire trois tentes, une pour chacun des interlocuteurs de la vision, à l’instar de la tente de réunion où au désert Dieu venait rencontrer Moïse.
Mais ce moment de gloire ne peut durer. La nuée, d’ombre et de lumière, qui déjà au désert manifestait la présence de Dieu fait place à la vision. Puis, de la nuée, une voix se fait entendre : Celui-ci est mon Fils bien-aimé, en qui je trouve ma joie : écoutez-le.
Écoutez quoi ? Précisément ce que Pierre trois jours auparavant avait refusé d’entendre, l’annonce de la Passion- Résurrection du Seigneur. Ainsi la transfiguration vient-elle confirmer le passage nécessaire de la croix pour Jésus. Et la croix est le chemin obligé vers la Gloire.
Mais peut-être pouvons-nous continuer à contempler le Seigneur sur la montagne, en faisant appel au quatrième évangile ? Celui-ci repose en particulier, nous le savons, sur le témoignage du disciple que Jésus aimait, sans doute l’un des trois disciples qu’il avait emmenés sur la montagne, l’apôtre Jean. Au pied de la croix, ce disciple a vu jaillir l’eau et le sang du côté transpercé de Jésus. Il s’est alors rappelé la parole du prophète : Ils regarderont celui qu’ils ont transpercé (Za 12, 10), et encore ce que le Seigneur avait dit : élevé de terre, j’attirerai tout à moi (Jn 12,32). Il a compris qu’à Pâques la croix devenait le lieu de la gloire du Seigneur, le lieu où il nous est donné de le voir siégeant à la droite du Père.
Saint Paul ajoutera : contemplant comme en un miroir la gloire du Seigneur, nous sommes transformés en cette même image toujours plus glorieuse (2 Cor 3,18). Ainsi la transfiguration du Seigneur révèle-t-elle notre propre destinée, comme nous le chantions au début de cette eucharistie : Jésus, Splendeur du Père, tu connaîtras la mort pour nous transfigurer.
Mais nous n’avons encore rien dit des deux premières lectures de la liturgie de ce jour. Elles sont pourtant bien importantes, surtout la première, le récit de la vocation d’Abraham (Gn 12, 1-4), qui inaugure en quelque sorte l’histoire sainte, l’histoire des relations du Seigneur avec son peuple, l’aventure de l’Alliance. La vie d’Abraham, c‘est une vie de renoncement, d’épreuve, mais aussi une promesse d ‘avenir inouïe. Dieu lui dit : Tu deviendras une bénédiction. En toi seront bénies toutes les familles de la terre. Et saint Paul d’ajouter : en toi et en ta descendance, c’est-à-dire le Christ (Ga 3,16). Dans la destinée d’épreuves et de bénédictions du patriarche, se dessine déjà la Passion du Seigneur et sa Résurrection en gloire.
Il en va de même pour nous tous de quelque manière. C’est ce que laissait entendre saint Paul à son disciple Timothée : il nous faut prendre part aux souffrance du Christ pour l’annonce de l’Évangile, afin que resplendisse la vie et l’immortalité dan l ’annonce de ce même Évangile ( cf 2 Tm 1, 8b-10). - 8mars 2020
Année A - 1er Dimanche de Carême - 1°mars 2020
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Genèse 2, 7-9 ; 3, 1-7 ; Romains 5, 12-19 ; Matthieu 4, 1-11
Homélie de F.Ghislain
Au début de cette eucharistie, le célébrant qui parlait entre nom à tous, à nous qui sommes ici ce matin, a demandé à Dieu tout puissant, donc capable de répondre à notre requête, de « progresser dans la connaissance de Jésus-Christ ». A la fin de la célébration, il renouvellera notre prière : « apprends-nous à toujours avoir faim du Christ ». Connaître Jésus, avoir faim de lui. Voici ce que l’Eglise nous propose au début de ce Carême.
La première chose à faire, donc, maintenant, c’est de vérifier notre désir. Est-ce que la connaissance de Jésus, la faim de Jésus nous habite ? Sommes-nous comme saint Paul lorsqu’il écrit aux habitants de Philippes : « Il s’agit pour moi de connaître le Christ, d’éprouver la puissance de sa Résurrection et de communier aux souffrances de sa Passion » (3, 10). Peut-être, si nous sommes loyaux avec nous-mêmes, devrons-nous constater la faiblesse de ce désir, le peu d’appétit pour cette faim ? Pourtant nous avons été baptisés, nous avons reçu le Saint-Esprit, c’est-à-dire : nous sommes du Christ, la flamme spirituelle que Dieu a allumée en nous est encore là, vivante. De la sorte, la première chose à faire en ce début de Carême, n’est-ce pas de prendre le temps de rentrer en nous-mêmes, de retrouver au fond de notre cœur ce désir, de ranimer cette flamme qui vacille encore en nous ? Si nous nous donnons un moment de recueillement, nous comprendrons à nouveau ce qui nous anime en profondeur, le Saint-Esprit nous donnera de l’air, notre désir s’enflammera, notre faim grandira. Ne manquons pas cette occasion : elle nous permettra, à la fin du Carême, pendant les Jours Saints, de communier à la Passion et à la Résurrection de Jésus.
Qu’est-ce que nous connaîtrons alors de Jésus ? Le récit de la tentation nous le répète trois fois : son écoute du Père, de la parole de celui-ci, son obéissance. La première lecture nous aide à comprendre : quelle qu’ait été la réalité de ce qu’elle nous raconte sous le mode de l’histoire du Paradis perdu, il reste ceci qui est impressionnant : dès le moment où des hommes se sont rendu compte qu’il y avait un Dieu et que celui-ci leur parlait, ils n’ont pas répondu. Tout était possible à leur humanité naissante, à leur innocence inaugurale, ils se sont détournés. Comment expliquer cela ? Il n’y a pas d’explication ; c’est le mal, et la création tout entière a commencé à se dérégler, à se défaire, d’autant que les hommes, nous compris, ont continué ce chemin négatif.
Jésus à l’inverse, lui aussi innocent à l’origine, entrant dans le monde, déclare à Dieu dans le secret de son cœur : « Me voici, je suis venu pour faire ta volonté » (Heb. 10). Dès le début « sa nourriture est de faire la volonté de Celui qui l’a envoyé et d’accomplir son œuvre » (Jean 4). La Parole de Dieu est la lumière sur sa route, elle le fait vivre. Et saint Paul nous dit, dans la seconde lecture, que cette obéissance restaure et au-delà la malédiction initiale.
C’est cela, frères et sœurs, que nous demandons de comprendre au début de ce Carême : la gratuité insensée du mal, l’insondable générosité du bien en Jésus-Christ. C’est la lumière que nous désirons. Ce carême n’est pas le premier, cette connaissance de Jésus nous a déjà été donnée ; elle s’entretient, nous dit encore la prière initiale de ce dimanche, par une vie fidèle, c’est-à-dire illuminée par la parole de Dieu et la réponse que nous essayons de lui donner jour après jour. C’est la vie du Christ en nous , pénétrée d'un esprit de simplicité et d'enfance spirituelle, ravie par le souvenir de Dieu qui provoque émerveillement, adoration confiance. Au fond, ce n'est pas tellement compliqué, c'est à notre portée. On ne nous demande de grands desseins ni des merveilles qui nous dépassent, mais plutôt l'humble attention à la Parole et à la Vie, là où nous sommes, en communion avec nos frères les hommes, tout et chacun, pris entre le bien et le mal. Leur combat est le nôtre, le nôtre est le leur, et Jésus-Christ triomphe en tous.
2020
Mercrdi des CENDRES - 26.02.2020
Jl 2, 12-18 ; 2 Co 5, 20-6, 2 ; Mt 6,1-6, 16-18
Homélie du P.Luc
Frères et Sœurs,
Dans cette célébration, nous entendons beaucoup d’impératifs : « revenez à moi, déchirez vos cœurs, laissez-vous réconcilier avec Dieu, ne fais pas sonner la trompette quand tu fais l’aumône, ne soyez pas comme ceux qui se donnent en spectacle quand vous priez, ne prenez pas un air abattu quand vous jeûnez »… et dans quelques instants chacun de nous entendra « convertis-toi et croie à l’évangile »… En ce mercredi des cendres, ces impératifs, ces mots d’ordre voudraient nous mettre en marche, chacun et tous ensemble, pour que quelque chose change dans nos vies.
« Convertis-toi et croie à l’évangile », pourrait résumer le mouvement de fond qui nous est demandé. Se convertir, comment entendre ce mot de façon nouvelle alors qu’on l’entend déjà si souvent dans notre vie chrétienne et dans la vie monastique en particulier ? Comment l’entendre ? N’est-ce pas en regardant plus profondément Celui qui nous adresse cet appel ? N’est-ce pas en essayant d’entendre dans la voix qui nous interpelle « le Seigneur notre Dieu, qui est tendre et miséricordieux, lent à la colère et plein d’amour » ? N’est-ce pas en reconnaissant le regard d’espérance que Jésus porte sur nous, Lui qui s’est identifié à l’homme blessé par le péché ? Alors, oui, en nous fondant sur la tendresse de Dieu pour nous et sur sa proximité à nos côtés, nous pouvons entendre comme une invitation heureuse et très bonne, l’appel à nous convertir. Dieu espère pour nous plus que nous n’espérons pour nous-même. Dans son invitation à revenir à lui, à nous laisser réconcilier avec lui et à être juste dans nos relations avec les autres, nous pouvons apercevoir et reconnaitre son projet sur nous. Là où le péché nous tire sur des chemins de fatigue et d’usure, revenir à notre Dieu nous donnera de reprendre le juste chemin. Là où l’oubli de Dieu et des autres nous laisse vide d’amour, nous laisser réconcilier avec notre Père et avec nos frères nous rendra à nous-mêmes et à notre capacité d’aimer. Oui, frères et sœurs, tournons la page de nos vieilles habitudes, tournons le dos à nos idoles qui nous usent et nous abusent, et croyons à l’évangile.
Croire à l’évangile. Cette injonction peut paraitre étrange, car nous pensons évidemment que nous croyons déjà à l’évangile. Au seuil de notre marche vers Pâques, cependant, croire à l’évangile nous replace, non devant une évidence qui serait trop connue, mais devant un mystère encore à découvrir et à accueillir. En effet devant la grandeur de ce que Jésus a accompli pour nous en sa mort et sa résurrection, nous restons des mal-croyants. Nous peinons à laisser cette bonne nouvelle de la mort et de la résurrection illuminer vraiment notre vie. Car laisser cette bonne nouvelle illuminer notre vie, c’est consentir à prendre nous-même le chemin que Jésus à pris. Durant ces 40 jours, nous allons être entrainés à sa suite. Nous allons le laisser apprivoiser nos peurs, nos réticences, guérir nos répugnances. Nous allons lui confier nos impuissances et nos manques de foi. Croire en la Bonne Nouvelle de la mort et de la résurrection de Jésus le Christ, notre Seigneur, c’est laisser peu à peu cette lumière forte traverser jusqu’aux part d’ombre et de souffrance de notre existence, pour peu à peu nous apprendre à les unir à la Passion de Jésus.
Prenons avec confiance et joie le chemin de Pâques, sans crainte de nous laisser surprendre et déplacer, avec le seul désir d’écouter et de nous laisser transformer par les moyens modestes mais profonds qui nous serons suggérés par l’Esprit et par l’Eglise.
Année A -5ème Dimanche Ordinaire - 9 Février 2020
ls 58.7-10. lCo 2. 1-5. Mt S. 13-16
Homélie du F.Antoine
Frères et Sœurs ... qui d'entre nous s'est dit en se levant ce matin« Moi, je suis le sel de la terre et la lumière du monde ! » ... Même après une solide thérapie, arriverait-on à une pareille image de nous-même?... C'est pourtant ce que le Seigneur vient de nous dire...
Il ne nous dit pas« voulez vous êtes le sel de la terre et la lumière du monde... ?
Il nous affirme..Oui..Vous..Vous tous..Vous êtes Le sel de la terre et la lumière du monde !
Ces images fortes...que veulent-elles dire ?
Par exemple celle du Sel ? Son usage est nécessaire ..et en même temps il est toujours mélangé à autre chose et il ne se voit pas! Il n'agit qu'au contact d'une autre réalité.
N'y aurait-il pas là une image du comportement chrétien qui nous est demandé?... une image d'avoir à vivre mélangé à une humanité de plus en plus loin de Dieu...de vivre mon être de baptisé, de croyant... dans cette société qui m'est donnée et qui est la mienne, en étant comme le sel... peu visible- mais actif, discret, à l'écoute des besoins ou des souffrances mises - comme par hasard- sur mon chemin... ?
Vous êtes le sel de la terre ! Quelle attitude pleine d'exigences nous est demandée, quelle foi profonde doit nous animer... pauvres humains que nous sommes guettés par l'affadissement, la lassitude, la lâcheté. En fait, nous essayons de croire en Jésus... mais... en réalité... c'est LUI qui croit en nous ... c'est LUI qui y croit...et totalement!
Mais le Seigneur ne s'arrête pas là, il ajoute « Vous êtes la lumière du Monde ! » Alors là, Le Seigneur va un peu fort! Nous... chacun d'entre nous ici présent, nous serions la lumière du monde?... ça se saurait quand même !... Il ne nous est pas dit d'essayer de l'être.. de faire des efforts. Non, vous les chrétiens, vous êtes la lumière...du monde= Vous l'Êtes, un point c'est tout et que votre lumière brille devant les hommes!..
Alors là, frères et sœurs, il y a de quoi est consterné ! Nous...être une lumière qui brille devant les autres.. !
Heureusement, le Seigneur a dû prévoir l'état d'âme de ses disciples présents et à venir, et on peut se demander si le ton de sa voix ne s'est pas alors -remplie-de-douceur quand il leur dit et.. Nous dit« Voyant ce que vous faites de bien, les hommes rendront
gloire au Père qui est aux cieux. >
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Ce bien n'est pas précisé...à chacun de le trouver... Mais, faire ce bien, ne serait-il pas celui de réaliser le commandement nouveau qui est la clef de tous les évangiles « Et
moi, je vous dit: aimez vous les uns les autres ! »
- Oui, chaque fois que nous faisons quelque chose de bien,
- Chaque fois que nous mettrons en œuvre cet amour des uns pour les autres, alors la beauté lumineuse et radieuse de ce bien-- conduira des hommes non à_nous rendre
g_l9jrn...! mais à être 'avec nous' ceux qui glorifient - à Jamais- notre Père qui est aux cieux
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Présentation du Sgr (02/02/2020)
(Ml 3, 1-4 – Ps 23 – Hb 2, 14-18 – Lc 2, 22–40)
Homélie du F.Jean-Louis
Frères et sœurs,
Il y a donc 40 jours, nous fêtions la Nativité du Seigneur, la Noël, et ce dimanche 2 février, avec la fête de la Présentation du Seigneur au Temple, nous concluons ce cycle inauguré par Noël. Nous ont été présentés plusieurs aspects de la venue du Christ parmi les hommes. Sa manifestation aux bergers, aux Mages païens venus d’Orient (l’Epiphanie), son baptême inaugurant sa vie publique, mais aussi la sainte famille de Jésus, Marie et Joseph, ainsi que la fête de Marie, Mère de Dieu le 1er janvier. La liturgie nous a donc présenté de façon variée cette incarnation du « Verbe de Dieu qui s’est fait chair et a habité parmi nous » comme le proclamait l’évangile de la messe du jour de Noël.
Les premiers dimanches du temps ordinaire étaient eux aussi marqués par cette manifestation de Dieu aux hommes. Sortis du temps de Noël, nous sommes restés néanmoins dans son rayonnement. Ainsi, il y a 15 jours, l’évangile du 2e dimanche ordinaire, faisait dire à Jean le Baptiste : « Moi j’ai vu et je rends témoignage : c’est lui le Fils de Dieu. » L’évangile de dimanche dernier, lui, parlant du choix par Jésus des premiers disciples, rappelait cette belle prophétie d’Isaïe entendue la nuit de Noël : « Le peuple qui marchait dans les ténèbres a vu se lever une grande lumière ».
Christ Fils de Dieu, Christ révélé aux marginaux du peuple d’Israël (les bergers) et même aux païens, Christ, Verbe fait chair, Christ Fils de Marie, Christ, lumière dans les ténèbres. La liturgie n’en finit pas de nous ouvrir au mystère de Jésus. Mystère insondable, il est vrai.
Aujourd’hui, 40 jours après le 25 décembre, l’Eglise célèbre donc la Présentation de Jésus au Temple de Jérusalem. Après 40 jours en effet, la famille juive pieuse présentait son fils premier-né au Temple pour le consacrer au Seigneur et le racheter par un sacrifice offert. Ainsi nous est révélé la condition pleinement humaine de Jésus. Il a vécu ce que vivait tout enfant juif de son temps et de son lieu. Cette consécration de Jésus au Temple est la raison pour laquelle l’Église a choisi ce jour pour en faire la journée de la vie consacrée.
Mais voilà que Siméon et Anne surviennent, le premier, pour révéler aux parents assez stupéfaits, il faut bien le dire, que leur fils est le salut préparé à la face des peuples et la lumière qui se révèle aux nations. Quant à Anne, elle proclame les louanges de Dieu et parle de l’enfant à tous ceux qui attendent la délivrance de Jérusalem, entendez qui attendent le Messie libérateur.
Frères et sœurs, en quelques semaines, la liturgie nous a nourris de manière extraordinaire. Nous avons fêté le Christ lumière alors que nous étions au cœur des nuits les plus longues de l’année, autour de Noël, et nous fêtons encore en ce jour le Christ lumière des nations, Messie libérateur, alors que les journées croissent de plus en plus et que, déjà nous espérons le printemps et le renouveau de la nature.
Et, de fait, l’évangile d’aujourd’hui, nous oriente déjà vers la Passion et donc vers Pâques. Siméon, en annonçant à Marie que son fils serait un signe de contradiction et qu’un glaive traverserait son âme, annonçait déjà le Mystère pascal.
L’enfant de la crèche et le crucifié ne font qu’un, nous le savons, et les lectures de ce jour complètent ce que nous avons déjà entendu depuis Noël et qui peut nourrir notre regard sur le Dieu de Jésus Christ et le Christ lui-même.
La première lecture nous a parlé de la venue du Seigneur dans son Temple. Venue sous un aspect assez fort : feu du fondeur, lessive du blanchisseur qui ne détruisent pas mais purifient pour pouvoir présenter l’offrande en toute justice. Le psaume qui suit, dans la même ligne, marque une réelle solennité de cette venue : « Portes, levez vos frontons, élevez-vous, portes éternelles, qu’il entre le roi de gloire, c’est le Seigneur, le fort, le vaillant, … »
Quant à la seconde lecture, extraite de la lettre aux Hébreux, elle nous oriente franchement vers la Passion et la Pâques en donnant le sens du Mystère pascal. « Parce que le Christ a souffert jusqu’au bout l’épreuve de sa Passion il est capable de porter secours à ceux qui subissent une épreuve. En effet, par sa mort, Jésus a rendu libres ceux qui, par crainte de la mort, passaient toute leur vie dans une situation d’esclaves. »
Déjà, cette seconde lecture nous montre une victoire bien moins triomphale que ce que notre vision spontanée de la toute-puissance de Dieu nous aurait fait espérer. Pas de triomphe claironnant mais un Christ qui va affronter la mort et quelle mort, comme tout autre homme. La victoire du Christ passe d’abord par une défaite apparente. Et ce que nous voyons lors de la Passion, nous le retrouvons en quelque sorte dans la Présentation du Seigneur. Quand on y réfléchit un peu, ce n’est pas rien l’entrée du Fils du Père dans le Temple du Seigneur. Dieu rencontre Dieu. Et pourtant, cela se fait dans une simplicité désarmante. Pas de grande cérémonie mais le rituel habituel pour tout enfant juif premier-né. Purification de Marie selon la Loi mais dont on nous dit encore moins. C’est simplement évoqué. Et que dire de l’offrande (deux tourterelles) qui est l’offrande des pauvres, les riches pouvant offrir un taureau. Nous retournons à la simplicité de la crèche. Les témoins ne semblent être que deux vieillards dont une veuve, femme dont la destinée a été brisée et qui a dû vivre une vie bien pénible, sans la protection d’un mari. Mais elle était toute tournée vers Dieu dans le jeûne et la prière, comme Siméon était à l’écoute de l’Esprit Saint. Pas de grande foule donc, pas de cohortes de prêtres et de lévites, pas de prince pour accueillir le Messie. Mais deux pauvres d’Israël dont l’un a le culot d’annoncer, dans la ligne du prophète Isaïe, que cet enfant est le Salut non seulement pour Israël mais pour toutes les nations.
Frères et sœurs, la célébration d’aujourd’hui est sous le signe de la lumière. Nous l’avons vécu particulièrement lors de l’ouverture de cette célébration. C’est le Christ lumière pour tous les peuples que nous sommes venus rencontrer. C’est aussi un enfant fragile, c’est aussi un enfant qui ne sera reconnu comme le Messie, le Salut du monde que par deux marginaux de la société du temps et non pas par la hiérarchie religieuse ou politique.
Nous sommes ainsi confirmés par les lectures d’aujourd’hui dans cette réalité que Dieu, le Tout-Puissant, le créateur de tout ce qui existe, l’au-delà de tout et de tous, se révèle dans la pauvreté, la simplicité la plus radicales et ce ne sont que ceux qui sont pauvres de cœur (même s’ils sont mages) et ceux qui sont ouverts à l’imprévu de Dieu qui peuvent l’accueillir. Voilà la veille que Dieu nous demande : garder un cœur de pauvre avide d’accueillir la nouveauté incroyable du Dieu qui se fait homme, qui vit une vie d’homme dans toute sa simplicité. Nous rêvons de succès de réussite, d’efficacité, même au niveau spirituel, mais, pour accueillir le Seigneur pour le reconnaître lorsqu’il se présente, ne convient-il pas d’être d’abord des personnes acceptant leur pauvreté tout en se tournant vers le Seigneur qui seul peut nous enrichir ? N’est-ce pas la foi inconditionnelle en ce Dieu déroutant qui est nécessaire ?
Fête de lumière, Chandeleur, que les textes de ce jour et la célébration que nous vivons nous orientent vers l’accueil du Seigneur, le Tout-Puissant qui, pour nous libérer, s’est fait semblable à nous pour souffrir jusqu’au bout sa Passion.
La Naissance du Seigneur nous oriente déjà vers sa Pâque. Orientons nos cœurs à sa suite en suivant son enseignement de dimanche en dimanche.
AMEN
Année A - 2e DIMANCHE DU TO – 12 janvier 2020
Is 49, 3.5-6 – 1 Co 1, 1-3 – Jn 1, 29-34
Homélie du f. Hubert
« Voici l’Agneau de Dieu, qui enlève le péché du monde. »
Parole de Jean-Baptiste, que nous entendons à chaque eucharistie, avant de communier.
Qu’est-ce que cela veut dire ?
Chrétiens massacrés, églises profanées au Burkina Faso ; tueries, décapitations au Nigeria ;
en France : crèches et statues détruites, cimetières juifs profanés,
règne de la force et du mensonge, du refus de l’autre, guerres par morceaux…
Divisions, susceptibilités, rivalités, entre chrétiens, et à l’intérieur même des Eglises…
Abus de pouvoir et de conscience, incestes, perversion… blessures à vie, …
« Voici l’Agneau de Dieu, qui enlève le péché du monde. »
Qu’est-ce que cela veut dire ?
Le sang de l’agneau pascal a protégé les hébreux de la mort, la nuit de la sortie d’Egypte.
L’Agneau de Dieu a versé lui-même son sang pour protéger tous les hommes :
par lui le "salut" de Dieu peut parvenir "jusqu'aux extrémités de la terre"
et au plus profond de nous-mêmes.
Nous avons célébré dimanche dernier le Baptême du Christ :
Jésus a voulu vivre là un geste symbolique manifestant sa solidarité avec les pécheurs
– le contraire du refus de l’autre – ;
et Dieu a « manifesté en lui sa splendeur » : « Celui-ci est mon Fils bien-aimé en qui je trouve ma joie. »
Au terme de sa vie publique, Jésus a vécu, non plus le symbole, mais la réalité :
il a pris la place du péché sur la croix,
pour que le pécheur soit libéré du péché.
Et Dieu a « manifesté en lui sa splendeur » en le ressuscitant des morts.
Dieu ne supporte pas le péché ; Dieu ne supporte pas que l’homme soit détruit par le mal.
Alors, Jésus, le Fils bien-aimé, porte lui-même le péché, il prend sur lui le mal, pour l’enlever.
« Dieu l’a identifié au péché, afin qu’en lui, nous devenions justes de la justice même de Dieu ».
L’Agneau de Dieu rend au pécheur – à l’homme blessé comme à l’homme agresseur – son vrai visage.
Dieu se laisse défigurer pour que l’homme retrouve son humanité.
Le péché, c’est ce qui abîme l’homme, dans sa relation à Dieu, aux autres, à la création, à lui-même.
La grâce, c’est tout ce qui établit l’homme dans la lumière, dans des relations heureuses et fécondes ;
ce qui restaure l’homme quand il est abîmé.
Puisque nous nous abîmons nous-mêmes, puisque nous nous abîmons les uns les autres, Dieu nous restaure.
C’est cela ôter le péché.
Dieu nous promet un ciel nouveau et une terre nouvelle où il n’y aura plus de mal.
La lumière de la Jérusalem céleste c’est précisément l’Agneau, qui ôte le péché en le prenant sur lui.
Innocent, nous l’avons condamné et rejeté ;
pécheurs, accusateurs, il nous a justifiés et unis à lui.
Lumière des nations, Alliance nouvelle,
il s’est laissé anéantir, prendre figure inhumaine et coupable, jusqu’à la mort,
pour que l’humanité soit délivrée de son inhumanité, et revête la splendeur même du Dieu saint.
« Voici l’Agneau de Dieu, qui enlève le péché du monde. »
Laissons-nous saisir par cette parole que nous l’entendons à chaque eucharistie,
avant de communier au mystère de l’amour sauveur :
Quand nous communions au Corps et au Sang du Christ,
nous recevons celui qui enlève notre péché,
celui qui enlève le péché du monde entier,
celui qui nous baptise et baptise le monde entier dans l’Esprit Saint.
« Rendons grâce à Dieu le Père… dit Paul.
Nous arrachant au pouvoir des ténèbres, il nous a placés dans le Royaume de son Fils bien-aimé :
en lui nous avons la rédemption, le pardon des péchés. »
Il nous rend à notre humanité et nous divinise.
Et pas seulement de chacun de nous, individuellement,
ni un peuple choisi – Israël ou l’Eglise – mais le monde entier :
« C’est trop peu que tu sois mon serviteur
pour relever les tribus de Jacob, ramener les rescapés d’Israël :
je fais de toi la lumière des nations,
pour que mon salut parvienne jusqu’aux extrémités de la terre. »
Baptisés dans le baptême du Christ, puissions-nous, avec le psalmiste, répondre :
« Tu as ouvert mes oreilles ; alors, j’ai dit : « Voici, je viens » ».
- 12 janvier 2020
année A - 12 janvier 2020 -- Fête du Baptême du Seigneur
Is 42,1-4.6-7 ; Ac 10,34-38 ; Mt 3,13-17
Homélie du F.Damase
Le prophète Ézéchiel avait annoncé qu’à la fin des temps l’Esprit de Dieu unirait tous les humains dans une communauté stable :
Je répandrai sur vous une eau pure et vous serez purifiés...
Et je vous donnerai un cœur nouveau, je mettrai en vous un esprit nouveau...
Je mettrai mon esprit en vous ...
Vous serez mon peuple et moi je serai votre Dieu. (Ezéchiel 36, 25-28)
À travers les lectures de cette Fête du Baptême du Seigneur, nous entendons la voix de cet Esprit de Dieu, le murmure de ce souffle, la brise légère entendue par Ézéchiel sur le mont Sinaï.
Dans la première lecture, le prophète Isaïe annonce comment cet esprit plein de tendresse reposera d’abord sur le Messie, le Serviteur de Dieu : « J’ai fait reposer sur lui mon esprit...Il ne criera pas, il ne haussera pas le ton... Il n’écrasera pas le roseau froissé, il n’éteindra pas la mèche qui faiblit. »
Ceci se réalise au moment où Jésus descend dans les eaux du Jourdain. Les cieux s’ouvrent, l’Esprit de Dieu descend sur lui sous la forme d’une colombe et la voix du Père se fait entendre : « Celui-ci est mon Fils bien-aimé ; en lui j’ai mis tout mon amour. » On sent qu’on passe alors d’un Testament à l’autre. En effet, toute cette atmosphère d’amour et de tendresse contraste avec le caractère abrupt du style de vie et de la prédication de Jean le Baptiste (Ne disait-il pas aux Pharisiens et aux Sadducéens : « Engeance de vipères, qui vous a suggéré d’échapper à la Colère prochaine ? »).
À partir du moment où Jésus, le Fils de Dieu, est descendu dans l’eau du Jourdain avec tous les pécheurs qui venaient faire pénitence, et qu’il assumait ainsi toute notre condition humaine, les cieux – qui représentent la demeure de Dieu – sont ouverts et resteront ouverts. Désormais une communication ininterrompue entre le ciel et la terre est possible. Une relation d’amour entre le Père et tous ceux qui ont reçu l’Esprit de son Fils bien-aimé peut se réaliser. Non seulement la prière continuelle mais l’union contemplative devient une réelle possibilité, une vocation pour chacun de nous.
Au début de la création (Gen 1,2) le Souffle de Dieu planait sur les eaux et en les agitant en faisait jaillir la vie. C’est le même Souffle de Dieu qui est descendu sur Jésus dans les eaux du Jourdain, tout comme il était descendu sur Marie pour en faire la Mère de Dieu. Ce même Souffle, ce même Esprit est descendu sur chacun de nous le jour de notre baptême. Il nous a alors donné la mission d’apporter la paix, la bonté, la compassion, l’amour dans un monde toujours si rempli de violence et de revanche, d’attaques et de contre-attaques.
Ce qu’Isaïe décrit comme l’attitude du Serviteur devient pour nous une mission ou un mot d’ordre :
Il n’écrasera pas le roseau froissé,
il n’éteindra pas la mèche qui faiblit,
il fera paraître le jugement en toute justice.
Puissions-nous tous être dans notre monde des artisans de paix remplis de compassion et de compréhension, nous qui, dans le Christ, sommes les bien-aimés de Dieu.
527 mots
Année A - EPIPHANIE - 05.01.2020
Is 60, 1-6 ; Ep 3, 2-3a.5-6 ; Mt 2, 1-12
Homélie du Père Abbé Luc
Frères et sœurs,
« Debout, Jérusalem, resplendis ! Elle est venue ta lumière, et la gloire du Seigneur s’est levée sur toi »… c’est avec ces mots qui résonnent depuis des siècles dans les assemblées juives et chrétiennes que le prophète Isaïe nous appelle à nous redresser dans l’espérance et à ouvrir nos yeux ce matin… Ouvrir les yeux de la foi, de la confiance en la promesse divine qui est fidèle. Mystérieuse lumière qui ne fait pas nombre avec les ténèbres, puisque le prophète ajoute aussitôt après : « voici que les ténèbres couvrent la terre, et la nuée obscure couvre les peuples ». Cette lumière-là inséparable de la gloire du Seigneur ne chasse pas les ténèbres, elle les traverse. « La lumière brille dans les ténèbres et les ténèbres ne l’ont pas arrêtées » nous assure St Jean dans le prologue de son évangile. Selon notre manière spontanée de regarder la réalité physique, de façon binaire, nous aimerions que s’il y a lumière, il n’y ait plus ténèbres. La lumière divine qui se lève depuis les temps anciens traverse les ténèbres. Elle nous permet d’habiter avec les ténèbres, non de les faire disparaitre en ce monde
…
A la reconnaissance de cette lumière, tous les peuples sont conviés. Ils accourent vers elle à la manière des mages venus d’Orient, qui suivent leur étoile… Faible lumière de l’astre qui a lui dans leur nuit…à la manière de la vie, cette vie dont Jean nous dit « qu’elle était la lumière des hommes ». Les mages ont fait confiance à la vie et ils sont partis sans bien savoir où ils allaient. Ils se sont laissé guider par la vie, cette belle et fragile lumière pour aller vers la Vraie Lumière, un enfant, le Verbe fait chair. Cet enfant, attendu par le peuple juif pour être son chef, son berger, est reconnu d’abord par les étrangers venus de loin qui ont été à l’écoute de la vie. Le roi Hérode et les scribes avaient les Ecritures, mais les avaient semble-t-il un peu oubliées… Ils ne sont pas prêts à se prosterner devant le Vrai Roi. Hérode veut se renseigner, mais non se mettre vraiment à l’écoute. Il n’attend plus et ne cherche plus la Vraie Lumière, car peut-être n’est-il plus déjà à l’écoute de la Vie.
Les mages reconnaissent le Vrai roi dans cet enfant couché dans une mangeoire entre ses parents, deux pauvres de la lignée de David. Ils offrent l’or, l’encens et la myrrhe parce qu’ils ont reconnu sa gloire, non la gloire humaine qu’il n’a pas du tout, mais la gloire que cet enfant tient de son Père, comme Fils unique, plein de grâce et de vérité, pour reprendre les mots de Jean. L’or confesse sa dignité royale, l’encens atteste son origine divine et la myrrhe annonce sa destinée mortelle. Le Vrai Roi qu’ils adorent ne fait pas nombre avec les autres rois, comme la Vraie Lumière ne fait pas nombre avec la lumière et les ténèbres humaines. Son pouvoir ne s’étend pas sur des territoires, mais sur des cœurs. Il n’appelle pas la soumission servile, mais la révérence aimante. « Clarté d’en haut », il est venu se révéler dans la faible lueur d’un visage d’homme, jusqu’à se laisser obscurcir dans la défiguration de la passion. Il a traversé les ténèbres pour resplendir dans la pleine lumière de la Résurrection.
En cette eucharistie, accueillons de manière plus confiante cette Clarté d’en haut, en nous laissant guider vers elle par la vie. Tournons-nous vers le Christ, le Verbe fait chair, la Vraie lumière « avec un cœur plus aimant », sans crainte devant ce roi qui veut notre liberté. Offrons-lui l’or à travers notre générosité pour tous les êtres qui attendent de nous la reconnaissance de leur dignité royale. Présentons-lui l’encens de notre prière fidèle et persévérante, témoignage pour nous et pour le monde qu’Il est la Vraie Lumière. Apportons-lui la myrrhe, l’attestation de notre foi que sa mort est vraiment passage vers la vie, et que nos ténèbres et nos morts ne peuvent faire obstacle à sa Vie offerte en plénitude. - 5 janvier 2020